Interpretation courbe menothermique 886.32 Ko

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Interpretation courbe menothermique 886.32 Ko
Suivi du couple infertile
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Références
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2. Ecochard R, Boehringer H, Rabilloud, M, et al. Chronological aspects of ultrasonic, hormonal,
and other indirect indices of ovulation. Br J Obst. Gynaecol. 2001 ; 108 : 822-829.
3. Dunson DB, Baird DD, Wilcox AJ. Day-specific probabilities of clinical pregnancy based on
two studies with imperfect measures of ovulation. Human Reprod. 1999 ; 14 : 1835-1839.
4. Wilcox AJ, Dunson DB, Baird DD. The timing of the “fertile window” in the menstrual cycle:
day specific estimates from a prospective study. BMJ 2000 ; 321 : 1259-1262.
5. Wilcox AJ, Weinberg CR, Baird DD. Timing of sexual intercourse in relation to ovulation.
Effects on the probability of conception, survival of the pregnancy, and sex of the baby.
NEJM 1995 ; 333 : 1517-1521.
6. Stanford JB, Smith KR, Dunson DB. Vulvar mucus observations and the probability of pregnancy. Obst. Gynecol. 2003 ; 101 : 1285-1293.
7. Bigelow JL, Dunson DB, Stanford JB, et al. Mucus observations in the fertile window: A better predictor of conception than timing of intercourse. Human Reprod. 2004 ; 19 : 889-892.
8. Dunson DB, Sinai I, Colombo B. The relationship between cervical secretions and the daily
probabilities of pregnancy : effectiveness of the TwoDay Algorithm. Human Reprod. 2001 ;
16 : 2278-2282.
9. Templeton AA, Penney GC, Lees MM. Relation between the luteinizing hormone peak, the
nadir of the basal body temperature and the cervical mucus score. Br J Obst. Gynaecol.
1982 ; 89 : 985-988.
10. Guermandi E, Vegetti W, Bianchi MM, et al. Reliability of ovulation tests in infertile women. Obst. Gynecol. 2001 ; 97 : 92-96.
11. McCarthy JJ Jr, Rockette HE. A comparison of methods to interpret
the basal body temperature graph. Fertil. Steril. 1983 ; 39(5) : 640-6.
12. Lang Dunlop A, Schultz R, Frank E. Interpretation of the BBT
chart : using the «Gap» technique compared to the Coverline
technique. Contraception 2005 ; 71 : 188-92.
>>
lnterprétation
des courbes ménothermiques
ldentifier
la période ovulatoire
(1)
La
courbe
ménothermique
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La température basale est celle du corps au réveil, avant toute activité
physique. Chez la femme, elle est le reflet du cycle ovarien (figure 1).
Phase folliculaire
Classiquement, deux approches sont
utilisées pour identifier la période ovulatoire :
>>
>>
Une approche prospective qui se base sur les événements pré-ovulatoires et reflète la folliculogénèse, la dominance estrogénique et/ou la
sécrétion brutale de LH. Ainsi, la recherche de mucus cervical et les
dosages urinaires de LH sont des méthodes prospectives, même
si la première peut également être considérée comme rétrospective.
Une approche rétrospective qui se fonde sur les événements
post-ovulatoires, notamment la présence d’un corps jaune et la dominance endocrienne de la progestérone. La réalisation d’une courbe
ménothermique représente la méthode rétrospective la plus commune.
Cependant, la méthode la plus précise pour déterminer le jour
de l’ovulation est l’échographie qui permet de visualiser l’effondrement du follicule et d’objectiver la présence de liquide dans
le cul-de-sac.
