janvier 2007 - Guts Of Darkness

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janvier 2007 - Guts Of Darkness
Guts Of Darkness
Les archives du sombre et de l'expérimental
janvier 2007
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© 2000 - 2008
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Les chroniques
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ISIS + AEREOGRAMME : In the fishtank/14
Chronique réalisée par Chris
La série "In the fishtank" initiée en 1996 par le label hollandais Konkurrent poursuit son petit bonhomme de
chemin et nous offre pour cette quatorzième livraison orientée post rock rien de moins que la réunion des
californiens Isis et des Ecossais Aereogramme. Les deux groupes nous amènent dans un superbe et très
atmosphérique voyage, aux ambiances léchées et aux compositions épurées. Le chant de Graig B. donne une
dimension éthérée supplémentaire aux deux longues plages atmosphériques que sont les magnifiques "Low
tide" et "Stolen". "Delial" quant à lui se veut plus rentre dedans mais reste à mon humble avis en dessous des
deux autres compositions. Même s'il est à première vue étonnant de voir Isis en action sur des morceaux aussi
planants, leur musique s'inscrit finalement ici dans la suite logique de leur deux précédents albums et laisse
présager de la teneur de leur nouvel effort sorti tout récemment sur Ipecac Recordings et chroniqué très
prochainement ici même. Pour conclure, j'aime beaucoup ce disque, surprenant et envoutant et qui malgré sa
courte durée parvient à nous tenir en haleine du début à la fin. Bravo.
Note : 5/6
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CALLISTO : Signal to the Stars
Chronique réalisée par Phaedream
AD Music recèle de petites perles que l’on a intérêts à découvrir. Signal to the Stars de Callisto en est une.
Pourtant rien n’indiquait que c’était un pur joyau musical que j’insérais dans mon lecteur. Après une 1ière
écoute, j’étais perplexe. Peut-être que je filais sensible…Donc je reportais une autre écoute à plus tard. Autre
écoute, même résultat. Jusqu’à ce que je réalise qu’effectivement j’avais un petit bijou dans les mains. Signal to
the Stars de Callisto est un chef d’œuvre d’harmonie, de mélodie dans un monde cosmique complexe, aux
intonations et modulations aussi étonnantes que percutantes.
C’est de loin que l’on entend les tintements statiques de Sycorax. Une pulsation basse fait écho dans une
sphère où toute sonorité laisse une trace d’écho. Complexe et inégale un rythme se forme autour d’un fin
clavier qui fait dandiner une série de notes mélodieuses. Un fin mouvement hypnotique, qui croise de superbes
percussions éparses, se forme parmi des stries filantes. D’autres strates plus denses, dont les réverbérations
occultent une mélodie, enveloppent Sycorax d’un rythme embryonnaire qui prend forme sur des percussions
soutenues et un synthé mélodieux symphonique. De superbes solos de synthé inondent cette mélodie qui se
réfugie doucement dans la tranquillité de la 2ième partie. Une brève tranquillité. Les striures synthétiques
reprennent leurs envolées sur de superbes solos, longs et vrillants, sur le puissant tempo lent que les épaisses
strates ont mobilisées en 1ière partie de Sycorax, qui s’éteint en décroissant. Isophore la sublime! Une sublime
mélodie forgée en 3 parties. Atonique, la 1ière partie souffle des parcelles d’harmonies qui sont suspendues
dans un oasis de rêves. Suaves et chétives les notes se dandinent sur un synthé mielleux dont les sonorités
percent notre mélancolie. Le mouvement intensifie sa tendresse sur un rythme qui va, diminuant vers la 2ième
partie. Sur un synthé bredouille et pensif le troubadour cosmique accentue sa procession avec la 3ième partie.
Le rythme devient constant sur un mouvement séquentiel ourlé de strates orchestrales et symphoniques pour
s’éteindre dans les souffles perdus du synthé solitaire. Isophore est l’une des plus belles pièces de musique
que j’ai entendue. C’est plaisant de savoir qu’en 2006, il existe encore des artistes qui sont capable de nous
faire vivre leurs émotions. Seule Elara est une superbe mélodie qui accroche instantanément. Rythme léger,
percussions nerveuses et structure synthé flûtée, c’est une charmante que l’on siffle sans savoir d’où elle sort.
Setisphere est un autre voyage cosmique fort mélodieux, construit en 3 épisodes. De belles notes voltigent
avec romance dans une sphère isolée. De faibles battements se font entendre, la structure rythmique se forme
autour d’un cercle harmonieux qu’une basse vient caresser de son tempo ondulant. Les souffles légers du
synthé poussent des harmonies segmentées, que l’on devine superbe. Setisphere progresse, amassant toute
l’énergie et les harmonies qui glanent ci et là pour devenir une sphère explosive aux rythmes circulaires
hachurés par des percussions métalliques. Une fresque circulaire étonnante où une superbe séquence
s’entortille sur des percussions solides et de superbes solos puissants, déchirants et sinueusement
harmonieux. Il y a un bref moment de quiétude vers la fin de la 2ième partie. Et le rythme acéré reprend toute a
dynastie harmonique. On y sent toute la démesure et la puissance retenue qui finalement explosent en un
tourbillon d’une rare intensité. L’équivalent d’un gros à la Deep Purple, cerné par des strates envahissantes et
mélodieuses. Un titre intense et puissant. Naiad suit les bourdonnements de la finale de Setisphere sur un beau
piano mélodieux. Un piano qui joue avec intensité sur une belle ligne de basse, dans une ambiance progressive
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où strates violonées donnent une profondeur harmonieuse à cette 1ière partie de Naiad. Un tempo hachuré
encercle l’impulsion qui prend une forme soft techno sur des orchestrations synthétiques flottantes. Les
percussions accélèrent le tempo de leurs caresses rythmiques, qu’un mouvement symphonique élève d’un
cran supérieur. Les percussions claquent et voltigent sur un tempo ambivalent qui opte pour un rythme lent
déchiré par un synthé aigu, qui lance ses strates enrobantes, ralentissant un mouvement qui s’éteint dans les
pénombres harmonieux de cette fantastique épopée musicale.
Signal to the Stars de Callisto n’a aucune faille. Un opus intense où la mélodie côtoie la complexité des
modulations, sans que l’on en perde une octave, une note. Un tour de force. Une œuvre majeure qui doit être
découverte et qui doit prendre la place qui lui revient, soit entre Chariots of Fire et The song of Distant Earth;
Un chef d’œuvre qu’il faut découvrir.
Disponible au ; http://www.admusiconline.com/
Note : 6/6
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XIMENG / SOLAZZO (Domenico) : Ximeng vs. Domenico Solazzo split EP
Chronique réalisée par Nicko
Imaginez la rencontre improbable entre deux monstres sacrés, gutsiens jusqu'au bout des ongles... Qu'est-ce
que ça peut bien donner ? Un début de réponse se trouve dans les 30 petites minutes de cette galette, un split
entre Ximeng (aka. Saïmone, dit "gros phallus") et Domenico Solazzo (aka. Progmonster, dit "Mars Volta
lover"). Le principe de ce split reprend plus ou moins celui des albums "War" où deux groupes "s'affrontaient"
sur un CD avec des morceaux de chacun des groupes qui s'enchaînent. Voilà, ici, c'est un peu pareil, avec deux
titres de Ximeng, 2 de Dom' et un écrit et interprété par les deux ensemble ! Ca commence plutôt mal je dois
dire, avec un morceau bruitiste très strident et à tendance un peu indus. C'est trop pour moi et mes pauvres
oreilles, je zappe ce morceau direct. Le deuxième titre, "Georg und Michael" (les deux héros de l'excellent
"Funny games" de Michael Hanneke - toi qui nous lis, si tu n'as pas vu ce film, cours vite l'acheter à ton
distributeur local !), est déjà plus sympa, tout en progression, à base d'infra basses distordues et
ultra-saturées. En fond, on a des extraits de séances de tortures issues du film sus-cité (pas étonnant que la
BO du film ait été en partie signée par Naked City et son fameux album "Toture garden" - toi qui nous lis, si tu
n'as pas cet album... tu sais ce qu'il te reste à faire ! ;-) ). Et le tout rend vraiment super bien ! Le seul reproche
que j'aurais à émettre c'est qu'on a droit à quelques longueurs un peu superflues, mais l'atmosphère générale
est bien pesante. Et puis, lorsqu'il s'agit de torture, faut justement que ça dure longtemps, sinon, c'est pas
drôle, hein Saï ??!! Le troisième morceau, sobrement intitulé "XMVSDS", est celui où les deux compères ont
collaboré. Et c'est facilement le meilleur morceau du split (de loin). Sur fond de musique electro/techno
hypnotique mais calme avec un rythme qui s'emballe, comme celui d'un coeur au bord de la crise cardiaque, on
a des samples de l'excellent "Seul contre tous" de Gaspard Noé (que si tu l'as pas, hein... je t'épargne la
suite...). Les samples choisis sont géniaux, ils montrent à merveille la folie, la paranoïa et le délire total du type.
La musique est admirablement bien pensée, avec des parties de guitares et de piano zorniens, bien décalées !
Une vraie réussite ! Le quatrième morceau marque une véritable fracture avec le précédent morceau. Ici, c'est
calme, voluptueux et doux, aux synthés, avant que ça ne parte en couilles vers la fin avec encore des samples
de films bien choisis et le tout évoluant vers un truc de plus en plus distordu et bruitiste bien saturé, un peu à
l'image d'un groupe de post-rock halluciné ! Le dernier morceau commence tout à fait comme une musique de
film d'horreur des années 70 assez proche de la BO d'"Halloween" avec un clavier répétitif reconnaissable et
ses boucles hypnotiques. Et là encore, ça part vers un délire bruitiste très dense avec des percus saccadés
agressives ! Vraiment pas facile à suivre... Au final, on a un split vraiment déjanté, à ne pas mettre entre toutes
les mains. Aussi, à son écoute, quand je vois "XMVSDS", je me dis que les deux hommes seraient bien inspirés
de créer un véritable groupe ensemble, genre Xilazzo ou Someng, à moins qu'un "XimengSolazzo Orchestral
Torture Big Band" ne fasse l'affaire ! Un split pas facile à appréhender, original, totalement
décalé/déjanté/dérangé, mais hélas un peu trop inégal pour moi.
Note : 3/6
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VAN DER WOUDEN (René) : Pro Sequentia
Chronique réalisée par Phaedream
Quel merveilleux titre. Pro Sequentia, ou Prosa en latin, signifie des hymnes séquentiels chantés par des
moines et des musiciens dans les années 1100. Cette forme d’art abstraite et répétitive serait le berceau de la
musique séquencée de nos jours. C’est aussi le titre de la première œuvre de René van der Wouden, un
synthésiste néerlandais que j’entends sur quelques compilations, dont le style me charme. C’est donc avec une
curiosité bien nourrie que mes oreilles se sont frottées à Pro Sequentia. Et, autant vous le dire d’entrée, j’ai
passé de très beaux moments.
Prosa Part I démarre avec un merveilleux souffle sidéral, teinté d’effets sonores analogues et un mouvement
synthétique orchestral. Doux, le mouvement flotte avec tendresse, alors qu’une superbe série de notes
ondulantes trace une séquence nerveuse, une magnifique flûte apparaît, figeant une mélodie mélancolique à
faire fondre les larmes refoulées depuis belle lurette. Le rythme s’anime autour d’une autre séquence plus
dynamique, un bon jeu de percussions et un synthé divinement mélodieux. Prosa I fuse des segments
d’harmonies sereines et chaudes à entendre. Un superbe titre qui a passé trop vite.
Plus atmosphérique Prosa II propose une longue intro à effets sonores hétéroclites. Sur un vent cosmique, des
notes croisent et décroisent une triste mélodie qui nourrira la séquence à venir. Le ton est grave et des cloches
funestes ouvrent la voie à une séquence qui oscille dans les vapes de strates synthétiques suaves et intenses
qui balancent un mouvement orchestral valsant. Les percussions explosent un rythme plus mélodieux, avec
une séquence basse et un superbe mellotron qui ajoute une texture musicale plus riche, plus profonde à un
tempo de plus en plus cadencé, sur de superbes solos aux effluves de flûtes enchantées. Un superbe moment
qui s’éteint dans les vapes atmosphériques intenses, ainsi qu’un alerte piano.
Prosa III poursuit cette quête atmosphérique. L’intro flotte sur de bons coussins synthétiques qui étirent leurs
accords dans un sillon complaisant de thèmes harmonieux. De superbes passages de synthétiseur, jumelés à
des souffles de tendresses d’une flûte mellotronnée berce l’atmosphère mélancolique qui surplombe cette
intro. Symphoniques et majestueux, les synthés progressent jusqu’à ce que le rythme s’anime. Percussions
sèches et une lourde séquence bourdonnante, basse, s’emparent de Prosa III, vers la 8ième minute. La
séquence voltige avec résonance sur un rythme lent, mais stylé, genre Enigma ou Jean Michel Jarre. Une
superbe mélodie qui s’éteint dans des vapes atmosphériques denses, avant de retrouver la route du rythme,
avec des solos de synthé percutants. Une gentille petite sérénade synthétique berce l’obscurité mélancolique
de Prosa IV. Des notes limpides, sonnant comme un clavecin cristallin, ondoient dans une ambiance statique.
Frénétiques, elles hoquètent un mouvement séquentiel qui pilonne un rythme saccadé et hypnotique. De
lourdes strates synthétiques dramatisent l’atmosphère alors que les percussions martèlent un rythme plus
affamé sur un mouvement linéaire du clavecin virtuel, qui va en décroissant, sur des notes pilonnées
d’intensité. Prosa V clôture cet opus fort mélodieux avec une touche symphonique aux effluves d’un
mouvement classique contemporain. Une superbe mélodie qui valse sur des strates mellotronnées aux
essences de violon, flûtes et autres instruments à vent classiques. Un superbe synthé symphonique prend la
commande et souffle de hymnes majestueux sur un séquenceur qui virevolte et assume la section rythmique.
Du grand art contemporain qui joue sur différents styles et séquences, embrassant rythmes lourds et mélodies
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somptueusement vêtues des plus beaux atouts orchestraux. Toute une finale. Ce premier René Van Der
Wouden dépasse mes attentes. Pro Sequentia est un superbe opus, avec des arrangements hautement stylisés.
Van Der Wouden utilise et développe ses séquences de façon étonnante. Sa musique est tissée de multiples
mouvements séquencés qui s’entrecroisent avec affinité sur des arrangements orchestraux très fluides et
mélodieux. J’ai eu la chair de poule à plus d’une occasion, démontrant hors de tout doute la grande sensibilité
qui semble entouré cet auteur fort prometteur.
Vendu et distribué par René V.D. Wouden, disponible au site de l’artiste : http://www.renevanderwouden.net/
Note : 5/6
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VAN DER WOUDEN (René) : Alchemia
Chronique réalisée par Phaedream
Après le superbement mélodieux Pro Sequentia, René Van Der Wouden nous offre un opus un peu plus
différent. Nettement plus complexe, avec ses intros très hétéroclites, Alchemia est un album aux mouvements
lents, envoûtants qui s’écoutent le corps et l’esprit à 0. Pas que ce soit de la relaxation! Non. Parce que c’est
bien fait. C’est fin, plein de subtilité et il faut entendre les mouvements empreints de tendresse et de nostalgie,
comme sur The True Glass of Alchemia, un titre ambiant d’une étonnante attraction.
