Les villes créatrices : la promotion du développement

Les villes créatrices : la promotion du développement
économique et social grâce aux industries culturelles
November 2004
« Nous nous félicitons du rôle économique croissant que jouent les villes grandes et
petites dans ce monde de plus en plus interdépendant qui est le nôtre, ainsi que des
progrès réalisés dans l’instauration de partenariats entre secteurs public et privé et le
renforcement des petites et micro-entreprises. Les villes de toutes tailles ont la possibilité
de tirer le meilleur parti des avantages de la mondialisation et d’en atténuer les
conséquences négatives. Des villes bien gérées peuvent offrir un environnement
économique favorable à la création d’emplois et à la mise à disposition de toute une
gamme de biens et services. »
Déclaration des Nations Unies sur les villes et autres établissements humains en ce
nouveau millénaire (AIRES/S-25/2-9 juin 2001), paragraphe 11.
Les villes sont des centres de croissance industrielle et d’expression culturelle, c’est un
fait acquis. Mais ce qui est nouveau c’est d’imaginer fédérer et gérer efficacement les
industries culturelles et créatrices pour qu’elles contribuent plus efficacement à
l’économie, l’emploi et la diversité culturelle des villes.
Le concept des « villes créatrices » a reçu un accueil très positif de la part des
intellectuels et des décideurs du monde entier, mais il reste encore beaucoup à faire —
tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement — pour exploiter
pleinement le potentiel créatif au bénéfice des populations.
La régénération de la ville par la culture
La culture est bien plus qu’un bien commun coûteux, elle peut jouer un rôle important
dans le renouveau urbain. Le concept de ville créatrice a été mis en œuvre ces deux
dernières décennies comme solution au déclin économique des villes industrielles
européennes, américaines et australiennes.
Ces expériences ont démontré que des industries de la télévision, du cinéma, du
multimédia, de la musique, du livre, ou les organisations de festivals, peuvent s’épanouir
dans des villes disposant d’une solide infrastructure de transports, de communications et
de protection sociale, assortie de politiques publiques d’encouragement à l’innovation et
aux petites entreprises du domaine culturel.
L’exemple le plus fréquemment cité est celui de « l’Initiative de Huddersfield, ville
créatrice » (Yorkshire, Royaume-Uni). Au cours des années 80 et au début des années
90, la ville a été durement frappée par la restructuration de l’industrie lourde britannique,
le chômage sévissait dramatiquement parmi les ouvriers non spécialisés ou peu formés
et l’avenir économique de Huddersfield était sombre.
Puis, en 1997, la Commission européenne a choisi la ville pour un projet pilote du nom
de « Huddersfield : cœur courageux, esprit créatif ». Des projets comme les pépinières
d’entreprises, à travers un maillage et des échanges d’expériences très productifs, ont
donné naissance à 50 nouvelles affaires dont beaucoup se sont spécialisées dans les
nouveaux médias et les technologies avancées. Ces structures innovantes travaillaient
ensemble dans les pépinières d’entreprises et les informations étaient diffusées à travers
des rencontres, un site Internet, une base de données des projets créatifs et le magazine
de la créativité du Nord, Brass.
Le partenariat public-privé, clé d’une politique efficace
Un facteur déterminant pour le succès des villes créatrices est la création de partenariats
public-privé. Ils permettent l’épanouissement du potentiel créatif et de l’esprit
d’entreprise des petites structures qui jouent un rôle important dans la restructuration
économique. Á la base du développement des entreprises créatrices, il faut bien sûr des
talents novateurs. Ainsi les villes disposant d’écoles dynamiques d’art contemporain, de
mode, d’artisanat, de musique et de design ont les meilleurs atouts de succès.
Dans cet esprit, les planificateurs municipaux ou régionaux tiennent aujourd’hui compte
du rôle de la créativité lors de l’établissement des plans directeurs : ils intègrent leurs
atouts culturels — matériel et immatériel — dans les systèmes éducatifs, l’environnement
et l’organisation topographique. Dans une situation économique très compétitive, les
régions et les villes prennent conscience qu’elles doivent attirer, former et retenir des
individus talentueux et créatifs qui sont à l’origine d’innovations, qui développent des
industries et des technologies avancées et qui servent de moteur à la croissance
économique.
Des environnements favorables à la créativité sont des facteurs clés de réussite et de
nombreuses villes dans le monde industrialisé mettent en place des services de soutien à
l’économie créatrice locale, facilitant ainsi la coopération entre les secteurs privé et public
et avec la société civile. Certaines ont même été jusqu’à établir des indices de créativité
fondés sur les 3 T : technologie, talent et tolérance.
La créativité : une ressource encore inexploitée
On peut mesurer le chemin parcouru par cette nouvelle conception à des indices qui ne
trompent pas : des lieux comme la Silicon Valley en Californie — sans conteste le centre
créatif le plus performant de la nouvelle économie — ont lancé de tels projets. Le projet
Initiatives culturelles de la Silicon Valley rassemble les industries numériques, les
autorités et le secteur associatif pour encourager l’insertion des atouts artistiques dans la
vie civique et stimuler la vitalité de la région.
Néanmoins le plein potentiel du concept de ville créatrice reste insuffisamment réalisé. La
discussion reste bien souvent au niveau académique ou politique, sans mise en œuvre
concrète. Selon une recherche canadienne récente, de nombreux obstacles subsistent à
l’établissement de politiques complètes pour la promotion de l’ordre du jour des villes
créatrices.
