La maladie hémorroïdaire (273a)

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La maladie hémorroïdaire (273a)
Corpus Médical – Faculté de Médecine de Grenoble
La maladie hémorroïdaire (273a)
Professeur Jean-Luc FAUCHERON
Avril 2003 (Mise à jour Mars 2005)
Pré-Requis :
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Séméiologie chirurgicale DCEM1
Anatomie du canal anal
Résumé :
La maladie hémorroïdaire, très fréquente, est d'origine multifactorielle.
Elle peut revêtir plusieurs tableaux cliniques : asymptomatique, elle n'est découverte que
lors d'un examen systématique de la région péri-anale, sous la forme d'un paquet
hémorroïdaire. Ailleurs, elle peut être responsable d'une pesanteur, d'un prurit, d'une
douleur plus ou moins sévère, d'une rectorragie, d'un prolapsus plus ou moins
volumineux et plus ou moins réductible.
Les règles hygièno-diététiques et le traitement médical par voie locale ou générale sont
indiqués dans tous les cas.
Le traitement instrumental, essentiellement par ligatures élastiques, injections
sclérosantes ou photocoagulation à infra-rouge, est de mise lorsque les symptômes
deviennent invalidants et résistent au simple traitement médical.
Le chirurgien est sollicité en cas d'échec de tous les traitements précédents ; il faut alors
le plus souvent réséquer les paquets hémorroïdaires. En urgence, il intervient également
dans le cas de la thrombose hémorroïdaire, complication fréquente et bénigne mais très
douloureuse, en réalisant l'ablation du caillot sous anesthésie locale.
Mots-clés :
Hémorroïdes, ligatures élastiques, injections sclérosantes, thrombectomie hémorroïdaire,
hémorroïdectomie, hémorroïdopexie.
Glossaire :
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Rectorragie : émission de sang rouge par l'anus
Ténesme : sensation douloureuse de la région anale, à type de brûlure,
pesanteur, serrement, pincement…
Faux besoin : sensation de réplétion du rectum, sans émission de selle lors de la
tentative de défécation
Références :
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J. Frexinos. Hépato-Gastro-Entérologie SIMEP Ed. Paris 1988 : 244-8.
Hudziak H. Thérapeutiques en proctologie : pathologie hémorroïdaire.
Gastroenterol Clin Biol 1998 ; 22 : B155-63.
Abramowitz L. Recommandations pour la Pratique Clinique sur le traitement de la
maladie hémorroïdaire. Le courrier de colo-proctologie 2001 ; 11 : 1-35.
Exercices :
1. Introduction
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La maladie hémorroïdaire correspond à une dilatation veineuse progressive dans la région du
canal anal. Elle représente une cause fréquente de consultation en médecine générale et en
gastro-entérologie, puisqu'elle touche près de 50% de la population de plus de 50 ans.
2. Pathogénie
Elle est complexe et fait intervenir de multiples facteurs :
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Vasculaires (ouverture de shunts capillaires)
Inflammatoires (irritation chronique)
Mécaniques (hypertonie sphinctérienne, hyperpression abdominale causée par une
constipation, une grossesse, une station debout prolongée répétée…)
Dégénératifs (vieillissement et relâchement des fibres de soutien)
Héréditaires (cas familiaux)
Hormonaux (influence de la vie génitale chez la femme)
Environnementaux (alimentation riche, épicée, alcool, chauffage excessif…)
3. Tableau clinique
3.1. Thrombose hémorroïdaire
Elle se définit comme la formation de caillots par rupture d'une veine dans un plexus
hémorroïdaire. Elle se traduit par une tuméfaction brutalement douloureuse et bleutée de la
marge anale. Il s'y associe une réaction inflammatoire. La guérison est spontanée en quelques
jours ou obtenue par évacuation chirurgicale du caillot. La séquelle cutanée s'appelle une
marisque.
3.2. Formes cliniques
La pathologie hémorroïdaire revêt des tableaux cliniques très divers, allant de l'absence totale
de symptôme (découverte fortuite lors d'un examen anal) à des complications gravissimes
menaçant le pronostic vital !
Les tableaux suivants peuvent être rencontrés :
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Fond douloureux permanent, à type de pesanteur, accompagné d'un prurit,
correspondant à une anite hémorroïdaire chronique.
Crise douloureuse correspondant à une anite hémorroïdaire aiguë.