Divisé en 2 parties, l’intro est un lent mouvement synthétique qui se développe avec de subtiles modulations.
Le synthé flotte dans un néant harmonieux. Dans cet espace où le silence est bercé de strates fluctuantes, se
terre de brèves mélodies qui sortent et se cachent, laissant des traces mélancoliques à chaque complainte
céleste. Un superbe mouvement, truffé d’une incroyable sensibilité. En mi-temps, le rythme s’éveille doucement
avec une série de notes limpides qui dessine un arc sonore hypnotique. Une nouvelle série de notes s’indexe à
celles en place, stimulant une séquence plus complexe, qui serpente avec insistance une sphère rotative
minimalisme. Cette sublime séquence module ses intonations, parmi des effets sonores et des explosions,
avant de prendre un envol séquencé, où les accords s’entassent et créent une confusion harmonieuse. Un titre
envoûtant qui puise la profondeur de sa beauté à l’ombre de ses strates onctueuses et mélodieuses. Far
Across the Heavens possède une intro plus que bigarré avec ses jets vaporeux, entourés de segments
mélodieux, de percussions tablas éparses. Des vagues spatiales qui inondent un univers statique, où se forme
une séquence bouclée qui ondule parmi une chorale ténébreuse et un synthé spectral, aux lamentations
aigues. Idéal pour un film d’horreur. Comme un lutin fou, la séquence roule avec frénésie accentuant
l’impulsion minimalisme qui se fragmente sur un synthé mélodieux, aux strates envahissantes.
Des notes virevoltent, un peu comme un xylophone, pour former un mouvement séquentiel serpentin qui
louvoiera en harmonie tout au long de Golden Dreams of Silver Elements. Des coussins synthétiques flottent et
étirent leurs souffles sur d’autres notes qui voltigent autour de fines pulsations. Flottant, le tempo est en
montagne russe sur un séquenceur lourd qui vrille dans une atmosphère inondée de segments mélodieux qui
serpentent une fixité déroutante.
Après une brève intro atmosphérique, The Alchemists étend sa mélodie avec une superbe séquence
harmonieuse. Des notes agiles et limpides serpentent avec grâce une impulsion aux boucles multiples, avec de
bonnes percussions claquantes et un beau synthé aux solos à faire rêver. The Alchemists est certes l’une des
belles pièces en 2006. Un long souffle atmosphérique, à laquelle se greffe des chœurs discrets, prépare l’intro
rythmique sur percussions claquantes de Gone to Earth thru the Book of Minerals. Un titre très électronique à
l’essence de ses belles incursions analogues rythmées des années 70, sur un synthé moulant aux superbes
lignes mélodieuses.
Comme on peut entendre Alchemia est quelque peu différent de Pro Sequentia. C’est un opus plus progressif
qui demande une écoute attentive, pour être certains de capter toutes les nuances. Et, comme les grandes
œuvres, il y a toujours un nouveau déclic à chaque écoute, captivant encore plus notre ouïe pour ré écouter
encore. Signe incontestable d’une œuvre de grand cru.
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Vendu et distribué par René V.D. Wouden, disponible au site de l’artiste : http://www.renevanderwouden.net/
Note : 5/6
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EBIA : Elosophy
Chronique réalisée par Phaedream
J’aime bien découvrir un nouvel artiste, surtout lorsqu’il possède sa propre signature sonore. Ebia est un
synthésiste Allemand qui fait partie de cette catégorie. Composé en 2004, Elosophy est une superbe sculpture
musicale, moulée sur des atmosphères insolites, des synthés onctueux et enveloppants, des pulsations
hétéroclites, des percussions aux tonalités variées. Bref, un album fascinant, loin des mouvements séquencés
de la Berlin School. Ici le rythme est imaginaire. Il est façonné sur des mouvements circulaires, à la fois
contradictoire, mais toujours harmonieux.
L’intro d’Elosophy I résonne de froideurs avec des coups sourds qui filtrent de lourds bourdonnements. Des
tonnerres sous une pluie invisible. Mais un vent froid qui fait pousser de légers tintements métalliques. Une
étrange ligne pulsative flâne parmi des striures synthétiques stridentes Platonique et froide, l’intro est noire et
sans âmes. Une belle strate se dépose et réchauffe l’ambiance sur un long mouvement mélodieux et flottant,
soutenu par l’étrange pulsation. Un silence placide brise cette symbiose embryonnaire, où seuls les pulsations
se font entendre. Elles amplifient les battements d’Elosophy I qui flotte avec grâce sur un léger séquenceur
uniforme où des notes basses et lourdes voltigent sur un rythme statique et circulaire. Le synthé multiplie les
coussins planants qui flottent sur d’étranges riffs sèches synthétiques, donnant une lourdeur à une impulsion
animée par des percussions feutrées et de belles strates harmonieuses. Un mouvement séquentiel aux
pulsations nerveuses, qui voltigent avec des notes multisonores ouvre Elosophy II. Circulaire, le rythme est
ceinturé de notes qui virevoltent sur des cymbales ordonnées. Tranquillement, un effet crescendo s’installe et
bouscule le tempo sur un mouvement de percussions séquencées à fréquences hachurées. Un moment génial
qu’un synthé entoure de brève strates harmonieuses, parfois stridentes, sur un mouvement sphéroïdal inondé
des notes séquentielles aux réverbérations pulsatives. Tout un morceau. Une excellente entrée qui dépeint
assez bien l’univers sonore de Ebia..
Eternity est un long mouvement ambiant aux évolutions synthétiques fragmentées. Sur de courtes harmonies
et striures flottantes, le synthé souffle des lignes où les voix se mêlent aux exhalations des strates au violon
acéré. Un beau titre flottant qui tire sa richesse d’un synthé ambivalent. À l’opposé E-motion brasse la cabane.
Une marche militaire à deux tons sur un rythme soutenu. Un rythme entraînant, sur une bonne séquence
ondulante bouclée, assortie d’un synthé aux strates enveloppantes et harmonieuses. Le mouvement oscille
entre deux tempos, sur une même séquence. Un tempo tempéré, guidé par des percussions métalliques et un
tempo plus lourd, plus accentué, martelé par des percussions et des pulsations pilonnantes. Un tempo
décousu en rythme nerveux dans une atmosphère angoissante ouvre Electron. Des pulsations lourdes, sur un
synthé austère, voltigent en notes papillonnées créant un cercle harmonieux convulsif. Le dernier rond ne se
ferme pas. Il laisse filer une strate qui s’entoure sur elle-même, éteignant tranquillement ce cercle hypnotique.
Emage est un titre sans mouvement, mais en rythme. Un grand cercle circulaire drapée de strates moulantes,
harmonieuses et parfois stridentes, sur des percussions et des pulsations aux rythmes sobres ou soft techno
sur des cymbales à la ‘’tschitt tschitt‘’. Une basse ondulante, aux pulsations de tam tam tribaux ouvre Etopia.
Les notes voltigeantes d’Ebia dansent sur des cycles circulaires pulsatifs, sombres et limpides. Les souffles du
synthé sont sublimes et pénétrants. Ils harmonisent une impulsion repliée, hypnotisée. Equalizer termine ce
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1ier opus sur une intro planante, Le synthé se dandine sur de superbes arrangements, lorsque que les
percussions animent un mouvement qui devient plus fluide, plus sensuel, jusqu’à sa dernière frappe.
Elosophy est un long voyage atmosphérique. Un opus étrangement beau où Ebia multiplie les impulsions
stagnantes qui forment des cercles étroits, où tout tourne en mouvements circulaires harmonieux. Un titre
fascinant, qui fait sourciller par ses permutations subtiles et ses impulsions imprévisibles. Un album difficile à
décrire, tant la flore musicale y est dense. Ebia! Un nom à retenir.
Note : 5/6
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COUTURIER (François) : Nostalghia - Song for Tarkovsky
Chronique réalisée par Trimalcion
À quelle musique peut rêver un pianiste de jazz à la vision des films de Tarkovski ? François Couturier ose
nous donner sa réponse. Et c'est plus en adorateur du cinéaste russe que du pianiste français (qui a quand
même joué avec John McLaughlin, Anouar Brahem, Michel Portal, Daniel Humair... j'en passe et des meilleurs)
que votre serviteur a mis ce disque dans sa platine. "Andréï Tarkovski est mon cinéaste préféré", dit sobrement
François Couturier en guise d'introduction. Bienvenue au club. Nous sommes quelques milliers sur la planète à
révérer cette poésie mystique, cette contemplation sublime qui font de chaque plan du cinéaste une expérience
à vivre intensément, invitant à la rêverie aussi bien qu'à la réflexion, soumettant l'espace et le temps pour nous
faire entrer dans une dimension nouvelle : celle de l'art total. Une oeuvre cinématographique unique qui a n'a
pu se révéler qu'au travers de sept films... mais quels films. L'ambition du pianiste français n'a pas été, fort
heureusement, de vouloir illustrer des passages de films, d'improviser sur des images. D'autant plus que les
films de Tarkovski comportent leur propre musique. Non, François Couturier veut simplement faire partager ses
impressions, ses émotions, évoquer l'univers du cinéaste à travers le prisme de sa propre sensibilité - qui reste
celle d'un musicien. "Le temps scellé", tel est le titre d'un livre théorique de Tarkovski que François Couturier
reprend à son compte - et tel est l'enjeu primordial : faire oublier à l'auditeur le temps réel pour lui imposer le
temps de l'oeuvre. Cette problématique est récurrente dans toutes les formes d'art qui se déroulent dans le
temps (théâtre, littérature, cinéma, musique...) Tarkovski y apporta sa vision. François Couturier apporte la
sienne : le temps s'avère suspendu ; il y a parfois du Mompou dans ce piano-là ; les notes s'égrènent, lentes et
tristes, consonnantes ou dissonnantes, au piano, à l'accordéon, au violoncelle ou au saxophone, comme les
versets d'une complainte poignante et douloureuse (aimer Bach aussi, ça aide). Nous sommes à mi-chemin
entre jazz et musique contemporaine, entre improvisation et rigueur compositionnelle, entre Keith Jarrett et
Arvo Pärt - qui appartiennent également tous deux (est-ce vraiment un hasard ?) à l'écurie ECM de Manfred
Eicher. C'est d'ailleurs là que, peut-être, le bât blesse, tant cette esthétique un rien distanciée et glacée (jusque
dans une pochette stéréotypée, identique à celle des "Psaumes de la repentance" de Schnittke, par exemple)
semble gagner tous les musiciens qui enregistrent pour ce label. Pourtant, l'émotion, au détour d'un phrasé,
d'une note en suspension, est là et bien là. Elle ne renvoie pas aux vertiges mystiques de Tarkovski, mais à
quelque chose de plus simple, de plus humain finalement, ce à quoi, que vous connaissiez Tarkovski ou non,
vous serez certainement sensible - une beauté plus directe que prévu.
Note : 4/6
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ARTEMIEV (Edouard) : Tarkovski par Artemiev : Solaris, Le miroir, Stalker
Chronique réalisée par Trimalcion
Dans mon souvenir, sans doute parce que je l'associais à l'émotion ressentie lors du visionnage des films, la
musique qu'Artemiev avait composée pour quelques-uns des chefs-d'oeuvre cinématographiques d'Andréï
Tarkovski était une sorte de musique électro-acoustique avant-gardiste intensément évocatrice et puissante.
C'est parfois le cas, en effet. Pourtant, c'est une petite déception qui a globalement dominé à l'écoute de la
"vision" d'Artemiev dénuée de celle de son prestigieux compatriote et ami. Car là où je m'attendais à du Pierre
Henry sous acide, n'est à certains moments apparu qu'un comparse soviétique de Klaus Schulze ou (pour
prendre des références dans la musique de film) de Walter/Wendy Carlos et Vangelis, c'est-à-dire un type
audacieux qui expérimente, certes, avec le dernier cri des synthétiseurs que lui offrait son époque (en
l'occurrence les seventies), mais qui a parfois la fâcheuse tendance d'endormir l'auditoire sous de longues
nappes planantes et une esthétique cruellement vieillie. J'ai par exemple bondi de mon fauteuil en entendant le
"thème" de Stalker ouvrant ce disque, sirupeux et monosémique à souhait. La reprise de Bach au synthétiseur
pour Solaris ne fait guère meilleure impression, rappelant le pire de Walter Carlos. Mais commençons par le
commencement. Alors que Tarkovski vient de voir "2001 l'odyssée de l'espace" de Stanley Kubrick, film dont
l'esthétique l'écoeure profondément, il décide de réaliser lui aussi un film de science-fiction, qui répondra à ses
propres attentes dans ce genre. Il s'agit de "Solaris" en 1972 (dont George Clooney a naguère fait un remake
insipide). Si Solaris est loin d'être une entière réussite, il n'en demeure pas moins une vision poétique
puissante à l'onirisme troublant. À cette occasion, Tarkovski fait appel à Artemiev, compositeur qui se
passionne pour les nouveaux media électroniques et synthétiseurs, pour la première de leurs trois
collaborations. Étrangement, cette B.O. s'avère être la plus convaincante : des distorsions acides et
dissonnantes de "ILL" jusqu'au maelström furieux de "Ocean" en passant par la transe technoïde de "Station"
ou les ténébreux errements de "Dream". Artemiev est dans son élément lorsqu'il ne se préoccupe plus que
d'ambiances, laissant de côté la "dramaturgie" musicale, la narration, souvent inhérente à l'illustration sonore
d'oeuvres cinématographiques. Avec "Le miroir" en 1974, Tarkovski nous livre une sorte d'autobiographie sous
la forme d'un récit d'initiation fragmenté et labyrinthique, film étrange, fascinant et déstabilisant à bien des
égards, qui inspire à Artemiev un cauchemar strident : l'impressionnant "Exodus". Enfin vient le second film de
science-fiction de Tarkovski, "Stalker" (1979), qui est lui un chef-d'oeuvre incontestable, la vraie réponse à
"2001..." (contrairement à "Solaris") : un film contemplatif, poétique et métaphysique ; la perfection plastique et
l'épure totale ne masquent pas un seul instant le suspense haletant de ce film d'anticipation de 140 plans (pour
deux heures et demie) ne contenant pas un seul effet spécial ou presque. Mais le lieu n'est pas ici à faire de la
critique de cinéma, dommage en l'occurrence car la musique seule offre un intérêt bien moindre. Ceux qui ont
vu le film se souviennent sans doute de ce très long plan dans lequel les trois protagonistes empruntent une
draisine pour pénétrer dans cette fameuse "zone" interdite (où des créatures extra-terrestres auraient stationné
puis d'où elles seraient reparties, laissant derrière elle des objets et des lieux emprunts de magie et de
phantasme, où les désirs se réaliseraient). Le ton passe alors du sépia à la couleur vive (qui symbolise la zone)
; durant plusieurs minutes, Solonitsyne est filmé en gros plan tandis que défile derrière lui le paysage. Ici, les
échantillons de train utilisés par Artemiev mêlés aux nappes synthétiques attirent l'attention, dans la mesure où
la distorsion qu'il leur impose progressivement peut refléter l'ambiguité ou l'altération des sentiments du
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personnage à l'approche du mystérieux sanctuaire. Pour le reste, le lyrisme trop marqué de la partition,
apprécié hors du contexte cinématographique, fait assez mauvais effet. En conclusion, ceux qui s'intéresseront
réellement à un tel disque seront bien davantage les mélomanes curieux de découvrir la musique
electro/ambient des pionniers que les amoureux du cinéaste russe. À moins que les deux catégories,
incidemment, ne se confondent.
