COMPTE RENDU du FORUM FRANÇAIS de FORMATION

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COMPTE RENDU du FORUM FRANÇAIS de FORMATION
COMPTE RENDU du FORUM FRANÇAIS de FORMATION OUVERTE à
DISTANCE (FFFOD) à l’ECOLE de MANAGEMENT de NORMANDIE
6 au 8 Novembre 2013
Mercredi 6 Novembre – 14h : La culture numérique – conférence de Yann LEROUX,
psychologue, psychanalyste, geek
16h30 : MOOC : nouveaux visages de l’autoformation – table ronde animée par
Christine VAUFREY, rédactrice en chef de Thot Cursus ; avec Christophe JEUNESSE,
maître de conférences à Paris X ; Denis CRISTOL, directeur ingénierie de formation
CNFPT.
Le MOOC est un cours MASSIF, Ouvert à tous et gratuit entièrement à distance.
Récents, les premiers moocs ont vu le jour aux USA en 2011. Les plus célèbres, tels
ceux des universités de Harvard et Berkeley peuvent regrouper 150.000 inscrits et
durer 10 à 12 semaines. Ils commencent à voir le jour en France (ex. ITIPA 2 : Internet
pour Apprendre) avec 10 fois moins de succès. Il s’agit d’enseignements mis en ligne
par des animateurs sur une plateforme, complétés par des interactions entre apprenants
qui constituent l’essentiel de la matière (objectif : apprendre des autres en fonction de
leurs compétences).
L’inscription est gratuite car l’autofinancement est réalisé à travers la vente de
certificats à ceux qui réussissent, des bases de données à des entreprises et de la
publicité sur la plateforme. La certification se fait par obtention de points à des QCM
et la correction est souvent réalisée par paires d’apprenants, ce qui constitue un
problème réel pour une évaluation certificative sérieuse. Seulement 10% des inscrits
vont jusqu’au bout de la certification, la plupart s’inscrivant dans plusieurs moocs à
thématique différentes. Ce qui intéresse les gens est plus souvent la compétence
acquise que le certificat attribué.
Le problème peut être la solitude de l’apprenant devant sa machine d’où l’idée de
resituer le mooc en tant que ressource d’apprentissage complémentaire dans un autre
dispositif.
L’université de Nanterre de sciences de l’éducation a vu pour la première fois en 2013,
les inscriptions d’étudiants pour les cours en ligne doubler celles du présentiel avec
60%. Certains étudiants se sont réorientés sur Lyon 1 qui ne connaît pas les mêmes
limitations d’inscriptions à distance.
Jeudi 7 Novembre – 9h : Qu’apportent les neurosciences aux pédagogues – table
ronde animée par Samuelle DILE avec Etienne-Armand AMATO, chercheur de
l’institut des hautes études pour la science et la technologie ; Philippe REVY,
orthophoniste ; Jacques FRADIN, docteur en médecine comportementaliste et
cognitiviste.
Après un historique de la recherche scientifique sur les fonctions cérébrales qui
aboutissent depuis quelques années grâce à l’IRM, à définir non plus seulement des
fonctions hémisphériques globales mais tout un réseau neuronal impliqué dans
chacune des tâches de perception-réflexion-action, la présentation s’est axée sur la
relation entre virtuel et réel.
Le transfert d’un apprentissage du monde virtuel dans le réel pourra avoir lieu
lorsqu’il est fait appel aux mêmes fonctions cognitives dans les deux activités. Par
exemple, jouer en ligne à un jeu de cartes améliore l’attention visuelle, la mémoire, la
logique ; ces fonctions seront bonifiées. Ce qui n’est généralement pas le cas des
activités motrices telles que le golf, demandant une évaluation de l’espace que la
machine ne peut fournir.
Il faut faire attention à la scénarisation de l’e-learning en relation avec l’empathie à
apporter aux apprenants : fixer les procédures (le cadre) et en informer l’apprenant (on
va faire un chat puis on utilisera la messagerie…) ; de même, il est préférable de
croiser ces procédures avec les habitudes des stagiaires par un questionnement
préalable (je n’utilise jamais la messagerie).
