Le service client - Magazine En
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www.lexpress.fr SUPPLÉMENT - L’EXPRESS N° 3168 DU 21 AU 27 MARS 2012 NUMÉ SPÉCI RO AL 60 CENTRES PAGES D’APPELS Une industrie mondialisée CONTACTS Le retour du magasin EMPLOI Des métiers d’avenir ÉDOUARD JACQUINET SERVICES clients Armelle BALENCEU Directrice des opérations clients Direct Energie Pourquoi les entreprises s’y mettent ÉDITO Une industrie du XXIe siècle S DAHMANE POUR L’EXPRESS ervice client, relation client… Derrière ISABELLE HENNEBELLE ces termes vaguement fumeux se déploie RÉDACTRICE notre quotidien. Au téléphone, sur interEN CHEF net, en boutique… la fameuse « expérience client » est partout. Lionel Faure, marié et père de deux enfants, s’apprête à transférer ses quatre abonnements téléphoniques chez Free, quand son opérateur le contacte pour lui proposer d’adapter ses tarifs. Bingo. Touché par cette « attention », Lionel reste fidèle à la marque. Quant à José Antonio Gonzalez, chef d’entreprise à l’agenda chargé, il prend le temps d’acheter ses chaussures de sport dans un magasin spécialisé, plutôt au passage une leçon de géopoque sur internet. Pour lui, bénéEn quinze ans, la relation litique. Trois grandes zones de proficier des conseils du vendeur, luiduction de ces services ont émergé, même marathonien, est essentiel. client s’est imposée comme héritage de l’histoire. Si tout Chouchouter son client peut change très vite dans ces secteurs, une industrie à part vraiment faire la différence. Sur pour l’instant en Inde et aux entière, encore méconnue c’est des marchés occidentaux saturés, Philippines que les Anglo-Saxons du grand public. il s’agit même de l’un des rares ont implanté leurs centres de con« réservoirs » de croissance. Tesco tacts pour leurs appels anglol’a bien compris et vient d’embaucher 22 000 personnes phones et au Mexique, en Colombie et en Argentine pour soigner l’accueil dans ses magasins. Quant à Danone, pour leurs appels hispanophones. Quant à la France, le groupe propose désormais un service de livraison à elle s’est déployée au Maghreb, en Europe de l’Est, en domicile de bouteilles d’eau. Enfin, à l’heure de Twitter Afrique noire et à l’île Maurice. et des class actions américaines, les clients mécontents Dans cette industrie qui combine services de pointe – et ils sont nombreux – disposent désormais d’un et technologies, la France fait partie des grands. De pouvoir de nuisance colossal. Bref, les marques n’ont quoi se remonter le moral après la perte du triple A. plus le choix. Mais comment marquer de l’attention à Teleperformance, leader mondial des centres d’appels, ses clients sans dépenser des fortunes ? C’est là l’un des salarie 130 000 collaborateurs dans une cinquantaine défis majeurs du secteur. de pays. Et Vocalcom, fondé il y a dix-sept ans, exporte En quinze ans, la relation client s’est imposée comme ses logiciels dans 43 pays. une industrie à part entière. Rebaptisés par nombre de Alors que le taux de chômage national approche médias « usines du troisième millénaire », les centres 10 %, le service client représente un vivier d’emplois d’appels ont connu un développement sans précédent. conséquent. Les fonctions de directeurs de la relation Leurs prestations et services affichent une diversité et client sont désormais briguées par des normaliens et une sophistication croissantes : information, vente, des polytechniciens. Si ces postes restent réservés à conseil, assistance, traitements des emails, tchats, saisies une élite, ce n’est pas le cas pour les milliers de contrats des données, factures… Avec des implantations de plus d’hôtesses de caisse, de téléconseillers et de superen plus éloignées, ces call centers administrent même viseurs, de salariés dans le commerce et la distribution. Certes, les rémunérations restent encore souvent trop faibles aux yeux des candidats. Mais les possibilités d’évolution et de mobilité sont réelles. Un autodidacte peut creuser son sillon. D’autant que des écoles enseignent désormais les fondamentaux du métier. C’est au cœur d’une industrie du XXIe siècle que L’Express, en partenariat avec le magazine spécialisé En-Contact, vous propose une plongée. Bon voyage. ● WWW.LEXPRESS.FR I 3 Sommaire 22 8 10 EDOUARD JACQUINET Khadija… ou la course à l’emploi QUAND LE SERVICE AU CLIENT FAIT LA DIFFÉRENCE 14 16 18 38 PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE 28 32 ARCHIVES FRANCE TELECOM Le ras-le-bol du harcèlement marketing 11 35 37 38 39 40 51 CRÉDIT COUVERTURE : EDOUARD JACQUINET 43 44 Centres d’appels Assistance sans frontières Service client La France championne du monde Quand la politique s’en mêle Le nouvel art de la séduction Le ras-le-bol du harcèlement marketing Le magasin n’est pas mort Les stars américaines de l’expérience client La bataille pour les prix Les galères les plus fréquentes DE VRAIS MÉTIERS ET DES CARRIÈRES D’AVENIR 48 49 54 EDOUARD JACQUINET Pierre Bontemps, président de Téléphone Store et Coriolis Relation client On ne badine pas avec l’amour Verbatim Gagner du temps ? Un luxe suprême 12 idées reçues sur le service client Services ou sévices clients ? Histoires rigolotes et édifiantes Interviews • Olivier Roussat, DG de Bouygues Telecom • Delphine Ernotte Cunci, directrice exécutive d’Orange France Reportages Une journée dans leurs vies 55 56 58 Interview François Béharel président de Randstad France Au jour le jour Sept vocations à la loupe Ils font bouger le service client France Des relations encadrées Au bout du fil L’enfer du bruit La bibliothèque idéale du service client L’EXPRESS 29, rue de Châteaudun, 75308 Paris Cedex 09. Tél. : 01-75-55-10-00 ■ CPPAP n° 0313c82839 ■ ISSN n° 0014-5270 ■ Hebdomadaire d’information édité par la Société anonyme Groupe Express-Roularta ■ Siège social : 29, rue de Châteaudun, 75308 Paris Cedex 09. ■ Capital social : 47 150 040 euros ■ Principal actionnaire : ROULARTA MEDIA FRANCE ■ Président-directeur général : Rik De Nolf ■ Directeurs de la publication : Christophe Barbier RÉDACTION ■ Directeur de la rédaction : Christophe Barbier ■ Rédactrice en chef : Isabelle Hennebelle ■ Secrétaire de rédaction : José Calvelo ■ Rédacteur graphiste : Thierry Benzaïd ■ Réalisation couverture : Dominique Cornière MANAGEMENT ■ Directeur général adjoint : Eric Matton ■ Editeur délégué : Tristan Thomas ■ Publicité. 