Note : 4/6
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CAVE AND THE BAD SEEDS (Nick) : Your funeral...my trial
Chronique réalisée par Twilight
'Your funeral...my trial', première galette du grand Nick qu'il m'ait été donné d'entendre est un réceptacle
d'ombres et de douleur, un spleen pudique, légèrement voilé, un peu à l'image de sa pochette, mais qui ne
saurait mentir à l'auditeur...Sous ses faux airs de ballade pour piano et orgue, le titre éponyme a quelque chose
de funèbre, de résigné, il annonce une nuit que confirme 'Stranger than kindness', chanson à fleur de peau qui
glisse le long des nerfs comme un frisson. Frisson ? Il y a bien de quoi frissonner car la descente dans les
ténèbres ne fait que débuter, 'Jack's shadow' renoue presque avec des climats proches de Birthday Party, en
bien moins violent certes mais les impressions noires et malsaines qu'il dégage sont similaires...une sorte de
rage intérieure qui ronge sans jamais réellement exploser, une sorte d'exorcisme à coup de montées de
guitares intenses et lascives à la fois...'Et personne ne vit disparaître le saltimbanque...' Nick Cave a le don de
raconter des histoires terribles et funèbres à propos de simplets mystiques en quête d'amour, d'alcooliques
hantés, d'assassins potentiels, anges déchus cloîtrés dans leur campagnes oubliées de Dieu et des hommes,
prisonniers de leurs villes de planches clouées puant la boue, le mauvais whisky et l'oubli...'The Carny', valse
funèbre et envoûtante est pour moi la plus belle pièce jamais écrite par Nick et ses Mauvaises Graines...'No one
saw the carny go'...Peu d'espoir dans cette écriture, malgré une quête obssessionnelle d'amour, d'une réponse
d'un Dieu sans cesse silencieux...Et 'Hard on for love', 'She fell away' de reprendre cette plongée maladive dans
l'ombre à coup de mélodies taillées dans le rasoir des guitares vrillantes et grinçantes qui vous déchirent les
tripes...'Sad waters' et ses tristes plages d'orgue apparaissent presque comme une flamme vacillante, un bref
instant de répit pour verser quelques larmes avant que les rythmes d'abord tranquilles de 'Long time man' puis
ceux plus psychotiques de 'Scum' vous replongent dans cette obscurité à peine dissipée par quelques éclats
de lune en lutte perpétuelle avec les nuages. 'Your funeral...my trial' porte bien son nom, funèbre et splendide,
comme un exorcisme, une faute qu'il a fallu expier en accouchant dans la douleur de ce qui reste l'un des plus
beaux opus de Nick Cave.
Note : 6/6
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CAVE AND THE BAD SEEDS (Nick) : Murder ballads
Chronique réalisée par Twilight
Tout le monde est d'accord sur ce point, Nick Cave est un songwriter; plus même, un véritable écrivain (ceux
qui comme moi se sont déléctés de 'Et l'âne vit l'ange' savent de quoi je parle). Lui qui a toujours aimé raconter
des histoires et créer des personnages a décidé de pousser la chose plus loin en se confrontant au style de la
'murder ballad' qui comme l'indique son nom est un genre d'histoire court et cruel contant mort et meurtres
(parfois assez gore) sur le ton de la chanson ou du conte adulte. Comment imaginer meilleur exercice pour un
esprit aussi noir et torturé que celui du grand Nick ? Curieusement cette thématique bien glauque lui apportera
pourtant une reconnaissance 'populaire' assez inattendue. L'explication se résume probablement au single
mélancolique 'Where the wild roses grow' où il chante en duo avec l'infecte Kylie Minogue (qui interpète ici la
première bonne chanson de sa carrière) qui fit un bon score de vente. Cette belle ballade sur lit de cordes
tristes et rythmique jazzy n'est d'ailleurs pas le seul duo puisque c'est avec P.J. Harvey que l'Australien
interpète le poignant 'Henry Lee', sans parler de la participation de Shane McGowan, Anita Lane, Rowland
S.Howard, etc. De par leur optique de 'murder ballad', les morceaux proposent un saisissant contraste entre la
cruauté des textes (la pauvre Mary Bellows qui quitte son trou pourri en quête de futur pour finir assassinée,
Henry Lee tué par une prétendante éconduite ou encore Elisa Day, la Rose sauvage, que l'on retrouvera le
crâne éclaté dérivant dans la rivière, sans parler de Stagger Lee qui sème la terreur dans la ville avec son colt et
j'en passe...) et la musique, plus tranquille (encore que parfois...), dans un registre blues jazzy triste version
Bad Seeds. Si l'exercice est réussi, admettons aussi qu'il ne s'agit pas de la plus belle réussite de Nick Cave et
ses Bad Seeds; les atmosphères sont certes réussies, l'adéquation entre textes et musique très bien maîtrisée
mais on sent la composition moins inspirée, louchant du côté des disques précédents plus que proposant de
nouvelles pistes, les mélodies sont moins prenantes malgré de beaux essais. Bref, un bon disque, mais qui
brille selon moi davantage par la qualité de ses écrits que par sa musique. J'adore par contre sa touche
d'humour noire finale...après tant d'horribles histoires, une reprise du 'Death is not the end' de Bob Dylan !
Note : 4/6
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LUDMILA : Disadorne
Chronique réalisée par dariev stands
Le Heavenly – merveilleux style inventé pour décrire la musique atmosphérique de Cocteau Twins lors des
années 80 – est un genre musical extrêmement reconnaissable. Il se trouve à la croisée de plusieurs courants
(New Wave bien sur, Gothique, New Age, Ambiant, World, Musique Electronique...), tout en dégageant quelque
chose d’unique qui semble ne provenir que de lui-même. Depuis son avènement populaire avec Dead Can
Dance (Forte influence du groupe chroniqué ici, avec Echo & The Bunnymen), on ne compte plus les multiples
projets qui s’en inspirent, lui empruntant son chant éthéré si typique. C’est ainsi que Ludmila a été créé il y a
presque dix ans, à Milan. Réunissant un producteur et une chanteuse soprano à la voix incroyable (la
formation-type du style, comme les Cocteau Twins), ce groupe nous sert ici un premier véritable album à la
pochette onirique et attirante. Et c’est une sacrée réussite. Jamais redondant, toujours superbe, le chant de
Paola se déploie avec majesté tout au long de 9 titres aux tempos assez rapides pour le genre, emprunts d’une
nostalgie latente et d’une ornementation sonore parfaitement dosée. Les morceaux se structurent
principalement autour de la basse, rivalisant d’inventivité avec les joyaux mélodiques ciselés par la voix de
Paola comme si tout coulait de source. La dessus s’ajoutent des rythmes trip-hop, des samples, et des parties
de guitares qui ornent le tout comme du lierre qu’on imagine s’enrouler autour des ruines d’un temple romain,
perdu dans une campagne italienne abandonnée... Il se dégage de ce « trip hop ethnique » une atmosphère
médiévale (certaines polyphonies ajoutent à cet effet) et brumeuse, comme un matin humide perdu dans une
époque oubliée, au creux d’une nature fantasmée… Ainsi se prend-on à rêver de mythologie à l’écoute de ce «
Disadorne » (« nudité ») flâneur, notamment grâce à une production remarquablement immersive que n’aurait
pas reniée certains sorciers de studio (Kate Bush en tête). Un disque injustement passé inaperçu, qui s’écoute
en boucle ; en suivant des oreilles les volutes de cette voix qui semble vouloir tracer un chemin secret...
Note : 5/6
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MIND OVER MATTER : Indian Meditation Vol. 2
Chronique réalisée par Phaedream
Inspiré par l’accueil réservé à Indian Meditation, paru en 2005, Klaus Hoffmann Hoock revient avec une suite,
Indian Meditation II. Suivant le même principe, soit remixé des compositions de MOM avec une touche aux
effluves de l’Asie. Cette 2ième compilation reflète le confort de Klaus H.Hoock pour la religion Hindoue et toute
la quiétude qui entoure cette mythique croyance. Crossing Jamuna River, initialement paru sur l’album On the
Wings of the Wind est un lent mouvement sinueux, aussi tranquille qu’un fleuve en l’absence de vent. Les
souffles synthétiques muent sur les subtiles oscillations des flûtes, aux sonorités aussi diverses que limpides,
qui inondent l’atmosphère de brefs chants mélodieux. Des accords de sitar traversent ses souffles d’harmonies
sur un mouvement linéaire qui ondoie délicatement sur une mer de bourdonnements, issue des réverbérations
d’un synthé statique. La basse ondulante de Maha Ganga me rappelle la structure de Ganga sur The Colours of
Life. Un titre doux initié par des chœurs célestes, des flûtes basses et des percussions natives. Le titre
progresse sur un beau sitar, une mélodieuse flûte traversière et de beaux tam tam doux, aussi envoûtant que la
sensualité de la ligne de basse. Land of Bliss est le seul titre inédit sur cette compilation. Un long mouvement
flottant sur un synthé aux délicates permutations dans les tons et oscillations.
Sathapthi Express progresse sur un tempo plus vivant. Les notes voltigent sur un mouvement dense où
d’épaisses strates flottent avec magnétisme sur une basse et des percussions acoustiques. Un titre intense au
délicat mouvement serpentin fluctuant. Avec Shive Shakti de lourdes nappes synthétiques flottent dans un
bourdonnement continu qui provient des croisements des coussins, des gongs et de réverbérations des ondes
circulaires. Un titre intense et triste qui nous rappelle que la beauté n’appartient qu’aux yeux qui la voient.
Paradiso est une superbe reprise de Being Home Again de The Colours of Life. Un tempo suave et lent, avec
une belle basse ascendante et un synthé enveloppant qui harmonise le présent au passé. Une superbe pièce
qui augmente en intensité sur des nappes aux souffles bienveillants.
Nettement plus tranquille que le volume I, Indian Meditation II n’en demeure pas moins mélodieux. Les
atmosphères sont denses, grâce à cette multitude des nappes flottantes dont les réverbérations introduisent
des mouvements secondaires, aux tournures étonnantes.
Omniprésent, les mellotrons exploitent une multitude de flûtes enchantées et enchanteresses, sur de superbes
strates aux arrangements orchestraux qui font toujours soupirer de nostalgie.
Note : 4/6
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DEAD MAN IN RENO : Dead Man In Reno
Chronique réalisée par Powaviolenza
Etttt c'est ENCORE au tour de Candlelight, excellent label des mighty Emperor et autres énormes tueries, de
nous signer un énième groupe de metalcore inutile et chiant ! Après la bouse The Seventh Cross, nous avons
maintenant le droit à Dead Man In Reno, dont rien que le nom nous évoque le pire de Myspace et autres
Clémenteries infâmes. On est donc ici dans la lignée des derniers Caliban et compagnie : gros riffs moshisants
hardcore plats accouplés avec du death mélodique mielleux à la suédoise. Mais contrairement à The Seventh
Cross et compagnie, quelques passages guitaristiques viennent rehausser l'intérêt - je ne parle pas des
dissonnances convenues en bas à droite du manche ou des chugga-chugga, mais de quelques duos
guitaristiques / riffs aux harmonies dignes d'attention, tels que celui dont est judicieusement pourvue l'intro. Ca
et une certaine technique / agressivité instrumentale continue (on ne tombe jamais dans le rose bo185on total,
excepté deux trois passages en chant clair et quelques passages acoustiques / classiques dignes des pires
groupes de Heavy/Speed épique - "Given A Season Of Sun", "Cursed") sauvent ce disque du 2/6 et le hisse un
peu au dessus de la très basse moyenne des centaines de groupes de metalcore du moment. A l'image d'un
Abigail Williams (aussi chez Candlelight.. tiens, tiens?), d'un The Black Dahlia Murder ou d'un Vehemence, le
très chouette cotoie le trend convenu, ce dernier aspect étant malheureusement trop présent pour en faire
abstraction. Alors si le gros riff suédois tape-à-l'oeil "Slaughter Of The Soul en moins bien" t'excite, si le besoin
d'intensité prédomine sur le besoin d'originalité dans tes critères d'achat, tu peux essayer Dead Man In Reno,
qui avec sa production énormissime et massive (comme d'hab..) signée Jamie King, ses quelques blasts et sa
quasi-perpetuelle moshitude pourra satisfaire tes instincts metalcoriques les plus vils. Par contre, si tu vomis
toute cette scène, ne t'emmerde pas avec Dead Man In Reno, groupe efficace mais ô combien superficiel. "Et
même si c'est bien joué / bien produit, on ne retiendra (quasiment) pas une note à la fin de l'album, pour ceux
qui auront eu le courage de se farcir les 40 minutes en entier."
Note : 3/6
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BOYS FIRST TIME : The Final Soul Trade
Chronique réalisée par Powaviolenza
Bénéficiant de l'ex-chanteur de Korum ainsi que du batteur de Decoherence, les Boys 1st Time - dont ce n'est
pas la première fois, ceci étant leur deuxième EP - pratiquent un hardcore new school très chaotique dans les
structures tel qu'il est couramment pratiqué de nos jours : extrêmement décousu, multipliant changements de
rythmes, passages jazzy, blasts ravageurs, le tout dans un seul morçal. Rien de bien nouveau donc : on est en
territoire connu, que ce soit pour la voix medium metalcore assez commune ou pour les gimmicks de
compositions - "je blaste puis partie calme puis on reblaste puis re-partie calme". Cela n'empêche pas les Boys
1st Time d'avoir la classe, même si ça ne casse pas trois pattes à un canard. La prod' est très bonne, claire et
puissante; tout le monde est bien évidemment très bon, du batteur au jeu qui latte bien la gueule (normal, c'est
le mec de Decoherence) au bassiste 6 cordes virevoltant et présent harmoniquement. Les riffs sont vraiment
sympas dans l'ensemble, parsemés d'harmonies parfois originales qui accrochent l'oreille et de certains riffs un
peu jazzy classes rappellant le Dillinger Escape Plan de "Miss Machine" (auquel le chant nous renvoie aussi
quand ça varie - en particulier sur "Run From The Exit"). Bref, trois bons titres que je n'écouterais pas en
boucle car ne captant pas mon attention du début à la fin - un peu trop décousus à mon goût, mais qui
devraient plaire à tous les amateurs de hardcore moderne bien gaulé pas encore lassés par cette prolifération
de groupes chaotiques je-fouette-l'air-avec-mon-instrument-c'est-rock'n'roll.
Note : 3/6
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SALVING THY AMISS : Horsewreck, Oh Trail's Highlight
Chronique réalisée par Powaviolenza
Salving Thy Amiss est un jeune groupe parisien sortant leur premier EP, "Horsewreck, Oh Trail's Highlight", qui
je dois dire, est une très bonne surprise pour ma part : on a ici affaire à un très bon hardcore sombre et opaque,
dissonnant avec classe (riffistiquement et au niveau de l'ambiance générale, ça pourra vous évoquer Ananda,
Tusk, Starkweather, pourquoi pas Voivod sur certaines dissonances aussi), chaotique sans plonger dans la
surenchère de chaos habituelle depuis quelques années. "Horsewreck" sonne définitivement sympathique,
violent et intense tout en étant plutôt "aérien" car développant un feeling assez triste / bizarre quasi-black. La
prod typée années 90 est bien poisseuse, les cris et la voix désabusée screamo sonnent bien malsains... Tout
cela n'est certes pas parfait : le batteur ne sonne pas toujours 100% carré sur certains roulements de double, le
tout est parfois un peu trop opaque et répétitif - mais je chipote plus qu'autre chose. Voilà une démo qui a la
classe, je suis bien pressé de voir la suite.
