Mojácar et son Parador [brochure]

Transcription

Mojácar et son Parador [brochure]
Mojácar: Blanc Village Maure
“...Le soleil du Califat s’est levé en Occident, il doit
briller avec splendeur sur les deux Orients pour chasser
de sa lumière les Lumières infidèles…”.
MOJÁCAR
Et son Parador
Abderraman III
O
n dit qu’il y eut à Mazarron des hommes paléolithiques sur un
emplacement perdu, lointain, très distant des couloirs naturels
de la région. Ces premiers habitants laissèrent là dans la grotte de
l’Algarrobo, une grande quantité d’outils très miniaturisés. L’archéologie
invite à imaginer une société se déplaçant le moins possible, survivant
avec ce qu’elle trouvait à proximité, planifiant ses aventures et
abandonnant le campement seulement lorsque la saison l’obligeait.
Les terres de cette côte du sud-est sont si extrêmes et inhospitalières que
le Néolithique y passe presque sans s’arrêter. L’humanité est déjà capable
d’arroser les céréales lorsque, vers le IIIe millénaire av J.-C., quelques
petites communautés apparaissent à Mojácar. Elles établissent leurs
campements en haut de la Loma de Belmonte, profitant des inondations
du fleuve Antas. La Méditerranée arrivera plus tard, pas comme une voie
de vie, car la pierre leur donnait déjà la hache et la chasse et la terre le
blé, mais comme une Via Apia d’un mélange des cultures ; comme
colonisateur de la civilisation ibérique. Pour l’instant, les plus anciens
habitants d’Almeria emploient les métaux sableux et la pierre pour tuer,
dépecer, gratter et moudre. Les objets en cuivre sont rudimentaires : on
trouve des ciseaux, des haches plates, des poignards et des couteaux. Il n’y
a pas de bagues. Les céramiques sont lisses ; des terrines grossières, des
assiettes en argiles rouge et jaune.
Un millénaire et demi plus tard le chaînon trouvé dans les gisements de El
Argar, imbibé de ce même fleuve Antas, prévient de la naissance d’une
nouvelle civilisation. Il s’agit d’une veine différente suivie par les hommes
du Néolithique dans leur développement, visiblement plus avancé. Leur
société se niche sur les hauteurs de promontoires fortifiés. Dans cette
région la culture argarique remplace alors la culture mégalithique. Un fait
exclusif et très circonscrit au sud-est andalou, qui va du Bronze moyen
jusqu’à un millier d’années av. J.-C. Concrètement, jusqu’à ce que la
nouvelle société ibérique s’éclaire au contact de la Méditerranée. Tout
autour d’Almeria les gisements argariques très explicites abondent. Sous
une tunique violette, l’habitant argarique préfère travailler au champ
plutôt que de s’occuper du bétail. Il habite au sein d’une grande
communauté de plusieurs centaines de personnes, en sécurité derrière des
murailles, protégé par l’œil alerte des vigies en haut des tours. Les
maisons ont deux étages et un toit plat en argile, ce sont de clairs
antécédents de la maison d’Alpujar.
L’habitant d’Argar aux longs cheveux dispose d’une mine d’où il extrait
de l’argent, de l’or et d’autres métaux, du bronze, du cuivre, du fer, avec
quoi il élabore des bracelets et des bagues, ainsi que des hallebardes. La
nécropole se trouve dans la ville même. On y enterre dans des paniers ou
dans de grandes jarres appelées « pithoi » les habitants les plus distingués
socialement. La céramique en terre a raffiné sa cuisson et ses finitions.
Des terrines paraboliques, des verres bas, des verres à pied, des assiettes et
des jarres, tous noirs, doux et d’une couleur si appliquée qu’on dirait du
métal. L’argent est préféré à l’or à la fin du deuxième acte de cette
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occasionné par le dieu chrétien. D’autres explications pointent vers la
recherche, de la part des habitants, d’un emplacement mieux abrité. Ce
qui ne fait aucun doute, c’est que malgré sa situation isolée, déplacée par
rapport à l’axe des événements historiques, Mojácar posséda les citernes les
plus importantes du Royaume de Grenade.
civilisation vers laquelle convergèrent sans doute les habitants de la
Méditerranée orientale pour ses mines et ses forges, dont on a appris
l’existence grâce aux haches planes à lame courbée et aux bracelets des
archers portés par les guerriers de retour outre-mer.
