Etat actuel de l`inventaire des flores tropicales

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Etat actuel de l`inventaire des flores tropicales
Courrier de l'Environnement de l'INRA n° 27, avril 1996
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Etat actuel de l'inventaire des flores tropicales (*)
par Odile Poney et Jean-Noël Labat
Muséum national d'Histoire naturelle, laboratoire de Phanérogamie, 16, rue Buffon, 75005 Paris.
Introduction :
la diversité végétale du monde tropical
d'espèces du même ordre de grandeur, sur des surfaces 6
fois et 30 fois plus petites.
Les végétaux sont minoritaires parmi les quelque 1,7
millions d'espèces que compte l'inventaire actuel des
espèces vivantes (fig. 1). Nous considérerons ici les seuls
végétaux vasculaires (Ptéridophytes + Spermaphytes), qui
constituent la très grande majorité des végétaux
actuellement répertoriés, en laissant de côté les bryophytes
et les algues (pour ces derniers, voir Groombridge, 1992, et
Campbell et Hammond, 1989). Signalons seulement que les
données et les estimations concernant la diversité des
différents ensembles de cryptogames sont globalement
moins précises, car leur inventaire est encore moins avancé.
Ainsi, à niveau de connaissance égal, la proportion de
groupes comme les champignons et les algues,
particulièrement mal explorés, serait modifiée à la hausse.
Le nombre d'espèces de plantes terrestres connues est de
l'ordre de 270-280 000.
85% des plantes terrestres sont des plantes à fleurs
(Angiospermes), soit 250 000 espèces.
Tableau I.
Diversité spécifique comparée
dans différents territoires français
% surface
France métropolitaine
Nouvelle-Calédonie
Guyane française
nombre d'espèces
100
3
15
4500
4 200
5000
Le tableau II réunit les 25 pays les plus riches en espèces
(d'après Groombridge, 1992) ; si l'on excepte de très grands
pays tempérés pour lesquels les chiffres élevés sont
évidemment liés à la surface (Etats-Unis, Russie), il s'agit
de pays tropicaux, y compris des très petits (Panama). La
plupart de ces pays sont également ceux qui possèdent une
couverture forestière importante. En effet, parmi les milieux
très variés des régions tropicales, les forêts sont les plus
riches, surtout les forêts denses humides.
Tableau II. Estimation du nombre d'espèces dans
les 25 pays de plus forte diversité biologique
Nombre d'espèces
Pays
> 50 000
40 000 - 30 000
20 000 - 30 000
20 000 - 1 5 000
15 000 - 1 0 000
10 000 - 5 000
Brésil
Colombie, Chine
Mexique, ex-Union soviétique, Indonésie
Australie, Venezuela, USA, Inde, Bolivie
Pérou, Malaisie, Thaïlande, Zaïre
Papouasie-Nouvelle-Guinée, Tanzanie,
Argentine, Madagascar, Panama, Turquie,
Cameroun, Guatemala, Philippines,
Paraguay, Birmanie
Figure 1. Les végétaux dans le monde vivant
1. La diversité des flores tropicales
Les régions tropicales représentent 40% des terres émergées
et portent 70% de la flore. En ce qui concerne les plantes à
fleurs, plus de 2/3 d'entre elles appartiennent aux flores
tropicales, soit près de 180 000 espèces.
L'Amérique tropicale possède une bonne moitié de cet
ensemble (85 000) et l'Ancien Monde se répartit l'autre
moitié de la façon suivante : Afrique tropicale 35 000,
Madagascar 8500, Asie 40 000 (dont 25 000 pour la région
malaise et 15 000 pour l'Inde); Australie 20 000. A titre de
comparaison, rappelons quelques nombres d'espèces
estimés pour les régions extratropicales les plus riches :
17 000 espèces en Amérique du Nord, 20 000 sur le
pourtour méditerranéen, 20 000 en Afrique du Sud. La flore
de plantes vasculaires d'Europe compte 12 500 espèces
connues.
Pour donner une autre idée de la richesse spécifique on peut
aussi, sans quitter la France, comparer (tab. I) la diversité
spécifique du territoire métropolitain (pourtant le 5e pays
d'Europe le plus riche en espèces), avec celles de Nouvelle
Calédonie (Morat, 1993) et de Guyane, qui ont un nombre
La moitié des espèces végétales connues habitent les forêts
denses humides.
C'est dans ces forêts que se trouve probablement la majorité
des espèces qui restent à découvrir et, bien sûr, que
l'inventaire est le moins avancé. Pour ces raisons, quand on
parle des problèmes liés à l'inventaire des régions
intertropicales, il s'agit essentiellement des forêts et
particulièrement des forêts denses humides. Cela ne doit
pas conduire à l'idée que les autres composantes de la
végétation tropicale sont suffisamment connues. Le
problème des forêts sèches est également crucial : plutôt
moins riches en espèces et mieux connues, elles sont
extrêmement fragiles, partout surexploitées et
particulièrement menacées, par exemple au Mexique
(Rzedowski 1978), à Madagascar (Sussman et Rakotozafy,
1994), en Inde.
La mauvaise connaissance des flores des forêts tropicales
est difficile à imaginer pour quiconque est habitué à la flore
tempérée, surtout celle d'Europe du Nord. Il y a à notre sens
trois raisons principales à cela :
- les forêts tropicales sont d'une immense diversité
biologique, on vient de le souligner sur le plan global. Pour
illustrer autrement ce fait, comparons par exemple le
(*) Ce sujet a fait l'objet d'une conférence aux Journées annuelles de la Société française de systématique en septembre 1994.
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Tableau III. Nombre d'espèces ligneuses répertoriées
dans un hectare de forêt tropicale
arbres de dbh > 10 cm
d'après Phillips et al. 1994
Région
nombre d'espèces/ha
Amérique tropicale
Afrique tropicale
Asie tropicale
Australie (Queensland)
Amérique du Nord
60-283
56-92
100-210
108
10-30
nombre d'espèces d'arbres relevés dans des inventaires
exhaustifs de parcelles de forêt (tableau III) ; les chiffres
fournis ici pour l'Amérique du Nord correspondent à la
diversité la plus élevée relevée en région tempérée ;
- une autre raison tient aux difficultés d'accès, à 2 niveaux :
les forêts tropicales préservées étant, par définition, peu
accessibles, leur prospection demande temps et
infrastructure importante, que ce soit pour des expéditions
itinérantes ou pour l'accès à des sites isolés, donc en tout
cas de bons moyens financiers ; d'autre part, pour atteindre
la voûte forestière, une riche imagination est nécessaire,
mais pas toujours suffisante : excellents grimpeurs, matériel
sophistiqué (incluant le « radeau des cimes », Halle et
Blanc, 1990) n'ont pas encore vaincu toutes les difficultés
d'accès aux strates supérieures des hautes forêts tropicales
(Wilson, 1991). Nous n'évoquerons pas plus ici les moyens
destructeurs (coupes, exploitations de minerais, mise en eau
de barrages hydroélectriques, etc.) si ce n'est pour les
regretter... mais rappelons toutefois (nous y reviendrons)
que les destructions ont jusqu'à présent fourni la plupart des
occasions de prospection et d'inventaires pendant ce siècle ;
- enfin, les pays tropicaux ont généralement des difficultés
économiques et politiques telles qu'ils ne consacrent
pratiquement pas de moyens à ce type de travaux.
L'état des inventaires sur le plan mondial a été bien illustré
par Frodin (1984, carte p. 20), qui répartit les terres
émergées en 5 zones délimitées en fonction de l'évaluation
de 4 critères majeurs : (1) importance des travaux
floristiques, en quantité et qualité ; (2) indices de densité de
collections ; (3) estimation du pourcentage d'espèces non
décrites ou non répertoriées ; (4) état des données de
distribution géographique. Il apparaît nettement que les
zones considérées comme correctement connues sont très
minoritaires et que toute la bande intertropicale, à très peu
d'exceptions près, se situe dans des zones où les inventaires
sont les moins avancés. Cette carte a été établie en 1979,
mais il est peu probable hélas que des changements
significatifs se soient produits depuis 15 ans.
Plus récemment, un point global (sinon réellement
exhaustif) a été publié dans un ouvrage collectif (Campbell
et Hammond, 1989) destiné à alerter la communauté
internationale sur la grave insuffisance des inventaires
floristiques des régions tropicales. Nous y avons puisé une
bonne partie des informations rapportées ici. Hélas il s'agit
de données qui datent à présent de plus de dix ans. Pour des
raisons pragmatiques évidentes, les données y sont, à
quelques exceptions près, compilées par pays et non par
région biogéographique. Nous avons ajouté des données
plus récentes mais ponctuelles, et souvent difficiles à
comparer aux autres.
