Récupération d`énergie dans les centrales de traitement d`air

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Récupération d`énergie dans les centrales de traitement d`air
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COORDONNÉ PAR FRANCK BENASSIS ET JACK BOSSARD
CVC N ° 862 JANVIER / FÉVRIER
2010
Les systèmes de récupération d’énergie
et le free-cooling
Incidences sur les autres composants
Le système de gestion de
la récupération et du free-cooling
Perspective
Récupération d’énergie
dans les centrales
de traitement d’air
Avec les réglementations thermiques et la directive européenne EPBD,
apparaît une nouvelle génération de bâtiments particulièrement étanches
permettant de réaliser d’importantes économies d’énergie. Un objectif
qui implique de mettre en place des centrales de traitement d’air «sobres»
sur le plan de leur consommation énergétique.
L
a directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments
(EPBD) et les réglementations thermiques qui en découlent obligent à revoir
le mode de conception des bâtiments, en
particulier les systèmes dédiés au confort
climatique intérieur. Les économies d’énergie exigées ont pour première conséquence
l’amélioration du bâti et de son enveloppe.
Cette nouvelle génération de bâtiments
particulièrement étanches pose de manière
cruciale la question de la qualité de l’air: il
est essentiel en effet de maintenir un
niveau de qualité d’air qui réponde aux exigences de santé et de bien-être des occupants.
Le renouvellement de l’air ne peut se faire
désormais que sous la haute surveillance
des systèmes de ventilation qui doivent
être particulièrement économes en énergie. En effet, chauffer ou rafraîchir l’air de
ventilation devient dans de nombreux cas
l’un des postes de consommation énergétique le plus important.
La sobriété des centrales de traitement
d’air s’appréhende à trois niveaux : les
consommations propres au fonctionnement de la centrale (alimentation électrique des moteurs et des auxiliaires, énergies consommées pour le chauffage ou le
rafraîchissement, etc.), les possibilités de
récupération entre l’air neuf et l’air rejeté,
les capacités des installations à utiliser des
énergies «gratuites» telles que le free-cooling ou la surventilation nocturne.
Toutes ces fonctions sont intimement liées
et doivent fonctionner en synergie: un système de récupération intrinsèquement efficace qui engendrerait une perte de charge
importante sur le circuit aéraulique verrait
son efficacité oblitérée par la surconsommation électrique des moteurs de ventilation. Il est donc important de rappeler que
l’efficacité du système doit être examinée
de façon globale, c’est-à-dire «aux bornes»
de la centrale de traitement d’air.
Les systèmes de récupération
d’énergie et le free-cooling
> Le recyclage
La façon la plus simple de récupérer de
l’énergie est de recycler l’air. Sur une centrale de traitement d’air à double flux, l’air
peut être pour tout ou partie recyclé, afin
de réduire les besoins énergétiques. L’avantage de ce système est qu’il est simple à
mettre en œuvre et peu onéreux : il s’agit
d’un caisson trois voies intégré dans la centrale. Il peut être utilisé en parallèle d’un
autre système de récupération: le recyclage
total de nuit en hiver ou lorsque les locaux
sont utilisés de façon intermittente.
Le free-cooling sera géré en ne faisant pas
de recyclage lorsque cela sera possible.
> La récupération par boucle d’eau glycolée
En mettant en place une batterie sur chacun des circuits d’une centrale à double
flux, et en faisant circuler un fluide caloporteur entre ces deux batteries, il est possible de récupérer l’énergie. Ce système a une
Une exploitation économique garantit
un faible coût du cycle de vie
Bernard Avallet,
directeur général de Swegon France
efficacité thermique modeste, de l’ordre de
40 à 50 %. En outre, sa mise en œuvre engendre des opérations de maintenance avec
un impact écologique non neutre, car le glycol se détériore dans le temps et il est
nécessaire de le remplacer et de le recycler.
Par ailleurs, il faut se conformer aux réglementations de rétention en cas de fuite. Il
est indispensable de prendre en compte la
consommation énergétique de la pompe
qui permet au fluide de circuler entre les
deux batteries.
