Itinéraires de parfumeurs autour des créations ESTEBAN

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Itinéraires de parfumeurs autour des créations ESTEBAN
Itinéraires de parfumeurs
autour des créations
ESTEBAN
Mathilde Bijaoui et Baume Tolu
E
xcursion dans le monde de Mathilde Bijaoui :
un monde enchanté, coloré, gourmand et odorant !
A travers Baume Tolu d’ESTEBAN, Mathilde magnifie la
facette fruits secs-datte de la matière. Pour cela elle marie
davana et immortelle, deux fleurs aux accents liquoreux,
Du marché aux marmites, son père lui apprend les goûts, et choisit le patchouli pour sculpter le gourmand sillage.
couleurs et odeurs d’une cuisine sensorielle. Tombée de- Elle ajoute un soupçon d’un cacao poudré qui teinte Baudans quand elle était enfant, Mathilde attise et cultive cette me Tolu d’un doux-amer à croquer.
curiosité pour ce qui se sent, ce qui se goûte.
Mécanique poétique dans laquelle chaque matière est un
Alors qu’elle n’a que 13 ans, le hasard d’une rencontre et rouage essentiel, Mathilde construit d’abord LA note auson attrait pour les odeurs la mènent aux portes ouvertes tour d’une dizaine de matières avant d’arrondir les angles.
de l’ISIPCA. Portes qu’elle ne refermera plus jamais. Son La précision au service de l’efficacité : comme en danmonde, c’est là : blouses blanches, orgue à parfums, des se lorsque la puissance du geste est soulignée par le tramilliers d’odeurs… Un monde ludique pour un vrai métier, vail des muscles, perceptible à travers le costume. D’ailleurs pour Mathilde, un parfum se porte comme un pull en
elle n’en croit pas ses yeux.
cashmere : exigence des lignes qui se dessinent, douceur
Bac scientifique, chimie, concours, ISIPCA… Mathilde et harmonie pour le confort. L’intérêt d’une construction
aime cet itinéraire personnel qui fait que sans être prédes- concise, d’une signature forte c’est que, comme en musitinée, elle est déterminée, dès 13 ans, à pousser seule les que : il reste dans la tête une petite mélodie que l’on vouportes de ce monde du parfum. Les odeurs deviennent sa drait rechanter, dont on ne peut plus se passer ! N’entenpalette de couleurs, l’orgue à parfums son instrument. dez-vous pas le refrain de ce parfum d’un joli brun : liComme l’artiste, elle puise l’inspiration dans le quotidien queur, rondeur, douceur…
ordinaire ou extraordinaire. Une promenade, un dessert…
Mathilde saisit l’impression, l’instant où l’esprit lâche et
devient prolixe en pistes créatives. Toutes ces idées, elle
les note précieusement dans un petit carnet. Puis elle pianote et de touche en touche, ajuste les notes jusqu’à l’harmonieux accord, recueil d’un souvenir. Si le parfum est
son mode d’expression, tous les sens nourrissent sa création.
Fidèle à son initiation sensorielle à travers les odeurs culinaires, Mathilde aime par-dessus-tout les épices : au féminin ou au masculin, froides ou chaudes. Cumin, piment,
poivre noir…. Cette « Spice girl » manie une gourmandise
nouvelle qu’elle pousse parfois jusqu’au salé.
D
Serge Majoullier, Emilie Bouge et les boisés
evenir parfumeur… L’idée naît toujours d’un désir qui curry…. Tout un lexique de mots pour l’instant inusités qui
mêle dans un sillage puissant sentiments, émotions et sou- pourraient devenir les tendances olfactives de demain.
venirs. Dans la région de Grasse, cette envie si intense Quelle richesse pour ESTEBAN d’être soutenu par un nez
s’inscrit parfois dans la génétique. Modelée par l’héritage précurseur, par un inventeur né !
familial, la mémoire peut guider à travers ses méandres
jusqu’à ce métier de passion.
Serge Majoullier et Emilie Bouge sont tous deux d’origine
Grassoise, le berceau de leur enfance fut celui de la parfumerie. Serge a créé Bois Plume, Emilie a créé Bois Velours. Itinéraires différents, nuances de sensibilités, ils ont
en commun la même passion, exprimée sous des jours
nouveaux pour ESTEBAN.
Roi des matières, alchimiste de la nature, Serge Majoullier est fils de parfumeur. Il aime la grande liberté des
créateurs de cette petite industrie. Après des études de
chimie, il accède à ce métier de créateur solitaire. Cette
possibilité d’évoluer en solo au sein d’une équipe est pour
Dame de cœur, magicienne des sens, Emilie Bouge a
grandi le nez dans les flacons. L’été de ses 18 ans et alors
qu’elle se destine à des études de mathématiques, Emilie
est bousculée par des souvenirs et des rencontres. Elle
réalise que la création est sa vocation et choisit de troquer
l’apprentissage des formules d’algèbre contre celui des
formules odorantes.