2. Inventaires et production de données
fiables
De quels critères dispose-t-on pour évaluer l'état des
inventaires et leur avancement ? La première question, qui
n'est pas exclusive aux flores, est la suivante : « qu'est-ce
qu'un inventaire complet ?» ; la réponse est aussi simple en
théorie que sa mise en application est inaccessible, surtout
sous les tropiques. Plus pragmatiquement, la question peut
devenir : « à quelles conditions un inventaire peut-il être
considéré comme satisfaisant ? ». Les critères sont de deux
sortes (tab. IV) : évaluation de la quantité et de la qualité
des données (à gauche), évaluation de la fiabilité et de la
qualité des informations qui en sont issues (à droite).
Ce tableau appelle quelques remarques complémentaires :
- énoncer qu'un inventaire est complet lorsque la
prospection ne fournit plus de données nouvelles,
taxinomiques (taxons nouveaux pour la science ou pour la
localité prospectée) ou écologiques semble un truisme
inutile. Mais il nous paraît utile de le mentionner, tant la
découverte d'espèces nouvelles de plantes est courante
(« routinière ») en forêt tropicale ;
- le taux d'espèces connues par un très petit nombre de
spécimens en collection est élevé. Ces taxons, même
« officiellement » répertoriés, ne peuvent être caractérisés
et décrits de façon satisfaisante ; le problème des « espèces
rares » est en effet couramment évoqué par les botanistes
tropicalistes. De telles lacunes peuvent compromettre la
fiabilité des distributions géographiques, des estimations de
taux d'endémisme, etc. ;
Tableau IV. Critères pour l'évaluation des inventaires
les données de l'inventaire
les informations issues de l'inventaire
l'inventaire est « satisfaisant » lorsque :
1.
- l'indice de densité de collections
(nombre de spécimens/100km2) est suffisant
- la prospection ne fournit plus de données
nouvelles, taxinomiques ou écologiques
(taxons nouveaux)
- tous les taxons sont représentés par un
nombre suffisant de collections
(variabilité intraspécifique, biologie, écologie)
(problème des « espèces rares »)
2.
les descriptions, monographies, flores, sont publiées
3.
les bases de données informatisées sont
disponibles et mises à jour
estimation du taux d'endémisme
fiabilité des données de distribution géographique
progrès en taxinomie etphylogénie
estimation du % d'espèces non décrites
ou non répertoriées
conservation et zones à inventorier en priorité
priorités d'études taxinomiques
Cartes de végétation
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- l'indice de densité de collections correspond, pour une
région donnée, au nombre de collections par unité de
surface de 100 km 2 : un chiffre extrêmement arbitraire et
souvent biaisé car, rapporté à l'échelle d'un pays ou d'un
secteur géographique, il gomme complètement les
différences souvent considérables dans la prospection des
différents points de ce pays ou secteur, mais quantitatif et
qui ne préjuge pas de la richesse spécifique dans
l'évaluation des besoins en prospection. Quoi qu'il en soit,
les niveaux extrêmement faibles qu'il atteint dans les
régions tropicales justifient qu'on y accorde quelque
intérêt ;
- la publication des données de l'inventaire : monographies
et flores, est une étape cruciale. Ce point sera développé en
détail plus loin ; signalons seulement ici que moins d'une
plante tropicale connue sur deux est décrite dans une flore ;
- les bases de données informatisées sont devenues
indissociables de l'avancement des inventaires floristiques ;
de leur développement dépend l'efficacité des progrès futurs
dans ce domaine ;
- les cartes de végétation sont une production très
importante, qui nécessitent entre autres les données des
inventaires ; disons seulement qu'elles sont globalement très
insuffisantes dans les régions tropicales ;
- enfin, quand on connaît les taux actuels et futurs de la
déforestation, et les estimations du nombre d'espèces
destinées à disparaître dans un avenir proche (parfois même
avant d'avoir été découvertes), il est logique que la question
de l'efficacité des méthodes d'inventaire se pose. On
l'évoquera avec quelques exemples, en relation avec les
priorités pour l'inventaire et la conservation.
Avant de reprendre plus en détail les points qui viennent
d'être mentionnés, on illustrera par quelques exemples
concrets la situation des inventaires botaniques relevée dans
quelques pays.
Etat de l'inventaire botanique :
quelques exemples
Asie
Chine tropicale et Taïwan
Taïwan mérite d'être mentionné car l'île est correctement
prospectée. 1 800 espèces de phanérogames sur 4 300 sont
endémiques (40%).
En Chine, près de la moitié des espèces recensées
appartiennent à la zone tropicale, considérée comme
correctement prospectée sur 80% de son territoire. Le
programme « Flora of China » lancé en 1958 (80 volumes
pour 30 000 espèces) était achevé aux 2/3 en 1990 ; cette
flore a été menée dans l'isolement complet dû à la situation
politique, ce qui a conduit à de sérieux problèmes
taxinomiques et nomenclaturaux. Actuellement la Flora of
China est en cours de révision et de traduction en anglais,
dans un programme qui associe le Missouri Botanical
Garden (Saint-Louis, Missouri) et la Chine.
Philippines
Les terres émergées de cet archipel ont une surface totale à
peine supérieure à la moitié de la France. On estime
actuellement à 8 000 espèces le nombre de phanérogames,
dont la moitié d'endémiques. Il n'existe aucune flore
générale des Philippines. Le seul ouvrage disponible est
Flora of Manila (1912) ; les autres publications floristiques
concernent plutôt les champignons et les mousses. Le
territoire philippin est concerné par le programme « Flora
Malesiana », qui sera évoqué en détail plus loin. Toutefois
la perspective très lointaine d'aboutissement de ce
programme a suscité la mise en place en 1991 du
« Philippines Flora Project », grâce une équipe dynamique
qui s'est fixé pour objectif la rédaction d'une flore en dix
ans. La première étape consiste en un important programme
de collecte et 75 000 collections au total sont attendues : ce
nombre, en apparence élevé, suffira à peine à porter l'indice
de densité de collection au minimum arbitraire de 100
spécimens par 100 km 2 (Van Steenis avait estimé l'IDC à
62 en 1962). Deux organismes américains (NSF, US
Agency Int. Dev.) soutiennent ce programme mené par le
Philippines National Muséum et Collection management
Program.
Asie du Sud-Est, Cambodge, Laos, Viet-Nam
La Flore générale de l'Indochine (éditée par le Laboratoire
de Phanérogamie, M N H N Paris) publiée entre 1905 et
1952, s'est révélée rapidement incomplète ; sa révision a
débuté en 1960 sous le nom de Flore du Cambodge, du
Laos et du Vietnam et est toujours en cours. Depuis les
grandes expéditions de prospection botanique conduites au
début du siècle (Père Bon, Pételot, Pierre, Poilane, Thorel),
la situation politique dans cette région n'a évidemment pas
permis d'enrichissement significatif des collections.
Nouvelle-Guinée
Pour Frodin (in Baas et al. 1990), les progrès ont été
significatifs en Papouasie-Nouvelle-Guinée entre 1940 et
1975, grâce notamment à l'activité de C.G. van Steenis.
L'indice de densité de collection pendant cette période
serait passé de 12 à 28. Par la suite, les difficultés politiques
ont empêché les progrès dans cette région, comme dans la
partie indonésienne de l'île (Iryan Jaya). La prospection
reste toutefois tout à fait insuffisante, de sorte qu'il est
encore à l'heure actuelle impossible de distinguer les zones
les plus riches de cette île dont la diversité floristique est
particulièrement élevée.
Afrique et Madagascar
C'est sur le continent africain que la situation des
inventaires et des flores est globalement la plus sombre. Le
fait que l'Afrique présente une diversité inférieure à celle
des autres continents n'est pas réconfortant pour autant.
La carte d'Afrique (fig. 2) donne l'estimation du nombre
d'espèces par pays (d'après Lebrun, 1976 mis à jour par
Morat & Lowry, 1993 pour le Congrès de Botanique à
Tokyo). On voit aussi sur cette carte les régions concernées
par les grands projets de flores. Plusieurs programmes de
flores des pays d'Afrique ont été élaborés dans la logique
des influences coloniales, généralement entre les deux
guerres mondiales. Trois pays n'ont absolument aucun
projet de flore en cours : le Congo, le Tchad, le
Centrafrique et il n'est pas possible d'estimer l'état
d'avancement de leurs inventaires. La flore du Gabon et
celle du Cameroun sont publiées depuis 1961 et 1963
respectivement par le laboratoire de Phanérogamie du
Muséum.