On sait que les peuples du Bronze s’immiscèrent dans les cultures
Helladiques de la civilisation hellénique naissante et souveraine grâce aux
différentes méthodes d’enterrement. Des matières et des métaux de cette
civilisation perméable restent dans les substrats de la civilisation ibérique
naissante. Les vestiges abondants disséminés dans toute l’Andalousie par
les Grecs, les Carthaginois et les Romains sont rares dans cette région
d’Almeria. On a constance de la population romaine à Mojácar grâce à des
ciseaux et à une ou deux villas agricoles.
Les conditions de cette terre extrême, riche en sous-sol, séchée par un
soleil hostile (lézard, figuier de Barbarie, homme abrité dans sa grotte) à la
surface, perdurent inamovibles tout au long de l’histoire. Il faudra que
passent quelques siècles, dix-neuf exactement, pour que la mine qui avait
attiré les Grecs et les Phéniciens et qui avait fait prospérer Algars et Ibères,
récupère son empire perdu. La troisième mine de fer plus florissante de la
province se trouve dans le village voisin à Mojácar de Bendar.
A ras du sol, l’aridité super saharienne de la province d’Almeria,
transformée en plateau de cinéma au XXe siècle et en musée au XXIe
siècle, concentre ses caractéristiques les plus remarquables dans le désert
de Taberna : hostilité physique, absence quasi totale de vie, désolation
blanche et grise acculée dans les allées telluriques. Voilà l’horizon
esthétique où l’âme d’Almeria assume sa beauté.
Il n’est pas étrange que ce soit les Arabes qui aient le mieux tiré profit de
ce territoire voisin en le dotant de la science et de la poésie. A l’extrême
occidental du monde islamique, Mojácar l’inexpugnable, à l’aube du VIIIe
siècle, appartenait à la cour de Tudmir. Elle fut loyale au Calife de Damas
et plus tard, à partir de 917, fidèle au Califat de Cordoue. La primitive, la
vieille cité est alors un emplacement frontalier se défendant avec des
forteresses, des tours et des châteaux, se penchant et ne perdant pas la mer
de vue. Le déplacement de la ville vers l’intérieur, entamé au XIIIe siècle,
est l’objet des spéculations les plus diverses. Certains historiens voient
tomber les pierres de taille du fort, s’effondrer les cachettes infidèles, fuir
hommes et femmes de la foi mauvaise vers l’intérieur, agités par la terre
qu’on leur enlève et qui se fendille grâce à un tremblement de terre
La beauté, l’harmonie et la civilisation sont toutes des résonances, des
répétitions, des effluves sonores, des faisceaux lumineux ondulant dans
l’eau. L’eau qui depuis toujours fut la vie et l’abreuvoir des peuples,
acquiert dans la conscience arabe un caractère fondamental. Sa bonne
administration est une garantie de santé. Si les Arabes s’établissent à
Mojácar c’est parce qu’il y a un moyen sûr d’obtenir de l’eau. La source
aux 12 tuyaux et la figure, si encensée par les Romantiques, de la
Mojaquera, la cruche sur la tête, sont les restes de cet amour invétéré pour
l’eau et sa dot de fleurs. La marguerite, la myrte et la camomille sont
quelques unes des fleurs de prédilection. « De tous les sujets poétiques, la
description des jardins est peut-être la plus familière aux écrivains
musulmans d’Espagne » ("De todos los temas poéticos, la descripción de
los jardines es tal vez la mas familiar a los escritores musulmanes de
España"), dit Henri Pérès dans son livre Splendeur d’Al-Andalus
(Esplendor de Al-andalus). L’une des plus belles descriptions est celle qui
décrit la violette comme « des ailes de papillon teintées de mûres du jardin
» ("alas de mariposa teñidas con moras del jardín").
