Fiche d`actualité : L`introduction en bourse

Transcription

Fiche d`actualité : L`introduction en bourse
Fiche d’actualité : L’introduction en bourse Introduction « Les banques ne peuvent à la fois augmenter leurs encours de crédit significativement et se voir imposer des contraintes en matière de levier et de fonds propres toujours plus drastiques. Les deux objectifs sont louables, mais pas nécessairement compatibles »1 La crise financière se transmet à l’économie réelle principalement par le « credit crunch » ou resserrement du crédit. On a constaté de vives tensions sur le financement bancaire. L’objectif de faire repartir le crédit, tant bancaire que désintermédié, se heurte potentiellement aux réformes envisagées pour réguler le capitalisme financier et prévenir la répétition d’une nouvelle crise. En effet les nouvelles règles se multiplient et font peser sur des banques des obligations importantes les obligeant à dépenser des sommes colossales (mise en place de procédures, sanctions dépassant le milliard d’euros, exigences de fonds propres accrus…), ce qui se ressent sur le crédit, les banques prêtent moins. La croissance et l’emploi sont les deux grands centres d’intérêts et enjeux des économies libérales aujourd’hui. Cela passe notamment par le financement des entreprises. Si ces dernières ont recours au crédit, en effet les banques françaises continuent de financer l'économie et les 2,7 millions d'entreprises en France, plus de 200 milliards d'euros de crédits nouveaux leur ont été accordés depuis un an, le financement des entreprises passe aussi par le marché. Il arrive un moment où la taille financière d’une entreprise est telle que ses investissements ne pourront être couverts par les apports de ses associés ou ses actionnaires d’origine, l’autofinancement ou les prêts bancaires. Le fait d’être introduite en bourse sur le marché dit « primaire » permet à une entreprise de faire appel à l’épargne publique. Une partie de cette épargne publique est en effet disposée à s’investir à long terme sur le marché financier en souscrivant des valeurs mobilières que l’entreprise en question émet en contrepartie de cet apport de capitaux. L’introduction en bourse assure en outre la mobilité du capital de l’entreprise grâce à l’existence d’un marché quotidien, ses actionnaires peuvent à tout moment céder leurs titres à d’autres sur le marché dit « secondaire ». Selon le rapport de la FBF du 22 octobre 2013 sur le financement des entreprises2, aujourd’hui, le tiers de l’endettement des entreprises provient de l’appel au marché, une tendance qui est appelée à se renforcer. En 2013 les IPO (Initial Public Offering3) se sont multipliées, retrouvant un niveau proche du fameux avant 2008, avec notamment l’IPO de Twitter le 7 Novembre 2013 sur Nyse Euronext à New York dont les chiffres sont assez marquants pour une société dont le Chiffre d’Affaires annuel en 2012 était de 422 millions de dollars et enregistrant des pertes de 134 millions dollars4. En effet le cours de Twitter a pris +72,69% en une journée, plus de 117 millions d’actions ont été échangées et la valorisation atteint près de 25 milliards de dollars soit 18 milliards d’euros, soit plus que Publicis ou Renault. Parmi les IPO marquantes à venir, sont prévues l’introduction d’Euronext et de Chrysler courant 2014. En matière de réglementation, l’actualité se concentre au niveau européen avec l’application des dispositions de la nouvelle directive Prospectus 2010/73/UE du 24 novembre 2010, transposée en droit français par l’ordonnance du 8 novembre 2012 et les décrets n°2012-­‐1242 et n°2012-­‐1243 du 8 novembre 2012. L’AMF a d’ores et déjà transposé dans son règlement général les dispositions ne nécessitant pas par 1 William Kadouch-­‐Chassaing, Directeur des Affaires Financières Société Générale 2 Rapport sur le financement des entreprises, un soutien indispensable à l’économie, Fédération Bancaire Française, 22 octobre 2013. 3 Introduction en bourse en anglais 4 Chiffres Challenge.fr 1 ailleurs de modifications législatives ou réglementaires (modifications en vigueur au 1er juillet 2012). S’agissant des dispositions à vocation réglementaire. La ratification de l’ordonnance, si elle a lieu, confèrera à ses dispositions (actuellement réglementaires) une valeur législative, conformément à l’article 38 de la Constitution. En effet le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2012-­‐1240 du 8 novembre 2012 portant transposition de la directive 2010/73/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 modifiant la directive 2003/71/CE concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation et la directive 2004/109/CE sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé du 16 