refraction de la lumiere et densite
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refraction de la lumiere et densite
ACCUEIL Réfraction de la lumière et densité Incurvation d’un faisceau laser Frédéric Élie, 27/2/2004 La reproduction des articles, images ou graphiques de ce site, pour usage collectif, y compris dans le cadre des études scolaires et supérieures, est INTERDITE. Seuls sont autorisés les extraits, pour exemple ou illustration, à la seule condition de mentionner clairement l’auteur et la référence de l’article. Lorsqu'un faisceau de lumière rencontre une surface séparant deux milieux aux propriétés physiques différentes, il se réfracte c'est-à-dire change de direction. En optique le phénomène de réfraction obéit aux lois de Snell-Descartes où est introduite une caractéristique des milieux, l'indice de réfraction, qui regroupe les propriétés physiques susceptibles d'influencer la propagation de la lumière. Ces propriétés sont multiples: densité, concentration, température, pression, etc. et bien sûr la longueur d'onde lumineuse utilisée. Dans cet article, je vous propose très simplement de voir comment l'une d'elles, la densité, arrive à modifier le chemin de la lumière au point d'incurver un rayon laser. présentation de l'expérience Incurver un rayon laser par de l'eau sucrée: Cette expérience est devenue un classique de la physique. La préparer comme suit: · choisir un récipient transparent rectangulaire de hauteur et de longueur suffisantes (par exemple 10cm X 25 cm, genre boîte de sucre en plastique); · le remplir d'eau; · choisir des morceaux de sucre de canne brun (marche mieux que du sucre blanc!) et les laisser se déposer doucement au fond du récipient de façon à le tapisser entièrement. Attention! Pour que l'expérience réussisse il faut absolument éviter de secouer le sucre une fois immergé. Le but est de créer une forte variation de densité sur une faible distance (on dit un fort gradient de densité): près de la surface libre l'eau doit être claire et au fond opaque. Attendre que tout cela se stabilise (une ou deux minutes); · installer une source laser de couleur rouge (genre petit crayon laser pour les conférences) de façon que le rayon parfaitement horizontal frappe perpendiculairement une face de la boîte au niveau de la couche claire de l'eau. Faire l'obscurité et observer: si la boîte est suffisamment longue le faisceau s'incurve vers le bas et finit par frapper la surface du fond où le sucre est le plus concentré (voir photos ci-après). ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 1/13 Incurvation du laser dans l'eau sucrée (couleur réelle) (le reflet rougeâtre au fond de la cuve est dû à la diffusion du laser par la couche dense de sucre) Incurvation du laser dans l'eau sucrée en couleur inversée: on voit nettement la forme parabolique du trajet lumineux (photos F. Elie) Essai pour voir comment la réfraction évolue avec la densité d'un liquide: Dans l'expérience précédente il apparaît que les changements de densité avec la profondeur de l'eau ont une action sur la réfraction du rayon lumineux: comme ces changements sont continus, quoique importants sur une faible épaisseur, le rayon se déforme progressivement le long de son voyage dans l'eau au lieu d'être un segment de droite. La question est alors de savoir quel lien quantitatif peut exister entre la densité du milieu traversé par un rayon lumineux et la réfraction de celui-ci? Il est assez facile de trouver dans la littérature scientifique des relations donnant le rapport entre la densité et l'indice de réfraction pour un gaz (comme l'air par exemple) selon le modèle théorique de Gladstone-Dale. Par contre j'avoue que pour les liquides les données sont moins courantes (à moins de se consacrer à une étude bibliographique poussée!) J'ai entrepris alors cette expérience pour évaluer la tendance du rapport densité-indice de réfraction, et voir si elle ressemble au modèle théorique pour les gaz. Je souligne toutefois que c'est une expérience du type "coin de table" (comme c'est dans l'esprit de ce site sans