Des Philosophes Esoteriques
l y eut aussi à Almeria une école philosophique menée par Ibn
Mararra qui, en partant des doctrines d’Empédocle, construisit
son propre credo d’ésotérisme islamique, selon lequel l’âme prend
un corps comme moyen de purifier une faute et, une fois la rédemption
obtenue, se réunir avec la matière divine. Accusé d’athéisme et entouré de
disciples dès son plus jeune âge, Ibn en vint à fuir et à prêcher dans les
montagnes d’Almeria jusqu’à sa mort.
I
L’Islam est parent de la philosophie, de l’architecture, de la science, du
folklore, même de la terre inculte (par un toponyme ou un figuier de
Barbarie). Son legs déborde tout inventaire pressé. Les pierres des citernes
et des casbahs restent rigides lorsqu’on les signale comme les restes de
l’époque précédent la Reconquête. Parce qu’ici, au sud, les pôles de la
boussole semblent changer et s’inverser, ou au moins les sens de l’histoire
semblent-ils se multiplier en une polysémique filigrane. Ceci, que les
Chrétiens orthodoxes et les historiens antiques appelèrent croisade et les
Musulmans d’aujourd’hui révolution, fut considéré en cette latitude
andalouse comme une simple rivalité pour le marché méditerranéen.
Depuis le haut de la tour défensive de Turre il faut voir la campagne de
Mojácar, pleine de cultures (blé, luzerne, oliviers, vignes). Les paysans de
l’étape nazaréenne arrangent les sillons et creusent des lits à l’eau pour que
le grain ne manque de rien. Les moissons et les récoltes se passent
tranquillement grâce à la tour anti-Chrétiens que les habitants de Mojácar
imposèrent ici, au milieu des champs semés, pour arrêter les habitants de
Lorca. A cette époque, les Mozarabes expulsés de Cordoue et Grenade
viennent ici former leurs fermes. Il s’établissent dans l’ibéro-romaine
Cadima puis ils construisent Santa Teresa et Cabrera. Certaines maisons de
l’époque ont survécu dans l’Alpujarra.
En 1488, les Rois Catholiques invitent les Maures à rentrer en Afrique, ou
au moins à s’éloigner de la côte de Mojácar pour réintégrer les campagnes
de l’intérieur. (C’est ainsi que se forme le quartier mudéjar de Turre). A
Vera un alcade défie les Rois Catholiques et ne se rend pas. Il s’agit de
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caroubiers, les ermites et les églises prospèrent. Puis viennent les années
noires postérieures à l’invasion napoléonienne et leur sillage de famine et de
fièvre jaune.
Mojácar atteint son maximum démographique de 6382 habitants en 1887,
grâce au filon d’argent de la Sierra Almagrera et à l’installation d’un haut
four de fonte de plomb qui deviendra le deuxième plus productif d’Espagne.
Le reste appartient à l’histoire contemporaine, le voyageur pourra le
corroborer épisodiquement dans les rues, les plages, l’architecture et les
biographies des habitants.
Modernite Et Traitrise
l’alcade de Mojácar. Dans une prudence politique digne d’éloges, les Rois
optent pour le dialogue et choisissent parmi leurs fidèles le plus honnête,
Garcilaso de la Vega, capitaine et poète, qui se rend là-bas en tête d’une
ambassade (d’autres sources nient que le poète fût né à cet époque).
Midi fait fondre les hommes par la barbe. La chevauchée maltraite le
cortège. C’est le mois de juin, les températures sont extrêmes. La chaleur est
sèche. L’air ne tremble pas. Garcilaso se réconforte sous les bambous de la
source d’Alabez, célèbre jusqu’à Grenade.
- Vous devez vous rendre.
- Pourquoi ? « Je n’ai jamais pris les armes contre les Chrétiens » - Les Rois
l’ordonnent. Ne m’obligez pas à vous soumettre – les presse le poète – J’ai
trop de force et l’appui du pouvoir.
- « Avant de me rendre comme un lâche je saurai mourir comme un
Espagnol »
Emu par les explications de l’Islamite, l’homme de la Renaissance l’accepte
comme un frère et l’autorise à poursuivre ses cultures (comme il le faisait
depuis sept siècles), sur leur patrie à tous les deux.
