sujet capa 2010

Transcription

sujet capa 2010
EFB
CAPA 2010
EPREUVE ECRITE
__________________________________________________________________________________
La société TATOL SA et la société BEPE détiennent chacune 50% du capital et des droits de vote de la
société anonyme PedroGaz, qui exerce une activité commerciale d’entretien et de ravitaillement pour
l’aviation.
TATOL et BEPE sont liées par un pacte d’actionnaires portant sur les titres PedroGaz. Outre certaines
dispositions régissant la gouvernance de PedroGaz, le pacte contient une clause restreignant la libre
cessibilité des actions PedroGaz.
En effet, l’article III du pacte prévoit :
« En cas de cession, de quelque nature qu’elle soit, par TATOL de tout ou partie de ses titres dans la société
Pedro-gaz, BEPE bénéficiera d’un droit de préemption. Afin de permettre à BEPE d’exercer ledit droit,
TATOL devra informer BEPE par LRAR de tout projet de cession en incluant notamment l’identité du
cessionnaire projeté, le nombre de titres dont la cession est projetée ainsi que le prix envisagé.
BEPE pourra exercer son droit de préemption dans les 15 jours suivant la réception de la LRAR pour la totalité
des actions dont la cession est projetée et selon les mêmes termes et conditions que ceux envisagés avec le cessionnaire
initial ».
Au début de l’année 2010, TATOL est entrée en négociations avec la société BLING BLING pour lui
apporter les 50% qu’elle détient dans la société PedroGaz et recevoir en contrepartie une participation au
capital de BLING BLING.
BLING BLING, société anonyme de droit français dont le directeur général est Brice Hotfire, est
spécialisée « dans le service aux VIP et l’organisation logistique des grands évènements sportifs ». A ce titre, elle
dispose de deux avions long-courrier spécialement aménagés pour accueillir des voyageurs de marque.
Cet accord ravit les deux sociétés : TATOL, d’une part, qui souhaite, pour son image de marque, détenir
des participations dans des sociétés d’événementiel, et BLING BLING, qui était désireuse de pouvoir
internaliser l’entretien et le ravitaillement de ses avions, activités couteuses jusqu’alors sous-traitées.
Dans un premier temps, BLING BLING avait également approché BEPE pour acquérir les 50% que
cette dernière détenait également dans PedroGaz, mais BEPE lui avait opposé une fin de non recevoir, en
lui indiquant par écrit qu’elle désirait au contraire augmenter sa participation dans PedroGaz. Dans ce
cadre, le pacte d’actionnaires liant TATOL et BEPE avait été communiqué à BLING BLING. La
direction de BEPE accueille la perspective d’une opération entre TATOL et BLING BLING avec
consternation.
*
1
L’article 12 des statuts de BLING BLING « Limitation des Pouvoirs du Directeur Général » prévoit ce qui suit :
« Les décisions suivantes ne pourront être prises et/ou mises en œuvre qu’à condition d’avoir été préalablement
approuvées par le conseil d’administration de la société ;
1.
L’adoption du budget annuel et tout changement important apporté à ce budget ;
2.
Tout projet d’acquisition ou d’aliénation (sous quelque forme que ce soit) d’actifs pour un montant
supérieur à 1 million d’euros (y compris l’acquisition de titres de société) ; et
3.
toute embauche de tout cadre dont la rémunération brute annuelle serait supérieure à 200.000 euros »
Les négociations entre BLING BLING et TATOL aboutissent à un contrat d’apport de titres, conclu par
le représentant de TATOL et par Brice Hotfire pour le compte de BLING BLING le 15 mai 2010, et aux
termes duquel TATOL s’engage à apporter à BLING BLING l’intégralité des titres PedroGaz qu’elle
détient.
En contrepartie de cet apport, TATOL se voit attribuer 10.000 actions de la société BLING BLING
représentant 20% du capital et des droits de vote de cette dernière, valorisant cet apport à 2 millions
d’euros. L’apport est définitivement approuvé par l’assemblée générale de BLING BLING le 31 mai 2010.
*
Les affaires de BLING BLING se portent à merveille. BLING BLING vient notamment de signer un
contrat très important avec la Fédération Française de Football (FFF) en vue de la coupe du monde de
football 2010, aux termes duquel BLING BLING s’est engagée, moyennant rémunération, à assurer le
transport aérien de l’équipe de France de football entre la France et l’Afrique du Sud, puis, en Afrique du
Sud, entre les différentes villes dans lesquelles l’équipe de France devra jouer ses matches.
L’article 6 de ce contrat (« Procédure de conciliation ») prévoit que :
« BLING BLING et la FFF conviennent, à la date de signature du présent contrat, de mettre en œuvre une
procédure destinée à favoriser le règlement amiable de tout litige susceptible de surgir entre elles, quelle que soit la
nature ou l’objet dudit litige.
Préalablement à l’introduction d’une quelconque procédure, qu’elle soit judiciaire ou administrative, et sur
l’initiative du dirigeant de la société ayant des griefs à formuler à l’encontre de l’autre, les dirigeants des sociétés
concernées s’engagent à se rencontrer afin de tenter de régler le litige de façon amiable. A défaut d’accord amiable
conclu dans le mois suivant le premier contact pris par le dirigeant de la société s’estimant lésée avec le dirigeant de
l’autre société, les parties recouvreront leur liberté.»
Cet article prévoit toutefois une exception, rédigée de la façon suivante :
« La procédure ci-dessus s’appliquera sauf dans des cas exceptionnels, tels que ceux de nature à justifier une action
judiciaire en référé, qui présenteraient une urgence particulière et impliqueraient la mise en œuvre de mesures
immédiates ou conservatoires. »
Pour organiser le premier voyage prévu entre Paris et Le Cap, BLING BLING affrète l’un de ses deux
avions. La veille du départ, BLING BLING utilise, pour ravitailler l’avion, le matériel
d’approvisionnement de la société PedroGaz.
Le 9 juin 2010, l’équipe de France, accompagnée de son « staff » technique (soit au total 70 personnes)
s’envole enfin à bord de l’avion de BLING BLING, en direction du Cap où elle doit disputer son premier
2
match le 11 juin 2010. A mi-chemin, alors que les joueurs repensent encore à la qualité de leurs matchs de
préparation, le pilote annonce à l’équipage et aux passagers qu’il se voit forcé de procéder à un amerrissage
en urgence sur le lac Victoria, entre l’Ouganda et la Tanzanie. L’avion n’a en effet plus de kérosène, alors
que le matériel de ravitaillement indiquait la veille que les réservoirs étaient pleins et que l’avion était donc
susceptible de parcourir jusqu’à 12.000 kilomètres. Aucun aéroport à même d’accueillir l’avion n’est
suffisamment proche.
Après quelques secousses, le pilote réussi finalement à poser l’avion sur l’île Ukerewe, au beau milieu du
lac Victoria. Aucun des passagers ou des membres d’équipage n’est blessé.
I.
REDACTION D’ACTE DE PROCEDURE
La FFF est rapidement prévenue de cet incident. Elle contacte immédiatement le siège de BLING BLING
à Paris, dont le directeur juridique, M. Jacquay, passablement inquiet, vous sollicite.
