Voir - Les Afriques

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DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : ABDERRAZZAK SITAIL
ÉDITION INTERNATIONALE : Afrique Zone CFA 1700 F CFA • France 3,50 € • France DOM 4 € • Maroc 23 DH • Algérie 170 DA • Tunisie 3,30 DT
Mauritanie 1100 MRO • Belgique 3,50 € • Italie 4 € • Canada 5,95 $ CAN • Luxembourg 3,50 € • Suisse CHF 5,9
MAROC MONTÉE DES RISQUES A LA BANQUE POPULAIRE
N° 203 - 24 au 30 mai 2012
Hebdomadaire international
AREVA CONDAMNÉE
AFFAIRE
RADIOACTIVE
Suite à la
condamnation en
première instance
du groupe français,
des questions se
posent au Niger, au
Gabon, en RCA et
en Namibie.
lesafriques.com
2 Les Afriques .
24 mai 2012
SOMMAIRE
Forte montée des risques à
la BCP-affaire Comarit
Le portefeuille de la Banque
Populaire devra souffrir de l’affaire
Comarit. Au-delà d’un effort de
provisionnement exceptionnel.
Comment la BCP s’est retrouvée
aussi loin de ses normes ?
16-19
«Pas de crise pour les
vraies Caisses d’Epargne»
Chris de Noose, directeur général de
l'Institut Mondial des Caisses
d’Epargne met l’accent sur le rôle
accélérateur de développement des
CE et banques de détail. Entretien en
marge du 23e Congrès mondial des
Caisses d’Epargne à Marrakech. 20-21
05
EDITORIAL
La fausse et la vraie polémique
06
BAROMÈTRE
Koffi Annan rappelle l’urgence
aux chefs d’Etats africains
08
BRUITS DE MARCHÉ
Côte d’Ivoire : le budget très souverain
des Ouattara
12
ARRÊT SUR IMAGE
L’homme le plus court du monde,
Chandra Bahadur Dangi
14
VERBATIM
15
WEB
Paul Kagamé : champion du Tweet
16
BANQUES & ASSURANCES
Forte montée des risques à
la BCP suite à l’affaire Comarit
20
Chris de Noose
«Les vraies Caisses d’Epargne
n’ont pas eu de crise»
22
Marrakech, capitale mondiale de l’épargne
25
BOURSES & FONDS
Bourse : la BRVM trouve le bonheur
dans le pré
26
Renaissance Capital prospecte l’Afrique
28
MATIÈRES PREMIÈRES
Les marchés paient toujours le manque
d’investissement des années 90
32
PÉTROLE & GAZ
Les printemps arabes ne laisseraient
encore de traces qu’en Egypte
34
ENTREPRISES ET MARCHÉS
Henri Jullien : «Le souci premier des banques
centrales c’est d’assurer des liquidités
aux banques commerciales»
36
Cameroun : bon cru de la Sodecoton
Marrakech Capitale
mondiale de l’épargne
38
Guinée : les Moulins d’Afrique
en ordre de marche
La Mecque touristique marocaine a
été pendant deux jours la capitale
des Caisses d’Epargne du monde, le
temps d’un congrès riche en débats.
Les Afriques était au cœur de
22-24
l’événement.
40
ARRÊT SUR IMAGE
Un sunnite libanais avec son
fils dans la cité de Tripoli
42
POLITIQUE ECONOMIQUE AFRICAINE
Algérie : les leçons des législatives
du 10 mai 2012
Bourse La BRVM trouve le
bonheur dans le pré
L’agriculture a largement contribué
à la hausse de l’indice BRVM 10 pour
le compte du premier trimestre
2012. Preuve que depuis Verlaine le
bonheur est toujours dans le pré. 25
Renaissance Capital
prospecte l’Afrique
La Banque d’investissement
Renaissance Capital, dont le siège du
département Afrique est situé à
Londres, a organisé sa troisième
Conférence panafricaine sur
l’investissement, à Lagos du 16 au 18
mai Au Nigéria.
26-27
Les marchés paient toujours
le manque d’investissement
des années 90
Nous payons actuellement le manque
d’investissements dans le secteur des
matières premières de façon générale
de la fin des années 90 lorsqu’on
n’avait d’yeux que pour les marchés
28-31
financiers et les start-ups.
24 mai 2012 Les Afriques
.3
SOMMAIRE
48
DOSSIER
Areva, affaire radioactive
52
FOCUS
France : les vrais drapeaux
Les printemps arabes ne
laisseraient encore de
traces qu’en Egypte
54
DÉCOUVERTE
Le périple d’Ibn Battuta,
à travers le caftan marocain
«Aujourd’hui, le printemps arabe n’a
plus d’incidence sur les marchés
pétroliers», souligne Francis Perrin,
directeur de Pétrole et Gaz arabes et
auteur du chapitre Energie du
Rapport Cyclope 2012.
32-33
56
VU DE NEW YORK
Crise de l’Euro :
tout est mélangé
60
POINT DE VUE AFRICAIN
Une malédiction plane sur
le nouveau président français
64
MEDIAS
66
ARRÊT SUR IMAGE
Jamie Dimon (au centre)
président de JP Morgan
68
EMPLOI
Monde arabe : de l’emploi pour les jeunes
Algérie : les leçons des
législatives du 10 mai 2012
72
ARCHIVES D’AFRIQUE
De la Rodhésie au Zimbabwé, 32 ans après…
74
PIED DE LETTRE
L’intégration au cœur du développement
Aux élections législatives, quelque
64,76% de la population algérienne,
soit environ les deux tiersabstention et bulletins nuls- n’ont
fait aucun choix. Un taux qui reflète
une démobilisation importante.
Cameroun : bon cru
de la Sodecoton
Grosse performance réalisée par la
Société de Développement du Coton
du Cameroun (Sodecon). Elle a
amassé pour l’exercice 2011 quelque
10,5 millions de dollars contre 2,350
millions de dollars en 2010.
36
Secrétaire de Rédaction : Daouda Mbaye.
Président administrateur délégué
Abderrazzak Sitaïl
Filiale Maroc
Les Afriques Communication & Edition SARL
219 bis, bd Zerktouni, Casablanca 20330 - Maroc
Tél : +212 522 233 477 - Fax : +212 522 233 501
Editeur
Edition Financière du Sud (Paris), filiale à 100% de
Les Afriques Edition et Communication SA.
Directeur de la Publication
Abderrazzak Sitaïl
Directeur de la Rédaction
Adama Wade
[email protected]
Rédacteur en chef délégué Ismaïla Aidara, Paris, Dakar.
Rédacteur en chef Louis Amédée, UEMOA.
Rédacteur en chef Achille Mbog Pibasso, CEMAC.
Rédacteur en chef Walid Kefi, Maghreb.
4 Les Afriques .
24 mai 2012
Dans ses premières déclarations
suite à son élection à la tête de la
confédération patronale marocaine,
Meriem Bensalah a mis l’accent sur
la réhabilitation de la PME
marocaine.
37
42-47
Grand reporter : Rodrigue Fenelon Massala.
Siège Social
Groupe Les Afriques Edition & Communication S.A.
Société anonyme au capital de 2’200’000.- CHF
Place Cornavin 14 - 16 - 1201 Genève - Suisse
Meriem Bensalah
Présidente de la CGEM
Directeur Développement et Marketing
Libasse Ka
[email protected]
Rédaction :
Walid Kefi, Tunis, Ismaïla Aidara, Paris, Dakar, Louis
Amédée, UEMOA, Achille Mbog Pibasso, CEMAC,
François Bambou, Yaoundé, Bénédicte Chatel, Paris, Anne
Guillaume-Gentil, Paris, Adama Wade, Casablanca,
Mohamed Baba Fall, Casablanca, Khalid Berrada,
Casablanca, Nadia Rabbaâ, Casablanca, Daouda Mbaye,
Casablanca, Olivier Tovor, Lomé, Willy Kamdem, Yaoundé,
Amadou Seck, Nouakchott, Mohamedou Ndiaye, Dakar.
Conseiller en charge des relations internationales
Comité Scientifique :
Guy Gweth, Paris. Intelligence économique.
Thierry Téné, Lille. Environnement et RSE.
François Konan, New York. Politiques économiques.
Philippe Bourgeois, Paris. Matières premières et coton.
Commercial,
[email protected]
[email protected]
Responsable Artistique : Mouhcine El Gareh
Maquettiste : El Mahfoud Ait Boukroum
Edition Internet – en français
Adama Wade, Casablanca.
Ismaïla Aidara, Dakar.
Mohamedou Ndiaye, Dakar
Chroniqueurs
François Konan, New York. Economie.
Philippe Bourgeois, Paris. Matières premières et coton.
Balla Moussa Keita
Responsable e-Marketing :
Khalid Essajidi
Responsable Abonnement et Distribution
Mouna Elbar
[email protected]
Diffusion
Presstalis, Sochepress,
Royal Air Maroc, SN Brussel.
Impression
Rotimpres, Aiguaviva (Spain).
Dépôt légal : novembre 2010
© Reproduction interdite sans l’accord écrit
de l’éditeur
Edition internationale
Commission paritaire : 1012 C 89135
Crédit photos
AFP, DR
ÉDITORIAL
Adama Wade
Directeur de la Rédaction
Jules Ferry
La fausse et la vraie polémique
I
l y avait un invité encombrant lors de la
cérémonie de prestation de serment de François
Hollande. Cet homme qui a traversé des siècles
c’est Jules Ferry, père de l’école laïque et
obligatoire à la française. Pour les anciens
colonisés que nous sommes, nous retiendrons
plutôt que Jules Ferry est l’inspirateur du
discours colonial. C’est lui qui prononça ces propos
datés de 1885 devant les députés français : «messieurs, il
faut parler plus haut et plus vrai ! il faut dire ouvertement
qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des
races inférieures, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles
ont un devoir de civiliser les races inférieures». Et de
fustiger, dans son élan moral, les comportements des
chercheurs d’or espagnols, par opposition aux douces
méthodes françaises. Déjà, les prémices du débat futur
sur les bienfaits de la colonisation.
Ce discours a vécu mais les postures ont demeuré, à
Gauche comme à Droite. La Gauche des «races
supérieures» s’est muée le long des évolutions en une
gauche «Bauliste» et Droit de l’Hommiste tandis que la
Droite résume toujours sa vision dans les intérêts
stratégiques de la France.
Il est assez étonnant que les africains se montrent
aussi surpris de l’hommage rendu à Jules Ferry,
personnage centrale de l’histoire politique française.
N’est-ce pas sa déclaration revisitée que nous
entendons encore dans les forums de la charity
business ou les sommets du G8: «il y a un devoir pour
l’Europe et les USA à aider l’Afrique» ?
Nous devrions surtout nous indigner que, 127 ans après
le discours de Jules Ferry, et 50 ans après
l’indépendance, l’Afrique soit incapable de se prendre
en charge. La colonisation a pris fin, mais sa structure
symbolique est toujours de mise dans des frontières
mentales et physiques qu’elle a léguée aux africains et
dans une chaîne de dépendances étroites vis-à-vis des
anciennes métropoles entretenues par des rapports
asymétriques.
S’il y a polémique, elle devrait venir de cette situation
qui fait que nos diplômés Bac +15 préfèrent affronter
les requins de Gibraltar pour franchir la forteresse
Europe où les attendent de petits boulots, la
déconsidération et, à la longue, la «sous humanisation»,
plutôt qu’une carrière en Afrique.
Que ces milliers de candidats à l’exil et à la mort
préfèrent ce triste sort à une vie citoyenne en Afrique, en
dit long sur les conditions de vie dans notre cher
continent et sur la capacité de notre élite à conduire le
changement à l’instar de son homologue de l’Asie.
L’Afrique est riche dites-vous ? Certes, mais nos Etats
emploient beaucoup d’argent et de temps d’abord pour
se neutraliser dans des guerres de leadership sans
lendemain. L’absence totale de concertation entre les
producteurs africains de pétrole, de fer, de phosphates et
de cuivre, accentue le faible poids du continent face aux
négociateurs mondiaux. Au lieu de faire le marché, nous
subissons le marché. N’attendons pas que de sa tombe
Jules Ferry vienne nous présenter des excuses pour des
phrases sorties de leur contexte. Bornons –nous à
travailler et à transformer le quotidien de nos
populations. Alors l’histoire sera différente.
24 mai 2012 Les Afriques
.5
BAROMÈTRE
Chiffres
710 000
FACEBOOKER
SÉNÉGALAIS
Koffi Annan rappelle l’urgence aux
chefs d’Etats africains
Dans un rapport détaillé, l’ex-Sg de l’ONU, Koffi
Annan, a appelé au forum d’Addis Abeba, les gouvernements africains à donner du travail à la jeunesse :
«les gouvernements devraient s’inquiéter du bien être de
leur population et imaginer des politiques qui améliorent leur vie». A méditer.
Qui passent en moyenne
30 minutes par jour. La
lutte fait partie de leur
principal centre d’intérêt.
67
MILLIARDS
DE F CFA
Mali : Amadou Haya Sanogo persiste
Les médiations Mali-Cédéao se heurtaient à l’heure
où nous mettions sous presse à l’obstination du capitaine Amadou Haya Sanogo déterminé selon ses
dires à imposer «une solution à la malienne». Une
expression qui a pris de court les émissaires dépêchés à Bamako, qui ont constaté tout juste le quasirégime de résidence surveillée du président par
intérim, Dioncounda Traoré.
Débloqués par le
gouvernement ivoirien
pour la réhabilitation des
universités publiques.
Côte d’Ivoire : Marcel Zadi Kessy se
met au travail
Connu pour avoir négocié le virage serré de la privatisation des compagnies d’électricité de Côte
d’Ivoire et pour avoir, socialement, transformé son
village d’origine grâce à l’application de simples méthodes de collectivisme utile, Marcel Zadi Kessy est
entrain de dépoussiérer le Conseil économique et
social (CES). Nommé à la tête de cette institution, il
y a quelques mois, ce cadre dynamique travaille à un
plan d’action novateur. Nous y reviendrons.
3 386
MILLIARDS
DE F CFA
Capitalisation du
compartiment actions de
la Bourse régionale des
valeurs mobilières
d’Abidjan le 15 mai
dernier.
Afrique du Sud : Mais qu’arrive-t-il à
Frédéric de Klerk ?
Le dernier président sud-africain, sous le régime de
l’apartheid est actuellement sur la sellette pour avoir
justifié le principe des bantoustans du régime d’apartheid qui privait des millions de noirs sud-africains du
droit de vote. Du coup, le syndicat national des travailleurs de la Santé et ses alliés (Nehawu) a demandé
que le Prix de la Paix de l’ancien président sud-africain lui soit retiré. La polémique fait rage.
86%
TAUX
RECORD
Jonathan Goodluck, le leader
Le président nigérian Jonathan Goodluck est le seul
chef d’Etat de la Communauté économique des Etats
de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à se prononcer clairement pour l’envoi des troupes en Guinée Bissau et
au Mali. Interrogés sur la question, de nombreux
chefs d’Etat se plaignent de la conjoncture. Le rétablissement de la démocratie a, forcément, un prix que
Goodluck ne veut pas marchander.
6 Les Afriques .
24 mai 2012
De la dette publique
française le jour même de
l’investiture de François
Hollande.
45
MILLIARDS
DE F CFA
Engagés par l’UE au Bénin
en 2011.
Jean Ping s’accroche mordicus
Alors qu’il a échoué à se faire élire les 29 et 30 janvier
lors du Sommet de l’UA tenu à Addis Abeba, le gabonais Jean Ping s’accroche toujours au fauteuil de président de la Commission de l’UA. Confronté au
barrage de l’Afrique du Sud, des pays de la SADC et à
quelques défections de quelques uns de ses plus
grands soutiens, le gabonais retrouvera sa rivale, la
sud-africaine Dlamini Zuma, lors du prochain sommet de l’UA, prévu à Malawi en juillet prochain.
T
N
E
M
E
N
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BRUITS DE MARCHÉ
Côte d’Ivoire : le budget très souverain
des Ouattara
Maroc : Lloyd’s Register Quality Assurance
(LRQA) prospecte
Si l’on en croit la Lettre du Continent, le président
Alassane Ouattara dispose d’un budget de souveraineté de 300 milliards de f CFA (457 millions
d’euros) contre seulement 100 milliards pour son
prédécesseur. Le pactole serait géré par Téné Birhaima Ouattara, alias «Iibo», frére cadet du président ivoirien, qui est ministre chargé des
Affaires présidentielles. Le cabinet de madame
Dominique Ouattara fonctionne à partir du même
fonds de souveraineté, selon le quinzomadaire
parisien, généralement très informé des us et
coutumes de la françafrique.
Casablanca accueille le leader
mondial de l’audit
et de la certification de systèmes
de management à
valeur ajoutée,
Lloyd’s Register
Quality Assurance
Mike James, directeur général de
(LRQA). «Nous déLRQA (à gauche) lors d’une précédente remise d’un certificat
sirons nous rapISO 50001.
procher des
opérateurs économiques marocains en les soutenant dans l’amélioration de leur performance»,
souligne à ce propos Jean-Maurice Crozet, Directeur Général Délégué, LRQA France. Pour rappel,
Lloyd’s Register Quality Assurance (LRQA) dispose
d’un réseau mondial de plus de 1700 auditeurs,
assurant la certification de plus de 45000 clients,
dont une large proportion de grands comptes internationaux (50% de 200 premiers groupes mondiaux utilisent les services de LRQA).
Ex-Im Bank renouvelle son assurance
export sur l’Afrique
Sénégal : Cheikh Amar en ligne de mire
La Banque Export-Import
des États-Unis (Ex-Im
Bank) renouvelle son programme «Short-Term
Africa Initiative» pour
une période de trois ans.
Il s’agit d’offrir une couverture d’assurance-crédit à l’exportation aux entreprises américaines
effectuant des ventes en direction de 18 pays
d’Afrique subsaharienne pour un montant maximal de 100 millions de dollars (50 milliards de
f CFA). Le Cameroun, l’Ethiopie et la Tanzanie devront bientôt être intégrés à la liste suite à une
évaluation de risques. Depuis 2002, Ex-Im Bank,
présidée par Fred Hochberg, a autorisé 4 milliards de dollars pour soutenir des exportations
américaines vers l'Afrique subsaharienne.
8 Les Afriques .
24 mai 2012
Le patron de la société TSE n’a pas été retenu dans
le marché de 6,5 milliards de f CFA relatif à la commercialisation de l’urée au Sénégal. L’Etat sénégalais a adjugé l’affaire à six sociétés que sont
Agrofitex, Sedap , Agrophitx, Matix, ICS, Senchim et
SEMAC. Pour les observateurs, Cheikh Amar paie
avec la perte de ce monopole sa proximité avec le
clan Wade. Faux rétorque une voix non autorisée,
qui rappelle que Cheikh Amar était le moins disant
pour la fourniture d’un marché des engrais estimé
à 84 000 tonnes.
Après avoir rénové
la grande mosquée
de Touba à coup de
milliards, le vent
serait-il entrain de
tourner pour
Cheikh Amar ?
Cheikh Amar, patron de TSE
Sénégal : alternance houleuse au Port de
Dakar
Bénin : le coûteux pari de Boni Yayi sur le
coton
En six ans, le président Boni Yayi a injecté 75 milliards de FCFA dans la filière coton pour l’apurement des dettes et la subvention des intrants
agricoles. Aujourd’hui, le problème reste entier
puisque la filière de l’or blanc cumule 75 milliards
sans pour autant parvenir à portée de son objectif de production de 600 000 tonnes annuelles.
Le dernier conseil d’administration du Port Autonome de Dakar (PAD) a remercié le DG, Bara Sady,
un homme du sérail de Wade qui sera resté dix
ans à la tête de cette institution stratégique. Le
nouveau directeur général du PAD est docteur
Cheikh Kanté, qui est entre autres ambassadeur
de l’Université Dauphine et PDG du groupe
SEMAC/GLAC. Pour la petite histoire, rappelons
que la SEMAC est l’un des heureux adjudicataires
du marché des engrais. Se défendant de toute collision d’intérêts, le nouveau DG du port rappelle
que l’appel d’offres a été lancé bien avant sa nomination. Bon à savoir.
France : nouvelle riposte à la concurrence
chinoise en Afrique
L’Agence pour le Développement des Entreprises en
Afrique (ADEA) a joué un grand rôle dans la mise en
place par la Coface (compagnie française d’assurance
du commerce extérieur) de garanties au profit des entreprises françaises pour des marchés supérieurs à 1
millions d’euros ; Ce dispositif orienté sur l’Afrique
permet aux entreprises de l’Hexagone de tenir la dragée haute à des chinois qui disposent de moyens de
soutiens plus importants. Prochaine étape, faire bénéficier aux clients africains de conditions financières
intéressantes. Entre l’offre chinoise et l’offre française,
le client africain devrait trouver sa voie.
Togo : bientôt une usine
d’acide phosphorique
RDC : plan de vol compliqué pour
Jean Marc Pajot
Bien loin le temps où la
production du phosphate
au Togo atteignait les 3
millions de tonnes. Avec à
peine 800 000 tonnes, le
pays perd de son importance dans la carte géopolitique de ce minerai. Plongé dans un long coma
depuis quelques années, la Société nouvelle des
phosphates du Togo (SNTP) commence à bouger
de nouveau. Dans le menu, un programme d’investissements d’une valeur de 28 milliards de
f CFA pour l’acquisition des équipements performants. La phase d’exploitation nécessitera 48
milliards de f CFA. Le grand saut qualitatif reste
cependant la production d’une usine d’acide
phosphorique. Seul hic, où trouver les investissements nécessaires (260 millions de dollars) ?
Le directeur général de la compagnie aérienne
flyCongo, Jean Marc Pajot, a déclaré récemment
vouloir apporter «une correction des erreurs du
passé». FLyCongo envisage de s’adapter aux critères modernes. Premier chantier important, le
renouvellement de la flotte. A sa prise de fonction
le 16 janvier, Jean Marc Pajot a trouvé 12 avions
dont 7 d’ancienne génération, quatre MT 82 provenant d’Afrique du Sud et un Boeing 767 venant
des USA. A noter que FlyCongo est en fait le nouveau de nom de Hewa Bora, une compagnie qui
avait connue le crash meurtrier (80 morts) d’un
Boeing vieux de trente ans en juillet 2011. Pour le
collectif des victimes de Hewa Bora qui réclame
indemnisation, ce changement de nom consécutif
à la perte de sa licence de vol ne doit pas dédouaner l’ex Hewa Bora de ses responsabilités.
24 mai 2012 Les Afriques
.9
BRUITS DE MARCHÉ
Gabon : guichet unique pour
les titres fonciers
L’ouverture prochaine d’un guichet unique pour
les titres financiers permettrait de réduire les délais d’attente, estimés actuellement à 10 ans... Le
directeur général de l’Agence nationale de l’urbanisme, des travaux topographiques et du cadastre
(ANUTIC), Yannick Mokanda, veut réduire les
étapes d’obtention de 134 à 7 et de 10 ans à 6
mois. Reste à mettre en musique toutes les administrations concernées.
