Caractérisation de matériaux argileux du site d`azaguie
Transcription
Caractérisation de matériaux argileux du site d`azaguie
J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 CARACTERISATION DE MATERIAUX ARGILEUX DU SITE D’AZAGUIE-BLIDA (ANYAMA, COTE D’IVOIRE) ET DETERMINATION DES PROPRIETES MECANIQUES DE PRODUITS CERAMIQUES. Koffi Léon KONAN 1,2, Joseph SEI1, Nibambin Siaka SORO1, Samuel OYETOLA1, Jean-Marie GAILLARD2, Jean-Pierre BONNET2 et Gabrielle KRA1. 1 Laboratoire de Chimie des Matériaux Inorganiques, Université de Cocody-Abidjan, UFR SSMT, 22 BP 582 Abidjan 22 (Côte d’Ivoire) 2 Groupe d'Etude des Matériaux Hétérogène (GEMH-ENSCI) Limoges, 47-73 avenue Albert Thomas, 87065 Limoges cedex (France) (Reçu le 07/12/2004 – Accepté après corrections le 27/12/2005) __________________________________________________________________________________________ Summary: Three samples of clay deposits at Azaguié-Blida (Anyama, Côte d’Ivoire) were studied by chemical analysis, x-ray diffraction and thermal analysis. Main crystalline phases identified are kaolinite, muscovite, quartz and minor phases are maghemite, goethite and anatase. Mineralogical compositions were also evaluated. Ceramic products (floor or wall tile, dimension 120 x 50 x 4,5 mm) heated at temperature ≤ 1150°C were manufactured and their mechanical properties were studied. It is pointed out that the addition of talc powder and sodium feldspar to the studied clays increase the mechanical resistance and decrease the porosity of the fired tile compositions. Key words: Clays of Côte d’Ivoire, characterisation, ceramic tile, mechanical properties. __________________________________________________________________________________________ I - INTRODUCTION Les travaux d’exploration entrepris par la Société pour le Développement Minier de la Côte d’Ivoire (SODEMI) ont relevé que la Côte d’Ivoire dispose de nombreux sites argileux [1]. Ces gisements sont exploités de façon empirique par des artisans ou des entreprises locales, tous confrontés à des difficultés dues essentiellement à l’insuffisance d’informations relatives aux caractéristiques des argiles contenues dans les sites répertoriés. En vue d'appréhender les potentialités de ces produits pour la réalisation de carreaux de sol ou de mur, trois échantillons de matériaux argileux provenant du gisement d’Azaguié-Blida (Anyama, Côte-d’Ivoire) ont été caractérisés et leurs comportements pendant un traitement thermique réalisé avec et sans ajout d’un produit fondant ont été étudiés. II – MATERIEL ET METHODE 2.1- Origine des argiles étudiées Les matériaux étudiés proviennent du site d’Azaguié Blida (Anyama, Côte d’Ivoire), précisément des rives du marigot "Gbo", (coordonnées géographiques 05°31,292 N et 04°05,407 O). Ce site se situe à 15 km d’Abidjan dans un bassin sédimentaire qui contient des formations argileuses notamment kaolinitique résultant d’une altération de type ferralitique sous climat tropical humide, des résidus de sable ferrugineux et des oxydes ou oxyhydroxydes de fer. Les trois échantillons dont les caractéristiques sont consignées dans le Tableau I, ont été prélevés dans trois puits distants de 250 mètres. Ils sont onctueux et peu plastiques au touché, avec une coloration variant du jaune clair au rouge pâle. Toutes les caractérisations ont été réalisées sur les produits tamisés à 100 µm. J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 Tableau I : Caractéristiques des échantillons prélevés : N. : Nord ; O. : Ouest Puits de prélèvement Puits 1 (Echantillon P1) Puits 2 (Echantillon P2) Puits 3 (Echantillon P 3) Coordonnées géographiques N. 05°31,144 O. 04°05,308 Profondeur Coloration de (Munsell prélèvement color [2]) (m) 3 Jaune clair (10YR8/6) 2,6 Rouge pâle (10YR6/2) 3,9 Jaune clair (10YR8/6) N. 05°31,234 O. 04°05,245 N. 05°31,103 O. 04°05,216 2.2 – Analyse chimique des argiles étudiées L’analyse chimique des poudres a été réalisée par fluorescence des rayons X à l’aide d’un générateur de type PHILIPS équipé d’une anticathode Ag et d’un analyseur de cristal LiF (2 0 0). 