Le commerce extérieur tunisien

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Le commerce extérieur tunisien
Le commerce extérieur tunisien
Résumé
La balance commerciale de la Tunisie est structurellement déficitaire, déficit qui s’est creusé au fil
des années et notamment depuis la révolution avec une croissance du PIB essentiellement
entretenue par l’augmentation de la demande. En 2015, dans un contexte de réduction de la facture
énergétique et d’une augmentation sans précédent des exportations d’huile d’olive, le déficit est
retombé à 14% du PIB. Ce résultat est le révélateur d’un recul de la compétitivité. L’ouverture des
négociations d’un Accord de Libre Echange Complet et Approfondi (ALECA) entre la Tunisie et son
principal partenaire économique, l’Union Européenne (UE), constitue une occasion de moderniser
son tissu productif. Associées à une politique d’offre, ces négociations sont de nature à faciliter le
rééquilibrage de la balance commerciale.
1. Le commerce extérieur tunisien souffre de nombreuses difficultés d’ordre
structurel
1.1. Un creusement du déficit largement imputable à une stagnation des exportations
La balance commerciale de la Tunisie est structurellement déficitaire. Alors que le déficit était stable
jusqu’au milieu des années 1990, il n’a cessé de s’aggraver depuis le milieu des années 2000 – de
0,5% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2005 à 17% du PIB en 2014. Le déficit s’est toutefois
contracté en 2015 : s’élevant à 5 Mds€, il représente encore 14% du PIB. Ce résultat global reflète
une détérioration de la compétitivité qui s’est accentuée depuis 2010, la croissance, certes ralentie,
étant tirée par la demande intérieure. Cette détérioration est imputable non seulement aux lourdeurs
administratives qui pèsent sur les entreprises installées en Tunisie mais aussi au recul de la
productivité dans un contexte social souvent tendu et avec un investissement en perte de vitesse.
En 2015, les exportations tunisiennes s’élèvent à 12 Mds€. Ce chiffre est en quasi-stagnation depuis
2010. Toutefois, la croissance des exportations d’huile d’olive (+75% par rapport à 2014, à 820 M€)
a permis à la Tunisie d’enregistrer un résultat honorable. Les exportations de produits industriels
transformés en Tunisie grâce à de faibles coûts de main d’œuvre et la proximité du marché européen
représentent encore aujourd’hui une large part des exportations tunisiennes. Ce secteur
manufacturier représente 70% des exportations tunisiennes avec encore une part substantielle pour
le textile-habillement (22% des exportations contre près de 40% 10 ans plus tôt) ; les industries de
transformation électriques et électroniques représentent aujourd’hui quant à elles 27% du total. Les
exportations agricoles et agro-alimentaires représentent 14% des exportations en 2015 soit 1,8 Md€,
mais avec l’apport exceptionnel des exportations d’huile d’olive (conjonction d’une bonne récolte et
de l’aménagement du quota par l’UE). Les exportations énergétiques et minières sont dans un creux
en 2015 avec simplement 11% des exportations (et moins de 4% du PIB) imputables notamment à
de très mauvais résultats enregistrés dans la filière des phosphates.
Depuis la révolution, les importations ont augmenté à un rythme plus soutenu que les exportations.
En 2015, elles se tassent au niveau de 17 Mds€ sous l’effet d’une baisse de 30% de la facture
énergétique. La diminution du poids des biens intermédiaires depuis la révolution (5 points de moins)
est un point d’attention, laissant anticiper un tassement de l’attractivité du site Tunisie corroboré par
la stagnation des exportations. Les importations sont très diversifiées. Le débat s’amplifie aujourd’hui
sur la justification de l’augmentation de ses importations alors que la croissance et l’investissement
privé ne croissent plus au même rythme que dans les années 2000. Certaines importations sont
aujourd’hui jugées inutiles par des experts alors que la pression sur la balance courante n’a jamais
été aussi élevée.
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1.2. Un ancrage toujours décisif à l’Union Européenne
L’UE est le premier partenaire commercial de la Tunisie et la France le premier partenaire au sein
de l’Union.
