Etude de la biomasse microbienne dans les sols ferrugineux
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Etude de la biomasse microbienne dans les sols ferrugineux
Numéro d’enregistrement scientifique : 83 Symposium n° : 11 Présentation : poster Etude de la biomasse microbienne dans les sols ferrugineux tropicaux de la zone Centre Nord du Sénégal Assess of microbial biomass in a ferrugineous tropical soil of the central northern part of Senegal NIANE -BADIANE Aminata (1), GANRY Francis (2), JACQUIN Fernand (3) (1) Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA), Bel-Air, Route des hydrocarbures, BP 3120 Dakar-Sénégal (2) Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), BP 5035, 34032 Montpellier cedex 1, France. (3) Laboratoire sciences du sol - ENSAIA -I.N.P.L., 2 avenue de la forêt de Haye 54500 Vandoeuvre les Nancy , France. INTRODUCTION L'accroissement des besoins vivriers en zone sahélienne et plus généralement en zone tropicale sèche implique un relèvement des rendements et leur maintien. Il est maintenant bien établi que le statut organique du sol joue une rôle primordial dans la productivité des terres mais aussi dans leur conservation. Les contraintes, telles que la démographie galopante et la disponibilité en terres cultivables, conduisent les paysans à pratiquer une culture continue de céréales ou de légumineuses sur la majeure partie des sols, ce qui accélèrent leur dégradation. Celle ci est fortement liée à l'évolution de la matière organique. De nombreux travaux (Blondel, 1971 ; Godefroy, 1958 ) réalisés dans la zone tropicale sèche ont montré la dégradation croissante de la fertilité de ces sols incluant une perte de leur aptitude régulatrice, notamment du pouvoir tampon. Les caractéristiques du climat (quantité, distribution, intensité des pluies, alternance d'une brève saison humide et d'une longue saison sèche) et celles des terrains (pente, faible stabilité structurale) rendent en effet cette zone très sensible à l'érosion dès lors qu'un écran permanent de végétation naturelle n'en assure plus la protection. L'alternance de ces saisons favorise à l'arrivée des pluies une réelle "explosion" de l'activité microbienne hétérotrophe donc consommatrice en matière organique (Birch, 1958 ; Dommergues, 1970 ; Wetselaar et al., 1982); alors qu'en saison sèche l'absence de période froide, la nature sableuse des horizons de surface des sols ferrugineux qui limite les surfaces minérales d'adsorption et de stabilisation des composés organiques, enfin la pauvreté minérale, sont autant de circonstances défavorables aux processus physico-chimiques d'humification tels qu'on les connaît en milieu tempéré en sols chimiquement riches. 1 Face à ces problèmes, de nombreuses études ont été effectuées par le passé sur le statut de la matière organique en sols ferrugineux tropicaux de la zone tropicale sèche (Blondel, 1971 ; Sanchez,1976) mais à notre connaissance peu d'études ont fait état de la biomasse microbienne de ces sols en relation avec les différentes formes d'azote organiques de ces sols tropicaux. Nous savons que cette biomasse microbienne représente 3 à 5% du carbone total du sol en zone tempérée et elle joue un rôle déterminant dans les processus d'humification (Paul et Voroney,1980). Notre objectif consiste à étudier l'évolution du carbone de la biomasse microbienne et ses relations avec les formes organiques azotées dans les sols sableux de la zone Centre-nord du Sénégal pendant la saison pluvieuse dans le cadre de dispositifs de longue durée mis en place à Bambey (30 ans) et à Thilmakha (15 ans). MATERIELS ET METHODES Le climat de la zone Centre-nord du Sénégal est qualifié de climat semi-aride Soudanosahélien avec deux saisons bien distinctes : une courte saison pluvieuse et une longue saison sèche. Les températures sont contrastées et les moyennes saisonnières enregistrées varient entre 18 et 32°C. Matériels - Nos études ont porté sur un sol ferrugineux tropical peu lessivé type sableux. Ce sol supporte deux agrosystèmes de longue durée: - Bambey : sol soumis à une rotation arachide-mil avec et sans travail du sol par traction bovine (30 ans sous culture); - Thilmakha : sol soumis à une rotation et techniques similaires mais ayant reçu du fumier pendant une dizaine d'années (10 ans). Ces deux sols sous cultures de mil ont reçu à la levée 100 kg N/ha sous forme de (NH4)2SO4. Des apports de potasse et de phosphore à des doses respectives de 45 et 