2.3- Diffraction des rayons X Les diagrammes de diffraction des rayons X ont été obtenus à l'aide d'un diffractomètre comportant un montage Debye-Scherrer, fonctionnant en réflexion, équipé d'un détecteur courbe INEL CPS 120 et d'une source de rayons X utilisant la radiation Kα du cuivre et opérant sous 40 kV et 30 mA. Le diffractogramme final de l’intensité en fonction de l’angle de Bragg est obtenu après calibration du détecteur dans le domaine angulaire 2θ d’environ 120°. Dans notre cas, le composé Na2Ca3Al2F14 est utilisé comme standard interne. 2-4- Analyse Thermiques Différentielle et Thermogravimétrique Le comportement thermique des matériaux argileux P1, P2 et P3 a été caractérisé entre 30 et 1200°C par analyses thermique différentielle (ATD) et thermogravimétrique (ATG) réalisées de façon simultanée à l’aide d’un appareil de type Setsy 24 SETARAM. 2-5-Préparation des échantillons frittés L’étude du comportement à la cuisson a été réalisée sur des carreaux de dimensions 120 x 50 x 4,5 mm3 traités à 1150°C. Le matériau, mis en suspension dans l’eau (masse d’eau/masse argile = 0,8) est finement broyé pendant 4 heures dans une jarre contenant des billes en alumine. La suspension ainsi obtenue est séchée dans une étuve à 105 - 110 °C, puis concassée à sec avant pressage dans un moule en acier. Après un premier pressage sous une pression uniaxiale de 5 MPa, les carreaux sont pressés à nouveau sous 20 MPa. Les carreaux crus sont ensuite frittés dans un four électrique dans les conditions suivantes : vitesse de montée = 3°C/min température maximale = 1150 °C temps de palier = 2 heures vitesse de descente = 10°C/min atmosphère = air statique. III. RESULTATS ET DISCUSSION 3.1 Analyse chimique Composition des argiles étudiées La composition chimique des différents échantillons, exprimée en % massique d'oxydes constitutifs, est donnée dans le Tableau II. Les principaux oxydes constitutifs sont SiO2 et Al2O3. Les oxydes de fer et de potassium y sont également présents en quantités importantes. Du titane et du magnésium ont été décelés, mais en quantité beaucoup plus faible. Le vanadium se trouve sous forme de trace dans certains échantillons. Tableau II : Composition chimique des différents échantillons exprimée en % massique d'oxydes constitutifs SiO2 Echantillon 58 P1 Echantillon 57,3 P2 Echantillon 48,8 P3 Al2O3 25,9 Fe2O3 4,6 K2O 3 TiO2 1 MgO V2O5 0,2 0,1 Na2O - 24,7 7,2 3,8 0,6 0,3 0,1 - 6,4 100,4 23,8 12,8 4 0,7 0,3 - - 8,8 99,2 36 P.F. 7,6 Total 100,4 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 3.2 Diffraction des rayons X Les diffractogrammes obtenus pour les trois échantillons de poudre tamisée à 100 µm (préparations non orientées) (figure 1) sont très voisins. Il ressort de l’identification des raies que trois phases minérales cristallisées riches en silice sont présentes dans les trois matériaux : - une phase micacée, caractérisée notamment par les pics observés pour les angles 2θ = 8,77°, 17,65° et 19,76° correspondant respectivement à d(001) = 10,07 Å ; d(002) = 5,02 Å et d(020) = 