NEA Say ...68 - EU

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NEA Say ...68
Le fait de rapporter de ragots sur la vie conjugale d'une personnalité
publique ne relève pas de la liberté d'expression.
 Der Standard (journal autrichien) a été débouté par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) . Il avait
été  condamné pour un article  sur l'ancien chancelier autrichien, Thomas Klestil. Des personnalités
publiques doivent être protégées contre la propagation de rumeurs concernant les aspects intimes de leur vie privée.
La Cour conclut, par cinq voix contre deux, à la non-violation de l'article 10 (liberté d'expression) de la Convention
européenne des droits de l'homme en ce qui concerne la publication d'un article qui avait fait état de rumeurs sur le
mariage du président autrichien de l'époque. (L'arrêt n'existe qu'en anglais.) 1.  Principaux faits La
requérante, société à responsabilité limitée ayant son siège à Vienne, est propriétaire du quotidien Der Standard.
En mai 2004, ce journal publia un article intitulé « Potins mondains ». Cet article faisait état de rumeurs circulant
dans « le gratin de la société viennoise » selon lesquelles Mme Klestil-Löffler, l'épouse du président autrichien de
l'époque, avait l'intention de divorcer et avait des liaisons avec deux hommes, dont Herbert Scheibner, chef du
groupe parlementaire FPÖ. Le couple présidentiel poursuivit alors Der Standard en justice en vertu des articles 6 et
7 de la loi sur les médias. Le tribunal pénal régional de Vienne leur donna gain de cause par un jugement du 15
juin 2004 et condamna la société requérante à verser 5 000 euros (EUR) de dommages-intérêts à M. Klestil et 7
000 EUR à Mme Klestil-Löffler, ainsi qu'à publier le jugement. Le tribunal régional estima que Der Standard avait
fait état d'un domaine strictement personnel de la vie du couple en alléguant que Mme Klestil-Löffler était
doublement adultère et que M. Klestil était un mari trompé ce qui avait très probablement nui à leur image auprès
du public. Der Standard avait avancé comme moyen de défense que l'article se contentait de rapporter une rumeur
; le tribunal régional considéra que la seule diffusion d'une rumeur pouvait porter atteinte à l'article 7 de la loi sur
les médias si elle donnait l'impression que les bruits en question avaient quelque fondement. S'appuyant encore
sur la loi sur les médias, les tribunaux autrichiens refusèrent de considérer des preuves pour vérifier si les rumeurs
en question circulaient déjà à ce moment là ; ils écartèrent l'argument de la société requérante selon lequel l'article
avait trait à la vie publique. En particulier, ils firent une distinction entre les problèmes conjugaux prétendument
rencontrés par une personnalité publique et son état de santé, susceptible d'avoir une incidence sur l'exercice de
ses fonctions. La société requérante interjeta appel ; elle alléguait en particulier que le couple présidentiel avait,
comme aucun auparavant, tenu le public informé de sa vie privée dont elle avait fait une « stratégie marketing ».
Elle soutenait aussi que l'article cherchait à se moquer des ragots de la société bourgeoise. La cour d'appel de
Vienne confirma toutefois par un arrêt du 20 janvier 2005 le jugement du 15 juin 2004. De même, le tribunal
régional donna gain de cause à M. Scheibner au terme de la procédure qu'il avait intentée en juin 2004. Il observa
que l'article avait fait état de la liaison que M. Scheibner aurait entretenue avec Mme Klestil-Löffler, question
strictement personnelle et sans rapport avec les fonctions publiques qu'il exerçait, risquant ainsi de ternir son
image auprès du public. Là encore, la cour d'appel confirma l'interprétation que le tribunal régional avait donnée de
la teneur de l'article. 2.  Procédure et composition de la Cour La requête a été introduite devant la Cour
européenne des droits de l'homme le 3 juin 2005. L'arrêt a été rendu par une chambre de sept juges composée de
: Christos Rozakis (Grèce), président, Nina Vajić (Croatie), Anatoly Kovler (Russie), Elisabeth Steiner
(Autriche), Khanlar Hajiyev (Azerbaïdjan), Dean Spielmann (Luxembourg), Sverre Erik Jebens (Norvège), juges,
 ainsi que de Søren Nielsen, greffier de section. 3.  Résumé de l'arrêt2 Grief Invoquant l'article 10
(droit à la liberté d'expression), la société requérante se plaignait des décisions des juridictions autrichiennes dans
les procédures dont elle avait fait l'objet. Décision de la Cour Il ne prête pas à controverse entre les parties que
l'ingérence dans le droit de la société requérante à la liberté d'expression était « prévue par loi » (la loi sur les
médias) et visait le but légitime de protéger les droits et la réputation d'autrui. La Cour rappelle que le droit du
public à être informé peut, dans des cas particuliers, s'étendre à certains aspects de la vie privée de personnalités
publiques, en particulier des hommes ou femmes politiques. Toutefois, en l'espèce, les juridictions autrichiennes
ont justifié l'ingérence dans le droit de la société requérante à la liberté d'expression. En particulier, mettant en
balance les divers intérêts en jeu, elles ont dûment pris en compte la qualité de personnalités publiques des
plaignants, et n'en ont pas moins conclu que l'article litigieux ne contribuait à aucun débat d'intérêt général. La
distinction qu'elles ont faite est convaincante, entre des informations sur la santé d'une personnalité politique qui
pourrait être une question d'intérêt général et des ragots sur son mariage. Au demeurant, la société requérante n'a
à aucun moment allégué que les rumeurs étaient fondées. Estimant donc que même des personnalités publiques
peuvent légitimement escompter être protégées contre la propagation de rumeurs concernant des aspects intimes
de leur vie privée, la Cour conclut que l'ingérence litigieuse était nécessaire, dans une société démocratique, pour
la protection de la réputation et des droits d'autrui. En outre, les sanctions à l'encontre de la société requérante
n'étaient pas disproportionnées. Il n'y a donc pas eu violation de l'article 10. Le juge Jebens a exprimé une opinion
dissidente à laquelle le juge Spielmann s'est rallié et dont le texte se trouve joint à l'arrêt. *** Les arrêts de la Cour
sont disponibles sur son site Internet (http://www.echr.coe.int). Contacts pour la presse Stefano Piedimonte
(téléphone : 00 33 (0)3 90 21 42 04) Tracey Turner-Tretz (téléphone : 00 33 (0)3 88 41 35 30) Paramy
Chanthalangsy (téléphone : 00 33 (0)3 88 41 28 30) Kristina Pencheva-Malinowski (téléphone: 00 33 (0)3 88 41 35
70) Céline Menu-Lange (téléphone : 00 33 (0)3 90 21 58 77)  

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