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ENTRE RÊVES ET
RÉALITÉS
L'ART
BELGE CHEFS-D'ŒUVRE
DU MUSÉE
D'IXELLES
DU 9 MARS AU 1er JUIN 2014
GUIDE DE VISITE
L'ART BELGE. ENTRE RÊVES ET RÉALITÉS. CHEFS-D'ŒUVRE DU MUSÉE
D'IXELLES
Constituées de plus de 10'000 œuvres datant du XVIe au XXIe siècle, les
collections du Musée d’Ixelles (Bruxelles, Belgique) sont particulièrement
riches en œuvres d'art belge des XIXe et XXe siècles, une période qui
correspond à celle de l’histoire de la Belgique moderne autant qu’à celle
couverte par les collections du Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds.
Le Musée d’Ixelles devant fermer pendant une année ses salles d’exposition
permanente pour cause de travaux, une occasion exceptionnelle s’offre de
présenter à l’étranger les chefs-d’œuvre de sa collection. Le thème retenu
pour cette exposition, qui sera également présentée à l’Espace Muséal
Bellevue de la Ville de Biarritz du 28 juin au 4 octobre 2014, est un panorama
de l’art belge des 150 dernières années, à travers la présentation d’ensembles
représentatifs des principales tendances de son histoire. Un prêt d’une telle
importance n’est possible que dans les circonstances actuelles, et offre donc
une occasion exceptionnelle de découvrir en Suisse cette remarquable
collection, où figurent notamment des œuvres de Pierre Alechinsky, Paul
Delvaux, Jan Fabre, René Magritte ou Théo van Rysselberghe.
L’exposition prend pour fil rouge la question du rapport au réel, un problème
essentiel pour l’art belge, qui lui a donné des réponses extrêmement diverses,
du réalisme social au fantastique en passant par diverses formes
d’expressionnisme ou d’humour. Organisé en sections thématiques destinées
à mettre en évidence les constantes et les spécificités de cette histoire, ce
parcours permet au visiteur d’en découvrir les épisodes majeurs, du réalisme
à l’abstraction et à l’art contemporain, en passant par l’impressionnisme, le
néo-impressionnisme, le symbolisme, le fauvisme, l’expressionnisme ou le
surréalisme.
PUBLICATION
L'art belge. Entre rêves et réalités. Chefs-d'œuvre du Musée d'Ixelles,
Bruxelles, sous la direction de Claire Leblanc, Silvana Editoriale, 2014.
CHF 30.-.
Avec la participation exceptionnelle du Musée d’Ixelles, Bruxelles, Belgique
En partenariat avec la Ville de Biarritz, France
PLAN DE L’EXPOSITION
Salle 8 – Introduction
Salle 9 – Réalisme, Paysagisme
Salle 10 – Art social
Salle 11 – Cabinet d’art contemporain
Salle 12 – Symbolisme
Salle 13 – Symbolisme,
Impressionnisme et
Néo-impressionnisme
Salle 14 – Fauvisme,
Expressionnismes, Surréalisme,
Héritage surréaliste
Salle 15 – L’Abstraction géométrique et
lyrique, CoBrA
Salle 15 – Epilogue : Art contemporain
SALLE 8 – INTRODUCTION
L’exposition propose une véritable découverte de l’art belge, depuis la création
du pays en 1830 jusqu’à nos jours, un art entretenant, d’une part, un
attachement constant à la réalité et à la matérialité de la peinture et, d’autre
part, une sensibilité aiguë pour des voies chimériques : un art entre rêves et
réalités.
SALLE 9 – RÉALISME, PAYSAGISME
RÉALITÉS SUBLIMÉES
Réalisme
L’année 1851 constitue un moment charnière dans l’évolution artistique en
Belgique. Gustave Courbet expose alors ses « Casseurs de pierres » au
Salon de Bruxelles, ébranlant la critique et le public. Son choix thématique
bouleverse les conventions établies : il ne s’agit plus de représenter ni de
mettre en scène des héros mythologiques ou historiques, de traiter des
scènes de genre mais de dépeindre une scène quelconque relatant la vie
« vraie », dans un style pictural franc et assumant sans complexe la
matérialité de la peinture et une gestuelle libre.