30 kg/ha sont réalisés au semis. Chaque traitement comporte 6 répétitions. A la récolte, les rendements en matières sèches sont évalués et varient de 3 à 7 t ha-1. Les caractéristiques physico-chimiques du sol (tableau 1) ont été déterminées sur un échantillonnage moyen obtenu à partir de 20 par traitement ; ces prélèvements ont été réalisés à l'aide d'une sonde sur une profondeur de 30 cm. Mesure de la biomasse microbienne Des échantillons de sols frais, de poids équivalent à 50 g (6 répétitions) prélevés avant les semis, 15 jours après semis et à la récolte ont été fumigés selon la technique de Jenkinson et Polwson,1976 adaptée par Chaussod et Nicolardot 1982. La biomasse sous forme de carbone a été calculée en divisant le carbone dégagé au cours flush par un coefficient Kc = 0,41 (Nicholardot et al., 1984). L'azote total du sol est dosé après une attaque Kjeldahl, par la méthode au phénate alcalin sur une prise d'échantillon d'un gramme. Les différents compartiments azotés du sol ont été déterminés par hydrolyse acide selon la méthode préconisée par Decau , 1968 et modifiée par Egoumenides et al.,1987. 2 Tableau 1 : Caractéristiques physico-chimiques des sols étudiés Caractéristiques Bambey Thilmakha pH eau Carbone ‰ Azote ‰ Granulométrie (%) Argile Limon Sable 5,64 1,64 0,14 5,55 1,37 0,12 4,5 1,5 93 3,5 2,5 92,6 0,67 0,22 0,04 0,08 1,01 1,15 0,70 0,28 0,01 0,16 1,15 1,33 110 48 88 80 35 86 Bases échangeables (meq/100g) Ca Mg Na K S T Phosphore (ppm) total assimilable S/T (%) RESULTATS ET DISCUSSIONS Les teneurs de la biomasse microbienne varient entre 3,6 et 10,3 % à Bambey et entre 2,1 et 8,6 % à Thilmakha par rapport au carbone total du sol (tableau 2). Le carbone de la biomasse exprimé par rapport au poids de sol sec est nettement plus important dans les sols avec labour seul et labour plus apport de fumier ; ceci suggère que les pratiques culturales ont une incidence significative sur la biomasse et notamment sur l'activité microbienne. IL faut préciser que les valeurs globales obtenues dans les sols de la zone Centre-Nord du Sénégal sont faibles comparées à celles mentionnées en zone tempérée ; néanmoins elles se rapprochent des valeurs trouvées en sols sableux par Chaussod et al. 1986. Nous avons observé que les valeurs de la biomasse exprimées en pourcentage du carbone total de ces sols sont plus élevées que celles trouvées en zone tempérée. Ceci peut être expliqué par le fait que ces sols, de nature très sableuse, ont une activité biologique plus intense par rapport à la majorité des sols tempérés qui présentent des quantités d'argiles plus importantes. Selon Duchauffour, 1970 les processus de biodégradation dans ces derniers sont freinés par les fortes teneurs en argile. D'autre part, nous avons étudié la variation des valeurs de la biomasse microbienne de ces sols à trois époques (avant semis, au semis et à la récolte) ; en fonction des traitements les valeurs les plus élevées ont été obtenues à la récolte (tableau 2) et se situent à Bambey sur rotation avec labour (169 mg C/kg de sol) et à Thilmakha sur sol ayant reçu du fumier (118 mg C/kg de sol). Sur le sol ayant reçu du fumier, la biomasse augmente par 3 rapport au témoin sans fumier ; celle-ci est due au fait que l'application du fumier entraîne un gain de carbone et d'azote minéralisable qui stimule l'activité et le développement microbiens du sol. Quant au labour, il accroît la porosité du sol et aussi le développement microbien du sol (Charreau et Nicou, 1971). Tableau 2 : Carbone de la biomasse microbienne du sol (mg kg-1 de sol) Traitements Avant semis Après semis Bambey Sans labour Avec labour C.V. % Thilmakha Sans fumier Avec fumier C.V. % Récolte 59 a (3,6) 62 a (3,8) 7 124 a (7,5) 114 a (6,9) 5 95 b (5,8) 169 a (10,3) 11 30 b (2,2) 69 a (5,0) 18 27 b (1,9) 58 a (4,2) 11 77 b (5,6) 118 a (8,6) 11 Les valeurs affectées d'une même lettre ne diffèrent pas significativement au seuil de 5% (Newman-keuls) ; ( ) elles représentent le carbone de la biomasse en pourcentage du carbone total du sol. Ces résultats montrent qu'il existe une variation saisonnière de la biomasse microbienne caractérisée par des hausses en saison pluvieuse et des baisses en saison sèche. Ces variations ont été obtenues par différents auteurs en zone tempérée (Collins et al., 1992 ; Vong, 1987 Vong et al., 1990,). Cette variation saisonnière est expliquée par la présence de différentes types de micro-organismes dans le sol à chaque