L’intérêt du jeu vidéo relativement au e-learning (serious games) : l’avatar est toujours
un personnage représentant le sujet dédoublé (pouvant ainsi se défouler sans
inhibition) qui va prendre du pouvoir et de la puissance au fil des récompenses
apportées par le jeu. Cet aspect motivationnel, représenté par l’image progressivement
modifiée de l’avatar, permet de maintenir l’intérêt du joueur et d’accroître son
implication dans l’activité.
L’importance de la variété dans les différents process utilisés en e-learning est
soulignée. Faire varier les paramètres constitue un atout essentiel : …et si c’était
autrement ?
11h : Le cerveau attentif – conférence de Jean-Philippe LACHAUX, directeur de
recherche en neurosciences cognitive à l’INSERM.
Lorsqu’on regarde une image, on ne la découvre pas de gauche à droite et de haut en
bas : le regard se pose successivement par petits flashs sur chaque élément qui nous
semble important avant de revenir plus en détails sur l’image après cette première
perception évaluative. Ce qui engendre une sensation différente lors du second regard.
Cette boucle perception-action de quelques secondes engendre donc une nouvelle
perception. La qualité de la performance sera déterminée par la qualité du choix de
l’action en relation avec la perception effectuée après chaque cycle, l’action en
réponse étant toujours une réaction à la perception souvent instantanée notamment en
ce qui concerne les automatismes.
Il existe une analogie avec le sens de l’équilibre : le déséquilibre attentionnel peut être
provoqué par 3 facteurs majeurs :
1. Les habitudes (lobe pariétal = carte de saillance) : certaines perceptions sont plus
marquées car répétées plus souvent, ce sont les principaux marqueurs de
l’attention qui vont permettre de poser le regard sur des éléments principaux d’un
paysage composé
2. L’utilité générale (système limbique = émotion, plaisir) : marque l’importance du
circuit de récompense dans le processus attentionnel
3. L’utilité ponctuelle (lobe frontal = système exécutif) : réagit en fonction des
priorités définies par des actions rapides largement inconscientes (micro objectifs
simples prioritaires)
C’est pourquoi l’entraînement attentionnel est important. La distraction peut parfois
simplement venir de l’oubli du fait que je cherche à rester concentré… l’objectif étant
alors de détecter les premiers signes des éléments de distraction (les vents
déséquilibrants).
La virtuosité des gens multitâches vient du fait qu’ils n’ont pas besoin d’écouter tous
les mots d’une phrase pour trouver son sens, cela laisse un espace vide ou temps libre
qu’ils peuvent combler pour faire ou penser à autre chose… certains sont plus
efficaces lorsqu’ils changent de tâche au bout d’un moment puis reviennent à la tâche
initiale, d’autres ont besoin de se concentrer jusqu’à la fin sur la même tâche.
On améliore l’attention lorsqu’on met les personnes dans des conditions d’alignement
attentionnel : habitudes + récompenses + utilité…
Conflits multisensoriels : une image animée verrouille l’attention plus longtemps
qu’une image fixe mais il faut faire attention à ce qu’elle soit en concordance avec les
sons ou le texte sinon on provoque une distorsion attentionnelle vers l’un ou l’autre
des éléments qui composent les stimuli.
Intention et Attention : les 2 sont étroitement liés ; si l’on fait une recherche internet, il
peut y avoir disparition de l’intention personnelle et fil de la recherche et l’on peut se
retrouver embarqué par le dictat de l’environnement sur l’attention (curiosité).
L’incertitude constitue également un facteur positif pour fixer l’attention.
15h30 : Nouveaux usages, nouveaux outils – table ronde animée par Jacques FAYET
avec Christophe BATIER, directeur technique du service TICE de l’université Lyon 1 ;
Olivier LAMIRAULT, directeur d’ingenium e-learning ; Annabelle FEUILLAFAY et
Lilian HUE du groupe de travail LMS de Communotic.
Le groupe de travail Communotic en collaboration avec le cabinet Stratice, a réalisé
une étude comparative de 9 plateformes « Open Souce » avec la participation des
organismes de formation bas normands. La conclusion a révélé que toutes les
plateformes sont plutôt verticales, centrées sur les contenus, les étudiants utilisant peu
les outils de communication interactifs mis à leur disposition. Les modules de cours
devant être « scormés » pour pouvoir être évalués, sont quasi impossibles à faire
évoluer après leur conception. Compte tenu de l’évolution de l’environnement
technologique (mobilité avec tablettes et smartphones, haut débit avec 4G,
accessibilité avec le cloud, Web 2.0 avec Google apps, réseaux sociaux, Wikis, Blogs),
la question se pose donc de la place d’une plateforme au sein de ce nouvel
environnement devenu collaboratif puis participatif.