Courbet introduit et nourrit activement, au gré de séjours successifs en
Belgique, une donnée fondatrice de la modernité qui se déploiera tout au long
de la seconde moitié du XIXe siècle : l’aspiration au réalisme.
L’art n’est plus le reflet d’un idéal mais l’expression de l’ici et maintenant, le
prolongement direct de l’expérience de l’artiste dans le monde. Premiers
peintres réalistes belges, ils introduisent des thématiques du quotidien,
notamment des milieux populaires, ou des paysages de proximité.
A l’heure de l’essor du médium photographique, la pratique artistique s’ouvre à
des perspectives inédites : la libre représentation et interprétation de la vie
telle qu’elle se donne à voir mais aussi telle qu’elle est ressentie par l’artiste.
Paysagisme
Dans le sillage direct de ces préoccupations réalistes, les artistes
réinvestissent également le genre du paysage. L’art du paysage – issu d’une
longue tradition – occupe d’ailleurs une place honorable au Salon officiel.
Désormais les artistes sortent de l’atelier et peignent sur le motif, en plein air.
Durant la première moitié du XIXe siècle, notamment avec Constable et
Turner, les paysagistes approfondissent les voies de la liberté d’expression et
d’interprétation de la nature. Au gré des paysages explorés et des variations
atmosphériques captées, leurs peintures se libèrent dans le traitement de la
lumière, de la couleur et des techniques picturales qui se font plus déliées,
souples et spontanées. Progressivement, le caractère pittoresque, narratif et
anecdotique du paysage s’éclipse au profit d’une recherche d’expression des
sentiments, de contemplation, ou de prouesses techniques visant à rendre la
fugacité et l’évanescence des lumières, des couleurs et des matières des
paysages et des ciels observés.
L’Ecole de Barbizon, en France, scelle ces aspirations. Dans leur sillage, une
importante vague paysagiste se déploie en Belgique autour de l’Ecole de
Tervueren et des artistes privilégiant les sujets inspirés de la côte belge, en
bord de Mer du Nord.
C’est à partir de 1863 qu’Hippolyte Boulenger, Joseph Coosemans et
Alphonse Asselbergs se retrouvent à l’orée de la forêt de Soignes, à
Tervueren, afin d’arpenter les sentiers des sous-bois et les plaines
environnantes de Bruxelles. En 1866, Hippolyte Boulenger « officialise » leur
filiation au groupe français en faisant apposer à son nom, dans le catalogue
du Salon officiel, « Ecole de Tervueren ». Durant plus d’une décennie, à l’aube
de l’impressionnisme, prolifèrera une production paysagiste mettant au cœur
de ses préoccupations les jeux de lumières, de couleurs, de matières et les
effets – souvent dramatiques – traduisant l’émotion individuelle suscitée par le
paysage dépeint. Les atmosphères enveloppantes, changeantes et subtiles de
la côte belge inspirent également nombre d’artistes, tels Louis Artan ou
Guillaume Vogels.
L’attachement et la sensibilité à la nature, à la réalité, se nourrissent
également, en Belgique, d’une tradition spécifiquement locale, issue de
l’époque des primitifs flamands. La prédilection pour la matière, les
transparences et les effets plastiques ainsi que l’inclination réaliste pour les
sujets dépeints perpétuent les pratiques picturales locales anciennes et
confirment l’existence d’un art spécifiquement belge.
SALLE 10 – ART SOCIAL
RÉALITÉS SUBLIMÉES
L’aspiration à rééquilibrer les relations entre l’art – dans ses manifestations les
plus larges – et la vie réelle est une constante depuis le réalisme. Dans un
contexte d’essor industriel fulgurant et de mutations profondes dans
l’ensemble de la société (urbanisation massive, essor de la classe ouvrière,
modernisation de la vie quotidienne…), les artistes ne peuvent rester
indifférents. Constantin Meunier ou Eugène Laermans offrent une vision lucide
de la vie ouvrière et rurale de l’époque, témoignant d’ailleurs de leur
engagement, tout comme de leur fascination, à l’égard des conditions de
travail et de vie du prolétariat. Entre naturalisme – tendant à une description
objective du sujet – et idéalisation – visant à sublimer, sur le mode esthétique,
les valeurs d’effort, de travail et de collectivité – le réalisme social de la
seconde moitié du XIXe siècle peut être considéré comme l’une des
expressions les plus symptomatiques de cette époque.