époque de l'année (Alexander, 1977). Les fractions azotées du sol ont été déterminées à la récolte (tableau 3) ; nos résultats indiquent que le compartiment organique azoté hydrolysable non distillable (Nhnd) du sol représente 40 et 60 % de l'azote total présent dans le profil (tableau 3). Le travail du sol et l'apport de fumier entraînent une augmentation non négligeable de ce compartiment. Ces résultats complètent ceux déjà obtenus au Sénégal sur l'effet des labours sur la matière organique et l'activité microbienne des sols (Charreau et Nicou, 1971). La fraction hydrolysable distillable (Nhd) représente 23 à 37 % de l'azote total du sol et quel que soit le traitement cette fraction varie très peu. Les résultats de travaux de Jocteur Monrozier, 1984 et Vong,1987 ont montré la nature labile de ces deux fractions et l'origine essentiellement de synthèse microbienne. La fraction non hydrolysable (Nnh) évolue en sens inverse de la fraction hydrolysable non distillable (Nhnd) et on observe que les pratiques culturales (labour et l'apport de fumier) entraîne la diminution des teneurs. Pour les deux dispositifs et quels que soient les traitements, la biomasse globale exprimée en mg par kg de sol présente une relation positive avec la courbe fraction azotée hydrolysable non distillable (Nhnd) du sol (figure 1); ceci explique une bonne partie de l'azote hydrolysable non distillable est d'origine microbienne. Ces résultats confirment ceux obtenus par Vong et al., 1990 . 4 Figure 1. Relation entre le carbone de la biomasse microbienne et l'azote hydrolysable non distillable des sols sableux de la zone CentreNord du sénégal 12 Avec labour Biomasse (% C Total) 10 8 Sans labour 6 Avec fumier 4 Sans fumier 2 0 30 35 40 45 50 55 60 Nhnd (% N Total) Tableau 3 : Valeurs des différentes fractions organiques azotées du sol (mg kg -1) Traitements Nhd Nhnd Nnh Bambey Sans labour 35 a (29) 51 a (43) 31 a (26) Avec labour 34 a (23) 89 b (60) 23 b (16) C.V. % 6 6 11 Thilmakha Sans fumier 41 a (37) 46 a (41) 23 a (21) Avec fumier 40 a (31) 58 b (52) 22 b (17)16 C.V. % 12 4 Les valeurs affectées d'une même lettre ne diffèrent pas significativement au seuil de 5% (Newman-keuls) ; ( ) les valeurs représentent les fractions azotées en pourcentage del'azote total du sol ; Nhd (Azote hydrolysable distillable); Nhnd (Azote hydrolysable non distillable); Nnh (Azote non hydrolysable). CONCLUSION L'ensemble des résultats obtenus sur les sols sableux de la zone Centre-Nord du Sénégal indique un effet saisonnier sur le développement des micro-organismes au champ, action liée probablement à la saison humide et au développement important de la rhizosphère. Nous avons également observé que les pratiques culturales ont une incidence significative sur l'évolution des teneurs du carbone de la biomasse notamment l'activité microbienne ce qui a été confirmé par ailleurs sur ces sols (6). Un fait important à signaler est les forts pourcentages en carbone total du sol de la biomasse comparés à ceux obtenus en sols tempérés dus peut-être à la nature très sableuse des sols étudiés. Pour les deux agrosystèmes, on obtient des relations étroites entre le BM-C exprimée en 5 pourcentage de C total et Nhnd exprimé en pourcentage de N total. Dans nos conditions expérimentales, ces résultats montrent une importante activité biologique en fin de saison pluvieuse (à la récolte. Celle-ci peut avoir une incidence sur l'évolution de la matière organique des sols. En effet, la forte biomasse à la récolte est "protégée" par la dessiccation du sol en saison sèche ; puis la reprise de l'activité microbienne, lors des premières pluies de la saison sèche ; puis la reprise de l'activité microbienne, lors des premières pluies de la saison suivantes, pourra jouer un rôle important sur les flux de minéralisation (pic de minéralisation) observés en sols sableux des zones tropicales sèches (Blondel, 1971 ; Decau, 1968 et Sanchez, 1976). Cette importante biomasse obtenue en fin de cycle peut-être considérée comme indispensable au maintien du pool d'azote labile des sols des agrosystèmes de la zone Soudano-sahélienne. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ALEXANDER M.,1977. Introduction to Soil Microbiology, 2nd John Wiley & son, New York. BIRCH H.F., 1958. The effect of soil drying on humus decompostition and nitrogen availability .Plant and Soil, 10, 1958, p. 9-31 BLONDEL D., 1971. 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