Elle désire que la poly sensorialité, compagne des moments forts de sa vie, soit le cœur de son métier. Une musique, une couleur, une photo… projettent Emilie dans un
domaine d’inspiration dont elle s’extrait changée, avec l’envie de raconter cette expérience émotionnelle.
lui le gage d’une plus grande créativité : pas de conces- Pour Bois Velours, une photo donne le départ. Un arbre
sion, un auteur libre jusqu’au bout. Pour une plus grande trapu sur fond de savane et de soleil. Emilie imagine les
liberté, cet auteur va jusqu’à choisir des matières nouvel- forces cueillies du haut de sa cime par ce bois centenaire
qui fait le lien entre ciel et terre. Tout passe mais lui reste, il
les, des mots nouveaux.
Sous le nez de Serge, les contrées exotiques deviennent rassure.
des champs lexicaux inédits, le quotidien un dictionnaire Il en est ainsi de ce jus à la force épicée qui éclabousse en
d’idées neuves : Serge est « chasseur de notes ». Il trans- tête, au corps boisé et enveloppant qui apaise en fond. Si
forme des odeurs rencontrées en matières, exploitables Bois Velours exprime l’idée de profondeur et de spiritualité
par lui-même et par ses pairs. Extractions, concentration, des terres d’Afrique, c’est qu’il est le fruit d’un art qu’Emilie
respect de la législation… telle est sa mission. Mais il doit aime et maîtrise. Art de manier les bois, les épices et les
aussi voyager en terre lointaine.
baumes pour les faire parler de croyances, d’imaginaire à
C’est ainsi qu’est né Bois Plume. Un de ses périples d’a- la puissante symbolique.
venturier des odeurs l’a conduit au Guatemala, au pied Comme tout travail intérieur, la création de ces parfums
d’un arbre dont le bois était doux et lacté. Il conserve alors stylisés peut être longue et difficile, c’est pourquoi Emilie
cette idée d’un boisé clair, à la sensualité vanillée et pou- aime aussi se dégourdir l’esprit avec la spontanéité des
drée, au caractère liquoreux. L’iris est une bonne alliée notes fruitées, son autre domaine de prédilection. Fidèle à
dans cet exercice de style autour d’un bois imaginaire.
la nature, elle aime les créer légers, croquants, plein de vie
Cette liberté qu’il recherchait est un atout indispensable et de gaieté. Elle alterne donc les styles contraires, passant
pour son métier. Sans un esprit libre, comment imaginer de fée mutine à mage mystérieux.
par exemple, que l’alchimie d’une cuisine raffinée puisse C’est ainsi qu’elle nous a envoûtés : à coup de sorts boidevenir matière parfumée. Maïs, poivrons, alcools, thé,
sés. Demain la potion pourrait être épicée, d’une belle
couleur pourpre et aux pouvoirs magiques, forcément !
NorbertBijaoui et Cèdre
P
ertinence et évidence… Pour Norbert la création est Si la maitrise permet les alliances improbables, Norbert
un tandem dans lequel la marque et lui-même ne forme insiste sur la notion de goût et d’esthétisme, car il n’oublie
plus qu’un esprit créatif à la recherche du sillage sur me- pas que le parfum est une parure dont l’originalité ne doit
sure. Lorsqu’il crée, c’est un message qu’il façonne et qu’il pas être un obstacle à l’agréabilité et à la beauté de la
partage. Message qu’il a longuement mûri par son écoute note.
attentive et son attention profonde à l’identité de la marque.
Enfin, la partie de lui qu’il livre permet de créer la nouveauté et l’émotion. Car le souvenir ou le choc olfactif
Norbert rend le message évident grâce à sa connaissance n’est beau que s’il est sublimé, embelli par une teinte perde la matière. Cette maitrise est construite sur une expé- sonnelle.
rience de dizaines d’années et de milliers d’essais. Pas- Alchimie du savoir et de l’intime, la création d’un parfum
sionné d’architecture il pense le parfum comme une cons- est un challenge d’imagination et de séduction. C’est ce
truction, dont la matière est à la fois fondation et clef de défi que Norbert aime relever.
voûte. Il connait leurs histoires, leurs structures et leurs
promesses. S’il aime toutes les matières -fragiles et fortes,
rétro et tendances, naturelles et synthétiques- il cherche
cependant à en réduire le nombre au sein de sa composition. Le nombre ne doit pas étouffer ni rendre confus. Certaines matières ont sa préférence : le ciste et les muscs,
deux modes d’expression de la sensualité.
Son amour pour les matières est une passion qu’il partage
avec ESTEBAN. Ses deux créations de la collection Matière d’ESTEBAN sont l’illustration de matières classiques
modernisées à l’image de la marque qui aime marier les
contraires. Ambre est un opulent qui respire et s’envole
avec légèreté, Cèdre un boisé sec et brut attendri par des
accents épicés cuirés.
C’est sa relation privilégiée à la marque ESTEBAN qui a
permis à Norbert de cibler la construction olfactive qui
ferait du Cèdre un sillage boisé à l’image d’ESTEBAN. Il a
choisi pour cela d’exploiter la simplicité du bois tout en le
parant de facettes subtiles de cuir et d’épices afin de séduire par l’évidence et de retenir par la sophistication.