Note : 4/6
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VAN BOGAERT (Frank) : One Out Of Five The Best of Frank Van Bogaert
Chronique réalisée par Phaedream
Je connaissais très peu Frank Van Bogaert avant d’entendre cette compilation. One Out of Five, un titre très
original pour un album compilation, est le 6ème album de ce musicien Belge dont le 1er opus Colours
paraissait en 1998. Human, de l’album du même nom, ouvre ce recueil en rythme et harmonie. Sans le savoir,
j’entrais dans le début de 77:20 minutes d’émerveillement.
Malgré un souple mouvement séquentiel, Human bifurque vers un tempo indéfini. Le rythme versus le non
rythme. Pourtant, il y a du rythme, mais un rythme qui se fond dans l’harmonie.
À chaque volet, à chaque mouvement apparaît un nouvel instrument, de sorte qu’à la fin nous constatons qu’un
rythme s’est formé. En fait plusieurs rythmes, comme par magie, se forment à mesure que Human progresse,
comme une improvisation structurée. Une grande qualité pour un compositeur. Doucement des notes de
guitares vrillent en spirales, des percussions éclectiques battent la mesure sur de superbes arrangements. On
est envahit par un son riche, dans une atmosphère aérée qui bouge constamment. C’est de cette façon que l’on
tombe pour la musique de Frank Van Bogaert. Comme ça, à partir d’une harmonie saisie au vol, il crée une
superbe pièce à saveur tribale. Un peu différent, Closer est plus convivial, sur de beaux effets vocaux. À mi
chemin entre la musique du monde et la musique tribale, Frank V. réussit à y coller un tempo entraînant.
Deserts est un autre titre assez fort. Après une intro style ballade romanesque, le titre explose sur de bonnes
batteries et un synthé aux nappes denses qui virevoltent avec la grâce d’une ballerine. Un beau titre, avec de
beaux arrangements qui jouent sur des intonations subtiles, avec une touche tribale. Comme sur Human, les
percussions sont terribles. Vous avez entendu Rorogwela, j’en suis sûr. C’est une superbe ballade, avec de
belles percussions montantes, des voix tribales qui ‘’hummhumm’’ sur un beau piano et même une cornemuse
fait une apparition discrète. Des vagues lavent le sable, sous une pulsation linéaire, et une suave flûte clanique.
Home by the Sea démarre doucement. Le tempo monte en cadence pour insuffler une superbe ballade sur des
percussions sauvages et puissantes, voire violentes que de superbes arrangements reforment en un titre
puissant, bien enveloppé de strates mellotronnées. Un autre superbe titre. En fait, One Out of Five est un
étonnant album, plein de découvertes, de petites perles musicales qui égayent les moments sombres, comme
l’inverse peut se produire; des moments émouvants qui vont chercher une larme sur le coin des yeux. Prenons
Violet, un titre incroyablement doux, malgré son lourd aspect dramatique et une orchestration monstre, la
délicatesse qui se cache derrière cette pièce nous atteint droit aux tripes. Tout comme le superbe Geographic,
une ode à la culture des premiers peuples sur des arrangements épiques. Un titre incroyablement nostalgique à
faire frémir l’épine dorsale.
One out of Five m’a totalement séduit. Tout au long des 14 titres, Frank Van Bogaert étonne par la diversité de
ses arrangements, et la fluidité des genres. De mélodieux, il peut vaguer sur des titres plus complexes, avec
des modulations étranges, qui finissent par boucler la boucle harmonieuse. Un habile mélange de musique
tribale, de musique du monde sur des structures séquencées à la New Berlin School. Un croisement entre
Vangelis, Mike Oldfield et Jean Michel Jarre. Un monde de fantaisie et d’harmonie sur 77:20 minutes
d’émerveillement.
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Disponible au : http://www.frankva185ogaert.com/
Note : 5/6
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SVARTSYN : Skinning the lambs
Chronique réalisée par Yog Sothoth
Comme beaucoup de monde, j’ai découvert Svartsyn grâce au split regroupant leur dernière démo en date
(2003) et l’EP d’Arckanum paru en 2004 « Kaos svarta mar » (cette chronique est d’ailleurs issue de ce split CD,
ne possédant ni la démo ni sa première réédition EP). Le groupe, au sein duquel on retrouve le batteur originel
de Dark funeral, évolue dans un Black Metal moderne « à la suédoise » (façon Watain / Ondskapt), jouant sur
l’alternance de parties rapides et de ralentissements plus mélodiques - particulièrement optimisés sur « A night
created by the shadows », morceau le plus marquant, ou sur les longs arpèges mid tempos du dernier titre pour propager une ambiance infernale, mais pour la moins accrocheuse. On est d’ailleurs parfaitement saisi par
le son que le groupe a réussi à développer, mettant en valeur chaque instrument pour un résultat des plus
opaques et impressionnant, avec une utilisation de la basse des plus judicieuses, et ce chant, bien dans l’esprit
suédois aussi, écorché et très réverbéré. Ambiance donc, mais un bémol par contre sur le manque de prise de
risque, certaines lignes de guitares provenant note pour note de certains classiques du Black Metal nordique:
le début de « Skinning the lambs » par exemple renvoyant immanquablement à l’ouverture du « Jesus tod » de
Burzum », à moins qu’il ne s’agisse d’un vague clin d’œil. Hormis ce point de détail, les 4 titres de cette démo
témoignent d’un réel potentiel pour ce groupe, qui après avoir longuement évolué au sein de l’underground
suédois (1ère démo en 1993, quand même), pourrait bien obtenir une plus large reconnaissance parmi la scène
Black Metal, par la seule force de sa musique. Une bonne découverte, qui donne envie de se procurer la suite.
Note : 4/6
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LA BARBARA (Joan) : Voice is the original instrument
Chronique réalisée par Progmonster
Il y a des disques qui ont le mérite d'exister. Tout simplement. Comme pour La Monte Young ou Marian Zazeela,
Joan La Barbara fait partie de cette catégorie d'artistes hors champ (Duchamp ?) qui questionnent la musique
dans son essence même, se souciant guère de l'expressivité que l'on peut donner à ce véhicule, fuyant toute
tentative de glorification de la personne, fût-elle fortuite. Vocaliste de son état, proche collaboratrice de John
Cage, Philip Glass ou Steve Reich - pour ne citer que les plus connus - c'est tout naturellement que la première
de ses rares publications sur disque se focalise sur son instrument naturel, comme l'indique par ailleurs très
clairement son titre... Trois longues plages, et trois approches différentes qui mettent en exergue ses
possibilités vocales ; "Circular Song", va-et-vient progressif qui suit le rythme de ses inspirations et expirations
régulières tout en jonglant avec les octaves, "Voice Piece", d'inspiration clairement tibétaine, se faisant l'écho
d'une recherche toute intérieure, et enfin "Vocal Extensions" où La Barbara s'aide d'un rack multi-effets pour
poursuivre son investigation expérimentale improvisée au-delà des limites imposées par le ridicule. "Voice Is
The Original Instrument" est le premier disque de culture occidentale à célébrer la nature même de notre voix
de manière si radicale, à l'instar du "For Alto" d'Anthony Braxton qui, le premier, osa l'album solo au
saxophone. Il ne fait aucun doute que cette audace, mais sans doute plus encore cette absolue conviction, ont
marqué à jamais les esprits de chanteurs et chanteuses plus contemporains qui ont, en quelque sorte, pris le
relais de cette approche singulière pour la fondre dans leur mode d'expression respectif. On saluera la
démarche. On appréciera l'effort. On soulignera la technique. Mais on cherchera aussi - sans les trouver - de
bonnes raisons à vouloir écouter cet essai plus d'une fois...
Note : 3/6
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ELEMENT 4 : Neotunes
Chronique réalisée par Phaedream
Element 4 est un projet musical parallèle à Brainwork, celui-là même qui nous a donné Soundclouds l’un des
meilleurs albums de MÉ en 2006. Guidé par Uwe Saher, un synthésiste Allemand. Element 4 fait vibrer les
planchers de danse depuis 1995 et Neotunes est son 6ième cd. Un opus fort différent de Brainwork. Si
Soundclouds nous faisait voyager sans bouger, Neotunes nous fait bouger, sans vraiment voyager.
Neo Intro est une courte introduction flottante où les strates se déplacent lourdement dans une sphère sonore
harmonieuse, nous faisant rêver à Soundclouds. Quakebeat 2006 allume la mèche avec une séquence agitée.
Des striures synthétiques déchirent l’ambiance sur des cymbales à la ‘’tschitt tschitt‘’ qui dessine un beat
martelant. La basse dans le plancher épouse parfaitement les pulsations cardiaques. le rythme est infernal et
nous enveloppe d’une superbe ligne mélodieuse qui assiège nerveusement un tempo décapant, croisé des
stries multi sonores. Loin d’être hypnotique, le tempo nuance son magnétisme par de superbes détours et de
fortes nuances dans les tons, appuyé de bons effets sonores. Bluenoon continue le pilonnage sur un tempo
plus minimaliste martelé de percussions qui échappe ses effets percutants, donnant une dimension industrielle
à un mouvement mélodieux à la Jarre. Blaster est encore plus frappant. Sur un beat dur, la séquence vrille d’un
cercle rotatif que les percussions pourchassent, au travers les stries saccadées. Loungebar calme les ardeurs
avec un beat lounge, assaisonné de bonnes percussions, d’un bon jeu de basse et de belles harmonies qui
reviennent inlassablement sur des strates discrètes qui deviennent plus apparentes. Euphoria c’est le concept
même des‘’techno dance‘’à l’âme momifiée. Ça bouge, ça assomme sur des rythmes aux variances pulsatives
et une basse qui masse les pieds de ses énormes champs de réverbérations. Un titre zombiesque où les yeux
sont souvent en arrière du corps. Mindscapes est une superbe pièce, bien agencé. Un beat tambourinant, avec
des percussions tam-tam, sur une ligne oscillante qui s’anime sur une impulsion circulaire martelante où les
strates syncopées avance le pied sur le frein. Le résultat est étonnant et plaisant. Des lignes qui s’entrecroisent
à des vitesses, tant linéaires que circulaires, sur et des beat variés n’ont pas la même impact qu’une ligne
monotone sans surprises. Tout le contraire de Neotunes où les atmosphères, les ambiances sont aussi
significatives que les tempos. C’est le même principe avec Road to Amnesia 2006. L’intro aux percussions
vaporeuse initie une pulsation lourde dont la résonance titille les muscles plantaires. Nous sommes dans un
foudroyant tourbillon technoïde intense qui altère son mouvement pour insérer toutes les nuances en rotation
et pulvériser un rythme encore plus sauvage sur de superbes strates synthétiques aux mélodies accrochantes.
Peaktime est du même moule, mais en mi danse il y a un superbe jeu de percussions et de basses à faire vibrer
les lustres du voisin d’en haut. De la dynamite compressée, qui a toujours une parcelle d’harmonie d’insérer
quelque part. Un techno tribal extra terrestre, F.X. est un titre est étonnant. Sur des tempos mous aux rigidités
plasmatiques Element 4 exploite les sonorités les plus hétéroclites et forme une impulsion aux cadences
fragiles et qui exploitent un techno frêle, mais succulent d’ingéniosité. Blaster conclût sur un remix
conservateur.
Je dois avouer que j’appréhendais l’écoute de Neotunes. Je ne suis pas un fana de techno, ni de ses rythmes
tonitruants. Mais, ce fût tout le contraire. J’ai été charmé par un artiste qui attache autant d’importance dans sa
recherche et la créativité que les rythmes. Neotunes c’est près de 80 minutes de beat enflammé, de musique
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martelante aux rythmes explosifs. Mais c’est aussi de la finesse dans les arrangements. Uwe Saher sait
comment nuancer les genres. La différence entre Elements 4 et les autres groupes technoïdes arrache pieds
est la subtilité et les nuances dans les évolutions et les tons. Tout au long de cette bombe, Uwe Saher modifie
les séquences et apportent des nuances mélodieuses qui changent la donne. Soundclouds et Neotunes, Uwe
Saher, ou Brainwork ou Element 4 si vous préférez a connu une excellente année. Je nous en souhaite d’autres.
Disponible au; http://www.brainwork.net/
Note : 4/6
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BRAINWORK : Back to Future
Chronique réalisée par Phaedream
Back to Future est le premier cd de Brainwork depuis Sensual Reflections, paru en 1997. Une longue période de
silence où Uwe Saher a réalisé 2 titres sous le nom d’Elements 4; Continuation et Live Summer 99, deux titres
issus en 1999. Un long silence de 4 ans, brisé par la parution de Back to Future, un opus où le rythme épouse
toute les formes. De la Berlin School sur du Drums’n’Bass.
4 am Machines nous place, dès les premières notes, dans l’univers assourdissant de Back to Future. Une
séquence nerveuse, aux délires stratosphériques de Tangerine Dream, déboule sur des percussions qui
tambourinent un tempo synth pop. Les synthés sont agiles et forment des lignes mélodieuses fébriles, parmi
des effets sonores dignes d’un western intergalactique. Le tempo accentue la mesure, pour virer sur un rythme
plus ‘’dance’’, avec des percussions qui matraquent un beat infernal. Un bon titre, avec un superbe jeu de
synthé, qui modifie inlassablement son parcours dès qu’il croise les mirifiques coussins flottants. Un
séquenceur aux lignes bouclées ouvre Back to Future. Un maelström de notes harmonieuses flotte autour de
coussins synthétiques en suspension qui aliment une profondeur sonore harmonieuse. Les percussions
tombent et martèlent une cadence très Berlin School, sur une bonne basse groovy. Back to Future possède un
beat très vivant qui évolue sur de superbes nappes statiques, des mellotrons orchestraux et de superbes solos
de synthé. De belles notes limpides s’entrecroisent pour former les fins mouvements bouclés de Sanddunes,
sur un synthé statique et une basse ondulante. Cette séquence mélodieuse, qui accroche l’oreille
instantanément, appui son rythme sur des percussions solides et des passages synthétiques soyeux, aux
solos et lignes principales à l’essence des peuples des déserts.
Un superbe mouvement séquentiel trace une ligne uniforme, qui ondule sur son effet de réverbération, où les
notes s’entremêlent sur un large mouvement circulaire. Transponder résonne de ses percussions qui martèlent
un rythme infernal. Sans nuances possibles, les lignes déboulent en cascades sur des séquences
minimalismes en mode staccato névrosé et une superbe basse qui coule de son étrange attrait. Transponder
est un énorme tourbillon séquentiel où les lignes voltigent, nerveuses et harmonieuses, dans une structure
rythmique aux superbes nuances synthétiques, qui étonnent dans cet univers robotique. Je croyais bien que
Transponder était la limite d’un Berlin School séquencé en mode soft techno! Faut croire que non, car Offbeats
est tout aussi hallucinant de rythme que Transponder. Les séquences sont superbes et oscillent sur des
mouvements linéaires où les notes vrillent comme sur des montagnes russes. Les percussions sont claquantes
et dures. Elles martèlent un beat infernal sur une basse moulante, qui trouve un peu de répit à l’ombre des
nappes flottantes. Offbeats est certes l’un des titres les plus puissants que j’ai entendu dans l’univers de la MÉ.