Pour le free-cooling, l’arrêt de la pompe est
suffisant. Ce procédé trouve sa justification
lorsque les systèmes assurant le soufflage
et l’extraction sont éloignés l’un de l’autre.
> La récupération par caloduc
C’est un système de récupération où le préchauffage de l’air neuf et le refroidissement
de l’air rejeté s’effectuent sur la même batterie divisée en deux. Le transfert de chaleur est réalisé par un fluide frigorigène à
changement de phase : évaporation par
refroidissement de l’air rejeté, condensation par réchauffage de l’air neuf. En été,
hormis une solution complexe de caloduc
horizontal motorisé (caloduc à pivot), la
récupération n’est pas possible. L’efficacité
thermique est directement liée au nombre
de rangs du caloduc, avec, pour corollaire,
une incidence négative sur la perte de
charge aéraulique et donc sur l’efficacité
globale du système. L’utilisation de fluide
frigorigène implique des coûts de maintenance plus élevés et la nécessité d’avoir
recours à une main-d’œuvre hautement
qualifiée. L’impact écologique est aussi plus
sensible.
> La récupération par échangeur à plaques
Dans le cas d’un système de récupération
par échangeur à plaques, le transfert de
l’énergie se fait par transfert thermique des
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RÉCUPÉRATION DE CHALEUR ET FREE - COOLING
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Sans
secteur
de purge
Figure 1
deux circuits d’air au travers d’une paroi.
L’efficacité thermique est meilleure qu’avec
le système à batteries à eau glycolée. Sauf
à générer une perte de charge pénalisant
fortement les consommations d’énergie des
moteurs des ventilateurs, le taux de récupération atteint 60 à 70 %. L’inconvénient
majeur de ce système tient à la prise en
glace des condensats de l’air extrait lorsque
les températures d’air neuf sont négatives.
Dans ce cas, soit le système est arrêté, soit
l’air neuf est by-passé de façon à permettre
à l’air extrait d’évacuer la glace accumulée
dans l’échangeur. Il convient donc de s’interroger sur la durée réelle de récupération
du système, car son efficacité décroît au
moment où la demande de récupération est
la plus nécessaire.
Quant au free-cooling, il est réalisé en utilisant le by-pass, comme dans les phases
de dégivrage. Il faudra alors porter son
attention sur la valeur des pertes de charge
engendrées par le passage dans les by-pass
et prendre en compte l’éventuelle surconsommation des moteurs des ventilateurs
pendant cette phase.
> La récupération par échangeur à roue
La récupération se fait par transfert de chaleur entre l’air extrait et l’air neuf grâce à
une roue à forte inertie thermique dont le
média est en aluminium (> Figure 1). Cette
roue, entraînée par un moteur pas à pas,
est composée d’une multitude de canaux
permettant le passage de l’air, l’enveloppe
de ces canaux captant ou restituant l’énergie suivant les besoins. Le système de récupération par roue présente de nombreux
avantages:
- le pourcentage de récupération est plus
élevé que pour les systèmes précédents, de
l’ordre de 80 à 85 % ;
- la perte de charge générée par le passage
43
Avec
secteur
de purge
Figures 2 et 3
de l’air dans les canaux de la roue est faible (inférieure à 200 Pa) et constante toute
l’année ;
- le système étant dynamique, la récupération peut se faire même avec des températures extérieures négatives, sans risque de
givrage.
Il est parfois reproché à ce système de ne
pas être totalement étanche. Sauf cas
extrême, il est possible de maîtriser le débit
de fuite, de sorte qu’il se fasse depuis l’air
neuf vers l’air extrait, et non l’inverse. La
roue peut être dotée d’un secteur de purge
permettant de ne pas transférer de l’air
extrait dans l’air neuf. > Figures 2 et 3
Un autre intérêt de l’échangeur à roue
réside dans le fait qu’il est possible de faire
varier la vitesse de la roue en fonction des
besoins et ainsi d’éviter les variations de
température de soufflage en mi-saison.
Le free-cooling sur un système de récupération à roue est très simple à mettre en œuvre:
il suffit que cette dernière soit arrêtée.