Afrique centrale
Nous disposons pour l'Afrique centrale de statistiques
récentes sur la flore des spermaphytes, portant sur la
période 1940-1994 (Léonard 1994). En 1946, Robyns avait
estimé le nombre d'espèces d'Afrique centrale à 9705. En
1948 débute la préparation de la Flore du Congo Belge et
du Rwanda-Burundi, devenue depuis Flore de l'Afrique
centrale. En près de 50 ans, 4 636 espèces ont été décrites à
un rythme d'environ 120 par an, dont 697 nouvelles (15%).
Les révisions taxinomiques ont conduit à de nombreuses
mises en synonymie, que ne compensent pas les espèces
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nouvelles, si bien que Léonard estime aujourd'hui à 9 377 le
surface, elles sont incomparablement plus gravement
nombre de spermatophytes dans cette région (un tiers
menacées. La diversité est de l'ordre de 150 espèces à
resterait donc encore à décrire pour terminer la Flore).
l'hectare (un chiffre faible par rapport aux plus riches forêts
Permettons-nous ici une remarque plus qu'anecdotique :
amazoniennes, mais à peu près de l'ordre de celui des forêts
parmi les 53 botanistes qui ont participé à cette flore juqu'à
« pauvres » d'Afrique). En nombre d'epèces, ces forêts
présent, 35 sont belges et un seul est zaïrois !
représentent 10% des plantes vasculaires (nombre total
d'environ 25 000 espèces). L'état du Queensland est le plus
Madagascar
concerné par ce type de végétation ; il était considéré en
Un historique de l'étude systématique des plantes de
1983 comme correctement inventorié, avec un indice de
Madagascar est proposé par Labat & Rakouth (1991), à
densité de collections de 200 spécimens/100 km 2 environ.
partir de l'exemple des Légamineuses-Papilionoideae.
Un net dynamisme dans le domaine de l'étude de la flore et
Les estimations du nombre de plantes vasculaires de
de la végétation s'est traduit ces dernières années par la
Madagascar sont comprises entre 8 500
(White, 1983) et 12 000 (Dejardin et al.
1973) ; il s'agit donc d'une flore tropicale
riche ; mais surtout, le taux d'endémisme
est extrêmement élevé, proche de 80%.
Mais pour une grande famille comme les
Légumineuses, ce taux est plus faible, de
l'ordre de 67% (Labat et Du Puy, 1994).
La flore de Madagascar (éditée par le
laboratoire de Phanérogamie du Muséum) a
commencé à paraître en 1936. Quatre des
40 familles (Euphorbiaceae, Leguminosae,
Gramineae et Rubiaceae) qui restent
encore à traiter représentent au moins 20%
de la flore de phanérogames. De plus,
Morat et Lowry (1993) estiment que toutes
les familles traitées avant 1960 ont besoin
d'une révision. Ce qui ne serait pas un luxe
si l'on suppose que toutes les familles sont
dans le même cas que les Palmiers, dont la
révision comprend 60 nouvelles espèces,
soit 36% des 170 espèces répertoriées
(Beentje, 1994).
En ce qui concerne l'importance des
collections, Dorr (in Campbell et
Hammond, 1989) estime qu'environ
260 000 spécimens botaniques ont été
collectés, ce qui porte l'indice de densité de
collection à 44 spécimens/100 km 2 . Ce
chiffre paraît satisfaisant. Toutefois la
partie orientale de la forêt dense humide,
ainsi qu'une grande partie de la forêt
caducifoliée de la façade occidentale,
restent très insuffisamment prospectées.
Un projet intitulé « Conspectus des plantes
vasculaires de Madagascar » s'est mis en
place en 1992, grâce à une coopération
internationale impliquant plusieurs
institutions : le Missouri Botanical Garden
(USA), le Muséum (Paris), le Parc de
Figure 2. Nombre d'espèces de végétaux vasculaires en Afrique
Tzimbazaza et le Centre national de la
En gras : les limites des territoires des grandes flores
recherche appliquée au développement
D'après Philippe Morat.
rural (Madagascar). L'objectif est de rendre
facilement accessible l'information sur tous
les noms attribués aux plantes vasculaires
de Madagascar. Pour sa réalisation, ce
mise en place d'équipes solides dans les grands centres
projet s'appuie sur la base de données développée sous le
universitaires et jardins botaniques, avec un effort marqué
système d'informatisation Tropicos. Ce projet a été présenté
dans le domaine de l'informatisation. Les effets se font dès
en détail par Schatz et al. (1994) au dernier colloque de
à présent sentir. Flora australiensis de Bentham, terminée
l'AETFAT (Association pour l'étude taxinomique de la
en 1878, traitait à peine le tiers des espèces aujourd'hui
flore d'Afrique tropicale).
dénombrées.
La flore moderne d'Australie, programmée sur 30 ans et 48
Australie
volumes, a commencé à paraître en 1979, mais avec une
Les documents que nous avons utilisés traitent de la forêt
progression de 1 volume par an jusqu'en 1994. Un tel délai
humide tropicale d'Australie, qui couvre en fait des surfaces
a paru trop long avant d'avoir accès aux espèces des flores
réduites par rapport aux régions sèches. Cependant leur
mal connues comme celles des forêts humides du nord-est,
diversité est beaucoup plus élevée et, du fait de leur faible
particulièrement menacées. Un manuel d'identification des
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Courrier de l'Environnement de l'INRA n°27, avril 1996
arbres du Nord Queensland (Hyland, 1982) comble
partiellement cette lacune ; de l'avis de son auteur, sur les
800 arbres pris en compte, 130 sont à collecter de nouveau
avant de les redécrire.
Mais l'Australie n'est pas au bout de ses peines. Ce payscontinent héberge quelques uns des genres d'Angiospermes
les plus diversifiés (en particulier Acacia et Eucalyptus), et
l'actualité récente a montré de façon spectaculaire qu'il n'a
sans doute pas fini de réserver des surprises aux botanistes,
comme en témoignent les découvertes successives des
« pins de Wollemi » et des « noix de Mount Bartle Frère »
(Holden, 1995).
Amérique
Mexique
La majeure partie du territoire mexicain est situé dans la
zone tempérée. Le Mexique est l'un des pays de plus forte
diversité végétale, avec près de 25 000 espèces de plantes
vasculaires répertoriées (Rzedowski 1978 ; Toledo, 1988,
1993).
Il n'y a pas de programme global pour la flore du Mexique.
Toutefois ce pays démontre un dynamisme évident dans le
domaine de l'inventaire floristique et de la taxinomie,
comme en témoignent les différents programmes menés par
les taxinomistes mexicains, parfois avec une collaboration
nord-américaine.
Les efforts portent sur les flores régionales, qui concernent
soit des entités politiques, soit des régions naturelles. On
mentionnera Flora del Valle de Mexico (éditée par J.
Rzedowski), dont le troisième et dernier volume est paru en
1991 ; Flora de Veracruz, projet mexicain de l'Instituto de
Ecologia, est une flore de type monographique dont 73
volumes sont parus, à partir de 1978 ; Flora de Oaxaca,
Flora de Tehuacan sont des projets mexicains d'inventaires
et de flores de régions à endémisme et richesse floristique
élevés, pilotés par l'Instituto de Biologia de l'UNAM
(Universidad Nacional Autonoma de Mexico). Lancés en
1990, ces projets sont au stade des prospections
d'inventaire, ainsi que Flora del Bajio y de regiones
adyacentes. Parmi les projets nord-américains, mentionnons
Flora ofNueva Galicia (université du Michigan), et Flora
of Chiapas (université de Californie). On trouvera dans
Chiang (1993) une liste complète des flores et des
principales monographies disponibles.
Signalons en outre que le sud du Mexique est concerné par
le programme international Flora Mesoamericana dont il
sera question plus loin. L'herbier (Mexu) de l'UNAM y
participe activement.
Depuis plus de 10 ans et le début des programmes
d'informatisation, de nombreuses listes floristiques ont
également été publiées, soit pour des Etats comme le
Chiapas, Quintanaroo, soit pour des régions ou réserves
naturelles, comme celle de Chamela, ou même par type de
végétation, par exemple les plantes aquatiques. Ici la
priorité est la mise à disposition des scientifiques et des
étudiants de l'information scientifique sous une forme
abrégée mais rapidement publiée.
Depuis quelques années, un Conseil national de la flore du
Mexique s'est donné pour objectif de rassembler les
données floristiques et d'encourager la publication de
monographies.
Un tel dynamisme des travaux d'inventaire et de floristique
constitue hélas une exception en milieu tropical. Il s'est
développé, tant en recherche qu'en formation, grâce à un
cadre institutionnel favorable, universitaire ou non.