SALLE 11 – CABINET D’ART CONTEMPORAIN
L’œuvre d’Edith Dekyndt (née en 1960) illustre l’élargissement de la palette de
médiums utilisés par les artistes d’aujourd’hui. Elle met en lumière le caractère
éphémère des phénomènes naturels ou artificiels, de même que leur
dimension impalpable, dont elle capture la charge poétique. Un objet dans le
vent, un rayon de soleil, la fumée d’une cigarette, voici ce qui émeut l’artiste.
L’espace interagit également en permanence avec les composantes de ce
travail. Edith Dekyndt balade le regard du spectateur, à qui il incombe un rôle
actif. Ses sens sont sollicités par cette œuvre à la fois immatérielle et
tellement substantielle.
Wim Delvoye (né en 1965) est sans doute l’un des artistes belges vivants les
plus connus sur la scène internationale. Son œuvre « Cloaca » reproduit un
système digestif humain et livre en direct des matières fécales, coulées
ensuite dans du plexi et vendues comme œuvres d’art. Une critique radicale
du marché de l’art qui a largement contribué à sa réputation de trublion.
Provocateur, il aime sans cesse mêler choses triviales et objets sacrés dans
des « émulsions » joyeuses – vitraux d’église obscènes et christs tordus mais
réalisés selon la meilleure tradition artisanale, cathédrales de métal ciselées
au laser et bétonnières en porcelaine de Delft. Au lieu de se battre contre la
culture populaire, il faut la prendre et la mâcher, revendique l’artiste. « Kiss »
ravale le thème immémorial de l’amour au plan médical et dentaire : c’est à
travers deux radios de crâne que nous voyons un couple s’embrasser.
SALLES 12-13 – SYMBOLISME
RÉALITÉS RÊVÉES
Le mouvement symboliste fait son apparition en France en 1886 et acquiert
rapidement une dimension européenne touchant tant le domaine des arts
plastiques que celui de la littérature ou de la musique. Récusant le réalisme et
l’impressionnisme, le mouvement entend substituer au réel un ordre supérieur.
À la réalité moderne désacralisée, les symbolistes préfèrent le royaume de
l’intériorité, privilégiant ainsi la dimension onirique et énigmatique. Ils trouvent
refuge dans l’ésotérisme et le mysticisme, notamment par le recours au
mythe, au sacré. Les thèmes exploités sont essentiellement hérités de la
Renaissance, du Moyen Âge et de l’Antiquité. Parmi les œuvres phares du
symbolisme belge, se compte celle de Fernand Khnopff. « Chimère » réunit
les sujets de prédilection de l’artiste : les créatures fantastiques et la figure
féminine, à l’apparence de femme fatale et inaccessible. « Intérieur d’atelier »
de Léon Frédéric est également symptomatique du courant, riche en symboles
aux significations diverses.
Moins amateurs de sujets mythologiques et légendaires, certains favorisent
plutôt les paysages brumeux ou les environnements quotidiens auxquels ils
joignent une dimension de mystère. Parmi eux Léon Spilliaert, féru de scènes
d’intérieur et d’extérieur empreintes de poésie et de silence évocateur. Dans
un style néanmoins plus obscur, « Après la prière du soir » de Xavier Mellery
s’inscrit dans la même tendance.
SALLE 13 – IMPRESSIONNISME ET NÉO-IMPRESSIONNISME
RÉALITÉS SUBLIMÉES
Impressionnisme
À partir des années 1880, la Belgique artistique se tourne résolument vers la
modernité avec la création du groupe des Vingt (1883-1893) et de La Libre
Esthétique (1893-1914). Sous la houlette de l’esthète Octave Maus, ces deux
groupements d’artistes encouragent l’innovation. Par le biais d’expositions, ils
favorisent l’ouverture vers les Arts décoratifs et la découverte des artistes
étrangers d’avant-garde. En 1903, les participants offrent à Octave Maus l’une
de leurs œuvres à l’occasion des 10 ans de La Libre Esthétique. Œuvres que
Maus lèguera au Musée d’Ixelles en 1906 et qu’on retrouve aujourd’hui
exposées au Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds.