Incidences sur
les autres composants
> La filtration
Si les systèmes de récupération par recyclage, batteries à eau glycolée ou caloduc
ne nécessitent pas particulièrement de précaution en matière de filtration, il faudra
apporter plus de vigilance lors de la mise
en œuvre d’un système d’échangeur à
plaques ou de récupération par roue.
> Les batteries
Le choix des batteries est directement
impacté par celui du système de récupération. En effet, en fonction du taux de récupération et du mode de fonctionnement,
la taille des batteries sera extrêmement différente. Sauf avec un système de récupération par roue, il sera toujours nécessaire de
prévoir des batteries chaudes capables de
combattre l’intégralité des besoins, car,
dans les périodes les plus froides, il faudra
pallier les arrêts ou les périodes de dégivrage des systèmes. Avec un récupérateur
à roue, il sera souvent possible, dans le cas
d’une utilisation exclusive en renouvellement d’air, de supprimer totalement la batterie chaude, car l’écart entre la température soufflée et la température ambiante
est très faible.
> Les moto ventilateurs
Quel que soit le système de récupération
retenu (hormis par recyclage), celui-ci a un
impact sur les pertes de charges totales du
réseau, avec pour conséquence l’augmentation des puissances absorbées par les
moteurs de ventilateurs. Il est souvent illusoire de vouloir rendre un système plus
performant, en ajoutant par exemple
quelques rangs à une batterie ou en allongeant un échangeur à plaques, car la perte
de charge complémentaire engendre une
puissance absorbée aux moteurs non compensée par l’amélioration de la récupération énergétique.
Le système de gestion de
la récupération et du free-cooling
Pour les systèmes de récupération par recyclage, batteries à eau glycolée ou caloduc,
le système de gestion à mettre en œuvre
est simple, tout comme la gestion du freecooling. Il n’en est pas de même pour les
échangeurs à plaques et encore moins pour
les récupérateurs à roue. Pour les premiers,
il faudra prendre en compte la prise en
glace de l’échangeur, ainsi que la commande des volets de bipasse. La gestion
d’un échangeur à roue est plus simple, mais
si l’on veut que l’efficacité de la roue soit
maximale et qu’elle corresponde aux
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COORDONNÉ PAR FRANCK BENASSIS ET JACK BOSSARD
besoins de l’installation, il faudra adapter
la vitesse de la roue à ces besoins. Les différentes mesures de pressions, de débits
d’air, de températures, ainsi que des fonctions spécifiques vont demander un système de contrôle élaboré et sophistiqué.
C’est pour cela que les centrales équipées
d’une roue de récupération sont souvent
également livrées avec une régulation
embarquée. Dans ce dernier cas, en fonction des constructeurs, la gestion du freecooling n’est pas toujours préinstallée.
2010
Une exploitation
économique garantit un faible
coût du cycle de vie
La plupart du temps, avec un système de
ventilation à double flux performant, il est
possible de supprimer une batterie de
Comparatif: l’efficacité des systèmes de récupération
Pour comparer l’efficacité des
différents systèmes, il faut prendre
soin de comparer les mêmes
efficacités (même bases de calcul) sur
des produits certifiés Eurovent.
Eau Glycolée - 4 Rangs
38%
45%
Eau Glycolée - 6 Rangs
52%
Eau Glycolée - 8 Rangs
48%
Plaques
78%
Plaques Doubles (en série)
textrait
83%
Roue
50%
Caloduc - 4 Rangs
59%
Caloduc - 8 Rangs
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
Figure 5 Comparaison de l’efficacité thermique des systèmes de récupération.
text
trecup
Extract air temperature
Figure 4
Wanted supply air temperature
> Efficacité thermique
Elle est définie comme suit (> Figure 4) :
η = (trécup – textérieur) / (textrait – textérieur)
La température de l’air introduit dans le
local (trécup) est donc:
trécup = textérieur + η (textrait – textérieur).