Back to the Sea est la pièce la plus longue sur Back to Future et elle démarre en lion. Séquences nerveuses
avec des percussions endiablées, ajustées sur la fébrilité des séquenceurs. Tout au long de Back to the Sea, la
structure rythmique est sensiblement la même; frappes nerveuses et répétitives, sur une bonne basse
mordante et une séquence ondulante. Pour ce qui est des synthés, c’est tout à fait différent; de longs solos de
guitares virtuelles sur des lignes sautillantes et des strates mouvantes. Un long titre qui n’en finit plus
d’étonner. Outre ses gros coussins synthétiques qui précèdent les furieux solos, il y a des passages où les
percussions martèlent le tempo en solitaires, ou à peine accompagnées de passages synthétiques timides. Un
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superbe carrousel tapageur qui s’écoule assez vite pour un titre de 16 minutes.
Back to Future est indéniablement un album d’une puissance étonnante. Uwe Saher parle d’un nouveau genre
musical, issu de la Berlin School et du Drums’n’Bass, que l’on pourrait appeler ‘’Sequence’n’Bass‘’ ou encore
‘’Berlin Bass‘’. Je ne sais pas si l’appellation a été retenue, mais ça dépeint fortement l’ambiance musicale qui
règne sur Back to Future. Un album lourd, aux harmonies fluides, sur des percussions et des séquenceurs
déments, accompagné d’un superbe jeu de synthé aussi imprévisible que mélodieux. Back to Future de
Brainwork est un essentiel. Un album multi sonore sans frontières, ni compromis. C’est dur, c’est cru et c’est
superbement bien produit. Un must!
Note : 5/6
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BLUT AUS NORD : Mort
Chronique réalisée par Sheer-khan
Blut Aus Nord continue de muter... de se former, de se déformer... de plus en plus froid avec sa batterie
electromolle et sa prod compressée. "MoRT" se présente comme un univers glauque, organique, rampant... un
marécage de sons de guitares industrieux et couverts de souffre, qui se remuent et grouillent dans des courbes
complexes d'accords disharmoniques et de mélodies déchirées. C'est répugnant... c'est sale, ça pue et ça
supure de partout... les métriques ont la polio. Les vocaux sont rares, profonds et dégueulés... et des leads
tous plus inconfortables les uns que les autres se tortillent et copulent au dessus des roseaux sous un ciel noir
charbon. Blut Aus Nord continue de muter... de se transformer... ni vitesse, ni brutalité, juste du difforme, rien
que du difforme qui va et vient dans les méninges en suçant les neurones et en donnant la gerbe. Et tout cela
est baigné d'une lueur incontestable, et d'une beauté dérangeante. Les accords qui s'effondrent et les rythmes
qui s'avachissent servent d'arrière-plan lugubre à des arabesques de guitares qui passent de la laideur à la
grandeur dans un maelstrom sonore et musical permanent... le spectre de choeurs sordides... une ouverture
soudaine dans des gouffres gothiques et grandiloquents... une angularité martiale finalement dissoute dans la
boue des guitares... des spectres, et rien que des spectres. Comme des serpents humides sous la lune, les
méandres disharmoniques changeants qui forment cette musique font luire au hasard de leurs contorsions des
reflets harmoniques glaçants, s'écartent au passage de mélodies véritables et terribles qui viennent montrer
leur dos avant de disparaître vers le fond comme des anguilles. On perçoit ça et là les échos improbables de
riffs harmonisés, tous plus noirs les uns que les autres, dégringolant de coup de cymbales en fausse caisse
claire, on se laisse posséder par un solo aspic... et tout cela est répugnant... tout cela est sale, puant et
supurant de partout, bizarrement émaillé d'un son cosmico-dépassé de boîte à rythme déglinguée. Il n'y a plus
rien de défoulatoire chez Blut Aus Nord... plus une seule ligne droite, plus aucun sol solide. On se plonge dans
"MoRT" exactement comme on se plonge dans un bain de fange... les répétitions, les chromatismes et les
distorsions mélodiques agissant comme des vapeurs lourdes et narcotiques qui écoeurent et abrutissent.
Même si le choix d'un son distant de blockhaus infecté contrarie une partie des sensations que procure ce
nouveau travail, Blut Aus Nord continue son parcours de différence et d'exigence avec une incomparable
réussite, et un sens inégalé de la beauté en négatif.
Note : 5/6
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TRIBES OF NEUROT : Meridian
Chronique réalisée par Chris
La mystérieuse entité Tribes Of Neurot poursuit sa déjà longue route avec ce sixième album à la pochette
acidulée et électrique. "Meridian" s'est fait sagement attendre puisque les derniers travaux studios du groupe
remontent à 2002 avec l'ode aux insectes qu'était "Adaptation and survival". "Meridian" confirme que les
californiens n'ont rien perdu de leur imagination et de leur inspiration avec ces 10 nouvelles compositions
assez courtes (4 minutes en moyenne) qui explorent le monde à l'aide de textures qui se répètent et se
superposent en tous sens, de bruitages et d'effets électroniques qui pénètrent de toutes parts et des samples
d'instruments à cordes. La musique du groupe semble ici plus facile d'approche que par le passé, grâce à une
approche un poil plus mélodique. De ce fait l'ensemble sonne moins hermétique. Mais "Meridian" reste
toutefois un monde torturé et électrique ; un monde strident et répétitif ; un monde étonnant et parfois
inquiétant... ; un monde étrange, vraiment...
Note : 4/6
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KOEPPER (Jeffrey) : Momentium
Chronique réalisée par Phaedream
Voici le second opus de Jeffrey Koepper, celui-là même qui nous offrait Etherea en 2003. Et comme à cette
période, Momentium visite les complexités du monde analogue, avec la technologie actuelle. Aidé de son bon
copain, Steve Roach qui fait le mixage final, le résultat est stupéfiant. Très fluide et surtout très électronique,
Momentium gravite entre deux sphères musicales; l’analogue et le digital moderne avec un sens inné des
arrangements, de la structure harmonique et des revirements insoupçonnés. Une expérience musicale qui vaut
l’investissement.
Les premières notes de Byzantine Machine sont sobres et flottent dans un espace aux réverbérations étranges.
Une courte harmonie qui termine dans les résonances menaçantes de ses dernières notes, lorsque l’on entend
le séquenceur arrivé. Nerveux, il frétille sur un mouvement circulaire, à une cadence soutenue. C’est beau un
séquenceur, c’est la cohésion parfaite, trop parfaite même. Et c’est pour cela que des synthésistes aiment
variés l’intonation des notes, amenant de subtiles modulations dans les mouvements. Ici, Koepper est
merveilleux. Le séquenceur épouse diverses formes rotatives sur de fines percussions métalliques et une
mélodie en arrière plan qui divise et approfondie la mélodie qu’est Byzantine Machine. Outside se développe
sur d’onctueuses nappes qui flottent dans une ambiance bigarrée d’effets sonores intrigants. Godspeed 2 est
un titre dédié à la mémoire du synthésiste Américain, Michael Garrison décédé des suites d’un cancer. Une
belle mélodie séquencée qui est visitée par des effets sonores, de strates volantes, et de mélodies fragmentées,
ajoutant une profondeur harmonieuse à un titre prisonnier d’un champ sonore. Un lourd bourdonnement
synthétique émerge d’un fort vent cosmique. Un superbe séquenceur ouvre Sense of Time. Résonnant de sa
lourdeur, il dessine un beau mouvement, au travers de lourds riffs intermittents. Mouvement imparfait, à la
rotation parfaite, la mélodie séquentielle traverse un cosmos de bruits analogues, où des mélodies fragmentées
enrichissent un mouvement minimalisme à la quête de trésors d’harmonies. Eternal Sea est la pièce la plus
longue sur Momentium. Un titre minimalisme avec un mouvement séquentiel à progression lente. Loin d’être
ennuyeux, on peut y suivre sa progression dans une faune sonore riche et dense, qui honore son invité de ses
plus belles formes. Un très beau titre. Sombre et ambiant, 2600 A.D. est une courte pièce atonique aux effets
sonores bigarrés. Sequential Meditation est un pur bijou de mouvement minimalisme. Au tout début, une ligne
nous berce sur un mouvement ondulant et ascendant avec des notes bourdonnantes qui voltigent en arrière
plan. À vitesse variable, la séquence est agréable à l’oreille et défile sur un mouvement lent. Un mouvement qui
se subdivise pour former deux lignes parallèles aux mélodies concurrentes, mais qui se complètent. Une
superbe idée qui donne un nouveau souffle à Sequential Meditation où 2 lignes s’entrecroisent, dont une
superbement sautillante, sur un synthé aux souffles soyeux. Ce carrousel harmonieux se poursuit sur
Awakening, une splendide façon de conclure un album immensément chaleureux.
Momentium de Jeffrey Koepper est une surprise inattendue. Sorti de nulle part, Koepper offre un album
mélodieux avec de fins mouvements séquentiels, aux saveurs des années analogues. Un bijou qui vaut le
détour, ne serait-ce que pour se délecter des modulations séquentielles qui forment la presque totalité de la
structure rythmique de Momentium. Un superbe album mélodieux, avec une richesse sonore incroyable qui
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rappelle que la musique d’hier s’est faite avec les rêves d’aujourd’hui pour la génération de demain.
Note : 5/6
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ROACH (Steve) : Life Sequences
Chronique réalisée par Phaedream
Le premier album que j’ai entendu de Steve Roach fut Western Spaces, paru sur Innovative Communication en
1987, avec Kevin Braheny et Richard Burmer. Je me souviens encore de l’effet A Story From The Rain.
Hummmm….À faire pleurer une vitre. Par la suite, je suis tombé sur Empetus, Traveller, Structures from
Silence, Quiet Music et ainsi de suite. J’étais dans la sphère très atmosphérico-tribal de Steve Roach. Dans les
dernières années, j’entendais que Steve Roach serait retourné à un style plus séquencé. Effectivement, Proof
Positive et Storm Surge: Live at NEARfest, paru en 2006 et chroniqué sur GOD, sont des albums séquencés (de
superbes en passant). Déçu d’être passé à côté d’albums aussi percutants, j’ai fait le tour du jardin de Mr.
Roach pour y cueillir des merveilles séquencées. Une superbe cueillette.
Paru en 2003, Life Sequences est une collection de vieux essais, et de plus récents, de MÉ séquencée. À pas
feutré la séquence de Lightness of Being émerge en douceur. Fin mouvement minimalisme, sur une basse qui
pulse un rythme uniforme. Imaginez la séquence comme une plaque pleine de vie, une vie qui bat sur un
superbe miroir aquatique où le reflet oscille dans son ensemble. Comme des feux follets, les notes se
déplacent sur cette séquence qui augmente joyeusement la cadence pour se terrer dans les envoûtantes
strates synthétiques de Living the Dream. Une étrange basse/percussion hisse sa sonorité sur une délicate
ligne de piano à l’intonation hypnotique. Le mouvement prend de l’ampleur sur une progression harmonieuse,
où les notes et accords se multiplient dans un tourbillon enchanteur, qui varie sa vitesse, influençant l’axe
harmonique de sa séquence. Un superbe titre harmonieux où Roach exerce un doigté magique pour varier la
rotation harmonieuse de l’impulsion principale. Tout simplement génial, il tourne souvent dans mon lecteur en
ce moment. Un peu plus agité, avec ses percussions métalliques feutrées qui font du sur place, Sundial est un
mouvement linéaire qui flotte sur une belle ligne de basse sombre. L’atmosphère est intrigante et effraie avec
ses striures synthétiques insistantes qui ne trouvent ne trouvent de places dans ce mouvement qui puise des
beaux moments, dans l’étalement de ses strates.
Un souffle de réverbération inconnue, aux directions variées, ouvre Sands of Time. Un faible pouls anime cette
étrange procession des vents. Le battement devient irrégulier, suivant une ligne scintillante et une nappe qui
étend son ombre sonore. Des serpentins harmonieux courent furtivement sur le mouvement. Et au 4ième
serpentin, il entreprend une étrange migration vers des territoires inconnus. Rythmes désordonnés, states
pulsatives aux courbes agressives, percussions inattendues, Sands of Time devient une fantasmagorie tribale
d’un monde cosmique aux manières rudes. Tranquillement, le pouls devient plus régulier, avec des souffles
synthétiques à la fois plaintifs et spectrales sur d’immenses strates aux nuances romanesques, ainsi que des
percussions oubliées quelque part, sur les banquises du temps. Une superbe épopée musicale qui étonne, de
secondes en secondes. Des notes frivoles et limpides sautillent sur une discrète nappe synthétique au souffle
étiré. Un mouvement de basse ondulante s’installe et guide Destination Horizon dans son long périple
séquentiel. Un début de voyage doux, sur un synthé aux couches enveloppantes qui bougent à peine. Le
mouvement devient plus saccadé avec des sonorités percutantes style glockenspiel et une basse au débit
rapide, enveloppés d’une superbe strate mélodieuse, qui feront toute la distance pour Destination Horizon.
J’ai passé d’excellents moments à écouter Life Sequences, un superbe opus aux ondes minimalismes des
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premières œuvres d’une Berlin School encore vierge. Que c’est bon d’entendre ce virtuose des sons, jouer sur
ses sonorités, moduler ses intonations et apporter des touches tribales futuristes dans un monde à l’univers
séquentiel Jurassien. C’est beau, c’est bon, c’est à se procurer.
Disponible au : http://steveroach.com/store/
Note : 5/6
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TANGERINE DREAM : Live Brighton 1986
Chronique réalisée par Phaedream
J’ai bien aimé l’année 1986 en ce qui a trait à Tangerine Dream. Avec Underwater Sunlight, les fans espèrent un
retour dans le temps, à tout le moins un éloignement significatif de la structure musicale de Le Parc. Le trio
Allemand entreprenait une tournée mondiale, commençant en Europe au début de Mars 1986 et qui allait se
terminer à Paris le 31 Mars 1986 avec un fantastique concert qui allait donner les meilleurs albums pirates de
cette tournée Parisian Dreams et 3 Tier Dream. Un bootleg que j’ai écouté des heures et des heures jusqu’à ce
que cet enregistrement du concert de Brighton soit disponible.
Tangerine Dream possédait des enregistrements de la console (soundboard) de 2 concerts de cette tournée.
Étrangement un était de Brighton, un concert inédit pour lequel il n’y avait aucun enregistrement disponible et
l’autre provenait d’un concert en Amérique, dont il existait une source très moyenne et incomplète. Jerome
Froese en a fait le mastering pour présenter 2 superbes reliques auditives d’une tournée où le Rêve Mandarin
était nettement plus énergique, plus rock que sa dernière tournée d’envergure en 1982. Initialement, les deux
concerts étaient vendus ensemble sous le titre de Tangerine Dream Classic Gold Recording Vault IV. Parce que
les setlists se ressemblaient trop, il fut convenu de scinder le coffret en 2, et le faire vendre par la série
Bootmoon, alors que le Vault IV(les premiers étant Rockface, East et Rockin Mars) continuaient d’être vendu
par TDI, pour commandes postales. Compliqué le monde de TD? N’est-ce pas?
Le son est clair, parfait. Trop beau pour être vrai. Pour être un vrai live, car on y entend tout, mais tous les
effets sonores, toutes les nuances. Mais je vous assure que ce sont les vrais concerts, car ils sont trop près
des sonorités des bootlegs pour en douter. C’est vous dire à quel point le remastering fut foutrement bien fait!
