(Sortie du territoire et mesures pr\351ventives
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(Sortie du territoire et mesures pr\351ventives
Adresse : 64 rue Paul Verlaine, 69100 VILLEURBANNE -Tél. : 04 78 03 33 63 / Mail : [email protected] www.fiji-ra.com La prévention des enlèvements internationaux et l’apport de la loi du 9 juillet 2010 LETTRE THEMATIQUE N°23 I) Le contexte Le risque d’enlèvement d’enfants est particulièrement élevé lors du franchissement des frontières. Un des parents peut saisir l’occasion d’un voyage à l’étranger pour retenir l’enfant et l’empêcher de regagner le lieu de sa résidence habituelle. Si le déplacement de l’enfant excède le cadre de vacances et consiste en un changement de sa résidence habituelle, l’enlèvement est caractérisé et le parent encourt des sanctions pénales allant jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. La nécessité d’adopter un cadre juridique permettant de prévenir les risques d’enlèvement revêt un aspect primordial. Les moyens permettant de dissuader un enlèvement parental sont nombreux, pourtant beaucoup présentent une efficacité limitée. Les conditions posées par les États pour délivrer des documents de voyages et autoriser la sortie du territoire de l’enfant mineur et les mesures préventives judiciaires et administratives peuvent néanmoins contribuer à prévenir un enlèvement international d’enfant. II) La sortie des enfants du territoire En France, les enfants mineurs ne peuvent franchir les frontières qu’avec l’accord du ou des titulaires de l’autorité parentale. Lorsque l’autorité parentale est partagée, un système de présomption d’accord est instauré pour faciliter les voyages à l’étranger, ce qui peut augmenter les risques d’enlèvement (A). Dans les pays de tutelle paternelle, l’enfant ne peut sortir du territoire qu’avec le consentement du père (B). A. En France La présomption d’accord Le droit français est basé sur un système égalitaire et consensuel de l’autorité parentale. Dès lors qu’un lien de filiation est établi dans les conditions prévues par la loi, les parents exercent l’autorité parentale sur l’enfant de manière conjointe. Pour faciliter les actes usuels de la vie quotidienne, un système de présomption d’accord est instauré, chacun des parents étant réputé agir avec le consentement de l’autre. La question s’est posée de savoir si la décision de sortir l’enfant du territoire national était un acte usuel de l’autorité parentale ou bien un acte pour lequel l’accord exprès des deux parents est exigé. En l’état actuel du droit français, en l’absence de désaccord manifeste de l’autre parent, chacun des parents peut autoriser son enfant à sortir du territoire. La délivrance des documents de voyage En droit français, l’enfant doit désormais être titulaire de son propre passeport et ne peut plus être inscrit sur celui de ses parents. Au titre de la présomption d’accord, chacun des parents est néanmoins habilité à demander la délivrance d’un passeport en faveur de son enfant. De plus, les règles relatives à la délivrance des passeports ont un effet limité dès lors que l’enfant a une double nationalité, la délivrance du passeport étant alors soumise aux règles en vigueur dans l’État d’origine. Par ailleurs, ces enfants étant dispensés de visa dans leur pays d’origine, cela peut encore faciliter l’enlèvement. B. Dans les pays de tutelle paternelle L’Algérie, le Maroc et la Tunisie ainsi que de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et du MoyenOrient retiennent un système de tutelle paternelle sur les enfants mineurs. L’autorité parentale conjointe n’existe pas. Les rôles des parents ne sont pas perçus en terme d’égalité mais de complémentarité. La tutelle, exercée par le père, consiste à assurer la protection des intérêts matériels et moraux de l’enfant tandis que la garde, plus généralement dévolue à la mère, a trait à son éducation et à sa protection physique. Le père est ainsi seul à prendre les grandes décisions relatives aux enfants. Ainsi, une mère qui souhaite emmener ses enfants au Maroc devra demander une autorisation au père pour faire établir un passeport à ses enfants, ainsi qu’une autorisation paternelle de sortie du territoire pour pouvoir rentrer en France. Association loi 1901 à but non lucratif - n° SIRET 499 638 260 00012 En Algérie, la réforme du 27 février 2005 permet aux mères divorcées qui ont la garde de leur enfant d’exercer automatiquement la tutelle. Elles doivent ainsi pouvoir sortir du territoire algérien avec les enfants sans l’autorisation du père. Une circulaire du 11 janvier 2003 prévoyait déjà la possibilité pour les mères