Qu`est-ce que l`amour pour Colette?

Transcription

Qu`est-ce que l`amour pour Colette?
ANALES DE FIL..OLOC~AFRANCESA, N," 2. 1987. PÁGS. 103-118
Qu'est-ce que l'amour pour Colette?
POR
P A B L O RODRIGUEZ G A R C ' I A
E.scitel(r iritii~~rsitcii.ici
p~(~f(~c.oi-(rdo
E.G.R.
Utzii.cn~idodde ('osrilltr - L<i Mtrnch<r
Si I'on examine les héroines de Colette, on peut voir que leurs vies sont
directement conditionnés par l'amour, la ou il y a une femme il y a aussi un
souvenir, une attente, une recherche ou meme un renoncement. 11 est toujours la, bon ou mauvais, heureux ou malheureux, offrant la jouissance ou la
souffrance.
Hélene Clément de LAI N ~ l i . s . s ~ l n id14
~ c Jolrr. Jadin de L ( I V(r,yril)oride~et
Vinca cherchent I'amour, qui est a cote d'elles. Dans Le B l i i2n Herhc «les
héros passent a cóté du grand amour dont ils révaientn ' sans le voir completement. Camille lutte contre sa rivale pour conserver son amour. Renée et
Annie ont perdu leur premier amour, mais elles cherchent d e facons différentes, bien sur- un autre. Claudine attend -Pénélopele retour de son
amour qui est loin et malade. Colette, enfin, comme narratrice de LLI Ni1i.v.\ern(.cJ clrr Jour rappelle le sien et veut renoncer a un autre qui est a coté d'elle.
Comme femme elle a beaucoup aimé et cela on ne peut pas le discuter. Done
dans ses romans elle va parler de I'amour: elle va le définir, le montrer, le
faire nécessaire, le perdre ... C'est a propos de tout cela qu'on va réfléchir
maintenant.
A ) I,E BOU1,EVERSEMENT D U CORPS
Tout d'abord l'éci-ivain nous présente I'amour comme quelque chose de
1
Beaumont-Parinaud (1951J. p. 149
104
PABLO RODRIGUEZ GARCIA
tres spécial pour la femme. 11 va meme bouleverser son corps produisant des
mouvements anormaux mais logiques. On comprend tout de suite que Vinca
était amoureuse quand Phil lui offrit sa mriin pourfirrnchir lp mriuvrris c.o~rloir
de r o c h o s , ct Ic sang inonta sous Ic hfile de [ s e s ]joirrs 2 . Le sang comme
force vitale indispensable bouge devant I'amour d'une faqon incontrolée,
comme celui de Claudine qui attend, impatiente, presque folle d'envie, le
retour de son mari et exclame:
«Dc;ji, I'upproche du printemps! Que de jours passés srins lui!)),
écoutrr fourmillrr m o n sring riir hoirt dc m e s doigts, i, I'ourlet chriud
d~ m e s oreilles, tressriillir 7.. .
Le sang au bout des joues, des doigts, des oreilles qui dénonce I'amour, qui
brule dans le corps de la femme, mais qui la fait tressaillir. Voila donc comment I'auteur nous présente I'amour, comme quelque chose qui est dans les
os, dans la chair de la femme, qui la fait trembler. qui lui produit des frissons:
Ce n'est pa.5 d ' a m o u r que jr tremhlr dit Renée dans I'Entravc~;a ce moment-la elle avoue qu'il peut produire des tremblements. Par conséquent,
I'amour se trouve dans le physiologique de la femme, qui change devant lui
comme la nature devant le printemps. Voila la belle métaphore de Claudine
qui attend Renaud et celle du printemps, ou celle du corps féminin comme
foyer pour l'amour, un corps qui va sauter s'il approche. Celui-ci est sa forme
visible; l'amour n'a pas de visage et cependant, grace au physique, on peut
l'apercevoir
Qu'il y a d ' o m o u r , oui, d'cimour, dcins crs prux-li,! Qu'ils sont prirlants, rt d o u s , et entieremrnt épris! Et les grandes inoins yui seri.ent
les miennes rri~ec irnr forcr c;grilp et c.ommunic~otivr,comrne je les
sens convriincur.~!'. . .
B) PEUT-ON LE DEFINIR?
On vient de voir des situations heureuses de I'amour, mais en est-il toujours ainsi'? Qu'est-ce que l'amour pour Colette? C'est difficile et complexe a
définir. A la fin du BIé en Herhe, Phil semble nous donner une définition
U n peu dc douleur, u n peu de plriisir ... Je ne liri olrrrii rionné yuc
crlu ... q u e celci 6 . . .
2
3
4
5
6
BH. p. 8.
R S . p. 211.
En, p. 8.
V1r.p. 138.
B I f . p. 183.
QU'EST-CE QUE L'AMOUR POUR COLETTE?