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WWW.LEXPRESS.FR I 5 Quand le service au client fait la différence « Des caisses d’hypermarchés aux péages autoroutiers, des halls d’aéroports aux guichets d’ex-services-publics-privatisés, il fallait continuellement attendre son tour pour se renseigner, attendre son tour pour payer, attendre son tour pour retirer la marchandise, embarquer très en retard sur des vols surchargés, franchir très lentement des kilomètres d’embouteillages. Et si, par malheur, votre cas finissait par échapper aux cases prévues automatiquement, alors commençait le cycle beaucoup plus long des vaines réclamations à un personnel dépassé, lui-même, par la logique aveugle de cette organisation. » En France, le service client peut ressembler à celui que décrit, de façon ironique, Benoît Duteurtre dans son roman Service clientèle (éd. Gallimard). Mais dans le même temps, il peut aussi, à lui seul, tout changer. État des lieux. WWW.LEXPRESS.FR I 7 QUAND LE SERVICE CLIENT FAIT LA DIFFÉRENCE RELATION CLIENT On ne badine pas avec l’amour Une mauvaise « expérience client » a conduit 12 millions de consommateurs français à changer de fournisseurs dans des secteurs clés au cours des six derniers mois, révèle une récente enquête. Ces chiffres démontrent tout l’intérêt pour les marques d’écouter et de s’intéresser à leurs clients. A * selon l’étude Net Promoter 2011 u cours des six derniers mois, 12 millions de consommateurs français ont changé de fournisseurs dans des secteurs clés. En 2011, comme en 2010, trois raisons principales expliquent leur infidélité : la mauvaise qualité des produits et services, les prix et les surcoûts non justifiés et la piètre qualité du service client, dévoile la toute dernière enquête Net Promoter, menée par Satmetrix, spécialiste des logiciels et services de gestion de l’expérience client. Autre enseignement : l’abandon d’une marque ou d’un fournisseur génère un important « bouche à oreille » négatif. Ainsi, près de 40 % des personnes ayant quitté leur fournisseur l’ont dénigré auprès de leur entourage, soit quatre fois plus qu’un consommateur moyen. Les clients n’acceptent plus d’être maltraités : 17 % des personnes interrogées ont classé des prix ou des surcoûts non justifiés en second parmi les causes d’infidélité. 13 % ont invoqué en première position la mauvaise qualité du service client. Tous les secteurs ne sont pas logés à la même enseigne : les fournisseurs d’ordinateurs et de produits électroniques grand public tels que les téléviseurs et les téléphones mobiles bénéficient d’un taux de fidélité assez fort et d’un « bouche à oreille » positif. À l’inverse, banques, fournisseurs d’accès internet et opérateurs mobiles s’affirment comme les mauvais élèves de la classe. Le client promoteur fournisseur crée un « client promoteur », elle profite d’un taux de fidélité largement supérieur, d’un « bouche à oreille » positif, et évite les effets négatifs engendrés par les clients perdus. L’écoute du consommateur « Les marques persistent à ne pas écouter ce que leur disent leurs clients » Aimez vos clients, ils vous le rendront. Les personnes ayant abandonné une marque sont quatre fois plus susceptibles de la dénigrer autour d’eux qu’un consommateur moyen. En revanche, les clients ayant recommandé leur marque sont près de cinq fois plus nombreux (46 %) que les détracteurs (9 %). Lorsqu’une marque ou un 8 RAISONS DE QUITTER UNE MARQUE * 2011 2012 Mauvaise qualité du produit ou du service Prix non justifié Mauvaise attitude des représentants de la marque Impossibilité d'accéder à quelqu'un pour résoudre mon problème Traitement différencié entre les nouveaux clients et les clients existants Centres d'appel à l'étranger Mauvaise politique d'échange ou de remboursement Mauvaise politique environnementale 22 % 17 % 13 % 12 % 10 % 9% 6% 2% 25 % 17 % 14 % 13 % 9% 9% 7% 2% 8 I WWW.LEXPRESS.FR «Les marques persistent à ne pas écouter ce que leur disent leurs clients. La tendance générale va plutôt vers l’augmentation des prix et du nombre de services payants. Cela promet d’accroître encore la volatilité des consommateurs », commente Robert Salvoni, directeur général international de Satmetrix. L’enquête montre également que les entreprises n’aident pas leurs équipes à comprendre l’impact de leur comportement sur leurs clients. Compte tenu de l’état actuel de l’économie et de la pression sur les ventes et les marges, « il est regrettable de perdre ainsi des clients, alors qu’il suffirait aux entreprises de s’intéresser vraiment à eux pour enrayer le phénomène, poursuit le spécialiste. Avoir des clients satisfaits engendre un double effet positif. Non seulement l’entreprise a de bonnes chances de les fidéliser sur le long terme, mais elle bénéficie aussi d’un niveau élevé de recommandation. » Délivrer une expérience client au-delà des attentes est d’une extrême rentabilité. Autrement dit : si vous aimez vos clients et si vous les servez bien, ils vous le rendront. ● MANUEL JACQUINET 12 idées reçues sur le service client « Pas besoin de formation pour exercer ces métiers » ; « Les centres d’appels sont tous délocalisés au Maroc » ; « Les usagers sont maltraités par les fonctionnaires… » Correctes ou erronées, les idées reçues pullulent à propos du service client. 1 FAUX. L’État a engagé une vraie révolution pour passer d’une logique d’usager à celle de client. Seulement cinq minutes d’attente dans 90 % des opérations courantes à la Poste, système efficace de traitement des appels le samedi dans les Caisses primaires d’assurance-maladie, gestion des comptes de la Sécurité sociale par Internet (Ameli) sont autant d’exemples d’amélioration. Les temps d’attente, la dématérialisation des services, l’engagement sur les délais de réponse, etc., tous ces indicateurs sont désormais mesurés et suivis. La charte Marianne formalise d’ailleurs l’ensemble de ces engagements. DR Le service client et l’accueil dans les (ex-) services publics sont déplorables 2 Les métiers du service client sont des professions de « larbin » qui ne nécessitent pas de compétences On apprend énormément à s’occuper de l’autre, à l’écouter, à le comprendre. Tous ceux qui ont exercé un métier de service le reconnaissent. Et les directeurs du service ou de la relation client FAUX. sont nombreux désormais à avoir fait Normale sup’, l’Insead ou Polytechnique. 3 Je veux devenir, chanteur, comédien, ou chercheur… Je n’ai aucun intérêt de prendre un job de téléconseiller FAUX.Le chanteur Corneille a été téléconseiller à Montréal au début de sa carrière, et le comédien Gilbert Melki a exercé comme sondeur et enquêteur par téléphone. 