André Marie Tala , « J`avais gagné mon procès pour plagiat contre

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André Marie Tala , « J`avais gagné mon procès pour plagiat contre
André Marie Tala , « J'avais gagné mon procès pour plagiat contre James Brown sans m'enrichir
Extrait du AEUD.INFO : L'action prend corps
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André Marie Tala , « J'avais
gagné mon procès pour
plagiat contre James Brown
sans m'enrichir
- HISTOIRE ET CULTURE - Actualité des artistes -
Date de mise en ligne : jeudi 31 juillet 2008
AEUD.INFO : L'action prend corps
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André Marie Tala , « J'avais gagné mon procès pour plagiat contre James Brown sans m'enrichir
Le festival « Nuits d'Afrique » de Montréal, a accueilli dernièrement le Camerounais André
Marie Tala parmi tant d'autres artistes africains invités. Un chanteur mal voyant, promoteur
du Ben Skin, un genre musical dont les racines proviennent des montagnes de l'ouest du
Cameroun, sa région natale. Quarante ans de vie musicale marqués notamment par le fait
d'avoir été plagié par James Brown
Peu bavard, profondément attaché à ses racines africaines, le musicien qui vit entre Paris et Douala, s'est
longuement confié à Afriqu'Echos Magazine (AEM) .
Merci de nous recevoir, André Marie Tala, comment est née la passion de la musique chez vous ?
Je pense que tous les musiciens ont la même histoire. On est passionné dès l'enfance. Dans mon cas, j'avais autour
de moi des gens qui aimaient la musique notamment ma grand-mère et mon oncle, ce sont eux qui m'ont influencé
même si eux n'ont jamais pratiqué la musique en tant que professionnels.
Après 40 ans de carrière musicale, comment se présente votre discographie ?
À ce jour, j'ai signé une vingtaine d'albums. Je continue de sortir des disques, mais pas tous les ans. En plus, la
piraterie qui est devenue un phénomène majeur en Afrique et particulièrement au Cameroun n'incite pas à faire
davantage. En ce moment j'ai un album en promotion qui est intitulé « Source des Montagnes ». C'est un album
essentiellement orienté vers du Ben Skin et qui compte 11 titres. Ce sont des titres repris en instrumental mais en
réalité, il y a une dizaine de chansons.
Quels sont les artistes qui ont collaboré à cet album ?
Maman Keita de la Guinée Conakry, Billy Kom, l'un des meilleurs guitaristes camerounais qui vit à Paris, Olivier
Mahop, en réalité Olivier Marchand, mais comme il a épousé une de nos soeurs du Cameroun, on lui a donné le nom
de Mahop ; à la basse, j'ai fait appel à l'ancien chef d'orchestre de Manu Dibango Nelle Ekwabi. Il y a aussi Brice
Wassy avec qui j'ai co-arrangé l'album et qui a aussi joué de la batterie et Don Dieu a fait les claviers.
Quels sont les albums ou les chansons qui auraient contribué davantage à votre rayonnement international
?
Généralement, je me fie aux chansons que les gens demandent puisque chacun a sa sensibilité, ses goûts et ses
couleurs musicales. Il m'est difficile de parler des albums que le public aime, par contre je peux vous citer des
chansons que les gens me réclament souvent : « Black Woman », « Sikati », « Je vais à Yaoundé »...
Vous êtes l'initiateur du Ben Skin, ce genre musical que nous dansions naïvement dans notre enfance au
quartier Bagangté de New Bell à Douala, lieu mythique qui porte un carrefour du même nom, à un jet de
pierres de votre domicile, comment vous était venue l'idée d'exploiter cette musique traditionnelle des
Bamilékés dansée jadis par des dames âgées lors des fêtes ou des cérémonies funéraires ?
Mon idée était de trouver un élément fédérateur chez les jeunes qui, jusqu'à présent ont tendance à n'aimer que ce
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qui vient d'ailleurs, plus précisément de l'Occident. Et pourtant, l'Africain pour qu'il puisse s'épanouir, a besoin de sa
tradition, de sa culture. Mais il y a encore des intellectuels qui croient que le salut du continent passerait par le
mimétisme culturel. C'est complètement faux, et c'est ce qui m'a poussé à valoriser le Ben Skin afin de montrer à la
jeunesse que près d'eux, il y a des richesses à valoriser et dont ils ignorent l'importance. C'est un moyen de les aider
à s'épanouir en préservant leur patrimoine et leur culture musicale à l'exemple du Ben Skin qu'ils ont à portée de
mains.