105
C'est la derniere phrase du roman, la conclusion et le résumé en deux mots de
ce que veut dire, pour lui, amour: des moments de bonheur. des moments de
souffrance. C'est donc bien simple. Et Germaine Beaumont ajoute: «Et ceux
pour lesquels c'est quelque chose de plus pur, de plus grand, de plus absolu,
sont condamnésn '.
a) Un peu de plaisir
Effectivement l'amour produit du plaisir a la femme: du plaisir physique
et du plaisir dans un sens de paix, de tranquillité, de bien-etre, donc de
bonheur. Malgré les moments amers dans I'existence des héroines de Colette,
elles éprouvent toutes des instants de joie. Voyons Renée, la plus triste et
seule de ces femmes qui trouve Max et nous avoue:
Je vais céder au fraternel. nu surprenunf plaisir, ignorc; depuis si
longtemps, de me confier, Juns paro le.^, u un cimi, de m'appuyer un
instant u lui, de me réconforter contre un étre inimobile et chaud,
cgfectueux. silencieux... Oh! Jeter mes brus uu cou d'un &re, chien ou
homme. d'un étre qui m ' a i m e ! 9 . . .
C'est un bonheur ignoré, mais confiant, chaud, protecteur, en un mot, absolu.
C'est la part du «plaisir», si énorme que Renée pleure pendunt une minlrte de
tres grand honheur l o . Pourtant celui-ci n'est pas toujours comme cela, si
grand, si complet. 11 est parfois petit et il ne s'exprime pas souvent: il cede a
la souffrance, qui semble plus colettienne que lui, ou bien la femme n'a pas le
droit de I'avoir tout entier, mais seulement une portion car, comme dit Annie,
chacun rle possede, ne doit posséder qn'une tres petite part du bonherrr
",
par contre a la pensée de Claudine, pour qui tout est bonheur, tout est amour.
11 faut penser que la phrase d'Annie est prononcée d'une perspective
pessimiste. Annie, qui a joui, aimé et souffert I'humiliation des hommes et, a
la fin, de Marcel. Plus grand est le bonheur, plus grande sera la souffrance qui
le succede. S'il est petit on souffrira moins. C'est pour cela qu'elle dit qu'il
fuut en avoir seulement une part. D'ailleurs elle a profité du plaisir autant
qu'elle a pu sans penser aux conséquences. On ne peut pas donc etre d'accord avec cette phrase. Chaque femme doit rester «son» bonheur parce que
chaque femme a .san vie, avec tout ce que celle-ci signifie.
7 Beaumont-Parinaud (1951), p. 149.
8 En, p. 124.
9 V o , p. 139.
10 V u , p. 244.
11 RS. : . 7 6 .
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PABLO R O D R I G U E Z G A R C ~ A
b ) Un peu de douleur
Parlons maintenant de la douleur, mais n'oublions pas qu'on ne peut pas la
séparer du plaisir. En parlant d e I'une on parle d e l'autre, c a r ils sont unis
comme les deux faces d'une monnaie. Dans I'oeuvre de Colette, cependant,
les moments de souffrance sont plus abondants que ceux d e plaisir. C'est
comme si la femme était habituée -meme destinée- ii la douleur. La vagabonde Renée, par exemple, a beaucoup aimé Taillandy et le rappelle avec ces
mots:
M o n D i r u ! que j'c;trris j r u n c ct yrrtJ j r 1'oitntri.s c.rt lrotnmr-lo! r t
comnzr j'tri so~!ffejrt!... C r c i t i ' r s t ptr.s lrtl c.ri de doulerrr.. u n r I(rt7icnttr[ion i~itidic~trtive.
tiotr. j r soupirc c.rlír yuc1yrrc:fOis. .trci. Ir ton dotit j c
dii.lris: * S i VOII.\ . S I I L ) ~ P comnzc
~,
,j'tri ktl; r?ierltrd(~.i l y tr yutrtre ons!. ' l .
C'est-a-dire que, pour elle, la souffrance était quelque chose d e tres habituel,
comme une sorte d e amaladie)). C'est la meme idée qu'elle reprend dans
L ' E t i t r ~ ~ en
v ~ disant:
.
Et prri.s,jc m'rrc,<~oudr
ri 10 JPnC'trc. derns lrnr postirre de!jir hrrhitircllc~,et
je c ~ o t n m e n cír~ ~.souJ/i-ir t.orrtitii>r~tnc~nt,
de Irr in<;inr ,fircon yrr'hici..
( / i ~ (tou.s
,
1r.s ,jorrr.s d'cri,crnt-hio 1 3 .
C'est la souffrance comme pai-tie habituelle de la vie, routiniere, quotidienne,
i ce moment-la elle perd son authentique valeur pour devenir tout simplement
monotonie: díins Irr .soidjfi-<rtir,ccJt le1 di.\.\itnuIrttion, t'IIc> 1/11 f ( ~ m r n]r .s'e.rerc.o cJt
.s'rr.r.~ouplit.
c,omrnc ¿i
u t r ~gytntzrrstiyuc~
~
yuotidi<~rinc~
p l r i n ~d ~ r.i.c.c/ues
.
14.. . Cela
veut dire qu'au fur et ii mesure qu'elle souffre et éteint la douleur chaque jour,
elle devient plus forte, qui est I'une des caructéristiques fondamentales d e
I'héroine colettienne dont on peut s'écrier:
car une lorigur pr1tienc.c [ r t ] de.s ch(rgrin.s jrrlorlsrmrnt círc,hr;.s ont ,Ji)i.tnc;,
(!!fin&, dui.c,i cettp j<>tnr)ie~
lh.
12
13
14
15
16
Vtr.
En,
1'0,
1'0.
Vo.
p.
p.
p.
p.
p.
30.
184.
36.
36.
36.
QU'EST-CE Q U E L'AMOUR POUR C O L E T T E ?