Maroc : Sogatour devient Hotels & Resorts
of Morocco (HRM)
Sogatour, la filiale de CDG Développement en charge
de la gestion du parc hôtelier, opère une refonte stratégique en devenant HRM. La nouvelle entité vise à se
positionner comme l’acteur incontournable du secteur hôtelier au Maroc.
Portée par les nouvelles ambitions du Groupe CDG
dans le cadre de la nécessaire structuration du secteur, la filiale entend moderniser son portefeuille, qui
comporte actuellement 15 hôtels, et l’étendre à d’autres établissements.
Côte d’Ivoire : l’initiative PPTE avant
le 30 juin
USA : une tête tombe à JP Morgan
En six semaines, JP Morgan qui a gagné 5 milliards de dollars a perdu
2 milliards dans des positions hasardeuses. C’est
Ina Drew, Directrice des
le dénouement de l’affaire de la baleine dont la investissements JP Morgan
presse financière s’était faite l’écho en avril dernier. En réaction, la banque a limogé sa directrice
des investissements, Ina Drew, l’une des femmes
les plus puissantes de Wall Street, qui met fin à une
carrière de trente ans. La purge devait aussi se
poursuivre à Londres où plusieurs responsables de
la salle de marché devaient tomber.
Macky Sall plus riche que François Hollande
François Hollande, le nouveau président français, dispose d’un patrimoine de 1,19 millions d’euros contre
2 millions d’euros pour son homologue sénégalais,
Macky Sall. Faut-il déduire qu’une carrière politique
est plus rentable financièrement à la tête d’un PMA et
PPTE qu’à la tête de la cinquième puissance économique mondiale ?
Nouvel emprunt de la Côte d’Ivoire
La Direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique (DGTCP) de Côte d’Ivoire a entrepris le lancement d’un emprunt obligataire par
appel public à l’épargne dénommé TPCI 6,00 %
2012-2015. Il s’agit de récolter 60 milliards f CFA
par émission de 6 millions d’obligations d’une valeur nominale de 10.000 f CFA chacune. Cette
levée permettra de faire face aux travaux de la reconstruction post-crise.
Madani Tall, Directeur des Opérations
de la Banque mondiale en Côte d’Ivoire
«Si tout se passe bien, la Côte d’Ivoire devrait atteindre le point d’achèvement avant le 30 juin», déclare Madani Tall, directeur des opérations de la
Banque mondiale en Côte d’Ivoire. L’institution
mondiale qui doit tenir son conseil d’administration
le 26 juin, soit un jour après celle du FMI, se garde
pour le moment d’avancer des promesses fermes.
10 Les Afriques .
24 mai 2012
Alassane Ouattara, Président de la Côte d'Ivoire
Hollande ne viendra pas à Kinshasa ?
Erratum
Dans le n°201 du magazine Les Afriques, paru du
10 au 16 mai 2012, nous regrettons une malencontreuse erreur, à la page 14. Sur le titre, il fallait lire, «Yann Caillère remplace Gérard
Pélisson à la présidence de Risma», au lieu de
«Amine Echerki remplace Gérard Pélisson».
toutes nos excuses auprès de nos lecteurs et du
groupe Accor.
L’Espagne créé une «Bad Bank»
François Hollande, président de la République française
François Hollande pourrait ne pas venir au prochain sommet de la Francophonie à Kinshasa.
«Pour autant le ciel ne nous tombera pas sur la
tête», déclare un haut responsable du camp présidentiel, qui espère avec l’arrivée des socialistes,
des rapports Paris-Kinshasa moins condescendants. Pour leur part, les partisans de l’opposant
Etienne Tisekeddi ont écrit au nouveau président
français, l’invitant à soutenir la volonté populaire.
Richard Attias tient forum à Libreville
Le franco-marocain Richard Attias veut faire du
New York Forum prévu à Libreville du 8 au 10
juin «le plus grand rassemblement de décideurs
économiques». Les personnalités se bousculent
au portillon. Cas de Muriel Robini, le chairman de
la City Bank ou encore du président Ali Bongo,
qui viendra défendre son engagement et sa foi en
une Afrique Verte. Le Forum se déroulera en trois
langues (Français, Anglais et chinois). Notons
que durant le
même mois de
juin, Attijariwafa Bank tiendra son grand
forum des
hommes d’affaires africains
au Maroc.
Richard Attias, homme d'affaires
L’Espagne créé une
«Bad Bank» sur le modèle irlandais. Ce véhicule réunira tous les
actifs toxiques des
banques espagnoles estimés à 184 milliards
d’euros. La débâcle des
institutions bancaires de ce pays membre de l’Union
Européenne a entraîné la nationalisation de la quatriéme banque. L’Etat espagnol dirigé par la droite a
déjà injecté 19 milliards d’euros pour soutenir son secteur bancaire. Les prochains jours seront décisifs.
Mauritanie : le cadavre
de Mauritania Airways
En pleine Commission mixte mauritano-tunisienne, la mise en liquidation de la compagnie aérienne Mauritania Airways a été suspendue. Motif
avancé, la partie mauritanienne, en l’occurrence
l’homme d’affaires Bouamatou, actionnaire important de la compagnie, ne voulait pas de la liquidation. Pour le personnel, il s’agit là d’une
manœuvre visant à retarder le paiement de ses
droits. En attendant, les sit-in se multiplient au
siège d’une compagnie qui a vu du jour où au lendemain son staff tunisien
prendre la clé des champs.
Ce dignitaire camerounais
qui disait que mieux vaut
une «coopération sûr-sûr
qu’une coopération sudsud n’a pas tort.
24 mai 2012 Les Afriques
. 11
ARRÊT SUR IMAGE
Népal
L’homme le plus court du monde,
Chandra Bahadur Dangi, âgé de 72
ans, sourit au monde du haut de ses
54,6 centimétres.
12 Les Afriques .
24 mai 2012
24 mai 2012 Les Afriques
. 13
VERBATIM
Fours
Feu
«Il n'y avait pas de fours,
c'est un mensonge (...) Il n'y
avait pas de chambres à gaz
non plus»,
Nikolaos Mihaloliakos, dirigeant du parti grec d'extrême-droite «Aube dorée»,
«Un feu de prairie de dette
est en train de ravager
l'Iowa et notre pays, et les
jours s'écoulent sans que
nous agissions, alors que
ce feu se rapproche des
maisons et de nos enfants
bien-aimés»
Le présidentiable républicain Mitt Romney
à propos de la Shoah.
Diversion
Pour le président Macky Sall
c’est très facile de justifier
ses revenus : il a été directeur
général, ministre d’Etat,
Premier ministre et président de l’Assemblée nationale. Donc c’est un faux
débat et une diversion…»
El Hadj Kassé, Conseiller spécial du chef de l'Etat
sénégalais
Problèmes
«Je ne peux régler en 5 mois
des problèmes de 50 ans»
L’islamiste Abdelilah Benkirane, chef du gouvernement
marocain
Sacré
«Le vendredi est un jour
sacré pour les musulmans.
Mais qui sont les musulmans et qui ne sont pas les
musulmans ?»
L’activiste
mauritanien
Biram Ould Dah Abeid arrêté pour avoir incinéré des livres légitimant l’esclavage.
Génération
«Ma génération a fait son
temps»
Abdelaziz Bouteflika, président d’Algérie
Transaction
«Ma détention prolongée serait à l'instigation du président français et aurait pour
but de l'empêcher de révéler
les détails de cette transaction...».
L'ex-Premier ministre libyen
Al Baghdadi Al Mahmoudi à propos du financement
de la campagne de Sarkozy en 2007.
Temps
«Peu importe le temps que
cela prendra, je vais diriger
l’ANC. Je ne suis pas inquiet
avec ce qui se passe en ce
moment, c’est un test»
Julius Malema, l’ex-leader
des jeunes du Congrès national africain (ANC)
14 Les Afriques .
24 mai 2012
Liés
« Cela a été dit avant moi,
que pauvreté et emploi apparaissent organiquement
liés. Car quand on parle
d’emploi, on pense à tous les
jeunes diplômés, disons,
qu’ils sont sous employés ou
au chômage. Sacrifier cette jeunesse, c’est accabler nos
pays dans la pauvreté »
Idriss Deby Itno, président du Tchad
Avoir
«David Beckham est l'un
des rares gars qui peut être
un dur sur le terrain, et
avoir en même temps sa
propre ligne de sous-vêtements»
Barack Obama à propos de
l’ancienne gloire de Manchester
SUR LE WEB …
Paul Kagamé Champion du Tweet
Si le président rwandais excelle dans Tweeter, d’autres
tardent encore à succomber aux vertus de ce média social ? Quid d’Ali Bongo, de Jacob Zuma, de Macky Sall ... ?
L
e dernier tweet posté par le président sud-africain Jacob Zuma
date du mois de mars 2012, et
c’était pour annoncer son arrivée à
Kimberely (Nord-Ouest du Cap). En
tout et tout, le président de la nation
arc en ciel n’a posté que 87 tweet depuis qu’il a rejoint ce média social. A
ce rythme, ces 118 579 abonnés devraient bientôt s’en lasser. C’est sans
conteste Paul Kagamé (61 061 abonnés) qui est le chef d’Etat africain le
plus habitué à Tweeter. Dans la seule
journée du 10 mai, le président rwandais a posté cinq messages, commentant les résultats du forum d’Addis
Abeba sur l’économie africaine. Le
premier mai, l’ancien rebelle livre un
mini discours sur le Net exaltant la valeur travail, chemin qui mène vers la
dignité. Entre une petite pique sur la
Banque mondiale (16 avril), des félicitations à l’équipe zambienne de
football, victorieuse de la CAN, le président partage sa vision de l’Afrique et
de son pays sans passer par les canaux
déformants des communicants. Les
spins doctors se laisseront-ils courtcircuiter ainsi encore longtemps ? Pas
tout à fait, puisque, à parcourir rapidement la page des supporters d’Ali
Bongo, l’on remarque un encadrement serré du verbe. La communication sur le président est faite à la
troisième personne dans le dernier
tweet posté… le 14 août 2009, ce qui
correspond dans l’échelle temporelle
du web, à l’ère glaciale. Autre chef de
l’Etat abonné à tweeter, Macky Sall. La
dernière fois que le président sénégalais a tweeté, c’était le 24 avril, bien
avant son sacre. «Je félicite les lionceaux
pour cette qualification aux jeux olympiques de Londres. Au nom de la Nation…». Nul doute, Macky ne tweete
pas comme Kagamé ou Zuma, mais
bien entouré de ses conseillers. Or,
tout l’intérêt des retombées d’un
tweet est de faire sentir à ses «followers» (2952 dans le cas du président
sénégalais) la spontanéité du message,
échappé comme un cadeau du ciel du
protocole et de la bureaucratie. Dans
un message publié le 18 avril, Macky
sert à ses abonnés une lourdeur qui
rappelle les discours sous Louis XVI :
«la conférence de presse avec mon homologue français Nicolas Sarkozy»…
Inutile dans ce florilège de présidents
abonnés à Tweet de chercher le capitaine Amadou Sanogo, sans doute occupé à se faire reconduire vers le
pouvoir qu’il avait fait mine de céder,
ou encore Mohamed Abdel Aziz de
Mauritanie, pourtant bon orateur. Par
contre, la page du président Paul Biya
(673 abonnés et 57 tweet) est bien là,
figée depuis le 18 octobre avec ce message solennel en français et en anglais
: «ensemble, nous allons encore faire
de grandes choses», adressé au peuple
camerounais. Même solennité guindée de la part du président Faure
Gnassingbé, suivis par 1354 internautes, et qui a utilisé le «Je» pour la
dernière fois le 22 septembre 2009,
pour dire : «mon avion a atterri à 18
heures (22 heures GMT) à l’aéroport
de Teteboro dans le New Jersey. Et si
tous nos présidents allaient fraternellement effectuer des stages d’utilisation des médias sociaux sur les
hauteurs de Kigali ?
Adama Wade
Paul Kagamé,
président de la
République du
Rwanda
Les Smartphones et
les joues tombantes
Les adeptes des nouveaux bijoux de
technologie seraient victimes du
«visage Smartphone» («Smartphone face», en anglais), peut-on lire
sur le magazine en ligne I 7 sur 7. Les
experts de l'American Society of
Plastic Surgeons pensent que l'utilisation prolongée de GSM pourrait
être à l'origine des bajoues. En cause,
de longues heures passées sur les tablettes, GSM et autres ordinateurs,
le visage penché en avant.
La tablette i Pad fait
des ravages
Lors présentation des résultats enregistrés par Apple au dernier trimestre. Tim Cook, le PDG de la firme, en
a profité pour dire que pas moins de
11,8 millions d’i Pad ont trouvé preneurs, soit plus du double par rapport au même trimestre de l’année
précédente. Cook a d’ailleurs fait un
petit commentaire amusant sur la situation : «Deux ans après avoir lancé
le premier iPad, nous avons vendu 67
millions d’exemplaires du produit. Il
nous aura fallu 24 ans pour vendre
autant de Mac, 5 ans pour vendre autant d’i Pad et plus de 3 ans pour
écouler autant d’i Phone.
Et si vous êtes tentés
de prendre des parts
dans Facebook
C’est sans
conteste Paul
Kagamé (61
061 abonnés)
qui est le chef
d’Etat africain
le plus habitué
à Tweeter.
L’entrée prochaine de Facebook en
Bourse pour une capitalisation estimée à 100 milliards de dollars risque
de faire des déçus. Les 900 millions
d’utilisateurs ne bénéficient d’aucun traitement de faveur. Les 337
millions d’actions mises à prix entre
28 et 35 dollars iront d’abord,
comme c’est le cas lors des introductions, aux investisseurs institutionnels et aux particuliers les plus
aisés. Le plus célèbre réseau social au
monde est tout sauf socialiste.
24 mai 2012 Les Afriques
. 15
BANQUES ASSURANCES
Forte montée des risques à la
BCP suite à l’affaire Comarit
Le portefeuille de la Banque Populaire devra
particulièrement souffrir de l’affaire Comarit. Au-delà
d’un effort de provisionnement exceptionnel, c’est de
l’usage pratique des règles prudentielles édictées par
Bank Al Maghrib dont il s’agit. Comment la BCP s’est
retrouvée aussi loin de ses normes ?
L
Racheter la
Comanav Ferry
n’était-il pas le
meilleur moyen
d’asseoir sa
domination sur
le trafic juteux
entre TangerNador et les
différents ports
méditerranéens
(Marseille, Sète,
Algésiras) ?
16 Les Afriques .
24 mai 2012
es déboires de la Comarit ont commencé
le jour où l’homme d’affaires Abdelmoula,
figure omnipotente du capitalisme tangérois et armateur à succès, décide de racheter Comanav Ferry auprès de la
CMA-CGM. Nous sommes en 2009. L’opération est
largement commentée par les banquiers mais aussi
par des professionnels étonnés qu’un des leurs, déjà
très endetté, puisse faire de nouvelles acquisitions par
le biais d’un prêt de la Banque populaire et, de surcroît, s’offrir une position dominante sans faire réagir le ministère de l’équipement et du transport.
A la tête d’un pool bancaire local, la BCP avait-elle
fait la due diligence nécessaire au moment d’accorder
ce prêt financé à guichet ouvert ? Ce financement at-il été effectué dans le respect de la réglementation
bancaire et l’obligation de conseil ? Y-a-t-il eu soutien passif voire abusif ?
Cela d’autant qu’une année avant ce rachat, le patron
de la Comarit venait de conclure un divorce onéreux
avec ses partenaires norvégiens. Ces derniers ne souhaitaient pas que le fils d’Abdelmoula, le très médiatisé Samir Abdelmoula, éphémère maire de Tanger,
accède à la tête de la Compagnie.
En bon homme d’affaires, le patriarche Abdelmoula
fait mine de vouloir se désengager, valorisant la Comarit au prix fort. Les norvégiens, véritables loups de
mer, sautent sur l’occasion et, bien accrochés à la valorisation proposée par leur partenaire marocain,
proposent d’en sortir. Piqué sur le vif par ce coup de
Trafalgar, Abdelmoula cède et lâche un chèque douloureux : 70 millions d’euros, accordés grâce à la BCP.
C’est le prix déboursé par le patron de la Comarit
pour se retrouver seul maître à bord et imposer son
fils aux commandes.
Alors qu’un tel rachat préconisait une navigation
prudente, voilà qu’intervient l’affaire du rachat de la
Comanav Ferry. En fait un piège tendu par l’armateur franco-libanais Jacques Saadé, acquéreur du
groupe Comanav par le biais de la privatisation et
qui, au lendemain même de son acquisition, a voulu
se débarrasser du pôle passagers. La plupart des
compagnies méditerranéennes déclinent poliment
l’offre. Les navires de la Comanav étaient vieux,
ayant largement dépassé leur délais d’amortissement. Alors que Balearia et Transmediterranea déclinent poliment, l’homme d’affaires Abdelmoula se
jette dans le bain. Racheter la Comanav Ferry n’étaitil pas le meilleur moyen d’asseoir sa domination sur
le trafic juteux entre Tanger-Nador et les différents
ports méditerranéens (Marseille, Sète, Algésiras) ?
Montant de cette acquisition : 800 millions de dirhams déboursé à Jacques Saadé et payables en plusieurs traites grâce encore une fois à la BCP.
Abdelmoula s’impose sur le Détroit.
Comarit et Comanav Ferry, l’absence de
synergie.
C’est ce jour là, témoigne un opérateur privé, que
les déboires ont vraiment commencé. «Rien n’est
fait pour assurer la synergie entre la Comarit et la
Comanav Ferry. Dommage que les banquiers considèrent naïvement leur mission finie dés qu’ils ont
accordé un financement à un entrepreneur», soupire notre opérateur qui rappelle qu’à cause du cas
Comarit, les fournisseurs exigent désormais aux
BCP Siège à Casablanca
24 mai 2012 Les Afriques
. 17
BANQUES ASSURANCES
Mohamed Benchaâboun,
président directeur
général de la Banque
centrale populaire (BCP)
Dans un ultime
rebond de cette
affaire qui sent
la manœuvre de
Boutakoff, les
banques se
voient proposées
un plan inédit qui
porte la
signature de
Toufiq Ibrahimi,
ex président de
la Comanav, à la
tête d’une
nouvelle entité,
Morocco Ferries,
doté d’un capital
d’un million de
dirhams.
18 Les Afriques .
24 mai 2012
armateurs de payer d’avance.
A la tête des deux entités, la famille Abdelmoula a
plutôt privilégié le mode de l’évolution séparée. Son
côté sentimental lui fera privilégier la Comarit, son
bébé, au détriment de la nouvelle acquisition. La
concurrence est vive entre les deux compagnies sensées travailler en harmonie. Les luttes de pouvoir sont
implacables. Le chef d’armement de la Comarit s’impose de facto sur celui de la Comanav. Le chiffre d’affaires des deux compagnies, qui avoisinait en ce
moment 2,5 milliards de dirhams, évolue mais moins
vite que la montée des charges sociales et les coûts
d’une gestion qu’il reste à évaluer.
Affaire embarassante pour Aziz Rebah
N’importe quel acquéreur aurait préconisé au moment de la reprise un plan social. Abdelmoula se
contente de traquer les charges, allant jusqu’à tailler
sur les repas et traitements de marins et à chercher des
économies de bout de chandelles. Les 1 700 salariés
sont démotivés. La crise guette, approche et finit par
éclater avec la série de saisies qui frappent le groupe
depuis janvier dernier. Début mai, 10 des 11 bateaux
étaient sous le coup d’une saisie conservatoire dans
des ports européens . Le dernier ferry encore en activité navigue avec une épée de Damoclés pendante.
L’un des créanciers qui ont exercé la saisie n’est autre
que le franco-libanais Jacques Saadé qui réclame les
impayés relatifs à la vente de la compagnie.
Le dossier finit par tomber dans les mains d’Aziz
Rebah, nouveau ministre de l’équipement et du
transport, qui passera tout le mois d’avril à essayer
à trouver un arrangement. Dans un premier temps,
le ministre a voulu solliciter des établissements publics comme la Caisse de Dépôt et de Gestion. Il reviendra bredouille. La forte dimension sociale du
dossier oblige le ministre à prendre les devants, lançant un appel d’offres pour la desserte des lignes de
la Comarit afin de ne pas perturber l’opération de
retour des MRE (marocains résidents à l’étranger)
qui affluent par milliers vers leurs pays d’origine
entre juillet et septembre.
Dans un ultime rebond de cette affaire qui sent la
manœuvre de Boutakoff, les banques se voient proposées un plan inédit qui porte la signature de Toufiq Ibrahimi, ex président de la Comanav, à la tête
d’une nouvelle entité, Morocco Ferries, doté d’un capital d’un million de dirhams. En gros, ce plan propose aux créanciers de mettre en place une nouvelle
société qui va affréter les navires durant la haute saison. Le sursis accordé à la Comarit permettra à la
compagne de poursuivre son activité, en attendant la
recapitalisation et l’entrée d’un industriel dans le capital. Morocco Ferries devait poser 100 millions de
dirhams et lever le double sur le marché.
Préalable posé pour la réussite de ce plan, un accord
entre toutes les parties concernées et le paiement des
7 mois d’arriérés de salaires du personnel. Les
Abdelaziz Rabbah,
ministre marocain
de l'équipement
et du transport
Tout porte à
banques, la BCP en tête, hésitent de donner leur garantie dans un plan qu’elles jugent risqué et la condicroire que la
tionnent à celle de l’Etat.
Comarit est
La bataille du Détroit est elle perdue ?
lâchée par ses Finalement, c’est la compagnie italienne Grandi Navi
qui assurera les lignes reliant Sète à Tanger et
créanciers qui Veloci
Nador pendant une année. Les 200 marocains abansur le port de Sète, qui ne pouvaient pas quitpréfèrent faire donnés
ter leur poste (l’abandon de navire pourrait leur
face aux
coûter leur carrière), ont été bénéficiaires d’une décision inédite du Conseil d’administration de ce port
conséquences
français : celui –ci a accepté de renverser la règle des
financières de ce créances privilégiées et passer sa redevance impayée
naufrage plutôt
que d’accorder
Le casse-tête de la BCP
Une éventuelle disparition de la Comarit provoune rallonge
de gros dégâts auprès des banques créansupplémentaire querait
cières dont la BCP, chef de file. L’encours dû par
est évalué entre 2 milliards. En cas
qui aurait permis ladeCompagnie
liquidation, les banques auront à faire face à
des coûts avoisinant les 3 milliards de dirhams.
de sauver la
L’enjeu porte aussi sur environ 1700 emplois. Les
saison et, peut
banques ont pourtant une solution : débourser
besoins financiers de la compagnie évalués à
être, la Comarit. les
450 millions de dirhams. Reste à leur assurer que
par la Comarit (130 000 euros) en deuxième position
après le salaire des marins. Tout porte à croire que la
Comarit est lâchée par ses créanciers qui préfèrent
faire face aux conséquences financières de ce naufrage plutôt que d’accorder une rallonge supplémentaire qui aurait permis de sauver la saison et, peut
être, la Comarit. En conséquence, le Maroc qui assurait une quote part de 48% dans le trafic du Détroit
voit celle-ci retomber à moins de 10% suite à la disparition de la Comarit. La réduction de l’offre entraînera sûrement une élévation de tarifs qui
constituerait une mauvaise nouvelle pour les travailleurs marocains résidents à l’étranger.
