1. Des jeux à pratiquer en classe

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1. Des jeux à pratiquer en classe
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Comment le jeu mathématique opère t-il sur les apprentissages et sur la construction du
langage ?
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex : jeux édités par le CRDP de Besançon en
partenariat avec la Cité des Sciences et de l'Industrie
1. Des jeux à pratiquer en classe
Le jeu mathématique : un jeu pour jouer
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex sont-des jeux numériques. On y joue à deux, l’un contre
l’autre ou à quatre en deux équipes de deux. Sont-ils des jeux pour jouer ou des jeux pour
apprendre ? Ce sont assurément des jeux pour jouer. Ils sont porteurs d’une dimension ludique
très clairement exprimée qui apportera quelques enrichissements à une pédagogie des
mathématiques qui gagnera en vie, dynamisme et en efficacité.
Le calcul mental au service de la stratégie
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex sont d’abord des jeux, on s’y amuse. Ce sont des jeux
dont la stratégie s’appuie très clairement sur le calcul mental. Ce sont avant tout des jeux qui font
compter. On calcule pour déjouer les plans de l’adversaire et pour gagner.
Plus les aptitudes des joueurs dans le domaine du calcul sont fluides, et plus leur réflexion et leur
stratégie prennent une place significative dans le déroulement du jeu. Le Magix 34, le Multiplay
et le Décadex sont des jeux de stratégie dans le plein sens du terme, on y génère de la rivalité
franche et de la compétition. Ces jeux possèdent une dimension mathématique et pédagogique
d’une grande richesse que tout joueur prendra grand plaisir à découvrir.
L’apprentissage du respect de l’autre
Dans ces jeux, il n’y a point de destruction de l’adversaire. Le principe du respect de l’autre n’a
plus besoin d’être réaffirmé tant il est étroitement imbriqué dans la règle et dans le
fonctionnement du jeu L’objectif de ces jeux n’implique pas la prise de territoires ni la
destruction du potentiel stratégique de l’adversaire. Les différences liées à l’âge, à la langue ou
aux inhibitions physiques ou morales sont ici totalement abolies. Un enseignant peut tout à fait
jouer avec un élève non francophone sans que cela n’affecte en rien la nature et l’authenticité de
leur relation. C’est pour ces raisons conviviales et scientifiques qu’on peut reconnaître au Magix
34, le Multiplay et le Décadex certaines vertus pédagogiques.
L’apprentissage de la concentration
Le jeu est d’abord une activité libre et désintéressée (pas de notation). Il crée entre les joueurs
une relation faite de réciprocité et d’équilibre. Bien qu’il sanctionne l’erreur en désignant un
vainqueur et un perdant, le jeu dans sa pratique ne porte pas à conséquence. Les jeux
mathématiques se rapprochent de l’activité scolaire en ce qu’ils induisent l’un et l’autre une
atmosphère propice à la concentration et au dépassement de soi. Ils sont facteur de progression
personnelle.
L’apprentissage dans le plaisir
Ainsi, on comprendra bien l’intérêt pédagogique d’un jeu qui permet aux enfants de s’approprier
des notions mathématiques dans le but de les faire calculer juste tout en les amenant à triompher
de l’adversaire. En déplaçant la nature des enjeux, le Magix 34, le Multiplay et le Décadex vont
s’attacher à rendre passionnant ce qui est, pour certains, aride et rebutant.
2. Des jeux compatibles avec la vie de la classe
Le jeu mathématique : Un jeu insolite
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex permettent à l’enfant de mobiliser ses compétences avec
rigueur et dans un constant souci de progression. Il sert à introduire de l’insolite dans les
enseignements et à éveiller la curiosité des élèves. L’enthousiasme et la volonté de gagner
demeurent toujours de mise. Ces pratiques ludiques conduiront l’élève à s’impliquer
intellectuellement dans une activité de recherche au cours de laquelle il fera preuve d’ingéniosité
et de vivacité d’esprit.