D’après les chroniqueurs de Mojácar, la cohabitation des Maures et des
Chrétiens surmonte même, en 1568, les révoltes des Maures qui refusent
d’être expulsés à nouveau, cette fois par le Marquis de Torralba.
La ville devient « la très noble et très loyale ville de Mojácar. Clé et
protection du Royaume de Grenade » (« muy noble y muy leal ciudad de
Mojácar. Llave y amparo del Reino de Granada »), comme il est écrit sur son
écusson après la guerre des Alpujarras.
A partir de ce moment et jusqu’au XVIIIe siècle où la piraterie cesse de
fustiger les côtes, Mojácar vit de la défense du littoral et des cultures qui,
suivant les enseignements arabes, ont gagné les montagnes de Cabrera où
des terrasses furent construites. Les figuiers, les vignes, les oliviers et les
L
a ville que nous connaissons aujourd’hui, riche et pittoresque,
est très demandée par les voyageurs grâce à deux aspects
romantiques : la Mojaquera et l’Indalo totémique. Ces bourgeois reniés,
premiers voyageurs de l’émotion, descendirent et redécouvrirent l’Espagne
pendant la première moitié du XIXe siècle. Les lavandières de Mojácar
stupéfièrent les Romantiques, pas parce qu’ils voyaient en elles
l’iconographie andalouse de l’éternel culte à la fertilité, mais à cause de
leurs vêtements qui retinrent leur attention romantique, subjuguant toutes
leurs expectatives exotiques. Ces femmes se rendaient à la source, avec
leur cruche, couvertes de voiles de la tête aux pieds, coutume qui se
prolongea jusqu’à il y a une vingtaine d’années seulement. Dans
l’imaginaire romantique, l’image débordant de guitares, de bandits, d’arcs
lobulés et de jalousies confirmait la candeur du pays, et en opposition à
l’uniformité des modes bourgeoises, s’érigeait en une expression vive de
liberté et de différence.
Ces voyageurs penchés sur l’exagération sentimentale remarquèrent aussi
l’Indalo que les habitants peignaient en ocre sur les façades blanches des
maisons. L’étrange figure était connue par les voisins comme « l’homme à
l’arc », et trouve son origine dans la grotte des Letreros (cueva de los
Letreros). L’archéologie distingue en lui la figure d’un dieu tenant l’arcen-ciel dans ses bras ouverts, protégeant les hommes du déluge. La portée
universelle du Prométhée préhistorique est due à un groupe de peintres
d’Almeria, qui plus tard utilisèrent le symbole comme un boutoir
intellectuel. Jésus de Perceval en fut le Messie indiscuté ; il réussit à ce
que l’idéologie esthétique, ses propres toiles et celles de son cénacle, soient
reconnues dans le Madrid de la fin des années 40.
Ce fut possible grâce à l’adhésion idéologique d’Eugeni d’Ors qui, bien
qu’absent des infâmes sessions d’encens d’Arabie et de vins de la souche
ancienne des « alpujarras » célébrées dans les nuits de Mojácar, soutint le
mouvement régional depuis son « Academia Breve de Arte ». On lui doit
MOJÁCAR ET SON PARADOR
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la définition de l’Indalo comme « une survivance substantive d’une soushistoire translucide à travers les voilages de l’Histoire et les tons brillants
de la culture » ( "supervivencia substantiva de una sub-historia traslúcida
a través de las veladuras de la Historia y los tonos brillantes de la
cultura").
Mojácar, cependant, est encore déserte. Les mines ont fermé. La
population compte à peine trois-cents âmes. C’est alors que surgit la figure
proverbiale de Don Jacinto, pionnier du boom touristique qui depuis la
mairie entame une repopulation en offrant des terrains à tous ceux qui
voudront restaurer des maisons et qui atteignent leur objectif en s’y
établissant et en y demeurant. Des artistes, des journalistes, des toreros et
des bohèmes arrivent en pèlerinage jusqu’ici, bientôt suivis de
constructeurs et d’hôteliers.