C ) LE BESOIN D'AIMER
On peut se demander si, malgré le peu de bonheur, la femme a besoin
d'aimer. C'est une nécessité, sans doute, et -pourquoi pas?- une mission
L'atteindrc, tremhler qu'il nr m'échappe, le voir ~ ' é c h a p p e r ,et patiemment I'(1pprocher de noullruu pour le reprendre voilN désormais
mon métier, mu mission l 7
celle de Renée amoureuse de Jean, une mission comme celle de d u r ~ rqui
appartient a toutes les femmes, de meme que I'instinct u u g u ~ t ed r ~ ' i n . \ t u l l e r
dan\ Ir mulhrur en I'exploitunt comme une mine de mutc;riuux précirirx 1 8 .
Deja la jeune Vinca a envie d'aimer: Elle j i t un effort pour éi-zoqurr un
trmps oic su mere, jeirne J i l l r , souffrit prut-gtre d'rtmour et de ~i1enc.r.Elle lui
vit dos chrveux précocement bluncs. un pince-nez d ' o r , et cettc muigrei4r 19...,
mais cela ne fait rien, malgré la douleur et la solitude qu'elle aura, elle réclame pulir elle srule la honte d'uimer, le tourment dlc corpJ et de l ' i m e 2 0 .
O n dirait qu'il s'agit plutot d'une victime prete au sacrifice que d'une amoureuse, mais c e qui doit nous intéresser c'est que la femme a besoin d'amour et
I'appelle:
J'ui peur de me tromper, qtiund i l me semblr qu'entre I'homme et moi
une longue récréntion commence.. . Homme, mon a m i , viens r ~ . \ p i r r r
c~nsemble:'... J ' u i toujours uimé tu compagnie 2 1 .
C'est I'appel émouvant de la narratrice de L a Naissrince du Jour a I'amour
par conséquent. C'est I'exemple le plus clair de sa nécessité. De la premiere
phrase d'une Vinca adolescente a une Colette 2gée il n'y a pas grande différence, sauf les annees. Le reste est identique: la demande humble de la
romanciere: Restons en~emble:tu n ' u ) plus de rui.ronc, muintenunt, d r me
quitter pour toujours
22.
C'est le meme besoin de Claudine ou D'Annie dans L u Rrtruite Sentim r n t u l r , de Renée a la fin de L'Entruve, de Camille, d'Hélene Clément, d e
toutes les femmes - e t de tous les hommes- de Max, toujours sous I'ombre
amoureuse de Renée, de Vial sous celle de Colette, d'Alain qui suit s a chim>re Saha, ou le jeune Phil qui avoue:
17
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19
20
21
22
En, p. 209.
B H , p. 156.
BH. p. 57.
B H . p. 57.
NJ, p. 52.
NJ, p. 52.
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PABLO R O D R I G U E Z GARCIA
C ' r . \ t mtr mtritrc.\.\c, c.e n ' e s t prrs m o n trmour.. . jt> p u i ~vivrc strns
elle ".
C'est une belle phrase valable pour tous les personnages: sans amour ils ne
peuvent vivre. Donnons seulement trois exemples des lettres d e Renée a
Max, ou I'on voit d e nouveau le besoin qu'elle a d e lui et I'importance qu'elle
lui accorde: lihr-c. de t o u r , strufde i ~ o r i s2 4 Qrltrrtrntc j«ur.s! J t r m t r i . ~je ne porirroi
. ~ u p p i ) r t oceltr, mtrintentrnt "; Ecrivez-moi, aimez-moi, réchaufez votre Renée 2 h .
Comme pour Renée, pour Colette I'amour est tres important, malgré son
apparent oubli dans Lu Nrrisscrnc.e du J o u r . Ce yrie iJou.v r.cnc)z de d i r ~12 se
.sc;pcrrt] drr mépris de I ' o n i o u r y ~ i ' o ndevine t o ~ i j o r i r srrn pcJrr. en vous listrnt,
dans votri> rrmo14r di-' I ' ( r m o ~ r r2 7 . . . lui dit Vial. Mépris, quand elle n'a fait
qu'écrire sur I'amour et aimer? Cela s'appelle renoncement, jamais mépris.
Elle ne pouvait pas mépriser les hommes, les animaux, la nature qu'elle a tant
aimés. Elle yrri ne .vtivuit que donnpr 2 H , comme Sido, ne pouvait pas mépriser
le meilleur des dons. Elle, dont un des ses maris disait:
Mcris t ~ ne
i peu.r donc écrire u n livrp y u i n r .soit d ' t ~ r n o u r :...
) Est-cc
y u ' i l n ' y t r pt1.s rrutrir choxp dtrn., Icr vie? ... -11 rn'crurclit pc~ut-~?trc~
rnseignc; cc y u i r r 1ic~nc.edo t e n i r , dtrns u n romtrn et hors dii rorncrn, la
p1crc.e d~ l'(rmour 2 q .
D)
L'IMPORTANCE DE L'AMOUR
On a vu q u e la femme a besoin d'amour et que celui-ci tient dans I'oeuvre
d e Colette une place prépondérante. Mais pourquoi? Simplement parce qu'il a
quelque chose d e tres spécial, c e qu'on pourrait appeler transcendance. May
ne connait pas I'amour. Annie ne le connait plus. Elles se voient vides,
isolées, meme maladei. Elles n'ont pas d'illusion pour lutter. Elles s e sentent
faibles. L'une a travers d e la drogue s'évade, I'autre 5 travers la choirjrcric.he.
