Confusion mentale (63a)

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Confusion mentale (63a)
Confusion mentale (63a)
Docteur Olivier MOREAUD
Octobre 2004
Objectifs :
Connaître les situations favorisant la confusion mentale afin de prévenir son apparition
Savoir reconnaître la confusion mentale et mettre en œuvre les mesures appropriées
Pré-requis :
Urgences générales et neurologiques (troubles métaboliques, toxiques, urgences cardiovasculaires, AVC, épilepsie, infections du système nerveux, etc…)
Résumé :
La confusion mentale est fréquente et grave. Elle résulte surtout d’affections
métaboliques et toxiques, mais toute affection générale ou neurologique est susceptible
de la favoriser. Sa prévention est essentielle et passe par la reconnaissance des
situations à risques (sujet âgé, démence sous-jacente, polypathologie, polymédications
et/ou prise de toxiques, stress physiologique et/ou psychologique), en particulier en
milieu hospitalier. Son traitement est surtout celui de l’affection causale ; l’usage des
psychotropes chez un malade confus doit être limité et les indications soigneusement
pesées.
Mots-clés :
Confusion mentale, urgences, démence, delirium.
Références :
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Confusion et démences chez le sujet âgé, Collège des Enseignants de Neurologie,
2è cycle des études médicales, Enseignement de neurologie. Revue Neurologique
(pp. 229-247). Masson. 2003.
Delirium. Brown TM & Boyle MF, British Medical Journal, 2002, 325, 644-647.
Exercices :
1. Définition et diagnostic positif
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Urgence médicale :
o Grave en elle-même : troubles végétatifs
o Terrain fragile : âge, polypathologie, polymédication, démence sous-jacente
o Affections causales souvent graves : troubles métaboliques
-> diagnostic et traitement urgents : risque vital
-> prévention ++
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Désordre global du fonctionnement psychique :
o troubles de la conscience : diminution de la prise de conscience au milieu
extérieur (obnubilation), hypo ou hyper-réactivité aux stimuli extérieurs,
troubles de l’attention
o troubles de la vigilance : inversion du rythme veille-sommeil, voire insomnie
nocturne totale ; souvent cauchemars et hallucinations
o distorsion des perceptions : illusions, hallucinations, onirisme, fausses
reconnaissances et perplexité ; distorsion de la réalité, impression de
déréalisation, générant agitation et agressivité
-> désordre cognitif global qui touche toutes les fonctions cognitives (mémoire, langage
avec incohérence du discours et troubles de l’écriture, praxies, capacités de raisonnement et
de planification, capacités d’identification des objets et des personnes, orientation dans le
temps et dans l’espace). Vouloir tester les fonctions cognitives de façon détaillée au cours
d’une confusion est illusoire.
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Mode évolutif :
o Début habituellement aigu (quelques heures à quelques jours)
o Fluctuations de la symptomatologie au cours de la journée
o Régresse en quelques jours avec une prise en charge appropriée
o En l'absence de prise en charge, apparition de signes végétatifs : hyperthermie,
tachycardie, déshydratation, éventuellement troubles digestifs.
2. Diagnostic différentiel
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Syndrome démentiel :
o Durée plus prolongée (> 6 mois)
o Pas de modifications de la vigilance et d’obscurcissement de la conscience
o Un épisode confusionnel peut révéler un syndrome démentiel jusque là plus ou
moins ignoré -> ré-évaluation du patient à distance de l'épisode confusionnel.
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Atteinte cérébrale focale :
o Limite diagnostic différentiel/diagnostic étiologique par exemple confusion de
la phase initiale d’un ramollissement bilatéral dans le territoire des artères
cérébrales antérieures ou postérieures, ou des artères paramédianes du
thalamus.
o Troubles du langage ou du discours : incohérence du discours des lésions
sous-corticales gauches (caudées) hémisphériques droites (frontales), jargon
de l’aphasie de Wernicke.
o Délires limités, monothématiques par exemple délire spatial après lésion
hémisphérique droite.
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Troubles psychiatriques :
o Schizophrénie avec incohérence du discours
o Mélancolie stuporeuse
o Etat maniaque
3. Aspects étiologiques
3.1. Facteurs favorisants
Nombreux et souvent intriqués :
• Age
• Terrain somatique fragilisé, notamment par une pathologie chronique : insuffisance
cardiaque, respiratoire, rénale ou hépatique, par exemple
• Altération préexistante des fonctions cognitives : démence (Alzheimer ou autre)
• Prise de molécules potentiellement toxiques : médicaments, alcool
• Evénement physiologiquement et/ou psychologiquement stressant : hospitalisation,
intervention chirurgicale, événement de vie difficile (deuil, passage en maison de
retraite, etc.).
3.2. Etiologies
Nombreuses et souvent multiples chez un même patient -> évaluation étiologique, clinique et
paraclinique systématique.
Tableau : étiologies de la confusion mentale
(O. Moreaud)
Orientation diagnostique
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Recherche des antécédents : maladies générales (diabète notamment) ou d’organes
(cœur, poumons, foie, rein...), pathologies du système nerveux (épilepsie ++,
antécédent d’accident vasculaire cérébral, maladie de Parkinson, notion d’altération
cognitive ou de maladie d’Alzheimer, ...).
Prises médicamenteuses et habitudes toxiques, en s’attachant à rechercher toute
modification récente (ordonnances ++, sevrage,...).
Examen clinique général ++ à la fois à la recherche des manifestations somatiques de
la confusion et en vue d’un diagnostic étiologique (par exemple signes en faveur d’une
ischémie myocardique ou d’une embolie pulmonaire, recherche de signes de cétose,
recherche d’un processus infectieux, ...).
Examen neurologique ++ à la recherche de signes neurologiques focaux (en faveur
d’une atteinte encéphalique lésionnelle), de mouvements anormaux (myoclonies d’un
état de mal épileptique ou d’une anoxie, tremblements, crampes et fasciculations d’un
trouble métabolique ou toxique...), d’un syndrome méningé.
Systématiquement glycémie capillaire et ECG dans le même temps que l’examen.
Dès que possible ionogramme (natrémie, calcémie, fonction rénale), fonction
hépatique, numération-formule, TSH, VS, gazométrie, recherche de toxiques dans le
sang et les urines, radiographie pulmonaire, bandelette urinaire, hémocultures.
Systématiquement TDM cérébrale (surtout si focalisation) et EEG (surtout en
l’absence d’étiologie évidente : état de mal ++, parfois non convulsif).
Ne pas hésiter à pratiquer une ponction lombaire, même en l’absence d’élément
clinique patent pour une atteinte méningée (après avoir éliminé une lésion focale)
(herpès ++).
4. Aspects thérapeutiques
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Traitement de la cause chaque fois que possible.
Traitement symptomatique systématique : réhydratation, apport calorique suffisant,
vitaminothérapie B1, B6 et PP à bonnes doses, arrêt de tout traitement médicamenteux
non indispensable, mesures visant à rétablir un rythme veille-sommeil (lever avec si
possible exercice physique dans la journée, luminosité suffisante dans la journée/peu
de lumière la nuit, etc.). En cas d’agitation et de déambulation avec risques de
blessure, une contention physique peut être nécessaire transitoirement ; si une sédation
médicamenteuse s’impose, on peut utiliser carbamates, benzodiazépines ou
neuroleptiques, en respectant des règles de prescription simples : utiliser de petites
doses, augmenter progressivement les posologies, traiter le moins longtemps possible,
surveiller les effets secondaires, utiliser une seule molécule à la fois.