Chapitre 4 : Milieux humides

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Chapitre 4 : Milieux humides
Chapitre 4 : Milieux humides
Les milieux humides sont des sites qui sont inondés ou saturés d’eau, sur une période suffisamment longue, pour que
la composition du sol et de la végétation soit influencée par la présence de l’eau. Ce sont avant tout des écosystèmes
de transition entre les milieux terrestres et aquatiques. Les milieux humides couvrent 12 millions d’hectares au Québec,
soit 8% du territoire, et représentent environ la moitié des 1100 sites protégés au Québec (Gadreau, 2000).
Les rôles des milieux humides :
Les milieux humides ont de nombreuses utilités, toutes plus importantes les unes que les autres. Premièrement, ces
milieux préservent la biodiversité. Au Québec seulement, 271 des 638 espèces de vertébrés dépendent des milieux
humides pour se reproduire, se nourrir ou trouver un abri (Thibaudeau, 2005). Les milieux humides ont, aussi, un rôle à
jouer dans le cycle de l’eau.
En effet, ceux-ci retiennent d’énormes quantités d’eau. Ils préviennent ainsi les inondations et les sécheresses,
localement. De plus, l’eau qui séjourne dans les milieux humides est filtrée, oxygénée et débarrassée de l’ensemble
des bactéries qu’elle contient. Les milieux humides diminuent également l’érosion, car leur végétation réduit la vitesse
du vent et de l’eau, ce qui favorise la conservation des sols arables. Aussi,
de grandes quantités de dioxyde de carbone (CO2) sont absorbées par ces
milieux. Finalement, les milieux humides sont propices aux activités
récréotouristiques. Ils constituent de beaux paysages et sont des endroits
Les milieux humides représentent
entre 3 et 4% de la superficie du
bassin versant.
MAPAQ, 2004 et Canards illimités, 2006
idéaux pour l’écotourisme.
4.1 Les milieux humides dans le bassin versant de la rivière Yamaska
Il est difficile de chiffrer exactement la superficie occupée par les milieux
humides.
Selon
le
MAPAQ
(2004),
les
milieux
humides
2
représenteraient près de 148 km , tandis qu’une compilation des
2
données de Géomont (2008) indique une étendue de 154,96 km .
Cependant, les sources de données, la classification et la précision
peuvent différer d’une étude à l’autre et il n’est donc pas possible d’en
tirer un constat. Donc, les milieux humides de toutes sortes représentent
environ 3 % de la superficie du bassin versant. Les marécages sont les
plus communs, suivis des tourbières boisées, puis des marais. Les
Tourbière
(Patrice Lefebvre, COGEBY, 2006)
figures 11 et 12 représentent la répartition des milieux humides dans le bassin de la Yamaska. Les zones les plus
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importantes en termes de superficie sont situées au nord du bassin (la Baie Lavallière) et dans la zone du piedmont et
des Appalaches. Les milieux humides des basses terres du Saint-Laurent sont presque complètement disparus à
l’exception de quelques marécages, tourbières boisées et bogs très dispersées.
Type de milieux humides :
Eau peu profonde : «Milieu humide comprenant les étangs, les dépressions et les cuvettes qui se situent dans des zones
fluviales, riveraines et lacustres. Il fait la transition entre les milieux humides normalement saturés d’eau de manière
saisonnière (marais, marécages, fens ou bogs) et les milieux aquatiques dont la profondeur de l’eau est plus importante.
L’eau peu profonde atteint une profondeur maximale de 2 mètres en été. Il y a présence de la végétation flottante (nénuphars)
ou submergée (élodées) avec moins de 25 % de la superficie colonisée par des plantes émergentes (quenouilles, joncs).»