Mais Vinca, Camile sont différentes. Elles aiment, elles luttent pour conserver leur amour, I'une contre la Dame e n blanc dont elle s e sent jalouse,
I'autre, contre une chatte. On les voit fortei, comme Claudine qui attend,
optimiste, la rentrée d e son mari, qui ne fait que penser a lui et a tout oublié
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29
HH. p. 134.
Vrr. p. 195.
V ( i . p. 197.
Vír. p. 198.
N J . p. 140.
S i . p. 20.
N J . p. 53.
QU'EST-CE Q U E L'AMOUR POUR C O L E T T E ?
109
pour lui. Et Renée, enfin, qui ne peut pas oublier son premier mari, qui lutte
contre I'amour représenté par Max, mais qui, enfin, y trouvera tout ce qu'elle
souhaite et qui va la combler au maximum.
a) Au-dela du corps
Certes, on ne peut pas voir l'amour seulement du coté physique -on le
verra apres-; meme si celui-ci est important, chez Colette l'amour va plus
loin
L ' a m o u r de Phil et Vinca, uboutit ailleurs que l u , l a , cette couche de
sarrasin battu, hérissé de fétus. I I uboutit ailleurs q u ' u u lit de tu
chambre ou de la mienne 3 0
pense Phil qui vient d'avoir une expérience toute différent avec la Dame e n
blanc et, a propos d'elles, il ajoute:
Puisqu'une femme q u e j e ne connais pus m'rz donné cette joie si grave, dont
je palpite encore, loin d'elle ... que ne ferri pus pour nous, notre amour? ".
Voila de nouveau le sens de transcendance qu'accorde I'écrivain a I'amour: il
va au-dela du corps et peut rendre les amants plus heureux que les plaisirs
eux-memes.
b) Au-dela de la vie
D'autre part il va au-dela de la vie et c'est ce que Colette nous décrit dans
une tres belle page de L a Retraite Sentimentale ou parlent Annie et Claudine,
Renaud ayant déja disparu:
Je vous croyuis terrcrssée, malude, trciinunt votre vie et la détestant,
et haiisant tout ce qui respire et prospere, en f i n ! E t vous voila jeune,
olerte, au milieu des betes et des abeilles ... A quoi bon I'amour, ce
grand amour dont vous étiez si orgueilleuse, Claudine? Aprt?.~la mort
d ' u n te1 amour, vous pouvez donc vivre.? Ou bien ce n'était pus
I'amour 3 2 . . .
Annie pense que Claudine tombera et se détruira, comme elle, apres la mort
30 B H . p. 180.
31 B H , p. 180.
32 R S , p. 228.
de son mari; mais ici il faut revenir i Sido qui, selon Claude Pichois <(ne
représente pas seulement la flore, la faune, les sources d e la Puisaye, mais
aussi la fidélité 2 soi, le pole de la stabilité opposé i celui du xvagabondage)) ", justement les deux póles qu'on aperqoit chez Claudine et chez Annie.
Claudine ne pouvait pas détestei- t o ~ c.(,t tlui r.cspirr, elle, pour qui la vie était
le plus important.
Annie pense que, une fois Renaud disparu. I'amour meui-t avec lui, mais s e
trompe. Elle pensait voir Claudine triste et déchirée, comme elle, mais au
contraire elle la voit jeune, au milieu d e la nature et pleine d e vie. La conclusion donc ;st bien simple. Est-ce que c e qu'il y avait ente Renaud et Claudine
était de I'amour: Annie s'intei-roge. Voilii la tres belle réponse de Claudine.
pleine d'espoir:
S i , rrrorz tlnJ¿rrzt, c'c;t(rit I'trrnorlr! Soyez trcinqirillr. ptrr.trz tr<rnqiiillc.
C'<:ttrit Ir p l r ~ sb r l (rrnour, r.clui yui i ~ i tde Iiri-tnCrnr ct demrrlrr trprÉ.s
Itr vio. Con.volrz-vous, mor1 rn,firnt, j r n'tri pt1.s prr.dr, mon trmorrr! -'4.
C'est une idée un peu magique d e I'amour, mais réelle. Ce n'est pas, bien sur,
celui de Tristan et Iseut, il n'y a pas de philtre, mais i l y a quelque chose qui
les rassemble: L'amour est plus fort que I'exil -dans c e cas la maladie d e
Renaud- et, enfin, plus que la mort.
C'est Ii qu'on doit chercher sa vraie transcendance. On ne peut pas donc
le toucher, le saisir a travers les sens -comme on prend I'amour physique-,
il est vraiment, comme I'ame.
C)
Au-dela du réel
Effectivement Colette ne croit qu'a un seul amour, mais elle sépare la
chair de l'ame: L'trmour. m'rr rendut. si Ji~rtunt;e,.\i c o ~ n b l édo~ pltri.vir. dt1n.s nitr
r,lzcrir, d r torrr.mrnt dlrns tnon f i m ~
I S . . . Elle parle de I'ame pour expliquer
I'amour qui vit de lui-méme et qui ne meurt pas, pour exprimer le plus profond d'une personne. sa propre vie, le plus important qu'on puisse offrir a
I'autre. A la fin de I'Enrrtrvc, Renée est amouruse et avoue:
J P mo mi.\. dtrtls .vrJ.s hrtrs o t , j fermtri
~
Ir.\ ypux porrr yrl'il
I Z O 19it pt1.5 qrir2
t,'r;trrit mon ¿imu q r ~ jo
r lrii dontzrri.~' h .
