Concomitance de jours fériés chômés : mode d

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Concomitance de jours fériés chômés : mode d
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Concomitance de jours fériés chômés : mode d’emploi
de la rémunération applicable
le 14 décembre 2010
SOCIAL | Rémunération | Temps de travail
Dès lors que deux fêtes chômées coïncident le même jour, un salarié doit pouvoir prétendre à
l’indemnisation de chacune d’entre elles.
Soc. 30 nov. 2010, FS-P+B, n°09-69.330
Soc. 30 nov. 2010, FS-P+B, n°09-42.990
Voilà un contentieux qui, a priori, ne devrait pas monopoliser outre mesure les forces vives des
différentes juridictions sociales ! La chambre éponyme de la Cour de cassation s’est, en effet,
prononcée, le 30 novembre 2008, à l’occasion de deux pourvois différents, sur la question de la
rémunération de salariés ayant travaillé le 1er mai 2008, qui se trouvait être, également, ce jour-là,
le jeudi de l’Ascension. Si l’on se fie au calendrier, la précédente coïncidence entre ces deux dates
remontait à 1913 tandis que la prochaine occurrence devrait intervenir en 2160.
En réalité, la solution dégagée par la Cour de cassation est évidemment de portée générale et
concerne tous les jours fériés chômés concomitants lesquels peuvent devenir un véritable
casse-tête pour les responsables paies et les salariés eux-mêmes. De manière plus globale, ces
deux arrêts ont ainsi le mérite de rappeler la législation afférente aux jours fériés et leur incidence
selon leur date et leur caractère chômé ou non. Pour rappel, le code du travail autorise 11 jours
fériés (art. L. 3133-1 c. trav.) parmi lesquels le 1er mai qui bénéfice d’un régime de faveur : il s’agit
du seul jour férié obligatoirement chômé (art. L. 3133-4 c. trav.). Tous les autres jours fériés légaux
- voire les jours fériés spécifiques régionaux (Alsace-Moselle et DOM-TOM) ou relatifs à certaines
professions - ne sont pas obligatoirement chômés : il s’agit de jours fériés ordinaires. Afin de
connaître le sort du salarié ces jours-là, ainsi que sa rémunération, il convient de se référer à la
convention collective ou aux usages de l’entreprise.
Si l’on met de côté le contentieux spécifique à la journée de solidarité et du lundi de Pentecôte,
pour ne s’attarder que sur le cas du 1er mai, et puisque celui-ci est obligatoirement chômé
(s’agissant de la définition des jours chômés, jours fériés, jours de fêtes légales, V. blog Dalloz, 2
juill. 2009), comment en calculer la rémunération ? Que se passe-t-il lorsqu’il tombe un samedi (cas
du 1er mai 2010) ? On le sait, le chômage du 1er mai ne doit pas entraîner de réduction de la
rémunération (art. L. 3133-5 c. trav.). Si l’entreprise est classiquement fermée le samedi, alors il n’y
aura pas de compensation particulière et le 1er mai sera considéré comme un samedi ordinaire
(Soc., 26 oct. 1964, Bull. civ. IV, n° 709). Si, en revanche, le samedi est un jour travaillé (ou si le 1er
mai tombe un jour de la semaine) et que l’entreprise, de par son activité, ne peut respecter le
chômage (en cas contraire, elle s’expose, aux termes de l’art. R. 3135-3 c. trav., à une amende de
la 4e classe), alors les salariés doivent percevoir leur rémunération habituelle ainsi qu’une
indemnité égale ce qui revient à doubler le salaire de cette journée (art. L. 3133-6 c. trav.) sans
qu’il ne soit possible de compenser cette indemnité spécifique par un jour de repos équivalent (Soc.
30 nov. 2004, D. 2005. IR 115 ; 8 oct. 1996, D. 1996. IR 244 ). Et même tripler !
En, effet, au cas très particulier du pourvoi n° 09-69.329, le 1er mai 2008, comme cela a été dit,
tombait le jeudi de l’Ascension. Les salariés ayant travaillé ce jour-là ont perçu une rémunération
majorée de 200 % au titre du jour de l’Ascension en application de leur accord d’entreprise. Mais le
problème se corse et devient franchement mathématique lorsque non seulement il y a
concomitance de date entre jours fériés et que, de surcroît, il y a concomitance d’indemnisations
textuelles, en l’espèce non seulement le code du travail et la convention collective applicable
(convention collective nationale des activités du déchet) prévoyaient un maintien de salaire mais,
de surcroît, l’accord collectif accordait une indemnité supplémentaire. En clair, fallait-il, pour le seul
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mai 2008, rémunérer deux fois le même jour en maintenant le salaire des employés et pour le 1
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mai et pour l’Ascension, puis indemniser de façon supplémentaire cette journée au titre de
l’accord d’entreprise ?
Sachant, d’une part, que la convention collective précise que le personnel ayant travaillé tout ou
partie de l’un des onze jours fériés bénéficie, après trois mois d’ancienneté dans l’entreprise, soit
d’un repos payé soit d’une indemnité correspondant au salaire équivalent, et, d’autre part, que
l’accord d’entreprise prévoit une majoration de rémunération en cas de travail un jour férié,
l’employeur s’était, habilement, défendu en estimant que la convention collective ne précisant pas
le nombre annuel de jours de congés payés supplémentaires dus au titre des jours fériés, le salarié
n’a le droit qu’à un seul repos payé ou à une seule indemnité lorsque deux fêtes légales tombent le
même jour. De surcroît, en cas de concours d’instruments conventionnels collectifs, les avantages
ayant le même objet ou la même cause ne pouvant se cumuler, seul le plus favorable devait être
accordé.
Pour la Haute juridiction, au contraire, le principe est réaffirmé (V., déjà, à propos de la coïncidence
du 8 mai et de l’Ascension, Soc. 21 juin 2005, n° 03-17.412, Dalloz jurisprudence) : les salariés sont
fondés à prétendre à onze jours de congés payés au titre des fêtes légales, peu important que deux
fêtes tombent le même jour (en 2005, la chambre sociale avait même précisé qu’une position
contraire aboutirait à n’accorder que dix jours). De plus, et surtout, l’avantage prévu la convention
collective et celui prévu par l’accord d’entreprise constituent la mise en œuvre de dispositions
légales distinctes et n’ont ni le même objet ni la même cause : ils peuvent donc être cumulés. En
effet, la convention collective, prévoyant un maintien de salaire pour le chômage des jours fériés,
sous condition d’ancienneté, est une application du dispositif de l’article L. 3133-3 du code du
travail tandis que l’accord d’entreprise vise lui la majoration de salaire de l’article L. 3133-6 du
même code. En résumé, lorsque deux jours fériés coïncident, le salarié peut donc prétendre, non
seulement au maintien de salaire pour chacun de ces deux jours, et, de surcroît, si cela est prévu
par les textes, à une indemnisation supplémentaire qui s’ajoute au maintien de salaire.
par A. Astaix
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