4 Les Français, mauvais élèves en service client DR Accueil du journal Le Progrès, à Lyon. VRAI ET FAUX. Roissy est l’aéroport le plus désagréable du monde ; les Champs-Élysées s’avèrent médiocres dans l’accueil des touristes ; les chauffeurs de taxi parisiens sont connus pour être acariâtres. Chiffres et baromètres n’épargnent pas notre pays. Celuici n’en est pas moins la première destination touristique au monde. Et avec des entreprises comme EDF, Veolia, Carrefour, Vinci, Accor, la France est classée n° 3 des services… mais pas du service client. Évoluons ! Dans les services clients comme dans l’industrie, la bataille est la même : il s’agit de concilier qualité et compétitivité. WWW.LEXPRESS.FR I 11 QUAND LE SERVICE CLIENT FAIT LA DIFFÉRENCE 5 La file d’attente interminable est une fatalité FAUX. La ligne bleue chez Carrefour (dès que vous attendez trop, on ouvre une autre caisse), les musées d’Orsay et du Louvre développant des applications iPhone pour consulter les temps d’attente, les billets coupe-file un peu plus chers pour éviter la queue… autant de mesures concrètes pour en finir avec le temps perdu. 6 FAUX. Le consommateur s’acquitte de 15 % pour le service dans un café en France ; aux États-Unis, il donne la somme qu’il souhaite ; 150 euros pour deux heures de « Personal shopper » au Bon Marché… le service n’est pas et ne peut être gratuit, notamment parce qu’il intègre une forte composante humaine. Cependant, afin de parvenir à des offres tarifaires réduites, il existe des offres ou des produits basiques « dégradés » en termes de service, c’est le cas pour Ryanair, Free mobile ou encore B&You. Ballerines personnalisées chez Repetto. défini « l’habileté relationnelle » (qu’on parvient à évaluer). Il s’agit de la capacité, ou du désir, de servir l’autre, de la facilité à nouer le contact ou la relation. 8 On ne parvient plus à parler à qui que ce soit. Il n’y a plus que des automates VRAI ET FAUX. La France recourt aux automates, qui ont d’ailleurs leurs vertus : billets de banque, titres de transport, relevés de comptes… Tout ceci va plus vite grâce aux GAB (les guichets automatiques) et aux DAB (distributeurs automatiques de billets). Le Japon et les ÉtatsUnis n’ont pas remplacé tous les métiers de service par des machines. À cause, peut-être, du coût du travail salarié ? Une vraie question ! 7 Le service client, ça ne s’apprend pas FAUX. Concierge de palace, téléconseiller, hôtesse de caisse, directeur de la relation client : pour tous ces métiers, des écoles ou formations spécialisées existent et le niveau de sélection est parfois très élevé. On a même « normé » et 9 Ils ne nous appellent que pour nous vendre des « trucs » inutiles Au niveau mondial, les centres de contacts reçoivent désormais plus d’appels qu’ils n’en émettent. C’est la preuve que les missions d’assistance, de service, de conseil (réalisées majoritairement en appels « entrants ») ont pris le pas sur les appels commerciaux (appels « sortants »). DR FAUX. 12 I WWW.LEXPRESS.FR ÉDOUARD JACQUINET Le service, ça devrait être gratuit. On paye assez cher comme ça ! 10 Ils sont tous au Maroc ou à l’Ile Maurice VRAI ET FAUX. Certes, 40 000 emplois ont été créés dans cette filière au Maroc depuis l’an 2000, mais 280 000 téléconseillers et chargés de clientèle travaillent toujours dans les centres d’appels localisés en France. 11 Les Indiens sont numéro 1 mondial du centre d’appels FAUX. Depuis juin 2011, les Philippines font la course en tête avec 500 000 emplois générés dans ce secteur. Manille a battu Bombay, notamment parce que la population parle assez bien anglais et que le marché anglo-saxon est le premier marché du monde. 12 Les emplois en centres d’appels sont mal payés FAUX. L’image d’Épinal est tenace mais désormais fausse : un télévendeur peut gagner jusqu’à 4 000 € par mois – ou 2 000 € mensuels dans un centre d’appels internalisé. La rémunération d’un directeur de la relation client se situe souvent entre 80 000 et 250 000 euros. ● H. CAUFIELD QUAND LE SERVICE CLIENT FAIT LA DIFFÉRENCE Olivier Roussat Directeur général de Bouygues Telecom « Les clients ont besoin d’assistance » DR Le « flibustier Free Mobile » et son offre tarifaire agressive ont récemment éperonné les gros navires des opérateurs télécoms. Les clients ont pourtant besoin de services qui ne peuvent pas toujours être gratuits ? Un problème de batterie déficiente, un besoin de transférer ses données sur un nouveau smartphone… cela prend cinq minutes à un conseiller expérimenté pour régler le problème. L’an dernier, nous avons réalisé plus de 1,5 million d’actes de service après-vente (SAV) au total dans notre réseau. C’est par souci d’efficacité que nous disposons de 3 000 téléconseillers dans des centres d’appels majoritairement « internalisés » et d’un réseau de 650 boutiques. Grâce à cette densité, 80 % des Français se situent à moins de vingt minutes d’un point de vente. Pouvoir tout faire presque partout permet de proposer à nos clients une relation commerciale fluide. › S’intéresser vraiment au client est essentiel pour satisfaire ses attentes ? Nous apportons une attention particulière à la demande de services, à ceux qui le rendent et innovons même pour satisfaire les nouvelles attentes. « Garantie échange 24 », par exemple, est un service transposé d’une expérience réussie aux États-Unis. Il permet de remplacer immédiatement un smartphone et de récupérer les données de l’ancien, sans aucune perte. Ce service fonctionne bien et séduit de nombreux clients. › Les Français seraient plus sensibles aux prix bas qu’au service… Qu’en pensez-vous ? Non, une partie d’entre eux a besoin d’une offre basique, sans service sophistiqué. À cet effet, nous avons conçu B&YOU. Pour autant, je suis convaincu que la majorité d’entre eux est confrontée à des besoins de service complexes et que parce que celui-ci est réalisé à distance ou, depuis toujours, sans facturation, ils n’ont pas vraiment conscience de ce service et de son coût. ● PROPOS RECUEILLIS PAR M. JACQUINET › Delphine Ernotte Cunci Directrice exécutive d’Orange France « Nous apportons un vrai service et devons désormais le vendre » ÉDOUARD JACQUINET Bien que dotée d’équipes d’ingénieurs et de process de pointe, Orange estelle une entreprise suffisamment réactive et orientée vers le client ? Mettons notre évolution en perspective. Notre entreprise vient de la culture du service public, du service rendu aux usagers, chez lesquels il fallait installer le téléphone. Cette histoire est encore très présente parmi nos collaborateurs. Âgés de 48 ans en moyenne, ils ont, pour un petit tiers d’entre eux, trente ans d’ancienneté. En dépit de l’étendue de notre service, nous n’avons pas encore pris