aucune prétention) et dont la seule ambition somme toute ludique est d'imaginer avec ce que l'on a sous la main des procédés simples, donc accessibles , mais aussi rigoureux que possibles, de répondre à des questions suscitées par l'observation attentive et la curiosité scientifique: par conséquent je ne garantis pas du tout le résultat obtenu, mais je le pose comme point de départ à des améliorations ultérieures, dans l'esprit critique de la méthode expérimentale… J'en profite, à ce propos, de rappeler qu'aucun des articles de ce site n'a valeur définitive, et que c'est par un jeu consistant à ré-imaginer des cheminements simples d'exploration et d'application qu'ils sont établis, avec leur cortège d'hypothèses heureuses et malheureuses, d'essais et d'erreurs, laissés parfois volontairement dans ces articles (réfléchir à voix haute, en quelque sorte…) Voici donc cette expérience: · d'abord, comme il s'agit de faire évoluer la densité d'un liquide (en l'occurrence l'eau), j'ai laissé tomber le sucre au profit du sel car il semble que ce dernier se dissout mieux dans l'eau, garantissant ainsi un liquide mieux homogène de densité uniforme; · j'ai choisi une boîte rectangulaire transparente remplie d'eau douce, assez petite cette fois car je m'intéresse à la réfraction de la lumière dans le plan horizontal ("vue de dessus") et non plus à son incurvation dans un plan vertical comme précédemment; la faible taille de la boîte me garantit une meilleure homogénéité du mélange eau + sel. · Je dispose la source laser de façon à obtenir un angle d'incidence par rapport à la normale de la face de la boîte, cet angle ne bougera plus au cours de la manip. Au bout d'un réglage assez délicat et fastidieux j'obtiens un angle d'incidence i = 34° qui ne ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 2/13 · · bougera plus au cours de la manip: c'est une valeur raisonnable car il ne faut être ni trop près de la normale (pour avoir une réfraction lisible), ni trop près de l'angle d'incidence limite (égale à 48° pour l'eau, j'en dirai deux mots plus loin: voir annexe). Toute l'installation est disposée bien horizontalement sur du papier gradué pour faciliter les repérages. La manipulation consiste alors à ajouter à chaque étape une même quantité connue de sel dans le volume fixe d'eau, d'en déduire la densité, et de relever l'angle de réfraction (r) du rayon laser dans ce mélange. Techniquement ce relevé est assez délicat: le laser étant surtout visible dans l'eau salée, il faut repérer le point d'impact d'arrivée sur la boîte puis celui de sortie, car le rayon émergent dans l'air est parallèle au rayon incident mais décalé du fait de la réfraction interne. Ce décalage d est relié à la largeur L de la boîte, à l'incidence (i) et à l'indice n par une relation assez compliquée (voir annexe ci-dessous). Chaque fois que l'on change l'indice (n) en agissant sur la densité du liquide r on obtient donc une réfraction différente, donc un décalage différent (d) que l'on mesure ce qui permet de remonter à l'indice de réfraction. Le tout dans l'obscurité en évitant d'être aveuglé par les réflexions du laser!… La densité est évaluée de la façon suivante: le volume d'eau douce est V = 2 cl, ce qui correspond à une masse d'eau m eau = 0,02 kg. La mesure de la densité du sel (pesée d'un volume de sel connu mesuré par un récipient gradué) me donne r sel = 1100 kg/m3 (densité de l'eau r eau = 1000 kg/m3). Comme on a affaire à une dilution supposée parfaite du sel dans l'eau le volume du mélange V reste le même lorsqu'on ajoute un volume de sel constant Vsel mais sa masse augmente: m = r V = msel + meau = r sel Vsel + meau d'où la densité cherchée du mélange: r = r en ml: eau +r sel Vsel / V, c'est-à-dire si les volumes sont r = 1000 + 1100xVsel/20 En ajoutant à chaque fois 0,5 ml de sel j'ai mesuré l'angle de réfraction r puis calculé l'indice correspondant n, et calculé la densité totale du mélange. J'obtiens le tableau suivant et la photo ci-dessous illustre une des phases de la manip. Vsel (ml) Densité r (kg/m3) Angle réfraction