Adama Wade
la rallonge ne sera pas un jour comptabilisée dans
les pertes additionnelles. C’est ce qui explique le
refus de la BCP qui sait qu’en ne volant pas au secours de son client elle se retrouvera face à une
perte sèche. Dans tous les cas, la continuation des
activités de la Comarit, par le biais d’une société
de gestion ou d’une société locataire, ou par une
reprise industrielle, ne pourra pas se faire dans
sa configuration actuelle, mais à travers la rupture avec le passé et le passif.
24 mai 2012 Les Afriques
. 19
BANQUES & ASSURANCES
Chris de Noose,
Dg de l’Institut mondial
des Caisses d’Epargne
20 Les Afriques .
24 mai 2012
Chris de Noose «Les vraies Caisses
d’Epargne n’ont pas eu de crise»
Dans les pays en voie de développement, les Caisses d’Epargne et
les banques de détails peuvent jouer un rôle accélérateur de
développement. C’est l’avis de Chris de Noose, directeur général de
l'Institut Mondial des Caisses d’Epargne. Entretien réalisé en marge
du 23e congrès mondial des Caisses d’Epargne tenu à Marrakech les
10 et 11 mai 2012.
L
es Afriques : La crise financière a eu raison de plusieurs
Caisses d’Epargne en Europe,
que seraient vos actions pour donner un coup de main à ces pays ?
Chris de Noose : Laissez-moi vous
dire que les vraies Caisses d’Epargne
n’ont pas eu de crise. Ceux qui ont
su garder de vraies Caisses
d’Epargne n’ont pas eu de problèmes. Leurs pays n’ont pas subi de
crise financière. De fait, la crise financière qui a été suivie par une
crise économique dans plusieurs
pays, a eu raison effectivement de
plusieurs pays, l’état des lieux est
plus frappant en Espagne.
LA : Sur ce point, quelle lecture
faites-vous de ce qui se passe en
Espagne ? Est ce qu’il y a la possibilité d’une propagation dans
d’autres pays d’Europe ?
Chris de Noose : Espérons que non.
Nous allons dans tous les cas, travailler pour stopper le mal. Mais
tout dépend aussi de notre capacité
à réussir une nouvelle relance économique. Pour l’Espagne, personnellement, je n’ai pas trop d’espoir
quant à une reprise économique rapide. Et c’est là que réside le problème. Si on avait moins de
chômage, peut être. Or, vous savez,
qu’aujourd’hui, en Espagne, le taux
de chômage a atteint les 24,5%, et
les gens qui sont en chômage ne
peuvent pas rembourser leurs prêts.
S’il y avait une reprise économique
cela aurait été possible.
LA : Quel regard portez-vous sur
les réalisations des Caisses
d’Epargne de part le monde ?
Chris de Noose : Les Caisses
d’Epargne demeurent des exemples réussis qui ont fait preuve
d’une puissante capacité à se développer avec un minimum de dégâts. Dans les pays sous développés
et en voie de développement, le
modèle des Caisses d’Epargne et
des banques de détails est pertinent. Il permet de trouver des
compromis sociaux. Pour moi c’est
le meilleur modèle.
LA : Quelles sont vous pronostics
économiques pour la fin 2012
début 2013 ?
Pour l’Espagne, personnellement, je n’ai pas trop d’espoir quant à
une reprise économique rapide. Et c’est là que réside le problème. Si
on avait moins de chômage, peut être. Or, vous savez, qu’aujourd’hui,
en Espagne, le taux de chômage a atteint les 24,5%.
Chris de Noose : J’espère que ça ira
un peu mieux, il faut dire que les dirigeants européens ont senti qu’il
ne faut pas penser, uniquement, argent. Mais préparer au fur et à mesure une éventuelle reprise
économique. En mi-mai, on organisera un Sommet à Bruxelles, pour
prendre des décisions sur le sujet.
LA : Quel bilan faites-vous du
23éme congrès des Caisses
d’Epargne tenu à Marrakech les
10 et 11 mai ?
Chris de Noose : L’idée de Bill Gates
d’équiper tous les bureaux, dans les
quatre coins du globe, d’un ordinateur m’a beaucoup inspiré. En se
promenant dans le quartier général
de Bill Gates, j’ai tout de suite su
quelle serait l’idée de la déclaration
de Marrakech. Finalement, Bill
Gates a atteint en quelque sorte son
objectif. L’accès au finance est notre
défi à nous. La proximité est le mot
d’ordre de ce défi. La déclaration de
Marrakech, en toute liberté, cherche
à éliminer les distances entre les
deux rives du financement. C'est-àdire, les banques, les Caisses
d’Epargne et les clients, le citoyen
lambda. On vous donne rendezvous dans trois ans à Washington
pour voir à quel point on va s’approcher de cet objectif.
Propos recueillis par
Sanae Taleb, Casablanca
24 mai 2012 Les Afriques
. 21
BANQUES & ASSURANCES
Marrakech Capitale mondiale de l’épargne
La Mecque touristique marocaine a été pendant
deux jours la capitale des Caisses d’Epargne du
monde, le temps d’un congrès riche en débats. Les
Afriques était au cœur de l’événement.
«E
n ces temps de turbulence, plus que jamais,
l’épargne doit retrouver sa plus simple expression».
Cette phrase de Chris De Noose,
directeur général de l’Institut Mondial des Caisses d’Epargne (IMCE),
reflète l’une des résolutions prises
lors de ce 23ème Congrès des Caisses
d’Epargne tenu à Marrakech les 10
et 11 mai dernier.
En effet, après plusieurs séances de
discussions, les 500 professionnels
participants à ces débats ont tranché.
Il est impératif de favoriser la diversité des prestataires financiers pour
les aider à réaliser une viabilité et
une inclusion financière plus facile.
Les membres d’IMCE réaffirment
leur attachement à l’inclusion financière. Dans ce cadre, l’inclusion financière est synonyme d’«exclusion
bancaire» qui est directement liée à
22 Les Afriques .
24 mai 2012
l’exclusion sociale. Aujourd’hui, les
mesures d’inclusion financière sont
devenues des priorités pour les
banques de détails. Ces derniers doivent nouer une forte relation avec
leur environnement. Sur ce point,
Chris De Noose parle de «globalisation» des banques et des Caisses
d’Epargne. Pour lui, une banque
d’épargne est d’abord une articulation financière entre le local et l’international. Les deux dimensions se
développent, simultanément, pour
garantir un environnement innovant
et riche en alternatives. En d’autres
termes, les intervenants à ces séances
plénières ont appelé à une démocratisation des capitaux. Ainsi, les
congressistes se sont donné le mot.
Désormais, en finance internationale, le malheur des uns ne fera jamais le bonheur des autres. Sous l’ère
de la mondialisation, il faut chercher
Nexim Bank en
phase avec l’investissement indien
Roberts U. Orya, directeur général
de Nigeria Export Import Bank
(Nexim Bank), souligne que l’année
2012 est plus que jamais celle de la
diversification des sources de revenus pour le Nigéria. Il trouve que
c’est la seule option à une époque où
les revenus du pétrole sont devenus
vulnérables, parce que subissant à la
fois des déficits de production et la
volatilité dans les marchés internationaux. Cet avis est partagé par un
certain nombre d’experts qui saluent du reste les efforts de diversification de la banque. Cette institution
bénéficiera certainement des
quelque 250 projets, d'une valeur 30
milliards de $, dans divers secteurs,
notamment ceux des infrastructures, de l'exploitation minière, de
l'agriculture, des télécommunications et de la santé, discutés à la dernière Convention d’Exim Bank en
Inde. Il est ressorti ce cette conclave
que 8 grands entreprises indiennes
ont décidé de mettre le cap sur le Nigeria, une destination de choix sur le
continent, vu la taille de son marché.
Anas Alaoui,
directeur général
de la CDG Maroc
Quatre institutions
de microfinance sur
la sellette au Ghana
Les congressistes se sont
donné le mot.
Désormais, en
finance
internationale,
le malheur des
uns ne fera
jamais le
bonheur des
autres.
La banque centrale du Ghana (Bank
of Ghana, BoG) entend remettre de
l’ordre dans la branche de la microfinance. Ainsi, l’institut d’émission
va très probablement procéder à la
fermeture de 4 institutions de microfinance non agréées. Ces établissements qui ont entamé des opérations
pourraient être contraints à cesser
leurs activités. Il s’agit de la Microfinance Medlorm Ltd, d’African Guarantee Trust Ltd, d’Abbey Cash
Microfinance Ltd et de Swift Financial Services. Franklyn Belnye, chef
de la supervision bancaire à BoG, qui
laisse entrevoir une porte de sortie.
Pour un regain de
la bancarisation au
Nigéria
à amener tout le navire à bon port.
De la sorte, «l’ancrage territorial des
institutions bancaires prend une autre
connotation. Pour garantir des marchés bancaires stables, il s’est avéré, nécessaire, de protéger la coexistence des
différentes structures d’épargne. Les
Caisses d’Epargne financent l’économie, et de part ce rôle, elles doivent
obéir, aussi, à un détachement dans
leurs rapports avec les Etats. La neutralité est la règle d’or à respecter», explique Yves Hubert, président du
Conseil d’Orientation et de Surveillance de la Caisse d’Epargne de Picardie, une banque française de
proximité avec 116 agences.
De fait, depuis toujours, le secteur
bancaire a su contribuer au développement financier. Si aujourd’hui la
machine tombe en panne, c’est que
l’un des maillons de la chaîne est
afonctionnel. Pour José Maria Mendéz, directeur général de la Confédération Espagnole de Cajas de Ahorros
(CECA), «quand la confiance des
épargnants et l’engagement des emprunteurs rejoignent la rationalisation
du profit par la banque, on est à l’abri.
Le déséquilibre entre les trois mène à la
crise. Quand les épargnants paniquent
et retirent leur argent, ils privent les
banques de leurs sources de liquidité,
les emprunteurs se retrouvent, par la
Alain Lemerre,
nouveau directeur
général de la
banque française
Caisse d'Epargne,
Yves Hubert, président du Conseil de
surveillance et Bernard Comolet,
nouveau président
du groupe
La Word Savings Banks Institute en question
La WSBI (World Savings Banks Institute)
réunit 111 membres qui représentent 6000
Caisses d’Epargne et banques de détail socialement engagées. Les membres de WSBI
offrent leurs services principalement aux
particuliers, aux petites et moyennes entreprises et aux autorités locales. Ils opèrent à
travers des réseaux étendus de distribution
qui leur permettent d’offrir des services de
proximité, de portée régionale et de développer une approche socialement responsable dans leurs activités et en faveur de la
société. Le réseau de WSBI couvre 89 pays à
travers le monde, aussi bien dans les régions
en développement que dans les régions développées. Le Congrès de WSBI, organisé
tous les 3 ans, est un forum offrant aux représentants des banques d’épargne et de
détail de tous les continents, l’opportunité
de rencontrer leurs homologues et leurs partenaires d’autres pays, d’échanger leurs expériences et de renforcer leur réseau afin de
développer des actions de coopération.
Ainsi, après l’édition de 2009 à Santiago au
Chili et celle de 2012 à Marrakech, les participants se sont donnés rendez-vous en 2015
à Washington pour la 24ème édition du
Congrès Mondial des Caisses d’Epargne.
La Central Bank of Nigeria (CBN)
ambitionne de pousser les nigérians
à ouvrir 63 millions de comptes
d'épargne en 2020. Cet objectif rentre dans le cadre de sa stratégie d’inclusion financière de l’institut
d’émission. Pour mémoire, cette démarche doit se réaliser en collaboration avec les banques commerciales
et de la microfinance. Le taux de progression de la bancarisation des populations attendu tourne autour de
12% par an, entre 2011 et 2020.
D’ailleurs, à mi-chemin de cette date,
le régulateur fixait un objectif initial
de 39 millions de comptes en 2015.
HFC Bank (Ghana)
s’inscrit dans la
croissance
Asare Akoffu
Profitant de l’Assemblée générale
annuelle de la banque, Asare Akoffu,
directeur général de HFC Bank, s’est
félicité d’un bon comportement en
2011. «Dans un environnement difficile des taux d'intérêt et des marges,
nous avons pu réaliser une croissance
importante de nos actifs et des bénéfices», a-t-il indiqué. Cette croissance
a surtout été portée par une réduction du coût des fonds et l’amélioration de la qualité du portefeuille de
prêts. Aujourd’hui, il reste à réussir
la satisfaction des exigences de capital au cours du premier semestre
2012, pour porter les fonds propres
à environ 100 millions de cedi ghanéen (1 GHS = 0,5337 $).
24 mai 2012 Les Afriques
. 23
BANQUES & ASSURANCES
Soutien de la Banque
mondiale aux utilités
au Burundi
suite, forcés à se désengager. La crise en
Espagne peut nous servir de leçon làdessus». Non loin de l’Espagne, l’Italie
souffre d’un autre type de déséquilibre. Pour Antonio Miglio, vice-président de la fondation de la Casse di
Risparmio Spa, «la crise en Italie est
surtout une crise de la dette publique».
Et d’ajouter, «pendant très longtemps,
l’Etat a pensé à s’occuper de tout. Il a
été au four et au moulin. En Italie, la
crise n’a pas touché comme c’est le cas
en Angleterre, en Allemagne en Espagne et en France, les banques de détails, mais elle a endetté l’Etat. Notre
malheur est ailleurs. Dans le passé,
l’Etat a fait des endettements pour que
les italiens deviennent riches. Aujourd’hui plus de 10% des riches de
l’Italie ont une fortune qui dépasse
deux fois la dette publique. On est face
à un paradoxe, alors que les riches de
l’Italie accumulent des fortunes, la
dette publique explose. L’Italie est une
nation hyper-endettée. Il faut, tout
simplement trouver un équilibre. Notre
dette dépasse les 70 milliards d’euros.
Pour relancer la croissance, les riches
doivent injecter des fonds dans l’économie». Antonio Miglio insiste sur le
courage que doit avoir les hommes
politiques pour prendre des décisions
concernant ce point. Ceci dit, pour
cet expert italien, la pression de la rue
aura son mot à dire dans cette combinaison. Dans ce contexte, et techniquement parlant, Antonio Miglio
déclare que l’option de la nationalisation des banques est toujours d’actualité. «Si certains experts s’attachent
à rejeter une telle solution d’autres
avouent sa vertu. Les récentes nationalisations de certaines banques américaines, espagnoles et même anglaises
nous servent de leçon». Rappelons,
qu’en fuyant le loup, les Etats peuvent rencontrer la louve. Le risque,
dans ce cas, est que les agents de
l’économie c'est-à-dire le banques
n’aient plus un accès libre aux financements et aux marchés.
Une agence
Poste du Maroc
On est face à
un paradoxe,
alors que les
riches de
l’Italie
accumulent
des fortunes,
la dette
publique
explose.
Sanae Taleb, ES à Marrakech
Réunion du Groupe Régional Afrique de WSBI
En marge du 23ème Congrès de WSBI, le
Groupe Régional Afrique de WSBI a tenu
le 8 mai 2012 à Marrakech sa 18ème réunion à laquelle la CDG et Poste Maroc, à
travers sa filiale Al Barid Bank, ont pris
part en tant que membres. Cette réunion
24 Les Afriques .
24 mai 2012
régionale dont le thème est «Faire face à
la compétition» était l’occasion de discuter des meilleures stratégies de distribution multi canal et de mise en œuvre
de systèmes d’informations bancaires
adaptés.
Afin de poursuivre la réalisation
des infrastructures publiques et des
projets de gestion urbaine au Burundi, le Conseil d'administration
de la Banque mondiale a approuvé
une subvention de 15 millions de $.
Il s’agit d’une rallonge devant permettre à ce pays de consolider les
progrès réalisés au cours de la
phase initiale du projet qui vise à
accroître l'accès aux services socioéconomiques de base et les possibilités d'emploi à court terme
dans les zones cibles. En outre, le
projet s'est concentré sur les villes
sélectionnées, à savoir Bujumbura,
Gitega et Ngozi. A terme, il devra
répondre au besoin de développement institutionnel dans la gestion
municipale et asseoir une décentralisation effective.
China Investment
Corporation cible
davantage l’Afrique
En marge de la session du Forum
économique mondial sur l’Afrique,
organisée du 9 au 11 mai à AddisAbeba, capitale éthiopienne, Gao
Xiqing, directeur général du fonds
souverain chinois China Investment Corporation (CIC), a affiché
une réelle disposition de l’institution qu’il dirige, pour accroître ses
investissements en Afrique. Le patron de CIC n’a pas exclu des domaines d’activités, mais ce sont
surtout les infrastructures qui seront visées, dans un premier temps.
Toujours est-il que sur des projets
à petite échelle, le fonds CIC collabore avec le Fonds Chine-Afrique
de développement pour investir en
Afrique. Il n’a pas conclu sans soutenir qu’en raison de sa croissance
économique continue, l’Afrique est
un continent prometteur pour les
investisseurs.
BOURSES & FONDS
Bourse La BRVM trouve le bonheur dans le pré
L’agriculture a largement contribué à la hausse de
l’indice BRVM 10 pour le compte du premier trimestre
2012. Preuve que depuis Verlaine le bonheur est
toujours dans le pré.
A
près une année 2011 en berne
où ses principaux indices ont
subi une contraction de 10%, la
Bourse régionale des valeurs mobilières
d’Abidjan (BRVM) renoue avec la
hausse. Sur le premier trimestre 2012,
l’indice BRVM 10 a affiché un rebond
de 10,8%, passant de 160 points au 2
janvier à 177 points au 30 mars. Pour
les analystes de Phoenix Capital Management, «ce rebond s’explique par la progression de la quasi-totalité des titres qui
compose cet indicateur et particulièrement les titres du secteur agriculture avec
SOGB (+4O%), SAPH (25%) et
PALMCI (16%)».
Dans sa présentation mensuelle de
l’activité boursière, le bulletin rappelle
qu’à l’instar du BRVM 10, l’indice
composite progresse également de
9,2% pour s’afficher à 152 points au 30
mars 2012. Au-delà du secteur agricole,
les entreprises qui ont le plus contribué
à cette croissance sont Shell (+53%),
Sodeci (+34%) et Sitab (+18%).
Preuve de la solidité de la tendance, la
hausse est accompagnée par une augmentation des volumes échangés.
Ainsi, le nombre de titres échangés est
passé de 5 915 307 au cours du quatrième trimestre 2011 à 6 970 463 sur le
premier trimestre de l’année en cours ;
Avec une hausse de 53%, le titre Shell
affiche la plus forte croissance de ce trimestre. Cette flambée du cours sur la
période est liée à la finalisation de la
transaction de rachat des actions de
Shell Petroleum par Vivo Energy Côte
d’Ivoire, une filiale de Vivo Energy BV.
Pour rappel, cette transaction a porté
sur 840 000 actions, soit 66,6% du capital de la société. Le titre SOGB continue aussi son embellie sur le premier
trimestre avec une progression de 40%
en raison des bonnes perspectives de la
société liées à l’augmentation de la demande de caoutchouc naturel en 2012 ;
A l’inverse, après avoir terminé l’année 2011 par une hausse de 14%, le
titre Uniwax enregistre la plus forte
baisse du trimestre avec un repli du
cours de 18,9%.
Consécutivement à cette hausse, la capitalisation boursière du marché a progressé sur le premier trimestre, passant
à 789 219 millions f CFA contre
698 020 millions le 2 janvier.
Source : Phoenix Capital Management
BRVM Abidjan
Mamadou Sanogo,
PCA de la BRVM
La présidence du Conseil d’administration de la Bourse Régionale
des Valeurs Mobilières (BRVM) a
changé de main. Le banquier Amadou Kane, ex Directeur Afrique de
Bnp-Paribas, qui occupait jusque-là
les fonctions de Directeur général
de la BICIS (filiale sénégalaise de
Bnp) et nommé récemment ministre de l’économie et des finances au
Sénégal dans le gouvernement
d’Abdoul Mbaye a cédé son fauteuil
au Malien, Mamadou Sanogo. Ce
dernier, Pdg du groupe Sabu
Nyuma et PCA de Sonavie-Mali a
été coopté pour assurer la présidence du Conseil d’administration
de la BRVM, jusqu’à la prochaine
assemblée générale des actionnaires. Pour rappel, l’ex PCA de la
BRVM avait été nommé en mai
2011 en remplacement de l’Ivoirien
Tiémoko Yadé Coulibaly, après une
dizaine d’années effectuées à la tête
du Conseil d’administration de la
BRVM et la Banque de Règlement.
Avec une
Le secteur des assuhausse de
53%, le titre rances très rentable
Angola
Shell affiche la en
Manuel Gonçalves, président du
plus forte
Conseil d’administration de la comcroissance de pagnie nationale d’assurances (Ensa
a défendu la semaine derce trimestre. Angola),
nière à Luanda, que le marché d'asCette flambée surance angolaise est rentable et en
croissance. S’expliquant sur une
est liée à la
sur le secteur dans son pays au
finalisation de étude
mois d’avril, il a souligné que les rapla transaction ports entre les primes et le taux de side rachat des nistralité permettent d'obtenir des
résultats positifs. Aussi, il a établi la
actions de
corrélation existante entre l'éconoShell
mie angolaise qui croît et tous les auPetroleum par tres secteurs de cette économie, liés à
leur tour aux assurances. Toutefois,
Vivo Energy
PCA d’Ensa Angola, a déploré des
Côte d’Ivoire. letaux
de pénétration des assurances
encore très bas.
24 mai 2012 Les Afriques
. 25
BOURSES & FONDS
Clifford Sacks,
Directeur Afrique
de Renaissance Capital
26 Les Afriques .
24 mai 2012
Renaissance Capital prospecte l’Afrique
La Banque d’investissement Renaissance Capital, dont le siège du
département Afrique est situé à Londres, a organisé sa troisième Conférence
panafricaine sur l’investissement, à Lagos du 16 au 18 mai Au Nigéria.
L
es dirigeants de Renaissance Capitale
évoquent souvent cette Afrique qui
gagne la croissance économique rapide
de l’Afrique, et les opportunités d’investissement ont été les thèmes majeurs de
la troisième Conférence des investisseurs panafricains à Lagos, tenu du 16 au 18 mai. Quelques centaines d’investisseurs et de compagnies invités à
titre privé ont pris part à la rencontre. Déjà présente au Nigéria à travers certaines prises de participation aux capitaux de banques locales et
sous-régionales, Renaissance Capital présentera les
perspectives à moyen et court terme du Nigéria et
de l’Afrique sub-saharienne.