L'existence au Mexique de 58 herbiers institutionnels est
également à souligner, et notamment le très actif Herbier
national (MEXU) et ses 472 000 spécimens représentant
25% des collections mexicaines. Le nombre de spécimens
déposé dans les institutions mexicaines a presque quadruplé
en 1976 et 1989. Il y aurait approximativement deux
millions de spécimens (champignons et tous groupes
végétaux) dans les herbiers mexicains, et près de 1 800 000
dans 41 herbiers étrangers (Grether 1993). Nombre des
réalisations mentionnées plus haut n'auraient pas vu le jour
sans la détermination et la compétence de J. Rzedowski,
auquel il faut rendre hommage.
Brésil
Ce pays a donné la première Flore tropicale, Flora
Brasiliensis (Martius et ai), décrivant 23 000 espèces entre
1840 et 1906. Ce monument (40 volumes in-folio) reste une
base incontournable pour nombre de travaux actuels.
En effet il n'y a pas à l'heure actuelle de programme de flore
en cours au Brésil.
Un vaste projet, le Programa Flora, a été mis en place par
le CNPQ (équivalent brésilien du CNRS) en 1977, avec
pour objectifs prioritaires d'avancer l'inventaire (collecter et
produire une base de données informatisée des collections),
et de former des botanistes brésiliens. Ce projet comprenait
cinq unités régionales : deux d'entre elles n'ont jamais
démarré et les trois autres ont fonctionné pendant une
dizaine d'années : Nordeste, Centre-Ouest et Amazonie,
puis ont cessé leur activité en raison de l'arrêt du
financement.
L'Amazonie représente a juste titre un point
particulièrement sensible en raison de l'immensité de son
territoire, de sa diversité et de la gravité des atteintes qui lui
sont portées.
La partie amazonienne du Programa Flora fut la plus active.
En effet, dans le cadre de « Projeta Flora Amazonica », 30
expéditions ont été réalisées entre 1977 et 1987, avec la
coopération d'institutions botaniques américaines,
notamment le New York Botanical Garden. Il faut préciser
que les expéditions d'inventaire et de collectes se sont le
plus souvent organisées « à la faveur » des programmes...
de destruction des forêts. Depuis mi-1960, la construction
des routes transamazoniennes et les différentes
implantations humaines, planifiées par le gouvernement
brésilien, ont provoqué des dégradations jusque dans des
territoires auparavant préservés par l'éloignement et
l'inaccessibilité. Pour les ouvertures de routes, quelques
repères chronologiques : Belem-Brasilia 1960,
Transamazonica 1968, Manaus-PortoVelho, CuiabaPortoVelho 1967, Manaus-Caracarai 1975; CalhaNorte
entreprise en 1980 et non terminée. La construction de
barrages (Tucurui, Balbina, Samuel, Cachoiera Porteira),
les exploitations minières (Carajas, Trombetas, Projeto Jari,
etc.) ou papetières ont aussi apporté leur lot de destruction
(Rankin-de-Merona et al., 1990). Dans ce contexte, les
prospections botaniques ont été le plus souvent
partiellement financées par contrats avec les promoteurs des
projets routiers ou industriels et correspondaient à des
« études d'impact ». Dans de telles conditions, il n'est pas
surprenant qu'à l'heure actuelle les zones à peu près
correctement collectées soient essentiellement : 1) les
abords des grandes villes où une institution botanique est
implantée (Manaus, Belém), 2) les rives des fleuves, 3) les
bords des routes ouvertes depuis 1960,4) certains sites
promis à la destruction par de grands projets « de
développement » (barrages, mines à ciel ouvert, usines de
pâte à papier, etc.).
L'activité d'inventaire et de récolte a toujours été sporadique
et insuffisante, mais elle n'a jamais cessé depuis la fin du
siècle dernier, excepté peut-être entre 1910-1930. Le
84
Courrier de l'Environnement de l'INRA n°27, avril 1996
Projeto Flora a permis de collecter près de 30 000
spécimens de plantes vasculaires, en fait un chiffre dérisoire
pour un territoire d'une telle étendue. L'indice de densité de
collections global pour le Brésil reste faible (25
spécimens/100 km 2 ) ; d'ailleurs les botanistes se refusent à
prendre un tel paramètre en compte pour un territoire
comme l'Amazonie, où de très grandes surfaces demeurent
non prospectées. A l'heure actuelle, il reste impossible :
- de tracer des limites fiables de la forêt amazonienne et de
distinguer avec précision les ensembles
phytogéographiques qu'elle comporte ;
- de dresser une liste floristique des espèces de l'Amazonie,
et encore moins de décrire l'extension géographique de
milliers d'espèces considérées comme rares ou endémiques,
car elles ne figurent dans les collections que par un très
faible nombre de spécimens.
En dehors de l'Amazonie, quelques programmes
d'inventaires ponctuels se poursuivent, généralement dans
le cadre de parcs naturels non forestiers (Campo Rupestre
sur les hauts plateaux du sud-est, Mata do Pico, etc.) et dans
les lambeaux de forêt épargnés de la côte atlantique et du
Nordeste. Ces programmes bénéficient souvent d'une
coopération avec le New York Botanical Garden ou les
Royal Botanic Gardens de Kew.
Au Mato Grosso, un comité botanique « Mato Grosso
Botanical Committee » s'est constitué en 1994. Il comprend
10 membres : 9 européens et un seul brésilien. Ses objectifs
restent modestes : établir un catalogue des plantes à fleurs
de cet Etat, et développer un réseau de botanistes pour
développer les études floristiques...
Un seul Etat du Brésil mène la publication de sa flore
(Santa Catarina, non tropical).
ce seuil arbitraire, déjà extrêmement faible, est pourtant
rarement atteint dans les pays ou régions de la zone
intertropicale (tableau V ) . Campbell (1989) considère
d'ailleurs seulement les zones dont l'IDC est inférieur à 50
comme insuffisamment prospectées ! Ces données
deviennent encore plus inquiétantes lorsqu'on y associe les
taux d'accroissement récent de ces collections.
Guyanes
Leur situation de colonie européenne n'a pas
considérablement favorisé la progression de l'étude de leur
flore, si ce n'est dans les années 1930-1960, grâce à
l'implantation de services forestiers. Le Surinam (exGuyane hollandaise) fut le plus actif au X X e siècle, comme
en témoigne Flora of Suriname (Pulle et al, 1928-1955, +
additions et corrections, 1975-1977). Cependant ce pays
reste insuffisamment prospecté, et la situation politique
interdit tout progrès depuis dix ans. En Guyane française
c'est principalement l'ORSTOM qui a, depuis 1965, assuré
un effort de prospection et d'inventaire ; cet effort s'est
concrétisé par la création d'une base de données
informatisée (Hoff, 1989). Au Guyana (ex-Guyane
britannique), des programmes de prospection et de collectes
sont soutenus par l'université d'Utrecht (Pays-Bas) et la
Smithsonian Institution (USA) qui a ouvert un poste de
collecteur permanent en 1988. Plusieurs institutions
botaniques sont associées depuis 1984 dans le projet « Flora
of the Guianas » (édité par l'université d'Utrecht), qui s'est
donné pour objectif de publier en vingt ans la totalité de la
flore de cette région. Mais à la moitié de l'échéance, on peut
estimer à environ seulement 1/5 le nombre des taxons
publiés.
' Les Antilles atteignent un chiffre comparable.
Progression des inventaires :
problèmes actuels
1. Prospection
L'indice de densité de collections et sa progression
Les botanistes considèrent un indice de densité de
collections (IDC) de 100 spécimens par unité de surface de
100 k m 2 comme un minimum acceptable de prospection ;
Tableau V. L'indice de densité de collections et
son évolution
D'après Campbell, 1989
en 1981
nbre de
collections
pour 100 km2
Iles du
Pacifique *
Taïwan
El Salvador
Malaisie
Sri Lanka
Inde
Kenya
Mexique
Colombie
Brésil
Cameroun
Madagascar
Guyanes
Bolivie
accroissement
1974-1981
(nbre de coll.
/100km2/an)
529
6,5
534
268
219
152
108
64
48
30
25
10
9
11
1
0,5
10
2
nombre
d'années
nécessaires
pour atteindre
un IDC de 100
3,27
0
1,5
4
1,8
1,4
1,38
0,1
0,12
0,14
27
13
39
59
65
?