r (°) Indice n (r ) 0 1000 25 1,32 1 1055 24,5 1,35 1,5 1082,5 24 1,37 2 1110 23,5 1,40 2,5 1137,5 21,5 1,53 ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 3/13 La courbe indice de réfraction en fonction de la densité a l'allure suivante: Remarque: la courbe semble présenter un comportement linéaire sur une première partie, mais le dernier point est peut-être une mesure aberrante. D'autre part, pour un volume nul de sel (eau douce seule) l'indice est de 1,32 alors que l'on sait qu'il vaut 1,33 pour une longueur d'onde de 0,589 microns qui correspond au jaune. Mais ici on a un laser rouge de longueur d'onde 0,655 microns. Ce n'est alors peut-être pas une anomalie compte tenu du fait que, en réalité, l'indice de réfraction dépend de la longueur d'onde l selon la formule de Cauchy: n = A + B/l ² car pour le rouge l'indice de réfraction est plus faible que pour le jaune. Rien ne me permet de dire à ce stade si mes valeurs sont cohérentes, cela mérite une manip plus précise. Analyse et modélisation du phénomène Pour un gaz la relation entre l'indice de réfraction n et la densité peut être décrite par le modèle de Gladstone-Dale: n - 1 = kr où k est une constante caractéristique du milieu. Pour mémoire cette dépendance s'explique ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 4/13 par la théorie de la réfringence de Lorentz pour les fluides. Je n'ai pas obtenu cette loi linéaire, à supposer que mes relevés soient corrects. Mais ici il s'agit d'un liquide (eau salée) et peutêtre pour les fortes concentrations la loi n'est plus linéaire. La courbe ci-dessus montre une partie approximativement linéaire pour laquelle il est possible d'évaluer le coefficient k: on trouve environ 7,3. 10-4 (m3/kg) qui est de l'ordre de grandeur de ce que l'on trouve dans la littérature (pour les gaz !) Pour ce qui concerne l'incurvation du faisceau laser dans une solution à gradient d'indice, comment celui-ci agit-il sur la trajectoire lumineuse? Pour répondre à cette question il faut se rappeler d'une part des lois de la réfraction optique (loi de Snell-Descartes) et d'autre part du principe qui régit la propagation d'un rayon lumineux (principe de Fermat). En fait, on verra que les lois de réfraction peuvent être vues comme une conséquence du principe de Fermat (lequel n'est valable que dans l'approximation de l'optique géométrique), bien qu'elles se déduisent aussi des lois de l'optique ondulatoire qui englobent le cas limite de l'optique géométrique. Je rappelle dès à présent que, dans l'optique géométrique, le trajet lumineux peut être assimilé à une courbe dans l'espace et que cette approche n'est acceptable que si la longueur d'onde est très petite devant les dimensions caractéristiques des frontières du milieu de propagation; dans le cas contraire, le comportement ondulatoire doit être pris en compte et se traduit notamment par des effets d'interférences et de diffusion de l'onde au contact des obstacles rencontrés de tailles comparables à celle de la longueur d'onde. L'indice de réfraction varie avec la densité, or celle-ci varie pour diverses raisons: répartition spatiale de la concentration, influence de la température variant d'un point à un autre, etc. C'est ce que nous allons voir maintenant. Signification et énoncé du principe de Fermat en optique Pour présenter le principe de Fermat, qui régit complètement toutes les lois de l'optique géométrique, il existe des façons très compliquées (qui découlent du calcul variationnel de la mécanique analytique), et des façons plus simples comme celle qui va suivre. Pour ceux que cela intéresse, sur un plan historique, j'en profite pour rappeler que c'est en exploitant le rapport qui existe entre l'optique géométrique et l'optique ondulatoire qu'une des manières de formaliser la physique quantique a été élaborée: suite aux comportements tantôt corpusculaire et ondulatoire de la lumière (Einstein), à la nature discontinue du rayonnement thermique (Planck) et au comportement ondulatoire de la matière dans les expériences des fentes d'Young, certains physiciens (De