Pour Clifford Sacks, le directeur Afrique de Renaissance Capital, «Les marchés émergents et l’Afrique
en particulier attirent de plus en plus l’attention. On
rencontre sur le continent africain la plus forte
concentration d’économies à forte croissance, et pour
la prochaine décennie, l’Afrique devrait être la success story dans le domaine de l’investissement».
Le forum a rassemblé ceux qui offrent des opportunités d’investissement et les compagnies se positionnant sur ce créneau du Nigéria et d’autres
marchés africains avec des centaines de groupes
d’investisseurs du monde entier. Les domaines des
métaux, des mines, du pétrole, du gaz, des banques,
de l’agriculture et des biens de consommation
étaient particulièrement concernés.
L’Afrique qui gagne
Ces propos du directeur Afrique de Renaissance Capital, reposent sur des faits et des chiffres concrets.
On estime que l’an dernier le continent a attiré
jusqu'à 82 milliards de dollars d’investissement directs étrangers. Cela n’inclut pas les opérations de
fusion et acquisitions qui ont été réalisées en 2011.
On estime qu’en 2015 ces investissements directs
étrangers atteindront sur le continent 150
milliards de dollars. Déjà, comparés à
2010, ces investissements
avaient augmenté de 27%
en 2011. Ce qui signifie
une croissance très
soutenue de ce domaine. Les do-
Malgré la
présence
croissante des
chinois, ce sont
les américains
qui l’année
dernière étaient
en tête du
peloton des
investisseurs
sur le continent.
Et on remarque
que les sudafricains sont
de plus en plus
présents aussi
sur ce marché.
maines attirant le plus les investissements sont entre
autres les métaux, le secteur minier, les communications, l’alimentation et le tabac. Malgré la présence croissante des chinois, ce sont les américains
qui l’année dernière étaient en tête du peloton des
investisseurs sur le continent. Et on remarque que
les sud-africains sont de plus en plus présents aussi
sur ce marché, comme pour ne pas laisser le champ
libre uniquement aux non africains.
Cela a fait dire à Charles Robertson, l’économiste en
chef à Renaissance Capital que : «L’Afrique reste une
référence en matière de croissance et de réformes, avec
des opportunités immenses, un faible endettement du
secteur privé, et public, quelque chose qui contraste
avec la léthargie des économies occidentales. Le PIB
par habitant a doublé au cours de la décennie écoulée, et pourrait encore doubler plus vite dans les années à venir. Alors que beaucoup bénéficie de la
hausse des prix des matières premières minières, il y
a aussi des histoires de croissance au niveau national
qui retiennent l’attention des investisseurs. Et ce
forum a offert une chance idéale d’entendre des réformateurs présenter leurs agendas pour les années
à venir, et aussi rencontrer les banques et les compagnies pourraient bénéficier de cet élan.»
Mais des problèmes existent
Cependant tout n’est pas aussi rose. Il y a aussi de
plus en plus de questions sur la qualité de cette croissance en termes de création d’emplois et de réduction de la pauvreté, selon le dernier rapport du
groupe Ernst & Young. Ce rapport souligne aussi que
les investisseurs ne manquent pas de louer les performances africaines. Après l’Asie, c’est la 2ème destination attirant les capitaux. Il y a par exemple les
problèmes d’insécurité avec les troubles en cours
toujours au Mali, en Guinée-Bissau, et entre les deux
Soudan. Et il y a aussi la corruption qui fait estimer
Ernst & Young que l’Afrique ne tire pas bénéfice de
tout le potentiel réel du continent. Mais Ajen Sita du
département Afrique de ce groupe de Consulting et
d’Audit a affirmé récemment dans la presse britannique qu’au cours des vingt dernières années il y a
eu des progrès significatifs en matière de démocratie,
de lutte contre la corruption.
Dave Barraud, City Londres
24 mai 2012 Les Afriques
. 27
MATIÈRES PREMIÈRES
Les marchés paient toujours le manque
d’investissement des années 90
Nous payons actuellement le manque d’investissements dans le secteur des
matières premières de façon générale de la fin des années 90 lorsqu’on n’avait
d’yeux que pour les marchés financiers et les start-ups.
demeurant très dynamique, l’offre de
fret maritime est trop abondante.
Le gaz monte en puissance
L
es ondes du choc de la crise de
2007-2008 se font ressentir encore aujourd’hui sur les marchés des matières premières. Pour
quelque 90 marchés analysés dans le
Rapport Cyclope, dont l’édition 2012
a été présentée le 9 mai à Paris Philippe Chalmin, professeur de ParisDauphine et président du Cercle
Cyclope, avance que «Nous sommes à
des niveaux de prix un peu inférieurs
au printemps 2011 mais encore supérieurs aux records du printemps 2008».
Et on ne sait pas quand ce «grand
choc» se terminera car «nous vivons le
temps long de l’investissement face à
une demande mondiale qui reste très
soutenue alors que la réaction des appareils de production est plus lente,
perturbée par les accidents géopoli-
tiques et financiers de la planète. Le
temps agricole, minier est un temps de
15 à 20 ans.» Nous payons actuellement le manque d’investissement
dans le secteur des matières premières de façon générale de la fin des
années 90 lorsqu’on n’avait d’yeux
que pour les marchés financiers et les
start-ups ! Or, aujourd’hui, la planète
compte 7 milliards d’hommes qui
consomment de plus en plus.
Seul marché à connaître une baisse
sensible de ces cours ces 12 derniers
mois : le fret maritime. L’essor chinois au fil de la dernière décennie a
conduit à fabriquer à tour de bras des
navires et aujourd’hui, alors que l’Europe est en crise, que la croissance
américaine est hésitante et que la
Chine perd un peu de terrain tout en
Oui aux
investissements ...,
mais écologiques !
Le spécialiste de Pétrole et Gaz arabes, Francis Perrin, auteur
de l’article pétrole dans Cyclope, voit le baril à $ 126-127 sur
2012. Mais sur la scène énergétique, c’est le gaz de schiste qui
devient peu à peu l’incontournable.
28 Les Afriques .
24 mai 2012
Dans le secteur énergétique, l’affrontement en 2011 de facteurs haussiers
(les «printemps arabes» et l’Iran) et
baissiers (les difficultés de la zone
euro, la perspective d’un réajustement économique chinois) a, en définitive, eu pour conséquence un
marché pétrolier relativement calme
durant les trois-quarts de l’année, à
$ 100-110 le baril. Mais il a repris en
fin d’année dernière et début 2012
avec des incertitudes géopolitiques
qui ont repris le dessus et des baisses
de production en Syrie, au Yémen
sans oublier l’arrêt de production au
Sud-Soudan. Le spécialiste de Pétrole
et gaz arabes, Francis Perrin, auteur
de l’article pétrole dans Cyclope, voit
le baril à $ 126-127 sur 2012.
Mais sur la scène énergétique, c’est le
gaz de schiste qui devient peu à peu
l’incontournable. Le consultant
Ralph Ichter, président d’Euroconsultants à Washington, souligne «l’explosion» de la production américaine
de gaz. «Exxon produit aujourd’hui
plus de gaz que de pétrole» note-t-il.
L’ère du charbon est révolu outre-Atlantique, cédant la place au gaz, meilleur marché et dont les Etats-Unis
disposeraient de 100 ans de réserve.
Un gaz naturel qui concurrence gravement les énergies renouvelables
comme le solaire, l’éolien. «Aujourd’hui, aux Etats-Unis, la grande
question porte sur l’avenir des énergies
renouvelables alors que le président
Obama a misé la dessus», note-t-il,
Francis Perrin soulignant pour sa
part que d’ici 2013 les Américains seraient exportateurs nets de GNL. En
Les prix des matières premières en 2011
(moyenne annuelle 2011 par rapport à la moyenne
annuelle 2010 en pourcentage)
75%
68%
63%
57%
56%
51%
46%
43%
39%
38%
38%
35%
35%
34%
32%
30%
29%
28%
28%
26%
25%
24%
22%
22%
20%
20%
20%
18%
17%
16%
16%
16%
12%
12%
10%
10%
7%
7%
5%
3%
1%
Argent
Maïs
Poivre
Laine
Huile de coprah
Charbon à coke
Coton
Café
Huile de soja
Pétrole Brent
Palladium
Blé Europe (euros)
CyclOpe
Caoutchouc
Charbon vapeur Europe
Viande bovine export Am. Lat.
Colza (en euros)
Etain
Or
Soja
CyclOpe hors pétrole er précieux
Ferrailes
Sucre
Blé
Acier
Huile de palme
Pétrole WTI
Charbon vapeur Asie
Cuivre
Minerai de fer
Jus d’orange congelé
Thé
Plomb
Viande porcine
Riz
Aluminium
Platine
Tourteau de soja
Nickel
Pâte à papier
Zinc
Cacao
Poudre de lait écrémé
Beurre
Fret -44%
Carbone-C02 (euros) -49%
(Source : rapport CyclOpe)
-60%
-20%
0%
20%
40%
60%
80%
Amara Konneh, ministre libérien
des finances, vient de dévoiler que le
gouvernement de son pays a prévu
une enveloppe de 40 millions de $,
dans le prochain budget, afin de stimuler le secteur agricole. Pour ce
faire, son pays a obtenu du Fonds international de développement agricole (FIDA) des prêts hautement
concessionnels, jusqu’à 30 millions
de $, a-t-il ajouté. A en croire les responsables libériens, grâce à un tel
programme, les petits exploitants
agricoles initiés à l’agriculture intensive pourront diversifier leurs activités et développer des cultures à
haute valeur ajoutée aussi bien pour
les marchés locaux que mondiaux,
tels que le café, le cacao, le caoutchouc, les palmiers à huile, …
L’Etat angolais
investit dans la
recherche agricole
-5%
-10%
-15%
-40%
Vaste programme
de relance de l’agriculture libérienne
100%
Afonso Pedro Canga, ministre angolais de l’agriculture, du développement rural et des pêches, a profité de
la récente inauguration du premier
zoo dans le district de Gambos, pour
annoncer que le gouvernement de
son pays compte investir 100 millions de $ dans un programme de recherche scientifique agricole.
Justement à Chibia, dans le district
de la province de Huila, le ministre
de tutelle a précisé que le projet portera sur la réhabilitation et la
construction des infrastructures de
recherche de l'agronomie, la pêche,
vétérinaires et la formation des cadres. Approuvé en Conseil de ministres le projet englobe aussi la
réhabilitation d’infrastructures dans
les provinces de Huambo, Huila, Cabinda, outre la construction de nouvelles structures scientifiques dans
les provinces de Benguela, Uige et
Kwanza Sul.
24 mai 2012 Les Afriques
. 29
MATIÈRES PREMIÈRES
Forte contribution
Prévisions de CyclOpe pour 2012
secteur minier
(moyenne annuelle 2012 par rapport à la moyenne du
au Nigéria
A l’issue des travaux sur l’Atelier de
annuelle 2011 en pourcentage)
la banque mondiale relatif à 7 ans de
Carbone-C02 (euros)
Palladium
Pétrole WTI
Or
Pétrole Brent
Fret maritime
Blé
Gaz Naturel Europe
Café
Charbon vapeur Europe
Gaz Naturel Asie
Charbon vapeur Asie
Riz
Plomb
Acier
Nickel
Maïs
Platine
Cuivre
Blé Europe
Soja
Cacao
Pâte à papier
Huile de palme
Minerai de fer
Laine
Caoutchouc
Etain
Sucre
Gaz Naturel Etats-Unis
Charbon à coke
Argent
Coton
(Source :
rapport CyclOpe)
30 Les Afriques .
24 mai 2012
-60%
54%
9%
8%
8%
-1%
-1%
-3%
-5%
-8%
-10%
-10%
-10%
-12%
-12%
-13%
-12%
-13%
-15%
-15%
-15%
-16%
-16%
-17%
-18%
-19%
-22%
-22%
-23%
-25%
-27%
-28%
-37%
-40%
-20%
gestion durable des ressources minérales du projet (SMMR) pour le développement du secteur minier au
Nigeria, Arch. Musa Muhammad
Sada, ministre nigérian des mines, a
salué la contribution du secteur minier dans le budget du gouvernement
fédéral qui a atteint 1,4 milliards de
naira en 2011. Sada a été représenté
par le secrétaire permanent du ministère, Alhaji Idris Kuta Ahamad.
Découvertes
de platine en
Afrique du Sud
Dans une partie, jusque-là inexplorée
du complexe de Bushveld dans la région du Waterberg, qui se situe dans
la province du Limpopo en Afrique
du Sud, Platinium Group Metals
vient d’annoncer la découverte de gisements de platine potentiellement
riches. Cette information est venue
confirmée, les premières données au
mois de novembre dernier.
Le cours du brut
au plus bas
0%
20%
40%
60%
La semaine dernière, les cours de
l’Or noir ont fléchi. Le «Light Sweet
Crude» pour livraison juin cède actuellement 1% à 97,5 $ dans les
échanges électroniques sur le New
York Mercantile Exchange. Pour
Michael McCarthy, stratège en chef
de CMC Markets Asia Pacific à Sydney, c’est une confluence de facteurs
qui poussent les marchés du pétrole
à la baisse. Hussein Allidina, directeur de la recherche des produits de
base à Morgan Stanley, assure aussi
que les cours pourraient dégringoler davantage avec le manque de
conditions macroéconomiques et
des fondamentaux baissiers.
Philippe Chalmin,
Pr à Paris-Dauphine et
président du Cercle Cyclope
Europe, aucune politique claire ne se
dégagerait à l’égard du gaz de schiste.
de 2001 et la Chine de 2012 n’ont plus
rien à voir», rappelle-t-il.
L’omniprésence chinoise
L’Afrique, absente bien que
dynamique
Autre révolution qui suit son cours
est l’omniprésence chinoise. Selon
que la croissance du géant est de 9%,
thèse soutenue par Philippe Chalmin,
ou de 7%, cela aura un impact sur les
marchés des matières premières. La
Chine devient ainsi, cette année, premier fournisseur et client du Brésil,
note Jean-Yves Carfantan, consultant
à Sao Paulo et auteur du chapitre de
Cyclope sur l’Amérique latine. Une
Chine qui est à la fois «une énorme
menace et une opportunité» pour le
géant latino-américain. A Bahia, la
Chine a investi dans 12 millions
d’hectares, souhaitant entre autres
«court-circuiter le grand négoce».
Aux Etats-Unis, c’est la Farm Bill qui
est à l’ordre du jour pour 2012, sinon
2013, avec pour axes majeurs la suppression des paiements directs aux
agriculteurs et une tendance nette vers
le «tout assurance» souligne Ralph
Ichter. Une politique dont le coût serait de $ 7 à 8 milliards par an, soit
«relativement peu», précise-t-il, notant
par ailleurs que le Cycle de Doha est
bel et bien mort. «Les Etats-Unis n’en
veulent plus car la donne a changé depuis le début des négociations. La Chine
Et l’Afrique dans tout cela ? Si un article porte sur le continent dans le
Rapport Cyclope, soulignant sa
montée en puissance économique
(+4,9% en 2011) et démographique,
sa présence renforcée sur la scène
mondiale des matières premières ou
encore du foncier, sa demande intérieure qui se développe grâce à un
pouvoir d’achat en hausse, force est
de constater que la route sera encore
longue pour faire figurer le continent
à part entière sur les marchés mondiaux. Et les débats entre spécialistes
des marchés qui ont animé cette
journée dédiée à la parution du rapport Cyclope, ouvrage unique en son
genre et traduit en anglais et en chinois, illustrent bien cela : l’Afrique
était quasiment absente des débats et
analyses, sauf à évoquer la crise alimentaire et sécuritaire au Sahel.
Quid de 2012 ? Hormis le carbone, le
Forer toujours
de plus en plus
profond
palladium, le pétrole léger américain
WTI et l’or, le prix de toutes les autres matières premières sont attendues en baisse par les analystes de
Cyclope. Certes les perspectives de
production demeurent insuffisantes
face à la dynamique de la demande
mondiale et face aux «aléas géopolitiques» qui ne vont sans doute pas
manquer en 2012, lit-on dans le rapport, que ce soit sur la scène pétrolière, avec le dossier nucléaire iranien,
les conséquences du retrait des
troupes américaines d’Irak, l’évolution de la situation en Syrie, en Libye,
au Soudan, sans oublier les élections
au Venezuela et en Russie. Mais face
à cela, l’économie américaine devrait
rebondir ce qui «devrait se traduire
par un affaiblissement de l’euro […],
par un renchérissement du dollar et
donc une corrélation négative pour
les marchés de commodités. En
outre, l’année 2001/2012 aura permis
une certaine reconstitution des
stocks de clôture chez les grands exportateurs, pesant ainsi sur les prix.
Bénédicte Châtel, Paris
La Chine de 2001 et la Chine de 2012 n’ont plus rien à voir. La montée
en puissance de l’Afrique, sa présence renforcée sur la scène mondiale
des matières premières et sa demande intérieure qui se développe
grâce à un pouvoir d’achat en hausse, sont à prendre en compte.
24 mai 2012 Les Afriques
. 31
PÉTROLE & GAZ
Les printemps arabes ne laisseraient
encore de traces qu’en Egypte
«Aujourd’hui, en termes de production, le printemps arabe n’a plus d’incidence
sur les marchés pétroliers», souligne Francis Perrin, directeur de Pétrole et gaz
arabes et auteur du chapitre Energie du Rapport Cyclope 2012.
S
ur la scène pétrolière, deux
des grands acteurs nord-africains sont revenus quasiment
à leur niveau de production d’avant
le printemps arabe. La Libye a quasiment retrouvé son niveau de production d’avant-crise, soit 1,4 Mbj
contre 1,6 Mbj au début de l’année
2011 ... C’est le retour à la normale
dans les pays qui ont vécu le printemps arabe. L’Algérie, n’a pas été
touchée par les révolutions arabes
du début de l’année 2011. Son niveau de production pétrolière est
demeuré intacte. C’est plutôt sur
l’investissement que les autorités
jettent leur dévolu, souhaitent modifier certain éléments de la politique énergétique algérienne,
notamment la loi sur les hydrocarbures de 2005 révisée en 2006, afin
de l’assouplir pour la rendre plus
incitative, plus attrayante à l’égard
d’investisseurs potentiels. Deux objectifs seraient poursuivis par l’Algérie, précise encore Francis Perrin.
D’une part se lancer dans de très
importants travaux d’exploration,
d’autre part, attirer des investisseurs
étrangers dans le développement
La reprise toujours
latente en Egypte
Deux objectifs seraient poursuivis par l’Algérie, précise encore
Francis Perrin. D’une part se lancer dans de très importants travaux
d’explora-tion, d’autre part, attirer des investisseurs étrangers dans
le développement d’hydrocarbures non conventionnelles.
32 Les Afriques .
24 mai 2012
d’hydrocarbures non conventionnelles, notamment le gaz de schiste
dont l’importance sur la scène
mondiale ne fait que croître. «L’Algérie sent bien qu’il y a des enjeux
énormes sur la scène mondiale en
matière de gaz de schiste et veut augmenter sa production pour satisfaire
sa demande nationale et ses exportations.» Les Etats-Unis misent sur ce
segment énergétique, l’Asie est en
plein boom gazier mais la production européenne, quant à elle,
n’augmente pas. Ce continent
devra donc importer et l’Algérie
veut être prête, souligne-t-il encore.
D’où l’importance d’attirer des investisseurs.
L’Egypte remise en cause
L’Egypte, quant à elle, «pays plus ga-
Forum de la RSE et
de l’économie verte
en Afrique à Tunis
zier que pétrolier», connaît d’importants revers. Depuis la chute du régime Moubarak, il y a eu à 15 reprises
des actes de sabotage perturbant les
exportations. En outre, l’Egypte a annulé son contrat avec Israël, estimant
les prix stipulés trop bas. On entrerait
dans la phase judiciaire du dossier.
L’ensemble de ces éléments fait que
«l’Egypte n’est plus considérée comme
un fournisseur stable de gaz», explique
le spécialiste, les contrats gaziers étant
à long terme, stratégique. «Quand des
acheteurs estiment qu’un pays n’est
plus un fournisseur fiable, ils cessent de
traiter avec lui».
Quant au Nigéria, il est devenu un
exportateur important de gaz naturel liquéfié à l’international, sans
oublier le gazoduc ouest africain
qu’il alimente. «Le Nigéria a diminué le torchage et dispose d’un potentiel important en gaz», note le
spécialiste. Total, pour sa part, travaille sur le nouveau projet GNL,
Brass LNG et le Nigeria voudrait
ajouter un ou deux autres projets et
trouver des marchés, précise-t-il.
Quid du projet de gazoduc entre le
Nigeria et l’Algérie avec pour fina-
lité le marché européen ? «Le projet
est très ambitieux et comprend de
grands problèmes de sécurité mais
aussi de financements», note encore
Francis Perrin. Les autorités tant nigérianes qu’algériennes feraient
pression sur Bruxelles pour dégager
des financements, mais la crise européenne poserait problème pour
développer des marchés aussi importants. Il en est de même du projet de gazoduc sous-marin entre
l’Algérie et l’Italie, qui ne devrait pas
se faire avant quelques années, estime-t-il. «Il n’y a pas en Italie,
compte tenu de la crise, la demande
nécessaire de gaz pour justifier la
construction de Galsi», conclut-il.
Quant aux relations intercontinentales africaines entre pays exportateurs et importateurs de produits
énergétiques, il existe de «grandes insuffisances de complémentarité», rappelle Francis Perrin. «Les pays
exportateurs sont plus en phase avec les
marchés mondiaux qu’avec les marchés
africains. Il n’y a pas de marché gazier
africain suffisant mais des produits spécifiques pourraient se développer.»
Bénédicte Châtel, Paris
Du développement des marchés
gaziers
La seconde édition du forum international de la Responsabilité sociale
des Entreprises et de l’économie
verte, organisée par la Confédération des entreprises citoyennes de
Tunisie et l’Institut Afrique RSE, est
prévue les 21 et 22 novembre 2012 à
Tunis. Après la première édition,
l’année dernière à Douala, les principaux acteurs de l’économie responsable
poursuivent
la
co-construction par l’Afrique et
l’Afrique d’une RSE adaptée au
contexte africain, souligne les initiateurs. Ces derniers, qui viennent
d’annoncer la manifestation, se félicitent déjà du choix de ce pays
d’où sont parties les révolutions
arabes. Ils ont ainsi réitéré le fait
que la question de la justice sociale
et du partage des richesses soit plus
que jamais au cœur des politiques
de développement et du business
model des entreprises.
ISMD à Casablanca
Le Nigéria a
diminué le
torchage et
dispose
d’un
potentiel
important
en gaz.