740
707
Les chiffres du tableau V correspondent aux collections
dénombrées dans les herbiers locaux en 1981 (d'après
Campbell et al, 1989) ; malgré leur relative ancienneté et
leur possible sous-estimation, au moins dans certains cas,
ces chiffres fournissent un ordre de grandeur et un point de
comparaison et il est hélas peu probable que beaucoup de
pays aient dans les 15 dernières années bénéficié d'une
significative augmentation de l'IDC (voir plus loin). Ce
tableau concerne quelques pays seulement. Cependant, tous
les pays qui avaient en 1981 un IDC supérieur à 100 y
figurent, cela souligne d'une part que ces derniers font
figure d'exception, d'autre part que tous ceux qui ne figurent
pas ont un indice inférieur à 100, et le plus souvent plutôt
inférieur à 50 : on illustre donc ici en quelque sorte la
variation dans la médiocrité... Pour mémoire, l'IDC en
France métropolitaine serait de 550-600. A vrai dire
l'enquête n'a jamais été faite, mais elle serait actuellement
en cours (G. Aymonin, comm. pers., sept. 1994).
L'IDC du Brésil paraît faible : on peut arguer qu'il ne prend
pas en compte les récents efforts de collecte que nous avons
mentionnés plus haut, par exemple ceux effectués jusqu'en
1987 dans le cadre du Projeto Flora. En fait, il faut le
souligner, ces enrichissements sont plutôt négligeables en
terme de densité de collections : rapportés à la surface de
l'Amazonie, ils correspondraient à une augmentation de
l'IDC de seulement 1 point...
En ce qui concerne l'estimation du temps qu'il faudrait, avec
les données de 1981, pour obtenir des densités de
collections de 100 espèces/100 km 2 , la majorité des pays se
plaçaient au delà de 50 ans, et jusqu'à des chiffres
impressionnants comme ceux de la Bolivie, voire
supérieurs. Pour tous les pays d'Afrique tropicale, excepté
le Kenya et le Sierra Leone, le chiffre est compris entre 50
Courrier de l'Environnement de l'INRA n° 27, avril 1996
et l'infini. Une régression sensible a eu lieu pour l'Afrique
depuis les années 70-80, alors que la tendance s'inverse à
peu près partout en Amérique depuis les dix dernières
années. En effet, il faut reconsidérer avec plus d'optimisme
les affligeantes estimations concernant la Bolivie et les
Guyanes, car des programmes d'inventaire s'y développent
depuis 1981, tout comme à Madagascar.
Pour conclure sur ce point, il apparaît donc, même en
considérant que certains chiffres sont en réalité plus élevés,
que les besoins en prospection et échantillonnage sur le
terrain sont encore énormes, si l'on veut espérer disposer de
données fiables sur la diversité des plantes tropicales...
Inventaires et bases scientifiques pour la biogéographie et
la conservation
L'insuffisance des données d'inventaire peut conduire à des
artefacts lors de l'évaluation de la richesse spécifique, ou
des taux d'endémisme, dans des régions données. Ces
artefacts alimentent à l'heure actuelle les débats théoriques
sur la biogéographie (théorie des refuges...).
Prenons en deux exemples, dans le domaine de
l'Amazonie :
- en considéra
nt que les zones de plus forte diversité spécifique sont les
plus anciennes, et que des espèces endémiques d'une région
se sont différenciées à la faveur d'un isolement
géographique, Prance (1982, 1987) a établi une carte des
zones refuges de forêt dense humide en Amazonie, pendant
les périodes sèches du Pléistocène, fondée sur l'évaluation
de la richesse spécifique et du taux d'endémisme de certains
groupes de plantes à fleurs, dans différentes régions. Mais il
semble que de tels résultats soient à considérer avec
beaucoup de précaution. Des botanistes brésiliens ont
montré par la suite (Nelson et ai, 1990) la troublante
ressemblance entre l'emplacement des zones refuges de
Prance et celle des indices de densités de collections
établies à partir de spécimens conservés dans l'herbier de
Manaus. La plupart des « refuges » se trouvent en effet
dans des zones relativement bien prospectées, autour des
grandes villes (Manaus, Belém), dans certains sites
riverains de l'Amazone (Tefe) ou des sites d'implantation de
projets de développement ;
- à une échelle beaucoup plus fine, la comparaison de la
répartition des taux d'endémisme et des densités de
collection en Guyane française montre aussi des relations
curieuses entre les deux paramètres. Granville et Hoff
(1995) examinent en détail cette question, grâce à des
données chiffrées établies à partir de la base de données
informatisée Aublet, et présentées sur une carte quadrillant
la Guyane en carrés de 750 k m . Cet exemple montre en
outre l'intérêt et les possibilités d'exploitation d'une base de
données comme celle qu'ont réalisée les botanistes de
l'ORSTOM, pour les collections et les espèces de Guyane
française. Il n'y a pas à notre connaissance d'autre région où
ce genre de statistiques soit possible, même en France
métropolitaine.
2. Nature, contenu et avancement
des « publications d'inventaire »
"Aflora is only useful after it is completed" (van Steenis,
cité par Geesink, 1990).
La question de la publication des données de l'inventaire est
particulièrement cruciale : rappelons que la moitié à peine
des espèces de plantes vasculaires répertoriées sont
actuellement accessibles dans des flores (40% pour
l'Amérique tropicale, Mori 1992).
85
Il s'agit principalement de deux grands types d'approche :
les monographies et les flores. Nous ne disposons pas de
statistiques sur la proportion d'espèces traitées dans des
monographies. Ces dernières sont nombreuses pour des
taxons de rang inférieur (genres, ou groupes de genres),
surtout à l'échelle régionale, ou continentale, beaucoup plus
rares sur un domaine taxinomique plus vaste ou à l'échelle
mondiale... En fait, ce sont les flores dites monographiques
qui remplissent le rôle de mise à disposition de
l'information complète sur les taxons.
En outre, se développent ces dernières années les
inévitables listes floristiques (« checklists »). Dans les
conditions actuelles de pénurie flagrante de documents, et
face à l'urgence extrême qu'il y a à les produire, la question
des choix de stratégie se pose pour leur publication. Mais
faut-il vraiment choisir ?
Les différents types déflores
Depuis les flores « synoptiques », jusqu'aux flores dites
monographiques ou semi-monographiques, les différents
types de flores correspondent à des contenus, voire à des
philosophies différentes : conceptuellement, elles se
répartissent globalement en deux groupes, selon qu'elles
contiennent ou non les éléments d'une révision
taxinomique.
Une flore synoptique livre juste ce qu'il faut pour identifier
un spécimen : clé et description succincte. Elle s'appuie sur
les connaissances disponibles au travers de diverses
publications taxinomiques et de l'expérience acquise par
l'auteur sur la flore de la région traitée. Dans cette catégorie
se placent la plupart des « petites flores » et des flores
locales. Pour autant, dans le monde tropical, une flore
synoptique, pas plus qu'une flore locale, ne se présente
comme un livre de poche : ainsi la flore antillaise de
Fournet (1978), Flora of Barro Colorado Island (Croat,
1978) ou le récent ouvrage de Gentry (1993).
Une flore monographique contient, en plus des clés, la
révision taxinomique du groupe traité (espèces nouvelles,
synonymies, etc.), ainsi que les descriptions aussi
exhaustives que possible des espèces. Ces documents
remplissent en fait le double rôle de flore et de publication
taxinomique, ce qui ne facilite pas l'accès à des utilisateurs
non spécialistes. La plupart des flores nationales entrent
dans cette catégorie, on les qualifie alors souvent de « flores
semi-monographiques » probablement parce que, à
l'échelon d'un pays, peu d'entités taxinomiques complètes
sont concernées. Mentionnons par exemple les flores des
ex-colonies françaises, africaines {Flore du Cameroun,
Flore du Gabon, Flore de Madagascar) ou asiatiques
{Flore du Cambodge, Laos, Vietnam) ou encore la Flore de
Nouvelle-Calédonie, pour citer les travaux français édités
au Muséum (Paris) ; ou encore les flores de certains pays
d'Amérique latine (Colombie, Guatemala, Panama, Pérou,
etc.).
Les grandes flores tropicales et leur avancement
Signalons d'emblée qu'au taux actuel de publication, il
faudrait environ 400 ans pour terminer Flora Neotropica, et
plus de 150 pour Flora Malesiana, deux « mastodontes »,
et que la flore d'Afrique du Sud est à peu près dans le même
cas.
La Flore de l'Afrique de l'Ouest (FWTA) a réussi, en un
court délai, à mettre à la disposition des biologistes un
document pratique pour accéder aux espèces les mieux
connues. Mais c'est une flore synoptique, rapidement
apparue très incomplète. Il n'y a pas actuellement de projet
de mise à jour, les flores en cours des pays d'Afrique
utilisant le modèle régional, semi-monographique. Flora
Mesoamericana est également une flore synoptique, de
86
format (au sens plutôt anglais du mot) identique à celui de
Flora Europaea, dépourvu d'illustration.