Phase lutéale
Ovulation
Cycle
hormonal
Progestérone
Estradiol
LH
FSH
Figure 1 :
le cycle ovarien est un
Folliculogenèse
continuum d’événements
Follicule
er
physiologiques, au 1 rang
primordial
desquels une variation de
sécrétions hormonales
ovariennes qui agissent
à leur tour sur la commande
hypothalamo-hypophysaire
Expulsion de
l’ovocyte
Follicule de
De Graaf
Follicule
antral
Corps jaune
Modifications
de l’endomètre
37,0
36,5
Courbe
ménothermique °C
36,0
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
20
22
24
26
28
La courbe normale est classiquement d’aspect biphasique qui se décompose,
pour un cycle de 28 jours, de la manière suivante (figure 2) :
- une phase hypothermique pendant les 12 à 14 jours de la phase folliculaire
- un nadir, ou dernier point bas de la courbe, qui précède le pic de LH
- une phase hyperthermique qui inclut la partie ascendante et un plateau
correspondant à la phase lutéale. Cette phase est le témoin de la présence
d’un corps jaune et est due à l’effet du pregnandiol (métabolite de la progestérone) sur le centre thermorégulateur bulbaire. Le décalage entre
la 1re et la 2e phase est généralement de 0,3°C à 0,5°C mais peut être plus
important. Toutefois, ni l’aspect de la courbe et ni l’importance du décalage
thermique ne sont corrélés au taux de progestérone circulant. En effet, le taux
de progestérone peut être très bas et générer un décalage significatif. A l’inverse, la courbe peut demeurer monophasique alors que le corps jaune est normal, y compris en début de grossesse. L’ascension thermique peut être rapide
(24h) ou plus lente (2 à 3 jours) sans que cette durée ait une signification
quant à la qualité du corps jaune.
figure 2
Ainsi, le décalage thermique entre les phases folliculaire et lutéale peut être
considéré comme un marqueur de l’ovulation. Toutefois, il est également
démontré que certaines femmes ovulent normalement sans élévation claire
de la température basale, la courbe étant dans ce cas d’aspect monophasique (figure 3).
REMARQUE
- le niveau de température de la phase folliculaire peut être élevé ou bas
sans signification pathologique dès lors que la courbe demeure biphasique
- de même, la première phase peut être allongée sans valeur péjorative
si la phase lutéale est de valeur normale (12 à 14 jours)
- les progestatifs ont également un effet hyperthermique, à l’exception
de la rétroprogestérone
figure 3
figure 4
>> Les courbes anormales
Dans une étude portant sur 107 femmes (326 cycles normaux), évaluées quotidiennement par une courbe de température, un test de Hühner, une échographie
transvaginale et des dosages hormonaux urinaires (FSH, LH, estrone 3 glucuronide
et pregnandiol 3 glucuronide), un aspect biphasique a été observé dans près de
70% des cas et un aspect monophasique dans 20%(2).
En pratique :
- Une courbe monophasique (figure 3) correspond le plus souvent à une absence
de sécrétion de progestérone et évoque donc une anovulation. Toutefois, cette
corrélation n’est pas systématique, le cycle ovarien pouvant être normal.
- Une phase folliculaire courte, inférieure à 10 jours, peut évoquer un premier
signe d’insuffisance ovarienne, notamment si l’âge de la femme approche 40 ans.
- Une phase lutéale courte, avec des plateaux thermiques inférieurs à 10 jours,
traduisent le plus souvent une insuffisance lutéale (figure 4).
- Enfin, dans 5 à 10% des cas, la courbe est ininterprétable (figure 5).
figure 5
>> Période de fertilité
La période de fertilité varie selon les cycles (3,4) et comprend 6 jours dont le dernier est celui de l’ovulation(5). La probabilité de grossesse est plus importante en
présence de mucus cervical(6,7). Quand celui-ci n’est pas observé au cours de la
période de fertilité, la probabilité de grossesse diminue de 50%(8).
>> Sensibilité de la courbe ménothermique
Depuis plus de 30 ans, le nadir est considéré comme potentiellement utile pour
prédire l’ovulation. Cependant, dès le début des années 1980, la fiabilité de ce
critère pour déterminer le jour de l’ovulation a été contestée. Une étude a
évalué la corrélation entre le nadir de la courbe ménothermique, la détection de
mucus cervical et le pic de LH. Si la quantité maximale de mucus était associée au
pic de LH dans 93% des cycles, le nadir ne l’était que dans 45% des cas(9). Dans
un travail récent utilisant l’échographie pour objectiver l’ovulation, le nadir est
apparu dans un intervalle de 8 jours avant à 4 jours après l’ovulation. Toutefois,
la courbe était corrélée aux résultats échographiques dans 74% des cas(10). Des
critères alternatifs ont été proposés pour améliorer la sensibilité
de l’interprétation. Les plus efficaces sont issus de logiciels d’interprétation
automatisés qui nécessitent de nombreux cycles. Une technique assez fiable
consiste à calculer la moyenne des températures relevées au cours de la phase
folliculaire. Dans ce cas, un décalage de 0,3°C par rapport à cette moyenne est
assez prédictif de l’ovulation(11). En pratique, la technique dite
«Coverline» est la plus usitée. Elle consiste à observer un décalage thermique
de 0,3 à 0,5°C par rapport à la température la plus élevée de la 1re phase. Enfin,
une autre technique dite «Gap» est actuellement proposée pour minorer les
variations individuelles. Elle consiste à mesurer le différentiel de température
entre la femme et son conjoint. Dans ce cas, les variations inhérentes aux conditions de vie sont limitées et le différentiel apparaît avec la phase lutéale(12).