Le jeu mathématique : Un jeu qui se pratique à plusieurs niveaux
A mesure qu’il joue, l’enfant ressent l’envie de progresser dans sa pratique et de percer les
mystères du jeu. Il dégage des principes dont il éprouve sans cesse la validité. A partir de
certaines hypothèses émises, il expérimente des tactiques puis s’essaie dans la construction de
stratégies gagnantes. Il entre alors dans la recherche dans le jeu et se pose à lui-même quelques
conjectures. Celui qui commence, est-il nécessairement avantagé ? A t-on intérêt d’investir
prioritairement les cases du centre ? Plus l’enfant explore le jeu, plus il se livre à des analyses qui
l’amènent à complexifier son approche. Il ressent alors le besoin d’être confronté à des
adversaires meilleurs que lui et à des situations encore plus complexes qui ne pourront que
l’encourager à accroître sa puissance de calcul. Dans ce contexte, les joueurs prennent d’euxmêmes plaisir à rechercher l’exactitude dans le calcul ou dans le raisonnement comme ils
pourraient être incités à le faire dans n’importe quelle séance de travail.
Des jeux paisibles
La pratique des jeux mathématiques en classe porte en elle l’étonnement, l’envie de découvrir et
surtout celle de réfléchir. Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex sont des jeux qui ne font
intervenir ni le hasard ni l’effet de surprise. Il n’y a donc point de plan secret, toute stratégie est
totalement transparente. On lit aussi bien dans son propre jeu que dans celui de l’adversaire. Le
joueur qui gagne savoure généralement modestement sa victoire. Le perdant s’en prend en
principe à lui-même et impute le plus souvent sa défaite à un manque de vigilance. Les jeux
mathématiques induisent chez le joueur une attitude réservée et recueillie qui rend leur pratique
en classe paisible et constructive. Celle-ci, pratiquée par un petit groupe, est par ailleurs
pleinement compatible avec la poursuite d’activités plus studieuses par le reste de la classe.
3. Des jeux au service de l’apprentissage des mathématiques
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex fournissent aux élèves l’occasion de mettre en pratique
certaines notions mathématiques pour atteindre l’objectif fixé par le jeu qu’ils vont utiliser pour
les besoins du jeu. Ils peuvent accéder au concept sans l’avoir préalablement théorisé. Pour le
joueur, le concept mathématique devient un outil auquel il recourra pour élaborer sa stratégie. Le
jeu libère en quelque sorte les notions mathématiques et les rend propices à l’expérimentation.
Celles-ci trouvent dans les situations de jeu des applications inattendues qu’il est ensuite possible
de relier aux différents domaines du champ mathématique auxquelles elles appartiennent. Ainsi,
les calculs effectués dans le Magix 34 mettent en œuvre les entiers relatifs dont les règles
opératoires trouvent là leur pleine matérialisation. Dans le Magix 34 et le Décadex, le recours au
concept de symétrie centrale peut s’avérer utile pour repérer un grand nombres de configurations
gagnantes. Ce dernier pourra également servir d’illustration au principe de l’égalité des vecteurs.
Le Décadex fournit une illustration simple de la combinatoire et des nombres complémentaires et
le Multiplay offre aux multiples communs d’un nombre une justification pratique accessible à
tous.
4. Des jeux au service de la construction du langage
Le jeu mathématique : un outil d’entraînement au calcul mental
Dans le jeu, les mathématiques sont détournées de leur finalité initiale : celle de produire
des nombres. Le calcul dans le jeu devient l’outil par lequel on prépare son offensive. La
volonté de vaincre stimule la puissance de calcul du joueur qui globalise un grand nombre
d'opérations dont la synthèse des résultats l’aidera dans son travail d’anticipation et dans
sa prise de décision. Le calcul est alors un pur jeu de l'esprit. Il est aussi l'outil à l'aide
duquel on anticipe, on se protège, on réfute une menace ou on prépare une stratégie
gagnante.
Le jeu mathématique : un outil servant à la construction du raisonnement
Le Magix 34, le Multiplay et le Décadex offrent au joueur un grand nombre
d’informations au moyen desquelles il élabore sa stratégie. Plusieurs solutions s’offrent à
chaque fois à lui et il ne doit en retenir qu’une, celle qui lui est la plus favorable. Il la
recherchera en analysant chaque possibilité. Le raisonnement occupe une place
primordiale dans le jeu mathématique. On l'utilise pour étudier une situation, pour
rechercher une solution, on est alors dans ce qu’on appelle un problème ouvert. L’accent
est mis ici sur le raisonnement. On raisonne aussi pour justifier une prise de décision ou
pour la contester. Le problème est alors fermé. On privilégie ici la réponse. La démarche
utilisée dans le jeu est comparable à celle que l’on utilise en mathématiques lorsque l’on
cherche une solution à un problème (ouvert) ou lorsque l’on recherche la solution d’un
problème (fermé).