Le Parador Mojácar
Ville Du Soleil
L
’hôte du parador remarque immédiatement la modernité du
bâtiment qui l’héberge. Il fut construit en pleine effervescence
touristique lorsque le village attira à lui les dissolus, les libre-penseurs, les
audacieux chercheurs d’un paradis terrestre de liberté.
Les grandes fenêtres de ses porches et de ses salons regardent la
Méditerranée. La plage, malgré l’affluence massive en été, jouit d’un
anonymat accueillant. Le jardin, récemment rénové et replanté, apporte
de l’air frais le matin et l’après-midi et des ombres corpulentes lors des
durs midis. En face se trouve l’île et la mer d’Alboran. Nous en saurons
plus sur elle un peu plus tard, pour l’instant intéressons-nous à Mojácar.
Pour visiter Mojácar il faut commencer par le mirador de la Plaza Nueva.
La vue sur la vallée donne une perspective historique de l’emplacement
primitif de Mojácar la Vieja. La côte du Mirador del Castillo (Mirador du
château) s’en va vers le haut ; il y eut en effet un château très fort et des
murailles. Mais c’est vers le bas que la ville s’étend en un blanc
labyrinthe.
La rue porte le nom du créateur de la métropole moderne, le maire
Jacinto, et s’arrête à l’église de Santa Maria, ancienne forteresse. Face à
elle, le voyageur la connaît déjà (il n’en reste qu’une et elle est en pierre)
se trouve la Mojaquera, l’idole romantique. La célèbre muraille ou ce qu’il
en reste, ainsi que le cimetière arabe, se trouvent en descendant l’escalier
en pierre surgi de l’église…
La place de la mairie (plaza del ayuntamiento) fulgure le souvenir «
indiano » des branches de son arbre centenaire. Tout près la ville avait
une de ses entrées. Cet arc plein cintre est orné de l’écu de Mojácar. La
Plaza Flores, ensuite, est un de ces coins particulièrement typiques. Le
quartier juif est une alternative au labyrinthe qui se présente ici au
voyageur. On peut aussi se perdre en descendant vers la mer que l’on
aperçoit. Cependant, la visite de la source par la côte portant son nom est
obligée. La source en question fut remodelée au XXe siècle, mais son eau
est identique, pure, divine. Le voyageur aura peut-être la chance de voir
une femme se pencher ici pour continuer la tradition de la lessive. Sinon
le voyageur pourra se consoler en écoutant le chœur de ses bambous
chanter à douze voix.
La Mer Des Mers
E
nchâssée sur les collines Mojácar a multiplié sa population, ses
services et l’affluence touristique sans abîmer ses alentours. Le
littoral est vierge de toute construction sur 12 kilomètres. Jusqu’au Cabo
de Gata le voyageur rêvant d’un bain a le choix. Il y a des plages animées
comme celle de El Cantal ou celle de La Rumania au sable fin résultant de
l’embouchure du fleuve Aguas, et d’autres plus intimes comme celle de Las
Grantillas, tranquille dans le charme sauvage de son sable rouge, ou le
vaste et rocheux banc de sable de la plage de Castillo de Macenas, à peine
connue.
Au large, à quarante milles nautiques, se trouve l’île volcanique d’Alboran.
Ce n’est pas grand chose, elle mesure à peine 300 mètres à sa base et 600
de côté, et sa hauteur est de 19 mètres dans ses endroits les plus élevés,
mais elle a été l’objet d’innombrables incursions. Le pirate tunisien AlBorany prit son nom lorsqu’il vint y mouiller son navire pour se faciliter
l’assaut de la côte. Toute une flotte, celle des alliés de Barberousse
commandée par Ali Hamet, composée par pas moins de 16 navires, eut
recours à l’île comme un emplacement stratégique dans la bataille contre
l’escadre de galères espagnoles commandée par Bernardino de Mendoza.
Même au XXe siècle, au milieu des années 60, des pêcheurs russes
prétendirent s’approprier l’île. C’est la raison pour laquelle, régulièrement,
un détachement d’infanterie de marine vient surveiller l’endroit.