On va d’un simple déficit dans la prise de conscience ou d’une sous-estimation des
planificateurs et du public quant à la valeur de la créativité pour la communauté, au
manque de personnalités artistiques ou politiques décidées à défendre le rôle de la
culture, en passant par le manque de ressources administratives, de talents et de
capacités pour gérer de tels projets et l’absence d’indicateurs clairs et exploitables pour
mesurer leur réussite.
Le programme UNESCO des villes créatrices : une réponse à un besoin
Ceci démontre à l’évidence les défis que rencontrent les pays, même les plus avancés,
quand il s’agit de mener des politiques pour créer des initiatives créatrices. Pour les villes
des pays en développement ou en transition, qui ont des moyens économiques et
technologiques limités, la tâche est simplement trop lourde. C’est pour cette raison que
l’UNESCO a décidé de lancer un programme de villes créatrices.
Conçu pour promouvoir le développement économique et social des villes dans les
mondes industrialisé et en développement, le programme met tout particulièrement
l’accent sur le rôle de la créativité et des arts. Il entend créer un forum d’échange
d’informations entre les villes, pour le renforcement des capacités locales, l’élargissement
de la diversité de la production sur les marchés intérieurs et internationaux et la diffusion
des bonnes pratiques.
Les villes disposant de traditions de créativité reconnues dans les champs de la
littérature, du cinéma, de la musique, de l’art populaire, du design, des technologies et
des arts numériques ou de la gastronomie peuvent demander à rejoindre le programme.
Elles perpétueront ainsi leur rôle de centre d’excellence et elles aideront d’autres villes,
en particulier du monde en développement, à renforcer leur propre créativité.
Le programme, approuvé avec enthousiasme par le Conseil exécutif de l’UNESCO à sa
170e session qui s’est terminée le 14 octobre 2004, est géré par l’Alliance globale pour la
diversité culturelle et a accueilli immédiatement son premier membre quand Edimbourg a
été nommée première « Ville de littérature ».
L’impact de la créativité : au-delà de l’économie
La capitale écossaise possède une longue tradition d’excellence dans le domaine de la
littérature et présente une scène contemporaine très animée. Elle a vu naître tout au
long de son histoire des écrivains célèbres comme Sir Walter Raleigh et Robert Louis
Stevenson et plus récemment J.K. Rowling, auteur de la série des Harry Potter, Irvine
Welsh et Ian Rankin, auteur de policiers. La ville est également célèbre pour ses
événements culturels marquants comme le Festival d’Edimbourg. Munie de cette riche
expérience culturelle, Edimbourg va jouer un rôle moteur dans le programme des villes
créatrices et lui permettra d’atteindre un impact vraiment mondial.
Le but du programme n’est certainement pas le seul développement économique. Les
industries de la créativité contribuent au tissu social d’une ville, à sa diversité culturelle
et à son rayonnement esthétique. Elles améliorent la qualité de la vie, renforcent le sens
communautaire et l’identité partagée et prennent part au tourisme culturel. Ce dernier
point prend de plus en plus d’importance à mesure que l’industrie du tourisme s’éloigne
des marchés de masse pour se rapprocher de formules individuelles de voyage et que les
touristes classent les activités culturelles et de visite du patrimoine parmi leurs cinq
priorités de voyage.
Des plans pour des villes créatrices ont déjà été conçus et testés à petite échelle et ont
démontré leur capacité à promouvoir le développement social et économique et à
stimuler l’entreprise et la diversité culturelle — dans des villes en difficultés comme dans
des villes prospères. Le programme des villes créatrices de l’UNESCO cherche à tirer les
leçons de ces initiatives et encourage la coopération et les partenariats entre les villes du
monde entier, du Nord et du Sud, pour apporter à tous les bénéfices de la créativité.
Pour de plus amples informations sur les villes créatrices, consulter les sites Internet
suivants (ordre alphabétique). [j’ai mis entre parenthèses le lien français, quand il y en
avait un. Sinon, c’est le même lien qui reste]
Cadre
d’action
pour
un
développement
urbain
durable
(http://europa.eu.int/comm/regional_policy/sources/docoffic/official/communic/caud/cau
d_fr.htm), Commission européenne, 1999
Capitales
et
villes
européennes
de
la
culture
(http://europa.eu.int/comm/culture/eac/sources_info/studies/capitals_fr.html),
Etude
préparée pour la Commission européenne par Palmer/Rae, Bruxelles, août 2004
Cités
et
gouvernements
locaux
unis
(http://www.citieslocalgovernments.org/uclg/web/francais.asp)
Creative Industries in the Modern City, Encouraging Enterprise and Creativity in
St.Petersburg, Tacis Cross Border Cooperation, Projets à Saint- Pétersbourg, Helsinki,
Manchester, septembre 2002.
Cultural Initiatives Silicon Valley
Edinburgh, City of Literature
Huddersfield Creative Town Initiative
Manchester Institute for Popular Culture
Programme des Nations Unies pour les établissements humains (UN-Habitat)
(http://www.unhabitat.org/wuf/2004/default.asp)
Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques (http://www.cprn.org/)
Seconde Conférence des Nations Unies sur les établissements humains (Habitat II,
1996), Istanbul (http://www.un.org/Conferences/habitat
UK Department for Culture, Media and Sport – Creative Industries
Urban Development Needs Creativity, Development Outreach, novembre 2003, Institut
de la Banque mondiale
Villes créatrices au Canada (http://www.creativecity.ca/), Rapport, Vancouver Arts
Initiative, 1993
World Urban Forum 2004
Sites UNESCO en relation avec le sujet :
Growing up in Cities
Most Project – Socially Sustainable Cities
Prix
UNESCO Villes
pour
la
paix
(http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.phpURL_ID=2477&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html)
Patrimoine mondial (http://whc.unesco.org/pg.cfm?l=FR)