Broglie…) ont supposé que, de même qu'il existe une optique ondulatoire qui généralise l'optique géométrique, il doit exister une mécanique ondulatoire (quantique) qui généralise la mécanique classique dont le comportement est proche de celui de l'optique géométrique dans la mesure où elles ont en commun le même type de formalisme variationnel (Lagrange, Hamilton, Jacobi, Poisson…) Fin de la parenthèse. Soient deux milieux (1) et (2), séparés par une surface (S) de normale (XX'), dans lesquels se propage un rayon lumineux. Le rayon incident du milieu (1) frappe la surface (S) en un point O sous un angle d'incidence (a) par rapport à la normale (XX'). Dans le milieu (1) la vitesse de la lumière est v, ne pouvant pas dépasser la vitesse c de la lumière dans le vide, définissant ainsi l'indice de réfraction n = c/v > 1. Dans le milieu (2) le rayon pénètre de O avec un angle de réfraction (a') par rapport à la normale; de même sa vitesse v' est inférieure à c et permet de définir l'indice n' = c/v'. La question est de savoir, pour deux milieux d'indices n et n' connus, avec une incidence (a) et un point d'impact O imposés, quelle est la réfraction a' ? Pour y répondre, considérons un domaine autour de O de dimensions fixées mais arbitrairement petites X0 et Y0; le rayon lumineux entre dans ce domaine par le point A de coordonnées X et Y, et en sort par le point A' de coordonnées X' et Y': on a donc les contraintes X + X' = X 0 et Y + Y' = Y0. Le trajet de la lumière AOA' est parcouru pendant une durée T égale à la somme des durées t et t' pour parcourir AO et OA' avec les vitesses respectives v et v': ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 5/13 T = t + t' = AO/v + OA'/v' = 1/c.(n(X² + Y²) 1/2 + n'(X'² + Y'²)1/2) = 1/c.(n(X² + Y²)1/2 + n'((X0 - X)² + (Y0 - Y)²)1/2) Le principe de Fermat pose que le trajet doit être parcouru en une durée minimale pour des points initiaux et finaux A et A' quelconques mais fixes, et pour une surface de séparation (S) arbitrairement petite mais fixe. Mathématiquement cela revient à annuler la différentielle de la durée T, dT, exprimée en fonction des coordonnées X et Y choisies comme variables indépendantes (on pourrait tout aussi bien choisir de tout exprimer avec l'autre couple de variables indépendantes X' et Y'): dT (X,Y) = ¶ T(X,Y)/¶ X.dX + ¶ T(X,Y)/¶ Y.dY = 0 les dérivées partielles doivent alors être identiquement nulles: ¶ T(X,Y)/¶ X = 0 et ¶ T(X,Y)/¶ Y = 0 donnent la même égalité n'/((X0 - X)² + (Y0 - Y)²)1/2 = n/(X² + Y²)1/2 c'est-à-dire n'/OA' = n/OA, soit encore: n' sin a' /|Y'| = n sin a /|Y| la surface de séparation étant arbitrairement petite, si elle tend vers 0 on a |Y'| et |Y| qui sont infiniment proches, donc il reste: n' sin a' = n sin a qui est la relation de Snell-Descartes. Elle montre un comportement symétrique entre les deux milieux de propagation: la désignation de l'angle d'incidence (a = i par exemple, donc a' = r) dépend du choix du côté où se trouve la source de lumière (ici côté milieu (1)). Bien sûr les démonstrations formelles de la loi de la réfraction sont plus élaborées que celle que je propose ici: elles font appel aux calculs des variations ou mécanique analytique, fondée par Lagrange (devenus un des domaines de la géométrie différentielle). Mais j'ai voulu essayer de faire sentir ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 6/13 ici le sens intuitif du postulat de Fermat, lui-même englobé dans un postulat plus abstrait et moins intuitif, le principe de moindre action dont la première formulation remonte à Maupertuis et qui a des applications dans tous les domaines de la physique… Quelques indices de réfraction: matériau Indice à 20°C et l = 0,589 m m air 1,000293 eau 1,333 Verre flint F3 1,613 Verre crown BK1 1,517 + 0,000001 Verre flint léger 1,575 + 0,000004 Verre flint moyen 1,650 + 0,000005 Verre flint lourd 1,890 + 0,000006 Fluorine, spath 1,434 - 0,00001 Diamant 2,417 + 0,000019 Dioxyde de carbone 1,0045 quartz 1,459 Sulfure de carbone 1,628 Oxyde de baryum 1,980 benzène 1,501 Iodure de césium 1,790 Eau (glace) 1,310 Alcool éthylique (éthanol) 1,362 Variation pour 1°C - 0,00009 évanescence et angle d'incidence limite: Supposons que l'indice de réfraction du milieu d'incidence n soit inférieur à celui n' du milieu réfractant: n < n'. La loi de Snell-Descartes montre alors que, quelle que soit l'angle d'incidence i, l'angle de réfraction r lui reste inférieur: r < i, mais augmente lorsque i augmente. A l'incidence rasante i = 90° on a sin i = 1 et l'angle de réfraction atteint une valeur limite r L telle que: sin rL = n/n' réciproquement, à l'intérieur du milieu d'indice n' > n, tout rayon dirigé vers la surface de séparation sous un angle supérieur à r L ne parviendra pas à engendrer un rayon réfracté dans le milieu extérieur d'indice n: la lumière est alors réfléchie par cette surface qui agit comme un miroir et retournera dans le milieu d'indice n'. Cette situation est exploitée pour utiliser les prismes comme des miroirs (prismes à réflexion totale comme dans les jumelles). Elle est également bien connue des plongeurs sous-marins qui savent que lorsqu'ils veulent braquer un faisceau lumineux vers la surface pour signaler leur présence ils doivent lui procurer une incidence plus fermée que l'angle d'incidence limite: par rapport à l'air l'indice de réfraction de l'eau étant n' = 1,33 cet angle limite est r L = arc sin (1/1,33) = 48,8°. Tout faisceau faisant avec la surface un angle plus petit que 90 - 48,8 = 41,2° ne sera jamais perçu par les personnes situées au-dessus! En fait, le rayon de lumière réfléchi à l'intérieur du milieu où il a été émis et d'indice n' > n, a une intensité plus faible que le rayon initial, car une fraction de l'intensité a été dissipée au niveau ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 7/13 du dioptre de séparation par effet d'évanescence. Pour expliquer cela il faut utiliser le comportement ondulatoire (et non plus géométrique) de la lumière. Dans cette approche la lumière est décrite comme une onde spatio-temporelle de fréquence f dont la loi de propagation suivant la direction de vecteur OM est du type: exp j2p f t . exp - jK.OM où K est le vecteur d'onde de composantes (K x, Ky) sur la base des vecteurs unitaires e x, ey: K = Kxex + Kyey (ey étant porté par le dioptre de séparation et e x par la normale à ce dioptre au point d'incidence O), avec K x = |K|cos a et K y = |K| sin a. La théorie électromagnétique montre qu'au niveau du dioptre séparant les milieux d'indice n et n', la composante tangentielle du nombre d'onde se conserve: Ky = K'y Or le module de K étant |K| = 2p f/v (v vitesse de la lumière dans le milieu d'indice n: v = c/n) et celui de K' étant |K'| = 2p f/v' (v' vitesse de la lumière dans le milieu d'indice n': v' = c/n') cette égalité donne: Ky = K sin a = K'y = K' sin a', c'est-à-dire n sin a = n' sin a' (ce qui montre que la loi de Snell-Descartes est aussi une conséquence des modèles ondulatoires de l'électromagnétisme). Comme dans chacun des milieux les modules du nombre d'onde valent respectivement: K² = K²x + K²y et K'² = K'²x + K'²y on peut exprimer ces modules au moyen seulement des angles d'incidence ou de réfraction, et des indices de réfraction de chacun des milieux: K² = K²x + K²y = K²x + K'² sin² a' Þ K²x = K² - K'²sin² a' = (2p f/c)²(n² - n'² sin² a') K'² = K'²x + K'²y = K'²x + K² sin² a Þ K'²x = K'² - K²sin² a = (2p f/c)²(n'² - n² sin² a) puisque K = 2p fn/c et K' = 2p fn'/c. Selon que l'on considère l'un ou l'autre milieu comme domaine d'incidence ou domaine réfractant, et selon les valeurs relatives des indices n/n' ou n'/n, ces relations mettent en évidence le rôle de l'incidence limite dans l'atténuation de l'onde lors de son passage dans l'autre milieu: · si n est l'indice du milieu incident et si n' est l'indice du milieu réfractant plus petit que n (n > n') alors l'angle d'incidence limite pour le milieu (n) est tel que sin aL = (n'/n). Dans ce cas l'onde transmise dans le milieu (n') a pour composante normale de nombre d'onde la valeur: K'²x = (2p f/c)² n² (sin² aL - sin² a) On voit que si l'incidence a est plus grande