Sur la promenade maritime ou dans les commerces des rues de Mojácar, le
voyageur aura sans doute remarqué les colliers et les boucles d’oreille en
corail, l’artisanat typique de la ville. Ce corail vient des fonds abruptes de
la mer d’Alboran. Depuis plus d’une décennie c’est une Réserve Marine. Si
le voyageur le souhaite, il peut y faire de la plongée et y pratiquer certaines
pêches. L’étranger peut être sûr que ces coraux rouges auront été recueillis
légalement. La fascination sanguine de leur brillant est presque aussi
ancienne que l’homme ; des ornements en corail ont été retrouvés dans des
tombes de plus de 25000 ans d’âge. Les Turcs, les Grecs, les Romains et
les Mandarins ont distingué avec du corail rouge leur importance et leur
rang.
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Jusque La Ou Indalo
Porte L’arc-en-ciel
L
e soleil sort prendre son bain par l’est. On l’appelle la côte
chaude (costa cálida). Les autres points cardinaux offrent au
touriste, depuis Mojácar, de belles excursions. Les plus connues sont à
l’ouest : l’ouest spaghetti du désert de Tabernas (par la A7 E15 vers Nijar)
et au sud : le Cabo de Gata.
L’aventurier défiant la chaleur est récompensé par le seul désert d’Europe
(48° de moyenne en été, un Mini Hollywood et un récent musée du désert)
qui vient à lui dans une beauté de paysage insoupçonnée, étrange et
surprenante. Contrairement à ce que pourrait penser le voyageur, il est
riche en vertébrés, en oiseaux et en reptiles, et il est propriétaire d’espèces
endémiques insolites à la floraison voluptueuse au milieu de la sévérité des
avenues grises ou d’une flore aquatique dans les rares nappes d’eau salée.
Le Cabo de Gata, renommé et encensé par tous ses visiteurs, est
complètement différent : c’est une grande lagune abreuvant la province et
probablement la zone humide la plus rageusement prodige d’Andalousie.
Sept sorties de l’autoroute de la Méditerranée donnent accès au Parc qui
communique à l’intérieur avec toutes les localités limitrophes par un réseau
de routes. En plus de ses eaux, de sa faune et de sa flore, il possède une
frange côtière combinant falaises, criques, bancs de sables et récifs pour le
plus grand plaisir des touristes.
L’excursion que nous proposons passe par des grottes, elle ne renonce pas à
des paysages d’air frais et mouille dans les endroits vénérés où l’homme à
l’arc-en-ciel protégea notre race des caractériels assauts célestes. Le nord
possède des atouts très puissants. La province de Murcie est tout proche.
Les Cuevas de Almanzora sont le village le plus ensoleillé de toute
l’Espagne. La sécheresse est un fait troublant. Son barrage, qui avec celui
de Beninar contient toute l’eau de la province, n’a pas de vanne en haut
car son niveau d’eau n’a jamais dépassé 5% de sa capacité. Le fleuve
donne son nom au village et aux grottes du même nom. On dit qu’au début
du XXe siècle 865 personnes habitaient encore les grottes et que les
cavernes voisines de Calguerin étaient peuplées par 260 autres âmes. Il est
indispensable de s’approcher pour les voir. Il faut aller vers Vera par le
Alp118 puis suivre de là la A352. Une fois dans le village n’importe quel
habitant vous indiquera le meilleur moyen d’aller jusqu’aux grottes. L’une
d’elles se visite et sert parfois de logement rural grâce à l’initiative
passionnée de son propriétaire. Il explique ses origines et son histoire in
situ comme le ferait un savant spéléologue, avec connaissance et passion.
Ses premiers habitants laissèrent une trace il y a 3000 ans. Hier
quasiment, si on compare avec les cavernicoles de la Zajara, située sur la
route de Las Cuevas de Herrerias (près du carrefour de Las Aguilas), qui
servirent d’abri il y a soixante-dix mille années. Celles-ci, que le voyageur
explore à Almanzora, furent certainement utilisées comme habitation par
les Arabes, qui formèrent des groupes d’une taille considérable. Ils furent
suivis de Chrétiens sans toit, de pauvres gadjo et de gitans.