M. Jacquay vous expose les éléments suivants : le contrat conclu entre BLING BLING et la FFF prévoit
que BLING BLING doit pouvoir fournir dans les plus brefs délais une prestation équivalente en cas de
non exécution. Malheureusement, l’autre avion de BLING BLING n’est pas disponible, car il est
immobilisé au sol pour sa révision annuelle. De plus, l’île sur laquelle le premier avion a procédé à un
atterrissage d’urgence est très difficile d’accès, et il n’est pas sûr qu’un autre avion puisse s’y poser. En
outre, compte tenu de la proximité de la Coupe du Monde, la plupart des avions et hélicoptères du secteur
sont déjà réservés, et il n’existe pas à sa connaissance d’autres avions privés disponibles pouvant
transporter 70 personnes. En toute hypothèse, M. Jacquay vous confie que BLING BLING, qui dispose
de peu de liquidités, n’aurait pas les moyens d’assumer financièrement l’affrètement d’un autre avion…
L’équipe de France reste donc bloquée sur une île du lac Victoria, à moins de 48h de sa première
rencontre. La FFF, qui entend contraindre BLING BLING à exécuter ses obligations contractuelles, a
adressé au Président du Tribunal de commerce de Paris une requête visant à être autorisée, compte tenu
de l’urgence, à délivrer une assignation en référé d’heure à heure à BLING BLING, et le Président du
Tribunal a rendu une ordonnance à cette fin ; une assignation a donc été signifiée à BLING BLING et
vous est communiquée par M. Jacquay (Cf. Annexe 4).
Il vous est demandé de répondre à cette assignation par le biais de conclusions.
Ces écritures devront être brèves et pourront s’appuyer sur le modèle communiqué en Annexe 5.
II. CONSULTATION
Il vous est demandé, pour les deux points suivants, de rédiger une seule et même consultation
pour BLING BLING au sein de laquelle vous traiterez l’ensemble des sujets.
1. Un malheur n’arrivant jamais seul, M. Jacquay vient de recevoir une lettre recommandée de la société
BEPE, qui entend remettre en question la validité de l’apport à BLING BLING des titres PedroGaz
antérieurement détenus par TATOL, aux motifs, d’une part, que la procédure de préemption prévue
par le pacte d’actionnaires n’aurait pas été respectée et, d’autre part, que Monsieur Brice Hotfire,
directeur général de BLING BLING aurait excédé ses pouvoirs à cette occasion.
Il vous demande de rédiger une consultation sur les points suivants (vous pourrez notamment étayer
votre raisonnement avec la jurisprudence et les textes fournis en Annexes 1 et 6) :
3
(i) les chances de succès de la société BEPE au regard notamment des termes précis du pacte
d’actionnaires liant BEPE à TATOL et des termes des statuts de la société BLING BLING ; et
(ii) les sanctions encourues en cas de succès de l’une et/ou l’autre des prétentions.
2. Grâce à vos brillantes écritures, la procédure en référé initiée par la FFF n’a pas prospéré : les
demandes de cette dernière ont été rejetées par le Président du Tribunal de commerce.
Toutefois, vos talents judiciaires ne sont pas sans conséquence, car la FFF, qui a dû assumer seule la mise
en œuvre d’un transport alternatif, joue de malchance : un avion officiel de la République Française, arrivé
à grands frais sur l’île, brise son train d’atterrissage et ne peut repartir que le surlendemain. Cette
succession de drames ne permet pas à l’équipe de France d’arriver à temps au Cap pour jouer son premier
match : conformément aux règles de la FIFA, la France doit donc déclarer forfait et, en conséquence, est
disqualifiée pour la suite de la compétition.
M. Jacquay craint fort que la FFF n’assigne BLING BLING en responsabilité contractuelle, sans autre
forme de négociations. La FFF, qui refuse toute discussion avec BLING BLING, a en effet publiquement
évoqué la possibilité d’une action en justice dans les tous prochains jours (non plus en référé mais au
fond), et a fait état dans la presse de divers postes de préjudice, mentionnant tout à la fois le préjudice
commercial subi en raison de la résiliation des contrats des divers sponsors, la perte de chance, et un
préjudice forfaitaire qu’elle établit à 10 millions d’euros.
Le directeur juridique vous demande un bref avis sur trois points particuliers :
(i) la recevabilité de cette éventuelle action judiciaire au fond contre BLING BLING (au regard notamment
des dispositions contractuelles applicables et de la documentation figurant en annexe),
(ii) la pertinence juridique des préjudices allégués par la FFF, et
(iii) les conditions dans lesquelles BLING BLING pourrait, le cas échéant, s’exonérer d’une partie de la
responsabilité de ces préjudices, et /ou engager la responsabilité d’autres personnes physiques ou
morales, afin d’éviter d’assumer seule les lourdes conséquences financières de cette situation.
*
M. Jacquay vous communique par ailleurs les informations suivantes :
-
Toutes les sociétés mentionnées sont des sociétés anonymes de droit français ;
-
Tous les contrats cités sont soumis au droit français, et les litiges naissant de leur exécution
relèvent de la compétence exclusive des tribunaux de Paris.
Conscient du fait qu’il vous sollicite dans un délai extrêmement court, il vous consulte en tant qu’avocat
généraliste de droit français, et n’attend donc pas de vous des développements particuliers liés à des droits
spéciaux (droit international, droit du transport aérien, droit des assurances, etc.).
*
4
Annexes :
1) Dispositions utiles du Code de commerce
2) Dispositions utiles du Code civil
3) Dispositions utiles du Code de procédure civile
4) Assignation délivrée par la FFF à BLING BLING
5) Modèle de conclusions en réponse
6) Jurisprudences utiles
5
1) Dispositions utiles du Code de commerce
Art. L. 225-56 I
Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Il exerce ces
pouvoirs dans la limite de l'objet social et sous réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées d'actionnaires
et au conseil d'administration.
Il représente la société dans ses rapports avec les tiers. La société est engagée même par les actes du directeur général qui ne
relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait
l'ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve.
Les dispositions des statuts ou les décisions du conseil d'administration limitant les pouvoirs du directeur général sont
inopposables aux tiers.
2) Dispositions utiles du Code civil
Art. 1134
Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
3) Dispositions utiles du Code de procédure civile
Art. 122
Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au
fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Art. 872
Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner
en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Art. 873
Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures
conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble
manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou
ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
6
4) Assignation délivrée par la FFF à BLING BLING
A Monsieur le Président du Tribunal de
commerce de PARIS
ASSIGNATION EN REFERE D’HEURE A HEURE
LE 9 JUIN 2010
A LA REQUETE DE :
La Fédération Française de Football, association loi 1901 reconnue d'utilité publique, dont le siège est
sis au 87, Boulevard de Grenelle, 75738 Paris Cedex 15, prise en la personne de son président, domicilié
de droit en cette qualité audit siège (ci-après la « FFF »),
Ayant pour avocat :
Maître Henri THIERRY
Avocat au Barreau de Paris
4, boulevard du Palais
75001 Paris
Tél. : 01 45 67 89 10
Fax : 01 45 67 89 11
Toque A 01
J’AI
Maître Mot
Huissier de Justice,
Demeurant 5, boulevard Saint-Germain, 75005 Paris
DONNE ASSIGNATION A :
La société BLING BLING, société anonyme au capital de 1.000.000 euros, dont le siège social est fixé
49 rue de Rivoli, 75001 Paris, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 542 014 428, prise en la
personne de son représentant légal domicilié de droit en cette qualité audit siège (ci-après « BLING
BLING »),
A COMPARAÎTRE A L’AUDIENCE DU 10 JUIN 2010, A 9 HEURES ;
Devant le Président du Tribunal de Commerce de Paris, sis 1, quai de Corse, 75004 Paris, pour les raisons
exposées infra.