C'est le grand succes d e I'amour, sa plus sublime transcendance: se rendre ii
33
34
35
36
Pichoiz. Préface d e la N a i s a n c e du Jour (1969). p. 28.
R S . p. 228.
K.S. p. 71.
Eri. p. 212.
QU'EST-CE QUE L'AMOUR POUR COLETTE?
111
I'autre entierernent, sans aucun intéret, sans rien attendre de lui - c o r n r n e
Renée, Claudine- que I'arnour:
Je no voudrais de I'arnour, enfin, que I'cimour
E) L'ABSENCE DE L'AMOUR
On vient de parler a propos de I'arnour, rnais un peu en théorie. C'est-adire, on a dit ce qu'était I'arnour, a que1 point il est irnportant pour la fernrne,
la nécessité qu'elle en a.. . Mais il ne faut pas oublier une chose: la plupart des
fernrnes de Colette se trouvent -ou se trouveront- seules. C'est justement
l'absence d'arnour. Elles se trouvent -ou se trouveront- sans arnour. Et
pourquoi cette absence'? II y a, surtout, deux raisons: les fernrnes le perdent
ou, si un autre se présente, elles ne le veulent plus. Bref, c'est la perte ou le
renoncernent, sirnplernent.
a) La perte
Si nous exarninons attentivernent la vie de ces fernrnes, on pourra remarquer que pour la plupart d'entre elles le prernier arnour est parti: le rnari
d'Annie. Taillandy, Willy. D'autres partiront ensuite, Renaud, Phil ou Alain.
11s ont été les prerniers
« L e p i r r don.\ Iri vic d'rrnr f i ~ r n m e :Ir p r e m i r r lzomnze». 0 1 1 ne mcurt
que dc c c ~ l r ~ i - / irrpres
r,
Ic.quf~l I<r i.vie con.jugcllc~ -ou
v(r c.ontrcífrrc;ot~devient rinr c<irri<;re
Le prernier arnour, incomparable et presque irnpossible a surrnonter. Kenée ne pourra pas oublier Adolphe Taillandy. Harnond lui demande si elle a
connu beaucoup d'hornrnes. La réponse de Renée est
U n seul. mcris qrrel!
39..
Cela va Ztre tres iniportcint d(ins lu vie de lu ,femrnc., v<i Iír m<irquer polrr
toujours. Comnie dit Coltvte
ir ouvrir 10 terre, np fjit-<.e que I ' e ~ p c ~ cde' u n c u r r é de choux, on se
~ e n torijorrrs
t
Ic pl-cniier. le ni<iitre, I'époux .srins rirl<iux 4 0 .
37 V'i. p. 167.
38 NJ. p. 66.
39 V l , . p. 95.
40 N.I. p. 118.
112
PABLO RODRIGUEZ G A R C ~ A
C'est pour cela que Renée s'écrie quand Hamond veut la d o t r r d'un nouvel
amour
Pensez-vorrs yu'irn «nouvrl crmour» , c o m m r vo1r.s dirrs, détruisr le
souvc~nir ilrr p r r m i ~ r .0 1 1 . . . le rc~s.sur.ite.?4 ' .
C'est la peur de Renée, que le premier amour ne renaisse et avec lui, de
nouveau, la souffrance. Elle ne veut pas le ressuciter, mais non plus I'oublier.
car elle se dit:
Tir nc t'es pus demundé, ce jorrr-la, si c3>ttrit I ' a m o u r T u ne pouvuis
t ' y t r o m p r r : c'étuit lui, I'umorrr, le p r r m i r r crmour. C'étuit lui, r t cc'
np .tcrci jumcris lui! 4 2 .
Pourquoi cette constante répétition d e la part de R e n é e ? Nous avons dit que
I'amour est source d e douleur, mais « s e d le premier amour a une chance
d'échapper a c e triste destin: par la joie ineffable du premier don, par une
ferveur inégalable, il est le seul a pouvoir briser le cercle vicieux d e la solitude
individuelle et a permettre la communion profonde des étres. 4 3 , de la l'importance pour la femme d e ce premier amour et d e s a perte:
C'étcrit lui, qui n r s'unnonce point, q u ' o n n r clioisit pus, q u ' o n n r
discute pcis. E t ce ne srrci plus jurnuis Irti! I I t'cr pris c r que tu peux
donnor sc~ulemrntune Jois; l a con.fionce, I'r'tonnc~mrntr6ligirux d r lu
promii.rc1 currsse, In nouvrauté de te.\ lartncs. I L jlerrr
~
d r la premiere
soi&i.tinc,r! 4 4 . . .
se dit Renée. Apres quoi ella va renoncer, comme Claudine, a d'autres
amours car ils ne seront jamais c o m m e le premier.
Quant a Camille et Vinca on peut dire que c'est différent. Elles ne renoncent pas a I'amour, mais a un amour concret, le premier d'ailleurs. Elles le
perdent, simplement. Phil et Vinca sont, a peine, adolescents, mais ils ont deja
perdu le bonheur d'enfants et c'est la qu'apparait I'incommunicabilité, donc la
séparation. Ils perdent un amour, mais ne renoncent pas a aimer -ils sont
tres jeunes d'ailleurs-.