4,49 Å. La très faible largeur à mi-hauteur du pic observé pour l’angle 2θ = 8,77°, bien qu’étant aux petits angles, permet de penser qu’il s’agit de muscovite [3, 4, 5]. En effet, pour l’illite, la largeur du pic à mihauteur est plus importante, surtout aux petits angles, ce qui n’est pas le cas ici. - la kaolinite, caractérisée notamment par les pics observés pour les angles 2θ = 12,42° et 24,71° correspondant respectivement à d(001) =7,12 Å et d(002) = 3,60 Å ; - le quartz, caractérisé par les pics observés pour les angles 2θ = 20,69° et 26,67° correspondant respectivement à d(100) = 4,26 Å et d(101) = 3,34 Å. Les pics observés dans tous les 3.3 Analyses thermiques différentielle et thermogravimétrique Les thermogrammes obtenus sous air pour 100 mg de poudre tamisée au cours de montée en température à 5°C/min sont représentés sur la figure 2. Le pic endothermique de faible intensité observé vers 100 °C est associé à une perte de masse faible (≤ 1,5%). Il correspond au départ de l'eau hygroscopique. Entre 280 et 300°C, une bosse exothermique apparaît. Elle est concomitante à une perte de masse significative dans le cas de l’échantillon P3 qui présente la bosse exothermique la plus marquée. Afin d’identifier le phénomène à l’origine de cet effet, un échantillon P3 calciné 15 min à 300 °C avec une vitesse de montée de 5°C/min, a été caractérisé. L’influence de cette calcination est illustrée sur les courbes ATD et ATG (figure 3) et sur le diagramme de diffraction des rayons X (figure 4). Après calcination à 300°C, le pic exothermique à 298 °C n’est plus observé et la perte de masse entre 270 et 350°C est réduite de 1,5 à 0,75% de la masse initiale sans que la nature des phases cristallisées n’ait été affectée. échantillons pour les angles 2θ = 27,95° et 35,71° correspondant respectivement à d(205) = 3,19 Å et d(119) =2,51 Å, caractérisent la présence de maghémite (Fe2O3γ). Le pic caractéristique de l’anatase (2θ = 25,32° correspondant à d(101) = 3,51 Å) est aussi observé dans tous les échantillons. Les échantillons P1 et P3 contiennent également de la goethite (FeOOHα) dont les pics caractéristiques sont observés pour les angles 2θ = 21,12°, 36,57° et 33,12°, correspondant respectivement à d(110) = 4,20 Å, d(111) = 2,45 Å et d(130) = 2,70 Å. 37 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 ▼ ■ ● ▼ ● ■ ■ * ♦ ■ ■■ ● P1 ● ● ● ■ ● ● ● P2 ▼ ▼ ■ ● ■ ■ ● ♦ ■ ■ ■ ● ● ●● ● * ■ ● ● ▼ P3 ▼ ■ ● 10 ■ ■ * ●I ♦ ■ ■■ ● ● ● ● ■ *● * 20 30 40 Angle (°2θ) ● 50 ● 60 Figure 1 : Diagrammes de diffraction des rayons X des échantillons d’argile : ■ Muscovite ; ● kaolinite ; ▼ Quartz ; ♦ Maghémite ; * Goethite ; I Anatase. 38 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 ATG P1 ATD -2 518 984 -8 0 P2 0 577 -6 296 952 -6 4 2 P3 0 0 -2 -8 Température (°C) 0 0 -5 -5 Perte de masse (%) 298 336 10 5 117 -10 -10 -15 -15 -20 562 Signal (µV/S) 5 969 Figure 2 : Thermogrammes des échantillons analysés (vitesse de chauffe = 5°C/min) P3brut P3calciné 0 200 400 600 800 Température ( °C) 1000 25 30 35 40 Figure 4 : Influence d’une calcination à 300 °C de l’échantillon P3 sur les diffractogrammes : ♦ Maghémite ; * Goethite. 