Intro UK 86 est comme je l’entendais sur Parisian Dreams. Un titre atonique qui sert de gros préambule à un
concert inoubliable avec des cris d’oiseaux mélangés aux souffles des flûtes, sur des nappes synthétiques
flottantes et grondantes. Les percussions tambourinent avec force et résonnent avec clarté au milieu d’effets
sonores bigarrés, avant de tomber sur Stratosfear 86 et sa superbe couche de percussions. Tout simplement
sublime. La 1ière partie de ce concert étant quasi identique à celle de Cleveland, je vais m’attarder un peu plus
sur la 2ième partie. Mais ce n’est pas parce que les titres sont similaires qu’ils se ressemblent en tout point.
Prenez Statosphere 86, les striures synthétiques sont plus prononcées ici que sur Cleveland, en plus d’y avoir
plus d’effets sonores et d’agressivité. D’ailleurs, la version Européenne de cette tournée possède une meilleure
clarté sonore, quoique par instant, le volume semble instable. Northern Light est un peu le penchant de The
Velvet Garden. Un titre qui fait le lien, sur une ambiance très atmosphérique entre Dolphin Dance et l’intense
Cool Breeze Of Brighton, composée pour cette tournée. Une grosse et lourde procession qui tourne en gros
rock progressif avec un superbe jeu de basse et de percussions, permettant à Edgar de s’éclater sur un furieux
solo. Ce passage est vite devenu un classique de cette tournée. Un grand moment qui se poursuit avec un
Going West à l’allure plus corsé, plus musclé avec ses percussions roulantes et ses effets sonores qui
apportent une toute nouvelle dimension. Yellowstone Park est bien interprété avec ses souffles sensuels et la
guitare qui remplace la voix de Mme Tory. Legend Leftover est un outtake de Legend. Un superbe titre, très
sombre à l’ambiance hyper angoissante, qui aurait eu sa place dans la trame sonore, que TD a choisi de garder
pour cette tournée. Un autre inédit de qualité et la façon qu’il est inséré dans le setlist est tout a fait géniale. Un
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piano concerto de Mozart qui débouche sur l’inoubliable Rare Bird termine ce fantastique enregistrement.
Si j’avais à choisir entre Brighton et Cleveland 86, je prendrais Brighton. La qualité sonore est ce qui a de plus
près de ce que j’ai entendu sur les bootlegs de Paris. Cool Breeze Of Brighton est aussi une autre raison. Un
titre dur et lourd qui ne fait pas dans la dentelle où Edgar est très à l’aise dans un univers de riffs et de
structures rock. Mais globalement, c’est tout un spectacle qui défile sans arrêt dans une atmosphère que l’on
ne reconnaît pas tant que ça. Faites le décompte et vous y trouverez pas moins de 8 titres nouveaux, soit la
moitié du répertoire Pas pire pour groupe qui a cessé d’improviser.
Note : 6/6
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TANGERINE DREAM : Live Cleveland 1986
Chronique réalisée par Phaedream
Fort de sa première partie Européenne, TD entreprend la seconde portion de sa tournée mondiale à Vancouver.
La tournée Nord Américaine s’arrête à Montréal, le 19 Juin 1986. Sur une scène, en avant d’un lac artificiel,
Haslinger, Franke et Froese donneront un concert bouillant qui restera gravé dans bien des mémoires pour
encore un bon bout de temps. Quel bel évènement, tout un spectacle. Lors de cette tournée, il y avait de la
magie dans l’air et beaucoup d’électricité, comme si le Dream était conscient que sa musique virait sur une
structure très froide. Quelques années plus tard, je me suis procuré Sonambulistic Imagery qui était le bootleg
le plus complet, avec la meilleure sonorité, le Tangerine Tree Volume 24 et finalement cette édition du
Bootmoon.
La source de ce concert est Cleveland, que j’ai en bootleg. Un enregistrement incomplet d’une qualité médiocre
provenant de l’audience. Quand j’ai su qu’une version plus complète serait remixé et vendue par Tangerine
Dream, j’étais inquiet parce quand TD remastique ses vieilles choses, il ne reste que bien souvent la structure,
on y reconnaît plus rien (Sohoman 82 et Soundmill Navigator). Alors que je m’attendais à l’aseptisation
systématique de la méthode Edgar Froese, nous avons droit à 2 sublimes concerts aux atmosphères
explosives. C’est Jerome qui en a fait le remastering, et il a pesé fort sur les percussions et effets sonores. Si
Parisian Dreams était rempli de ses percussions tablas claires et limpides, je n’en n’avait pas remarqué une si
forte présence sur Sonambulistic Imagery.
Même si TD à laisser tomber les improvisations depuis la fin des années 70, les concerts des années 80 sont
authentiques et sont plus pesants, plus rock. C’est ce qu’on ressent en ouverture avec Pilots Of Purple Twilight
où les 3 claviers sont synchronisés au quart de tour, tout en respectant les structures sur un titre plus étiré
qu’en studio. Stratosfear 86 ne jouit pas de l’accueil que le public Anglais et Français lui a réservé, ce faisant
on y entend toute les nuances et les effets sonores ajoutés par Froese fils, donnant une superbe intonation à ce
classique. Akash Deep et Beneath the Waves sont 2 pièces inédites aux sonorités très 86. Une belle flûte
progresse sur des chœurs et une ligne séquentielle basse. Le titre monte en cadence sous une nuée de
percussions assourdissantes et de grosses riffs synthétiques. Une folie concentrée qui se poursuit sur
Beneath the Waves, et le tempo baisse lourdement pour faire place à un synthé plaintif qui ouvre les portes à la
superbe version de Zen Garden. Cette 1ière partie ce termine sur une autre inédite, Coloured Rain qui plonge le
public dans l’ambiance romanesque du piano de Paul Haslinger, qui joue quelques lignes de Logos, de
l’improvisation pour introduire Dolphin Dance et les fougueux solos de synthés. Une superbe interprétation,
avec une excellente sonorité qui découpe le morceau avec la précision d’un chirurgien. The Velvet Garden est
une autre pièce inédite, aux beaux effets sonores, qui se moule bien entre Dolphin Dance et Ride on the Ray qui
est plus rock, avec ses percussions martelantes et le gros solo d’Edgar Froese. Going West, Yellowstone Park,
Underwater Twilight et Legend Leftover sont quasiment identiques à la version de Brighton, mais la finale est
assume par Unicorn Theme, une remarquable interprétation, sans le coté vocal, qui est assumé par un superbe
synthé aux strates rêveuses et mélancoliques.
La tournée de 1986 est un grand moment de l’histoire de Tangerine Dream. Une tournée exceptionnelle qui est à
la portée de tous, grâce à un superbe travail de restauration et de remastering par Jerome Froese, qui est
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semble plus à l’aise aux consoles que sur scène ou que comme auteur compositeur d’un ex-monument comme
Tangerine Dream
Note : 5/6
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TANGERINE DREAM : Live Ottawa 1986
Chronique réalisée par Phaedream
La 1ière portion des Bootmoon Series fut produite en 2004. Un total de 5 concerts; Montréal 77, Aachen 81,
Paris 81, Sydney 82 et Ottawa 86 ont été sélectionnés pour être remasterisé et vendu en 10 000 exemplaires le
concert, à des prix loin d’être une exemple. Je vous ai déjà parlé de Montréal 77, un bon concert, qui n’était pas
mieux fait que son penchant des Tree, le Tangerine Tree Vol. 18. Même que ce dernier aurait pu être une
production officielle, tant la qualité était bonne. Ce qui est loin d’être le cas avec ce Ottawa 86. Dans la série des
Tangerine Tree, il y avait 2 catégories; les Trees, qui étaient des enregistrements de la console (soundboard) ou
des très beaux audiences stéréos, et les Leaves qui étaient des enregistrements de seconde qualité, parfois
c’est le seul enregistrement disponible. Ottawa fait partie des Leaves, ça vous donne une idée de la perception
de la qualité du service de Bootmoon. Tout en sachant que de meilleurs enregistrements existaient (Cleveland
et Brighton) TDI et Eddie ''Cashlow'' Froese ont donné leurs accords pour que Bootmoon produise un tel navet
de qualité sonore, tout en sachant qu'on en possède de meilleurs. Pour l'éthique, on repassera! Et c’est là que
le lien de confiance se perd. Lorsque l’on sait que son artiste préféré préfère les sous à l’intégrité artistique, il y
a un problème.
Parce qu’il n’y a jamais eu de déclaration d’affaires entre les 2 parties. Qui plus est, les pochettes des
Bootmoon sont près de celles des bootlegs. Il y a peu d’informations et c’est plein de zones grises. Pourtant, ils
ne sont pas des bootlegers. Ils ont leurs kiosques de vente à chaque concert de TD et ils ont eus leurs gros
mots à dire pour faire arrêter la production et la distribution des Tree. La sortie de Preston 80, par Bootmoon a
créé tout un émoi et ce fut le début du grenouillage de TDI pour faire cesser la distribution des Trees qui a 93
titres de très bonne qualité, dont une vingtaine sont d’ecxellentes qualités et 91 Leaves et crtains d’entre eux
feraient rougir de honte certains distributeurs de bootlegs. Depuis 2002 c’est près de 195 titres qui ont été
amassés, colligés et remasterisés par des fans qui ont fait un travail extraordinaire. J’avoue que j’ai un peu de
misère à suivre TD dans son raisonnement, puisque ce sont ces fans là qui réussissent à maintenir le mythe
vivant.
Le seul mérite Ottawa 86 est d’être le plus complet des spectacles de 86. Au niveau sonore, c’est d’une
pitoyable qualité. En dessous de moyen. Le son est étouffé et on y entend les commentaires assez clairs de
l’audience. Disons que Stratosfear s’en ressent et c’est encore pire avec Bois de Boulogne, la pièce manquante
sur Cleveland 86 et Brighton 86. Tout est flat et au même niveau. Les moments doux sont mieux et démontrent
la piètre prise d’enregistrement. C’est une honte de mettre ça sur le marché. À date, cela n’a fait que discréditer
la gang à Edgar.
En toute honnêteté, ça ne vaut pas 1 sous et la version Tangerine Tree, qui est maintenant illégal, mais qui
continue de circuler vaut bien cette version. D’ailleurs, selon les sources du milieu, c’est cet enregistrement
que les gens de Bootmoon auraient choisi pour nettoyer et vendre. Eh bien la méthode semble avoir des ratées.
Mais tout ça est très inquiétant pour les années à venir. Quelle vidange va-t-on essayer de nous passer? Est-ce
que les bootlegs de qualité, les raretés que les fans et organisateurs de Tree, faisaient parvenir, en appui à ce
projet, vont le faire avec Bootmoon? J’en doute. En ce qui me concerne Bootmoon va récupérer les meilleurs et
va les vendre sans les retoucher, à gros prix. Des bootlegers autorisés par TDI, c’est un peu dérangeant. C’est
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incroyable de vendre ça, avec une sous qualité de ce genre. Moi je n’y toucherai pas, mais si un Live de 86 vous
tente, il y a Brighton et Cleveland. Deux sources vraiment retravaillées par Jerome Froese, qui a fait un travail
de géant. Mais pourquoi ne pas lui avoir donné le remixage d’Ottawa 86? Ça aurait coûté trop cher, paraîtrait-il!
Faudrait faire comprendre à Froese et sa gang que leurs lauriers commencent à sécher sérieusement.
Note : 2/6
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JAMES TRIO (Bob) : Explosions
Chronique réalisée par Progmonster
Bob James. La seule évocation de ce nom fait frétiller des pupilles les dj's en herbe qui, depuis que la musique
électronique pour dance floor dicte sa loi, ont su donner corps à leur travail en samplant à tour d'aiguilles le
groove de sa trilogie "One", "Two" et "Three" parue sur Tappan Zee. L'écoute d'"Explosions" devrait pour le
moins leur faire un choc. Car il s'agit du même Bob James, aussi incroyable que cela puisse paraître ! Alors
chez ESP, son second disque est un gros pavé de jazz avant-gardiste, comme si l'artiste devait s'expurger
d'emblée de cette approche honteuse qui jamais plus ne transparaîtra dans la suite de sa carrière, à mille lieues
de sa musique pour supermarché (c'est en tout cas ainsi que je la perçois). Le trio est habillé par Barre Phillips
à la contrebasse (que l'on retrouvera bientôt dans le Trio de John Surman) et Robert Pozar à la batterie, dont
l'approche tout en percussions en fait un cousin proche de Han Bennink. Là où "Explosions" est encore plus
étonnant, au-delà de ses compositions fracturées, de ces ambiances lourdes qui ourdissent un évènement
tragique, entre cordes qui se tendent et touches d'ivoire qui s'affolent, c'est l'apport inédit et je serais même
presque tenté de dire précurseur, d'effets électroniques préparés par Gordon Mumma et Bob Ashley, seulement
crédités en tant que co-compositeurs. La musique contemporaine nous abreuvait déjà de ce genre de travail à
l'époque, mais jamais encore n'avait-elle été se mouiller dans l'univers jazz. C'est chose faite ici, et de manière
très concrète ; fusionnant avec le reste du groupe dans les parties improvisées, elles servent de toile de fond
sur la seconde face où James et les siens réintroduisent sommairement leur sens du swing, histoire de créer
un contraste fulgurant ("An On", puis le chaotique en diable "Wolfman" qui, à l'instar des musiciens du Titanic,
continuent à jouer comme si de rien était alors que la situation s'aggrave de minutes en minutes vers une issue
que tout le monde sait inéluctable). Étonnant.
Note : 4/6
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BYBLOS : Energy
Chronique réalisée par Phaedream
Byblos m’est totalement inconnu. Dragos Cucos est un jeune synthésiste Roumain, faisant parti du label
d’Indra; Perfect Music. De là à conclure que sa musique peut être influencé par Indra, le pas est mince. Mais
non! Nous découvrons un artiste allumé, avec un goût pour le rythme, les séquences aux impulsions
surprenantes. Un musicien dont l’influence est la MÉ, avec un zeste de Jean Michel Jarre. De quoi attirer l’ouïe.
Une pulsation éveille les premiers mouvements séquentiels de Trance. Des séries de notes séquencées, à la
Jarre, virevoltent sur une séquence circulaire aux percussions pilonnantes et aléatoires. Le tempo sort de son
coin serré pour embrasser une liberté où les notes virevoltent sur des beats nerveux et saccadés, qui croisent
un synthé aux souffles de trompettes. Un morceau sauvage.
Waves of Light démarre sur une séquence circulaire aux notes rapides et agiles. Elles tournoient avec force sur
des effets sonores analogues. Le seul vrai moment sur Energy où l’on peut faire un lien avec Indra. La
séquence est furieuse avec ses notes qui tournent sur des percussions pulsatives et des nappes synthétiques
aux enveloppes sonores à la Jarre. Une puissante tornade, au rythme infernal qui ferait bouger tout un plancher
de danse. Avec ses bruits de grève, des cours d’eau et de ses mers, le doux piano qui berce Ocean Love est
d’une tendresse à arracher quelques émois et soupirs de rêves, de nostalgie. Une douce romance sur piano
après deux titres canons. Joy débute avec une belle séquence harpée où des notes cristallines façonnent un
rythme mélodieux qui accentue sa séquence sur des tonalités graves. Une belle mélodie séquencée où le piano
et la flûte se font discrète sur de superbes arrangements. Expansion est une superbe pièce avec un séquenceur
bas et circulaire. Des notes sautillent dans un cosmos aux effets sonores analogues, emplies de stries filantes
et des séquences parallèles qui structurent un rythme mélodieux qui n’est pas sans rappeler les 1ière œuvres
de Jarre. Jean Michel Jarre semble avoir une forte influence sur Byblos, car Power of Dance est un autre titre
Jarresque. Polyrythmique il exploite le coté dance de Jarre sur ce titre.