Les Impressionnistes – Renoir, Monet, Pissarro, Morisot – exposent à
Bruxelles et influencent les Vingtistes comme Théo Van Rysselberghe. La
peinture en plein air qui capture l’instant, la lumière qui dissout les formes, les
touches de couleur qui font vibrer la toile : autant d’éléments adoptés
maintenant par les jeunes artistes belges. L’impressionnisme belge affiche
une richesse et une variété remarquables avec les vibrations lumineuses et
subtiles d’un Théo Van Rysselberghe, la touche ferme et empâtée d’un Willy
Finch ou les frémissements de la touche de Juliette et Rodolphe Wytsman.
Le courant culmine dans les années 1890 avec l’œuvre luministe d’Emile
Claus. Par une touche méticuleuse et contenue, évitant l’éclatement du sujet
dans la matière picturale, Claus équilibre ses jeux de couleur et de lumière de
manière telle qu’il aboutit à une vibration et une irradiation d’une intensité
exemplaire. Sans fougue ni débordement, dans un certain respect des
propensions réalistes locales, Claus illumine et sublime les campagnes
flamandes des bords de la Lys ainsi que la vie villageoise, les travaux des
champs ou la vie au bord des cours d’eau pour livrer l’une des œuvres les plus
puissantes de l’impressionnisme belge.
Néo-impressionnisme
Tandis que les manifestations impressionnistes se développent en Belgique,
le néo-impressionnisme émerge simultanément. Captivé par les expériences
divisionnistes découvertes à Paris, Octave Maus invite aussitôt les maîtres du
pointillisme – Georges Seurat, Camille Pissarro et Paul Signac – à exposer à
Bruxelles dès 1887. Ainsi, dans le sillage de l’impressionnisme quant au choix
des thèmes et des recherches relatives à la relation lumière-couleur, les néoimpressionnistes développent leur vision de manière plus scientifique et
systématique et l’appliquent grâce à la technique divisionniste. Fascinés par
ces nouvelles perspectives offertes à la peinture, stimulés par les aspirations
positivistes sous-jacentes au courant, des artistes belges emboîtent le pas à la
mouvance néo-impressionniste : Willy Finch, Théo Van Rysselberghe et
Georges Lemmen sont les premiers à s’adonner au pointillisme.
SALLE 14 – FAUVISME, EXPRESSIONISMES
RÉALITÉS RÉINVENTÉES
Fauvisme
Au début du XXe siècle, de jeunes artistes belges réagissent, d’une part, à un
impressionnisme tardif, devenu systématique et, d’autre part, au symbolisme
au contenu littéraire trop intellectuel. Il s’agit pour eux de trouver une autre
voie picturale sans sacrifier la spontanéité de l’émotion. Rik Wouters ouvre la
voie avec une simplification des formes, des plans et des couleurs plus
tranchées. Soutenu par la Galerie Giroux, fondée en 1912, il influence, malgré
sa brève existence, Willem Paerels, Ferdinand Schirren, Louis Thévenet et
Auguste Oleffe.
Ceux qu’on appellera les « Fauvistes brabançons » s’inspirent de sujets
simples : bonheur domestique, tâches de la vie quotidienne, portraits des
proches dans une vision optimiste de la vie. L’emploi de couleurs vives
entraîne l’abandon des jeux classiques de clair-obscur et donne une intensité
expressive à ce style.
Les Belges restent fidèles à un espace en trois dimensions et sont plus
influencés par la composition structurée de Cézanne que par les aplats
colorés sans relief de Matisse. Ils n’en prennent pas moins des libertés avec la
perspective classique. Dans le tableau « Après la messe » de Louis
Thévenet la large table semble rabattue vers le spectateur. Ce style ouvre la
voie à l’expressionnisme et à l’abstraction, et prend fin après la Première
Guerre mondiale.
Expressionnismes
Dans l’entre-deux-guerres, l’expressionnisme flamand occupe le devant de la
scène artistique belge. Il est représenté par Gustave De Smet, Constant
Permeke et Fritz Van den Berghe, qui forment la seconde École de LaethemSaint-Martin, village de Flandre où plusieurs générations d’artistes en quête de
tranquillité s’exilent. Le trio est soucieux de rendre compte des conditions de
vie modestes des villageois flamands et de mettre l’accent sur la dignité de
leur labeur quotidien, comme le montre le « Grand paysage aux vaches » de
De Smet. Outre la puissance d’expression, l’expressionnisme flamand est
caractérisé par un trait pictural épais, des modèles aux corps imposants et une
palette terreuse. Par ses formes schématiques, le « Portrait de Permeke »
signé Van den Berghe évoque par ailleurs l’influence significative du cubisme
sur le mouvement expressionniste.
