Toutes religions confondues: contre le clonage!
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Toutes religions confondues: contre le clonage!
7LP0301A1229 A3 DIMANCHE 7LP0301A1229 ZALLCALL LA PRE SSE M ONTR ÉAL 67 23:27:28 12/28/02 B A3 DI MA NCH E 2 9 DÉC EMB R E 2 0 0 2 Les créateurs de Dolly s’y opposent L’Institut Roslin met la planète en garde contre les dangers du clonage ACTUALITÉS Toutes religions confondues: contre le clonage! LAURA-JULIE PERREAULT Hindous, musulmans, disciples de Krishna, juifs et catholiques ont trouvé un point d’entente : tous s’opposent au clonage humain et dénoncent l’action des raéliens, une secte bien connue au Québec qui prétend avoir mis au monde la copie génétique d’une femme le lendemain de Noël. Agence France-Presse LONDRES — L’Institut Roslin, d’Édimbourg, en Écosse, où est née la brebis Dolly, a mis le monde en garde hier contre les dangers du clonage d’un être humain, au lendemain de l’annonce par la secte des raéliens de la naissance d’un bébé cloné. « Je trouve cela clairement répréhensible », a commenté sur BBCradio le Dr Harry Griffin, porte-parole de l’Institut Roslin, mondialement connu depuis la naissance en 1996 de la première brebis clonée, baptisée Dolly. « Tous les groupes qui ont travaillé sur le clonage des animaux — bovins, moutons, porcs, souris, chèvres — ont fait état d’un fort taux de fausses couches, de mortalité post-natale et de problèmes avec les clones au cours de leur vie », a déclaré le chercheur. « Ce n’est pas une conséquence inévitable du clonage mais c’est une conséquence courante », a-t-il ajouté. Les recherches du créateur de la brebis Dolly, Ian Wilmut, responsable de l’Institut Roslin, ont montré que tous les animaux clonés dans le monde avaient des malformations génétiques et physiques. Dolly, premier animal cloné au monde à partir d’une cellule adulte d’un mammifère, est née avec des anomalies chromosomiques et souffre d’une arthrite très prématurée. Un autre expert britannique, le Dr Patrick Dixon, spécialiste des questions éthiques liées au clonage, a estimé que le monde réagirait avec « répugnance et dégoût » si la nouvelle, annoncée vendredi aux États-Unis, sans aucune preuve scientifique, était confirmée par des experts indépendants. « Il y a une course à l’échelle mondiale entre scientifiques marginaux pour produire des clones, motivée par la célébrité, l’argent et des croyances tordues », a expliqué le Dr Dixon, auteur d’un ouvrage intitulé La révolution génétique. « Pouvez-vous imaginer ce qui se passera lorsqu’une fille de 12 ans regardera sa mère et se rendra compte qu’elle regarde sa propre soeur ? », a-t-il demandé. « Comment cela affectera-t-il le sentiment de sa propre identité, lorsqu’elle saura qu’elle n’est qu’une copie de quelqu’un de beaucoup plus vieux qu’elle ? » Hier, le porte-parole du Vatican, le rabbi en chef de Jérusalem et les leaders de l’islam ont tour à tour qualifié le clonage d’immoral et d’inhumain. À Montréal, les leaders des communautés spirituelles se sont aussi insurgés contre cette pratique jusqu’à maintenant réservée aux animaux. Les raéliens, de leur côté, voient dans la controversée méthode de reproduction humaine une manière d’accéder à la vie éternelle. Les adeptes de cette secte, qui compte entre 20 000 et 60 000 membres dans le monde, ont la conviction que les êtres humains ont eux-mêmes été créés en laboratoire par des extraterrestres. Vendredi, les raéliens, dont le chef spirituel est le Québécois d’adoption Claude Vorilhon, alias Raël, ont choqué les leaders politiques et religieux du monde en annonçant qu’une petite fille clonée à partir des cellules de sa mère est née par césarienne dans un endroit gardé secret. « Apprentis sorciers » Tout comme le Vatican, l’archevêché de Montréal croit que le clonage est condamnable mais veut d’abord s’assurer qu’un clone est bel est bien venu au monde avant de lancer les premières pierres. « Pour l’instant, j’éprouve un vertige important face à cette question en attendant que la vérité soit faite. Mais nous voyons que la tentation de jouer les apprentis sorciers pour remplacer à la fois Dieu et la nature est forte », dit Mgr Louis Dicaire, qui remplace le chef de l’Église du Québec, Mgr Turcotte, pendant ses vacances. Photo Associated Press © Les adeptes de Claude Vorilhon, dit Raël, ont secoué la communauté scientifique en cette fin d’année. Mgr Dicaire ne croit pas qu’il revienne à l’Église de demander des sanctions contre les scientifiques qui pratiquent le clonage. « Nous pouvons seulement continuer d’af- firmer et d’afficher fièrement notre respect de la vie », a-t-il ajouté. Pour l’Église catholique, la vie commence dès la conception, et toutes les manipulations d’embryons sont prohibées. Péché, péché ! Parmi le leadership musulman, hier, on rappelait que le clonage humain peut mettre en péril la loi naturelle. Ayed