Le patronat marocain, sous la houlette de la Confédération générale
des entreprises du Maroc (CGEM),
en partenariat avec l’Université Internationale de Casablanca,
compte accueillir la 12ème Conférence internationale de l’International Society for Markets and
Development (ISMD), placée sous
le thème «Le développement à l’ère
des marchés», du 22 au 25 mai à
Casablanca. Le choix du Maroc a
été dicté par son modèle robuste de
développement économique et social, érigé en exemple dans sa région. Plus d'une soixantaine de
chercheurs internationaux de
renom, devant présenter des travaux centrés sur la place de l’individu et de l’entreprise dans un
monde en mutation, y sont attendus, autour de conférences en
séances plénières et ateliers.
24 mai 2012 Les Afriques
. 33
ENTREPRISES ET MARCHÉS
Henri Jullien,
Directeur général des activités
fiduciaires à la Banque de France
34 Les Afriques .
24 mai 2012
Henri Jullien «Le souci premier des
banques centrales c’est d’assurer des
liquidités aux banques commerciales»
Directeur général des activités fiduciaires à la Banque de France, Henri
Jullien a participé à l’Africa Banking Forum qui s’est tenu à Marrakech les
17 et 18 mai derniers. Entretien.
L
es Afriques : Comment les
banques centrales européennes vivent-elles cette
crise obligataire sans précédent ?
Henri Jullien : Il y a plusieurs types
de problèmes qui surgissent avec
cette situation exceptionnelle. En
tout premier lieu, il y a la question
des liquidités à assurer aux banques
commerciales afin qu’elles puissent
continuer à accorder du crédit à leurs
clients. Les Banques centrales essaient de fournir cette solution tout
en ne couvrant pas des opérations
anormales. Le temps est à la rigueur.
Depuis 2008, la réglementation est
en train de se mettre à niveau. Il y a
Bâle III qui impose de nouvelles
contraintes. Le souci des banques
centrales demeure plus que jamais de
veiller à ce que les banques commerciales puissent accorder du crédit.
LA : Finalement, qui de l’Amérique et de l’Europe a raison
quant au rôle de la Banque Centrale : assurer la croissance ou garantir la maîtrise de l’inflation à
des taux bas ?
H.J : Les deux choses sont liées. La
croissance et la maîtrise de l’inflation sont liées même si l’approche
varie entre la BCE et la FED. Aujourd’hui, l’inflation n’est pas un
problème majeur pour l’Europe.
On a eu à enregistrer d’importants
flux entrants venant de la Chine, ce
qui a poussé à la baisse des prix.
LA : Pensez-vous que les banques
centrales africaines vivent les
mêmes défis que leurs consœurs
européennes ?
H.J : L’Afrique est le théâtre d’une
croissance rapide. Un rattrapage économique est en cours. Les bouleversements viennent surtout des
innovations technologiques comme
le M Banking qui permet de réaliser
des transferts d’argent rapides et à
moindre coûts. Il y a de nouveaux
services combinant la technologie et
les produits financiers. Il y a la problématique du contrôle du change,
toujours en vigueur, et qui concerne
(puisqu’il s’agit des réserves de
change), la sécurité du pays. Jusqu’en
1986, la France avait un contrôle de
change. Nous avons du savoir-faire
dans ce domaine.
LA : S’agissant du M-Banking,
comment les banques centrales
gèrent-elles la situation sachant
L’Afrique est le théâtre d’une croissance rapide. Un rattrapage
économique est en cours. L’Europe, qui est en panne de
croissance, a tout intérêt à regarder vers le Sud. Nous avons
beaucoup à gagner dans la vitalité des économies africaines.
que les opérateurs sont souvent
du secteur des télécoms ?
H.J : C’est un débat mondial. Dés lors
qu’il y a du crédit en cause et des
mouvements d’argent, le régulateur
devrait avoir son mot à dire. Les opérateurs téléphoniques disposent des
moyens colossaux pour peser dans
ces nouveaux services. Je ne serai pas
étonné qu’un jour qu’il y ait des accords entre opérateurs et banquiers.
Je pense par exemple à Paypall qui
dispose d’une base de données fabuleuse. L’élément fondamental de ces
nouveaux services reste la confiance
dans le paiement par mobile et par
internet. La réglementation suivra
certainement. Mais en définitive, les
banques sont au cœur du système.
Elles assurent la tenue des comptes et
la compensation ne peut se faire sans
leurs concours.
LA : Quel est votre sentiment par
rapport à l’African Banking Forum ?
H.J : Je découvre pour la première
fois. C’est un cadre d’échanges et de
rencontre entre partenaires européens, maghrébins et subsahariens.
Le forum permet à travers cette mise
en contact la possibilité d’un échange
d’expériences et de transferts de savoir et de technologie. L’Europe, qui
est en panne de croissance, a tout intérêt à regarder vers le Sud. Nous
avons beaucoup à gagner dans la vitalité des économies africaines.
Propos recueillis par
Adama Wade
24 mai 2012 Les Afriques
. 35
ENTREPRISES ET MARCHÉS
Cameroun Bon cru de la Sodecoton
Grosse performance réalisée par la Société de
Développement du Coton du Cameroun (Sodecon).
Elle a amassé pour l’exercice 2011 quelque 10,5
millions de dollars contre 2,350 millions de dollars en
2010. Derrière ces bons chiffres, une politique
commerciale et managériale agressive.
Abrogation de la surtaxe sur les appels
entrants au Sénégal
Amadou Kane, ministre sénégalais
de l’économie et des finances, a dévoilé récemment à Dakar, que le
gouvernement a décidé de l’abrogation du décret relatif à la surtaxe sur
les appels internationaux entrants
au Sénégal. Il a ajouté que cette décision, qui va rendre caduc, à partir du
15 mai, un décret datant du mois
d’août 2011 du président sortant Me
Abdoulaye Wade, et qui avait fait
couler beaucoup d’encre, a été prise
en accord avec les acteurs du secteur.
En présence de son homologue
Abou Lô du département des TIC,
mais aussi de Seydou Guèye, secrétaire général du gouvernement,
d’Abdoul Aziz Mbaye, conseiller
spécial du président de la République en charge des TIC, et de différents responsables des opérateurs,
il a salué l’accord.
Inauguration d’ACE
Terminal Station par
Ellen Johnson Sirleaf
S
odecoton passe à la vitesse supérieure. Les résultats de la
campagne cotonnière 2011
confirment la bonne santé financière
du géant camerounais du coton.
Dopée par la montée vertigineuse
des cours du coton sur les marchés
mondiaux, Sodecoton signe son retour dans la cour des grands. Après
une timidité de sa production en
2008 et 2009, la Société de Développement du coton du Cameroun a
produit plus de 161 000 tonnes pour
la campagne 2011. Une performance
qui a poussé les autorités de la compagnie cotonnière à bien aborder la
présente campagne 2012 et qu’elles
estiment prometteuse. «La production cotonnière de cette année est bien
lancée avec des estimations qui pour-
36 Les Afriques .
24 mai 2012
ront atteindre plus de 180 000 tonnes»
a avoué le Directeur général de Sodecoton. Une bouffée d’oxygène
supplémentaire pour le Trésor public qui tire à travers cette filière des
ressources substantielles pour booster l’économie du pays.
Cependant, ce cru engrangé risque
d’être plombé par la fraude opérée
au niveau de la filière et entretenue
par de puissants circuits vicieux qui
en font un business florissant. Le
gouvernement a pris toutes les dispositions aux alentours des corridors
frontaliers pour freiner les trafics illicites de coton. Chaque année, l’Etat
subit un lourd préjudice de ce trafic
que certaines organisations estiment
à 2 et 3 milliards f CFA.
Ismael Aidara, Douala
Belle cote du coton
camerounais
Dopée par la
montée
vertigineuse
des cours du
coton sur les
marchés
mondiaux,
Sodecoton
signe son
retour dans la
cour des
grands.
Désormais, la Société des télécommunications du Libéria (Libtelco) à
Monrovia étrenne sa station terminale ACE. Sise au sein des bureaux
techniques de Libtelco, la station, qui
sera «centre névralgique» de la puissance optique du câble sous-marin
du Libéria, a été inaugurée par Ellen
Johnson Sirleaf, chef de l’Etat libérien. Pour rappel, le projet a été financé, à hauteur de 500 000 $ par la
Banque mondiale dans le cadre du
projet de la connectivité de l’Afrique
de l’ouest (WACP) et qu’il repose sur
un système de câbles optiques, essentiel aux secteurs de l'éducation et
de la santé. Frédéric Norkeh, ministre libérien des postes et télécommunications, a justement salué le
partenariat avec CCA (Consultant
câble du Libéria) qui comprenait
entre autres LTA et Libtelco.
Meriem Bensalah Présidente de la CGEM
Dans ses premières déclarations suite à son élection à
la tête de la confédération patronale marocaine,
Meriem Bensalah a mis l’accent sur la réhabilitation de
la PME marocaine.
C’
est la première fois qu’une
femme accède aux commandes de la Confédération générale des entreprises du
Maroc (CGEM). A 49 ans, Meriem
Bensalah Chaqroun a été élue à la
tête de la confédération mercredi 16
mai avec 96% des voix, succédant
ainsi à Mohamed Horani, président
de HPS, qui n’avait pas souhaité se
représenter. Dans sa première déclaration, la présidente des Eaux
Minérales d’Oulmés s’est dit «très
touchée par la marque de confiance
placée en elle pour être à la tête de
cette confédération». Le grand axe de
son mandat de trois ans (20122015) se reflète dans ses premières
déclarations : «Je vais œuvrer au
cours de mon mandat de trois ans
pour résoudre les problèmes qui entravent le développement des Petites
et Moyennes Entreprises (PME), les
locomotives de l’économie».
Haute figure de l’entreprenariat familial, Meriem Bensalah avait été
distinguée en 2007 dans le cercle
restreint des femmes les plus influentes du monde arabe, selon le
Magazine Forbes. Son influence au
Maroc se mesure surtout par ses capacités managériales, ayant réussi à
adapter les Eaux Minérales d’Oulmés dans l’environnement changeant de la mondialisation, de
l’ouverture des frontières et de la
montée de la concurrence. Mère de
3 enfants, impliquée dans l’associatif et notamment dans les activités
culturelles de Casablanca, Meriem
Bensalah, devra remobiliser la
CGEM dans son rôle de porte-parole des employeurs et de source de
proposition face à ses différents
partenaires.
MBF
Meriem Bensalah,
présidente fraîchement élue de la
CGEM
«Je vais
œuvrer au
cours de mon
mandat de 3
ans pour
résoudre les
problèmes qui
entravent le
développement des
PME».
Indaba 2012, salon
international du
tourisme à Durban
Du 12 au 15 mai, la ville sud-africaine de Durban a accueilli le
salon Indaba. En dépit d’une
conjoncture internationale marquée par une tendance baissière,
l'industrie du tourisme en
Afrique du Sud se porte bien.
Quelque 13 000 délégués venus du
monde entier, 1 800 exposants,
200 tours operators internationaux ont tenu à être présents. La
réussite d’un tel évènement serait
aussi à mettre à l’actif d’une certaine concertation et d’un travail
en synergie au sein du secteur.
C’est en effet, l’avis de Thulani
Nzima, PDG de la South African
Tourism, qui réaffirmait à la
veille d’Indaba que pour réussir
dans l'industrie du tourisme, la
cohésion de tous les partenaires,
ainsi qu’un effort commun, restent indispensables.
Mémorandum d'entente pour le financement de l’autoroute
Caire-Banha
Le financement de l’autoroute
Caire-Banha, devant nécessiter
2,6 milliards de livre égyptienne,
est désormais ficelé. La National
Bank of Egypt (NBE) et le ministère égyptien des transports viennent de signer un Protocole
d’accord dans ce sens. Galal
Moustafa Saïd, ministre des transports et Adel Zayed gouverneur
de Qalyubia, qui ont assisté à la
cérémonie de signature, ont tour
à tour salué l’accomplissement
d’une voie longue de 40 km et devant soulager la congestion du
trafic Caire-Alexandrie qui culmine actuellement à 120 000 véhicules par jour.
24 mai 2012 Les Afriques
. 37
ENTREPRISES ET MARCHÉS
Guinée Les Moulins d’Afrique
en ordre de marche
C’est le fruit d’une joint-venture entre les Moulins
Lahlal (Maroc) et la Compagnie Sonoco SA (Guinée).
Montant de l’investissement 28,5 millions de dollars.
La firme suisse Bühler se charge des installations clé
à main de la minoterie.
P
artenaires depuis une dizaine
d’années dans le secteur du
blé, le marocain Omar Yacoubi, PDG des Moulins Lahlal et
l’opérateur guinéen Mamadou Saliou Diallo, PDG de Sonoco SA,
sont passés à la vitesse supérieure.
Leur vœu, d’installer une usine de
fabrication de blé de farine fortifiée,
devient réalité pour résorber l’épineux problème du déficit de la farine en Guinée. La cérémonie
d’inauguration du nouveau complexe industriel de production de
farine, dénommé «Les Moulins
d’Afrique», et situé dans la zone industrielle de Sonfonia (commune
de Matoto), a eu lieu lundi 7 mai
2012 sous la présidence du Premier
ministre de Guinée, Mohamed Said
38 Les Afriques .
24 mai 2012
Fofana, qui avait à ses côtés le ministre de l’Industrie, la conseillère
du président en charge du secteur
privé et de l’ambassadeur du
Royaume Chérifien en Guinée.
Confiance des bailleurs
et des banques locales :
D’un coût global d’investissement
de 28,5 millions de $, cette nouvelle
minoterie de dernière génération a
bénéficié de la confiance des partenaires financiers institutionnels et
d’un pool de banques locales. Lesquels ont accompagné le projet de
minoterie dans la phase du montage financier et la soumission aux
partenaires financiers. Après plusieurs rounds de discussions au
tour de table, les deux associés ont
Pose de la pierre de
l'extension de la
minoterie Les
Moulins d'Afrique:
de gauche à droite:
El Hadj Mamadou
Saliou Diallo, PDG
Sonoco SA, Omar
Yacoubi, PDG
Moulins Lahlal,
l'ambassadeur du
Maroc et le Premier ministre de
Guinée
Tourisme mondial,
plus de 1000
milliards de $
de recettes en 2011
Après les pertes enregistrées en
2009, une année de crise, les recettes du tourisme international
qui se sont redressées en 2010,
poursuivent leur croissance. Il ressort de la dernière édition du baromètre de l’OMT (Organisation
mondiale du tourisme), qu’elles se
sont à 1 030 milliards de $, soit 740
milliards d’euros, contre 928 milliards de $ en 2010. En termes réels,
les recettes du tourisme international ont donc progressé de 3,8%,
tandis que les arrivées de touristes
internationaux ont augmenté de
4,6% en 2011, atteignant les 982
millions d’arrivées. Pour les analystes de l’OMT, la corrélation
étroite qui existe entre ces deux indicateurs se confirme, sachant que
la croissance des recettes a tendance à être légèrement plus faible
que celle des arrivées dans les périodes de difficultés économiques.
Entame de l’extension de l'aéroport
Victoria Falls au
Zimbabwe
Afin de relever le défi de l’organisation de l'Assemblée générale de
l’Organisation mondiale du tourisme, un organe des Nations Unies,
en 2013, le gouvernement zimbabwéen a décidé d’injecter plusieurs
millions de $ dans les travaux
d'agrandissement de l’aéroport Victoria Falls. Si pour la station balnéaire et l’hôpital un consortium
d’entreprises de Bulawayo participe
aux travaux, il n’en est pas de même
pour les réaménagements à l’aéroport. Les entreprises locales ont
alors exprimé leur déception, vu
leur exclusion dans ce chantier.
Train de mesures
en Afrique du Sud
contre le jeu illégal
trouvé un terrain d’entente avec les
bailleurs inscrits sur la short-list devant participer au financement du
projet.
«Le financement est presque bouclé.
Les banques et les partenaires institutionnels croient en ce projet. C’est un
modèle industriel nouveau en Guinée
que nous mettons en place et qui
constitue un signe de vitalité du secteur privé. Notre partenariat est un
co-développement industriel à forte
valeur ajoutée», a reconnu le Marocain Omar Yacoubi.
«En tant opérateur du secteur, ma
première commande passée auprès
des Moulins Lahlal pour faire venir la
farine en Guinée pesait 45 tonnes
payée à l’avance. Durant tout ce partenariat j’ai respecté mes engagements. Aujourd’hui, avec ce projet Les
Moulins d’Afrique, je passe du statut
d’importateur de farine au statut
d’industriel» a estimé Mamadou Saliou Diallo, PDG de Sonoco SA.
La capacité de production des Moulins d’Afrique est de 172000 tonnes
de blé fortifié par an et devra atteindre un pic de 216000 tonnes l’année
après l’extension de l’usine prévue
en principe en mars 2013.
La firme suisse Bühler, géant mondial dans la fabrication et l’installation des chaînes logistiques
agro-alimentaires, se charge de la
réalisation de la minoterie «Moulins d’Afrique».
Une bouffée d’oxygène à la fois pour
le secteur privé guinéen et le gouvernement qui considèrent ce projet industriel privé comme une
réponse à la récurrente tyrannie liée
à la facture du blé à l’import soumise aux fluctuations des cours du
marché de la farine. Grâce à cette
minoterie, le marché guinéen sera
ravitaillé correctement et en grande
quantité en farine de blé fortifiée de
très bonne qualité.
Alpha Condé,
président de la
Guinée
Vers la hausse des
transactions entre le
Sénégal et la Grande
Bretagne
Quitus du président
Selon les associés, le chef de l’Etat,
Alpha Condé a délivré son quitus
pour la réalisation de la minoterie.
Car, cette importante industrie traduit concrètement la vision de son
programme quinquennal qui place
l’autosuffisance alimentaire au
cœur de ses priorités. Cet investissement de 28,5 millions de $ est un
bol d’air frais envoyé à l’économie
guinéenne qui profitera beaucoup
du transfert technologique. Mais, le
secteur agro-industriel reste toujours vulnérable : déficit d’énergie,
d’eau, absence de financement et
d’incitations avantageuses fiscales.
Ce modèle de financement des
Moulins d’Afrique, réalisé en Guinée fruit d’une joint venture maroco-guinéenne devra inciter
d’autres opérateurs nationaux à
prendre cette voie afin de booster
le tissu économique.
Ismael Aidara,
Envoyé spécial à Conakry
Rob Davies, ministre sud africain
du commerce et de l’industrie, a récemment annoncé que le gouvernement de son pays, en partenariat
avec la National Gambling Board
(NGB) est en train de mettre en
place une politique forte pour combattre et éliminer le jeu illégal. Les
professionnels de la NGB ont d’ailleurs été mandatés pour préparer
un plan d'actions dans ce sens. Il
aussi précisé que le Conseil national de politique sur le jeu illégal et
des alcools que l'Afrique du Sud a
besoin d'une stratégie nationale
claire pour combattre et éliminer le
jeu illégal d'une manière cohérente
avec des mesures répressives.
Avec ce
projet Les
Moulins
d’Afrique, je
passe du
statut
d’importateur
de farine au
statut
d’industriel.
Avec un volume d’échanges global
estimé en moyenne à 60 milliards
de f CFA sur la période de 2006 à
2010, dont des importations sénégalaises de Grande- Bretagne autour de 55 milliards de f CFA et
des exportations stagnant à 4 milliards de f CFA par an, la Grande
Bretagne et le Sénégal comptent
booster leurs transactions. Ainsi,
la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Dakar
a abrité la cérémonie de signature
d’un Protocole d’Accord destiné à
renforcer les investissements et à
élargir les échanges commerciaux. Paraphé par Mata Sy
Diallo, la ministre sénégalaise du
commerce, de l’industrie et de
l’artisanat, et Henry Bellingham,
ministre britannique chargé des
relations avec l’Afrique, ce document permettra de hisser les
échanges à la hauteur des potentialités des deux bords.
24 mai 2012 Les Afriques
. 39
ARRÊT SUR IMAGE
Liban
Un sunnite libanais
avec son fils dans la
cité de Tripoli, le 14
mai. La guerre entre
factions fait rage.
40 Les Afriques .
24 mai 2012
24 mai 2012 Les Afriques
. 41
POLITIQUE ECONOMIQUE AFRICAINE
Algérie Les leçons des
législatives du 10 mai 2012
Abdelaziz Bouteflika,
président de la République algérienne
42 Les Afriques .
24 mai 2012
Aux élections législatives
du 10 mai 2012, quelque
64,76% de la population
algérienne, soit environ
les deux tiers- abstention
et bulletins nuls (2/3),
n’ont fait aucun choix.
C’est un taux qui reflète
une démobilisation
importante de la
population, plus
accentuée auprès
de la jeunesse.
24 mai 2012 Les Afriques
. 43
POLITIQUE ECONOMIQUE AFRICAINE
Dépouillement
dans un bureau de vote
Il y a eu donc
2 903 945
nouveaux
électeurs par
rapport à 2007
représentant un
accroissement
de 11,54 %, soit
581 000/an. Or,
les pouvoirs
publics
annoncent
officiellement
une demande
additionnelle
d’emplois de
300 000/an.
44 Les Afriques .
24 mai 2012
Q
uelque 44 partis politiques ont participé aux élections législatives du
10 mai, dont 21 nouvellement
agréés par le biais de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi organique
relative aux partis politiques en février dernier.
En tout, 462 sièges étaient en lice. Comment ne
pas rappeler que le porte-parole semi officiel, directeur du centre de recherche sécuritaire et stratégique – CRSS-, dans un entretien au quotidien
gouvernemental El Moudjahid en date du 22
avril 2012, affirmait qu’un taux de participation
inférieur à 45% serait un échec relatif pour les
élections. Espérons qu’il ne se contredira pas
avec ces résultats.
Dans ce cadre, il y a trois observations à notre niveau. Premièrement, le Front de libération nationale (FLN) remporte les élections législatives en
obtenant 220 sièges( 46,90%), le rassemblement
national démocratique (RND) 68 sièges.(14,49%),
l’Alliance verte qui regroupe trois partis islamistes
(MSP, ENNAHDA, ISLAH) obtient 48 sièges
(10,23%), le Front des forces socialistes (FFS)
(4,47%) 21 sièges et le Parti des travailleurs (PT)
20 sièges 4,26%). Pour avoir la majorité absolue, il
manque au parti historique (FLN) environ 15
sièges. Ce parti peut légiférer presque seul puisque
nous trouvons au niveau de la périphérie plus de
60 y compris les indépendants des anciens du
FLN, sans compter que plus de 50% des élus du
RND sont également des anciens du FLN.
Dans l’arithmétique politique
Par rapport à l’ancienne alliance présidentielle, le
RND et beaucoup plus le MSP, deviennent des accessoires. Deuxièmement, rappelons qu’en 2007,
selon les données du Ministère de l’intérieur, les inscrits ont été de 18 760 400. Le corps électoral pour le
10 mai 2012 était de 21 664 345 électeurs et électrices. Il y a eu donc 2 903 945 nouveaux électeurs
par rapport à 2007 représentant un accroissement
de 11,54%, soit 581 000/an. Or, les pouvoirs publics
annoncent officiellement une demande additionnelle d’emplois de 300 000 par an (plus de 18 ans entrant dans la vie active) ce qui donne une différence
de 281 000/an soit un total de 1 405 000 électeurs
que le gouvernement doit justifier. Les données apparaissent encore plus importantes si l’on comptabilise les décès durant cette période, posant la
problématique de la nécessaire vérification du fichier
électoral afin de tester de la cohérence des données.