*
*
7
La FFF informe le destinataire de la présente assignation que, conformément aux articles 56 et 853 du
Code de procédure civile :
-
les parties se défendent elles-mêmes ou qu’elles ont la faculté de se faire assister par toute personne
de leur choix ;
-
leur représentant, s’il n’est pas avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial ;
-
faute pour le défendeur de comparaître ou de se faire représenter, il s’expose à ce qu’un jugement
soit rendu contre lui à la lumière des seuls éléments produits aux débats par son adversaire.
PLAISE A MONSIEUR LE PRESIDENT
La FFF et BLING BLING ont conclu le 25 mai 2010 un contrat aux termes duquel la société BLING
BLING s’est engagée à prendre en charge l’ensemble des transports aériens de l’équipe de France de
football et de ses accompagnateurs (soit 70 personnes au total) à l’occasion de la Coupe du monde de
football qui se déroulera du 11 juin 2010 au 11 juillet 2010.
Conformément aux stipulations de ce contrat, il était notamment prévu que BLING BLING organise un
transport entre Paris (aéroport du Bourget) et le Cap, en Afrique du Sud (Cape Town International
Airport), pour une arrivée prévue le 9 juin 2010, à 18h30, heure locale.
En contrepartie de l’organisation de ce premier voyage, une somme de 150.000 euros a été versée à
BLING BLING par la FFF.
En raison d’un problème inconnu survenu pendant le vol, l’avion affrété par BLING BLING a été
contraint de procéder à un atterrissage d’urgence sur l’île Ukurewe, au milieu du lac Victoria, en Tanzanie.
D’après les informations parcellaires dont dispose la FFF, l’avion a été endommagé à l’occasion de cet
atterrissage forcé et n’est pas en mesure de décoller à nouveau.
Les 70 personnes composant l’équipe de France de football et leurs accompagnateurs sont donc pour
l’instant bloqués sur l’île d’Ukurewe, à moins de 48 heures de la première rencontre sportive à laquelle
l’équipe de France doit participer, sous peine d’élimination.
Conformément au contrat précité, BLING BLING s’est engagée, en cas de problème survenant dans
l’exécution de ses obligations contractuelles, à fournir dans les plus brefs délais une prestation de
substitution.
Contactée à cet égard par la FFF, BLING BLING lui a opposé un refus d’exécution, prétextant divers
obstacles matériels la plaçant dans l’impossibilité d’organiser un nouveau transport aérien dans le délai qui
lui est imparti.
Il est bien évident, compte tenu de l’extrême urgence qui caractérise cette situation, que BLING BLING
ne peut s’exonérer de son obligation au seul motif des difficultés de sa réalisation matérielle, ou au regard
d’un éventuel surcoût d’une prestation équivalente.
8
La FFF, compte tenu de son absence d’expérience dans ce domaine et du délai extrêmement bref auquel
elle est confrontée, n’est en toute hypothèse pas en mesure d’assurer seule la mise en place d’une solution
alternative.
La FFF se trouve donc contrainte de saisir votre juridiction, conformément à la clause attributive de
compétence contenue dans le contrat conclu, qui réserve la résolution de tout litige naissant de son
exécution au Tribunal de céans.
Il semble superflu de souligner l’ampleur du dommage auquel s’expose la FFF si, en raison de la carence
de BLING BLING, l’équipe de France n’était pas en mesure de se trouver en temps voulu au Cap aux fins
de pouvoir disputer son premier match de football.
Ledit dommage doit nécessairement inclure le retentissement considérable qu’aurait un tel évènement, non
seulement pour la population française, mais aussi pour l’ensemble des observateurs internationaux.
A la lumière de ce qui précède, la FFF sollicite de la juridiction de céans qu’elle ordonne à la société
BLING BLING de procéder, conformément aux dispositions contractuelles qui la lient à la FFF, à
l’exécution d’une prestation de substitution garantissant l’arrivée de l’équipe de France et de son équipe
d’accompagnement au Cap le 11 juin au matin, au plus tard.
PAR CES MOTIFS
Vu l’article 873 du Code de procédure civile,
Dire et juger recevable et fondée la demande formulée par la FFF ;
Ordonner l’exécution forcée de l’obligation contractuelle pesant sur la société BLING BLING ;
Condamner la société BLING BLING à s’acquitter de la somme de 10.000 euros entre les mains de la
FFF en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société BLING BLING aux entiers dépens.
SOUS TOUTES RESERVES
9
5) Modèle de conclusions en réponse
A Monsieur le Président du Tribunal de
Commerce de Paris tenant l’audience des
référés
________________________________
Audience du []
à []
CONCLUSIONS EN REPONSE
POUR
:
la société []
Défenderesse
Ayant pour avocat :
CONTRE
:
Maître []
Avocat au barreau de Paris
[coordonnées]
La société []
Demanderesse
Ayant pour avocat :
Maître []
Avocat au barreau de Paris
[coordonnées]
10
PLAISE A MONSIEUR LE PRESIDENT
[à compléter]
*
I. RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
[à compléter]
*
II. DISCUSSION
[à compléter]
* *
PAR CES MOTIFS
Vu les articles [],
Dire et juger [] ;
SOUS TOUTES RESERVES
LISTE DES PIECES COMMUNIQUEES :
[le cas échéant]
*
*
*
11
6) Jurisprudence utile
Arrêt n°1
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 15 décembre 2009
N° de pourvoi: 08-21037
Publié au bulletin
Cassation
Mme Favre, président
M. Salomon, conseiller apporteur
Mme Batut, avocat général
SCP Boullez, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les consorts X... que sur le pourvoi incident relevé par M.
Y... et la société Accueil hôtel :
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l’article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. Hervé X... et M. Y... ont été actionnaires principaux de la société
AFI 75, exploitant deux hôtels par l’intermédiaire de sa filiale, la société Hôtel Le Faisan ; qu’en
application d’une convention du 7 janvier 2005, M. Hervé X... ainsi que Mmes Véronique et Caroline X...
(les consorts X...) se sont vus attribuer la totalité des titres de la société Hôtel Le Faisan, M. Y...
conservant, par l’intermédiaire de la société Accueil hôtel, la totalité des actions de la société AFI 75 ; que
cette même convention a prévu, pour une durée de cinq ans, un droit de préemption mutuel entre les
signataires, assorti d’une clause pénale, en cas de cession de leurs titres composant le capital des sociétés
AFI 75 ou Hôtel Le Faisan ; que les consorts X... ont, le 22 juin 2005, constitué la société Herveca (la
société), à laquelle ils ont apporté les titres de la société Hôtel Le Faisan ; qu’invoquant une violation par
ces derniers de la clause de préemption, M. Y... et la société Accueil hôtel les ont assignés en paiement de
la somme prévue au titre de la clause pénale ;
Attendu que pour accueillir la demande de M. Y... et de la société Accueil hôtel, l’arrêt retient que l’apport
effectué par les consorts X... s’analyse en une opération juridique par laquelle ces derniers avaient transféré
des éléments de leur patrimoine personnel à la société en cours de constitution et avaient reçu en
12
contrepartie des titres sociaux pour une valeur globale correspondant aux actifs apportés ; qu’il en déduit
que cet apport, ayant eu pour résultat le transfert à titre onéreux par les consorts X... des titres qu’ils
détenaient dans la société Hôtel Le Faisan au profit de la société, constitue, au sens de la clause de
préemption, une cession, qui aurait dû faire l’objet d’une notification préalable à M. Y... et à la société
Accueil hôtel, afin de les mettre en mesure d’exercer leurs droits ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Sur le pourvoi incident :
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi principal rend sans objet l’examen
du pourvoi incident ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 30 octobre 2008, entre les parties, par
la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles,
autrement composée ;
REJETTE le pourvoi incident ;
Condamne M. Y... et la société Accueil hôtel aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande, les condamne à payer aux consorts X...