L’apprentissage de l’expression de la pensée
Le joueur qui joue seul contre un adversaire est en principe peu enclin à analyser les
différentes situations qui s’offrent à lui. Très content d’avoir pu trouver une solution, il
s’empresse de l’utiliser. Quelle que soit l’issue de la partie, il ne saura jamais expliquer
pourquoi il a perdu ou gagné. Si à la place de faire jouer deux élèves l’un contre l’autre,
on les fait jouer à quatre en deux équipes de deux en situation collaborative, on crée là des
conditions de jeu d’une très grande richesse qui vont déboucher directement sur
l'expression de la pensée. Pour cela, on ne place pas deux joueurs d’une même équipe l’un
à coté de l’autre. Celui dont c’est le tour de jouer doit nécessairement faire valider son
coup par son partenaire qui doit avoir lui aussi son mot à dire. La communication
chuchotée n’est pas autorisée. Il doit communiquer à voix haute et faire en sorte que les
échanges soient entendus par l'équipe adverse. Les stratégies sont évoquées ainsi au grand
jour et sont donc connues de tous les joueurs. Chaque partenaire fait part des opportunités
qu’il a repérées dans la situation de jeu. Ils étudient ensemble les différentes possibilités.
Durant la partie, le dialogue s’installe entre les deux co-équipiers qui progressent dans
leur réflexion. Ces pratiques obligent le joueur à mettre des mots sur sa stratégie et à se
faire comprendre de son partenaire. Elles favorisent la verbalisation de la pensée
rationnelle et débouchent ainsi, par le jeu de la confrontation des points de vues opposés,
sur la construction du langage argumentatif à visée persuasive."
L’apprentissage de la démonstration et de l’argumentation
Les décisions sont donc prises dans le binôme en toute connaissance de cause. La vision
du jeu s’élargit. C'est au joueur dont c'est le tour de jouer, de décider du coup qu'il va
choisir. Son partenaire ne doit pas jouer à sa place, il exerce une mission de contrôle.
C'est en passant par le verbe que le joueur va convaincre son interlocuteur du bien-fondé
de sa stratégie. Pour y parvenir, il est incité à reformuler sa stratégie, à clarifier son
analyse, et à détailler ses arguments afin de recueillir l'adhésion de son coéquipier. Dans
le jeu à quatre, la distribution des rôles change à chaque tour et on devient alternativement
acteur et collaborateur. Un joueur est acteur quand il doit jouer : c'est lui qui décide,
l'autre remplit une mission de conseil et inversement.
L’apprentissage de la coopération
Cette pratique collective génère rapidement une qualité de jeu de très haut niveau. Elle
laisse peu de place à l'erreur. Elle est vite repérée par l'un des membres du binôme.
La pratique à quatre prépare aussi aux situations de collaboration de groupes. Le joueur
ne doit pas imposer son coup et doit être à même de faire accepter sa stratégie par son
partenaire. Il devra se montrer convaincant. Ses capacités à démontrer et à argumenter
sont ici déterminantes. Inversement, son coéquipier doit savoir-faire preuve de sens
critique. Cette démarche incite chacun des joueurs à prendre des distances par rapport à
son point de vue initial et à considérer des arguments contraires aux siens en essayant de
convaincre l'autre. Ces pratiques présentent un fort intérêt pour les classes d'enfants non
francophones ou maîtrisant imparfaitement l'expression orale. La nécessité d'échanger
avec son partenaire va conduire le joueur à ordonner sa pensée et à la structurer.
La construction du langage
L’enseignant a sa part dans le succès d’un apprentissage collaboratif. Il aide les enfants à prendre
possession du jeu en les interrogeant sur les objectifs à atteindre et sur les contraintes à respecter.
Il n’intervient pas directement dans le fonctionnement d’une paire sauf si elle laisse un de ses
membres en dehors de l’interaction. Dans ce cas, il va exercer son rôle de médiateur en reprenant
les propos de l’enfant passif pour les lui faire clarifier ou expliciter. En l’amenant à prendre part
dans la prise de décision, l’enseignant va aider l’enfant à intégrer certaines structures langagières
qu’il pourra ensuite réinvestir dans une pratique du jeu à deux, notamment lorsqu’il devra
exposer de manière intelligible un raisonnement à son partenaire.