Souvenir d`enfance à la forge quai de Saint

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Souvenir d`enfance à la forge quai de Saint
Souvenir d’enfance à la forge quai de Saint-Omer à Dunkerque
Cécile Dekooninck
2000
Avec Thérèse, ma sœur jumelle, nous étions les premières petites filles de Mr et Mme
Ildephonse Lecointe, mes grands-parents maternels.
Notre grand père était forgeron et maréchal ferrant, quai de Saint-Omer à Dunkerque,
et nous étions toujours impressionnées par le grand feu, les flammes énormes activées par un
grand soufflet suspendu au plafond ; on y gardait des braises rouges pour y mettre les fers et
les façonner sur une enclume à la forme des sabots des chevaux. Le fer était différent pour
chacun des pieds mais aussi selon les chevaux.
Le maréchal ferrant était également le soigneur des chevaux malades notamment
pour la maladie des pattes qui sont les parties les plus sensibles de l’animal.
Notre grand père et son fils Alfred portaient un grand tablier de cuir les protégeant
des étincelles et des projections de métal en fusion.
Ils posaient fréquemment à l’époque des cerclages en acier sur les roues en bois des
chariots ; les lourds cercles de fer, préalablement cintrés et soudés étaient chauffés à blanc
avant d’être posés sur la roue. Ils étaient alors très vite refroidis pour que le bois ne brûle
pas et que le fer serre à la roue en se contractant.
Maman aidait à immobiliser la roue avec de grandes tenailles.
Quant à nous, enfants, c’étaient les chevaux qui nous fascinaient, ils étaient (presque)
toujours très gentils.
Notre grand père nous mettait souvent sur le dos des chevaux, nous en étions très
fières.
Les deux petites filles à la forge
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Suivant l’arrêté en date du 5 avril 1912, Mr le Sous Préfet de Dunkerque avait
autorisé l’emploi, dans la forge, d’une étampeuse à vis de 50 mm de diamètre :
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Quai de St Omer, le grand-père et son fils Alfred au travail (1920)
Ce que les chevaux n’appréciaient guère, c’était lorsque notre grand-père leur retirait
les anciens fers ainsi que la corne usée.
Pour ce travail, la patte était attachée sur une barre horizontale et tenue avec une
grosse lanière de cuir. Quand le travail était terminé, les employés venaient rechercher les
chevaux. Pour eux, c’était fini, ils étaient contents et soulagés car il leur était pénible d’être
attachés et de rester sur trois pattes.
Ensuite, nous allions auprès de notre grand-mère pour gouter et attendre papa qui
venait nous chercher avec maman pour rentrer à la maison.
Comme papa était en bicyclette, il nous installait l’une sur la selle, l’autre sur le cadre
et nous rentrions tous les quatre, contents, surtout nous en tant que spectatrices, un peu
craintives et beaucoup inutiles, nous avions le sentiment d’avoir participé à quelque chose, à
l’époque, hors du commun.
Le métier de maréchal ferrant était physiquement éprouvant ; il demandait de la force
et s’exerçait dans des conditions difficiles.
A l’époque, les femmes se rencontraient chez l’épicier et les hommes chez le maréchal
ferrant.
De nombreux métiers doivent leur disparition à l’évolution des techniques. Les
maréchaux ferrants ont été victimes de la mécanisation du matériel agricole et de l’abandon
du cheval comme moyen de traction et de locomotion.
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Toute la famille autour du grand-père, devant la forge, années 1920
Outils garnissant la forge
Le foyer ou l’on fait chauffer le fer. Il peut être simple ou double.
L’auge en pierre ou en fonte, qui contient l’eau.
La fosse, trou pratiqué sous le foyer pour recevoir le charbon.
Le soufflet, en acier ou en tôle, à double vent, qui par la tuyère, envoie l’air dans le
fond ou sur le coté du foyer.
Deux tisonniers, l’un droit, l’autre crochu, pour attiser le feu et retirer le mâchefer.
La pelle pour prendre le charbon.
L’écouvette, long balai pour asperger d’eau le charbon dans le foyer.
Deux tenailles à mettre au feu, dites “lopiniéres" servant à tenir le lopin (pièce de
métal) dont une goulue et l’autre étroite.
Huit tenailles à main, dont quatre goulues pour faire le lopin et forger la première
branche, et quatre étroites, pour forger la seconde branche et ajuster le fer
L’enclume sur laquelle on forge et on ajuste.
La bigorne, petite enclume à 2 cornes sur laquelle on rectifie le fer.
Deux ferretiers, l’un pour forger, l’autre, plus petit pour ajuster.
Trois marteaux, l’un pour frapper devant, l’autre plus petit, dit « à panne gros » ou
« à main» pour faire les lopins, bigorner, et finir le fer, le troisième dit « à panne moyen", ou
« à déboucher ».
Les étampes pour étamper les fers (y percer des trous).
Quatre tranches, une à chaud, une à froid, une pour éponges arrondies, et enfin une
tranche anglaise.
Les poinçons pour percer et calibrer les contre-perçures, pour percer, calibrer et
fraiser les mortaises, facultativement, des machines à percer et à tarauder.
Le billot, sur lequel on contre-perce.
L’établi, destiné à desservir la forge.
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L’étau pour limer et façonner le fer.
Le seau pour refroidir les fers les tranches, les étampes et les poinçons.
Le casier, étagère en bois à nombreux compartiments, où sont placés les fers de
rechange.
Les mandrins pour agrandir des « œil » d’outils (trou ménagé dans un outil pour
introduire le manche).
Le forgeron change le fer à cheval
Matières premières
Les matières premières utilisées à la forge sont :
- le fer et l’acier,
- le charbon,
- les clous.
Le fer
On emploie en maréchalerie :
- les deferres et la ferraille pour fabriquer le lopin bourru.
- le fer puddlé en barres dit « fer maréchal ».
- le bon fer ou fer doux présente à la cassure des lamelles aplaties, fibreuses, mêlées
de petits grains de couleur bleuâtres ; frappé à faux sur une enclume, il plie et ne casse pas.
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2000
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