Si l’expressionnisme flamand a un plus grand rayonnement, le courant est
également représenté sur le territoire wallon, au sein du groupe Nervia (19281938) qui affirme, quant à lui, son identité latine. Amoureux de la Première
Renaissance, ce groupe à l’idéal humaniste prône harmonie et intimité. Bien
que les sources d’inspiration se situent également dans les scènes populaires,
les silhouettes des personnages sont davantage élégantes et délicates, ce
dont témoigne le « Nu » de Louis Buisseret. Autre membre majeur, Anto Carte
affectionne les scènes aux allures à la fois paysannes et religieuses tel «
L’Homme au coq », inscrivant son œuvre entre expressionnisme et
symbolisme.
SALLE 14 –SURREALISME, HERITAGE SURREALISTE
REALITES MAGIQUES
Héritier du mouvement d’avant-garde Dada, le surréalisme voit le jour en
France en 1924 avec la rédaction de son « Manifeste » par André Breton. Il
trouve très vite d’autres terres d’accueil comme l’Espagne ou la Belgique. À
travers toute l’Europe et par l’intermédiaire de toutes les disciplines artistiques,
les artistes ont l’ambition de faire table rase des conventions et des tabous de
la classe bourgeoise dirigeante. Ils partagent une volonté de renouveler le
langage réaliste pour faire place à l’absurde et au subconscient. Le monde
onirique est privilégié, au détriment du bon sens. Davantage en France qu’en
Belgique, les surréalistes mettent leur travail au service de la révolution
socialiste.
René Magritte réinvente les formes du réel avec un rendu néanmoins
hyperréaliste, ce qui procure un sentiment de malaise. Paul Delvaux, quant à
lui, n’affirme pas son appartenance au courant mais use malgré cela de
nombreuses caractéristiques surréalistes. Quelquefois il se contente de nourrir
ses œuvres d’une atmosphère surréelle et associe fréquemment des motifs
sans liens apparents. À certaines occasions encore, il peint des situations qui
vont littéralement à l’encontre de la logique, comme dans « La Fenêtre ».
Le surréalisme en Belgique, dont le rayonnement mondial assure sa large
renommée encore à ce jour, s’étiolera naturellement au fil des années,
notamment au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Cependant,
l’ouverture au rêve et au surréel offerte par le mouvement connaît une
pérennité tout au long de la seconde moitié du siècle – notamment, par
exemple dans l’univers du singulier et caustique Marcel Broodthaers ou de
l’œuvre fantasque et poétique de Panamarenko – et, d’une certaine manière,
aujourd’hui encore. L’esprit surréaliste, dont nombre de Belges se plaisent
eux-mêmes à revendiquer comme symptomatique de l’identité nationale, est
entretenu par une certaine frange de l’art actuel travaillant autour du rêve, de
l’humour, de l’ironie et d’une aspiration à éviter les codes consensuels, tel
Wim Delvoye par exemple.
SALLE 15 – L’ABSTRACTION GÉOMÉTRIQUE ET LYRIQUE, COBRA
RÉALITÉS CHIMÉRIQUES
L’abstraction, entre « raison et sentiments »
A l’instar des mouvances internationales, deux principales phases et deux
grands types d’abstraction – géométrique et lyrique – se succèdent en
Belgique.
La « première abstraction » se développe à la sortie de la guerre 1914-1918.
C’est alors une abstraction constructiviste – également évoquée comme
« Plastique Pure » – qui se déploie durant l’entre-deux-guerres. Dans ce
contexte de crise et de doute, les principes de représentation réaliste, mis en
cause tout au long de la seconde moitié du XIXe siècle, sont radicalement
battus en brèche. Sous l’impulsion du groupe hollandais De Stijl, cette
première abstraction belge naît à l’aube des années 1920, sous le nom de
Plastique Pure. Malgré les efforts d’artistes tels que Victor Servranckx, elle
s’essouffle rapidement, faisant place à des courants plus conservateurs.
Une alternative contrastée, au destin tout aussi prolifique, émergera toutefois
après la Deuxième Guerre mondiale : l’abstraction lyrique. Dès 1945, un
groupe est fondé au nom de la liberté d’expression : La Jeune Peinture belge.