La publication plus rapide des flores de zones tempérées est
due au nombre plus élevé de rédacteurs et à la meilleure
connaissance de la flore.
Le temps nécessaire pour terminer une flore dépend donc,
c'est évident, du nombre d'espèces, du format choisi, de
l'avancement des prospections d'inventaire préalable mais
aussi, et surtout, de la « main-d'oeuvre » : tout cela a été
souvent dit et écrit, depuis trente ans (De Wolf, 1964). La
situation actuelle était en théorie prévisible, mais l'évolution
des priorités scientifiques telle qu'elle s'est produite depuis
ne l'était sans doute pas !
L'avancement de la publication des flores se heurte
aujourd'hui à deux problèmes majeurs : choix du type de
publication, ressources humaines.
Les choix stratégiques pour l'édition des flores
Les flores des régions tropicales sont donc des documents
hétéroclites, à fonctions multiples, non seulement manuel
d'identification mais aussi encyclopédies taxinomiques
faisant fonction de monographie. Elles progressent avec
une lenteur inquiétante. Aujourd'hui, l'urgence voudrait
imposer des choix de stratégies de publication, car la
demande est de plus en plus pressante, notamment pour
l'élaboration de programmes de conservation. Au dernier
congrès international de botanique (Tokyo, 1993), un
symposium sur l'« avancement des flores » a discuté à
nouveau ces problèmes. La tendance serait de maintenir les
grands programmes de flore, mais en leur donnant une
envergure internationale, ou en la renforçant quand elle
existe. Il est de plus en plus difficile pour une institution
botanique de mener seule un programme d'envergure. Il
conviendrait sans doute d'activer la publication en allégeant
son contenu, mais à notre avis cela ne ferait que déplacer le
problème...
Procéder à des choix s'avère en effet extrêmement difficile,
tant il y a de lacunes. Les séries monographiques, tellement
critiquées pour leur lourdeur, leur lenteur et leur difficulté
d'accès pour les non-taxinomistes, apportent en fait
l'information de base préalable, indispensable à la
préparation de flores pratiques de bonne qualité. Comment
sauter cette étape ? Comment, par ailleurs, se contenter de
documents aussi peu accessibles à une large communauté
d'utilisateurs, en raison de leur caractère très technique, de
leur hyper-spécialisation, mais aussi souvent de leur langue
(anglais le plus souvent) et de leur prix !
Quelle que soit leur présentation, les flores actuelles restent
trop difficiles d'accès pour leurs utilisateurs (Jarvie et van
Welzen, 1994). Le couplage avec des bases de données
informatisées plus conviviales améliorera peut-être la
situation (voir plus loin), de même que la généralisation de
l'usage de systèmes comme Delta (Dallwitz et ai, 1993),
qui font appel à une méthode de codage des descriptions
taxinomiques déjà encouragée depuis plusieurs années
(Dallwitz, 1980).
Les listes floristiques ou catalogues (dits checklists),
généralement régionaux ou nationaux, ne fournissent pas de
description et ne permettent pas d'identifier une plante. Leur
développement est bien compréhensible car ils représentent
un outil utile pour évaluer la diversité de tel ou tel secteur
géographique. De tels documents, facilement édités à partir
de bases de données informatisées, sont le plus souvent le
produit logique de ces dernières. Mais ils peuvent devenir
dangereux s'ils sont pris pour ce qu'ils devraient mais ne
sont pas souvent, à savoir soit des documents préliminaires,
soit des catalogues raisonnes, critiques, c'est-à-dire des
sous-produits des flores ; en fait les listes floristiques sont
Courrier de l'Environnement de l'INRA n° 27, avril 1996
généralement produites à la place des flores, et pour pallier
leur absence.
Les différentes formules sont donc nécessaires et
complémentaires, à des niveaux différents, pour des usages
différents et dans des contextes scientifiques et politiques
différents. La préparation de flores locales est la meilleure
façon de favoriser les collaborations avec les instituts
locaux. George (1990) souligne d'ailleurs l'intérêt qu'il y
aurait à faire coopérer dans un projet commun (inventaire,
taxinomie, rédaction) les spécialistes monographes et les
rédacteurs de flores...
Les « ressources humaines »
Partout on continue de déplorer le manque de botanistes
taxinomistes pour l'étude des flores tropicales, et même la
diminution de leur nombre, des problèmes évoqués, par
exemple, par Campbell (1989) ou Mon (1992).
Van Steenis avait estimé à 80 espèces par an et par
botaniste le « rendement » de la rédaction d'une flore
monographique, mais il a dû revoir ses prévisions à la
baisse en 1979, après l'expérience de Flora Malesiana. En
1990, Polhill considère que 50 espèces par an, pour un mitemps dédié à la rédaction d'une flore régionale, est un
chiffre raisonnable. Ainsi pour atteindre un taux de
publication annuel de 110 à 220 espèces par an il faut 2 à 4
botanistes. Toutefois, les taxons importants nécessitent dix
ans de travail pour un seul botaniste, voire plus. C'est une
des raisons pour lesquelles ils sont souvent délaissés.
Actuellement la tendance à travailler en équipe, souvent
internationale, est encouragée.
Un autre problème concerne le partenariat entre pays
tropicaux et pays « du Nord » qui coopèrent aux
programmes d'inventaire. Actuellement, les conditions du
partenariat semblent évoluer favorablement dans différents
pays, notamment en Amérique du Sud où les centres de
recherche et structures universitaires sont suffisamment
forts. Mais elles restent extrêmement difficiles en Afrique.
Par exemple, la flore du Cameroun et celle du Gabon sont
publiées indépendamment avec la participation du Muséum
(Paris). Mais les éléments floristiques de ces deux pays sont
si proches que, en l'absence de coopération locale,
financière et scientifique, rien ne justifie de continuer à
publier les mêmes espèces dans deux séries.
3. Banques de données et bases de données informatisées
Herbiers
Dépositaires des collections de référence, ils constituent les
banques de données de base. L'insuffisance de structures
pour assurer l'existence, le maintien et l'entretien des
herbiers est le lot de la plupart des pays tropicaux,
notamment lorsque l'instabilité politique sévit : l'herbier de
l'université du Congo, à Brazzaville, a été complètement
détruit entre 1991 et 1993 (J.-P. Profizi, comm. pers.). Pour
les végétaux, le partage des échantillons en « parts »
distribuées à plusieurs institutions botaniques limite le
problème du lieu de dépôt du matériel. A l'heure actuelle,
un jeu complet des récoltes est toujours déposé dans le pays
où l'expédition a eu lieu, à la demande de celui-ci. Bien sûr,
(tab. VI), les plus importantes collections se trouvent dans
les herbiers d'Europe et des Etats-Unis, qui hébergent de
plus la presque totalité des récoltes anciennes. Mais certains
d'entre eux, on le sait, connaissent également de grandes
difficultés en moyens financiers et en personnel... Le
tableau VI montre que quelques pays de la zone
intertropicale ont des collections importantes, précisément
ceux dont la flore est la mieux connue (Chine, Afrique du
Sud, Australie, Kenya), et aussi ceux qui se montrent
dynamiques dans le domaine de la systématique végétale
Courrier de l'Environnement dé l'INRA n°27, avril 1996
(Brésil, Mexique). On y lit aussi que la plupart des pays
manquent de collections de référence.
Tableau VI. Nombre d'herbiers institutionnels
dans quelques pays
Avec le nombre de spécimens et de types (tous
groupes végétaux) qu'ils hébergent
D'après Holmgren et al., 1990
pays
Etats-Unis
France
URSS
Angleterre
Chine
Australie
Inde
Brésil
Afrique du Sud
Mexique
Kenya
Vietnam
Zaïre
Madagascar
Cameroun
Gabon
nombre
d'herbiers
628
55
102
439
83
35
48
85
34
42
2
3
3
2
4
1
nombre
de spécimens
60 421 964
20 178 300
18 097 878
15 647 668
10 042 383
5 300 600
3 585 628
3186 539
2 477148
2107 543
550 000
221 000
175 000
80 000
62 000
15000
nombre
de types
668 320
300200
104 941
322 567
22 351
27603
22 765
17744
46 849
6 784
2 400
180
0
500
110
30
Bases de données informatisées
II n'est pas utile ici d'argumenter sur leur intérêt. On citera
seulement quelques exemples importants.
Théoriquement, 3 types de bases de données (BD) peuvent
être envisagées : BD de collections, BD taxinomiques, BD
mixtes).