(GÉOMONT, 2008)
Marais : «Milieu humide souvent rattaché au fleuve, à un lac ou à un écoulement d’eau lent et qui est habituellement riche en
nutriments. Le niveau d’eau varie selon les marées, les inondations et l’évapotranspiration, ce qui fait que le marais (eau
douce, saumâtre ou salée) peut être inondé de façon permanente, semi-permanente ou temporaire. Il est colonisé par une
végétation émergente (quenouilles, joncs), flottante (nénuphars) et submergée (élodées). Parfois, on le qualifie d’herbier
aquatique qui représente un regroupement de plantes submergées et flottantes.» (GÉOMONT, 2008)
Marécage : «Milieu humide souvent rattaché à un lac ou une rivière avec une teneur assez élevée en nutriments. On trouve
également les marécages d’écoulement qui ne sont pas connectés à un réseau hydrographique, mais qui sont humides à
cause de leur situation topographique qui favorise l’accumulation de l’eau de ruissellement. Le marécage est inondé de façon
saisonnière (crues printanières) avec un sol saturé et une nappe phréatique élevée à écoulement lent. Généralement, il
contient moins d’eau de surface que dans un marais et il est inondé moins longtemps. Les marécages sont dominés par des
arbustes (saule, aulne) et des arbres (frêne rouge, érable argenté, peuplier baumier, frêne noir, cèdre) sur 30 % et plus de leur
superficie.» (GÉOMONT, 2008)
Tourbière boisée : « Sous-classe de marécage qui se définit comme un milieu humide caractérisé par la présence de
tourbe, comme un bog ou un fen, mais qui se distingue par la dominance d’arbres matures (cèdre, mélèze, épinette). Des
tourbières boisées se forment lorsque le sol dans les deux types de tourbières (bog ou fen) devient plus sec ou selon la
topographie (sur les buttes). Les tourbières boisées se trouvent souvent en périphérie des bogs ou des fens. Une tourbière
est un milieu humide caractérisé par la présence de tourbe qui s’accumule plus rapidement qu’elle ne se décompose. La
tourbière possède un sol mal drainé, plutôt acide et la nappe phréatique est au même niveau ou près de la surface.
L’épaisseur de la tourbe est d’au moins 30 cm. Il existe deux types de tourbières : les fens et les bogs, qui se distinguent selon
leur source d’alimentation en eau et la topographie environnante. » (GÉOMONT, 2008)
Fen (tourbière minérotrophe) : « Milieu humide alimenté par les eaux de précipitations et par les eaux d’écoulement (de
surface et souterraines). Par conséquent, il est généralement plus riche en éléments nutritifs et moins acide qu’un bog. La
végétation d’un fen varie selon l’humidité du sol et les nutriments qui y sont apportés. Les fens se trouvent souvent dans le
bas des pentes et dans les dépressions où il y a une bonne circulation d’eau et de nutriments. Il est habituellement caractérisé
par des mousses brunes et des herbacées du type des cypéracées (linaigrette, carex). » (GÉOMONT, 2008)
Bog (tourbière ombrotrophe) : « Milieu humide alimenté uniquement par les précipitations, qui est faible en éléments
nutritifs et plutôt acide. Un paysage plat indique la présence de bog. Le bog est dominé par des sphaignes et des éricacées,
(kalmia, cassandre). On y trouve également de belles fleurs sauvages, telles que les orchidées. Certains bogs comportent
des mares. » (GÉOMONT, 2008)
GÉOMONT, 2008
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FIGURE 11 LA RÉPARTITION DES MI
MILIEUX HUMIDES DU BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE YAMASKA
2
154,96 kmCIC,
2006
0,50%
23%
3%
Eau peu profonde
21%
Marais
Marécage
7%
Potentiel
13%
CIC, 2006
Tourbière bog
33%
Tourbière boisée
Tourbière fen
CIC, 2006
GÉOMONT, 2008
CIC, 2006
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FIGURE 12 LES MILIEUX HUMIDES DANS LE BASSIN VERSANT DE LA YAMASKA
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4.1.1 La baie Lavallière
La baie Lavallière est située à l’embouchure du bassin, à l’ouest de la rivière Yamaska, et est formée de deux
importantes zones composées de marécages, de marais et de prairies humides. Propriété du Ministère des ressources
naturelles et la Faune (MRNF) depuis 1977, ce milieu a été aménagé en 1988 en partenariat avec Canard illimités
canada (CIC) afin d’assurer sa conservation et sa restauration (Bisson, Laurence-Ouellet, 2009). La Société
d’aménagement de la baie Lavallière (SABL) offre des activités d’interprétations sur ce site public de 1400 hectares
depuis 1989. Les principales menaces pour la baie Lavallière sont les coupes illégales de bois, y compris le bois mort,
la chasse à la grenouille, ainsi que les travaux de drainage agricole (UQCN, 1994).
4.1.2 Le marais du lac Boivin
Situé dans la ville de Granby, ce marais d’eau douce de 128 ha est géré par le
Centre d’interprétation de la nature du Lac Boivin (CINLB). Des nichoirs favorisant la
nidification de la sauvagine ont été installés par Canards Illimités. Le marais du Lac
Boivin est menacé par l’eutrophisation accélérée causée par des apports en
phosphore important. Le CINLB comprend quatre sentiers, diverses tours et caches
d’observation qui amènent les visiteurs à la découverte du marais et des boisés
diversifiés qui l'entourent.