200 400 600 800 1000 1200 10 20 ♦ * Angle ( °2θ ) -6 518 -6 15 -4 571 104 -4 ♦ * -8 0 523 -4 -2 -2 -4 109 Signal (µV/S) 2 -2 P3 brut P3 calciné -6 -4 -6 4 -2 -4 575 109 0 Perte de masse (%) 2 0 952 4 -20 Figure 3 : Influence d’une calcination à 300 °C de l’échantillon P3 sur les courbes ATD/ATG Les pics caractéristiques de la maghémite et de la goethite ont toujours la même intensité relative. Le phénomène exothermique observé au dessous de 300°C semble donc devoir être attribué à la combustion des résidus organiques (0,75% de la masse initiale pour P3) et à la transformation de la maghémite (Fe2O3γ) en hématite (Fe2O3α) plus stable . Le pic endothermique visible à 336°C sur la figure 3, est lui aussi associé à une perte de masse. Il intervient dans un domaine de température où la décomposition endothermique de la goethite selon la réaction : 2 FeOOHα → Fe2O3α + H2O, est généralement observée [6]. Au dessus de 450°C, un phénomène endothermique, d'intensité très marquée est associé à une perte de masse importante. Il correspond à la déshydroxylation de la kaolinite [7] selon la réaction : Si2Al2O5(OH)4 → Si2Al2O7 + 2 H2O. (kaolinite) (métakaolin) A 575°C, un phénomène endothermique, de faible intensité sans aucun effet sur la courbe thermogravimétrique est observé. Il correspond à la transformation allotropique du quartz α en quartz β [8]. Entre 600 et 850°C environ, une dérive de la courbe ATD associée à une perte de masse progressive est observée. Ce 39 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 comportement est caractéristique de la déshydroxylation de la muscovite [9,10,11] selon la réaction : (Si3AlO10)Al2(OH)2K → (Si3AlO11)Al2K + H2O (muscovite) (muscovite déshydroxylée) Vers 975°C, un phénomène exothermique est associé à aucune perte de masse. Il est caractéristique de la réorganisation structurale du métakaolin qui fait l’objet de diverses interprétations dans la littérature entre autres : - formation d’une phase de structure spinelle et/ou nucléation de mullite [12, 13] ; - évolution de l’aluminium vers la coordinence VI la plus stable [14, 15] ; - extraction de silice amorphe [16]. Les travaux récents de SORO [17] indiquent qu’il s’agit d’une démixtion en deux domaines, l’un riche en alumine et l’autre riche en silice. Ce dernier phénomène est généralement affecté par la présence de Fe3+ dans le réseau du métakaolin ou de composé ferrique sur les surfaces des plaquettes; le pic exothermique s’élargit alors vers les basses températures [18]. 3-4- Composition minéralogique estimée D’après les résultats de la diffraction des rayons X, les minéraux cristallisés suivants sont présents dans l’ensemble des échantillons : - la kaolinite : Al2Si2O5(OH)4 - la muscovite : Al2Si3AlO10(OH)2 - le quartz : SiO2 - la goethite : FeO(OH) - la maghémite : Fe2O3γ - l’anatase : TiO2 A partir de la composition chimique et des pertes de masse, une estimation de la quantité de chacune des phases cristallines identifiées par diffraction des rayons X a été faite pour chaque échantillon en utilisant un logiciel de calcul de composition minéralogique mis au point par le Groupe d’Etude des Matériaux Hétérogènes de l’Ecole Nationale Supérieure de Céramique Industrielle de Limoges (GEMH-ENSCI). Ce logiciel de calcul utilise la principale relation T(a) = ∑MiPi(a), où T(a) représente la teneur (%) en oxyde constitutif de l’élément chimique « a » et Mi la teneur (%) en minéral « i » dans l’échantillon. Pi(a) correspond à la proportion d’oxyde de l’élément « a » dans le minéral « i ». Les calculs ont été réalisés en considérant les formules idéales indiquées précédemment et en ne prenant pas en compte la possible présence de Fe3+ dans le réseau des phyllosilicates. Les résultats de cette estimation sont reportés dans le Tableau III. Tableau III : Composition minéralogique estimée (exprimée en % massique) des échantillons P1 P2 P3 Kaolinite Muscovite Quartz Goethite Maghémite Anatase Autres 41 31 26 25 32 34 27 