Solana, Picasso, Benjamin Palencia,
Clavé, Miro. Et un important
dossier d’eaux fortes et de gravures
de Goya et d’autres auteurs.
En allant vers le nord, le voyageur
peut passer la journée dans le Parc
Naturel de Sierra de Maria de Los
Vélez, éden de plus de 22000
hectares, d’où est originaire
l’Indalo. Depuis Vélez Rubio, nous
y accédons par la N342. Une
géographie nouvelle, verte, secoue
immédiatement l’étranger. Au vent
d’Almeria s’unissent des vents de
Murcie et de la Manche. C’est la
latitude complexe de cette
montagne. Il existe des formes antagoniques de l’aborder, certaines plus
attractives que d’autres, par les sentiers ou par les ravins. Les subtilités de
son écosystème se contemplent uniquement si on leur jette un regard sans
hâte.
Le voyageur aspire un air de pins et de romarins. La lavande parfume le
seuil du jour et la marjolaine la tombée de la nuit. Les espèces de sa faune
se comptent par milliers. Le relief change les tons, aiguise l’instinct à la
nuit tombée. Le bois de sabines est très difficile. Il se forme de troncs
tournés sur eux-mêmes en une contorsion grégaire, comme s’ils
s’assuraient mutuellement qu’aucun d’entre eux ne quitte le troupeau. Le
poète d’Almeria Julio Alfredo Egea situe ici la légende de tradition bergère
qui a pour protagoniste le fils d’un chevalier de la cour du marquis et une
Morisque qui vivait près du château. « Une nuit de lune claire, une fois
levé le pont-levis du château et le peuple endormi, les amants fuirent vers
les montagnes sur le meilleur cheval du père du jeune-homme. Ils se
frayèrent un chemin dans le labyrinthe du bois jusqu’au haut bois de
sabines et sous un arbre…entre plaisirs et larmes ils célébrèrent des
liturgies d’amour… Un lit touffu odorant dégageant des effluves d’arôme
à grande distance les attira. Ils ne trouvèrent que cet autel d’amour sous
l’arbre et le foulard en tulle de la Morisque enroulé aux branches… Ils ne
purent rattraper le cheval qui traversait la Sierra dans un galop fou en
hennissant tristement… Et les amoureux ? » (“Una noche de luna clara,
una vez alzado el puente levadizo del castillo y dormido el pueblo,
huyeron sierra arriba los amantes, en el mejor caballo del padre del
doncel. Triscaron por laberinto de bosque hasta el alto sabinar y bajo un
gran árbol…entre gozos y lágrimas celebraron liturgias del amor… Un
lecho de matas olorosas, del que se desprendían oleadas de aroma a gran
distancia, los atrajo. Sólo encontraron aquel altar de amor bajo el árbol y
el pañuelo de tul de la morisca enredado en sus ramas…No pudieron dar
alcance al caballo que, en loco galope, cruzaba la Sierra lanzando
relinchos lastimeros..¿Y los enamorados?... ) – se demande l’écrivain, qui
répond, nostalgique : « La légende tronquée n’a pas une fin certaine » («
No tiene final cierto la leyenda truncada”).
Pour rentrer au parador l’itinéraire le plus sûr est : Vélez Rubio, Puerto
Lumbreras, Huércal Overa par la A7/E15, jusqu’aux Gallardos et de là
par la E150 jusqu’à Mojácar.
On voit le village immédiatement. Le voyageur connaît le chemin. Son
bâtiment consistorial néoclassique vaut le coup d’œil, tout comme la visite
complète du château, dont la construction fut ordonnée par le premier
Marquis des Vélez, Don Pedro Fajardo, qui profita de l’ouvrage arabe
antérieur. Son état de conservation ne pourrait pas être meilleur. Il abrite
la bibliothèque, le musée archéologique et un inattendu musée d’art
contemporain, de l’essayiste et critique d’art Antonio Manuel Campoy. La
collection, étonnante, compte plus de quatre-cent peinture de Tapies,
MOJÁCAR ET SON PARADOR
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Cuisine Au Cumin
a cuisine d’Almeria est une cuisine méditerranéenne qui utilise
la mer, la terre aride et le potager. Dans ses plats comme dans
ses origines le souffle arabe hausse des arômes épicés, intenses et
doux et le ton oriental de sa culture. L’isolement territorial de la province
a son reflet aussi dans les plats où, en ce qui concerne la cuisine
traditionnelle, interviennent rarement des produits d’autres endroits.