janvier 2013 n’a toujours pas été adopté. I – Des procédures d'introductions en bourse diverses Les modalités techniques d’une IPO répondent à deux objectifs, diffuser les titres auprès du public et organiser et assurer leur première cotation dans les meilleures conditions possibles. L’introduction peut s'effectuer par : -­‐ l'une des procédures de marché centralisées par Euronext qui permet de réaliser ces deux opérations simultanément pour la totalité des titres ; ces procédures sont au nombre de 4 : ! la cotation directe ! l'offre à prix minimum (OPM) ! l'offre à prix ferme (OPF) ! l'offre à prix ouvert (OPO) Les procédures de marché permettent d'associer un actionnariat plus nombreux -­‐ un placement (garanti ou non), centralisé par l'établissement "chef de file" pour tout ou partie des titres. La procédure de placement cible essentiellement des investisseurs institutionnels. -­‐ la combinaison des deux. 1) L'Offre à Prix Ferme (OPF) Connue il y a quelques temps sous le nom d'O.P.V. (Offre Publique de Vente), cette procédure est la plus utilisée par les banques introductrices et la plus plébiscitée par les émetteurs. Un prix de cession des titres est fixé, et c'est uniquement à ce cours d'introduction que peuvent avoir lieu les ordres d'achat. Cette procédure a la particularité de répartir les attributions de titres proportionnellement à la demande. Les ordres sont classés en "Ordre A", ordres prioritaires qui portent généralement sur un maximum de 100 titres, et en "Ordres B", qui rassemblent eux le reste des titres demandés (Il y a les « Ordre C » pour les institutionnels). Cette classification a pour but d'éviter que les ordres portant sur un faible nombre d'actions soient servis d'autant plus mal que l'introduction remporte un franc succès. -­‐> le taux de satisfaction des "Ordres A" doit être au minimum de 0,8% afin que la procédure d'introduction soit recevable. 2 2) L'Offre à Prix Minimal (OPM) Ce type de procédure permet à la société qui s'introduit de proposer des actions à un prix minimal. Tous les ordres d'achat à cours limité sont recevables à la condition qu'ils ne soient pas trop éloignés du prix minimal (les ordres "au mieux" étant systématiquement annulés). Une fois le carnet d'ordre rempli, le premier cours coté correspond alors à la limite inférieure de la dernière tranche d'ordres servis. -­‐> cette procédure s'applique essentiellement lors des périodes fastes. Le premier cours de Bourse coté ne peut excéder de plus de 50% le prix d'offre. 3) L'Offre à Prix Ouvert (OPO) Cette procédure d'introduction en Bourse consiste, pour l'émetteur, à proposer une fourchette de prix aux investisseurs, laquelle est ensuite susceptible d'être modifiée par les établissements introducteurs pour peu qu'ils aient notifié qu'ils s'en réservaient la faculté. Le prix définitif n'est alors fixé qu'après réception de la totalité des ordres. Comme pour les Offres à Prix Minimal, seuls les ordres supérieurs ou égaux au prix définitif fixé sont servis. Dans le cadre de cette procédure, la souscription d'une partie des titres est réservée aux institutionnels comme les banques, les assureurs, etc... -­‐> les titres peuvent être répartis à la suite de l'offre soit de façon uniforme soit en privilégiant les ordres portant sur les montants les plus faibles. 4) La Cotation Directe La procédure est l'équivalent de l'OPM, si ce n'est que les ordres stipulés "Au mieux" sont acceptés. Autre différence, la société qui émet des actions les cède à des intermédiaires financiers à un prix déterminé, lesquels sont alors tenus de placer ces titres sur le marché. -­‐> la cotation directe est peu utilisée (essentiellement des sociétés qui s'introduisent au Marché Libre) l'écart entre le premier cours coté et le prix d'offre étant limité à 10%. 5) Le Placement Garanti Il s'adresse aux investisseurs institutionnels, et n'est pas tenu de garantir l'équité de la répartition des titres. -­‐> le prix des actions lors de cette procédure est supérieur ou égal au prix d'OPF. L'opération se déroule selon un calendrier prévu dans le prospectus AMF (cf partie II). A titre d'exemple : • Date d'ouverture de l'offre, -­‐ Une période de réservation, précédent la période de procédure de marché, peut être planifiée, auquel cas, les ordres sont exprimés en montant ou en quantité selon les modalités de l'offre et ils sont dits "révocables". -­‐ Période achat ferme : les ordres sont dits "irrévocables" (impossibles à annuler) • Date de clôture et de fixation définitive du prix d'offre • Allocation et réduction des ordres le cas échéant • Date des premières négociations sur le marché • Date de règlement / livraison. • La vente des titres est possible le premier jour de négociation sur le marché. 