la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis
pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé
par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour les consorts X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le pourvoi fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné M. Hervé X..., Mme Véronique X... et Mlle
Caroline X..., à payer à M. Guy Y... et à la société ACCUEIL HOTEL, la somme de 100 000 € ;
AUX MOTIFS QUE « la convention de cessions d’actions signée le 07 janvier 2005 entre les consorts X..., d’une part, et
monsieur Y... et la société ACCUEIL HOTEL, d’autre part, stipule une clause ainsi libellée :
” Les soussignés se concèdent un droit de préemption mutuel en cas de cession de leurs titres AFI 75 ou HOTEL LE
FAISAN pour le cas où ils projetteraient de céder lesdits titres. Ce droit de préemption est consenti pour une durée de Cinq
ans à compter de ce jour. Le droit de préemption s’exercera de la manière suivante : envoi par le cédant d’une lettre
recommandée avec accusé de réception du projet de cession indiquant les conditions de la vente et le prix payé. Le récipiendaire
aura un délai de 30 jours à réception de cette information pour faire part à l’expéditeur de son désir à l’acquéreur indiqué.
13
Au cas où cette procédure ne serait pas observée la partie fautive devra indemniser l’autre d’une somme égale à 500. 000
euros. “
Considérant que, les consorts LE BOURSlCOT ont constitué, le 22 juin 2005, la société à responsabilité limitée
HERVECA à laquelle ils ont fait apport de “ la totalité des actions de la société HOTEL LE FAISAN “ évaluées à
la somme totale de 900. 000 euros en contrepartie de laquelle ils ont reçus 9. 000 parts sociales de 100 euros chacune ;
Considérant que la clause attribue réciproquement aux cocontractants un droit de préemption sur toute “ cession “ des
actions de l’une ou l’autre des sociétés AFI 75 et HOTEL LE FAISAN, sans faire aucune référence aux conditions et
d’une telle cession ni au nombre de titres cédés ;
Considérant que l’apport auquel les consorts X... ont procédé est une opération juridique selon laquelle les personnes
physiques ont transféré à une société en, cours de constitution des éléments de leur patrimoine personnel limitativement
énumérés dans les statuts et ont reçu, en contrepartie, des titres de la société bénéficiaire émis par cette dernière en une quantité
déterminant une valeur globale strictement égale à celle des actifs apportés ;
Considérant que, dans une telle opération, il n’est intervenu aucune transmission universelle des patrimoines des auteurs de
l’apport à celui de la société constituée ;
Considérant ainsi que l’apport a eu pour résultat le transfert des actions HOTEL LE FAISAN par les consorts X... qui
s’en sont trouvés dépossédés au profit de la société HERVECA bénéficiaire qui en est devenue la nouvelle propriétaire ; que
ce transfert est intervenu à titre onéreux puisque, en contrepartie, ont été remises aux apporteurs des valeurs mobilières ;
qu’ainsi, un tel transfert à titre onéreux constitue une cession au sens de la clause contractuelle litigieuse ;... Considérant qu’en
décider autrement aurait pour résultat, comme le relèvent monsieur Y... et la société ACCUEIL HOTEL, de permettre à
un cocontractant de détourner le droit de préemption par le biais d’un apport des actions. à une société holding ;
Considérant que la clause contractuelle et dénuée de toute ambiguïté susceptible de justifier qu’il soit fait application des
articles 1156 à 1162 du code civil ;
Considérant, en conséquence, qu’en application de la convention du 07 janvier 2005, les consorts X... devaient,
préalablement à l’opération d’apport des actions HOTEL LE FAISAN à la société HERVECA, mettre monsieur Y...
et la société ACCUEIL HOTEL en mesure d’exercer leur droit de préemption et, à cet effet, leur adresser la lettre
recommandée avec accusé de réception les informant du projet ;
Considérant que la circonstance que les consorts X... ont, ultérieurement, soumis à monsieur Y... et à la société ACCUEIL
HOTEL le projet de revente des actions HOTEL LE FAISAN n’est pas de nature à. régulariser l’opération d’apport ;
Considérant qu’il convient, à cet égard, de relever que, contrairement à ce que soutiennent les consorts X..., la valorisation de
l’apport à 900. 000 euros n’est pas neutre pour l’exercice du droit de préemption qui a seulement été proposé à monsieur Y...
et à la société ACCUEIL HOTEL pour le prix de 1. 340. 000 euros ;
Que c’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont dit que les consorts X... ont manqué à leur obligation ;
Considérant que la clause mettant à la charge de celui des cocontractants qui aurait empêché l’exercice du droit de préemption
la somme de 500. 000 euros s’analyse en une clause pénale qu’en application de l’article 1152 du code civil le juge a a faculté
de modérer si elle est manifestement excessive ;
Considérant que tel est le cas en l’espèce où la disproportion entre la valeur des parts sociales concernées et le montant de la
clause pénale démontre le caractère manifestement excessif de celle-ci ; qu’au demeurant, monsieur Y... et la société
ACCUEIL HOTEL se bornent à constater les plus-values successives de 471. 000 euros et de 440. 000 euros
matérialisées sur les actions HOTEL LE FAISAN à l’occasion de leur apport puis de leur revente ;
Considérant au surplus qu’ils comparent seulement cette plus-value totale avec le montant de l’indemnité contractuelle sans
prétendre qu’au prix de 900. 000 euros ils auraient exercé leur droit de préemption ; qu’à cet égard, ils n’allèguent ni ne
14
justifient qu’ils auraient disposé des capitaux propres ou empruntés nécessaires pour lever l’option dans le court délai de trente
jours fixé par la clause contractuelle ;
Considérant que dans ces circonstances, il convient de réduire à 100. 000 euros le montant de la clause pénale et de réformer
en conséquence le jugement de ce chef ;
Considérant que chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, il n’y a pas lieu à application des dispositions
de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens d’appel doivent être supportés, après masse, par moitié par chacune
des parties ; »
ALORS QUE l’apport en société est le contrat par lequel un associé transfère la propriété d’un bien à une
société, en contrepartie de droits sociaux ; que la contrepartie n’étant pas un prix, l’apport en société ne
constitue pas une vente et il échappe donc à l’application d’une clause de préemption qui régit
exclusivement la cession assortie du paiement d’un prix ; qu’en retenant, pour décider que la clause de
préemption était applicable à l’apport par les consorts X...des actions de la société HOTEL LE FAISAN à
la société HERVECA, que cette opération d’apport constituerait une cession, au sens de la clause de
préemption litigieuse, dès lors qu’elle a eu, pour conséquence, de déposséder les consorts X...de leurs titres
au profit de la société HERVECA qui en est devenue la nouvelle propriétaire, et que ce transfert est
intervenu à titre onéreux, puisque, en contrepartie, ont été remises aux apporteurs des valeurs mobilières,
bien que l’apport en société ne soit assorti du paiement d’aucun prix justifiant de le soumettre à la clause
de préemption qui s’applique exclusivement à une cession d’actions, la cour d’appel a violé l’article 1134
du Code civil.