Progressivement, Louis Van Lint, Anne Bonnet et d'autres atteignent
l’abstraction par une déconstruction du monde visible. Ces artistes, à l’instar
d’un Antoine Mortier, représentent l’abstraction lyrique, qui garde le souvenir
de la réalité. Les expériences du cercle donneront également naissance à
l’abstraction géométrique, plus radicale et, quant à elle, totalement détachée
du réel. Jo Delahaut fait figure de chef de file et signe « Rumeurs », œuvre
empreinte de mesure et de structure à l’image du mouvement, dans la
continuité du travail des premiers abstraits.
CoBrA
Mais c’est aussi au sein du groupe CoBrA que l’abstraction lyrique trouvera sa
forme la plus épanouie. Né en 1948 du rassemblement de trois groupes
développant des recherches comparables – Host au Danemark, Reflex aux
Pays-Bas et le Surréalisme révolutionnaire (fondé par Christian Dotremont en
1947 à Bruxelles) – l’appellation du groupe est issue de la synthèse des
premières syllabes des trois capitales (Copenhague, Bruxelles, Amsterdam)
dont sont originaires ces artistes. Animée par Pierre Alechinsky, Christian
Dotremont, Asger Jorn, Karel Appel et Serge Vandercam, l’association ancre
explicitement ses orientations et ses objectifs dans la voie de l’abstraction
lyrique. À leurs yeux, la création artistique doit dépasser les querelles
réductrices autour de l’opposition entre abstraction et figuration et doit
retrouver une fraîcheur, une naïveté, une spontanéité et une liberté
d’expression.
« CoBrA » de transmission du Belge Pierre Alechinsky et « Obscurité
illuminée» du Danois Asger Jorn illustrent notamment la philosophie du groupe
qui entend revenir aux sources de la création, puisant ses sujets d’inspiration
dans les dessins d’enfant et les arts primitifs ou populaires. À l’inverse de l’art
construit, guidé par des principes de rigueur, CoBrA suggère une totale
spontanéité créatrice et une libération du geste pictural. Révoltés, les
membres se veulent en marge de la culture occidentale. Christian Dotremont
s’inspire ainsi de la calligraphie orientale et fait de ses poèmes illustrés,
appelés « Logogrammes », une marque de fabrique.
SALLE 15 – EPILOGUE: ART CONTEMPORAIN
L’épopée de l’art libéré au fil de nombreuses révolutions esthétiques se
déploie avec constance de 1850 à l’avènement de l’abstraction au milieu du
XXe siècle. C’est au cours de ces deux siècles que les axes et les orientations
de l’art moderne se sont définis et ont ouvert la voie aux expérimentations
postérieures – foisonnantes et singulières – œuvres de Panamarenko, Michel
François, Edith Dekyndt, Wim Delvoye, Jan Fabre, Xavier Mary… Ces artistes
laissent entrevoir la pérennité des orientations prises par la Belgique
depuis 150 ans : un art, empreint d’humour et de dérision, exprimant tout à la
fois son attachement et son détachement à l’égard du réel, honorant la
factualité de la peinture pour elle-même et cultivant sa liberté et sa fraîcheur
par rapport aux courants internationaux pour, finalement, perpétuer avec
originalité cette habileté si fructueuse à jouer librement l’entre-deux : entre
rêves et réalités.
CONCEPT ET RÉALISATION
Commissaire : Claire Leblanc, conservateur du Musée d’Ixelles.
Co-commissaires : Lada Umstätter, conservatrice directrice du Musée des beauxarts de La Chaux-de-Fonds et Alain Fourgeaux, directeur des Affaires culturelles de
la Ville de Biarritz.
Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds : Sophie Vantieghem (coordination,
recherches); Nicole Hovorka, Mathieu Amstutz, Léa Marie d'Avigneau, François
Henry (régie d’œuvres, gestion administrative, recherches) ; Alexandra Zuccolotto,
Joël Rappan (relations publiques, site web) ; Anouk Gehrig Jaggi (constats d’état) ;
Gabriel Umstätter (relecture des textes, dossier de presse) ; Maria Walhström
(documentation) ; onlab, Thibaud Tissot, Nicolas Polli (graphisme) ; Pierre Bohrer
(photographie) ; Tatiana Armuna, Francine Barth, Irène Brossard, Wolfgang Carrier,
Stéphanie Chambettaz, Ivana Gvozdenovic, Priska Gutjahr, Daniel Hostetteler,
Marikit Taylor (médiation culturelle) ; Tatiana Armuna, Florestan Berset, Priska
Gutjahr, Daniel Hostettler, Beat Matti, Daniela Moretti, Jean-Pablo Mühlestein, Romi
Cattin, Joël Rappan, Yves Regamey, Jean-François Tissot, Thomas Trippet, Bruno
Wittmer, Alexandra Zuccolotto (accueil / surveillance).
Equipes techniques : Mathias a Marca (responsable), Lélia Bouille, Jonas Chapuis,
Yannick Lambelet, Yann Leu, Beat Matti, Jean-François Tissot, Victor Savanyu
(accrochage, encadrement, montage) ; Cédric Brossard (responsable), Maryvonne
Kolly, Laurence Schmid, Vanni Stifani (régie et entretien du bâtiment).
REMERCIEMENTS
Ixelles: Willy Decourty, Bourgmestre et Yves de Jonghe d’Ardoye, Échevin de
la Culture et des membres du Collège des Bourgmestre et Échevins d’Ixelles.
Biarritz: Didier Borotra, Sénateur(H) Maire et Marie Contraires, Adjointe déléguée
aux Affaires culturelles et au Patrimoine.
La Chaux-de-Fonds: Jean-Pierre Veya, directeur du dicastère et conseiller
communal, Xavier Huther, administrateur du dicastère ; Angelo Melcarne et Valérie
Mathez, co-présidents (Société des amis du Musée des beaux-arts de La Chaux-deFonds).
Musée d’Ixelles: Anis Benkacem, Anne Carre, Bérénice Demaret, Débora Leleu,
Stéphanie Masuy, Laura Neve, Marc De Moor, Aïda Bahtit, Thierry Charpentier,
Marco Cohen, Laurent De Bluts, Jérémy De Leener, Saïd D’Khissi, Abdel El Boti,
Sergio Gualini, Danielle Joye, Nadine Machtelinckx, Vincent Marganne, Rachid
Uarda, Mohammed Zebti, Tullia Teucci, Sarah Aucremane, Patricia Baes, Carine
Klein
Espace Muséal Bellevue de la Ville de Biarritz: Pascaline Serenari, Marie-Hélène
Labasse, Hélène Girard, Gérard Gostisbehere, Claire Ripert.
Prestataires externes : Via Mat Artcare AG, Suisse (transport) ; A.DC., Fine Art
Business Partner, IC-Verzekeringen – Mme Régina Stappers, Belgique (Assurance) ;
Mixed Media ; Vincent Everarts (photographies des œuvres)
AUTOUR DE L’EXPOSITION
VISITES COMMENTÉES
Dimanche 9 mars à 11h15 par Claire Leblanc, conservateur du Musée
d’Ixelles et commissaire scientifique de l’exposition et Lada Umstätter,
conservatrice directrice
Visite réservée aux membres de la Société des amis du Musée des
beaux-arts (SaMba)
Dimanche 23 mars à 11h15 par Lada Umstätter, conservatrice-directrice
Dimanche 11 mai à 11h15 par Sophie Vantieghem, conservatrice assistante
Entrée libre
ATELIERS POUR ENFANTS (6-12 ANS)
Fritz, frites et les moules
Animés par Priska Gutjahr
Mercredi 26 mars, 14h00 – 15h30
Mercredi 9 avril, 14h00 – 15h30
Mercredi 7 mai, 14h00 – 15h30
Sur réservation. Prix : CHF 12.-
VISITES COMMENTÉES AUTOUR DE LA COLLECTION
Pour les adultes et les enfants. Programme détaillé sur le site du musée.
SAVE THE DATES !
17 mai 2014 (19h00 – 24h00) : Nuit des musées
18 mai 2014 (10h00 – 17h00) : Journée des musées
7 - 8 juin 2014 : Fête du 150ème anniversaire du musée, visites, ateliers,
diverses manifestations pour tous
5 juillet 2014 (17h00) : Vernissage de l’exposition « AES+ F. The Liminal
Space Trilogy. Au seuil du paradis et de l’enfer »