l’habitude de le faire rétribuer… ou du moins nous n’avons pas complètement réussi. Mais n’est-ce pas un trait culturel spécifique de la société française de minorer l’importance du service au client et du travail que cela implique pour le mettre en œuvre ? › Quels sont les autres obstacles à lever pour optimiser votre relation avec les clients ? Notre culture est technique. Notre métier a longtemps consisté à construire des réseaux, des infrastructures et moins à vendre. Pour nombre de collaborateurs, le simple fait de monnayer une prestation est une pratique moins naturelle. Pourtant, il est vital de migrer vers une culture du service rendu… et vendu. Nous avons déjà beaucoup travaillé pour nous mettre à des standards du marché en termes de productivité et de qualité de service, dans nos centres d’appels › 16 I WWW.LEXPRESS.FR notamment. Chez Orange, reconnaissons-le, nous ressentons souvent un petit « sentiment d’infériorité ». Pour vendre, nous avons besoin d’être sûrs de la qualité de notre offre. Enfin, pour effacer les séquelles de la crise sociale que nous avons traversée, nous redonnons aux salariés la compréhension de leur travail. C’est d’autant plus important qu’ils accomplissent bien ce travail ! Humaniser le commerce, réenchanter la relation commerciale, expérience client… Ces formules impliquent de « remettre des gens en face d’autres gens ». Quelle stratégie adopter ? Désormais omniprésent, le Web a effectivement besoin de s’humaniser et le service d’être incarné par des individus. Nos 15 grandes boutiques implantées dans les principales villes françaises visent à répondre à cette nécessité. Tout comme nos milliers de conseillers dédiés, tant en boutique que dans les centres d’appels, et nos techniciens d’intervention – dont 5 000 sont apprentis. Cette année, nous visons à devenir leader de l’expérience client. Notre stratégie implique de travailler sur les parcours clients. Pour ce faire, nous avons redonné de l’autonomie aux onze grandes régions créées. Celles-ci sont désormais responsables de leurs clients. À elles de trouver comment gérer au mieux les consommateurs parfois déçus, suite à une mauvaise expérience avec Orange. Vendre, superviser, dépanner dans les hot lines… tout ceci représente une valeur considérable. Il est impératif pour nous d’expliquer ce service et de le vendre. ● › PROPOS RECUEILLIS PAR M. J. QUAND LE SERVICE CLIENT FAIT LA DIFFÉRENCE REPORTAGES UNE JOURNÉE DANS LEURS VIES La relation client a envahi notre vie quotidienne. Téléphone, magasin, internet : tous les moyens sont bons pour créer du lien avec le consommateur. FRANCIS GAUTHIER, retraité. Un grand-père hyperactif À 71 ans, cet ancien propriétaire d’une brasserie parisienne profite de sa retraite. Il s’est mis à l’informatique, au vélo d’appartement, mais, pour les questions vraiment importantes, Francis se déplace. EDOUARD JACQUINET 6 h 30 : Sur les chapeaux de roue ! C’est ainsi que Francis Gauthier aime démarrer sa journée. Avant même le petit-déjeuner, ce natif des Deux-Sèvres, « exilé à Paris depuis trente-deux ans », s’attaque à ses nombreux mails. L’ancien chef d’entreprise s’occupe de sa sœur Marie, 89 ans, et de sa cousine Marcelle, 91 ans. Il gère leurs documents administratifs, les opérations bancaires et les relations avec la famille. Un vrai travail ! « Heureusement, comme nombre de retraités, je me suis converti à internet. C’est formidable, en une demiheure, j’ai consulté les comptes, vérifié les encaissements et les débits bancaires. » 18 I WWW.LEXPRESS.FR 6 h 50 : Cap sur le site de ventes aux enchères eBay. Cet « expert » gère toutes les ventes de la famille : sa fille, son gendre, ses fils. Autant de jeunes quadra débordés qui ont la chance de pouvoir confier à ce grand-père dynamique le service client, les réponses aux acheteurs ou encore la mise en place des photos. 7 h 30 : Il est temps d’assurer un autre service tout aussi important : prendre en charge et assister sa femme, partiellement handicapée et profiter avec elle du petitdéjeuner. Consultation de l’emploi du temps chargé et consigné dans un petit agenda papier qu’il a toujours dans la poche. Aujourd’hui : séance chez le kiné, rendez-vous chez le coiffeur, chez l’assureur et le banquier. « Je fais partie d’une génération où certaines choses se font en faceà-face, en discutant. Moi, les calls centers avec les “tapez 1 2 3” et des personnes qui ne peuvent jamais rien pour vous, qui doivent toujours demander la réponse ou l’autorisation à des supérieurs ou à des spécialistes, ça ne m’intéresse pas ! Hier par exemple, je suis allé à la Macif, et j’ai pu régler mon problème de sinistre en direct et serré la main de mon interlocuteur en prime. Bien sûr, tout cela m’a demandé du temps, mais, après tout, du temps, j’en ai maintenant, alors que pendant quarante ans, j’ai couru après. » 15 heures : En route pour le magasin d’ameuble- EN MATIÈRE DE SERVICE CLIENT IL APPRÉCIE : › La Poste où il trouve que les temps d’attente ont largement diminué et que ses interlocuteurs sont compétents › Le service client chez Renault minute : « On me reconnaît, et ça, c’est très important, je n’ai pas besoin de tout réexpliquer. » › Le téléphone Doro qu’il a offert à son épouse à Noël avec deux grosses touches et des fonctions basiques mais adaptées à ses besoins IL N’AIME PAS › Les centres d’appels où il faut « taper 1, taper 2 ou 3 » et où personne n’est jamais capable de résoudre les problèmes › Les cafés où le service s’est dégradé ment Alinéa pour changer une armoire. Achetée deux jours plus tôt, il s’avère qu’elle ne convient pas tout à fait. « La dernière fois, les vendeurs ont été très commerciaux. Ils m’ont repris un meuble qui avait été déballé sans facturer de pénalités. Ce geste commercial m’a convaincu de rester fidèle à cette enseigne. » Pour se rendre chez Domus (Rosny-sous-Bois, dans le 93), Francis Gauthier a programmé son GPS, le compagnon indispensable dans sa Renault Modus. « Je pourrais me passer d’un véhicule mais, pour circuler avec ma femme, cela m’est indispensable. » L’entretien de son véhicule est confié en exclusivité au Renault minute de Boulogne. 17 heures : Petite pause dans un café où cet ancien du métier constate parfois avec un brin de tristesse que « le service s’est perdu ». 