"Gabrielle" : un film à ne pas manquer et à soutenir.

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"Gabrielle" : un film à ne pas manquer et à soutenir.
"Gabrielle" : un film à ne pas manquer et à
soutenir.
Le dernier film de Louise Archambault, réalisatrice
québécoise, est dans les salles depuis le 16 octobre.
Gabrielle est une œuvre qui respire la sincérité, l’émotion et
pose question sur la place des personnes handicapées
intellectuelles dans une société qui n’a pas encore toutes les
clés pour accepter et rendre effective leur soif de vie
ordinaire.
Gabrielle est une histoire sensible portée par une interprète
lumineuse. Le film offre un regard juste sur l’amour entre deux
personnes handicapées intellectuelles, à travers les yeux de l’héroïne
Gabrielle Marion-Rivard, jeune adulte de 22 ans et porteuse du
syndrome de Williams et Beuren. Autour d’eux gravitent une sœur,
deux mères, des accompagnateurs et les membres de la chorale des
Muses de Montréal * où ils chantent avec brio. La musique, en
particulier les chœurs, est omniprésente, entrainante. C’est sans
doute un des vecteurs de l’émotion intense portée par les acteurs
handicapés et que l’on ressent face à l’écran. Comme l’explique la
réalisatrice Louise Archambault, « A l’origine du film il y avait le désir
de parler du bonheur, de celui des gens que l’on considère en marge
de la société, des “ invisibles ” en quelque sorte, et de la force que
peuvent leur procurer les arts comme la musique et particulièrement le
chant chorale ». Dans le film, Les Muses se retrouvent régulièrement
pour répéter en vue d’un concert avec le plus connu des chanteurs
québécois, auteur notamment d’ “ Ordinaire ”, un titre particulièrement
approprié au sujet.
Un amour ordinaire
Car la quête du bonheur et de l’amour simple entre Gabrielle et Martin
n’est justement pas si ordinaire que cela. Leur entourage et leur mode
de vie constituent même un handicap pour leur relation. C’est l’un des
sujets de fond que traite ce film et qu’il pose en débat. Des personnes
porteuses d’un handicap intellectuel ont-elle le droit à une vie
amoureuse ? S’il est difficilement concevable de répondre par la
négative, les craintes de l’entourage face aux conséquences d’une
union, et notamment de la maternité, se comprennent aisément. Cette
peur, dans le film, est portée par la mère de Martin qui ne trouve
d’autre solution que d’exclure son fils de cette relation sentimentale.
Un rejet défensif, qui constitue son unique échappatoire. En miroir, on
trouve, Laurent, « famille d’accueil » et accompagnateur au sein de la
petite résidence dans laquelle Gabrielle habite avec trois autres
membres des Muses de Montréal. Lui fait tout pour la laisser vivre sa
vie tout en la protégeant, une position compliquée à tenir tant la
distance à poser entre protection et autonomie dépend de chaque
individu.
Les facettes de l’autonomie
Il y a aussi Sophie, la sœur de Gabrielle, qui joue l’ouverture tout en
étant consciente des limites de sa cadette. Gabrielle veut qu’on la
laisse vivre comme les autres, qu’on la considère comme capable.
Elle veut son appartement, condition de son autonomie, et d’une vie
sentimentale épanouie. Car, malgré son cadre de vie bienveillant, qui
se veut respectueux de son intimité et ouvert sur la ville, ce sont bien
les questions des limites de la vie en communauté protégée et de
l’indépendance qui sont posées. Le spectateur est aussi témoin de
l’envers de la médaille. Il entrevoit les difficultés concrètes, voire les
dangers, qu’entraîne l’indépendance lorsque Sophie permet à
Gabrielle de tenter l’aventure.
Le personnage de Sophie, lui aussi, incarne un autre sujet de fond,
celui du rôle de la fratrie des personnes déficientes intellectuelles.
Sophie est tiraillée entre la volonté d’accompagner sa sœur dans sa
vie d’adulte et les choix de sa propre vie. La complicité des deux
sœurs illustrent à quel point les liens dans une fratrie peuvent être
forts, combien une sœur peut se sentir porteuse d’une mission et avoir
du mal à choisir entre sa propre vie et le bonheur de son alter-ego.
Ce film généreux devrait sensibiliser un large public sur le handicap
mental et sur des questions rarement traitées au cinéma et encore
taboues comme la sexualité des personnes concernées. Gabrielle à
reçu le prix du public au Festival de Locarno, du jeune public à
Angoulême et sélectionné pour le festival de Toronto... à vous de
jouer pour faire aussi bien en France !

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