Cependant, si cette approche semble intéressante, notamment en termes d’implication du couple, son évaluation ne repose à ce jour que sur de petits effectifs.
Pour que la courbe soit interprétable,
il convient de respecter rigoureusement certaines règles :
- même thermomètre
- même voie (rectale, buccale, vaginale, axillaire)
- au lever
- si possible à la même heure. Un écart d’une heure peut faire varier
la température de 0,1 à 0,2°C. Si l’heure du lever est irrégulière,
elle doit être notée pour pondérer l’interprétation.
En pratique :
- les voies rectales et vaginales sont recommandées lorsque la variabilité entre les
cycles est importante et/ou lorsque le décalage thermique est difficile à objectiver.
Mode
Durée de la mesure
Température moyenne
Rectification
Rectale
/vaginale
Entre 30 et 60 sec.
environ
Température moyenne :
37,0 °C
+ 0 °C
Buccale
Entre 45 et 90 sec.
environ
Température moyenne :
36,6 °C
Ajouter
+ 0,4 °C
Axillaire
Entre 60 et 120 sec.
environ
Température moyenne :
36,1 °C
Ajouter
+ 0,9 °C
Un certain nombre de facteurs peuvent affecter la mesure de la température
de repos, notamment :
- la consommation d'alcool,
- un sommeil court, agité ou long,
- les voyages (décalages horaires),
- les activités physiques,
- une maladie intercurrente,
- des troubles gynécologiques,
- et certains médicaments.
(1)
Indications
de
la
courbe
ménothermique
>>
>>
Si la fiabilité des courbes ménothermiques pour déterminer précisément le jour
de l’ovulation est bien moindre que la recherche de mucus cervical ou le dosage
urinaire de LH, sa réalisation demeure au 1er rang de la prise en charge des
couples désirant une grossesse pour :
- Déterminer la période de fertilité. L’ovulation se situe dans les 5 jours
entourant le nadir, ce qui définit la période de fertilité.
Cette information peut être utilisée pour les cycles suivants.
- Programmer des explorations fonctionnelles.
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Le test de Hühner est réalisé au moment du nadir en se basant sur les
courbes précédentes.
>>
Le dosage de progestérone et la biopsie d’endomètre sont réalisés en
milieu de phase lutéale. La courbe permet de déterminer la meilleure
période.
- Explorer une infertilité. La courbe ménothermique permet d’évoquer
une insuffisance ovarienne, une anovulation ou une insuffisance lutéale.
- Diagnostiquer un début de grossesse. Un plateau thermique prolongé
au-delà de 17 ou 18 jours doit faire évoquer une grossesse. Dans ce cas,
le nadir permet d’en dater le début assez précisément. En cas de retard
de règles, elle permet de distinguer une anovulation d’une ovulation tardive
et d’une grossesse débutante.
- Surveiller une induction de l’ovulation. La courbe montre si l’ovulation
est rétablie, si la phase lutéale est suffisamment longue et si la grossesse
est obtenue.
Conclusion
Simple d’utilisation et peu onéreuse, la courbe ménothermique
est indispensable dans l’exploration d’une stérilité, la datation
et l’interprétation des examens et le suivi des traitements.
Elle doit être corrélée aux dosages hormonaux et à la biopsie
d’endomètre pour évaluer la qualité de l’ovulation et du corps
jaune.
L’établissement de la courbe ménothermique permet également
de noter les événements significatifs tels que l’apparition de la
glaire, les rapports sexuels, les éventuelles métrorragies,
les douleurs, les pathologies intercurrentes
et les traitements, etc.
Si plusieurs cycles sont souvent nécessaires
pour une bonne interprétation, la mesure
quotidienne de la température permet une
meilleure implication de la patiente, et de
son partenaire, dans la prise en charge
de l’infertilté.