20 h 30 : Coup de téléphone à son fils, technicien en hotline informatique. Pour programmer son smartphone, son fils est meilleur que lui. ● M. J. Plongée au cœur d’une industrie mondialisée Le service au client tient souvent à des petits détails, à des attentions qui font toute la différence : livraison de bouteilles d’eau à domicile, sourire à la caisse, SMS personnalisé un jour d’anniversaire... Mais, pour les entreprises, il nécessite aussi de vrais investissements humains et technologiques. Orange mobilise quelque 22 000 téléconseillers, et 11 000 personnes travaillant dans ses boutiques ou comme techniciens d’intervention. Bien que l’industrie soit encore souvent opposée aux services, il est urgent de reconnaître que cette vision est obsolète. Les services clients sont devenus une industrie à part entière. À découvrir. DR PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE CENTRES D’APPELS Assistance sans frontières Désormais mondialisée, l’industrie du service client réalise des prestations d’une diversité et d’une sophistication croissantes. Bien que l’employeur et les logiciels soient souvent français, nombre de chargés de clientèle sont malgaches, camerounais ou marocains. 28 I WWW.LEXPRESS.FR R abat, Antananarivo, Curepipe… Telles sont actuellement les destinations les plus fréquentées. Pas par les touristes, mais par les directeurs ecommerce ou relation client des grands e-marchands, sites de rencontres et opérateurs de renseignements téléphoniques. La raison ? De nombreux prestataires en centres d’appels, ou « BPO » (Business Process Outsourcing), y ont organisé leur « production ». Ces structures, devenues centres de contacts, doivent désormais concilier au mieux coûts de production maîtrisés – et donc prix de vente supportables par leurs clients –, facilités de recrutement et capacités opérationnelles 24 h/24. La ménagère s’est mise à internet DR Petit retour en arrière. Il y a quinze ans, l’e-commerce n’existait pas. Pour régler un problème avec la Sécurité sociale, il fallait se déplacer à la caisse locale la plus proche. En revanche, les centres d’appels, délocalisés ou non, renseignaient et prenaient déjà les commandes des ménagères après le spot télévisé sur M6 Boutique. Aujourd’hui, la ménagère s’est mise à internet, mais a encore besoin d’assistance. Quant à la Sécurité sociale, elle incite à ouvrir un compte Ameli pour gérer son dossier en ligne. Les centres d’appels ont donc évolué en conséquence. Ils ont spécialisé les profils et se sont équipés d’outils adaptés. Ces der- niers affichent une sophistication croissante : ils peuvent aujourd’hui tchatter, parler, enregistrer les conversations téléphoniques et, bien sûr, vendre ; mais aussi repérer l’internaute en difficulté ou sur le départ. Pour s’adapter à cette nouvelle donne et à une difficulté récurrente – recruter et conserver les bons profils –, les professionnels sont allés vers des horizons de plus en plus exotiques. C’est à Yaoundé, au Cameroun, que Charles-Emmanuel Berc, bourguignon de naissance et professionnel du service client depuis 20 ans, a créé la société Interstis. Un choix réfléchi pour ce quadragénaire : « Ici, nous disposons de télévendeurs dotés d’une véritable fibre commerciale et qui savent très bien parler et rédiger le français. Depuis quelques semaines, avec une équipe de quatre télévendeurs seulement, nous générons plus de 20 000 euros de chiffre d’affaires par jour pour l’un des plus gros e-commerçants français. » C’est le résultat d’un véritable savoirfaire. « Nous contactons exclusi- vement des prospects qui n’ont pas concrétisé leur commande, soit parce que leurs coordonnées nous ont été transmises par notre client, soit parce que nous les repérons directement en ligne pendant leur navigation », explique Charles-Emmanuel Berc. Des outils spécialisés permettent en effet d’identifier les points de blocage du parcours client sur internet et de proposer alors une assistance en ligne, par tchat notamment. Les agents de CharlesEmmanuel Berc prennent alors le relais : « Notre équipe de commerciaux sédentaires rappelle ces prospects et engage la conversation avec eux. » « Ici, à Yaoundé, nous disposons de télévendeurs dotés d’une véritable fibre commerciale et qui savent très bien parler et rédiger le français » Recruter s’avère de plus en plus délicat L’ENTENTE L’Afrique francophone est une destination idéale pour les spécialistes français de la relation client. D’autres entrepreneurs français sont partis encore plus loin. Après avoir implanté ses premiers camps de base au Maroc, à Meknès, Oujda ou Rabat, Claude Briqué, autre « ancien » du métier, a ainsi créé, il y a environ six mois, 300 postes à Antananarivo, la capitale malgache. Sa société ADM Value, fondée exclusivement sur une offre « offshore », c’est-à-dire exécutée outre-mer, salarie 2 000 agents. À chaque pays correspondent des savoir-faire bien particuliers. « À Madagascar, nous assurons la modération d’un important site de rencontres en ligne. À Rabat ou à Meknès, nous gérons les dons pour une grande organisation caritative française, raconte Claude Briqué. Les Marocains ont de réelles aptitudes commerciales, mais recruter s’avère de plus en plus délicat, sauf à pratiquer la surenchère salariale. » Parce qu’il est d’origine arménienne, Olivier Mouradian sait que Erevan compte d’excellents ingénieurs informaticiens et des jeunes diplômés vraiment multilingues. La ville bénéficie également d’une stabilité politique rare dans la région. Son entreprise, ICS PerWWW.LEXPRESS.FR I 29 formance, y assure un service en 22 langues pour des clients comme Reed Business Information (sondages internationaux) ou l’éditeur de logiciels Adobe (service clients). C’est même depuis ce centre en Arménie que les assurés sociaux de certaines Caisses primaires d’assurancemaladie sont incités à ouvrir leur compte Ameli. Olivier Mouradian supervise ses opérations depuis son domicile, à Barcelone, où il vient de s’installer. ●●● Les usines du troisième millénaire Pour accompagner une telle organisation au quotidien, des technologies pointues sont essentielles. Et, là encore, les entreprises françaises ne sont pas les plus malhabiles. L’éditeur de logiciels pour centres d’appels Vocalcom fournit ainsi nombre de ces entrepreneurs français partis à l’aventure, mais également leurs concurrents mieux établis. Au total, l’entreprise créée en 1995 par Anthony Dinis génère plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Elle équipe 400 000 agents dans 3 500 centres d’appels situés dans 43 pays. Présents dans le peloton des leaders mondiaux pour leurs activités « cœur de métier », les Français 30 I WWW.LEXPRESS.FR commencent aussi à concurrencer les champions américains avec une nouvelle gamme de services. Ainsi Octopus, la solution utilisée par Charles-Emmanuel Berc au Cameroun pour assister les