28 22 4 2 7 1 6 6 1 <1 <1 <1 <1 <4 3-5 Etude des produits frittés Après frittage, les carreaux ont tous une bonne cohésion et ne présentent pas de fissures ou de boursouflements visibles. Leur couleur rouge due à la présence de Fe3+ s’est intensifiée. Le frittage des céramiques silicatées fait généralement intervenir un flux visqueux qui, en favorisant la consolidation des grains et la fermeture des pores, entraîne un gain au niveau des propriétés mécaniques du produit [19,20]. Dans les carreaux, il est d’usage d’ajouter à l’argile et au sable des fondants (composés faisant baisser la température de fusion du mélange). Ces composés, le plus souvent riches en ions alcalins (Na, K, Li), favorisent la densification en augmentant l’importance du flux et en diminuant la viscosité de celui-ci. Des essais ont donc aussi été réalisés sur des carreaux d’argile P1, P2 ou P3 40 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 contenant du feldspath sodique (société CERADEL, France) et du talc 2C (talc de LUZENAC, France). Les compositions chimiques du feldspath sodique et du talc 2C sont consignées dans le Tableau IV. Tableau IV : Compositions chimiques du feldspath sodique et du talc 2C Feldspath sodique Talc 2C SiO2 Al2O3 MgO Na2O K2O Fe2O3 CaO P.F 68,80 19,47 0,06 9,1 0,7 0,19 1,73 …. 46,4 9,0 31,9 …. …. 1,7 1,2 9,5 En présence de kaolin, le talc, silicate de magnésium de formule structurale idéale Mg3Si4O10(OH)2, permet d’accélérer le frittage (quantité comprise entre 2 et 4%) [21] . Il a aussi tendance à former de la cordiérite (Mg2Al4Si5O18) [22] qui peut contribuer à améliorer la résistance mécanique de l’échantillon [23,24]. Le feldspath sodique (albite) de formule structurale (NaAlSi3O8) est assez courant. Il fond de façon congruente vers 1119°C et forme un eutectique avec le quartz au dessus de 1060°C [25]. A cette température, le matériau ayant une viscosité intermédiaire entre l’état solide et l’état liquide, peut permettre un réarrangement de la porosité. La composition retenue pour tester l’influence de ces ajouts est 80% en masse de matériau argileux, 17% de feldspath sodique et 3% de talc 2C. Les variations de dimensions ainsi que la perte de masse ont été déterminées sur les carreaux refroidis après frittage. La porosité ouverte a été estimée en utilisant la méthode par imprégnation d'eau sous vide. Elle est calculée à partir de la relation suivante : Ph − Ps Po = x100 Ph − Pi avec Po la porosité mesurée en % , Ps le poids de l'échantillon sec, Ph le poids de l'échantillon rempli d'eau et Pi la poussée d'Archimède subie par l’échantillon imprégné lorsqu’il est plongé dans l’eau. La résistance mécanique des carreaux frittés a été déterminée à partir d’essai en flexion trois points [26]. La contrainte limite en traction σ a été calculée à partir des efforts enregistrés par la machine de flexion au moment de la rupture en utilisant la relation σ = 3.F.E2 , 2.l.e où F représente l’intensité de la force appliquée, E la distance entre les deux supports du carreau, l la largeur du carreau et e son épaisseur. Les contraintes limites ainsi déterminées sont rassemblées dans le Tableau V. Les valeurs moyennes sur dix essais de résistance mécanique obtenues pour les carreaux réalisés à partir d’argile seule (C0) sont très faibles, inférieures à celle généralement attendue (R = 30MPa) [27] et la porosité ouverte reste importante. L’échantillons P3 dont la teneur en fer est la plus importante (12,8%), possède la résistance mécanique la plus élevée. Ces argiles pauvres en éléments fondants possèdent une