La 1ière partie de Sinchrony forge son tempo sur les effets réverbérants d’une basse bourdonnante. Rythme
bouclé, traversé d’effets analogues sur des notes variantes. Une seconde séquence arrive en mi parcours et
sculpte une ligne mouvante aux formes harmonieuses, donnant toute une dimension harmonieuse à un titre qui
connaissait un assez lent départ. Après le placide carrousel cosmique X-Trance, Travel In Time entame un
tempo zombiesque aux notes à effets cascades sur un beat à la basse résonnante. Entrecoupé de passages
atmosphériques, Travel In Time augmente son impulsion après chaque pause atmosphère, atteignant
subtilement la forme d’un soft techno dance aux spirales mélodieuses. Plai Romanesc est une courte pièce
atonique au mellotron flûté, à la flûte de Pan, qui dégage une chaleur nostalgique. Un sombre au revoir.
Energy est un 1ier album prometteur qui inclut de beaux passages. À peine quelques longueurs, beaucoup de
rythme, ce jeune musicien à le souci de la création, car à bien des endroits, il fait écarquiller les oreilles par ses
orientations tout à fait insoupçonnées. Comme sur la 2ième partie de Sinchrony. Un artiste qui connaît l’art de
surprendre est un artiste qui a le souci du détail, de sa création. Avec un tel éventail, Energy de Byblos est un
opus et un artiste à découvrir.
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Note : 4/6
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INDRA : Ocean of Silence
Chronique réalisée par Phaedream
Après les étonnants The Call of Shiva et Signs, Indra ré édite un autre titre de son catalogue, en nous
présentant, cette fois-ci, un album ambiant. Ocean of Silence est conforme avec son titre. Pas de rythme, peu
de mouvement, les impulsions sont lentes, entourées d’un monde marin à la cohésion aquatique. Mais derrière
cet onctueux monde de silence, se cache une route imaginaire où la vie bat. Un monde que l’on voit très bien,
aux travers les sensibles ondulations de notre claviériste philosophe.
Une belle onde cosmique, aux souffles stridents, amène la rêveuse Choralia. Des notes carillonnent dans une
ambiance où les effets sonores jettent un voile sombre. Dans un silence feutré, les notes de piano flottent avec
un synthé aux incantations plaintives. La 1ière partie de Choralia est une forme d’ombre abyssale où les
mouvements flottent lascivement, à la dérive. Une basse aux mouvements lents forme une impulsion linéaire
hypnotique, où une nuée de courtes harmonies fragmentées tournent autour et s’y lovent, moulant une mélodie
similaire à la basse. Éparpillées, ses courtes odes planent dans une atmosphère où le tempo naît. Une douce
ligne synthétique oscille sur un mouvement de plus en plus garni qu’une fine percussion séquencée vient
soutenir. Choralia muscle son tempo avec des percussions tablas, sur un mouvement ondulatoire ascendant.
Les strates synthétiques deviennent plus denses, plus fermes et créent l’illusion d’un élan vers des sommets
plus hauts, alors que Choralia se replie, avec sa nostalgie, ses souvenirs qui soutirent les larmes d’un océan
qui conservent ses secrets. Floating Star est une poésie sur la nature halieutique. Un beau synthé contourne
les bords d’une rivière que des chants d’oiseux coiffent d’une beauté imaginaire. Le mouvement est souple et
animé par un beau piano aux résonances Vangelisques sur des vents qui ourlent les vagues d’un cours d’eau
qui n’a racine que dans les lointaines steppes d’une civilisation vierge. Dans un univers sonore aussi atonique,
les lourdes strates de Morning Light font l’effet d’une horde d’ombres ondulantes aux déplacements lourds et
sinueux. Un mouvement lourd, animé par un souffle de vie aux pulsations horizontales, inondant les fonds
marins d’une onde musicale à faire valser les hippocampes. Morning Light devient un superbe mouvement aux
subtiles ondulations d’une beauté étonnante. De superbes notes et segments harmonieux décorent cette
lumière d’une teinte vive qui illumine un silence habité par le silence.
Ocean of Silence est un vrai album flottant. Pas une vieille esquisse qui gonfle les rangs d’un Nouvel Age
insipide. Il y a tout un monde de fascination, de sensibilité et de complexité ondulatoire autour d’un vrai album
flottant, planant de MÉ. Ocean of Silence est un album très profond, où l’on sent la tristesse et l’espérance. Un
album sombre avec des bribes d’harmonies qui sont éparpillées dans un monde immensément vaste qu’Indra a
réussi à créer aux travers son opus. Ce qui, selon moi, est la plus belle des qualités sur cet Océan de Silence.
Disponible au http://www.indramusic.ro/
Note : 4/6
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MYTHOS : Mysteria - An Electronic Journey Into Sound
Chronique réalisée par Phaedream
Mythos est un mythe, une légende en Allemagne, Formé à la fin des années 60, par l’homme orchestre Stephan
Kaske, ce fut l’un des premiers groupes à signer sur la prestigieuse étiquette OHR, en 1969, spécialisée dans la
musique psychédélique, progressive et le Krautrock.. Inspirés par les groupes psychédéliques comme Pink
Floyd, Genesis et Iron Butterfly, Stephen Kaste et ses compagnons de trio; Harald Weisse (basse) et Thomas
Hildebrand (percussions), réalise des premiers albums assez psychédéliques avec flûtes, mouvements
acoustiques. Par la suite le trio prend une tangente plus rock hard avec Strange Guys. En 1980, soit 8 ans après
leur premier album, Stephan Kaske entreprend sa carrière solo, sous le nom de Mythos, pour tâter une
approche plus progressive et plus électronique avec Quasar. De 72 à 80, Mythos a produit 5 albums, toujours
en cherchant à aller plus loin.
Mysteria c’est trois cd de 53 minutes chacun, avec 5 titres chaque dont la durée est a peu près identique. Un
mystère ou une coïncidence? J’ai beau chercher d’autres indices, pour tenter de cerner le mystère, si mystère il
y a, entourant un titre et une structure de présentation si étroitement reliés. J’ai rien trouvé
Si je n’ai pas trouvé de mystère, j’y ai découvert de l’excellente musique. Une musique riche et très
harmonieuse. Un mélange de rock progressif et d’électronique, mais de la MÉ différente de ce qu’on est habitué
d’entendre. Sur Mysteria, il n’y a pas de ces longues intro atmosphériques, comme il n’y a pas d’ambiances
cosmiques, ni d’effets spatiales. Pas de segments improvisés, ni de longs et sinueux solos de synthé qui
étirent la durée des titres et il n’y a pas de pauses atmosphériques, ni de passages à vide. Tout est structuré,
tout est pensé. Chaque titre est construit sur des séquenceurs aux rythmes appuyés par des percussions, un
bon et puissant jeu de basse et des effets sonores qui ajoutent puissance et curiosité aux structures
cadencées. Les synthés peinturent les paysages sonores de belles harmonies aux impulsions en constantes
évolutions, sur des séquences modulatoires aux mélodies secondaires qui font les transitions entre les
permutations. Ce qui donne parfois quelques longueurs, animées de percussions et effets sonores qui baignent
agrémentent l’attente. Chaque titre semble être minutieusement passé dans un microscope auditif, où chaque
faille est corrigée, chaque mollesse est redressée. Chacune des pièces est bien fignolées, bien adaptées et il
n’y a aucun trou. C’est comme si Stephan Kaske aurait pris des semaines, des mois à travailler sa musique. Un
artiste polissant constamment son œuvre. Les percussions sont incroyablement bien étoffées. Je ne me
souviens pas d’avoir entendu un tel jeu de percussions sur un album de MÉ. Sur chaque titre, elles ré orientent
les tempos ou modifient les structures par des martèlements lourds ou incisifs. Au niveau électronique,
Stephan Kaske ne fait pas dans l’abus. Il y a quelques solos ici et là, le plus percutant étant un solo de guitare
sur Pimp Your Guitar, mais les instruments électroniques demeurent la pierre d’assise de Mysterious. Dès le
départ, avec Karakuri on est saisi par des strates émotives aux effluves asiatiques. Trois belles lignes forgent
une mélodie émouvante qui nous berce sur un nuage de mélancolie. Mythos nous sert du beau synthétiseur
aux mouvements fluides et aux effets ingénieux. Des lignes qui s’entrecroisent, qui se fondent ou se
subdivisent en nuées harmonieuses sur des structures aux ondulations déviantes.
Mysteria est une œuvre colossale. Imaginez, 3 cd et plus de 150 minutes de musique rythmée, sans délire
atmosphérique ou psychédélique. Un sublime coffret où Mythos nous offre 15 titres qui bougent et respirent de
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créativité. Du beau rock progressif noyé de synthé mélodieux aux souffles malléables qui épousent les formes
et les structures de son auteur. J’ai été agréablement surpris par Mysteria, un étincelant coffret pour ceux qui
aiment la musique.
Disponible chez www.amazon.de
Note : 5/6
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[´ramp] : Looking Back in Anger
Chronique réalisée par Phaedream
[´ramp] est un groupe de MÉ assez particulier. Formé de Frank Makowski (Tranquility) et Stephen Parsick, ce
duo produit une musique sombre, ambiante aux effets industriels. Un mélange unique, qui parfois ressemble à
du Redshift. De la MÉ Dark Ambient Industriel décrirait adéquatement le style musical de [´ramp]. Looking Back
in Anger est une rétrospective qui retrace 10 ans de carrière, avec des pièces inédites. Toute la musique fut
remixée et remasterisée, afin d’obtenir une sonorité maximale. Vous voulez entendre quelque chose de
nouveau? De différent, suivez le guide.
Bien que [´ramp] ait horreur des stéréotypes et des comparaisons, on ne peut éviter toute forme d’association
avec la MÉ, style Berlin School, lorsqu’on entend The Warsaw Disaster, un titre qui ressemble beaucoup à du
Tangerine Dream, justement à l’époque de Poland. Un départ canon sur un séquenceur sautillant et de
superbes solos, sur un tempo bien en rythme avec de belles nappes synthétiques qui s’enroulent autour d’un
mouvement spiralé. Vers la 4ième minute, le tempo ralenti de beaucoup pour prendre une tangente plus
atmosphérique, la vraie nature de [´ramp]. Exploitant avec doigté les effets sonores sombres et ténébreux, de
fines percussions, appuyées d’un synthé ascendant, remontent le rythme sur un mouvement très
Tangerinerien. Les impulsions varient sur un mouvement giratoire, nappé d’un superbe jeu de synthé
symphonique et de belles percussions. Un superbe morceau. Sakrileg am Mittag, de la même époque, est tout à
fait à l’opposé. Une longue incantation aux effets vocaux tribaux, sur un mouvement aux intonations
mouvantes. Bariolé d’effets sonores hétéroclites et de voix rauques, Sakrileg am Mittag progresse sur
d’étranges nappes synthétiques que l’on mélangent aux voix incertaines. Une excellente atmosphère de terreur.
Generatorenkonflikte offre une intro très industriel avec une basse aux pulsations très métallisées. Le rythme
est flou et tourne autour de percussions aux impulsions d’aciéries, comme si on assisterait à un concert de
machinerie légère. Un titre génial qui a, sans aucun doute, influencé certains dj de la techno.
Tribejagd nous plonge au cœur d’un abîme sidérurgique où des tam tam tribaux, aux résonances métalliques,
réveillent une superbe voix qui surgit des entrailles d’un monde souterrain. Les strates synthétiques sont
superbes et injectent un tempo démoniaque, aux limites d’une horreur enchaînée. Une séquence bourdonnante
émerge des entrailles de What´s the Point of Eating Concrete? Une 2ième séquence, aux notes plus limpides,
double le mouvement avec un superbe solo de synthé. Scindé par un passage atmosphérique What´s the Point
of Eating Concrete? reprend son lourd mouvement séquentiel, avec un zest de sonorité industrielle. Une
superbe pièce, trop courte, qui plaira aux fans de Redshift. Looking Back in Anger, la pièce titre, est tout
simplement jouissif. Après une superbe intro atmosphérique, où les riches nappes flottent aux travers de
pulsations circulaires, un séquenceur émerge vers la 5ième minute, pour entreprendre un tourbillon séquentiel
dément. Un cercle infernal où les striures et strates synthétiques traversent une atmosphère aux réverbérations
multiples et exploratoires. Du grand art séquencé comme on en entend que trop rarement. À plein volume, la
peinture lève. Absolument F-A-B-U-L-E-U-X. Après un mouvement aussi intense, l’ambiante So Far est
bienvenue. Une réflexion sonore intense aux impulsions lentes, mais profondes qui se poursuit sur Scissors, à
tout le moins son intro. Car après la barre des 3 minutes, le rythme s’anime sur des notes sombres et basses,
cachant une fine mélodie qui tente de sortir des griffes d’un tempo tambouriné. Un superbe morceau aux
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effluves d’un Redshift au sommet de son art.
Quel album! WoW! Une expérience musicale à vivre. Tout au long de cette compilation, [´ramp] n’as pas arrêté
de surprendre. Que ce soit de par ses rythmes, ses percussions, ses séquences tourbillonnantes et ses
incursions dans un monde underground aux racines industrielles, Looking Back in Anger est un voyage
musical fantastique, dans le temps et les genres.
Disponible au http://www.doombient.com/start.htm
Note : 6/6
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FOREST SILENCE : Philosophy of winter
Chronique réalisée par Iormungand Thrazar
Après trois demos, le premier album du groupe hongrois Forest Silence paraît chez Appease Me/Candlelight en
novembre 2006. Il s'intitule "Philosophy of winter" et présente un black metal mid tempo, avec quelques
élements symphoniques bien intégrés et plutôt discrets dans le mix. Le point fort du groupe est son
interprétation musicale sans faille, le groupe consiste d'anciens et d'actuels membres des expérimentés Sear
Bliss. Cependant, le black metal de Forest Silence, bien que remarquablement joué, souffre d'un son trop typé
nordique à mon goût et d'un certain conformisme dans ses compositions et ce dès le titre d'ouverture "Bringer
of storm". Je lui préfère les passages plus lents et intimistes du morceau qui lui succède, "Spirits of the winds".
"At the dawning of chaos" continue dans la plus pure tradition scandinave. Cet album est un peu paradoxal: il
est objectivement bon et plaisant à écouter, pourtant je trouve le conformisme rigoureux des compositions
plutôt dérangeant. On a donc affaire avec "Philosophy of winter" à un premier disque correct mais qui souffre
d'un manque flagrant d'originalité, cependant sauvé par une capacité instrumentale remarquable. Bref, vous
passerez probablement un bon moment à l'écoute de ce premier Forest Silence, mais on l'oublie assez
rapidement. Ceci étant dit, loin de condamner le groupe, Forest Silence se devra de développer un style plus
personnel à l'avenir pour s’imposer comme quelque chose de réellement convaincant.