e-acheteurs, constitue-t-elle une alternative aux produits d’ATG, filiale d’Oracle. Pour la planification des ressources humaines, une autre étape clé de la gestion des clients, le français Holydis n’a pas à rougir face à des concurrents comme l’israélien Nice Systems. Il y a une dizaine d’années, dans Libération, la journaliste Nicole Pénicaud stigmatisait les « usines du troisième millénaire ». Elle ne se doutait pas que ces usines seraient de plus en plus sollicitées, créatrices d’emplois et largement consommatrices de haute technologie française. Savoir où produire est une question clé dans le secteur du textile, dans l’automobile, dans l’électronique et, désormais, dans l’industrie des services clients. Les dynamiques d’internationalisation sont mouvantes. Savoir identifier la destination où l’on pourra trouver le meilleur compromis compétences/coût/disponibilité des ressources, en fonction des missions et à un temps T, est devenu un véritable savoir-faire. PHOTOS DR PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE FLUIDITÉ Les centres d’appels migrent d’un continent à l’autre, à la poursuite des meilleurs compromis économiques. Savoir où produire est une question clé dans l’industrie des services clients Être capable d’anticiper est un avantage déterminant. Il y a cinq ans, Pia Heitz-Casanova, dirigeante d’Euro CRM, a su identifier un tel potentiel sur l’île Maurice. Elle y gère notamment la réception des appels pour le 118 218, marque française du leader mondial du renseignement téléphonique The Number. À l’époque, il était encore avantageux, selon les missions, de recruter et de fidéliser une main-d’œuvre très qualifiée et souvent trilingue dans cette petite île. Aujourd’hui, « c’est toujours parfaitement adapté pour certaines prestations », admet la chef d’entreprise. Et pour traiter d’autres nouveaux clients, c’est dans… le Calvados que Pia HeitzCasanova va ouvrir son prochain centre de contacts. Son objectif : passer le cap des 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. ● MANUEL JACQUINET CREDIT PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE SERVICE CLIENT La France championne du monde Les étrangers qui atterrissent à Roissy auraient, dit-on, une opinion détestable de l'accueil dans l'aéroport parisien. Quant aux chauffeurs de taxi, leur manque de courtoisie serait proverbial. Mythe ou réalité ? Paradoxalement, notre pays reste un champion mondial des services aux clients, notamment dans les logiciels et les centres de contact. M esurer et « évaluer » la qualité du service client est de venu une priorité. Marques, réseaux de magasins, opérateurs télécom consacrent des sommes considérables pour mesurer la satisfaction client et le fameux NPS (Net Promoter Score, bref, l’indice de recommandation). On utilisait déjà, à cet effet, les mystery shopping (clients mystères) qui visitent les magasins. Mais, depuis que les services sont également rendus à distance, rien de tel pour écouter 32 I WWW.LEXPRESS.FR le client que d’enregistrer et d’analyser ce que le consommateur dit ou écrit. Les « verbatim » (ce que l’on écrit dans ses mails et courriers) sont désormais analysés, via une solution d’analyse sémantique de textes, grâce au savoir-faire de la société Erdil. Créée par Séverine Vianney, une jeune doctorante en sciences du langage, avec la collaboration de la faculté de Besançon, pour répondre initialement à un besoin du Groupe Nestlé, la société Erdil a conçu un logiciel permettant d’analyser en peu de temps des milliers de verbatim PODIUM Anthony Dinis (Vocalcom), Pia HeitzCasanova (EuroCRM) et Daniel Julien (Teleperformance): trois dirigeants qui portent haut les couleurs françaises. clients. Il est alors possible de tirer des conclusions affinées sur l’image de marque, les services, les magasins de l’entreprise et les attentes des consommateurs. Leroy Merlin, Orange, Total ou encore SFR sont clients de cette start-up bisontine qui a doublé son chiffre d’affaires en 2011. Et si l’on demandait au client son avis, immédiatement après son paiement en caisse ? Telle est la possibilité aujourd’hui offerte par l’application Visitors Book. Elle permet de recueillir l’opinion des consommateurs sur le point de vente, lors du passage en caisse via le terminal de paiement. Les questions peuvent varier d’un client à l’autre et concerner l’accueil, la visibilité de la signalétique magasin ou la qualité du conseil. Les réponses sont analysées automatiquement et synthétisées sous forme de reporting. Éditée par Jade-i, une start-up créée par un polytechnicien, ex-cadre de grands groupes (Cogema, Gemplus), l’application a déjà séduit les magasins Lapeyre. Pour réduire les files d’attente, et donc le temps perdu, ennemi n° 1 du service client, des logiciels permettent aussi d’anticiper les flux, par exemple, de personnes à la caisse d’un supermarché ou d’appels entrants dans les centres de contact. Ces logiciels rendent possible de prévoir le personnel nécessaire. C’est précisément le métier d’Holy-Dis, éditeur du logiciel spécialisé Planexa qui équipe la moitié du Top 20 français des centres d’appels et quasiment autant des hypermarchés français. Là encore, forte de son succès, l’entreprise française s’est développée dans 42 pays du monde. Des outils conviviaux et simples d’utilisation Il faut soigner la relation sur tous les canaux : magasins, réseaux sociaux et centres d’appels. Dans cette mission, les outils technologiques s’avèrent indispensables et doivent être conviviaux et simples d’utilisation. C’est notamment sur ce constat que Conecteo a vu le jour en 2005, à Bordeaux, sous la houlette d’anciens de NetCentrex et de Dialogic, véritables références dans le métier. Depuis, la start-up a connu une très forte Vos RELATION CLIENT Dans le service client, certaines entreprises françaises ont déjà gagné tous les oscars croissance. Avec sa suite logicielle, elle équipe désormais la Société Générale, Groupe Crédit Mutuel, Amaguiz, Yves Rocher ou encore Smartbox. Sur ce même créneau, mais en se spécialisant sur le tchat et le click to call (le bouton pour rappeller immédiatement le client), la jeune pousse nantaise iAdvize a réussi une belle performance. Son outil disponible en location équipe désormais les sites Web Fnac, Cdiscount, Pixmania ou encore The Kooples. Il arrive que ces start-up deviennent des ETI (ces fameuses entreprises intermédiaires désormais chéries de tous), voire des leaders mondiaux. Dans le service client, deux entreprises françaises ont gagné, elles aussi, tous les oscars et continuent de faire la course en