Troisièmement, lors des élections du 17 mai 2007 et
selon les données du ministère de l’intérieur, le
nombre de votants, soit 6 662 383, donnait un taux
de participation de 35,6% avec un nombre de bulletins nuls de 961 751 (3,8%). Aux élections locales,
le taux de participation a été de 43,96% pour les
Assemblées populaires communales (APC) et
Une proportion
de 64,76% de la
population, soit
environ les deux
tiers (2/3), n’a
fait aucun choix
et ne croit pas
en la politique.
43,26% pour les assemblées de wilayas (APW).
Lors du scrutin présidentiel du 09 avril 2009, le
taux de participation avait atteint 74,5% soit un
taux d’abstention de 25,5%.
Pour le 10 mai 2012, le taux de participation total
aux élections législatives a atteint 42,90 % incluant
le taux d’abstention record de notre émigration
qui s’est établie à 86%, posant la problématique de
l’efficacité de nos ambassades. Il y a lieu de comptabiliser les bulletins nuls qui ont été de 1 668 507,
soit 7,66 % (une nette progression par rapport à
2007) par rapport aux inscrits, ce qui nous donne
35,24% de personnes ayant fait un choix. Ainsi
64,76% de la population, soit environ les deux tiers
(2/3), n’ont fait aucun choix et ne croient pas en la
politique, taux qui reflète une démobilisation importante de la population.
Pourquoi a-t-on voté
majoritairement FLN ?
Abdelaziz Belkhadem,
Secrétaire général du
FLN en train de voter
La majorité de la population sait que nous sommes
dans un régime présidentiel et que les députés n’ont
aucun pouvoir réel tant sur la gouvernance que la
politique socio-économique. Pour des raisons culturelles du manque de repères et n’ayant pas préparé depuis l’indépendance politique le personnel
politique, n’ayant jamais eu d’élections transparentes et libres, et du fait de la mentalité du beylik
hérité de l’époque coloniale, la majorité des Algériens est attentive aux paroles du Président. Précisons que la constitution algérienne de novembre
2008, n’oblige pas le président de la République à
choisir son premier ministre au sein de la coalition
majoritaire à l’assemblée nationale. Il faut donc
écarter dans toute analyse objective ces résultats du
programme des candidats souvent déconnecté tant
des réalités locales que mondiales, discours lassants
qui n’ont fait que multiplier des promesses démagogiques et des engagements farfelus loin de la réalité. Le FLN, en plus, instrumentalisant à des fins
partisanes le passé historique.
Nous avons assisté à plusieurs phases de distribution sans merci de la rente pour calmer le front social, menaces de certains officiels de l’Etat contre
ceux qui s’abstiendraient, implication directe des
ministres, du Premier ministre et de tous les médias publics y compris même le jour des élections
où l’unique ENTV reproduit le discours du président à Sétif. Cela ne suffit pas à expliquer les résultats notamment du parti FLN. Il existe deux raisons
essentielles.
La première raison est qu’après 50 ans d’indépen-
24 mai 2012 Les Afriques
. 45
POLITIQUE ECONOMIQUE AFRICAINE
Huit des neuf «chefs
historiques» du FLN : de
gauche a droite, en haut :
Ahmed Ben Bella,
Hocine Aït Ahmed,
Mohamed Khider et
Larbi Ben M'hidi, en bas :
Mohammed Boudiaf,
Rabah Bitat,
Krim Belkacem
et Mostefa Ben Boulaïd.
Le ministre de
l’intérieur,
commentant les
résultats, ne
s’est pas
trompé en
disant qu’en
1991 c’était un
vote sanction et
qu’en 2012 c’est
un vote refuge.
46 Les Afriques .
24 mai 2012
dance politique, l’on utilise le sigle FLN symbole de
tout le peuple algérien, car le Parti du FLN n’est pas
le FLN qui a déclenché la guerre de libération nationale, les luttes intestines au sein de parti, animées
plus par le partage de la rente, ternissant d’ailleurs
son image historique. C’est assimilable à l’utilisation de la religion à des fins politiques. A la télévisons algérienne les présentateurs qui ne se lassaient
pas d’éloges envers le parti du FLN ne se sont pas
trompés en affirmant indirectement que les votants
en majorité ont voté pour ce sigle historique alors
que la majorité des partis se sont prévalus des valeurs du 01 novembre 1954 sans réels impacts. La
deuxième raison, la plus importante, est l’implication directe du président de la République. Comment ne pas rappeler que le président de la
République n’a cessé de relever l’importance de ces
élections qui entameront la mise en application des
réformes politiques qu’il a annoncées. Jamais les
pouvoirs publics n’ont multiplié tant d’actions de
sensibilisation à l’adresse des citoyens. Et l’Etat a déployé des moyens colossaux et appuyé par la propagande de l’ENTV.
Des élections aussi importantes
que le 1er novembre 1954
Comment ne pas rappeler que pour anticiper une
accusation récurrente depuis l'instauration du
multipartisme en 1989, les autorités ont invité 500
observateurs étrangers, dont 150 de l'UE, les au-
tres observateurs étant ceux de la Ligue arabe, de
l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI),
de l'ONU et d'ONG américaines. Et c’est dans
cette perspective qu’est intervenu depuis la convocation du corps électoral en février dernier, pour
la sixième fois (discours lus et écrits) pour renouveler son appel au vote. «Ces élections sont aussi
importantes que le 1er novembre 1954», avait souligné le Président Bouteflika à Arzew (Oran) à
l’occasion du 41e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures.
De peur d’un taux d’abstention record à Sétif, nous
avons deux annonces du président de la République. La première est qu’il ne briguerait pas un
quatrième mandat, annonce laissant planer une incertitude vis-à-vis de l’avenir du pays et donc une
inquiétude des citoyens qui ont vu en le FLN historique dans leur subconscient comme un vote refuge.
Le ministre de l’intérieur commentant les résultats,
ne s’est pas trompé en disant qu’en 1991 c’était un
vote sanction et qu’en 2012 c’est un vote refuge.
La seconde est que, bien qu’étant président d’honneur du FLN, le Président demandait aux algériens
d’aller voter massivement pour les candidats de
leurs choix, interprétation mal comprise, étant assimilée à aller voter FLN. Les algériens en majorité
du fait de leur faible culture politique, après ce discours inquiets ne connaissant pas les enjeux de
pouvoir disaient à la télévision ENTV «je vais aller
voter Bouteflika» et, par là, le parti FLN.
A noter que 70 à
75% des jeunes
ont boudé les
urnes. C’est
l’expression de
la désillusion
d’une jeunesse
qui insistait
surtout pour le
changement.
On peut dire sans risque de se tromper que le discours de Sétif a permis de gagner plus de 10 points
de participation par rapport aux élections législatives précédentes et, au passage, de faire gagner le
parti FLN. C’est donc un vote sécurité pour les plus
de 50 ans, cette tranche qui a le drame des années
1990/2000 et qui constituait la majorité des votants.
A noter que 70 à 75% des jeunes ont boudé les
urnes. C’est l’expression de la désillusion d’une jeunesse qui insistait surtout pour le changement.
D’où l’importance de relativiser les résultats d‘éviter les discours triomphants et de se poser cette
question stratégique : statut quo afin de préparer
sans heurts les élections présidentielles d’avril 2014
ou changement réel ? D’où ce constat que les fondamentaux de la crise sociale ne sont pas résolus et
cette question : le changement pourtant nécessaire
se réalisera-t-il ?
Les promesses de changement du président de la république seront-elles tenues ?
Des militants écoutent le
discours du Pt Boutaflika
lors de la commémoration
du 8 mai 1945
Les résultats laissent sceptiques tant les observateurs nationaux qu’internationaux. Comment la
même composante partisane qui a été incapable
pendant plus de 10 années de faire des réformes,
étant mue par l’unique dépense monétaire grâce à
la rente des hydrocarbures, peut-elle les mener
maintenant qu’elle a une majorité encore plus importante ? Nous ne pouvons pas ne pas reconnaître
le décalage qui existe entre les potentialités que re-
cèle l’Algérie, et elles sont énormes, et le niveau de
développement proprement dérisoire que le pays a
atteint après plusieurs décennies d’indépendance.
Aussi, face au vieillissement des élites politiques issues de la guerre de libération nationale, à l’obsolescence du système politique, aux contraintes
externes de plus en plus pesantes, il y a lieu de se
demander si les promesses du président de la République dans son discours du 08 mai 2012 seront
tenues ? Se dirige-t-on vers la fin de la légitimité révolutionnaire, qui suppose le pouvoir bienfaisant
comme contrat politique implicite par les tenants
du «socialisme de la mamelle» afin de légitimer
l’échange d’une partie de la rente contre la dépendance et la soumission politique ?
En résumé, il s ‘agira d’éviter les replâtrages inutiles
en différent les réformes de structures et de prendre
en compte ce désir de changement des deux tiers de
la population, d’éviter de brandir la peur et donc de
combattre toute forme de xénophobie et d’intolérance. selon la fameuse phrase de Voltaire «monsieur
je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je
me battrai de toutes mes forces pour que vous puissiez
le dire». Un renouveau de la gouvernance par plus
de moralité dans la gestion de la Cité, un Etat de
Droit ne pouvant y avoir d’Etat de droit si l’Etat
n’est pad droit, c'est-à-dire immoral s’impose pour
des raisons de sécurité nationale.
Professeur Abderrahmane MEBTOUL
[email protected]
24 mai 2012 Les Afriques
. 47
DOSSIER
Areva, affaire radioactive
La condamnation en première instance du groupe Areva
pour «faute inexcusable» après la mort par cancer d’un exsalarié pose le problème des risques sanitaires liés à
l’exploitation de l’Uranium. Quid des mesures prises pour les
salariés et populations riveraines ? Enquête.
L
e 11 mai soit moins de 24 heures après la
tenue de leur conseil, les administrateurs
d’Areva sont pris de court par une information qui fait le tour des agences de
presse. Le groupe est condamné par le
tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS) de
Melum pour la mort par cancer du poumon d’un
ex-salarié d’une mine d’uranium au Niger. Serge
Venel, mort à 59 ans, a travaillé de 1978 à 1985 dans
la mine en question.
Le défunt n’était pas un employé direct d’Areva mais
de la Cominak, société de droit nigérien qui exploite
des mines d’uranium à Akokan, au nord-ouest du
Niger. Un détail loin d’impressionner les juges qui
ont condamné Areva en tant que co-employeur et
non pas la Cominak. «Le tribunal a dépassé l’apparence pour reconnaître la réalité des relations sociales
de l’entreprises», déclare Me Teissoniére, avocat de la
famille de la victime. Contacté par nos soins, l’un des
responsables de presse du groupe Areva, qui ne pouvait pas se prononcer officiellement en attendant de
recevoir le jugement par écrit, relève toutefois une
contradiction dans ce jugement. «C’est l’incompréhension qui prévaut. La Caisse primaire de l’Assurance
maladie n’a jamais déclaré que la maladie professionnelle de Serge Venel est liée à Areva. D’autre part, le
juge déclare que Areva est employeur et, en même
temps, demande à la CNAM de verser des indemnités,
reconnaissant implicitement qu’Areva n’est pas employeur. Il y a contradiction».
Bref, selon ce jugement rendu en première instance,
la veuve de Serge Venel touchera la totalité du salaire de la victime. La condamnation fera percevoir
à la famille des dommages et intérêts à hauteur de
200 000 euros qui seront versés par la Caisse primaire d’assurance maladie et non par Areva.
C’est la première fois que le groupe Areva est
condamné ainsi, ouvrant un boulevard pour des cas
similaires en France mais aussi en Afrique. Jusque-là,
le débat sur les risques sanitaires de l’Uranium était
cantonné dans les pays du Nord et rarement en
Afrique où les mines sont exploitées à ciel ouvert.
Puisque la cause du cancer de Serge Venel est «l’inhalation de poussières d’uranium», selon le diagnostic
du pneumologue cité lors de l’audience, il est clair
que le groupe Areva aura beaucoup à s’expliquer sur
le thème des risques sanitaires. Selon la direction de
la communication, toutes les mesures sont prises.
C’est la
première fois
que le groupe
Areva est
exploite l’Uranium au Niger ?
condamné ainsi, Qui
Le juge, qui a condamné Areva et non la Cominak tiendrait à Areva. Il s’agit de la plus grande mine
ouvrant un
dans l’affaire Venel, a sans doute en tête les
souterraine au monde, située à 250 km de proliens capitalistiques entre les deux entités. La
avec plus de 250 km de galeries. L’autre
boulevard pour COMINAK (Compagnie Minière d’Akouta), a été fondeur
opérateur de l’uranium au Niger, la Somaïr (ficréée en 1974. Son capital est détenu à 34 % par
liale d’Areva) exploite une mine à ciel ouvert .
des cas
AREVA, à 31 % par la SOPAMIN (Niger), à 25 %
Contrairement aux deux premiers producteurs
similaires en
par OURD (Overseas Uranium Resources Devemondiaux de l’uranium (Canada et Australie), le
lopment Company Ltd, Japon) et à 10 % par ENNiger (3 producteur mondial) est l’un des pays
France mais
les plus pauvres au monde. L’entrée en activité
USA (Empresa Nacional del Uranio S.A,
de la mine d’Imouraren, la deuxième plus
La société emploie 1 200 personnes
aussi en Afrique. Espagne).
grande au monde, changera-t-il la donne ?
pour l’exploitation d’une mine qui, elle, appare
48 Les Afriques .
24 mai 2012
24 mai 2012 Les Afriques
. 49
DOSSIER
De la sûreté et de la
sécurité autour de l’uranium
En attendant la
causalité entre la
maladie et le
passage de la
victime à la
société Cominak, le volet
sanitaire reste le
dernier souci des
décideurs
africains.
«Nous avons mis en place des observatoires de la santé,
uniques au monde», rappelle-t-on. «Nous faisons le
suivi des mineurs pendant et après leurs activités par
des médecins et financés par Areva».
Des observatoires de santé
Problème, ces observatoires n’ont été mis en place
qu’en 2009 soit dans le cas du Gabon bien après la
fermeture des mines d’uranium, actives entre 1961
et 1999 C’est dire qu’il n’y a pas encore de profondeur dans les statistiques pour établir formellement
la causalité entre le cancer et la proximité aux
mines d’uranium. Cela d’autant qu’il n’y a eu à ce
jour que 500 consultations au Gabon. Le Niger où
travaillait Serge Venel et où démarrerait la mine
d’Imouraren, la plus grande au monde, dés l’année
prochaine, n’a vu l’établissement de ces centres
qu’en décembre 2011. Ces centres permettent de
procéder à des examens cliniques, radios et sanguins et de faire le suivi du fameux tableau numéro
6 (maladies liées à l’uranium). Notons qu’à l’heure
où nous mettions sous presse, le groupe français se
réservait le droit de faire appel une fois que lui sera
notifié le jugement par écrit. En attendant que ne
soit démontrée la causalité entre la maladie et le passage de la victime à la société Cominak force est de
le dire, le volet sanitaire des risques liés à l’exploitation de l’Uranium est le dernier des soucis des gouvernements africains.
Adama Wade
Des investissements gelés en Afrique
Notons qu’en plus du Niger, Areva
cherche à reprendre pied au Gabon où
ses anciennes mines en activité entre
1960 et 1999 sont à l’arrêt. Des campagnes d’exploration sont en cours depuis 2006 à travers Areva Gabon, filiale
à 100% d’Areva. Mais comme au Niger
où les informations persistantes font
état de ralentissement dans les investissements de la mine d’Imounarem, le
groupe a mis un coup de frein dans la
mine de Bakouma en République centrafricaine suite à la catastrophe de Fu-
50 Les Afriques .
24 mai 2012
kushima au Japon qui a vu une chute de
30% des cours d’uranium. Or le gouvernement centrafricain, qui avait intégré
les recettes dans ses prévisions, continue à camper sur ses positions, demandant au groupe de respecter le contrat
qui stipulait le démarrage de l’exploitation effective depuis 2010. Tout comme
Bakouma, l’ouverture de la mine d’uranium d’Imouraren (200 000 tonnes de
réserves), initialement prévue en 2013
sera retardée. C’est le contenu du plan
de rigueur du nouveau PDG Luc Oursel,
qui préconise une réduction de 32% des
investissements sur la période 20122016 par rapport à la période 20072011. Le rachat en 2007 pour 1,8
milliard d’euros du canadien Uramin,
propriétaire de mines en Namibie et
Centrafrique a été l’affaire de trop pour
Areva, expliquant la guerre frontale qui
mine le groupe entre les pro Anne Lauvergeon et les pro Luc Oursel. La victoire finale de l’un ou l’autre de ses
protagonistes sera tranchée par l’Elysée et, quelque part, par Niamey.
Areva Luc Oursel en opération de séduction à Niamey
Le changement de locataire à L'Elysée après le départ de Nicolas Sarkozy
risque de saper la feuille de route du tout nouveau patron du groupe
nucléaire français. Luc Oursel cherche à tout prix à se connecter au palais de
Niamey dont le président est un fidèle de la famille socialiste.
L’
ère Auvergeon est révolue. A Areva, c’est la
méthode Luc Oursel qui se met en place. A
52 ans, ce diplômé de l’Ecole des Mines de
Paris était un des grands outsiders de la succession
de l’ex-patronne et débonnaire Anne Lauvergeon.
Malgré une paix des braves signée avec certaines
fortes personnalités du champion nucléaire français,
en embuscade pour postuler le fauteuil très convoité,
Luc Oursel est décidé à mener l’offensive pour vendre les merveilles d’Areva avant fin 2012. Un long périple pour soit recadrer le timing des investissements
ou passer à la vitesse supérieure qui le mènera aussi
bien du côté de la Manche, au Canada, aux EtatsUnis, qu’en Afrique (Centrafrique, Afrique du Sud
Luc Oursel, Pdg
d’Areva reçu par
le président du
Niger, Mahamadou Issoufou
La première grande opération de séduction de Luc Oursel
s’est déroulée sur le sol nigérien. Ce n’est pas fortuit. La
firme française exploite l’une des réserves mondiales les
plus grandes dont les investissements ont été gelés.
et le Niger). Une stratégie différente de son prédécesseur, accusée à tort et à raison d’être très iconoclaste.
Sans chambouler le dispositif du modèle intégré du
groupe nucléaire, clame t- on du côté du shadow-cabinet du nouveau patron.
Selon des informations parvenues à Les Afriques, Luc
Oursel a inscrit le Niger parmi ses priorités fin 2012
et 2013. La première grande opération de séduction
de Luc Oursel s’est déroulée sur le sol nigérien. Ce
n’est pas fortuit. La firme française exploite l’une des
réserves mondiales les plus grandes (le site d’Imouraren) dont les investissements ont été gelés. Le site
fournit un tiers de l’uranium au groupe nucléaire
français. La situation d’insécurité dans la zone d’exploitation des gisements d’uranium, suite aux enlèvements d’otages français sur le site d’Arlit, avait
plombé les activités du champion nucléaire. Sous
l’ère de la transition militaire, l’ex patronne Anne
Lauvergeon avait multiplié ses aller-retour à Niamey
pour prendre langue avec les autorités. Sans suite.
Une source officielle, a confirmé que le président Mahamadou Issoufou a reçu un message de Luc Oursel
le 22 avril dernier, deux semaines seulement après la
célébration de la prise du pouvoir de Issoufou. Cette
connexion, selon nos informations, a été obtenue
grâce à l’ambassadeur du Niger à Paris, Abdourahmane Mayaki. Le tout nouveau ministre des mines,
Omar Tchiana, a transmis le message au chef de
l’Etat. Sauf contre toute attente, Luc Oursel, très
proche de l’ancien pouvoir en France, serait sur un
siège éjectable, selon plusieurs sources bien informées. Ce qui explique son rapprochement subitement avec le palais de Niamey. L’actuel locataire de
l’Elysée, François Hollande est un frère de parti et
ami de longue date du président Mahamadou Issoufou. Influence politique et enjeux économiques vont
beaucoup peser sur l’avenir de Luc Oursel, surnommé «Kung Fu Panda, l’homme éclair» au siège,
qui avait déjà programmé une tournée sur les sites
exploités par le groupe nucléaire français. Selon une
déclaration officielle du chef de l’Etat nigérien, à l’occasion de l’an 1 de sa prise du pouvoir, Areva a pris
l’engagement de dépasser ses investissements sur
Imouraren de plus de 3,7 millions d’euros avec une
reprise imminente des activités début 2013.
Ismael Aidara, Niamey
24 mai 2012 Les Afriques
. 51
FOCUS
Bleu-Blanc-Rouge,
le vrai «étendard» français
52 Les Afriques .
24 mai 2012
France Les vrais drapeaux
D’abord il y eut quelques lézardes : «la France, tu l’aimes ou
tu la quittes» emprunté à l’extrême droite nord-américaine
(«Canada love it or leave it»). Et puis un jour la digue a cédé,
emportant toute décence sur son passage, inondant
même les mieux intentionnés. Désormais la remarque
fatale était à portée de mots et de maux.
P
lus que le racisme, s’étala alors au grand
jour le mépris longtemps contenu. Désormais on pouvait tout s’autoriser, et peut
importe ce que pourraient ressentir ceux
sur qui on crachait, tant leur opinion
compte si peu. Et si, au passage, on pouvait consolider le bouc émissaire espéré, c’était tout bénéfice.
Ancien étudiant de la Sorbonne, la culture française
m’a formé. Balzac, Flaubert ou Stendhal, m’ont aidé
à devenir adulte. Je tiens «Aurélien» d’Argon ou «les
chemins de la liberté» de Sartre pour des romans majeurs. Et si je suis un passionné de la littérature
d’Amérique latine, c’est en français que j’ai lu Garcia
Marquez ou Asturias. Le cinéma de Claude Sautet et
les chansons de Brassens et de Ferré m’ont nourris.
J’entends d’ici l’objection : «vous êtes différent».
Faux : nous sommes des millions. Nous avons toujours été de millions.
Nous, c'est-à-dire une grande partie des arabes, des
africains noirs et des musulmans, tous ces francophones (et souvent francophiles, cela allait ensemble) plus de deux cent millions je crois, qui avons
avec la France la langue, la culture et une part importante de l’histoire en partage.
Au nom de ce patrimoine commun, j’ai décidé
d’adresser cette brève missive à madame Morano.
(mais Sarozy ou Le Pen auarient tout aussi bien fait
l'affaire). Une remarque de madame Morano (reprise depuis en boucle par une partie des dirigeants
français) a soudain éclairé ma modeste lanterne culturelle francophone, que je tente, envers et contre
moi-même, de ne pas la laisser s’éteindre.
Vous avez déclaré, madame, que vous aviez été choquée de voir autant de drapeaux étrangers le soir de
la célébration de la victoire de monsieur Hollande.