3 II-­‐ Des procédures d'introductions en bourse soumises à d’importantes obligations Une entreprise souhaitant que ces titres soient introduits à la négociation sur un marché doit respecter un certain nombre de règles. Elle est pour cela assistée d’un établissement de crédit en qualité de chef de file. Tout d’abord l’émetteur doit remplir les conditions d’admissions du marché sur lequel il souhaite que ces titres soient admis. L’entreprise de marché prend la décision d’admettre ou non un émetteur. Les règles sont fixées dans les règles de marchés, publiées sur le site de l’entreprise de marché. « Sociétés cotées & opérations financières » AMF 3 mai 2013 L’introduction en bourse sur le marché réglementé ou l’inscription sur un système multilatéral de négociation organisé avec une offre au public nécessitent l’établissement préalable d’un prospectus soumis au visa de l’AMF5. Ce prospectus est établi sous la responsabilité de la société et doit être mis à disposition du public avant le début de l’opération. L’offre au public de titres financiers et l’admission de tels titres sur un marché supposent l’établissement préalable d’un prospectus visé par l’AMF dont le contenu est déterminé par un règlement européen6. Il contient : •
•
•
•
Le nombre et la nature des titres offerts la souscription Le calendrier de l'opération et la date prévue de cotation des titres Les éléments d'appréciation du prix La procédure d'introduction. 5 Autorité des Marchés Financiers 6 Règlement (CE) n° 809/2004 du 29 avril 2004 mettant en œuvre la directive sur les prospectus Directive 2003/71/CE du
4/11/2003 sur le prospectus à publier en cas d'offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l'admission de valeurs mobilières à la négociation, modifiée par la directive 2010/73/EU transposée en 2012 et les règlements délégués UE de mars 2012, juin 2012 et mai 2013 4 L’AMF ne se prononce pas sur la structure de l’opération. Néanmoins, au titre de ses missions de protection de l’épargne, de bon fonctionnement du marché et pour veiller à sa bonne information, l’AMF définit des règles pour la bonne information du marché concernant notamment, la fourchette de prix sur la base de laquelle est prise la décision d’investissement et également des règles, pour éviter un déséquilibre manifeste dans l'allocation des titres, aux dépens des investisseurs particuliers (art. 315-­‐35 du règlement général AMF). L’AMF veille très scrupuleusement à ce que les facteurs de risque pour les investisseurs soient déterminés et que ces derniers en soient informés, via des notices d’information notamment. S'agissant d'une introduction sur un marché réglementé, un prospectus sera toujours établi. Pour Alternext, un prospectus devra être établi lors de toute première admission sur le compartiment offre au public Alternext Paris (pour un montant supérieur à 2,5 millions d'euros. En deçà de 2.5 millions d’euros, les sociétés sont dispensées du prospectus sur Alternext). L’émetteur candidat à l’introduction en bourse et ses conseils sont souvent amenés à diffuser des informations sur la société préalablement au visa et à la publication du prospectus. Aussi, afin de fournir une information égalitaire au marché le plus en amont possible de l’opération, le prospectus d'introduction peut-­‐être scindé en deux documents : •
•
un document de base sur l'émetteur, enregistré par l'AMF et publié en amont de la période d’offre pour permettre une meilleure prise de connaissance de l’émetteur par le marché une note d'opération accompagnée d'un résumé du prospectus, visée par l'AMF, et publiée au plus tard le jour de l’ouverture de l’offre, sur les caractéristiques de l'opération d'introduction, et incorporant par référence le document de base. Le prospectus est établi par l’émetteur et il engage la responsabilité de ses signataires. Le visa de l’AMF atteste que le prospectus est complet, compréhensible, cohérent. Il n’implique ni approbation de l’opportunité de l’opération, ni authentification des documents comptables et financiers présentés. Une fois le visa accordé par l’AMF, le prospectus doit faire l’objet d’une diffusion effective (art. 212-­‐27 du règlement général) : -­‐
-­‐