tête. De fait, le leader mondial des centres d’appels est une ●●● 2pourrendez-vous incontournables booster votre carrière ! Jeudi 24 mai de 10h à 18h 2012 8 Espace Champerret - Paris 17e Mardi 11 de 10h à 18h septembre 2012 9 Espace Champerret - Paris 17e Des centaines de postes proposés : Téléopérateur, Chargé d'assistance, Chargé de clientèle, Hot-liner, Superviseur, Technicien conseil, Responsable Plateau, Directeur centre d'appels... Entrée gratuite - toutes les informations sur www.jobrencontres.fr - 01 75 55 14 75 WWW.LEXPRESS.FR I 33 PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE société française. Il s’agit de Teleperformance, créée voici plus de trente ans par Daniel Julien et Jacques Berrebi. Avec 130 000 collaborateurs dans 49 pays, l’entreprise est présente sur tous les continents et cotée sur les marchés boursiers américain et français. Valeur chouchoute des analystes financiers, grâce à la régularité de ses résultats dans un secteur pourtant très concurrentiel, elle a certes connu quelques difficultés en France. Mais son dernier centre, ouvert à Blagnac en décembre 2011, témoigne d’une vision nouvelle de son métier : espaces de travail repensés, création d’une académie de la vente, recours au télétravail… La société au sein de laquelle ont démarré de nombreux managers de centres d’appels nourrit un nouveau projet : devenir le leader mondial, non plus des centres de contacts, mais de l’expérience client. Enfin, même si l’on ne connaît pas son nom, il est probable que VIVE LE LABEL DE RESPONSABILITÉ SOCIALE ! T ous les centres d’appels ne se ressemblent pas. Parmi les 2 500 implantés en France, certains investissent particulièrement dans le recrutement, l’intégration, la formation initiale et continue de leurs équipes, convaincus qu’il s’agit là du cœur du réacteur. Depuis 2004, ils peuvent même obtenir un label qui certifie ces bonnes pratiques sociales. Créé à l’initiative des syndicats de la profession et de Jean-Louis Borloo, alors ministre du Travail, le label de responsabilité sociale a été attribué à trente entreprises ou organisations. Et de nombreux pays viennent étudier cette certification. 34 I WWW.LEXPRESS.FR TELEPERFORMANCE ●●● l’on ait utilisé ou été appelé via les logiciels d’un autre champion français : Vocalcom. L’entreprise équipe plus de 650 000 agents de centres d’appels dans 41 pays du monde, et 70 % des prestataires spécialisés français en sont équipés. Créée il y a quinze ans, Vocalcom est spécialisée dans les outils de télémarketing, service client, tchat et interaction client. Fondée par un véritable passionné de technologie et de commerce, l’entreprise a toujours su conserver une bonne longueur d’avance sur ses concurrents, nombreux et souvent américains. Son secret ? Un investissement soutenu en recherche et développement et une croissance menée tambour battant. En 2000, alors que de nombreux experts ne croient pas au modèle délocalisé des centres d’appels, Vocalcom crée une filiale au Maroc. Dix ans après, sur ce seul pays, elle équipe 25 000 postes de travail. Customer driven, comme disent les Anglo-Saxons, c’est-à-dire « orientée client », l’entreprise a grandi, ouvert des filiales aux États-Unis et en Asie pour accompagner ses principaux clients. Et c’est avec le soutien d’Apax Partners (entré en 2011 au capital) qu’elle entend désormais EXPLOIT Teleperformance compte aujourd’hui près de 100 000 stations de travail pour 130000 employés. Vocalcom équipe plus de 650 000 agents de centres d’appels dans 41 pays du monde devenir leader mondial dans son domaine. Elle prévoit 124 recrutements cette année. Un seul objectif : être recommandé par ses clients Vocalcom investit désormais le point de vente avec son produit The Drive, qui permet de renseigner le client. Car, comme le relève Anthony Dinis, son dirigeant fondateur, « il ne s’agit plus de traiter des contacts mais de répondre à la demande du client, de tout faire pour que celui-ci soit satisfait. Le client dialogue avec des marques en utilisant différents médias : la voix, l’écrit, le SMS, ou il s’exprime sur les réseaux sociaux ». Ces outils permettent de lui répondre là où il est, sur le même canal que celui qu’il utilise, avec un seul objectif : qu’il soit tellement satisfait qu’il vous recommande à ses propres amis, car telle est la « nouvelle frontière » de la relation client. Les géants américains du CRM ou de la technologie (Sales Force, Avaya), convaincus et un peu bluffés, ont d’ailleurs noué des accords technologiques stratégiques avec le champion français. Pour gagner la coupe du monde, il faut nouer de bonnes alliances. ● M. J. PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE Les stars américaines de l’expérience client Chaque année est publiée une liste des « champions du service client ». Une excellente occasion d’étudier les innovations qui font la différence dans un pays beaucoup plus porté que la France à cette culture du client et de sa satisfaction. Starbucks implique les baristas dans l’organisation de la production La multinationale du café a transformé ses « baristas » en « penseurs » de la production. Afin d’améliorer l’efficacité et d’accélérer le service, ces collaborateurs ont pour mission de repérer et de supprimer les étapes inutiles dans leur travail. Starbucks a récemment commencé à externaliser son service client téléphonique auprès de Sitel. Numéro un du classement 2010 des « champions du service client » établi par l’institut d’études JD Power, le détaillant d’articles de sports nature est célèbre pour sa politique de retours indulgente. Les détenteurs d’une carte de crédit L.L. Bean ont désormais droit aux frais de port gratuits pour toutes les livraisons et les retours. Quand la société a annoncé la fermeture d’un centre d’appels en 2009, la direction a annoncé à ses salariés qu’ils pourraient travailler depuis leur domicile, ce qui éviterait l’externalisation de leur activité. « Avec la sous-traitance, la qualité du service s’est beaucoup dégradée », a déclaré Terry Sutton, vice-président en charge de la satisfaction clients. USAA : ses clients déposent leurs chèques via leur iPhone USAA est l’un des acteurs les plus innovants dans l’industrie de l’assurance et des services financiers. L’entreprise permet à ses clients de déposer des chèques sur leurs 40 I WWW.LEXPRESS.FR DR L.L.Bean fait travailler ses téléconseillers à domicile comptes en les photographiant avec leurs iPhones, et en les transmettant via une application spécifique. Prochainement, ses clients pourront gérer un constat de sinistre via leur