Thérapie par ondes de choc

Transcription

Thérapie par ondes de choc
Thérapie par ondes de choc extracorporelles (TOCE)
Introduction :
La thérapie par ondes de choc extracorporelles (TOCE) a été introduite dans le monde
médical il y a environ 30 ans. Depuis ce temps, les ondes de choc ont changé radicalement le
traitement de la lithiase urinaire. Aujourd'hui, les ondes de choc sont le traitement de première
intention pour traiter les lithiases urinaires. La TOCE a aussi été utilisé en orthopédie et en
rhumatologie pour traiter les tendinopathies calcifiante ou non, les retards de consolidation
osseuse ou la pseudarthrose, l’ostéonécrose aseptique de la tête du fémur, ainsi que les
fractures de fatigue. Le principe de la TOCE dans le cadre des troubles musculosquelettiques
est la stimulation de la régénération tissulaire et pas uniquement la désintégration des
calcifications comme en urologie.
Historique :
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1951 : Développement du premier générateur d’ondes de choc en vue d’applications
cliniques
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1971 : Destruction in vitro de lithiases urinaires par un tube à ondes de choc
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1980 : Première application clinique au département d’urologie de l’université de
Munich
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1980 : premières études sur les effets des TOCE sur les os du pelvis
•
1991 : étude sur la capacité à favoriser la guérison des fractures, particulièrement dans
les cas de retard de consolidation ou de pseudarthrose
•
1991-98 : premières études sur les troubles musculosquelettiques
•
1998-1999 : Développement de lithotriteurs compacts
•
Depuis 2000 de nouvelles applications en ostéo-articulaire sont régulièrement
suggérées
Principes des bases physiques :
Les ondes de choc utilisées en médecine sont des ondes sonores, avec un large spectre de
fréquence (200 kHz-20 MHz). Ceux sont des impulsions à haute pression, variant de 1001000 bars (10-100 MPa), caractérisées par un temps d’élévation rapide (onde de choc directe)
de courte durée (< 10 ns), suivie d'une phase de pression négative responsable de la cavitation
(onde de choc indirect). Il s’agit d’impulsions acoustiques qui sont générées dans un réservoir
d’eau par différentes techniques, puis focalisées par une lentille acoustique, l’énergie des
ondes de choc se trouvant alors concentrée dans la zone focale. Ainsi la peau située
directement sous la source d’énergie n’est exposée qu’à une sollicitation minime, tandis que
les hautes densités d’énergie nécessaires à titre thérapeutique sont atteintes dans la zone
focale à l’intérieur du corps, à la profondeur souhaité. L'énergie est exprimée en joules ou
milli joules, et la pression en bars ou en méga pascals. Le dosage du traitement est fonction de
la densité d'énergie acoustique (mJ/mm2), de la taille de la focale et du nombre d'impulsions
générées.
Un système générateur d'onde de choc comprend une source d'énergie électrique, un
mécanisme de conversion électro-acoustique et un matériel pour focaliser l'onde de choc. Il y
a trois systèmes d'appareil produisant des ondes de choc : Electro-hydraulique (Orthospec) ;
Piézo-électrique (Wolf) ; Électromagnétique (Dornier EPOS, Siemens).
Les ondes de pression : La dénomination « thérapie par ondes de choc radiales » est
trompeuse, car les appareils utilisés dans ce cas ne génèrent pas des ondes de choc, mais des
ondes de pression balistiques. L'onde de pression est produite par un compresseur d'air,
produisant l'énergie pneumatique nécessaire pour accélérer suffisamment un projectile
localisée dans une pièce à main. Lorsque le projectile frappe l'applicateur, une onde
mécanique radiale (ou sphérique) est créée. Ces dernières se distinguent fondamentalement
des ondes de choc et présentent une amplitude de pression beaucoup plus réduite de 1-10 bar
(0,1-1 MPa). Les ondes de pression ne sont pas focalisées. L'onde radiale est délivrée
directement au contact de la peau et s'épuise rapidement en pénétrant les tissus, n'atteignant
pas plus de 3 cm de profondeur.
Localisation par imagerie :
Pour placer la structure à traiter au foyer de l’onde de choc, et l’y maintenir le temps du
traitement, il est nécessaire d’utiliser un repérage, échographique ou radiologique (obligatoire
en Allemagne). La TOCE sous imagerie est appelée Orthotripsie, en référence à la lithotripsie.
Ces moyens sont également utilisés pour la vérification de l’efficacité du traitement sur ces
structures.
Deux théories s’opposent, la thérapie focale, avec une focale petite et centrée sur la zone à
traiter, et la théorie zonale, avec une focale très large tout autour de la zone à traiter et sans
contrôle par imagerie. C’est le même débat que sur les infiltrations guidées sous imagerie ou à
« l’aveugle ». Les deux débats restent à ce jour non tranchés, même si une tendance actuelle
nette encourage l’utilisation de l’imagerie, dans le but d’augmenter la précision, la tolérance
et diminuer le nombre de séances nécessaires.
Mécanisme d’action :
Les caractéristiques des ondes extracorporelles induisent une cavitation (production de bulles
gazeuses) dans les tissus interstitiels produisant des micros dommages aux tissus. Les micros
dommages induits par la cavitation seraient responsables d'une partie de l'effet thérapeutique.