Le développement de bases informatisées est à peine
amorcé pour les flores tropicales. Les BD de collections se
développent dans les institutions des pays occidentaux, à
peu d'exceptions près : le premier herbier informatisé fut
celui de l'Afrique du Sud ! A Nairobi (Kenya) l'herbier de
l'Afrique de l'Est comporte 150 000 spécimens
informatisés ; on peut citer aussi les collections du
Programa Flora au Brésil, informatisées depuis 1980
environ. Les priorités sont généralement celles des
programmes spécifiques menés par ces institutions. C'est le
cas de la BD Sonnerai créée au Muséum (Paris) pour
l'informatisation de l'Herbier national. Certains herbiers,
comme celui de l'US National Museum (Washington DC),
ont préféré informatiser d'abord les types.
La Guyane est maintenant dotée d'une BD informatisée de
la flore (Hoff et al., 1989), nommée Aublet en hommage à
l'auteur du premier travail sur les plantes de Guyane. C'est
une base mixte (collections, taxinomie, bibliographie).
D'autres territoires français des tropiques ont également des
herbiers informatisés (Nouvelle-Calédonie, Polynésie, et
autres îles du Pacifique...).
La BD Tropicos du Missouri Botanical Garden (USA) est
certainement la plus importante à l'heure actuelle, tant par
la quantité que par l'ampleur des données. Mise en chantier
au début des années 80, Tropicos est mixte, comme Aublet.
Des données sur plusieurs flores tropicales sont déjà
disponibles, en particulier sur la Chine, l'Equateur, la
« Mésoamérique », le Pérou et Madagascar entre autres,
correspondant à des programmes de recherches
internationaux. Comme nous l'avons déjà signalé, la liste
floristique de Madagascar sera un produit de cette BD, celle
du Pérou a déjà été publiée (Brako et Zarucchi, 1993).
87
Une base de données comparable, LBase, s'élabore à Leiden
(Pays-Bas) dans le cadre des travaux de Flora Malesiana
(Welzen et al. 1992).
Ces BD vont bien sûr évoluer, grâce en particulier au
couplage avec des systèmes d'information géographique
(SIG), de traitement d'image et de systèmes experts de
détermination. Certaines de ces bases seront rapidement
consultables sur Internet, donnant un accès immédiat à des
données mises à jour continuellement. De telles innovations
techniques vont faciliter l'accès aux données floristiques par
les utilisateurs. Cela se développe déjà pour les flores des
régions tempérées, comme Flora ofNorth America (Morin
et al. 1989), ou Flora Europaea qui a créé le système EDS
soutenu par l'Europe Science Foundation. De même Flora
of Southern Africa, qui fut un pionnier de l'informatisation,
développe le système informatisé Précis, commencé vers
1972. Néanmoins pour les tropiques, les bases de données
réalisées ou en cours n'ont pas encore d'applications
adaptées à un public d'usagers et l'accès aux nouvelles
technologies sera beaucoup plus limité, ou retardé, dans une
bonne partie des pays de la zone intertropicale.
Les BD exclusivement taxinomiques peuvent être
géographiques ou monographiques : la plus importante de
cette deuxième catégorie est ILIDIS (International Légume
Database and Information Service) qui regroupe les 20 000
espèces de Légumineuses. Des résultats issus de cette base
de données ont déjà été publiés : catalogue des
Légumineuses d'Afrique - 5 825 espèces, Lock (1989), de
l'Asie de l'Ouest - 2 000, Lock et Simpson (1991). Le
couplage avec la banque de données chimique de Chapman
et Hall a abouti à la réalisation d'un dictionnaire à double
entrée (Bisby et al., 1994). C'est un bon exemple de l'intérêt
des BD taxinomiques pour la mise en valeur de la
biodiversité.
Mentionnons encore, pour mémoire car il dépasse le simple
cadre des inventaires et des flores tropicales, le vaste projet
IOPI (International organization for plant information), créé
par un regroupement international de la plupart des grandes
institutions botaniques. Il s'agit en effet de constituer un
outil global de diffusion des connaissances, sous forme de
catalogue unique des végétaux de la planète.
4. Quelles stratégies pour les inventaires sur le terrain ?
Les lacunes des inventaires sont graves au plan quantitatif,
comme le montrent les indices de densité de collections ;
elles le sont également qualitativement. En effet :
- le taux de découverte de nouveaux taxons en forêt
tropicale est important. Par exemple, sur les quelque 8 000
espèces rapportées par les explorations botaniques du
Projeto Flora Amazonica, 81 étaient nouvelles soit plus de
1% (Prance et Campbell, 1988) et, en Equateur (région du
Rio Palenque), c'est 9% d'espèces nouvelles qu'un
inventaire en forêt dense humide a livré (Gentry et Dodson,
1978). A une échelle géographique et taxinomique réduite,
l'une de nous (O.P.) a relevé près de 10% d'espèces
nouvelles (16/163) au cours de la révision des
Légumineuses-Mimosoideae des Guyanes. On peut
mentionner également que 40 plantes nouvelles découvertes
en Guyane française sont décrites chaque année ( M . Hoff
comm. pers.). Morat et Lowry (1993) estiment que la
connaissance de la flore d'Afrique tropicale augmente en
moyenne d'une espèce nouvelle par jour ;
- beaucoup d'espèces sont représentées dans les collections
par un très petit nombre de spécimens, voire un seul, le type
(toujours pour les Mimosoideae des Guyanes, moins de 5
spécimens pour la moitié des espèces étudiées). Dans ces
conditions, on dispose de données très fragmentaires
88
Courrier de l'Environnement de l'INRA n° 27, avril 1996
Figure 3. Principaux centres de diversité et points chauds
D'après Groobridge et al., 1992, modifié.
concernant la morphologie (par ex. pour les espèces
dioïques), la phénologie et les différents stades de
croissance (fleurs, fruits, formes juvéniles...), l'écologie, la
biologie. En outre, dans le domaine de la biogéographie,
comment parler sérieusement d'endémisme, délimiter des
aires de répartition, interpréter des répartitions disjointes,
lorsque l'on dispose de si peu d'information ? Le problème
des espèces rares de la flore néotropicale est longuement
évoqué par Campbell & Prance (1988). Mais la notion
d'espèce « rare » risque d'être confondue avec celle d'espèce
sous-collectée, lorsque c'est seulement en herbier que la
plante est rare...
Les procédures d'inventaire
Toujours pour les mêmes raisons d'urgence, la question de
l'optimisation de l'efficacité des inventaires se pose. Il y a
deux façons, globalement, de pratiquer l'inventaire sur le
terrain : la prospection itinérante, dans des secteurs peu ou
pas connus, et les inventaires exhaustifs de surfaces
limitées. L'association judicieuse des deux méthodes doit
pouvoir fournir des données de manière optimale.
La première, que l'on pourrait qualifier de « classique »,
permet de réunir les données de provenance aussi variées
que possible pour caractériser la flore d'une région et établir
la répartition et la variabilité géographique des espèces ;
elle favorise la découverte de nouveaux taxons (surtout si
on s'éloigne des bords de route...).
La seconde méthode, quantitative, s'est développée
récemment dans les forêts des trois continents (Campbell,
1989). Elle consiste à pratiquer des relevés complets sur des
transects, parcelles, ou par des méthodes aléatoires (pointcenter quarter ou point-quadrat). Dans certains cas, les
parcelles dépendent de stations de terrain ou réserves et
bénéficient d'un suivi pendant plusieurs années (Gentry,
1990 ; Poney et al, 1995). Sous l'égide du M A B , la
Smithsonian Institution (Washington DC) a récemment mis
en place un réseau qui regroupe différents sites d'étude sous
différentes latitudes et sur tous les continents, le Network
Biodiversity Plots.
Les inventaires exhaustifs s'avèrent efficaces pour :
- chiffrer la diversité floristique locale et permettre les
comparaisons quantitatives entre différents sites. Les
relevés floristiques effectués de cette manière ont révélé il
n'y a pas si longtemps que la diversité en Amazonie
occidentale dépassait celle des forêts d'Asie du Sud-Est,
considérées auparavant comme les plus riches (Gentry
1988, cité par Loizeau, 1992) ;
- améliorer la qualité des données sur les espèces présentes,
lorsque les parcelles sont suivies ;
- favoriser la collecte et l'étude des « espèces rares ».
La valeur de la surface minimale nécessaire pour
caractériser la composition floristique locale a été évaluée
de diverses façons. Par exemple, à Barro Colorado Island,
la surface de la parcelle de 50 ha totalement inventoriée
correspond à 3% de celle de la réserve totale (1 500 ha),
mais elle contient 75% des espèces connues dans la totalité
de la réserve (Gentry, 1990). La recherche de la surface
minimale pose le problème de la courbe aire-espèces, bien
plus complexe qu'en forêt tempérée. Pour l'Amazonie,
Loizeau (1992) discute ce problème et cite nombre de
travaux qui s'y rapportent... Il semble que la courbe aireespèces se stabilise, pour les familles les plus riches (qui
contiennent le plus d'espèces rares), autour de 60 ha.