Vous n'êtes pas à votre première expérience des « Nuits d'Afrique », comment allez-vous vous y prendre
pour surprendre malgré tout ?
La réaction du public à un concert n'est toujours pas prévisible même si tous mes passages ont été un grand succès
aussi bien au Balattou qu'au Kola Note. C'est au moins la troisième fois que je reviens dans cette belle métropole
francophone d'Amérique du Nord pour les Nuits d'Afrique . À chaque fois ça a été un bonheur car le public
montréalais est un public charmant. Touré a eu une idée géniale de lancer ce festival, un forum qui permet la
connaissance de l'Afrique telle qu'on y vit avec sa culture, sa diversité. J'espère que cette fois-ci encore, ce sera la
même ferveur.
Vous aviez été plagié dans les années 1970 par James Brown, cette histoire a été marquée par un procès
retentissant qui avait duré plusieurs années, reparlez-nous un peu de cette affaire...
Le titre de l'album plagié est « Hot Koki ». En 1975 au moment où mon 33 tours sortait, James Brown était au
meilleur de sa forme. Comme par hasard, il se trouvait en tournée au Cameroun. Je suis allé vers lui pour lui
remettre un exemplaire pour qu'il sache ce que nous faisions comme musique au Cameroun. C'est par la suite que
j'ai été surpris de constater plus tard qu'il avait interprété ma chanson dans la même gamme, la même introduction,
le même corps du morceau sur le plan rythmique et les mêmes refrains. Il a juste adapté les paroles en anglais. Voilà
pourquoi je suis allé, tout de suite, à Paris où, avec mon éditeur, nous avons pris des avocats pour attaquer James
Brown aux États-Unis. Au bout de 4 ans, j'ai gagné le procès. C'est cela le côté historique. Je n'avais pas gagné une
fortune car à l'époque du président Jimmy Carter, le dollar n'était pas fort. En plus, quand un procès dure quatre ans
au cours desquels vous demandez les services de plusieurs avocats, je dirais que ce sont ces avocats, pour la
plupart, qui se sont sucrés. Ma victoire était essentiellement morale et médiatique.
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« Sans la musique, il n'y aurait pas de radio dans les maisons, dans les voitures... il n'y aurait pas de télévision »
Sur la situation en Afrique qui est loin d'être reluisante, trouvez-vous que les artistes s'engagent comme ils
devraient ? Pensez-vous aussi que la musique peut réellement contribuer au développement du continent ?
Les premiers à dénoncer les maux ou les fléaux de notre société sont les artistes. C'est soit par le cinéma, soit par la
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chanson ou la comédie et cela ne date pas d'aujourd'hui. La musique est un vecteur non négligeable du
développement en Afrique sur le plan économique. Généralement, on se limite à voir l'aspect concert, on oublie
souvent les autres produits dérivés. Je crois que sans la musique, il n'y aurait pas de poste radio dans les voitures,
les postes combinés que chacun de nous écoute chez lui. Si on écoute la radio, c'est avant tout parce qu'il y a la
musique. Si la musique n'existait pas, je suis convaincu qu'on ne vendrait pas assez de postes radio, on n'installerait
pas la radio dans une voiture, il n'existerait pas de hauts parleurs dans les super marchés pour diffuser la musique et
tous les autres produits dérivés. La télévision n'y échappe pas. Parce que la télévision ne vit que parce qu'il y a la
musique. Chacun de nous a un téléviseur chez lui, c'est en grande partie parce qu'on aimerait écouter et voir les
artistes chanter et danser etc.
Les gens savent, ou du moins doivent comprendre, que si les Beatles à eux tout seuls ont ramené des devises en
Angleterre plus que toutes les industries confondues, cela veut dire que la musique est quelque chose
d'extrêmement important. Malheureusement, en Afrique, nous n'avons toujours pas compris que c'est essentiel de
travailler pour faire évoluer la musique au même titre que n'importe quel domaine ou industrie.
Les chanteurs Lapiro de Mbanga ainsi que Jo La Conscience sont incarcérés pour des motifs jugés
fallacieux par beaucoup, avez-vous une position sur cette affaire ?
Je souhaite vivement que les autorités camerounaises relâchent ces musiciens puisque le Cameroun est un pays de
droit et de liberté. Si mes confrères musiciens ont commis un délit, il faut les juger. Mais si au contraire, à travers
leurs chansons et leur engagement, ils n'ont fait que dénoncer certains fléaux de notre société, j'estime qu'il faut les
relâcher simplement afin qu'ils retrouvent leur liberté si chère à la personne humaine.
Source : AME
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