En c e qui concerne Alain d e Lrr Ch(itto « d e p par
I'amour physique, c'est-a-dire la «consommation», se détourne d e cette forme
de 1' «impur» et s e retire dans le monde d e I'enfance a v e c Saha qui incarne la
puretéa 4'. 11 n'y a pas non plus un renoncement d e la part d e Camille. Elle a ,
tout simplement, perdu un amour qui n'était pas le sien, mais qu'elle a voulu
conserver jusqu'au dernier moment.
41
42
43
44
45
p. 165.
p. 146.
Ketchum (1968), p. 272.
Vtr, p. 146.
Ketchum (1968). p. 190.
Víi.
Vii.
QU'EST-CE QUE L'AMOUR POUR COLETTE'?
b) Le renoncernent
Parlons maintenant de I'autre type d'absence d'amour, le renoncement,
condition de quelques femmes de Colette - e t de quelques hommes: Alain, dont
on a toujours dit qu'il était le reflet de I'écrivain, renonce a I'amour pour
rester dans l'enfance que représente Saha; on vient de le voir-.
Pour commencer il faut dire qu'il n'y a pas une seule sorte de renoncement, et que les causes qui les ont produits ne sont pas les memes. Pour
parler des différents types, on va choisir tros femmes fondamentales dans
I'oeuvre romanesque de cet auteur: Claudine, Renée et la narratrice de la
N~~issrrnce
du jour, c'est-a-dire, Colette.
1) La douce retraite
Dans La Rrtraite Sentimentule, Claudine ne renonce pas a l'amour absolu,
mais a I'amour physique. Ce n'est donc pas un renoncement complet. Elle
attend son mari, mais lui reste fidele, échappant a la tentation de la chair. Elle
est le symbole de la vertu et du ((pur»car elle «se réfugie au pays natal, elle
se réintegre a la force maternelle qu'est la nature,, 4 6 . Annie, par contre, ne
renonce pas a la tentation de la volupté et représente le vice et 1' ((impur».Le
résultat de la lutte est le triomphe de la vertu, donc de I'amour-vertu, de
l'amour idéal. De toutes faqons on a cru voir que la retraite de Claudine
<(ressembleplus a une facon d'échapper aux problemes que pose la vie en
société qu'a leur véritable solution ... Comme [Colette] a tué Renaud parce qu'
((il était vraiment trop inconsistantn, c'est aussi la mort qu'elle donne a Claudine, en la figeant dans une stérile retraite)) 4 7 . Peut-etre que Renaud était
«inconsistant», mais la retraite de Claudine ne peut pas etre «stérile))car elle
signifie I'amour absolu, authentique et vrai qui d e m e u r ~upres la vie 4s.
2) Le tourment de ILI 1'01upté
On a parlé de ce que signifie pour la femme le premier amour, I'énorme et
absolue importance qu'elle lui accorde. On en a beaucoup d'exemples a travers Renée Néré et son mari Adolphe Taillandy. Si nous voulons comprendre
son renoncement il faut d'abord comprendre cet homme et cet amour, les
premiers, parce qu'ils vivent en elle et, ceapendant, elle veut tout oublier.
Renée veut effacer le moindre souvenir de sa tete: Dieu merci! J P n'uime P U S ,
46 Harris (1973), p. 189.
47 Ketchum (1968), p. 145.
48 R S , p. 228.
114
PABLO RODRIGUEZ G A R C I A
4 y . Elle parle
d e I'amour c o m m e si elle en avait peur. Poui-tant elle a beaucoup aimé ... et
beaucoup soufert: J r n'oime ptrs ptrrler dt2 I'trmorrr ... Si ,j'cii~tiisprrdlr u n
ctcfirtit hit'ti-(limé, il mc semhlr que jr ne pourrtris plrr.5 protloncrr soti t i o t l ~".
Elle ne veut plus ces luttes du couple d'égal a égal. elle refuse <cL'amour
parce qu'elle e n a peur, mais elle ne craint pas seulement le risque banal de la
souffrance. Elle craint aussi que I'amour d'un seul etre ne soit la fois une
richesse et une limite)) a s a liberté. Elle ne veut que jouir de I'amitié avec
I'homme, ce qui n'a pas été possible avec Taillandy. Deux idées donc: la peur
d e la souffrance et le désir d e vivre comme amie d e son ennemi. C'est pour
cela qu'elle s'écrie:
,jc t ~ ' t i i m tptr.\.
~ jc n'trimc'i.tri plus pc~r.sontzr.po-.sotltio. po..\onne!