Publication : Bulletin 2009, IV, n° 173
Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles du 30 octobre 2008
15
Arrêt n°2
Cour de cassation
Chambre mixte
Audience publique du 26 mai 2006
N° de pourvoi: 03-19376
Publié au bulletin
Rejet.
Premier président : M. Canivet., président
M. Bailly., conseiller apporteur
M. Sarcelet., avocat général
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Célice, Blancpain et Soltner., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n Y 03-19376 et n C 03-19495 ;
Donne acte aux consorts X... de la reprise de l’instance introduite au nom de Daurice X..., décédée le 25
septembre 2003, en leur qualité d’héritiers ;
Donne acte aux consorts X..., tous les sept agissant en leur qualité d’héritiers de Daurice Y..., du
désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre M. Z... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Papeete, 13 février 2003), qu’un acte de donation-partage dressé le 18
décembre 1957 et contenant un pacte de préférence a attribué à Mme Adèle A... un bien immobilier situé
à Haapiti ; qu’une parcelle dépendant de ce bien a été transmise, par donation-partage du 7 août 1985,
rappelant le pacte de préférence, à M. Ruini A..., qui l’a ensuite vendue le 3 décembre 1985 à la SCI
Emeraude, par acte de M. B..., notaire ; qu’invoquant une violation du pacte de préférence stipulé dans
l’acte du 18 décembre 1957, dont elle tenait ses droits en tant qu’attributaire, Mme X... a demandé, en
1992, sa substitution dans les droits de l’acquéreur et, subsidiairement, le paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que les consorts X... font grief à l’arrêt d’avoir rejeté la demande tendant à obtenir une
substitution dans les droits de la société Emeraude alors, selon le moyen :
16
1 / que l’obligation de faire ne se résout en dommages-intérêts que lorsque l’exécution en nature est
impossible, pour des raisons tenant à l’impossibilité de contraindre le débiteur de l’obligation à l’exécuter
matériellement ; qu’en dehors d’une telle impossibilité, la réparation doit s’entendre au premier chef
comme une réparation en nature et que, le juge ayant le pouvoir de prendre une décision valant vente
entre les parties au litige, la cour d’appel a fait de l’article 1142 du code civil, qu’elle a ainsi violé, une
fausse application ;
2 / qu’un pacte de préférence, dont les termes obligent le vendeur d’un immeuble à en proposer d’abord
la vente au bénéficiaire du pacte, s’analyse en l’octroi d’un droit de préemption, et donc en obligation de
donner, dont la violation doit entraîner l’inefficacité de la vente conclue malgré ces termes avec le tiers, et
en la substitution du bénéficiaire du pacte à l’acquéreur, dans les termes de la vente ; que cette substitution
constitue la seule exécution entière et adéquate du contrat, laquelle ne se heurte à aucune impossibilité ;
qu’en la refusant, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1138 et 1147 du code civil ;
3 / qu’en matière immobilière, les droits accordés sur un immeuble sont applicables aux tiers dès leur
publication à la conservation des hypothèques ; qu’en subordonnant le prononcé de la vente à l’existence
d’une faute commise par l’acquéreur, condition inutile dès lors que la cour d’appel a constaté que le pacte
de préférence avait fait l’objet d’une publication régulière avant la vente contestée, la cour d’appel a violé
les articles 28, 30 et 37 du décret du 4 janvier 1955 ;
Mais attendu que, si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat
passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur, c’est à la
condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de
l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir ; qu’ayant retenu qu’il n’était pas démontré que la société
Emeraude savait que Mme X... avait l’intention de se prévaloir de son droit de préférence, la cour d’appel
a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la
bénéficiaire du pacte ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en chambre mixte, et prononcé par le premier président
en son audience publique du vingt-six mai deux mille six.
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour les héritiers de Daurice Y...,
épouse X....
Moyen annexé à l’arrêt n° 240 P (chambre mixte)
MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué, après avoir constaté et jugé que le pacte de préférence contenu
dans l’acte de donation-partage du 18 décembre 1957 n’a pas été respecté à l’égard de Daurice Y... épouse
X..., et, après avoir dit que Mme Y... épouse X... a subi un préjudice du fait de ce non-respect, dont sont
responsables in solidum le vendeur, Ruini A..., l’acquéreur, la SCI Emeraude, et le notaire, Me B..., d’avoir
cependant rejeté la demande de Mme Y...-X... tendant à s’entendre substituer à la SCI Emeraude dans
l’acquisition de la parcelle vendue à celle-ci par Ruini A... ;
AUX MOTIFS QUE le pacte de préférence entre dans la catégorie des obligations de faire ; que l’article
17
1142 du code civil dispose que toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts,
en cas d’inexécution de la part du débiteur ; qu’en outre, si la SCI Emeraude était censée connaître
l’existence du pacte de préférence puisque les actes le contenant ont été transcrits aux hypothèques, il n’est
pas démontré qu’elle savait que Mme X... avait l’intention de se prévaloir de ses droits de préférence, ni
qu’elle aurait usé de manœuvres pour l’en priver ; qu’il n’y a donc pas lieu à annulation de la vente, qui en
tout état de cause n’aurait pu aboutir à la substitution de Mme X... à la SCI Emeraude ;
ALORS, D’UNE PART, QUE l’obligation de faire ne se résout en dommages-intérêts que lorsque
l’exécution en nature est impossible, pour des raisons tenant à l’impossibilité de contraindre le débiteur de
l’obligation à l’exécuter matériellement ; que, en dehors d’une telle impossibilité, la réparation doit
s’entendre au premier chef comme une réparation en nature ; que, le juge ayant le pouvoir de prendre une
décision valant vente entre les parties au litige, la cour d’appel a fait de l’article 1142 du code civil, qu’elle a
ainsi violé, une fausse application ;
ALORS, D’AUTRE PART, QU’un pacte de préférence, dont les termes obligent le vendeur d’un
immeuble à en proposer d’abord la vente au bénéficiaire du pacte, s’analyse en l’octroi d’un droit de
préemption, et donc d’une obligation de donner, dont la violation doit entraîner l’inefficacité de la vente
conclue malgré ces termes avec le tiers, et en la substitution du bénéficiaire du pacte à l’acquéreur, dans les
termes de la vente ; que cette substitution constitue la seule exécution entière et adéquate du contrat,
laquelle ne se heurte à aucune impossibilité ; qu’en la refusant la cour d’appel a violé les articles 1134, 1138
et 1147 du code civil ; ALORS, ENFIN, QUE, en matière immobilière, les droits accordés sur un
immeuble sont applicables aux tiers dès leur publication à la conservation des hypothèques ; qu’en
subordonnant le prononcé de la vente à l’existence d’une faute commise par l’acquéreur, condition inutile
dès lors que la cour d’appel a constaté que le pacte de préférence avait fait l’objet d’une publication
régulière avant la vente contestée, la cour d’appel a violé les articles 28, 30 et 37 du décret du 4 janvier
1955.
Publication : Bulletin 2006 MIXT. N° 4 p. 13
Décision attaquée : Cour d’appel de Papeete, du 13 février 2003
18
Arrêt n°3
Cour de cassation
Chambre mixte
Audience publique du 14 février 2003
N° de pourvoi: 00-19423 00-19424
Publié au bulletin
Rejet.