Le LMS permet la traçabilité pour les OPCA grâce au scorm mais reste un système
fermé et peu évolutif ; les outils du Web 2.0 permettent l’ouverture mais non la
traçabilité… quel est le pourcentage de besoins de l’un par rapport à l’autre ?
Christophe BATIER présente rapidement l’évolution de Spiral Connect vers Claroline
Connect et les nouveaux outils en cours de réalisation. Un MOOC a été créé (Elearn2)
afin de tester ces outils et de permettre des améliorations à la demande des utilisateurs
afin de produire une plateforme cousue main (claco.univ-lyon1.fr).
Etude PISA OCDE tous les 4 ans : statistiques sur les méthodes de formation des pays
de l’OCDE et leur succès (classement français 18ème ?)
Travail collaboratif : Les formateurs font généralement leurs cours sur diaporama =
prise de notes d’un groupe d’étudiants chargés de rédiger le polycopié de résumé du
cours qui sera publié sur la plateforme.
Vendredi 8 Novembre – 9h : Numérique : transformation des modalités
d’apprentissage et modèles économiques : témoignages introductifs de Michaël
IOCHEM (Elephorm) et Marie-Pierre BESNARD (Cali-Media), historienne.
Elephorm est un éditeur de tutoriels vidéos vendus entre 30 à 70€, scormés et
possibles à inclure sur une plateforme LMS. 30% d’augmentation des ventes en
quelques années. Les experts ayant scénarisé les tutoriels sont tous certifiés par les
entreprises des produits (Apple, Adobe, Microsoft…) vendus.
10h : D’une économie de stock à une économie de flux – conférence de Serge
SOUDOPLATOFF, militant d’internet.
Historique intéressant de l’alphabet (1ère révolution) vers l’imprimerie (2ème
révolution) et l’économie de stock (produit rare) vers internet (3 ème révolution) et une
économie de flux (circulation de l’information).
La contrainte de l’interaction oblige à se reconfigurer pour ne pas être submergé par le
nombre d’informations qui nous parvient. L’information se transmet en mode réseau et
non plus hiérarchisé comme auparavant. Le meilleur exemple en est le téléphone,
individuel et hiérarchisé, qui monopolise un canal de communication, coûteux et donc
détenu par les « rentiers » qui en profitent pour réaliser des bénéfices dans une
économie de marché. En comparaison, Internet est un réseau de « barbares » qui ont
envahi le marché en mettant du gratuit à la portée de tous en ne vendant pas la matière
produite directement (Ex. Google dont le produit phare est le moteur de recherche, ne
l’a jamais rendu payant en tant que tel mais a développé d’autres voies de production
de richesses).
On assiste ainsi progressivement à la mise en concurrence de rentiers face aux
barbares, comme Novotel (achat d’immeubles pour location de chambres) vs AirBnB
(logement chez l’habitant par mise en relation)…
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Les grandes fractures du numérique sont les suivantes :
De l’information rare vers l’information abondante
De l’innovation fermée (téléphone) vers l’ouverte (internet)
De la hiérarchisation vers la communauté
De la confiance externalisée (juge, patron) vers l’internalisée (notation des pairs)
De l’économie de stock (rareté) vers celle de flux (activité)
Du design expert vers le collaboratif
Créer une communauté (barbare) revient à engendrer beaucoup de transactions peu
onéreuses en opposition à l’achat de biens rares (rentiers) que l’on met en vente ou
location à un prix intégrant les bénéfices.
LEGO a instauré pour la première fois un vote de sa communauté pour des réalisations
faites sur internet. Lorsque le nombre de votes est supérieur à 10.000, le concepteur se
voit proposer la production de sa création, gagnant ainsi 1% des ventes de son produit.
WIKIPEDIA : 23 millions d’articles publiés dans 287 langues différentes.
L’éducation 2.0 impliquera du travail collaboratif, de l’implication personnelle (faire
apprend) et du FUN !
Dans les forums de discussion, l’attribution de badges en relation avec le nombre de
messages écrits remplace les grades de l’armée ou les diplômes attribués.
Philippe MOLODZOFF
Commission Fédérale de Formation