[Jr ] t ' t i i m r ~... J r ne veux plu.5 Ic d i r c . .jr nrJ v r r l s plus Ic dirc ,jtrnitris! Jc
n r ilcu.r p1rr.s ctltc7ndro cctto v0i.t-, m<r voi.t- d'rrrrtrefoi.~. h r i s l e , h<rssc,
m u r m u r r r irrc;.si.stihlcment Ic t l ~ o td'<i~rtr<ífois
Apres toutes c e s négations et ces répétitions il semble q u e le renoncement
de Renée est indiscutable, mais voila que le Grand-Serin entre en scene et,
avec lui, I<r c.h<rlrur. lo IumiPre, et c.e .\rt,otid trmour tout mele des cendres
hrul<rnte.s du prrmic,r, rnt1i.s si cher, si inespt;ré j 3 . . . Renée va .s'trtt<rcher a lui,
mais ce n'e.st guere le chemin de I'umour 5 4 jusqu'a un beau baiser qui fait
renaitre sa v o l u p t l o r r h l i r ' ~ .A c e moment-la elle passe du renoncement a
I'acceptation d e cel nouvel amour qu'a ressucité la sensualité. Ils vont avoir
des moments heureux. il pensent méme a s e marier. Mais voila, de nouveau,
qu'apparait le doute chez Renée, s a lutte intérieure: le coirple umoirr.rux pri.\onnicr d ' u t ~ c~,ll<rtnhr<)
tiedc 5 5 et une autre fois A i m e r , <.'o.st ohéir . . . ccir <.'e.st
I'trmour stjrrl ylri i . ~ n d
f ~ c i l e j,o y r u x , g l o r i e ~ r xle .scivcrgc j h . Elle qui, <<loind e
se livrer étourdiment au plaisir d e I'instant, y renonce au nom d'une idée
peut-etre erronnée, mais noble, qu'elle se fait de son destin de femme)>5 7 , elle
ne veut pas perdre c e qu'elle a réussi a atteindre apres l'amour: la liberté, son
travail. Elle pense:
Cc p r t i t tlrhlt~trude n ~ t r vic future, etre u n trmtrtlt J i d P l ~r't un hpl
rnfirnt, pruduit sur moi le p l r ~inexplicuhlc.
~
le plrr., dé.srr.strert.r
Ji't
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V t l . p. 97.
V ( r . p. 98.
Mallet-Joris (1977), p. 50
V ~ Ip.. 175.
Vtr. p. 177.
V o . p. 141.
Vri. p . 168.
V u . p. 168.
Mallet-Joris ( l 9 7 7 ) , p. 51
Vrr. p . 172.
rf-
QU'EST-CE QUE L'AMOUR POUR COLETTE'?
115
Ce n'était pas I'idée qu'elle s'était faite de I'amour et elle veut y renoncer. De
nouveau surgit une lutte i p r e pour oublier Max quand elle s'était déja attachée a lui. D e l ' o u h l i e r , c o m m e .si jc. n ' a v r i i . ~j u m u i s connrr son r r g u r d ni lu
cnrrsse d p .va b o u c h ~". Mais le renoncement se produit malgré la douleur de
Renée
M o n pLruvre second u t n o u r , celui q u e j e nonltncris m a cht?re chaleur,
m u lumit.ro ... I l e \ t l i l , tout pres de mri t n u i n , j~ peux le saisir. et j e
,fui5 6 0 . . .
Si nous lisons attentivement les lettres de sa tournée, nous pouvons voir
comme elle aime Max, comme elle a besoin de le revoir, et cependant elle
I'abandonne:
A d i e u , m o n ch6ri ... J e np irous verrui plus ... C ' e s t le m o i n d r ~m a l que
j e puisse iJousfuire ... J e tne sen.5 t o u t u s ~ ; e ,et c o m m e i n c u p ~ r h l ede
reprondre l'hrihitude dc l ' a m o u r , et ejyurée d'avoir. encore u sorrffrir
pcrr l u i 6 1 .
C'est le douloureux mais conséquent renoncement de Renée. Elle ne demande que l a p u i x , Seigneur, l a pui.r que Taillandy lui avait refusé et que Max
lui refusera:
Trr étuis vpnu pour pcrrtager mu vie. P u r t u g e r . o u i , prendre tu p u r t !
E t r e de m o i t i é duns mes ucteb, t ' i n t r o d u i r e u choque herlre d r r n ~l a
pugode .sec.rete dc mes pensées, n'est-ce pns.') Pourcfuoi t o i p l u t o t
q u ' u n ciutre? Je l ' a i fermde ir tous 6 2 .
3) Le besoin de renoncer
Le troisieme exemple de renoncement est celui de la narratrice de lu
d u J o u r , c'est-a-dire de Colette. Selon une phrase de Marcel Arland <<Ala premiere page, elle songe qu'elle doit renoncer a I'amour; a la
derniere, ce renoncement est a c c o m p l i ~6 3 , mais au milieu du récit apparait le
doute, meme la résistance, bien qu'elle sache deja c e qu'elle veut et ce qu'il
va arriver, on nc sort pus de lu q u u n d , ni'cotnme on veut 6 4 avoue-t-elle. 11 y a
des moments ou elle souhaite avoir I'amour et d'autres qui nous montrent le
Nuiserrnc'