Et vous avez ajouté ceci : «nos amis algériens n’accepteraient pas de drapeaux français dans de telles
manifestations chez eux». Passons sur le fait que ces
drapeaux, à cette place, à ce moment, sont une ma-
Nous avons beau
refuser de
larguer les
amarres,
certains d'entre
vous, et non des
moindres, sont
en train, en
polluant les
quais, de nous
obliger à lever
l’ancre.
nifestation éloquente du rayonnement de la France
dans le monde. Plus fondamentalement, je voudrais
vous dire, madame, que cela fait très longtemps que
ces gens là brandissent le drapeau français. Comme
«tabors marocains» ou «tirailleurs» sénégalais, ils
ont répondu présents, aux heures dramatiques de
votre pays. Comme romanciers, ils ont écrit certaines des plus belles pages de la littérature française.
Quelques noms, juste pour votre information : hier
Kateb Yacine, Driss Chraïbi, Mouloud fearroune,
Sembène Ousmane, Ferdinand Oyono ou Camara
Laye (et la liste est loin d'être exhaustive) ; aujourd’hui Cheikh Hamidou Kane, Tahar Benjelloun,
Yasmina Khadra ou Boualem Sansal.
Quel est le point commun, madame, entre le sénégalais Senghor, l’algérienne Assia Djebar et le libanais Amin Maalouf ? Ils sont entrés à l’Académie
française et en ont conçu une très grande fierté.
Amis français réveillez-vous. Ne commettez pas l’irréparable. Nous avons beau refuser de larguer les
amarres, certains d'entre vous, et non des moindres,
sont en train, en polluant les quais, de nous obliger
à lever l’ancre. Ne venez pas ensuite nous reprocher
d’aller voir du coté de la Chine ou d’inscrire nos enfant dans les universités québécoises
«La France, tu l’aimes ou tu la quittes» a dit le président Sarkozy. Nous l’aimons et pourtant, au train
ou vont les choses, nous risquons (nous ou demain
nos enfants) de la quitter, tant nous avons le sentiment violent que, elle, elle nous a déjà quitté.
Majid Kamil
(Ancien ambassadeur de Mauritanie)
Directeur de banque
PS : Il est plus que temps que nous,
ceux qu'on pourrait appeler élite
africaino-arabo-francophone, de réfléchir
sur notre part de responsabilité dans l'image
contrastée qui est aujourd'hui la notre dans le monde.
24 mai 2012 Les Afriques
. 53
DÉCOUVERTE
Le périple d’Ibn Battuta, à
travers le caftan marocain
Les trésors découverts par Ibn Battuta, chroniqueur,
grand voyageur devant l’éternel, ont inspiré les
stylistes marocains. C’est ce que proposait de faire
revivre la 16e édition de Caftan à Marrakech.
54 Les Afriques .
24 mai 2012
L
e coup d’envoi de la 16ème édition de
CAFTAN, événement incontournable
de la haute couture marocaine et arabe,
a été donné lors d’une conférence de
presse le 11 mai dernier à la Mamounia.
Les noms des artistes et des invités d’honneur qui
seront au rendez-vous y ont été révélés.
Présentée par l’animatrice franco-marocaine Ness,
CAFTAN 2012 a été marquée par la participation
d’artistes marocains tels que Abdelfattah Grini
mais aussi par des artistes internationaux ; parmi
eux la troupe Rustavi de Géorgie, la danseuse chinoise Sharon Joyce Kung, ou encore la troupe indienne Threebee qui ont rendu un vibrant
hommage à la découverte du monde et de l’autre.
Les trésors découverts par Ibn Battuta ont inspiré
les stylistes marocains. Leurs créations présentées
lors de cette édition ont été sublimées par des
mannequins de différentes nationalités avec en
L’invitée
d’honneur de
cette année
était la styliste
chinoise, Guo
Pei, célèbre
pour son talent
et son
audacieuse
créativité !
tête d’affiche Monika Krol, mannequin de renom
ayant déjà collaboré avec Christian Dior, Louis
Vuitton, Givenchy, ou encore Elie Saab.
L’invitée d’honneur de cette année était la styliste
chinoise, Guo Pei, célèbre pour son talent et son
audacieuse créativité ! Pour le plus grand bonheur du public, elle a présenté l’une de ses collections sur le podium de Caftan 2012.
Emblème de la haute couture en Chine, Guo Pei a
fait ses preuves dans l’univers de la mode. Perfectionniste, elle a toujours su donner le meilleur
d’elle-même à travers son travail. Ses créations
sont portées par une clientèle prestigieuse et hétéroclite, venue aussi bien de l’univers de la politique
et du cinéma, que du monde des affaires. Guo Pei
s’est aussi distinguée pour avoir dessiné les tenues
lors de la remise des prix aux jeux olympiques de
Pékin en 2008.
Mouna Fatimi Rachid, Marrakech
24 mai 2012 Les Afriques
. 55
VU DE NEW YORK
Crise de l’Euro
Tout est mélangé
L’Union résiste à la crise
56 Les Afriques .
24 mai 2012
Une éventuelle sortie de la Grèce, du
Portugal et «maybe» de celle de
l’Espagne sonnerait le glas de la monnaie
européenne. Si l’Italie est dans le lot,
bonjour la catastrophe finale.
24 mai 2012 Les Afriques
. 57
VU DE NEW YORK
D
epuis un certain temps je suis resté un
peu silencieux sur tout ce qui se passe
en Europe. Ma dernière publication
date du 22 Février 2012. J’ai été gagné
par «l’Euro fatigue». Après le succès du
dernier «bail-out» je m’étais senti réconforté par les
évènements et suis tombé dans la lassitude, oubliant
qu’avec l’euro et les européens rien n’est jamais sûr
d’être sûr. Depuis un certain temps cependant, la dynamique de la politique économique européenne
semble être la préoccupation de tous ! Je n’ai jamais
assisté à un tel scenario dans lequel la politique et
l’economie sont si étroitement reliées. Je ne veux pas
rater ces moments historiques.
De quoi s’agit-il au juste ? Voilà depuis près de
quelques semaines, les changements politiques en Europe ont fait revivre la flamme de la crise de l’Euro.
En France et en Grèce les électeurs ont montré leurs
mécontentements face aux pouvoirs en place. En
France, Sarkozy a été gentiment remercié. En Gréce,le
parti au pouvoir a été obligé de partager son autorité
avec l’extrême droite, opposées à toutes les mesures
draconiennes et aux plans d’austérité. Standard &
Poor profite de cette situation pour se faire remarquer en dégradant 26 banques italiennes.
Je n’ai jamais
assisté à un tel
scenario dans
lequel la politique
et l’economie
sont si
étroitement
reliées. Je ne
veux pas rater
ces moments
historiques.
lement différente : la Grèce installe la division au sein
de la zone monétaire et cela avec son lot de déclarations diplomatiques insensées et contradictoires.
L’Autriche, mon second pays, a proposé que la Grèce
quitte l’Union Européenne, pour renégocier sa réentrée dans la zone euro (indirectement cela équivaut à
quitter la zone euro). Le porte-parole de la commission européenne, a quant à lui, rejeté l’idée d’une sortie de la Grèce. Le président de la même commission,
José Manuel Barroso, a dit à ce sujet et je cite : «Quand
le membre d’un club ou d’une association ne respecte
pas les règles, il est mieux de sortir de ce club, cela est applicable à toute organisation, à toute institution, et à
tout projet». Vous comprenez maintenant pourquoi
j’ai utilisé plus haut l’expression de «cacophonie» pour
décrire ce qui se passe dans la zone euro ! Tout cela
arrive parce qu’il n’y a plus de leader dans la crise européenne ! L’Allemagne semble faire son mea culpa,
depuis que sa position rigide sur l’austérité économique s’est vue bombardée par l’opinion internatio-
Evolution des Bonds Publics (10 ans) entre
le 22 Fevrier et 14 Mai 2012
SPA(10Y)
FRA(10Y)
ITA(10Y)
POR(10Y)
GRE(10Y)
Une totale cacophonie
Dans les milieux européens des finances, on évoque
une éventuelle sortie de la Grèce, du Portugal et
«maybe» de celle de l’Espagne et dans le pire des cas de
l’Italie (cela serait la catastrophe finale). Dernièrement, pour calmer les marchés, les ministres des finances européens réunis à Bruxelles ont démenti avec
ferveur une potentielle sortie de la Grèce de la zone
monétaire ! En réalité sur le terrain, l’histoire est tota58 Les Afriques .
24 mai 2012
34,36
37,17
21,1
27,56
12,55
13,81
11,07
5,48
10,97
4,95
5,11
2,95
5,77
2,77
4,94
2,89
4,91
2,83
5,33
6,23
22 FEV 12
Mars 12
Avril 12
14 Mai 12
La Grèce
dans l’Europe
Entre février et
mars, il y a eu
une certaine
accalmie sur les
marchés. Tous les
bons (de 10 ans) à
part ceux du
Portugal, ont
connu de légères
baisses. Les taux
d’intérêts sur les
bons grecs
continuent d’être
les plus élevés.
nale. Indirectement, sa cousine, l’Autriche, dire tout
haut ce que l’Allemagne pense tout bas ! En plus, il y
a une invitée surprise à la table, en l’occurrence François Hollande, le nouveau président français! En
Grèce, le nouveau vainqueur des élections (Syriza)
menace de ne pas signer une autre mesure d’austérité,
créant ainsi un véritable imbroglio financier. En
pleine rédaction de ces lignes, je prends connaissance
de l’échec des pourparlers entre les deux partis ! Ce
désaccord renvoie donc le pays de Platon et de Socrate
à une autre élection qui déterminera le grand vainqueur ! Tout est vraiment mélangé !
La nervosité s’installe
Malgré les différents appels au calme, la nervosité
commence à gagner les marchés de transactions des
bons publics. Le tableau ci-dessus montre l’évolution
des bons publics depuis la parution de mon dernier
article sur l’euro (22 Février 2012). Comme on peut
le constater, la montagne grecque tout naturellement
domine la contrée !
Lorsque qu’un état émet des bons de trésors, il s’endette en effet auprès des détenteurs de ces bons. Les
taux d’intérêts sur ces bons sont définis par le marché
financier. Si les investisseurs (spéculateurs) doutent
de la capacité de remboursement de l’état, ceux-ci
vont demander des garanties élevées. Cela va se traduire par des taux d’intérêts élevés. C’est la raison
pour laquelle, les taux d’intérêts sur les bons publics
de la Grèce sont de 29,10% quand ceux de l’Allemagne de sont de 1,47%.
Entre février et mars, il y a eu une certaine accalmie
sur les marchés. Tous les bons (de 10 ans) à part
ceux du Portugal, ont connu de légères baisses. Les
taux d’intérêts sur les bons grecs continuent d’être
les plus élevés. Entre le 12 Avril et la date du 14 Mai,
les bons espagnols et Grecque connaissent une
hausse significative.
Et si la Grèce sortait de l’euro ?
C’est la question qui est sur toutes les lèvres ? Là encore je crois que les européens vont commettre la plus
grande erreur de leur vie s’ils laissaient la Grèce s’en
aller ! Pour soutenir cette argumentation, on cite
l’exemple de l’Argentine qui est sortie de l’union monétaire avec l’Amérique, a dévaluée sa monnaie locale
et expérimentée une croissance économique en
moyenne de 9% entre 2003 et 2007. Les conditions du
défaut de paiement de l’Argentine et de celle de la
Grèce ne sont pas les mêmes. L’Argentine est un pays
ayant une économie sectorielle plus avancée que celle
de la Grèce. Comme je l’ai mentionné déjà plus haut,
la clef de sortie de la Grèce n’est plus dans les mains
de la Commission européenne, mais plutôt dans les
élections prochaines ! Je crains que celles-ci ne se
transforment en référendum sur la participation du
pays à la zone monétaire ! Dans le cas où la Grèce devrait partir, cela va enfin réveiller l’Europe qui mettra
tout en œuvre pour sauver sa monnaie.
Francis Konan
Conseiller éditorial Les Afriques,
blog : frkonan.wordpress.com
24 mai 2012 Les Afriques
. 59
POINT DE VUE AFRICAIN
Une malédiction plane sur
le nouveau président français
En Afrique, ce n’est pas la victoire de
François Hollande que l’on fête, mais la
défaite du lecteur (et coauteur) du
discours de Dakar. «Sarkozy rentre au
quartier», dit-on aujourd’hui en Afrique
pour traduire sa déchéance.
Q
u’ils étaient beaux les drapeaux
ivoiriens, sénégalais, maliens, algériens, marocains qui flottaient à la
Bastille : c’était, eût-on cru,
l’Afrique qui venait d’élire son
président. N’en déplaise à Eric Zemmour et aux
indignés de Droite, nous autres africains étions
particulièrement heureux de voir nos symboles
ainsi coloniser les cieux français.
Le truc c’est que d’un président à l’autre, elle est
toujours déçue cette Afrique, qui s’invite à la
table des réjouissances, sans y apporter du vin, en
manière d’indépendance, mais prête à danser,
parce qu’il est toujours bon de fêter quand on
souffre, en manière d’inconséquence.
Il y a cinq ans, l’Afrique avait été plutôt présente
dans la campagne entre Ségolène et Nicolas.
Dans un discours tenu au soir de son élection, il
avait promis de bien belles choses. Cette fois, de
la campagne jusqu’à son élection, le président
élu s’est bien gardé de multiplier les effets d’annonce, mais ceux que l’on a suivis avaient, avant
lui, déjà été dits.
Il est peu probable de toute manière qu’un président normal incarne la rupture. La normalité
entre la France et l’Afrique étant encore la sujétion et l’aspiration sans retour des ressources et
60 Les Afriques .
24 mai 2012
Sarkozy, discours de
Dakar juillet 2007
Le truc c’est que
d’un président à
l’autre, elle est
toujours déçue
cette Afrique, qui
s’invite à la table
des réjouissances, sans y
apporter du vin,
en manière
d’indépendance,
mais prête à
danser ...
des talents du continent. La politique africaine de
la France est depuis le temps une dette d’Etat et
non pas une dette de l’un des nombreux «régimes» à s’être succédés à Paris, qu’ils soient de
Gauche ou de Droite. Dès lors, l’espoir sonne
comme un éternel recommencement.
Qui en effet est François Hollande, qui sinon un
Français ?
Un corrézien à l’Elysée
Le film de son ascension, ça n’est pas tout à fait
un indien dans la ville, mais ça y ressemble. Tout
sera nouveau pour lui même si ce qu’il avait appris de l’Elysée auprès de son illustre homonyme avait dû être oublié, tellement cette
expérience commençait à dater et eût été bien
invisible dans un curriculum vitae.
Côté cour, François Hollande n’a jamais assisté à
un Conseil de ministres, il va en présider plusieurs, tous d’importance capitale. Espérons qu’il
ne sera pas frappé par la malédiction de ceux qui
avant lui ont gagné leur toute première élection
présidentielle (Pompidou, D’Estaing et Sarkozy)
qui ont tous fait «un petit mandat et puis s’en
va». Hollande a, en tout cas, une sorte de virginité, pleine de promesses. Mais la virginité, ça
n’est pas parce qu’on la perd à quarante ans que
l’on fera le meilleur usage qui soit de sa sexualité.
Côté cœur, une journaliste succède à une chanteuse comme première dame de France. Une
femme ni pacsée ni mariée à l’Elysée et un président qui s’apprête à légaliser le mariage homosexuel : on est bluffé par cet «American
Dream» version française qui rend possibles
tous les rêves, réalisables les trajectoires les plus
improbables… Rien n’est donné, tout se
construit, pourrait-on conclure pour emprunter
à une formule philosophique.
«Sarkozy rentre au quartier»
Abdoulaye Wade lui-même n’avait pas perdu au
premier tour, Giscard d’Estaing non plus, «personne» n’a appelé à voter pour Sarkozy dans l’entre-deux tours, l’énergie du désespoir qu’il a
nommé du beau nom de «combativité» n’a fait
que rendre plutôt «respectable» sa défaite, qui
reste historique.
En Afrique, ce n’est pas la victoire de François
Hollande que l’on fête, mais la défaite du lecteur
(et coauteur) du discours de Dakar. «Sarkozy rentre au quartier», dit-on aujourd’hui en Afrique
pour traduire sa déchéance. Evidemment ici, on
n’explique jamais rien par les causes finales, les
24 mai 2012 Les Afriques
. 61
POINT DE VUE AFRICAIN
raisons immédiates, les principes visibles. François
Hollande a gagné certes, il reste que, dans l’imagerie générale, ce n’est pas du fait de la majorité
d’électeurs qu’il a acquis à sa noble cause pour la
France, mais plutôt du fait d’une vengeance outretombe de Kadhafi.
Mais après lui avoir rendu la monnaie de sa pièce,
il se murmure que Kadhafi continuera de le hanter au travers d’affaires sinon nées éventuelles,
concernant ses relations plus ou moins troubles
avec l’argent et les milieux d’argent (le vice de
DSK était les femmes, celui de Sarkozy serait-il
l’argent ?). Mediapart, «officine» aux ordres sans
doute de l’ex dictateur libyen a fait la preuve
d’une promesse de financement (donc de discussions préalables : l’intention vaut le fait) et le
poursuit déjà pour «dénonciation calomnieuse» ;
Cecilia dont il avait célébré le mariage avec l’animateur Jacques Martin, à Neuilly-sur-Seine,
avant de s’octroyer le privilège magistral de la lui
piquer par la suite (officieusement puis officiellement), l’a lâché dès 2007 (l’arroseur arrosé) ;
Carla elle-même survivra-t-elle à la déchéance de
62 Les Afriques .
24 mai 2012
Ségolène Royal
chez Me Abdoulaye Wade
cet homme qu’elle n’a jamais connu que comme
président de la république… ?
Une retraite tout en procès ?
François Hollande
a gagné certes, il
reste que, dans
l’imagerie générale, il a acquis à
sa noble cause
pour la France,
plutôt du fait
d’une vengeance
outre-tombe de
Kadhafi.
Jacques Chirac, qui avait demandé à voter pour
son frère du village (Hollande), et Dominique
de Villepin, tous traînés dans la boue dans des
procès où l’Elysée n’a pas manifesté la moindre empathie, tiendront-ils leur revanche ?
Après l’échouage, les lâchages suivront et
comme de juste les révélations (Karachi, Bettencourt, etc.): affaires à suivre… ! S’il est
blanchi de toutes les présomptions qui tendent
à s’accumuler contre lui, il comptera dans l’histoire comme un grand président français. Autrement, cette parenthèse de sang libyen
qu’aura été son règne se révèlera un cauchemar
dont la France prendra des années encore à
s’expliquer les tenants et les aboutissants.
Qu’elles furent longues et difficiles, ces dernières semaines : le Conseil National de Transition était bien loin, trop impuissant. Paul Biya
n’a pas pu envoyer des «observateurs interna-
tionaux», et pour cause, tous étaient occupés à
courtiser le camp socialiste ( à travers notamment les réseaux de Stéphane Fouks, communicant de Paul Biya). Le président Alassane
Ouattara aurait bien aimé lui renvoyer l’ascenseur, mais Nicolas Sarkozy n’a pas daigné exiger
le moindre recomptage des voix, il n’a même
pas attendu que soient dépouillés les suffrages
des Français de l’extérieur. Comment la CEDEAO aurait-elle pu dans ces conditions organiser l’enlèvement de François Hollande et le
bombardement de son QG de campagne ?
«Les blancs sont décidement faits
pour être des dieux»
C’est-à-dire que la sorcellerie prend en France
des formes magnifiques, la sorcellerie c’est un
raccourci qui explique et recouvre l’image que le
sens commun se fait ici du prodige et de la perfection. La science des sondages laisse bouche
bée l’opinion publique africaine. Les bureaux ne
sont pas encore fermés que déjà des «marabouts» annoncent, avec une marge d’erreur
guère plus importante que celle des médecins
diagnosticiens les plus doués, qui est le prochain
président de la France.
Le rêve français
n’est-il pas un
rêve africain ? Et
notre rêve à
nous autres
Africains, est-ce
un Français qui
va avec sa
baguette
magique le faire
devenir une
réalité ?
François Holland,
Pt de la France
Pas moyen de traficoter les chiffres, pas moyen de
pratiquer le dilatoire, et tout cela sans qu’aucune
commission électorale indépendante ne soit
créée… La France va-t-elle revoir son code électoral après que les infractions de France 2 ont
semé la division au soir du premier tour ? Au
reste leur code électoral traite-t-il seulement de
l’élection présidentielle ?! D’où vient-il que des
fonctionnaires hiérarchiquement soumis à un
ministre de Sarkozy aient toute liberté de gérer
ce processus ?
Sarkozy qui s’est battu comme un beau diable a
été bien prompt à reconnaître la victoire de son
rival socialiste. Hollande lui-même a été bien imprudent de ne rien contester de tout cela. Comme
si en France les hommes intègres valaient autant
que des lois bien faites, comme si l’argent, les réseaux, les puissances extérieures se mettent toujours du côté de ceux que le peuple a choisis.
Pourquoi nous fait-on croire que c’est l’argent
qui expliquait tout, que des réseaux émergeaient
les meilleurs ? Le rêve français n’est-il pas un rêve
africain ? Et notre rêve à nous autres Africains,
est-ce un Français qui va avec sa baguette magique le faire devenir une réalité ?
Eric Essono Tsimi
24 mai 2012 Les Afriques
. 63
MEDIAS
L’Afrique dans la presse britannique
Aucun sujet vraiment dominant cette semaine dans les médias
britanniques sur l’Afrique. Chaque quotidien a tenté d’avoir donc son
scoop. Le Guardian annonce ainsi que l’avocat de Charles Blé Goudé
indique que son client, l’ancien général de la rue à Abidjan, est prêt à
se rendre devant tout tribunal qui lui garantie justice.
N
Niger, la pire nation au monde
pour les mamans
ick Kaufman, l’avocat de Blé Goudé
a déclaré au Guardian, que celui qui
a aidé Laurent Gbagbo a s’accrocher
au pouvoir, serait prêt à se défendre
devant tout tribunal qui lui garantirait un jugement juste. Le dirigeant charismatique
des Jeunes Patriotes en Côte-d’Ivoire, a quitté son
pays aux dernières heures du régime défunt.
Blé Goudé prêt à se rendre
Charles Blé Goudé serait à la frontière entre le
Ghana et le Togo. Et sa réapparition dans les média
intervient seulement trois semaines après l’énoncé
du verdict dans le procès de Charles Taylor. Rapportant des propos de son client, l’avocat affirme
que Blé Goudé dit «avoir servi son pays en toute
loyauté et qu’il continuerait à le faire en tout lieu où
il se trouverait».