L
Le « pimentón » est très célèbre dans tout le pays ; en réalité, comme
doit le savoir le voyageur, c’est un plat de pommes de terre au piment et à
la tomate (qui prend son goût caractéristique dans le cumin) ; les «
gachas » et les « migas » sont aussi très connues. En général les soupes
plaisent beaucoup, ainsi que les « pucheros », les salades et les paellas,
très différentes des paellas valenciennes.
Ici à Mojácar on déguste du poisson frais, des fruits de mer et des fèves.
Les rougets à l’ail blanc sont un aliment supérieur. Les poissons panés
sont arrosés d’un bouillon aux amandes et ornés d’un œuf râpé. On trouve
des gambas, des crevettes, des clovisses… ici les calamars font fureur, tout
comme les chinchards à la « moruna » qui captivent parfois l’invité avec
des arômes de cumin et une pincée de curcuma. Le poulpe, la lotte et le
maquereau abondent sur cette côte et sont la base de recettes délicieuses.
On ne peut abandonner le rapport gastronomique d’Almeria sans
mentionner, comme « tapa » reine, les « michirones », qui transforme une
assiette de charcuterie (saucisse, jambon et chorizo) en un pot-au-feu de
fèves à l’oignon.
LA RECETTE SECRETE
ENSALADA BONITA
La « melva » est un thon rayé couleur d’acier vivant dans l’Atlantique.
Certaines femmes du littoral de Mojácar préparent une salade qui soulage
la fin des longues journées estivales, lorsque la fatigue fait qu’on n’a envie
que de plats froids. En voici les ingrédients : 300 gr de « melva » à l’huile
d’olive, cinq tomates dures et rouges, autant de piments « morrones », la
même quantité de tomates pour salades, deux gousses d’ail pilées et deux
petits oignons.
Le charme de cette salade consiste à faire sauter l’ail un peu avant de
l’ajouter aux tomates et aux piments bien lavés et épluchés. On la présente
telle quelle, l’oignon coupé en fine julienne et la « melva » par-dessus. On
peut la décorer avec des olives ou des câpres.
La fuite de tout artifice est la norme commune à la plupart des
spécialités du lieu. Prenons pour exemples la soupe de poisson, les «
pelotas » ou l’ail « colorao ». Le visiteur doit absolument goûter la crème
de Mojácar (crema mojaquera), les « gurullos », plus petits que les
croquettes, les « tarbinas », une variété de « gachas » parfois épaissies au
lait et vivifiées avec des grains de « matalauga » et que l’on sert souvent
accompagnées de croûtons.
Si on veut du vin d’Almeria il faut goûter celui de Laujar de Andarax,
un rosé fort, et pour les moins amateurs, le léger « ezurraquei », élaboré
avec le raisin blanc d’Alpujar.
En dessert nous recommandons le pain de figue (pan de higos), les «
soplillos », le flan aux châtaignes (flan de castañas) et la tourte aux rillons
(torta de chicharrones). La glace aux figues de Barbarie (helado de higos
chumbos) et la salade de fruits sont sans rival.
Parador de Mojácar
Playa de Mojácar. 04638 Mojácar (Almería)
Tel.: 950 47 82 50 - Fax: 950 47 81 83
e-mail: [email protected]
Centrale de Reservations
Requena, 3. 28013 Madrid (España)
Tel.: 902 54 79 79 - Fax: 902 52 54 32
www.parador.es / e-mail: [email protected]
Textos: Juan G. D’Atri y Miguel García Sánchez Dibujos: Fernando Aznar
MOJÁCAR ET SON PARADOR
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