Bihoreau Gris au Centre
d’interprétation de la nature du lac
Boivin (CINLB)
(Alain Mochon, FSÉTHY, 2008)
4.1.3 Municipalité de Sainte-Anne-de-la-Rochelle
Dans la municipalité de Sainte-Anne-de-la-Rochelle, on retrouve un milieu sensible de 51 ha. Ce milieu humide,
caractérisé par un cours d’eau marécageux, est un endroit à conserver prioritairement. En effet, on y retrouve de la
lindernie douteuse et de la cornifle épineuse, respectivement espèce rare et espèce susceptible d'être désignée
menacée ou vulnérable (RAPPEL, 2000)
4.1.4 La tourbière de Saint-Joachim-de-Shefford
La société de conservation des milieux humides du Québec protège la réserve naturelle de la Tourbière de-SaintJoachim-de-Shefford. Cette réserve compte environ 20 hectares et abrite des espèces en péril telles l’aréthuse
bulbeuse, la platanthère à gorge frangée variété à gorge frangée ainsi que la grenouille des marais.
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4.1.5 Canton de Valcourt
Un cours d’eau marécageux de 9 ha est présent dans le canton de Valcourt. Le potentiel écologique de ce site est dû à
la présence de la renouée faux-poivre-d’eau et de la cornifle épineuse, soit deux espèces végétales susceptibles d'être
désignées menacées ou vulnérables. La principale menace pour ce milieu humide est la pollution agricole provenant
des champs avoisinants (RAPPEL, 2000)
4.1.6 Municipalités de Sainte-Christine et Béthanie
Le Schéma d’aménagement de la MRC d’Acton fait état de trois habitats du rat musqué dans les municipalités de
Sainte-Christine et Béthanie. Ces sites sont des milieux forestiers humides. Les intentions d’aménagement doivent
donc protéger le couvert forestier de ces milieux tout en permettant des usages compatibles avec la protection du
milieu naturel (UQCN, 2005).
4.2 La perte de milieux humides
Les milieux humides ont une grande valeur environnementale, mais également économique. Leur perte entraîne de
lourdes conséquences non seulement pour l’environnement mais aussi pour la population. Malgré tous les avantages
de ces milieux, ceux-ci sont souvent perçus de manière négative car ils sont impropres à la majorité des cultures
commerciales, à la construction résidentielle, ils hébergent une quantité importante d’insectes en plus de dégager
parfois des odeurs peu agréables.
Les milieux humides du sud du Québec sont de moins en moins nombreux. Par le passé, l’industrialisation de
l’agriculture et l’agrandissement incessant des zones urbaines ont causé leur disparition. Dans la plupart des cas, ces
milieux ont été drainés pour ensuite être cultivés ou encore remblayés dans le but d’en faire des zones résidentielles,
industrielles ou commerciales.
Aujourd’hui, la Loi sur la qualité de l’environnement stipule que « nul ne peut porter atteinte à un milieu humide sans, au
préalable, avoir obtenu une autorisation du ministre de l'Environnement ». De plus, la Politique de protection des rives,
du littoral et des plaines inondables est composée de normes que les gestionnaires et les propriétaires de ce genre de
territoire se doivent de respecter. Mais les lois et les règlements ne sont pas suffisants pour sauvegarder les milieux
humides. De nombreuses tourbières sont drainées sans permis du MDDEP et une fois le processus enclenché, il est
extrêmement difficile, voire impossible, de pouvoir restaurer l’état original du milieu. De plus, la réglementation actuelle,
basée sur des principes visant à éviter et diminuer les impacts, lors de travaux dans des zones humides, défavorise les
petits milieux humides pour mieux se concentrer sur les milieux humides plus vastes. Comme les milieux humides,
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dans le bassin versant de la Yamaska, sont très fragmentés et de petite taille, il faudra plus que des lois pour les
conserver et les mettre en valeur.
La perte des milieux humides dans le bassin versant est difficilement quantifiable, vu le manque de données
comparables sur l’ensemble du territoire. La comparaison entre les données de 1996 et 2002 provenant de
l’analyse d’images satellite présente des écarts si importants qu’elle ne peut être réelle. Les méthodes
employées pour identifier l’utilisation du sol ont évolué et se sont perfectionnées. Il est donc très difficile de pouvoir
comparer des résultats obtenus à l’aide de méthodes différentes. L’interprétation seule de ces données pourrait donner
une image non représentative de la réalité du bassin versant.
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Références :
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version PDF.
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