Sur la période 2011-2015, l’UE a absorbé 70% des exportations tunisiennes (en moyenne, 8,6 Mds€
par an) et représente environ 50% des importations tunisiennes (également près de 8,6 Mds€ par
an, en moyenne). La France absorbe près de 30% des exportations tunisiennes mais ne représente
que 17% des importations tunisiennes. L’Italie, second partenaire commercial de la Tunisie au sein
de l’UE, présente un profil sensiblement différent : une part de marché assez voisine de celle de la
France mais en revanche une absorption des produits tunisiens beaucoup plus faible. Cela peut
notamment être imputable au fait qu’une large partie du tissu productif italien délocalise plus
spontanément en Europe centrale et orientale. L’Allemagne et l’Espagne viennent loin derrière.
Les exportations tunisiennes vers ses voisins du Maghreb (et notamment l’Algérie et la Libye)
représentent officiellement moins de 10% du total des exportations ; ce chiffre officiel minore
probablement la réalité des flux du fait de l’importance des phénomènes de contrebande dans les
zones frontalières et de fraude à la douane, même dans le contexte de la crise libyenne.
La diversification des exportations tunisiennes vers d’autres marchés, notamment ceux d’Afrique et
du Moyen Orient encouragée dans une stratégie de modernisation de l’économie tunisienne ne se
traduit pas encore de façon significative dans les chiffres.
De grands pays émergents commencent à se manifester sur le marché tunisien : la Chine représente
désormais 8% des importations tunisiennes soit plus que l’Allemagne ; la Turquie en est à 4%.
2. Le commerce tunisien souffre également d’une politique commerciale encore
largement protectionniste
La Tunisie est membre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) depuis 1995. Le régime
« Nation la Plus Favorisée » (NPF) du pays est relativement protectionniste. Toutefois, une inflexion
substantielle a été opérée en 2015 sur le plan tarifaire dans le cadre d’une simplification adossée à
une diminution des droits. Conformément à la loi de finances 2016, seuls trois droits subsistent : 0%
(pour les matières premières, les intrants et les biens d’équipement qui ne sont pas fabriqués
localement) et 20% (pour les biens de consommation). Seuls les produits agricoles n’ont pas
bénéficié de cette diminution (36%). Ces mesures s’inscrivent dans un dispositif en vue de
décourager la contrebande et la fraude. Par ailleurs, les obstacles techniques au commerce restent
nombreux. Les procédures d’évaluation de la conformité des produits (essais, inspections du
produit) sont très contraignantes en Tunisie. Cela est imputable à l’inefficacité des institutions en
charge de la procédure (douane et laboratoires, en particulier), par une infrastructure et des
compétences insuffisantes et inadaptées. La problématique est similaire concernant les normes
sanitaires et phytosanitaires : système de contrôle contraignant, inefficace et opaque.
Les relations commerciales entre la Tunisie et l’UE sont régies par un Accord d’Association (AA)
dont le processus de libéralisation progressif s’est achevé en 2009. Au titre de l’AA entre la Tunisie
et l’UE, les produits manufacturés circulent en principe librement entre les deux espaces
commerciaux. En revanche, l’accord ne couvre que très partiellement les biens agricoles (y compris
les biens agricoles ayant subi une première transformation). Pour quelques produits, le droit de
douane NPF est réduit dans la limite d’un contingent (parfois saisonnier) : viande bovine, lait, beurre,
pommes de terre, etc.
L’accès au marché tunisien est par ailleurs très largement perturbé par le développement de
l’économie informelle qui favorise le développement de circuits de distribution parasitaires via, en
particulier des filières de contrebande ; et largement favorisée par les défaillances de contrôle des
frontières terrestres (Algérie et Libye).
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Outre l’AA avec l’UE, la Tunisie a signé un certain nombre d’accord commerciaux bilatéraux,
principalement avec les autres pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord : Algérie (1981 et
1991), Union du Maghreb Arabe (1989), Grande Zone Arabe de Libre Echange (1998), Turquie
(2004). Ces accords restent cependant largement inopérants. A titre d’exemple, le commerce intrarégional de la Tunisie ne représente qu’environ 8% du commerce tunisien.
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