que l'incidence limite (a > a L) cette composante est imaginaire et vaut: K'x = -j(2p f/c) n (sin² a - sin² aL)1/2 ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 8/13 L'onde présente donc une atténuation suivant la normale (Ox) dans le milieu (n') sur une épaisseur caractéristique d'évanescence d: exp j2p f t/c . exp -jK'y y' . exp - x'/d avec: d = 1/ ((2p f/c)n(sin²a - sin²aL)1/2) REMARQUE IMPORTANTE : cette épaisseur caractéristique d'évanescence ne doit pas être confondue avec l'épaisseur de peau sur laquelle une onde électromagnétique subit une atténuation due à la réaction des atomes ou des molécules à cette onde et qui a pour effet de modifier la permittivité diélectrique du milieu (théories de Lorentz ou de Debye par exemple pour les diélectriques) · de même, inversement, si n' est l'indice du milieu incident et n celui du milieu réfractant plus petit que n' (n' > n) on obtient des relations analogues par permutation des lettres primées ou pas. L'évanescence est d'autant plus forte que le milieu d'incidence a un indice élevé et que la fréquence de l'onde lumineuse est élevée (lumière bleue). Exemples numériques: dioptre air/eau, le milieu d'incidence étant l'eau. On a a L = 48,8°. On se fixe une incidence a = 55° plus grande que l'angle limite et on calcule l'épaisseur d'évanescence pour une radiation bleue (f = 625 10 12 Hz) et rouge (f = 428 10 12 Hz), on trouve: pour le bleu d = 0,236 microns, pour le rouge d = 0,344 microns. Equation des rayons lumineux dans un milieu d'indice variable: On veut déterminer l'équation qui permet de trouver la forme d'un trajet lumineux dans un milieu dont l'indice de réfraction varie d'un point à un autre (comme par exemple dans notre expérience au début). Comme cadre géométrique on choisit comme axes: Oy horizontale et Ox verticale et on suppose que l'indice varie seulement selon l'altitude: n = n(x). Pour déterminer l'équation de la trajectoire on peut, soit utiliser la relation de Snell-Descartes à chaque dioptre infinitésimal d'épaisseur dx, soit appliquer le formalisme variationnel du principe de Fermat. Je propose ici de voir ces deux aspects. Première méthode: application de la relation de Snell-Descartes: L'application de la loi de la réfraction à chaque couche élémentaire d'épaisseur dx et d'altitude x montre que la quantité suivante est invariante: n(x) sin i(x) = cste = n0 sin i0 ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 9/13 le schéma ci-dessus montre que le décalage dy de la trajectoire lumineuse est liée à son altitude y par: dy/dx = tg i(x) = sin i(x)/cos i(x) = n0 sin i0 / (n²(x) - n²0 sin² i0)1/2 si l'on connaît n (x) la trajectoire s'obtient en intégrant: y (x) - y0 = n0 sin i0 ò dx/(n²(x) - n²0 sin² i0)1/2 Deuxième méthode: application du principe de Fermat D'après ce principe le temps t que met la lumière pour parcourir une trajectoire AB de longueur s doit être minimal par rapport aux conditions aux limites imposées en A et B. Or en chaque point M de la trajectoire la vitesse de la lumière est v(M) = c/n(M) où n(M) est l'indice de réfraction en ce point. Comme pour parcourir une portion élémentaire ds de trajectoire la lumière met le temps dt = ds/v(M) = n(M) ds/c, alors puisque c est la vitesse de la lumière dans le vide (constante) le principe de Fermat, appliqué à la trajectoire complète, revient à minimaliser l'intégrale appelée "chemin optique" L AB: d LAB = d ò AB n(M)ds = 0 les variations sont prises par rapport aux conditions limites et on obtient: d LAB = ò AB d n(M) ds + ò AB n(M) d ds Or d n(M) = grad n(M).d r et la deuxième intégrale devient, après une intégration par partie: [n(M)d s]AB - ò AB dnd s. Le terme entre crochets est nul puisque A et B sont supposées fixes quelconques, et remarquant que d s = u.d r (u vecteur unitaire porté par le rayon vecteur r = OM: u = dr/ds) on obtient: d LAB = ò AB (grad n (M) ds - d(n(M)u)) d r = 0 pour toute variation quelconque d r sur la position des limites A et B ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 10/13 ce qui donne l'équation des rayons: grad