Premier président :M. Canivet., président
M. Bailly., conseiller apporteur
Premier avocat général :M. Benmakhlouf., avocat général
MM. Capron et Bouthors., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° N 00-19.423 et n° P 00-19.424 ;
Donne acte à M. X... de ce qu’il se désiste de ses pourvois, en ce qu’ils sont dirigés contre les sociétés
Sygma Banque et Banque populaire industrielle et commerciale ;
Sur le moyen unique de chacun des pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 18 avril 2000), que M. et Mme X... ont cédé à M. et Mme Y... leur
participation dans le capital d’une société Le Point Service, M. Y... s’engageant à cette occasion à se
substituer aux cédants dans les engagements souscrits pour des opérations relatives aux affaires sociales ;
que l’acte de cession stipulait notamment que pour toute contestation qui s’élèverait entre les parties,
relativement à l’interprétation ou à l’exécution de la convention, celles-ci s’engageaient à soumettre leur
différend, préalablement à toute instance judiciaire, à des conciliateurs désignés par chacune d’elles, à
moins qu’elles ne s’entendent sur la désignation d’un conciliateur unique, et que les conciliateurs
s’efforceraient de régler les difficultés et de faire accepter par les parties une solution amiable, dans un
délai de deux mois au plus à compter de leur désignation ; qu’une procédure collective ayant été ouverte à
l’égard de la société Le Point Service, deux créanciers de cette société ont fait assigner M. X... en paiement
de dettes sociales, en sa qualité de caution solidaire ; que celui-ci a alors appelé M. Y..., cessionnaire, en
garantie ;
19
Attendu que M. X... fait grief aux arrêts attaqués de l’avoir déclaré irrecevable, en l’état, en ses demandes,
alors, selon le moyen :
1 / que le juge ne peut pas opposer des fins de non-recevoir qui ne résultent pas des textes ; qu’en
déclarant irrecevable la demande de M. X... sur le vu de la clause de conciliation préalable que stipule la
convention qu’il a conclue avec M. Y..., la cour d’appel a violé l’article 122 du nouveau Code de procédure
civile ;
2 / que l’article 10 de la convention souscrite par M. X... et M. Y... stipule que “pour toute contestation
qui s’élèverait entre les parties relativement à l’interprétation ou à l’exécution des présentes, les soussignés
s’engagent à soumettre leur différend, préalablement à toute instance judiciaire, à des conciliateurs,
chacune des parties en désignant un, sauf le cas où ils se mettraient d’accord sur le choix d’un conciliateur
unique” ; qu’en déclarant purement et simplement irrecevable, par application de cette clause, la demande
de M. X..., quand la convention, loin d’interdire aux parties d’agir en justice, se borne à différer la saisine
du juge jusqu’à l’issue de la procédure de conciliation qu’elle prévoit, la cour d’appel a violé l’article 1134
du Code civil ;
Mais attendu qu’il résulte des articles 122 et 124 du nouveau Code de procédure civile que les fins de nonrecevoir ne sont pas limitativement énumérées ; que, licite, la clause d’un contrat instituant une procédure
de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu’à son issue
le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent
; qu’ayant retenu que l’acte de cession d’actifs prévoyait le recours à une procédure de conciliation
préalable à toute instance judiciaire pour les contestations relatives à l’exécution de la convention, la cour
d’appel en a exactement déduit l’irrecevabilité du cédant à agir sur le fondement du contrat avant que la
procédure de conciliation ait été mise en œuvre ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. X... aux dépens des pourvois ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer à M. Y... la somme de 1
820 euros ; rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, siégeant en Chambre mixte, et prononcé par le premier
président en son audience publique du quatorze février deux mille trois.
LE CONSEILLER RAPPORTEUR, LE PREMIER PRESIDENT,
LE GREFFIER EN CHEF.
Moyen produit au pourvoi n° N 00-19.423 par Me Capron, avocat aux Conseils pour M. X....
MOYENS ANNEXES à l’arrêt n° 217.P (Chambre mixte)
Le pourvoi fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR déclaré irrecevable l’action en garantie que M.
Daniel X... formait contre M. Daniel Y... ;
AUX MOTIFS QUE “M. X... a appelé en garantie M. Y... sur le fondement de l’acte de cession d’actions du 17 octobre
1994, qui prévoit, en son article 5, la garantie personnelle de M. Y... de se substituer aux engagements souscrits par les
cédants pour des opérations relatives aux affaires sociales” (cf. arrêt attaqué, p. 3, 2e considérant) ; “que cet acte prévoit, en
20
son article 10, le recours à une procédure de conciliation “préalablement à toute instance judiciaire” pour “toute contestation
relative à l’exécution des présentes” ; que l’appel en garantie répond, précisément, à la définition contenue dans l’article 10,
comme constituant une contestation relative à l’exécution de la garantie prévue à l’article 5 de l’acte ; que l’appel en garantie
est irrecevable en l’état” (cf. arrêt attaqué, p. 3, 3e considérant) ;
1. ALORS QUE le juge ne peut pas opposer des fins de non-recevoir qui ne résultent pas des textes ;
qu’en déclarant irrecevable la demande de M. Daniel X... sur le vu de la clause de conciliation préalable
que stipule la convention qu’il a conclue avec M. Daniel Y..., la cour d’appel a violé l’article 122 du
nouveau Code de procédure civile ;
2. ALORS QUE l’article 10 de la convention souscrite par M. Daniel X... et M. Daniel Y... stipule que,
“pour toute contestation qui s’élèverait entre les parties relativement à l’interprétation ou à l’exécution des
présentes, les soussignés s’engagent à soumettre leur différend, préalablement à toute instance judiciaire, à
des conciliateurs, chacune des parties en désignant un, sauf le cas où ils se mettraient d’accord sur le choix
d’un conciliateur unique” ; qu’en déclarant purement et simplement irrecevable, par application de cette
clause, la demande de M. Daniel X..., quand la convention, loin d’interdire aux parties d’agir en justice, se
borne à différer la saisine du juge jusqu’à l’issue de la procédure de conciliation qu’elle prévoit, la cour
d’appel a violé l’article 1134 du Code civil.
Moyen produit au pourvoi n° P 00-19.424 par Me Capron, avocat aux Conseils pour M. X....
Le pourvoi fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR déclaré irrecevable l’action en garantie que M.
Daniel X... formait contre M. Daniel Y... ;
AUX MOTIFS QUE “M. X... a appelé en garantie M. Y... sur le fondement de l’acte de cession d’actions du 17 octobre
1994, qui prévoit, en son article 5, la garantie personnelle de M. Y... de se substituer aux engagements souscrits par les
cédants pour des opérations relatives aux affaires sociales” (cf. arrêt attaqué, p. 3, 3e considérant) ; “que cet acte prévoit, en
son article 10, le recours à une procédure de conciliation “préalablement à toute instance judiciaire” pour “toute contestation
relative à l’exécution des présentes” ; que l’appel en garantie répond, précisément, à la définition contenue dans l’article 10,
comme constituant une contestation relative à l’exécution de la garantie prévue à l’article 5 de l’acte ; que l’appel en garantie
est irrecevable en l’état” (cf. arrêt attaqué, p. 3, 4e considérant, lequel s’achève p. 4) ;
1. ALORS QUE le juge ne peut pas opposer des fins de non-recevoir qui ne résultent pas des textes ;
qu’en déclarant irrecevable la demande de M. Daniel X... sur le vu de la clause de conciliation préalable
que stipule la convention qu’il a conclue avec M. Daniel Y..., la cour d’appel a violé l’article 122 du
nouveau Code de procédure civile ;
2. ALORS QUE l’article 10 de la convention souscrite par M. Daniel X... et M. Daniel Y... stipule que,
“pour toute contestation qui s’élèverait entre les parties relativement à l’interprétation ou à l’exécution des
présentes, les soussignés s’engagent à soumettre leur différend, préalablement à toute instance judiciaire, à
des conciliateurs, chacune des parties en désignant un, sauf le cas où ils se mettraient d’accord sur le choix
d’un conciliateur unique” ; qu’en déclarant purement et simplement irrecevable, par application de cette
clause, la demande de M. Daniel X..., quand la convention, loin d’interdire aux parties d’agir en justice, se
borne à différer la saisine du juge jusqu’à l’issue de la procédure de conciliation qu’elle prévoit, la cour
d’appel a violé l’article 1134 du Code civil.