smartphone. Ils pourront également effectuer des paiements entre eux, avec des virements immédiats par SMS ou par e-mail. Four Seasons Hotels forme tous ses salariés à servir le client Afin de garantir un nombre suffisant de salariés en première ligne, l’hôtelier haut de gamme forme ses employés de back-office à être efficaces sur d’autres tâches, comme ces DRH qui viennent renforcer le guichet du club de fitness. Cette polyvalence inédite des salariés devrait renforcer la réactivité de l’entreprise, au plus grand bénéfice du client. LE DESIGN des boutiques Starbucks est explicitement conçu pour que l’acheteur se sente « chez lui ». Publix Super Markets garantit des rayons toujours achalandés Propriété de ses salariés, le géant des supermarchés Publix (1 000 magasins) a achevé l’installation de son logiciel d’inventaire en 2009. Le système commande automatiquement les réapprovisionnements. Selon Publix, cette réforme améliore de 19 % les taux de « non-disponibilité ». Ace Hardware double son programme de clients mystères La chaîne de bricolage propriétaire de 4 400 points de vente a doublé l’ampleur de son programme de clients mystères pour y soumettre un bien plus grand nombre de magasins. Les nouveaux outils déployés en 2009 ont permis aux responsables des points de ●●● PLONGÉE AU CŒUR D’UNE INDUSTRIE MONDIALISÉE ligne. Désormais disponible auprès de 78 revendeurs, ce service autorise les automobilistes à choisir leurs conseillers clientèle en visionnant au préalable leurs photos. Lexus : ses clients prennent rendez-vous en ligne et choisissent leurs conseillers clientèle Alors que les ventes de son rival Amazon.com explosent, le libraire mise sur ses 700 boutiques, à partir desquelles ses clients ont accès au Wi-Fi, et ce depuis mi-2009. Alors que beaucoup de sociétés réduisent les embauches dans leur service client ou l’externalisent, Barnes&Noble a ouvert un nouveau centre d’appels internalisé. ● La réputation du constructeur automobile Lexus n’aura finalement pas souffert du rappel massif des véhicules de sa maison mère Toyota. Pour l’entretien ou la réparation de leur voiture, les clients de la marque peuvent prendre rendez-vous en Barnes & Noble : rend ses librairies plus conviviales C.-H. F. FRANCE QUAND L’ADMINISTRATION SE MET À ÉVALUER LA « SATISFACTION CLIENTS » L adoption de la « charte Marianne » de l’accueil dans les services publics a fait figure de révolution lors de son lancement, en 2003. Elle fixe aux fonctionnaires des objectifs très concrets : décrocher en moins de 5 sonneries, traiter les courriers en 15 jours ouvrés, les courriels en 5, les demandes relatives à la qualité de service en 15 jours… Si, dans la foulée, certains services ont évolué, d’autres résistent, la notion même d’usager leur paraissant grotesque. Certains agents des impôts déclaraient ainsi il y a quelques années : « Nous n'avons pas face à nous des usagers mais des redevables, des assujettis, auxquels nous appliquons la loi en vertu de dispositions de la puissance publique. » Dans un rapport sur « Les relations de l’administration fiscale avec les particuliers et les entreprises » réalisé quatre ans après la fusion entre la direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique, la Cour des comptes a voulu savoir si cette évolution vers une administration plus humaine était en bonne voie. Et si elle a salué certaines améliorations, elle a reconnu que 42 I WWW.LEXPRESS.FR le chemin à parcourir était encore long. Après quelques ratés initiaux, les portails de télédéclaration sont désormais appréciés des professionnels (six millions d’abonnés) et des particuliers (12,2 millions de télédéclarations en 2011, soit plus de 35 % du total de l’impôt collecté). Mais certaines procédures restent ubuesques. La Cour des comptes explique dans son rapport pourquoi il est si difficile de joindre un agent par email : chaque service dispose d’une boîte fonctionnelle, mais chaque agent a aussi la sienne, qui fonctionne avec un autre logiciel ! Selon les magistrats de la Rue Cambon, l’accueil téléphonique est « à repenser dans son ensemble ». Un exemple : l’organisation de la réception d’appels en « sonnerie tournante » (basculement automatique de l’appel vers un autre poste après un certain nombre de sonneries sans réponse). Ce système inciterait certains agents à « ne pas répondre dans l’espoir qu’un de leurs collègues décrochera »… Ils estiment en effet que prendre le combiné téléphonique est, dans ce cas, une « perte de temps » par rapport à leur « vrai travail ». ● C.-H. F. «HOMESHORING» : QUAND LES CENTRES D’APPELS RELOCALISENT… VERS LE DOMICILE DES AGENTS L es délocalisations vers des destinations exotiques moins onéreuses que la France ne sont plus une fatalité. Le développement des formules de travail à domicile offre désormais des alternatives compétitives. Aux États-Unis, la méthode est répandue. Ainsi, 300 000 agents à domicile travaillent pour Apple, AT&T, Home Depot ou Capital One. L’employeur n’a plus besoin d’investir dans de vastes centres d’appels. Les employés n’ont plus à se déplacer vers leur lieu de travail. Bien qu’encore un peu plus chère que la délocalisation, cette formule permet d’offrir une meilleure qualité de service. Fini l’accent indien du téléconseiller de Bombay qui, paraît-il, agace les clients américains! Ce type d’aménagements commence à peine à percer en France où 9 % des actifs s’adonnent au télétravail. Pour l’heure, deux formules cohabitent. Dans l’une, il s’agit de télétravail « simple » : l’opérateur Didier Ferrier, fondateur d’Eodom, le leader français du Homeshoring. DR vente de prévoir les niveaux vitaux de stocks. Cette amélioration a contribué à augmenter les ventes. Les salariés en magasin peuvent désormais passer plus de temps avec leurs clients qu’avec le carnet de commandes. ●●● est salarié de la marque ou du prestataire spécialisé pour lesquels il assure le service client. Dans l’autre, baptisée homeshoring, l’agent est indépendant, souvent avec le statut d’autoentrepreneur. Il est mis en relation avec ceux dont il assure le service clients par l’intermédiaire d’un prestataire spécialisé, lequel fournit aussi les logiciels nécessaires. Les deux cas de figure sont aujourd’hui surtout le fait de petits prestataires innovants. Même si certains grands noms de la téléphonie ou des prestataires « classiques » de centres d’appels mènent en direct des expérimentations. Les métiers du téléphone s’affirment comme des pionniers du télétravail… Il fallait y penser. ● C.-H. F.
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