Pour les tendinopathies dégénératives ou chroniques, ces micros dommages entrainent la
stimulation d'un processus inflammatoire pour activer la régénération du tendon. C’est le
concept de l' « Augmented Soft Tissue Mobilization » (ASTM: Rompe 1996, Davidson 1997,
Gehlsen 1999, Roush 1998). Les mécanismes sont une augmentation de la circulation
sanguine et la création d'une néovascularisation dans la zone traitée. Mais en réalité, du fait de
la puissance des générateurs de TOCE, le concept serait plus proche de celui du « dry
needling » ou micro-ténotomie sous guidage échographique, qui consiste à introduire une
aiguille dans un tissu avec une pathologie chronique (fibrose ou tendinose) pour entrainer des
lésions aigues, qui vont réactiver un nouveau processus de cicatrisation. Le TOCE doit
toujours être associée aux traitements adjuvantes permettant d’accompagner le processus de
cicatrisation jusqu’à la guérison.
Le phénomène de cavitation permet aussi le bris des dépôts calcaires de façon à promouvoir
leur réabsorption, l’augmentation de l’ostéogenèse (Schaden 2001), l’analgésie par
hyperstimulation ressemblant à celle provoquée par certaines applications d'électro analgésie
(Rompe 2001).
Les autres mécanismes d'action des thérapies par ondes acoustiques ne sont pas encore clairs :
inhibition de la nociception par libération d’endorphines (Mouzopoulos 2007, Seil 2006),
augmentation de la perméabilité membranaire des neurones et altérations cellulaires (Andres
2008), effets biologiques (rôle mitotique et anabolique) avec induction de la production de
facteurs de croissance (TGF-β1, IGF-1), modification de l'environnement chimique cellulaire
avec accroissement de la diffusion des cytokines à travers les parois vasculaires,
chimiotactisme qui accélérerait la guérison (Ogden 2001), prolifération de ténocytes et
synthèse de collagène (Han 2009, Seil 2006).
Indication :
Indications standard consensuelles :
•
Tendinopathie chronique :
o Aponévrosite plantaire ou fasciite plantaire avec ou sans épine calcanéenne
o Tendinopathie corporéale et enthésopathie d’Achilléenne
o Epicondylite ou « tennis elbow »
o Epitrochléite ou « golf elbow »
o Tendinopathie de la coiffe des rotateurs avec ou sans calcification
o Tendinopathie patellaire ou « jumper’s knee »
o Tendinopathie du moyen fessier
•
Pathologie osseuse
o Retard de consolidation de fracture
o Pseudarthrose
o Fracture de stress
o Ostéonécrose aseptique
o Ostéochondrite disséquante
Contre indication :
Grossesse ou Enfant ; Tissu pulmonaire ou nerveux dans la zone à traiter ; Tumeur à
proximité de la zone à traiter ; Infections aiguës dans la zone à traiter ; Infections cutanées
locales ; Syndrome douloureux régional complexe (SDRC) ou algoneurodystrophie ; Trouble
de la coagulation ; Pacemaker si onde électromagnétique
Effet secondaire :
A ce jour, il n’a été rapporté aucun effet indésirable grave. La plupart du temps, les effets
secondaires sont mineurs : douleur, hématomes, gonflement et irritations cutanées. Les deux
seules cas décrits de rupture tendineuse (tendon d’Achille et aponévrose plantaire) étaient des
patients ayant subits des infiltrations intra tendineuse de corticoïdes peu de temps avant.
Aspect financier :
Le coût de l'appareillage et de l'entretien sont particulièrement élevés et se reflètent sur le coût
des traitements. En France, la TOCE ne constitue pas une prestation des caisses d’assurance
maladie. Il arrive toutefois que les assurances complémentaires garantissent ce type de
prestations. Le cout pour le patient varie entre 30 et 100 euros par séance.
Conclusion :
La grande majorité des études scientifiques sur le sujet, concluent sur les effets positifs des
ondes de choc sur les tendinopathies avec entre 65 et 75% de bons et très bons résultats.
Malgré toutes ces études, la thérapie par ondes de choc reste encore méconnue, sous prescrite
et sous estimée par le milieu médical. Ceci pour plusieurs raisons : par manque de
connaissances sur la thérapie par ondes de chocs (lesquels prescrire, quand et quels résultats
en attendre) et sur la physiopathologie des tendinopathies, mais aussi par crainte financière
devant une thérapie non encore remboursé et avec des prix variant énormément selon les
centres. Les traitements modernes et efficaces (TOCE et injections de PRP) sont
malheureusement pour les patients, trop rarement mis en œuvre, avec une orientation vers la
chirurgie trop précoce.
La TOCE ne doit plus être confondue avec la thérapie par ondes de pression ou « ondes de
chocs radiales ».
La TOCE mérite plus de mise en pratique et notamment par les médecins, mais ne doit en
aucun cas se substituer entièrement à la rééducation. Rappelons que dans le cadre de
pathologies de sur utilisation comme les tendinopathies, une prise en charge étiologique est
indispensable en parallèle du traitement symptomatique.
Dr Chenaitia Hichem
Dr Digoin Alain
03/04/2013