bin Ahmad al-Qurani, un religieux d’Arabie saoudite, a soulevé la possibilité de la reproduction unisexe grâce au clonage. « Et c’est péché, péché, péché », a dit le chef musulman. Il ne s’oppose cependant pas aussi catégoriquement au clonage des plantes et des animaux, qui pourrait rendre de grands services aux hommes, selon lui. Les autorités juives de Jérusalem ont pour leur part rappelé que le judaïsme est en faveur des progrès de la science qui peuvent régler le problème de l’infertilité, mais qu’il rejette la création artificielle de la vie. Les disciples de Krishna notent que les raéliens font fausse route en « se prenant pour Dieu ». « Nous émanons de Dieu, donc nous voulons faire comme lui, c’est compréhensible, mais c’est une erreur. Les raéliens se trompent en essayant de réincarner leur corps pour atteindre la vie éternelle. Ce qui compte, c’est la réincarnation de l’âme, et elle se fait par une vie d’abnégation, sans promiscuité ni intoxication. Les raéliens font le contraire », a expliqué Gaura Dasa, un des présidents du temple Hare Krishna de Montréal. À la mission hindoue du Canada, on préférait prendre un peu de recul face aux nouvelles technologies de reproduction. « Le clonage nous semble contre nature. Cependant, rappelons-nous que les religions ont tendance à dénoncer les grandes avancées technologiques. Tous étaient contre le premier voyage de l’Homme sur la lune. Il faut peut-être prendre le temps de regarder les conséquences du clonage avant de tout condamner », a prévenu Sharma, qui travaille dans le temple hindou de la rue de Bellechasse, à Montréal. — Avec la collaboration de l’Associated Press CLONAGE : QU’EN PENSENT LES CITOYENS Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Photo BERNARD BRAULT, La Presse © L’homme ne doit pas se prendre pour Dieu, déclare Thérèse Lebel. Selon Denis Roy, Raël devrait être enfermé, rien de moins. Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Croisé par hasard, le coroner Paul Dionne croit que l’on doit faire preuve de prudence. Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Pensons aux conséquences de nos actes, avertit pour sa part Thomas Panos. Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Une technique intéressante, croit Michael Johnston, mais la science n’est pas encore au point. Pas de clones, surtout pas de politiciens! RAYMOND GERVAIS Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Il est irresponsable de cloner des humains, de l’avis de Geneviève Daigneault. LES OPINIONS des gens de la rue sont partagées relativement au clonage d’un être humain tel que celui que les raéliens prétendent avoir réalisé. Certains croient que Raël et sa suite devraient être enfermés, tandis que d’autres trouvent le phénomène intéressant du point de vue scientifique. Toutefois, tous sont d’accord pour que le clonage soit réalisé d’abord avec succès sur des animaux. Il ne faut pas brûler les étapes. Le Dr Paul Dionne estime qu’il faut être prudent lorsqu’on manipule des gènes et que, jusqu’à maintenant, le clonage des animaux n’a connu qu’un succès relatif. « En agissant trop vite avec des humains, on risque de créer des monstres. Cependant, le phéno- mène est intéressant au chapitre de la bioéthique. Si la science médicale avance dans ce domaine, on doit s’assurer de bien maîtriser la situation. Comme scientifique, je trouve ça intéressant, mais en science, il n’y a rien de plus dangereux que de cacher des données. Il vaut mieux poursuivre les recherches avec des animaux avant de tenter de cloner un humain. » Thérèse Lebel est contre. Pour elle, c’est tout simplement se prendre pour Dieu en jouant avec la nature humaine. Denis Roy pense pour sa part que Raël devrait être enfermé. « On joue avec quelque chose qu’on ne connaît pas et dont on ignore les conséquences. » Michael Johnston estime que le clonage pourrait avoir un avenir mais que la science dans ce domaine n’est pas encore suffisamment avancée. Il croit que la re- cherche doit se poursuivre avant d’aller plus loin et que cela ne doit pas être laissé entre les mains de sectes religieuses. « Surtout, il ne faudrait pas tenter de cloner des politiciens ! » Thomas Panos croit avant tout qu’il s’agit d’une question morale. « On ne peut procéder au clonage d’humains sans penser aux conséquences. » Serge Wong est contre le clonage afin de respecter l’esprit et la personnalité de chaque humain. Si le clonage devenait une réalité, il devrait être réservé pour cloner des génies et des médecins spécialistes. Pour Simon Couture et Geneviève Daigneault, il est ridicule et irresponsable de vouloir cloner des humains et l’on doit d’abord poursuivre la recherche sur des animaux. Pour eux aussi, pas question de cloner des politiciens. Photo BERNARD BRAULT, La Presse © Au pire, croit Serge Wong, on ne devrait cloner que des scientifiques et des médecins spécialistes.