Karine Dubrueil et Ambrorient
L
a partition d’un chemin guidé par l’exigence et la Ce parfum-boule à l’histoire longue et profonde ne compte
beauté.
pourtant que 23 matières, chacune est indispensable. Cette simplicité permet la lisibilité de son message : un Orient
Comme les notes d’une portée s’accordent pour offrir à mystérieux et mystique. Cette simplicité est aussi le gage
l’oreille avertie une harmonieuse émotion, les passions de d’une identité forte, Ambrorient séduit avec une douce
Karine Dubreuil se confondent pour créer un univers artis- certitude, l’adhésion est entière.
tique en évolution permanente.
Demain, Karine aimerait nous conduire vers son amour de
Ses deux passions naissent à Grasse où elle grandit. Les toujours, les fleurs. Un amour exigeant, car pour elle, une
jardins extraordinaires de ses grands-mères ont imprimé belle fleur est une fleur vivante. Sa quête de pureté se
au fond d’elle le bonheur des fleurs vivantes, les mélodies traduit dans ce travail par la recherche de naturalité et de
de sa mère pianiste y ont ancré l’amour du chant. Influen- transparence. Jasmin, Pivoine, Rose ou Mimosa, laquelle
ces soudées, indissociables, la musique et les fleurs gui- de ces symphonies olfactives nous livrera sous les doigts
dent ses pas vers le métier de parfumeur.
Pureté des sons, pureté des notes… la musique et les
parfums se lient. Comme Karine travaille ses gammes,
elle apprivoise les accords, ne s’estimant musicienne que
lorsque l’émotion de son chant s’accompagne de larmes,
ne s’estimant parfumeur que lorsque la nouveauté de ses
accords surprend. Exigeante, elle ne veut pas d’une parfumerie au hasard ; elle souhaite garder le contrôle de ses
matières.
A travers Ambrorient, on devine en filigrane la tessiture
de sa voix : sombre et voluptueuse, traversée de lumière.
La bergamote introduit la couleur et l’émotion… Les baumes et les muscs imprègnent le parfum de douceur et de
sensualité… Confidence de sa voix dévoilée, elle baptise
sa création « Intime ».
A la manière d’un opéra de Puccini, l’orchestration maîtrisée donne de l’ampleur au parfum tandis qu’un excès de
musc confère à l’harmonie une douceur nouvelle.
de Karine sa divine essence ?
Violaine Collas et Colère d’épices
V
iolaine choisit de devenir parfumeur à 14 ans. Mar- Cette eau d’épices revêt son nom de scène et devient
quée par les parfums enveloppants que portent les fem- Colère d’Epices d’ESTEBAN. Exubérante fraicheur puis
mes de sa famille, son intuition des odeurs se nourrit aussi chaleur enjouée, la colère n’est jamais longue chez Violaide sa découverte de l’ailleurs à travers les voyages. Puis ne, c’est une explosion de couleurs froides avant de rel’intuition devient science grâce à l’enseignement de l’ISIP- trouver une humeur chatoyante.
CA et à l’apprentissage auprès de parfumeurs confirmés à
Paris, en Allemagne puis à New York.
L’écriture animée de Violaine, ses formules courtes aux
matières de caractère nous ont séduits par la justesse de
Pour créer, Violaine lie les sens, s’inspire des arts. Art des leur ton. Singulière coïncidence ou accord parfait ? ESTEcouleurs, art des saveurs, art des odeurs… ces stimuli BAN et Violaine se sont rencontrés autour d’un rouge lusont nécessaires pour exprimer au sein de ses créations mineux et enjoué.
l’énergie qui est la sienne. Modigliani, maître qu’elle apprécie pour son usage de la couleur comme éclairage de Le spectre des couleurs est infini et la palette de Violaine
la volupté, disait : « Le dessein de l'art est de lutter contre est large… promesse de nouvelles créations à porter à la
les obligations ». Le dessein de son art à elle est de lutter manière des couleurs vives : assumées.
contre la fadeur, de traduire la sensualité et la vie.
Pour cela, une écriture sanguine, des traits de caractère
assumés et des couleurs vives synonymes de vie. Les
couleurs lui parlent, lui chuchotent des accords d’humeur.
Pour le jaune, elle pense : floral solaire et lumineux. Pour
le rouge, elle crée un accord feu hyper sensuel.
Le rouge est d’ailleurs plus qu’une inspiration pour Violaine : c’est un trait d’elle-même.
Alors quand elle crée le parfum rouge de notre collection
Couleurs, c’est un peu d’elle dont elle parle. Un départ
impertinent d’épices fraiches avec la Cardamome, cette
ultra vibrante incisive et contrastée, utilisée en petites touches. L’insolence de l‘accroche, soutenue par la fraicheur
colorée du gingembre se fond dans une sensualité délicatement ambrée où le benjoin rivalise d’accents poudrés et
vanillés avec la douceur confortable et rassurante des
muscs et des bois.