Taylor cherche prison
Une autre information inédite révélée par le Guardian, indique que les avocats de Charles Taylor ont
officiellement informé les Nations Unies qu’envoyé
l’ancien président Charles Taylor dans les prisons
pas très sécurisés de Grande Bretagne le laisserait
culturellement isolé, et constituerait une double punition. La défense de Taylor a insisté pour dire que
les 80 ans requis contre leur client est réaliste, sachant qu’à la Hayes il n’y a pas d’emprisonnement à
vie ou d’exécution capitale. Me Courtenay, le chef
de file des avocats de la défense de l’ancien président
libérien a indiqué qu’après l’annoncé de la condamnation dans ce procès le 30 mai, il fera appel.
64 Les Afriques .
24 mai 2012
Charles Blé
Goudé serait à la
frontière entre le
Ghana et le Togo.
Et sa réapparition dans les
média intervient
seulement trois
semaines après
l’énoncé du
verdict dans le
procès de
Charles Taylor.
The Independent s’intéresse au rapport de Save de
Children indiquant que le Niger est la pire nation
au monde pour les mères. Quotidiennement les
mamans doivent lutter contre la maladie, la malnutrition et la pauvreté. Le quotidien britannique
affirme citant ce rapport, que le Niger remplace à
cette position l’Afghanistan. Ce rapport annuel de
Save The Children s’intitule «L’Etat des mères dans
le Monde». Il fait une comparaison de la situation
des mères dans 165 pays du monde, en prenant en
compte des facteurs comme: l’éducation, le statut
économique, la santé de la mère et le bien-être et la
santé de l’enfant. Parmi les dix pays au bas de ce
classement, sept font actuellement face à une crise
alimentaire. Ce rapport insiste sur le fait que la
malnutrition est le problème le plus sérieux que les
mères doivent affronter. Un cinquième des morts
maternelles et un tiers des morts infantiles sont
liées à ce problème.
La victoire de Hollande :
Une musique à nos oreilles
L’artiste sénégalais Baaba Maal dans un blog au
Guardian affirme que Sarkozy, c’est déjà le passé, la
vieille France, et que François Hollande apprécie
par contre le rôle que peuvent jouer les immigrés
dans la construction du futur en France. Baaba
Maal affirme qu’au plus fort de la campagne pour
la présidentielle, la question de l’immigration et de
la race était au centre du débat. Et certains africains
de France, des artistes, de grands intellectuels, et
autres écrivains primés affirmaient qu’en cas de
victoire de Sarkozy, il leur faudrait quitter l’Hexagone. L’artiste sénégalais revient sur le discours de
Sarkozy à Dakar dans lequel il affirmait que les
Noirs n’avaient pas eu la chance de marquer l’histoire. Maintenant avec la victoire de François Hollande Baaba Maal espère que l’administration
changera le traitement réservé aux français d’origine noire. Car pour lui il est important que la seconde et troisième génération d’enfants immigrés
nés en France fasse partie du système français.
Soudan, un cessez le feu peu respecté
Le Financial Times s’intéresse encore cette semaine
au conflit entre frères ennemis soudanais. Reprenant une dépêche de l’agence Reuters, le journal financier précise que le Soudan a bombardé sept
localités sud soudanaises en 48 heures, violant ainsi
le cessez-le-feu des Nations Unies. Cela pourrait
rendre encore plus difficile les efforts internationaux pour pousser les deux parties à reprendre les
négociations sur différents sujets non encore réglés.
Selon le porte-parole de l’armée sud-Soudanaise,
les Migs et Antonov soudanais ont bombardé les
régions du Bar-El-Ghazal, de Unity et de Upper
Nile. A Khartoum le porte-parole de l’armée soudanaise n’a pas souhaité répondre à ces allégations.
François Hollande
face à la presse
Maintenant avec
la victoire de
François
Hollande Baaba
Maal espère que
l’administration
changera le
traitement
réservé aux
français
d’origine noire.
A l’opposé le ministre soudanais des affaires
étrangères dans une adresse au parlement de son
pays, a affirmé que Khartoum appliquera les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations
Unies appelant les deux parties à s’engager dans
la feuille de route de paix de l’Union Africaine.
Le Daily Telegraph confirme d’ailleurs ces bombardements soudanais des localités sud-soudanaises.
Deux élections: Egypte et Algérie
The Independent s’intéresse à l’élection algérienne.
Il s’agirait de l’élection la plus juste en vingt ans
dans le pays malgré une abstention substantielle.
Le printemps arabe n’a pas eu de véritable prise
en Algérie affirme Alastair Beach de the Independent. Quelques 44 partis briguaient les 462 sièges
de la nouvelle assemblée qui devra poursuivre les
reformes constitutionnelles.
Le Guardian évoque par contre la campagne pour
la présidentielle égyptienne avec le premier débat
télévisé entre candidats jamais organisé auparavant
dans le pays. Des millions d’égyptiens ont suivi ce
débat sur deux chaînes privées de télévision satellitaire entre Amr Moussa, l’ancien patron de la
Ligue Arabe et Abdel-Monein Abul-Futoh un ancien membre du groupe des Frères Musulmans.
Dave Berraud, Londres
24 mai 2012 Les Afriques
. 65
ARRÊT SUR IMAGE
Etats Unies d'Amérique
Jamie Dimon (au centre) président de JP
Morgan, la tête dans les nuages suite à la
perte de 2 milliards de dollars occasionnée
par un trader indélicat.
66 Les Afriques .
24 mai 2012
24 mai 2012 Les Afriques
. 67
EMPLOI
Monde arabe De l’emploi
pour les jeunes
Le sentiment de désespoir dominant chez les chômeurs, et qui a
déclenché le printemps arabe, continue de hanter les jeunes diplômés de
la région. A cet effet, et dans un souci de trouver des solutions, une
conférence a été organisée autour de ce sujet par le British Council.
Reportage par David Matthews.
A
près qu’il s’est vu interdire
par la police de vendre les
fruits et les légumes, sous prétexte qu’il ne possédait pas les permis
nécessaires, Mohammed Bouazizi
s’est immolé par le feu.
Son décès, début 2011, constitue un
anneau de grande importance dans
la chaîne des événements qui se sont
succédés et qui ont inspiré les révolutions dans la région, où les autocraties s’étaient installées depuis
longtemps en Tunisie, Egypte,
Yémen, et en Libye. Cependant, en
dépit des profonds changements
politiques ressentis dans toute la ré-
Manifestation
de diplômés
chômeurs
Afrique du Nord
L’Institute of
International
Education a
montré que le
nombre
d’étudiants est
passé à
+162 % entre
1998 et 2008
contre 40 %
pour la
population
MENA.
68 Les Afriques .
24 mai 2012
gion arabe, les auto-immolations
par le feu n’ont pas cessé.
En fin janvier 2011, cinq diplômés
chômeurs marocains se sont immolés devant le ministère de l’éducation
nationale à Rabat, capitale du pays.
Leur acte rentrait dans le cadre d’une
manifestation exigeant leur intégration dans des postes du secteur public. Un de ces diplômés a succombé
à ses blessures.
Le nombre de diplômés chômeurs
dans la région constitue un sujet critique et a été au centre d’une conférence organisée par le British Council
à Mohammedia au Maroc sous le
thème «Le futur de l’éducation supérieure dans la région MENA».
Tout au long de la dernière décennie, le nombre des étudiants dans
la région MENA a explosé, sans que
le marché de l’emploi ne puisse suivre le rythme.
Selon une étude menée par l’Institute of International Education, la
population des étudiants a sensiblement accru, passant de 2,9 à 7,6 millions entre 1998-1999 et 2007-2008.
Cette évolution équivaut à une
hausse de 162% alors que la population globale de la région MENA a
augmenté de 40%.
Adriana
Jaramillo,
spécialiste
principal de
l’éducation
au sein de la
Banque
Mondiale :
«Le taux de
chômage chez
les diplômés
[dans la
région
MENA]… est
le plus élevé
au monde».
Stephen Chan, Professeur des relations internationales à l’école des
études orientales et africaines
(School of Oriental and African
Studies) à l’Université de London, a
intervenu lors de la conférence avec
la question suivante : «Qu’allez-vous
faire avec tous ces gens une fois qu’ils
auront obtenu leurs diplômes ? Etre
jeune, en colère et à l’université est
une chose, être jeune, en colère et en
chômage en est une autre».
Le taux des inscriptions en enseignement supérieur, qui était de 25,8% en
2010, devrait atteindre 32,4% vers
2020. Selon un rapport intitulé
«Breaking Even or Breaking
Through», établi par la Banque mondiale et l’Agence Française de Développement au sujet du financement
des universités dans la région MENA,
le nombre des chômeurs diplômés
en Egypte a atteint, en 2010, près du
quart. En Tunisie, le pays où le printemps arabe a été déclenché, leur
nombre s’est accru de 8,7% en 2000
à 21,9 % en 2010. En 2005, 46% des
diplômés tunisiens étaient encore en
chômage 18 mois après l’obtention
de leurs diplômes.
Selon Adriana Jaramillo, spécialiste
principal de l’éducation au sein de la
Banque Mondiale : «Le taux de chômage chez les diplômés [dans la région
MENA]…est le plus élevé au monde».
Au Maroc, les immolations par le feu
illustrent la frustration et la colère
des gens contre le manque d’emplois
pour les diplômés dans le secteur public. Les commentateurs déclarent
qu’une opinion très répandue dans
la région veut qu’un diplôme universitaire doit obligatoirement assurer
un poste dans le public. Une telle
supposition fait du chômage des diplômés une problématique encore
plus explosive au Maroc que dans
d’autres pays du monde.
Selon Breaking Even, l’attrait de ces
emplois est clair : le rapport explique
qu’ils offrent «des avantages médicaux et de retraite relativement généreux, des heures de travail
relativement courtes, et assurent
même le transport». Cependant, ces
emplois demeurent insuffisants pour
couvrir tous les besoins.
Contrairement aux économies de la
région MENA, les économies asiatiques, telles que l’Inde et la Malaisie
ont su profiter des opérations d’externalisation menées par les sociétés
multinationales, selon Hussein Eissa,
vice-président de l’Université Ain
Shams au Caire.
Eissa, lors de son intervention à la
conférence, a affirmé que ces sociétés sont découragées par la faiblesse
des ressources humaines dans la région. Ainsi, les institutions dans la
région Mena «ont besoin de former
les étudiants dans le domaine des
compétences générales, l’informatique, et les langues».
Selon la Banque mondiale, près de
24 mai 2012 Les Afriques
. 69
EMPLOI
40% des entreprises dans la région
considèrent que le manque de main
d’œuvre compétente constitue «une
contrainte majeure», plus que dans
n’importe quel pays au monde.
D’autres affirment que former les diplômés selon le besoin de l’employeur pourrait être une solution.
Pour Eissa, 1 500 diplômés ont bénéficié en 2008 d’une reformation à
l’école des affaires au sein de l’université dans le domaine de l’informatique, les langues, et les
compétences générales, et reçoivent,
en contrepartie, l’opportunité de travailler dans une grande entreprise
internationale en Egypte. Le taux
d’emploi pour ce groupe a atteint
80%, affirme Eissa, et le programme
a été étendu à 80 écoles pour intégrer
10000 étudiants.
Cependant, Eissa reconnaît que le
plus grand problème est que «le
nombre des diplômés en affaires dépasse la demande».
Les universités des pays francophones de la région -Maroc, Algérie,
et Tunisie- se trouvent elles aussi,
dans le dilemme de passer ou non à
la langue anglaise. Selon Adel Lagha,
membre tunisien du groupe des experts régionaux du British Council,
le «Young Arab Analysts Network International», les entreprises «ne peuvent pas recruter des spécialistes en
Technologies de l’information en Tunisie». Par conséquent, «elles se dirigent vers l’Inde où les compétences en
langue anglaise sont bien présentes».
En fait, les problèmes commencent
bien avant l’inscription. Dans l'étude
Programme for International Student Assessment (PISA), les indicateurs mesurant les compétences des
jeunes de 15 ans dans le domaine de
la lecture, les sciences, et les mathématiques, compilés par l’OCDE,
montrent que les lauréats des écoles
de la région Mena sont faibles par
rapport aux compétences requises
pour les études universitaires.
Les scores PISA ne concernent pas
tous les pays de la région MENA,
mais les quatre pays qu’ils couvrent-Dubaï aux Emirats Arabes
70 Les Afriques .
24 mai 2012
Unis, Qatar, Tunisie et Jordaniesont tous classés en dessous de la
moyenne établie par l’OCDE en
2009. Tous, à part Dubaï, languissent dans le dernier quantile.
Remarquablement, le Qatar-qui
avait enregistré le revenu par habitant le plus élevé au monde, se situe
actuellement au cinquième rang à
partir du bas dans un tableau de 65
au niveau des compétences de lecture et des sciences, et quatrième à
compter du bas en ce qui concerne
les mathématiques.
Ainsi, et dans un souci d’améliorer
les normes et les compétences des diplômés, des systèmes d'assurance
qualité sont en cours d'élaboration
dans la région. Cependant, des
doutes subsistent quant aux pouvoirs
des organes d'assurance qualité, et
quant à l’autonomie par rapport aux
gouvernements, souvent autocratiques et opaques.
Selon Nadia Badrawi, présidente du
Arab Network for Quality Assurance
in Higher Education (Réseau arabe
pour l'assurance qualité dans l'enseignement supérieur)- réseau soutenu
par la Banque mondiale et l'Unescojusqu'à présent, 10 des 22 pays arabes
ont créé des agences d'assurance
qualité, huit sont entrain de les développer et quatre n'ont pas l'intention
Les universités
des pays
francophones
de la région Maroc,
Algérie, et
Tunisie- se
trouvent elles
aussi, dans le
dilemme de
passer ou non
à la langue
anglaise.
Amphithéâtre
d’une université
(Zone MENA) :
de l’adéquation
formation-emploi
de le faire. Mais seules quatre des 10
agences qui existent actuellement
publient leurs résultats.
La plupart de ces agences sont affiliées aux ministères nationaux qui
s'occupent de l'enseignement supérieur, ce qui engendre un important
conflit d'intérêts : «Les ministères de
l'enseignement supérieur sont le principal fournisseur. Comment un évaluateur peut-il être le [principal]
fournisseur?» demande Badrawi.
En Egypte, la qualification pour
l'accréditation dans l'enseignement
supérieur est mise en œuvre depuis
2007, mais son sceau d'approbation
a été refusé à certaines facultés de
niveau inférieur, explique son directeur, Mostafa Radwan. Ce dernier
estime que les taches noires peuvent
nuire à l'image d'une université
comme elles peuvent la pousser à
améliorer sa qualité. Les établissements sont appelés à «élaborer un
plan stratégique plus ambitieux et qui
[sera] financé [par] le gouvernement», explique t-il.
Mais le financement public des universités ne risque rien si la qualité est
jugée mauvaise. Interrogé lors de la
conférence si le principe des bâtons
et de carottes est appliqué au secteur
égyptien, Radwan a plaisanté en disant que «les carottes et les bâtons ne
sont pas pour l'homme» et a souligné
que son objectif n'était pas de punir
les institutions errantes.
«Il doit y avoir des coups de bâton.
[Vous] ne pouvez jamais travailler
sans bâtons», réagit Badrawi, qui estime que ces mesures devraient inclure un risque de suspension du
financement public, et qu' «il devrait y avoir un risque de fermeture»
pour les universités qui ne parviennent pas à assurer.
Jaramillo recommande que les états
investissent plus d'argent dans le secteur. Mais il serait probablement difficile pour les universités de
persuader leurs gouvernements
qu'ils sont sous-financés. Selon la
Banque mondiale, la proportion du
produit intérieur brut consacré à
l'enseignement supérieur dans la région a augmenté de 1,1% en 2000 à
1,4 % en 2010, atteignant ainsi le
même niveau que le groupe de
l'OCDE des pays les plus riches. En
effet, l'Algérie dépense 2,6% de son
PIB pour l'enseignement supérieur,
plus que ne dépense la Corée du Sud.
30
Au niveau du privé, on estime que
les présidents des universités favorisent l’introduction des frais d’inscription pour augmenter le budget.
Mais politiquement parlant, ceci
constitue un anathème dans plusieurs parties de la région.
S'il est difficile d'attirer les entreprises
étrangères à la région, comment les
diplômés peuvent-ils mettre en place
leurs propres entreprises ? Les participants à la conférence étaient
presque à l'unanimité dans leur
appel adressé à ces diplômés de développer leur esprit entrepreneurial.
Lahcen Daoudi, Ministre marocain
de l'enseignement supérieur, de la recherche scientifique et la formation
des cadres, explique que l'une de ses
«préoccupations majeures» est d'encourager les étudiants à «s’auto-organiser» au sein de l'université dans des
communautés d'étudiants, en vue
«d’inculquer ... l’autonomie et l'indépendance économique».
Selon Chan, «les tigres économiques
d’Asie», à savoir le Singapour, la
Corée du Sud, Hong Kong et Tai-
Le problème
des diplômés
chômeurs
dans la
région «va
probablement
s'aggraver
avant de
s'améliorer».
wan, se sont transformés dès qu’«ils
ont permis à leurs jeunes de créer leur
propre emploi».
Néanmoins, permettre aux jeunes
diplômés de démarrer de nouvelles
entreprises est bien loin des compétences de l'académie, prévient-il. Si
cela prend deux ans dans un pays
MENA à mettre en place une société,
par exemple, «ce que les universités
font n’aura plus d’importance. Vous
serez en train de vous tuer» dit-il.
L’année dernière, l'appel de Daoudi
pour l'auto-organisation des étudiants a été repris plus vigoureusement en Egypte : Les Universités y ont
été démocratisées, avec de nombreux
présidents et doyens désormais élu,
dans un contexte décrit par Badrawi
comme une «faim pour les élections».
Mais les bases économiques qui
sous-tendent le chômage des diplômés sont susceptibles de persister.
Le problème des diplômés chômeurs dans la région «va probablement
s'aggraver
avant
de
s'améliorer», prédit Jaramillo.
David Matthews
DES CONNAISSANCES GASPILLEES : LE CHOMAGE DES ADULTES DANS LA REGION MENA
25
2000
15
10
Proportion des chômeurs diplômés de l’enseignement supérieur
Moyenne
OCDE
Moyenne
UE
Egypte
Jordanie
Maroc
Syrie
0
RoyaumeUni
5
Tunisie
Pourcentage
2010
20
Source : Banque mondiale
24 mai 2012 Les Afriques
. 71
ARCHIVES D'AFRIQUE
De la Rodhésie au Zimbabwé, 32 ans après…
Ici en 1976, Robert Mugabé, leader du ZANU (Zimbabwean African National Union), du temps où il était ce héros qui faisait l’unanimité en Afrique.
A la Havane (Cuba), le 8 juin 1992 le temps d’un entretien avec
Fidel Castro.
Le 6 février 1980, à la tête de la guérilla nationaliste ZALA (Zimbabwe
African Liberation Army), juste avant les élections générales.
7 avril 2000. En campagne pour les legislatives, Mugabé accuse les
fermiers blancs de soutenir le MDC (Movement for Democratic
Change). C’est le début de l’escalade.
Avril 1980. Le prince Charles reçoit une médaille de la part de celui
qui n’était encore que le premier ministre du Zimbabwé. C’était lors
d’un dîner célébrant le passage de la Rodhésie au Zimbabwé.
L’influence réelle de sa femme Grace reste l’une des énigmes de Mugabe. Ici, le 10 juin 2000 en pleine campagne législative.
72 Les Afriques .
24 mai 2012
Accolade avec le Venezuelien Hugo Chavez en marge du 60e anniversaire de la FAO, le 17 octobre 2005 à Rome.
L’embargo qui frappe le Zimbabwé a vu l’envolée record de l’inflation qui atteignait 231 million pour cent en juillet 2009. D’où
le lancement d’un billet de banque de …100 million de $ zimbabwéen.
Morgan Tsvangirai, l’actuel premier ministre et leader du MDC (opposition) est le principal opposant à Robert Mugabé. Ici le 3 février 2008.
Comme Jim Steele, ici quittant la prison de Chinoyi, 115 km au NordOuest de Hararé, le 22 août 2001, la plupart des fermiers blancs sont
prêts à mourir pour leurs terres. Le problème reste entier.
A l’image de Tabo Mbekki (ici le 12 avril 2008), la plupart des dirigeants sud-africains ne sauront pas sur quel pied danser dans l’affaire de l’expropriation des fermiers blancs Zimbabwéen.
Le premier ministre, Morgan Tsvangirai, ici avec Alassane Ouattara,
essaie de se forger une posture de future président incontournable.
Un moindre faux pas pourrait lui coûter cette position de successeur
potentiel à son rival politique, Robert Mugabé.
24 mai 2012 Les Afriques
. 73
PIED DE LETTRE
Daouda Mbaye,
Secrétaire de
Rédaction.
Un porte-avion
nécessite
des moyens
L’intégration au cœur du développement
A
vec des micro-Etats, l’Afrique
réduit ses chances de
développement. Est-il
nécessaire de plancher sur «Le
tout et la partie» pour
appréhender les atouts de vastes
ensembles économiquement intégrés ? La
Grèce, qui traverse une période délicate de
son histoire, n’est toujours pas lâchée par les
27 autres membres de l’Union européenne.
Au contraire, ils lui restent solidaires.
Pourtant, sous nos latitudes, c’est un truisme
d’avancer que la plupart des Etat africains
n’ont rien d’Etats –Nations. Hérités de la
colonisation, les frontières des pays actuels
ont été, à l’origine, tracées à la règle. Les
séquelles d’entités décomposées, de familles
divisées, sont jusqu’à présent le lot de
frustrations, de conflits aussi absurdes que
fratricides. L’ethnie Ewé est toujours répartie
entre le Togo et le Ghana. L’enclave
gambienne de 10 000 km² à l’intérieur du
Sénégal continue de résister au bon sens.
Pour traverser ce «clos», où chaque
Sénégalais a au moins un cousin ou une
sœur et vice-versa, les entraves ne manquent
74 Les Afriques .
24 mai 2012
pas. Les ballantes, manjacks, mankagnes,
peulhs, mandingues, … du sud du Sénégal
sont les mêmes en Guinée Bissau, dès le Rio
Cacheu franchi. Nombre de ces peuples sont
répartis dans toute la sous-région entre la
Guinée Conakry, la Sierra Leone, le Libéria,
la Côte d’Ivoire, la Niger, le Burkina Faso, le
Mali, … Entre autres aberrations, nombre
d’Etats sont enclavés et ne disposent
d’aucunes ouvertures sur l’océan.
Au lendemain des indépendances, la
clairvoyance des panafricanistes, qu’ont étéjuste un temps- Léopold Sédar Senghor du
Sénégal et Modibo Keita du Mali, produisit la
Fédération du Mali. Ce bel ensemble engloba
les deux Etats. Malheureusement, cette
fusion fut éphémère. Si les armoiries
respectives sont aujourd’hui distinctes, il
reste tout de même aux populations de ces 2
pays une devise commune «Un peuple, Un
but, Une foi», qui trône toujours sur leurs
pièces d’identités officielles (CIN et
Passeport). Ironie de l’histoire le Mali est
aujourd’hui coupée en deux ! De grands
ensembles pourraient être des remparts
contre de telles agressions !