être mis à disposition du public, gratuitement, au siège de l’émetteur et être mis en ligne sur le site de l’émetteur être publié sur le site de l’AMF Les documentations à caractère promotionnel se rapportant à l’opération, quelle que soit leur forme et leur mode de diffusion (encarts presse, leaflets, mailing, bannières internet, etc.) doivent être communiquées à l’AMF préalablement à leur diffusion (art. 212-­‐28 du règlement général). Elles doivent, notamment, mentionner l’existence du prospectus visé par l’AMF et leur contenu doit être cohérent avec les informations contenues dans le prospectus. Les obligations sont très strictes en matière de conflits d’intérêts et de gestion de d’information privilégiée. Les banques intervenant sur l’opération doivent être très vigilantes dans l’application des obligations réglementaires, il y a un vrai risque réputationnel. En effet Goldman Sachs et UBS sont dans le viseur des autorités britanniques s’agissant de l’opération d’introduction en bourse de Royal Mail, les deux banques ayant conseillé l’Etat britannique sur l’opération et soupçonné d’avoir sous-­‐évalué les prix. 5 Schéma récapitulant la procédure d’une IPO : Conclusion : L’introduction en bourse permet, en plus d’obtenir un financement, de gagner en notoriété, elle met un coup de projecteur sur des compétences, des équipes, des savoir-­‐faire et permet à une entreprise de se faire connaître du public. Entrer en bourse, c’est pour beaucoup d’entrepreneurs une forme de consécration, c’est acquérir une crédibilité supérieure. Source : AMF Cela représente cependant des risques, l’entreprise introduite est alors soumise aux règles de marché être coté, c’est aussi devoir se soumettre aux exigences des analystes, qui peuvent contraindre l’entreprise à changer de stratégie lorsqu’ils estiment que cela leur sera plus profitable. Paradoxalement, alors que l’introduction en bourse permet de lever des fonds supplémentaires, elle peut donc se traduire par une perte d’indépendance stratégique. Cela entraine aussi un risque face au OPA. Enfin l’introduction en bourse est un processus complexe, coûteux et risqué : il faut généralement faire appel à une banque spécialisée, qui achète les titres avant de les revendre au marché. 6 Annexe 1 : Les introductions en Bourse de 2013 sur Euronext et Alternext : Nom Place de cotation Date Levée Capitalisation au jour de la levée Medtech Tarkett IMPLANET Numericable Blue Solutions MND Group Cardio3 Biosciences Euronext, compartiment C Euronext, compartiment A Euronext, compartiment C Euronext, compartiment A Euronext, compartiment B Euronext, compartiment C Euronext, compartiment C 27/11/2013 21/11/2013 19/11/2013 07/11/2013 29/10/2013 17/10/2013 04/07/2013 20 millions d'euros 530,9 millions d'euros 14,1 millions d'euros 652,2 millions d'euros 85,8 millions d'euros 21,2 millions d'euros 26,5 millions d'euros 64,5 millions d'euros 1,85 milliards d'euros 39 millions d'euros 5,57 milliards d'euros 418 millions d'euros 58,2 millions d'euros 150 millions d'euros Erytech Euronext, compartiment C 30/04/2013 17,7 millions d'euros 64,3 millions d'euros Ymagis Euronext, compartiment C 30/04/2013 11,6 millions d'euros 49,7 millions d'euros Ekinops Euronext, compartiment C 25/04/2013 6,7 millions d'euros 31,1 millions d'euros Spineguard Alternext 23/04/2013 8,1 millions d'euros 30 millions d'euros Annexe 2 : Le rôle de la conformité dans le processus d’introduction en bourse : Le pôle conformité de la banque chef de file (Lead) ou des banques associées à l’opération (Co-­‐lead) est amené à participer de façon active dans la procédure d’introduction. Etapes chronologiques : • Application des procédures standards préalablement à la signature du contrat entre la banque et la société souhaitant s’introduire en bourse : o Procédure conflits d’intérêts (conflits potentiels sur les opérations avec les intérêts de la banque) o Procédure KYC (des actionnaires cédants, de la société) • Comité d’approbation au sein de la banque: présentation de l’IPO, de la société, des honoraires. • Implication des analystes : évaluation de la société mise en bourse, fourchette de valorisation • Présentation par la société à la banque de son activité, de ses objectifs… • Vérification des restrictions investisseurs (investisseurs américains et japonais notamment font l’objet de restrictions) -­‐> Rédaction d’une note d’opération, présentée à la conformité. • Rédaction du prospectus par les équipes de juristes et avocats de la banque et de la société émettrice, consultation de la conformité (documents standardisés) • Après publication de l’information, book constitué par les vendeurs de la salle de marché, présentation à leur client du projet pour « tester » la demande et report des fourchettes de prix et quantités dans un book, présenté à la société • Travail de la conformité sur la documentation commerciale présentée au chargé de clientèle pour diffusion aux clients personnes physiques • Intervention de la conformité sur le marketing post IPO : envoi d’un mail aux clients de la banque présentant l’opération réussie • Contrôles du respect des barrières à l’information, contrôle abus de marché (manquement d’initié principalement). Le Brize Adoïs, Capraja Chloé, Padmore Lovejoy, El Ghadhab Ines 7