n(x,y,z) - d/ds (ndr/ds) = 0 Dans le cas où n = n(x) seule vous pouvez vous convaincre (exercice!) que cette équation est exactement la même que celle obtenue par la première méthode. Application à l'effet "flaque d'eau" sur une route chauffée, et notion de mirages On va exploiter l'équation des rayons obtenue par la première méthode au cas où l'indice de réfraction varie à cause de la température non uniforme de l'air situé au-dessus d'une surface plane (route par exemple). On a vu, en effet, que l'indice est directement relié à la masse volumique de l'air par la loi de Gladstone-Dale, et comme la masse volumique change avec la température et que celle-ci n'est pas uniforme, un rayon lumineux suivra une trajectoire courbe au-dessus de la surface. Cette situation est à la base du principe général des effets "flaque d'eau" et des mirages. Techniquement, les choses peuvent devenir rapidement compliquées parce qu'en général la variation de la température d'un point à l'autre est loin d'avoir une forme sympathique et que l'intégrale est souvent difficile à calculer. La température située juste au-dessus d'une surface chauffée par le soleil est d'autant plus élevée que l'on est près du sol et on peut en première approximation prendre: T (x) = T0 – ax Par ailleurs, à pression atmosphérique constante la masse volumique est inversement proportionnelle à la température: r T = r 0 T0 = cste compte tenu de la loi de Gladstone-Dale l'indice de réfraction varie donc avec l'altitude selon la relation: n(x) = kr 0T0/(T0 - ax) + 1 » Ax + B (l'épaisseur x étant faible) avec A = kr 0a/T0 et B = 1 + kr 0. L'indice de réfraction est à gradient positif: dn/dx = A, on doit donc s'attendre à ce que la courbure de la trajectoire lumineuse soit tournée vers le haut. L'injection de n(x) dans l'équation du rayon donne immédiatement par intégration une solution de la forme: x (y) = (n0 sini0 /A) ch Ay/n0sini0 le trajet lumineux suit une courbe appelée chaînette dont le minimum est situé au point y 0 = 0 et x0 = n0 sin i0 /A, elle peut être approchée par une parabole. En ce point, un faisceau de lumière provenant du ciel apparaîtra de la même couleur bleue à une distance correspondant à la hauteur des yeux du conducteur. L'approximation parabolique donne ch X » 1 + X²/2 ce qui donne ici: x(y) » (n0 sin i0 /A) (1 + (A/n0 sin i0)² y² /2) ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 11/13 pour un voyageur dont les yeux sont placés à une hauteur h au-dessus du sol, la lumière reflétant le ciel en O lui parvient d'une distance D telle que: tg i0 = dx/dy = (A/n0 sin i0) y = h/D pour y = D on a donc la distance D à partir de laquelle le voyageur verra le reflet en O: D = (Ah/n 0 sin i0)1/2. Or, la lumière venant du ciel subit une réflexion totale en O si son incidence i 0 est au moins égale à l'incidence limite iL = arc sin 1/n0. La distance D devient donc: D = (T0 h/a(n0-1))1/2 = (T0/D T.x0/(n0-1).h)1/2 où D T est la diminution de la température lorsqu'on s'éloigne d'une distance x 0 = 1m du sol. Application numérique: pour T 0 = 300 K (27°C), D T = 10°C sur 1m, n0 = 1,0003 (air) et une hauteur de regard h = 1,2 m pour un conducteur dans une voiture, on trouve que la distance à laquelle le ciel semble se refléter sur la route (effet flaque d'eau) est D = 346 m. Comme la voiture avance, cette distance restant constante par rapport au conducteur, la flaque semble se déplacer en même temps que le véhicule. Ce mirage est dû à un gradient positif d'indice. Dans le cas d'un gradient négatif dn/dx < 0 la courbe du rayon lumineux présente une courbure tournée vers le bas, ce qui entraîne qu'un objet placé sur la terre, hors de la vue de l'observateur, peut lui apparaître comme émergeant au-dessus du sol, placé dans les airs, comme le montre le schéma ci-après: c'est le véritable mirage tel qu'il peut exister dans un désert. ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 12/13 BIBLIOGRAPHIE Jean-Pierre FAROUX, Jacques RENAULT: cours d'optique, Dunod, Paris 1998 ©Frédéric Élie, 27 février 2004 - http://fred.elie.free.fr - page 13/13