Publication : Bulletin 2003 MIXTE N° 1 p. 1
Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 18 avril 2000
21
CORRECTION
I.
REDACTION D’ACTE DE PROCEDURE
S’agissant d’un exercice de rédaction, le correcteur pourra avant tout s’attacher au respect par les
étudiants du formalisme des conclusions, et notamment aux mentions obligatoires et/ou usuelles.
A cet égard, les étudiants disposant d’un modèle complet fourni en annexe.
L’énoncé du sujet et la nature de l’acte de procédure requièrent par ailleurs une certaine concision
: le correcteur pourra donc apprécier la capacité des étudiants à synthétiser les faits de l’espèce et
leur argumentation juridique et sanctionner les écritures trop longues ou non achevées.
La qualité des arguments juridiques développés par les étudiants est laissée à la libre appréciation
du correcteur. Il serait cependant opportun d’opposer aux arguments de la FFF une impossibilité
matérielle d’exécution (en nature ou par équivalent) et de débattre sur la nature juridique de
l’obligation pesant sur BLING BLING (moyen ou résultat). D’autres moyens juridiques, plus
originaux peut-être, pourront être développés par les étudiants. Il ne s’agit pas de les sanctionner,
cette partie du sujet ayant vocation à apprécier les capacités de rédaction. De ce point de vue,
l’argumentation juridique sera essentiellement évaluée au regard de son articulation avec les faits,
le correcteur étant invité à évaluer la cohérence de l’ensemble et la clarté du raisonnement suivi.
II.
CONSULTATION
1.
Sur le non respect des termes du pacte d’actionnaire et sur les pouvoirs du directeur
général
Les étudiants devront être évalués sur leur capacité à analyser les termes précis des dispositions
contractuelles (droit de préemption) et statutaires (limitation des pouvoirs du directeur général)
tout en s’appuyant (i) sur les grands principes applicables en droit des sociétés et en droit des
contrats et (ii) sur la jurisprudence applicable en la matière.
(i)
Sur les chances de succès de la société BEPE
•
Sur la violation alléguée du droit de préemption prévu dans le pacte)
Rappel du principe
PedroGaz est une société anonyme c’est-à-dire une société par actions. Le principe en la matière
est que la transmission des actions est libre.
Analyse de l’article III du pacte
L’article III du pacte d’actionnaires liant TATOL et BEPE limite la libre transmissibilité des
actions. Les étudiants devront analyser l’applicabilité ou non du droit de préemption au cas
d’espèce. En tant qu’exception au principe, cette disposition doit être interprétée restrictivement.
Le juge, dans le cadre de ses pouvoirs souverains, est amené à rechercher l’intention des parties au
moment de la signature du contrat et dans le cadre de sa négociation (jurisprudence sous l’article
1134 du Code civil). Cela est d’autant plus pertinent que les termes du pacte sont relativement
larges et mentionnent les opérations de cession « de quelque nature qu’elle soit »). L’étudiant devra
22
avoir rappelé le principe d’interprétation souveraine par le juge du fond au vu de l’intention des
parties.
Une analyse précise des opérations soumises au droit de préemption de BEPE devra ensuite être
effectuée au regard de la jurisprudence du 15 décembre 2009 (fournie). Au cas d’espèce, il
s’agissait d’une opération d’apport de titres par la société TATOL au profit de la société BLING
BLING. Or le pacte ne vise que les opérations de « cession, de quelque nature qu’elle soit ». Aux
termes de la jurisprudence la plus récente (15 décembre 2009), les juges suprêmes se refusent
d’assimiler à une opération de « cession » l’opération d’apport, même isolé et à titre pur et simple
notamment (i) car le transfert de propriété du bien à la société n’est pas définitif comme dans le
cas d’une cession et (ii) la contrepartie, qui n’est pas une somme d’argent, est un bien dont le
transfert est également temporaire (or l’article III alinéa 1 in fine du pacte parle de « prix »).
L’article III du pacte ne semblait donc pas applicable.
Bonus
Les étudiants qui auront relevé que la jurisprudence en la matière est fluctuante et que les juges
ont parfois assimilé une opération d’apport pur et simple à une opération de cession (Cour
d’appel de Versailles du 30 octobre 2008 dont la décision a été cassée par les juges suprêmes le 15
décembre 2009 ; Cass. com 21 janvier 1970, cité dans le Code monétaire et financier, sous l’article
L.228-23) pourront être récompensés.
•
Sur les pouvoirs du directeur général de BLING BLING
Rappel du principe
L’étudiant devra avoir rappelé le principe selon lequel, aux termes de l’article L.225-56 I du Code
de commerce (fourni), le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en
toute circonstance au nom de la société.
Analyse de l’article 12.2 des statuts
Discussion sur la nature d’une opération d’apport : l’apport en société peut il être assimilé
à une « acquisition ou une aliénation d’actifs » ? Les étudiants pourront s’interroger sur la nature
sui generis de l’apport en nature à une société. Si l’apport est proche de la vente, donc de l’ «
acquisition » ou de l’ « aliénation », il en diffère notamment (i) car le transfert de propriété du bien
à la société n’est pas définitif comme dans le cas d’une vente et (ii) la contrepartie, qui n’est pas
une somme d’argent, est un bien dont le transfert est également temporaire. La précision « (sous
quelque forme que ce soit) » semble toutefois militer pour une interprétation large de la clause
statutaire.
L’étudiant devra par conséquent débattre de l’application ou non de la clause statutaire, limitant
les pouvoirs du directeur général en cas d’« acquisition ou une aliénation d’actifs », à l’apport des
titres PedroGaz.
A considérer que l’apport en nature est « une acquisition » ou « une aliénation », l’apport
de TATOL à la société BLING BLING est valorisé à 2 millions d’euros, soit au dessus du seuil
statutaire d’un million d’euros. L’approbation préalable du conseil d’administration semblait donc
requise.
(ii)
Sur les sanctions en cas de succès de l’une ou l’autre des prétentions
23
•
Sanctions de la violation du droit de préemption prévu dans le pacte
Nature de l’obligation à la charge de TATOL
Le droit de préemption fait naître chez TATOL une obligation de faire en cas de cession de ses
titres, i.e. obligation de proposer la cession à BEPE (Cass. com. 7 mars 1989, cité sous article 1142
du Code civil). En principe, l’obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et
intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur (article 1142 du code civil). BEPE semble
toutefois vouloir aller plus loin et « remettre en cause la validité » de l’apport.