59 Vu, p. 231.
60 Va. p. 238.
61 V o . p. 245.
62 Vlr. p. 247.
63 Cité par Ketchum (1968), p . 45.
64 NJ. p. 53.
contraire: Irrtlt<2t jr m ' c ; c r i ~ en dederns: .Ah! mon D i c ~ u ,p o u t ~ uq ~ r ' l l.roit
rncot.P le! «et t(rnt6t: .Ah! t ~ o nD i e u , poutvrr yrr'll t i c J soit p l ~ r sla!. 6 s . Cependant la décision est prise, celle d ' u n e femme de cinquante-trois ans qu'un
d e ses maris, d e s années antérieures, conseillait ainsi: Tu devreii.~h i ~ t V~P, ~
S
c,itiqrrtrntr ern.,., c;crirp r r n ~.sot.t~de tn(rn~rc~1
q ~ r erpprendr(rit
i
e~~r.v,fkrnrno.s
iI i ~ i v r e
( J t puix
~
eri'c'c. I ' h o m m ~y u ' r l l r s erimrnt, un ( , o i l de
~ vie u d r u s ... Colette 2youte:
J P srris p e u t - $ t r ~cJn trciin de I'kcrirc h? Ce serait la premiere cause d e son
renoncement: pouvoir jouir, enfin, de I'amitié d e I'homme hors de I'amour qui
est -on I'a déja vu- source de souffrances et d'hostilités. C'est surtout
I'amitié qu'elle va chercher désormais. Celle-ci sera le c o d e , le manuel pour
vivre en paix avec I'ennemi et Colette maintenant peut le suivre.
On a dit q u e le renoncement est volontaire et jamais forcé. Si I'écrivain
dit: L'irtle dc.s gr(inde.s htrt~(ilitc;.sile I'rsi.vt~nc.e,I'citnorrr. .sr r.c~rircde la m i r n nc h 7 . c e n'est pas parce qu'elle s e sent abandonnée, mais parce qu'elle a
changé maintenant, parce qu'elle ne peut tout donner ou tout perdre. D'autre
part elle I'appelle banalité et dans un autre moment elle dit: L'rimorrr. ( . r ri'osr
pei.s un .srntirrient h o n o t ~ i h l r quand celui-ci a été la chose la plus importante
d e sa vie et son grand honneur. Peut-étre parle-t-elle, deja agée, seulement d e
la partie physique de I'amour en opposition a la partie sublime d e l'amour
vertu. Cela explique la fuite d e Colette devant le jeune Vial. II représente la
tentation de la chair, le plaisir d e la jeunesse pour une ft2mmc qui c;c,huppr 2
I ' u g r d ' 6 t r r Lrnr , f k m m r h' et qui va renoncer. C'est le moment d e la retraite
apres tant d'années d e bonheur ou de douleur. L'écrivain civoue:
Il.firrrr désormciis que tntr rri.srrssc~si jc suis triste, mtr gtritk si j r srri.5
,quic. .se ptrs.vent d ' u t ~tnotif yui Ieur ci suffi pcndcint t r r n t r cinnr;r.s:
I'trrnorrr. J'v cirrii~e.C ' r s t p r o d i g i ~ u s .C'e.st t r l l o n r n t prodigieu.v 7 0 . . .
A partir d e c e moment elle dit i I'homme qui la désire: je m'eng(igr ic.i ir
pt.cndrr /non cwngc;. N o n , [u ne m'ei.s pus t~récl.pe~~rt-c;trr ~ ' ( I s - t ,j(imciis
u
i,oirlu de. mcil ... A d i t ~ r r ,c h r r Iiomme 7 ' . . .
Avec le renoncement elle cherche donc I'amitié pure avec I'homme, mais
aussi la tranquillité apres la fatigue, I'existence sans passion apres I'orage, la
sérénité qui suit a la lutte. D'autre part, elle rappelle q u e Sido srivriir yu'on
posstdr dtrns I'erh.st~ntion,et seuletnrrzt dut1.s 1'uh.stention 7 2 qu'elle cherche
65 N J . p.
66 N J , p.
67 iV.1. p.
68 N.1, p.
69 N,/. p.
70 NJ. p.
71 NJ. p.
72 N.1. p.
152.
57.
52.
56.
52.
152.
57.
60.
QU'EST-CE QUE L'AMOUR POUR COLETTE'?
117
désormais, comme Claudine, comme Renée. C'est-a-dire, le pur, I'absolu, le
transcendant. C'est son renoncernent mais en rneme temps sa nouvelle naissance: «L'amour universel, la véritable sérénité))7 3 de la solitude.
73 Ketchum (1968). p. 230.
PABLO R O D R ~ G U E ZGARCIA
BIBLIOGRAPHIE
BIBLIOGRAPHIE DE COLLETTE ANALYSEE DANS CETTE ETUDE
Leu reirniie seniinirnrnlr. Mercure de France. Folio. 1957. (Signe employé pour les notes: H S . )
Lo vanuhonde. Albin Michel. Le livre de poche. 1983. (Signe employé pour les notes: V u . )
L'rnirclv~.Flammarion. 1970. (Signe employé pour les notes: E n , )
Le blr en herbr. J'ai lu. 1950. (Signe employé pour les notes: B H . )
L(i nuissunce du joirr. Garnier-Flammarion. 1969. (Signe employé pour les notes: N J . )
Sitio. Hachette. Livre de poche. 1961. (Signe employé pour les notes: S i . )
BIBLIOGRAPHIE CRITIQUE SUR COLETTE
BEAUMONT-PARINAUD, G. et A,: Colerre, Seuil. Paris, 1951.
HARRIS, E.: L'upprofondissement de Iu sensualité, duns I'oeirvre romtrrwsque de Coleiie, Ed.
A. G. Nizet, Paris, 1973.
KETCHUM, A.: Coleitr ou Ici Naissunce du Joirr. Bibliotheque des lettres modernes. Par&,
1968.
MALLET-JORIS, F.: ,,Une vocaiion fémininrn. Cahiers Colette. n.* 1, Flammarion, 1977.