algériennes séparées ou divorcées résidant à l’étranger de repartir dans leur pays de résidence avec les enfants sans l’autorisation du père. En dehors de cette hypothèse, la sortie du territoire de l’enfant peut s’avérer très compliquée si le père refuse de donner son autorisation. III) les mesures administratives préventives judiciaires et Les contrôles aux frontières peuvent permettre de prévenir un enlèvement international d’enfants. A ce titre, des procédures d’opposition administrative et d’interdiction judiciaire à la sortie du territoire peuvent être sollicitées par les titulaires de l’autorité parentale. A. L’opposition territoire administrative à la sortie du Le parent qui craint que son enfant soit enlevé à l’étranger peut faire une opposition à sortie du territoire en préfecture. Il s’agit d’une mesure administrative d’une durée de 15 jours, non renouvelable. En cas d’urgence, en dehors des heures d’ouverture des services préfectoraux, l’opposition peut être reçue par les services de gendarmerie ou de police. La mesure est valable 7 jours. L’opposition à sortie du territoire permet l’inscription de l’enfant sur le Fichier des personnes recherchées (FPR). Le décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées organise les modalités d’enregistrement des données et d’accès au fichier. L’état civil de l’enfant est enregistré ainsi que son signalement, sa photographie et les motifs de sa recherche. Le FPR est un fichier de la police nationale placé sous la responsabilité du ministère de l’Intérieur. Il a pour objectif de faciliter les recherches et les contrôles effectués par les services de la police nationale, les unités de la gendarmerie nationale et les agents des douanes exerçant des missions de police judiciaire ou des missions administratives. Les agents de douane exerçant ces missions au sein des aéroports ont accès à ce fichier qui peut être diffusé auprès de certains postes frontières déterminés. Cependant, la consultation du fichier n’est parfois pas faite de manière systématique dans tous les aéroports. Le Fichier des personnes recherchées est relié au Système d’Information Schengen (SIS) utilisé par les États européens qui participent à la coopération policière européenne. Le Code frontières Schengen contient également des dispositions concernant les mineurs. Il indique aux gardes frontières d’accorder une attention particulière aux mineurs. Ils doivent vérifier que le parent accompagnant est titulaire de l’autorité parentale et procéder à des contrôles approfondis s’il existe des raisons sérieuses de penser que l’enfant a été illicitement déplacé. L’abolition des frontières intérieures à l’espace Schengen réduit cependant sérieusement la portée des mesures préventives. Pour que l’opposition à sortie du territoire se pérennise, le juge aux affaires familiales doit parallèlement être saisi aux fins d’obtenir une décision judiciaire d’interdiction de sortie du territoire. B. L’interdiction judiciaire de sortie du territoire : l’apport de la loi du 9 juillet 2010 Les tribunaux peuvent restreindre les modalités d’exercice de l’autorité parentale lorsqu’il existe un risque d’enlèvement. La loi du 9 juillet 2010 relative aux violences spécifiquement faites aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants est venue renforcer le régime de l’interdiction de sortie du territoire de l’enfant. Le juge aux affaires familiales peut ordonner l’interdiction de sortie de l’enfant du territoire français sans l’autorisation des deux parents (article 373-2-6 alinéa 3). Ce pouvoir a également été étendu au juge des enfants qui peut faire bénéficier de cette mesure l’enfant faisant l’objet d’une mesure de placement (article 375-7 alinéa 7). Désormais, l’interdiction est inscrite directement au FPR par le procureur de la République et non plus sur le passeport des parents. En effet, l’enfant étant désormais titulaire d’un passeport personnel, cette disposition présentait des limites d’application au plan pratique. La loi du 9 juillet 2010 vient donc combler, sur ce point, les insuffisances du régime antérieur. L’interdiction de sortie du territoire sans l’autorisation des deux parents ne peut être prononcée qu’à l’issue d’un examen circonstancié des faits : le juge doit établir qu’il y a un risque réel que l’enfant soit enlevé, le risque de non retour étant accru lorsque qu’aucune convention d’entraide ne lie la France avec l’État vers lequel l’enfant risque d’être enlevé. Le juge se base sur des éléments de fait qui se sont déjà passés ou qui sont prévisibles tels que des menaces ou une première tentative d’enlèvement. Janvier 2012