Rectorragies modérées, de sang rouge, "arrosant" les selles. Le problème n'est pas tant
d'affirmer la maladie hémorroïdaire que d'éliminer une cause organique sus-jacente
comme un cancer colorectal (où là, les rectorragies sont isolées, ou accompagnent les
selles)
Prolapsus hémorroïdaire plus gênant que douloureux, dont on décrit 4 stades : le stade
I correspond à des hémorroïdes "internes"; le stade II correspond à des hémorroïdes
prolabées lors d'un effort et se réduisant spontanément; le stade III correspond à des
hémorroïdes extériorisées, ne se réduisant qu'avec le doigt; le stade IV correspond à un
prolapsus hémorroïdaire irréductible.
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Thrombose interne non extériorisée : la douleur seule existe.
Prolapsus hémorroïdaire circonférentiel thrombosé appelé encore "étranglement"
hémorroïdaire. Ici, l'évolution peut se faire vers le sphacèle, puis la surinfection et la
gangrène périnéale…
Marisque : il s'agit d'un repli cutané péri-anal correspondant à l'évolution d'une
thrombose hémorroïdaire (spontanée ou traitée par thrombectomie simple). Elle rend
simplement la toilette locale plus difficile.
4. Méthodes thérapeutiques
4.1. Méthodes médicales
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Règles hygièno-diététiques : éviter épices, alcool, station debout prolongée.
Régularisation du transit par laxatif doux : mucilage, son, paraffine, sorbitol, PEG.
Médications :
o Phlébotoniques et anti-inflammatoires, pour le traitement par voie orale
o Topiques hémorroïdaires en pommades ou suppositoires, associant
diversement des protecteurs muqueux, des anesthésiques locaux, des antiinflammatoires, des anti-oedémateux, des veinotoniques, des spasmolytiques,
des anticoagulants, etc.
4.2. Méthodes endoscopiques
Elles sont réalisées en ambulatoire et peuvent être renouvelées plusieurs fois. Elles sont
pratiquement toutes suivies de douleurs à type de ténesme, de pesanteur, de faux besoins et de
rectorragies pendant quelques jours. L'infection sur le site du geste est exceptionnelle, mais
souvent grave.
Ces méthodes sont multiples, et aucune n'a franchement démontré sa supériorité sur une autre,
dans la littérature. Il s'agit des techniques suivantes :
• Injections sclérosantes (efficacité transitoire)
• Ligatures élastiques de la base d'un paquet hémorroïdaire
• Photocoagulation infrarouge
• Electrocoagulation monopolaire ou bipolaire
• Cryothérapie.
4.3. Traitement chirurgical
Il est considéré comme radical et correspond au traitement définitif de la maladie, à
l'exception de la thrombectomie hémorroïdaire, qui ne s'applique qu'à la thrombose.
Les principaux traitements sont les suivants :
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Thrombectomie hémorroïdaire : incision radiée sous anesthésie locale et évacuation du
caillot
Excision hémorroïdaire localisée
Excision hémorroïdaire complète : résection des trois paquets principaux après
ligatures selon la technique de Milligan et Morgan
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Hémorroidopexie selon Longo : agrafage circulaire de la muqueuse sus-pectinéale
pour supprimer la vascularisation hémorroïdaire et "retendre" le tissu de soutien
Photo : prolapsus hémorroïdaire localisé, avec anite
(J.L. Faucheron)
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Photo : incision cutanée dans l'opération d'hémorroïdectomie selon Milligan et Morgan
(J.L. Faucheron)
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Photo : ligature d'un paquet hémorroïdaire
(J.L. Faucheron)
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Photo : opération terminée
(J.L. Faucheron)
5. Indications
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Le traitement médical peut être proposé à tous les stades.
La thrombose hémorroïdaire externe est une urgence lorsque la douleur est intense : il
faut réaliser une thrombectomie sous anesthésie locale
Les prolapsus hémorroïdaires de stade I et II relèvent du traitement médical, voire du
traitement instrumental. Les stades III récidivent trop souvent après traitement
instrumental, mais ils peuvent être tentés de première intention.
Les récidives ou échecs de ceux-ci et les prolapsus de stade III et IV sont une
indication à l'excision chirurgicale.
L'hémorroïdopexie, traitement "moderne" de la maladie hémorroïdaire, ne
s'appliquerait pas au stade IV, déjà trop "avancés".
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