faible aptitude au frittage à T ≤ 1150°C. Tableau V : Caractéristiques des carreaux réalisés à partir d’argile seule (C0) et de mélange contenant 80 % argile, 17% de feldspath sodique et 3 % de talc 2C (C1). Puits 1 Puits 2 Puits 3 Origine de (Echantillon (Echantillon (Echantillon l’argile P1) P2) P3) Type de C0 C1 C0 C1 C0 C1 mélange Résistance 4,5 18 6,2 16,1 8,8 14,4 mécanique (MPa) Retrait sur 2,7 5,4 2,4 6,0 6,1 8,6 la longueur (%) Retrait sur 2,8 5,7 2,4 6,2 6,2 8,7 la largeur (%) Porosité 35,7 27,7 40,3 25,9 34,7 26,2 ouverte (%) Perte de 6,5 5,7 5,8 5,3 8,6 7,2 masse (%) L’ajout de fondant dans les mélanges conduit à une importante augmentation de la résistance mécanique à la rupture pour les trois types d’échantillons (C1). A 1150°C, le flux visqueux induit par la 41 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 fusion des additifs est déjà assez développé pour avoir une conséquence sur la cohésion et sur la densification des carreaux. Il est à noter que la résistance en traction varie alors comme la teneur en kaolinite du produit argileux. La mullitisation de la kaolinite étant bien avancée à 1150°C [28], cette corrélation suggère d’impliquer aussi la mullite dans l’amélioration des propriétés mécaniques. Les propriétés de ces produits sont encore faibles pour une application dans le domaine des carreaux ; seule l’utilisation d’une température de frittage plus élevée ou d’une très grande vitesse de chauffe (qui favorise à la fois la densification et la mullitisation) [28] pourrait permettre d’utiliser les argiles P1, P2 et P3 pour ce type d’application. IV. CONCLUSION L’étude par diffraction des rayons X, analyse thermique différentielle et thermogravimétrique de trois échantillons de matériaux argileux du gisement d’Azaguié-Blida (Anyama, Côte – d’Ivoire) a permis d’identifier les principales phases minérales cristallisées constitutives comme étant la kaolinite, la muscovite et le quartz. La maghémite, la goethite et l’anatase étant les seules phases minérales minoritaires détectées. Les propriétés mécaniques des carreaux confectionnés, avec ou sans fondant, à partir de ces matériaux argileux ont été étudiées. Même si l’ajout de talc et de feldspath sodique permet d'augmenter significativement la résistance mécanique à la rupture en traction et de diminuer fortement la porosité ouverte des produits cuits, ces matériaux argileux sont trop réfractaires (entre 26 et 41% de kaolinite, 25 et 34% de muscovite, 22 et 27% de quartz) pour permettre de réaliser des carreaux de sol à une température de frittage T ≤ 1150°C. L’utilisation de fondant organique, riche en éléments alcalins telles les cendres de fougère comme ajout serait une voie à explorer bien que cette méthode n’ait jamais été utilisée industriellement. BIBLIOGRAPHIE [1] EMERUWA E. ; Les matières premières à usage céramique de la Côte-d’Ivoire, bilan et perspectives Rapport SODEMI n° 634, mars 1993 [2] MACBETH Munsell® Soil Color Charts. Division of Kollmorgen Corporation 2441 North Calvert Street Baltimore, Maryland 21218 Edition 1975 [3] BRINDLEY G. W., BROWN G., Crystal structures of clay minerals and their Xray identification, Miner. Soc. Monograph n°5 p. 276 ; 1980 [4] BOUCHET A., MEUNIER A. et SARDINI P. ; Minéraux argileux : Structure cristalline, identification par diffraction de rayons X ; Bull. Elf Explor. Prod., Mém. 23, Pau; 2000 [5] REYNOLDS R. C.; Interstratified clay minerals-In : Brindley G.W. and Brown G. (eds.) : Crystal structures of clay minerals and their X-ray identification–Mineral. Soc. London n°5 p249-303 