Exécution forcée dans certains cas limités – tiers de mauvaise foi
Lorsque le droit de préemption est extrastatutaire comme en l’espèce, la jurisprudence admet de
manière restrictive la possibilité d’annuler l’opération en cas de violation du droit de préemption
et la possibilité pour le bénéficiaire de ce droit de se substituer à l’acquéreur, quand bien même
l’obligation à la charge du débiteur (i.e. TATOL) est une obligation de faire. Deux conditions
cumulatives, que l’étudiant devra avoir rappelées, sont nécessaires et ressortent de l’arrêt de la
chambre mixte de la cour de cassation du 26 mai 2006 (fourni). Ces conditions manifestent la
mauvaise foi du tiers acquéreur :
1.
La connaissance du tiers de l’existence du droit de préemption ; et
2.
La connaissance du tiers de l’intention du bénéficiaire de se prévaloir du droit de
préemption.
L’étudiant devra ensuite analyser les faits d’espèce pour savoir si ces deux conditions cumulatives
sont réunies :
1.
S’agissant de la connaissance du tiers (i.e. BLING BLING) de l’existence du droit de
préemption : il est mentionné que BLING BLING avait au préalable approché BEPE pour
acquérir ses 50% dans PedroGaz et que dans ce cadre, le pacte d’actionnaires avait été
communiqué à BLING BLING. Cette dernière avait donc connaissance du droit de préemption
au moment de l’apport par TATOL de ses actions PedroGaz.
2.
Par ailleurs, BEPE avait indiqué par écrit à BLING BLING son désir d’augmenter sa
participation dans PedroGaz. BLING BLING pourra difficilement contester sa connaissance de
l’intention de BEPE de se prévaloir du droit de préemption en cas de transfert de ses titres par
TATOL.
Conclusion : il semble que les conditions jurisprudentielles soient réunies pour permettre à BEPE
de demander l’annulation de l’apport et d’obtenir sa substitution à BLING BLING. Par ailleurs,
l’exécution forcée en nature de l’obligation de faire de TATOL ne porte pas atteinte à la personne
du débiteur.
Bonus
L’étudiant qui aura relevé les difficultés pratiques pour BEPE de se substituer à BLING BLING
pourra être récompensé. S’il y a effectivement substitution, TATOL devra-elle faire un apport de
ses titres à BEPE et ainsi entrer au capital de cette dernière ? Cet apport devrait alors être
approuvé par les actionnaires de BEPE, ce qui n’est pas certain. Est-il envisageable que la
24
substitution se fasse par l’intermédiaire d’une cession plutôt que d’un apport (i.e. BEPE acquérant
les 50% de PedroGaz contre paiement d’une somme en espèce) ? Dans ce cas, à quel prix ?
•
Sanction de l’excès de ses pouvoirs par le directeur général
L’article L.225-56 I alinéa 3 prévoit que les dispositions des statuts ou les décisions du conseil
d’administration limitant les pouvoirs du directeur général sont inopposables au tiers. Cela vaut
quand bien même les tiers auraient eu connaissance de la clause statutaire.
Par conséquent, BEPE ne pourra pas remettre en cause la validité de l’opération d’apport sur ce
fondement et la société BLING BLING restera tenue d’exécuter les engagements contractés par
Brice Hotfire au mépris de l’article 12.2 des statuts.
2.
Sur l’action en responsabilité contractuelle potentiellement initiée par la FFF à l’encontre
de BLING BLING
(i)
Sur la recevabilité de cette éventuelle action
Identification de la clause de conciliation contenue dans le contrat
Les étudiants devront faire état de l’article 6 du contrat conclu entre la FFF et BLING BLING,
tel qu’expressément rappelé dans le sujet.
Détermination de l’applicabilité de la clause de conciliation
Les étudiants devront débattre de la mise en œuvre de l’exception prévue audit article 6. Cette
exception, qui avait vocation à s’appliquer à la procédure de référé d’heure à heure, n’est en
revanche pas opposable en ce qui concerne une procédure au fond, le sujet mentionnant
explicitement que cette éventuelle action serait engagée par la FFF « non plus en référé, mais au
fond ». Il s’agit donc de conclure à la nécessité pour la FFF, en l’espèce, de respecter l’article 6 et
de déclencher une procédure de conciliation. Cette procédure n’ayant pas été mise en œuvre (le
sujet mentionne explicitement l’intention de la FFF d’assigner « sans autre forme de négociations
»), toute assignation violerait donc la procédure de conciliation préalable.
Identification des conséquences procédurales
Les annexes du sujet incluent l’article 122 du Code de procédure civile relatif aux fins de nonrecevoir, et l’arrêt du 14 février 2003 aux termes duquel la Cour considère que « la clause d’un
contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la
mise en œuvre suspend jusqu’à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de nonrecevoir qui s’impose au juge si les parties l’invoquent ». Les étudiants devront donc développer
dans la consultation le fait que le non-respect par la FFF de son obligation de conciliation
préalable entraîne l’existence d’une fin de non-recevoir qui pourrait être soulevée par BLING
BLING pour faire déclarer irrecevables les demandes de la FFF.
Bonus
Un bonus pourra être accordé aux étudiants qui auront par ailleurs cité l’article 123 du Code de
procédure civile pour préciser que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de
cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient
abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt, et qui conseilleraient par
25
conséquent à BLING BLING de soulever l’irrecevabilité dès que possible, par exemple in limine
litis.
(ii)
Sur la pertinence des préjudices allégués par la FFF
Le sujet fait état de l’intention de la FFF de se prévaloir d’un préjudice commercial subi en raison
de la résiliation des contrats des divers sponsors, d’une perte de chance, et d’un préjudice
forfaitaire qu’elle établit à 10 millions d’euros.
On attend à cet égard des étudiants deux éléments. En premier lieu, il s’agirait de rappeler que
s’agissant d’une inexécution contractuelle, l’action engagée par la FFF se verra donc appliquer les
règles de la responsabilité contractuelle. En second lieu, serait utile dans la consultation un bref
rappel des grands principes régissant la définition du préjudice contractuel indemnisable et de la
perte de chance au regard notamment des dispositions des articles 1147 et 1150 du Code civil.
Concernant l’article 1150, il serait opportun d’évoquer la notion de « dommage prévisible » telle
que dégagée par la jurisprudence sous cet article.
(iii)
Sur les conditions dans lesquelles BLING BLING pourrait, le cas échéant, s’exonérer
d’une partie de la responsabilité de ces préjudices, et/ou engager la responsabilité d’autres
personnes physiques ou morales, afin d’éviter d’assumer seule les lourdes conséquences
financières de cette situation.
Deux actions judiciaires sont théoriquement envisageables : la première, la plus évidente, semble
être à l’encontre de PedroGaz, dont le matériel défectueux a indirectement contribué à causer
l’inexécution contractuelle. Toutefois, il devra être rappelé que, conformément aux termes du
sujet, BLING BLING est désormais actionnaire à 50% de PedroGaz, il semble donc peu
opportun d’assigner en responsabilité sa propre filiale. Reste une seconde action en responsabilité
contractuelle qui pourrait être intentée par BLING BLING à l’encontre de TATOL. A l’occasion
d’une opération d’apport, il est usuel que l’apporteur des actifs concède dans le contrat d’apport
un certain nombre de garanties quant à la teneur de ces actifs (notamment, par exemple, le bon
état des machines). Il conviendrait donc de conseiller à la société BLING BLING d’examiner les
termes du contrat d’apport conclu avec TATOL pour identifier les conditions dans lequel, le cas
échéant, TATOL s’était engagée sur la qualité du matériel apporté pour ensuite engager la
responsabilité contractuelle de cette dernière.
*
*
*
26

Documents pareils