Régions à inventorier en priorité et conservation
Les forêts tropicales abritent la majorité des espèces qui
restent à découvrir. Ces régions sont donc celles où le taux
potentiel d'extinction est le plus élevé. 60 000 plantes
auront disparu ou seront menacées de l'être dans les 40
prochaines années c'est-à-dire près d'1/5 de la flore totale
connue (estimation de Mayo, 1986, cité par Groombridge,
1992). Pour Myers (1990) la moitié des espèces aura
disparu dans un siècle. Il est évident qu'une partie d'entre
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Courrier de l'Environnement de l'INRA n" 27, avril 1996
elles se seront éteintes avant même d'avoir été découvertes
et décrites, ce que Campbell (1989) appelle « extinction
anonyme ».
Les taux de déforestation sont difficiles à estimer. En
Amazonie, en 1988, d'après une carte satellitaire, 8,2% de
la forêt originale a disparu. La progression serait de
20 000 km* par an en moyenne, mais elle est très variable
selon les états (Maranhao : 60,7% de forêt détruite ;
Amazonas, plus grand mais plus accessible : 0,8%
seulement ; Rondonia, progression particulièrement
alarmante) ; cela conduit inévitablement à un processus de
fragmentation à grande échelle. Mais l'Amazonie n'est pas
bien sûr la seule forêt menacée (Aldhous 1993).
La délimitation de zones à inventorier en priorité est une
autre façon d'optimiser l'efficacité des inventaires.
Centres de diversité
La notion de zone prioritaire est déjà un peu ancienne, et
plusieurs propositions ont été publiées depuis plus de dix
ans, utilisant des combinaisons de critères qui comprennent
bien sûr le nombre d'espèces, le taux d'endémisme, les
densités de collections, les menaces éventuelles de
destruction... Dans ce sens, le programme de l'UICN
« Centres de biodiversité » cherche à délimiter les régions
riches à protéger en priorité. Les critères retenus sont ceux
de Whitmore (1983), qui définit ces régions comme
possédant à la fois un nombre élevé d'espèces (dépassant
1 000) et un taux d'endémisme élevé, supérieur à 50%.
Campbell et Prance (1988) ont cartographie les régions où
la prospection et la récolte sont à renforcer ; Campbell
(1989) a dressé une liste des régions à inventorier en
priorité, en leur attribuant un coefficient obtenu par
pondération différentielle de quatre des critères de l'état des
inventaires (indice de densité de collections très bas : 2 ;
endémisme : 1 ; distributions géographiques intéressantes :
1 ; région menacée : 3). Myers (1988, 1990) a sélectionné
18 « point chauds » (fig. 3), dont la surface totale représente
seulement 0,5% de celle de la planète, mais qui comportent
en tout 50 000 espèces de plantes endémiques, soit 20% de
la flore mondiale. Parmi ces 18 points, 14 sont tropicaux, et
6 sont en forêt dense humide. Les centres de diversité
biologique dans le monde sont recensés par Davis et al.
(1994).
Modélisation de la distribution de la richesse spécifique
Cette méthode consiste à estimer, grâce à des paramètres
connus du biotope, la diversité de régions pas ou mal
inventoriées. Les travaux de Gentry (1988) basés sur des
échantillonnages de 87 communautés forestières de 0,1 ha,
dont 69 en Amérique tropicale, montrent que la
pluviométrie annuelle et sa distribution saisonnière sont les
paramètres les mieux corrélés à la richesse spécifique.
D'autres travaux récents (Phillips et al. 1994) concluent
que, parmi différents facteurs écologiques considérés, le
taux annuel de renouvellement de la forêt est le meilleur
indicateur de la diversité des communautés végétales. Ce
qui peut se résumer par : plus une forêt est dynamique, plus
elle est riche en espèces. Ces conclusions ne contredisent
pas celles de Gentry.
Diversité et phylogénie
En posant la question "To a conservationnist [...], is
Welwitschia equal to a species of Taraxacum ? Is the panda
équivalent to one species of rat ? ", Vane-Wright et al.
(1991) proposent de développer une approche systématique
de la conservation, en considérant non seulement la richesse
spécifique et les divers indices qui s'y rapportent, mais aussi
un paramètre qu'ils nomment taxinomie distineness, mesuré
à partir des résultats de l'analyse phylogénétique.
En conclusion
Le bilan est assez sombre et il est clair que les inventaires
des flores tropicales ne sont pas complets, ils sont même
dramatiquement loin de l'être. Dans la plupart des pays, on
en est aux questions de base : quelles plantes poussent et
où ? (George, 1990). Les lacunes se manifestent à tous
niveaux, les taux de progression sont partout très
insuffisants et absolument incompatibles avec les exigences
de la demande croissante dans le domaine de la
biodiversité, pour l'environnement, la conservation,
l'aménagement... Si bien qu'on peut légitimement se
demander si l'on en sait assez pour se lancer dans la
protection de la diversité biologique (Soulé, 1990).
Mais, s'interroge Nooteboom (1988), que font les botanistes
de leurs journées ? Faut-il donner la priorité à
l'établissement des documents de base : inventaires et
révisions taxinomiques ou se consacrer à la phylogénie ? La
question est régulièrement discutée dans les revues
spécialisées (voir par exemple Bramwell, 1989 ; Soulé,
1990 ; George, 1990). Pour Geesink (éminent théoricien du
cladisme, 1990), un pur auteur de flore traitera de 200
espèces en 4 ans, tandis qu'un biogéographe ne viendra à
bout que d'une quarantaine.
Les inventaires sur le terrain doivent être poursuivis et
intensifiés, sans abandonner la prospection itinérante,
même si cette dernière paraît trop aléatoire pour figurer
dans la liste des méthodes « modernes » ; l'enrichissement
des collections doit se poursuivre, même si, dans la plupart
des herbiers du monde, celles-ci s'entassent en attendant
qu'un botaniste s'en occupe. En effet, la publication des
données sous forme de flore constitue le goulet
d'étranglement le plus sérieux, et on peut estimer que la
moitié des nouvelles espèces décrites à l'heure actuelle ont
été « découvertes » dans des collections indéterminées, en
attente depuis de longues années, ou dans des collections
attribuées par erreur à des espèces déjà connues. Ce qui fait
dire à certains que le terrain n'est pas prioritaire puisque l'on
découvre plus d'espèces nouvelles dans « les vieux
herbiers » !
La pénurie de botanistes taxinomistes a été soulignée, mais
cette situation n'est pas nouvelle ! La preuve, ces phrases de
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Courrier de l'Environnement de l'INRA n°27, avril 1996
Hauman ( 1931 ) : « La botanique systématique souffre dans
beaucoup de pays d'une crise évidente, en raison de
l'énorme développement des autres sciences botaniques
vers la chimie, la physique et même les mathématiques, et il
en résulte qu'elle n'est souvent plus enseignée dans les
universités. Cela semble fatal, mais il y a là, au point de vue
scientifique et aussi social, un danger grave. En effet, les
gouvernements, surtout dans les pays coloniaux ou les pays
jeunes, dont la flore est encore mal connue, ont besoin de
systématiciens. [...] On pourrait ainsi former pour l'avenir
des systématiciens qui rendront de grands services à la
science. »
La France compte sans doute parmi les pays développés les
plus touchés par le grave affaiblissement de ce domaine de
recherche. De plus, alors que la très faible participation de
botanistes locaux, surtout en Afrique et en Asie, demeure
un problème crucial, notre pays a récemment réduit à néant
le rôle de premier plan qu'il tenait voilà quinze ans dans la
formation de botanistes pour les pays tropicaux
francophones ; c'est la regrettable conséquence de la
suppression des deux DEA (diplômes d'études
approfondies) de botanique tropicale (Poney, 1993).
Quand on voit l'importance de la tâche et du retard pris, on
ne peut pas nier qu'il faut redonner à l'étude systématique
de la diversité des plantes tropicales un caractère prioritaire
dans les musées d'histoire naturelle et les jardins botaniques
dont c'est la vocation première, mais également dans les
universités et autres organismes de recherche (CNRS,
ORSTOM...). Condition sine qua non à la concrétisation
d'une telle action, la formation de botanistes taxinomistes
ne sera possible que dans le contexte d'une reconnaissance,
par la communauté scientifique, et par les botanistes euxmêmes, de l'importance et de la valeur des travaux liés aux
inventaires biologiques •
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