1980 [6] PASCAL P. ; Nouveau Traité de Chimie minérale. Tome XVII Masson et Cie, p.667 1967 [7] BELLOTTO M., GUALTIERI A., ARTIOLI G., CLARK S. M.; Kinetic study of the kaolinite-mullite réaction sequence. Part I : Kaolinite dehydroxylation, Phys. Chem. Miner., vol. 22 p 207-214 1995 [8] JOUENNE C. A. ; Traité de céramiques et Matériaux Minéraux ; Edition Septima, Paris (1990) [9] MAZZUCATO E., ATIOLI G., GUALTIERI A. High temperature dehydroxylation of muscovite-2M1: a kinetic study by in situ XRPD, Phys. Chem. Minerals, Vol. 26, 375-381 1999 [10] MACKENZIE R.C., MILNE A.A. The effect of grinding on micas.I. muscovite, 178-185, 1953 [11] SCHOMBURG J., ZWAHR H. Thermal differential diagnosis of mica mineral group. J. Thermal Analysis, (1997) 48; 135139 [12] Srikrishna K., Thomas G., Martinez R., Corral M. P., De Aza S., Moya J. S. Kaolinite-mullite reaction series : a TEM study, J. Mater. Sc., (1990) 25; 607-612 42 J. Soc. Ouest-Afr. Chim. (2006) 21 ; 35-43 [13] GUALTIERI A., BELLOTO M., ARTIOLI G., CLARK S.M.,Kinetic study of the kaolinite-mullite reaction sequence. Part II : mullite formation, Phys. Chem. Miner, (1995) 22, 215-222 [14] SANZ J., MADANI A., SERRATOSA J. M., MOYA J. S., AZA S.Aluminium 27 and silicon 29 magic angle spining nuclear magnetic resonance study of the kaolinitemullite transformation, J. Am. Ceram. Soc., (1988) 71, C418-C421 [15] PASK J. A., TOMSIA A. P.; Formation of mullite from sol-gel mixture and kaolinite, J. Am. Ceram. Soc., (1991) 74; 67-73 [16] LEE S., KIM Y. J., MOON H.-S.; Phase transformation sequence from kaolinite to mullite investigated by an energy-filtering transmission electron microscope, J. Am. Ceram. Soc., (1999) 82 ; 2841-48 [17] SORO N.S ; Influence des ions fer sur les transformations thermiques de la kaolinite Thèse de l’Université de Limoges 2003. [18] SORO N.S., ALDON L., FOURCADE O. J., JUMAS J. C., LAVAL J. P., BLANCHART P.; Role of iron in mullite formation from kaolins by Mössbauer spectroscopy and rietveld refinement. J. Am. Ceram. Soc., (2003) 86 n° 1; 129-134 [19] ANSEAU M. R ., DELETTER M. AND CAMBIER F.; The separation of sintering mechanisms for clay based ceramics. Trans. J. Br. Ceram. Soc. (1981) 80; 142-146 [20] CAMBIER F., ILUNGA N’DALA, ANSEAU M. R. AND DELETTER M.; Analysis of the influence of additives on the sintering of kaolinite based ceramics. Silicates Industriels, (1984) 11-12; 219-225 [21] GROSJEAN P.; The contribution of the fast Once Fring of Earthenware bodies. Part 2 : Search of the optimum Body. Interceram n°3 p 20-22, 1985 [22] RASCH H.; Some effects of temporary liquid phases, firing conditions and raw materials. Ber. Dt. Keram. Ges. (1991) 68 n° 7 – 8; 338-345, [23] GROSJEAN P. ; Contribution à la monocuisson rapide de faïences au talc. L’industrie céramique n°779-780-781, 1984 [24] BLANC J.J. ; La vitrification de pâtes alcalines dopées par le talc. L'industrie céramique n°802, p 104-107 ; 1986 [25] LEVIN E.M., ROBBINS C.R., McMURDIE H.F. ; Phase diagrams for ceramists. The American Ceramic Society Inc., (1sted.) 1964. [26] ALLIPRANDI G. ; Matériaux réfractaires et céramiques techniques – I. Eléments de céramiques et de technologie, Editions Septima Paris, p 11-20 ; 1979 [27] ZANZOUN H. ; Optimisation des étapes d’élaboration des céramiques à partir d’argiles du maroc. Thèse de doctorat 3ème cycle de l’université d’Ain Chack Casablanca, 1995 [28] CASTELLIN O. ; Influence de la vitesse de traitement thermique sur le comportement d’un kaolin : application au frittage rapide. Thèse de l’Université de Limoges ; 2000. 43