> Efficacité sur la récupération
De nombreux paramètres extérieurs à la
centrale interviennent dans le calcul de
l’efficacité de récupération: temps de
fonctionnement, débits et conditions de
températures d’air. Il n’est pas possible
de donner par conséquent l’efficacité
sur la récupération pour une centrale en
particulier. Il n’en demeure pas moins
que cette valeur est probablement la
plus pertinente:
η = 1 - (conso. annuelle avec récup.
d’énergie /conso. annuelle sans récup.
d’énergie).
B
.
at exch
er he
. aft
p
Tem
e
ratur
tempe
e
d
i
s
Outi
A
ηQ = 1 -
A
A+B
Figure 6
> Efficacité énergétique
Sur la Figure 6, la surface A symbolise
l’énergie récupérée par l’échangeur et la
surface B, le besoin additionnel en
chauffage pour obtenir la température
désirée. L’efficacité énergétique est
donc le ratio de l’énergie récupérée par
l’échangeur de température sur le
besoin total.
Cette valeur, normalement supérieure à
l’efficacité en température, ne permet
pas une comparaison directe des
différents systèmes.
DOSSIER
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RÉCUPÉRATION DE CHALEUR ET FREE - COOLING
2010
Comparatif: le coût énergétique des systèmes de récupération
Consommation 80 %
16
6 491 €
Double Flux Sans Récupération
Eau Glycolée - 4 Rangs
15
5 292 €
Eau Glycolée - 6 Rangs
15
5 401 €
Figure 8 Coût du cycle de vie.
155 741 €
Eau Glycolée - 8 Rangs
155 156 €
Plaques
15
5 583
5 €
Plaques Doubles (en série)
111 4439 €
Roue
133 874 €
Caloduc - 4 Rangs
14
4 367 €
Caloduc - 8 Rangs
2 000
Investissement 15 %
Maintenance 5 %
> Minimum requis RT 2005 = centrale à
double flux sans récupération.
> Consommations des équipements
annexes des systèmes de récupération
inclus.
> Énergie électrique: 0,060 euro/kWh.
> Énergie gaz: 0,025 euro/kWh.
> Hypothèses de calcul: CTA débit
20 000 m3/h, air repris 20 °C ; air soufflé
25 °C.
> Fonctionnement en chauffage si
température extérieure < 18 °C
6 heures/20 heures ; 7/7 jours.
> Température air neuf suivant base de
données Météo France Paris.
0
4 000
6 000
8 000
45
10 000
12 000
14 000
16 000
18 000 €/an
Figure 7 Comparaison de la consommation annuelle des systèmes de récupération.
chauffage additionnelle. Et ce grâce au
rendement élevé du récupérateur thermique, au contrôle complet des températures, des débits d’air et des durées de
fonctionnement et à l’exploitation de l’excédent de chaleur du local. Cela signifie
des coûts d’investissement et d’installation réduits. De plus, la centrale occupe
moins d’espace.
La notion de « coût du cycle de vie » (Life
Cycle Cost) correspond à la totalité des
frais pendant la durée de vie estimée d’un
système de ventilation à double flux. L’investissement représente environ 15 %, la
maintenance environ 5 % et la consommation énergétique le solde, soit 80 %
(> Figure 8). Le récupérateur thermique à
rendement élevé, le bon rendement énergétique des ventilateurs et les possibilités de régulation optimisées permettent
au total une faible consommation d’énergie. Ainsi, un système de ventilation à double flux performant a un coût de cycle de
vie très faible.
Les centrales équipées de systèmes de
régulation embarquée (> Figure 9) permettent, grâce à des algorithmes de régulation
sophistiqués, une optimisation de leur
fonctionnement et donc des consommations énergétiques. Les fonctions les plus
courantes sont intégrées (débit variable,
programmation horaire, pilotage des
vannes, etc.), ainsi que des solutions économiquement énergétiques (free-cooling,
surventilation nocturne, décalage des
points de consigne, etc.). Enfin, ces régulations embarquées sont compatibles avec
les systèmes de GTC disponibles sur le marché et certaines intègrent des logiciels
embarqués de supervision. 33-45
Figure 9
Interface utilisateur.