Note : 3/6
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FURZE : Necromanzee cogent
Chronique réalisée par Iormungand Thrazar
Woe J. Reaper est une personnalité assez atypique dans le black metal actuel à en juger le layout de ses
disques et le warning "Don't stop the Furzement" présent sur la réédition de son premier album "Necromanzee
cogent", paru dans sa première version en 2003 chez Apocalyptic Empire Records et réédité en 2006 par
Candlelight. The Reaper catégorise sa création en "Necro Saint black metal", ça ne veut absolument rien dire
mais ça contribue au gimmick: le sieur se fout des conventions et trace son chemin. Un chemin assez
personnel sur ce premier album. Furze alterne entre morceaux doomy lents et caverneux ("For the lust of
darkness", "Dodsrikets fremtred") généralement longs de plus de dix minutes et pièces résolument plus black
metal avec une voix assez originale (les excellents "Leizla" et "Silver starlight"). Une alternance qui passe
remarquablement bien et qui permet d'aérer le disque pour éviter l'overdose et la linéarité. Le titre final
"Sathanas' megalomania", oeuvre de 23 minutes, présente un morceau avec des claviers macabres en
introduction évoluant par la suite vers un black metal chaotique, désorganisé et bordélique assez jouissif. Sur
"Necromanzee cogent", Furze présente deux points forts: des compositions travaillées, efficaces et variées et
des vocaux particuliers et très bien modulés. Un fort bon premier album qui met en avant un one-man band à
l'identité déjà bien marquée.
Note : 4/6
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[´ramp] : Oughtibridge
Chronique réalisée par Phaedream
Enregistré lors d’un concert au Jodrell Bank Radio Observatory le 23 Juin 2001, Oughtibridge est un titre
hommage à un village situé non loin de Sheffield, endroit où ['ramp] se retirait entre ses concerts. Entièrement
improvisé, Makowski et Parsick se sont surpassé pour offrir une prestation digne de leur créneau musical. Joué
dans une noirceur, ce concert devient tout un évènement atmosphérique.
Très caractéristique à ['ramp], de lourds bourdonnements ouvre la marche sombre de Dron(e)field. Procession
lente, entourée de pulsations giratoires, qui tournent leurs fuseaux sonores sur un mouvement linéaire.
Entouré d’effets sonores éparses et d’ombres ondulantes aux tempéraments ténébreux, Ozone est un festival
de bourdonnements, de pulsations et de percussions aux sonorités variées, d’un xylophone à un glockenspiel.
Dans une ambiance hermétique où tout est tissé serré, des notes cristallines se faufilent sur une ligne
trampoline où les notes de basse rebondissent, comme les percussions aux sonorités industrielles, pour
nourrir une courte séquence qui ressemble à un film d’horreur de Jason. Un titre incroyablement dense qui fera
craquer les assises de votre voisin. Plus limpide, la pièce titre est une énorme flaque qui gravite avec intensité
et qui s’enrichit de chœurs spectraux sur Ascension. Un mouvement lourdement ténébreux qui donne
l’impression de faire sauter mon ampli à chaque répétition de sa charge sonore. Fibre arpente un titre plus
nerveux, aux synthés menaçant qui explosent avec stupeur avec l’arrivée de Tool. Une ligne lourde et
frénétique émerge d’une forte explosion pulsative. Un passage tellement puissant avec ses violents solos que
les planchers en vibrent. Une courte baisse dans ce régime de puissance, faisant respirer les pauvres lattes de
plancher, et Tool repart de plus belle, arpentant les summums sonores de sa lourde séquence pulsative. Bien
que tout autant frénétique, la séquence baisse en puissance, conservant son âme de rebelle qui s’insurge
contre toute tentative de tranquillité environnementale avec ses longues pulsations giratoires aux intonations
variées. Un bon titre qui, même à pleine puissance maîtrise la perfection sonore de sa ligne hyper lourde. Un
incroyable balancement qui s’étend aux pulsations métallisées et ambivalentes de Dune. Un titre flottant aux
formes tranchantes qui se réfugie dans le silence abyssal de Lovell, dont les grondements amplifient à la croisé
de Stern. Un titre étrangement ressemblant aux mouvements de Chronos, ce sombre album de Michael Stearns.
Sur les derniers moments de Stern, une pulsation mue dans une atmosphère lugubre et métallique où effets
sonores créent une ambiance de schizophrénie latente. Tranquillement Spinegrinder s’agite en fébrile tempo
sur une brève mélodie limpide qui, malgré sa douceur, fait l’effet d’un coup de poignard dans cette noirceur
envahissante. Tout est anarchie et se divise en tous les sens. Une cacophonie délirante qui retrouve sa
cohésion harmonieuse avec l’apparition d’un séquenceur agile et d’un synthé agressif aux strates acérées,
refoulant Spinegrinder dans ses limites atmosphériques. No Hard Shoulder termine ce spectacle sur un
mouvement séquentiel saccadé, enrobé de sulfureux solos de synth qu’une belle strate violonée couvre de
douceur. Un moment intense qui atteint son paroxysme lorsque les instruments se rencontrent au même point.
Une symphonie électronique improvisée qui se termine dans la quiétude d’une séquence qui s’éteint
doucement.
Fermez toute les lumières, mettez le volume un tout petit peu au dessus de la ligne du milieu et écoutez. Vous
vivrez l’expérience ['ramp]! Oughtibridge est un album d’atmosphère, aux séquences lourdes, qu’il faut savoir
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écouter, comme l’on sait déguster un aliment rare. Un album puissant avec des passages ambiants d’une
lourdeur attirante qui nous scie le souffle, lorsque les séquenceurs courent en courant continu. ['ramp] explore
des territoires qui nous sont inconnus, pour le plus grand plaisir des mélomanes à la recherche d’étrangeté.
Pour apprécier un petit bijou comme Oughtibridge, donnez-vous au moins la chance de faire une 1ière écoute
complète. Même chose pour le duo; plus je l’écoute, plus j’aime ça. Et plus j’aime ça, plus je l’écoute. C’est le
syndrome ['ramp]!
Disponible au http://www.doombient.com/start.htm
Note : 5/6
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MAMMATUS : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
J'ai encore quelques disques promos qui trainent. Ils attendront. Là, tout de suite, j'ai envie de vous parler de
Mammatus. Ouais, man, ça se passe comme ça chez Proggy. Mais attends ; faisons les choses
convenablement. D'abord, tu t'installes, bien à l'aise dans ce qui te sert de divan d'où dépassent un ou deux
ressorts. Voilà. Tu t'enfonces. C'est d'enfer. Et pour être sûr que tout se passe dans les meilleures conditions,
je vais pousser le volume à fond, histoire que la déflagration qui sortira des enceintes crée un petit courant
d'air agréable à même d'alimenter les effluves parfumées des bâtons d'encens disposés sur la table basse. Tu y
es, man ? Ok. On est go. (le disque commence) Merde... Quand j'écoute du stoner, ça me fait toujours le même
effet. Est-ce que je suis définitivement un vieux réac' (la réponse est dans la question) ou est-ce que,
finalement, on est bien plus nombreux que je le crois à ne trouver que dans les sons et l'approche seventies
tout ce sel, toute cette aura qui donne à la musique cette dimension unique que beaucoup de nos
contemporains n'ont pas ? Mammatus n'est pas rétrograde. Je veux dire ; le groupe ne se contente pas de
regarder dans le rétroviseur. Si Earthless fût pour moi la révélation tardive mais ô combien jouissive de 2005,
Mammatus s'impose comme celle de 2006. Sleep, c'était ta came ? Ne va pas plus loin, tu vas adorer. D'ailleurs,
le hasard (?) fait bien les choses ; ils sont signés sur leur label, Holy Mountain ; tout s'explique... (le disque se
poursuit) Ouah... je divague. Mes propos deviennent confus, nan ? Enfin, je me comprends. Je veux dire... Ah
ah, c'est trop bon. Non, mais attends ; j'hallucine ? Ouais mais non, l'aspect drone n'est pas aussi prépondérant
ici c'est clair ; c'est plus abstrait, ça voyage quoi, c'est plus musical aussi, dans le sens où la guitare très acide
préfère s'agiter dans tous les sens comme une anguille plutôt que de maintenir ad lib un riff bien lourd. Ouaip.
Mais si le final de "Dragon of The Deep" te fait pas penser au Sabb, c'est que t'es devenu sourd, mec. Hun...
Nan... J'ai des fleurs dans la tête. Ce disque tourne en vrille. Ce disque... (le disque tourne. Indéfiniment)
Note : 5/6
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LA DIAGONALE DU FOU : La forme du vent
Chronique réalisée par Progmonster
"La Forme du Vent" est une autoproduction super bien torchée que l'on doit à un trio parisien
basse/guitare/batterie des plus classiques qui exerce ses talents depuis 2003. Je considère être ma foi
(malheureusement) plutôt assez bien placé pour savoir combien il est difficile de trouver le parfait équilibre, le
liant essentiel, qui permet aux musiques au parti pris exclusivement instrumental de ne jamais sombrer dans
l'ennui. La Diagonale du Fou a pour lui une production à la hauteur, mettant judicieusement en valeur les
différents instruments qui jamais ne saturent l'horizon. La construction méticuleuse des morceaux, se
déployant sur le scénario prévisible de la lente montée en puissance, emprunte ce tic au post rock tout en
sonnant diablement plus métal. Nuancée et délicate, cette musique n'est pas dépourvue de couleurs malgré
l'absence de véritables solii. Un bien ou un mal ? On verra plus tard. Et si on a droit à quelques rares riffs
appuyés, si de toute évidence le groupe prend du plaisir à alterner thèmes et tempi différents afin de soigner
leurs contrastes, de manière générale, on dira que nos parisiens privilégient avant toute chose la création
d'atmosphères qui se veulent prenantes, tendues, obsédantes. Mais pour cela, il faudra toutefois renouveller
l'expérience à plusieures reprises pour tenter de se convaincre de l'absolu pertinence de leur propos. Vous
l'avez lu, pour un jeune groupe, et selon mon point de vue, La Diagonale du Fou n'est pas avare en qualité.
Cependant, je reste encore et toujours sur un avis mitigé. Il me manque quelque chose de fondamental que
pour pouvoir y adhérer complètement. Je ne sais pas ; un chant, ou alors - puisque le groupe n'en veut pas des thèmes plus forts, plus accrocheurs, plus immédiats. Quelques timides envolées n'auraient certes pas fait
de tort à l'ensemble. De quoi pouvoir rehausser les dynamiques à la façon d'un Dysrhythmia tout en prenant
garde de ne pas commettre à leur tour l'erreur des démonstrations inutiles. Le groupe a clairement les
capacités de nous offrir une suite à la hauteur de ces espérances.
Note : 3/6
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ASH RA TEMPEL : S/t
Chronique réalisée par dariev stands
Peu de disques font l'effet de provenir d'une entité "autre" avec la même force que ce premier Ash Ra Tempel.
Et pourtant, il fut bien l'oeuvre d'humains. Manuel Göttsching, guitariste visionnaire et leader du groupe,
accompagné de Hartmut Enke à la basse et de Klaus Schulze à la batterie (un personnage que les lecteurs de
guts connaissent bien depuis quelque temps) forment le groupe le 24 Aout 1970, alors que Enke vient de
ramener de Londres une foultitude de matos de studio et de scène, matos qui appartenait à l'origine à Pink
Floyd ! Vu l'usage qu'ils vont en faire, l'anecdote est croustillante (serait-ce celui exhibé au dos de la pochette
d'Ummagumma, et qu'ils se sont fait voler peu après ?). A la vue du dit matos, Schulze ne tient plus et rejoint
les compères. Ce dernier, en charge d'une frappe monolithique et tribale totalement indépendante des
éructations de Gottshing, venait tout juste de quitter Tangerine Dream à l'époque. C'est par lui que le groupe
fera la connaissance de Rolf-Ulrich Kaiser, fondateur du label OHR, qui sera assez fou pour sortir cet album en
1971. Pas mal de bonnes fées se sont penchés sur ce premier album "monstre" (comme il a été désigné à
l'époque), si l'on inclut aussi Thomas Kessler, propriétaire du Beat Studio et mentor du groupe (et d'Agitation
Free), ainsi que Conny Plank, fameux ingé-son qui produit l'album avec un certain James McRiff (ça ne
s'invente pas !). En effet, nous sommes ici aux confins du royaume prétendument infini que les anglo-saxons
appelaient alors "psychédélisme". Ici, la règle est simple (et sera déclinée sur beaucoup de disques krautrock,
puis sur la trilogie berlinoise de Bowie) : une face A guitaristique et rythmée, et une face B électronique, en
mode défrichage d'espaces inconnus, en roue libre. Un genre de dogme qui laisse le champ libre à toutes les
expérimentations, et les Ash Ra Tempel ne se privent pas. Quand on tombe sur un tel objet sonore, qui - cela va
de soi - laisse loin derrière les timides incartades "space rock" de groupes comme le pink floyd de l'époque,
pour décoller vers des confins insoupçonnés, on redéfinit forcément son approche. Je ne pense pas
chroniquer des disques de la même façon après celui-ci. Ces types, derrière leur apparence de hippies en
jeans-baskets et longs cheveux blonds, sont des sorciers. Autant que Can, me direz vous, ou Amon Duul,
Cluster, Harmonia ou encore Kraftwerk. Mais ici, on touche à une sorte de mystique insaisissable, quelque
chose qui n'a été capté qu'une seule fois (allez, peut-être qu'Hawkwind...). De toute son être, cette musique
appelle à autre chose qu'une simple écoute, mais à quoi ? Poussant le précepte Face A psyché/Face B ambient
à son paroxysme, les 3 musiciens se limitent à un seul morceau par face. "Amboss", décharge hendrixienne
propulsée par le feedback et les effets d'échos vertigineux, semble d'abord se jouer au ralenti, puis finit en une
cavalcade qui semble être accélérée. Entre temps, aucune cassure. Juste une montée en puissance à faire pâlir
Godspeed avec solo de guitare qui brule infiniment sans jamais se consumer. Décollage vertical, mais comme
Hendrix le disait, impossible de savoir si l'on va en haut ou en bas, vers la voie lactée ou vers les abysses
terrestres. Une chose est sûre, là ou l'on va, il y a beaucoup d'espace, et aucune âme qui vive. Pendant que la
section rythmique esquisse quelques motifs orientaux, la guitare fonce bille en tête comme une fusée vers
l'inconnu, traversant des nuages de feedback, des piscines de reverb galactique, et bien sûr, des troupeaux de
wah-wah sauvages. Seul Hendrix savait les dompter, et il faut les voir ici dans leur milieu naturel, bref, il faut
voir l'usage de Göttshing fait de la pédale CryBaby (vers 12min50). Encore plus long, "Traummaschine" est un
périple en "terra incognita" de plus de 25 minutes (on frissonne à l'idée d'imaginer ce qu'ils auraient fait sans
les limitations du support vinyle), la bande-son d'une excursion dans les entrailles d'une pyramide égyptienne...
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L'auditeur, transposé en Indiana Jones musical le temps d'une face B, s'enfonce dans les galeries, avant de
rebrousser chemin, pris de panique devant sa découverte; puis de se faire happer par les éboulements
déclenchés par sa course effrénée vers la sortie. Cela semble se jouer à des milliers de pieds sous terre.
Dissolution des formes dans l'eau d'ébène. Evanouissement du rythme derrière des bruits de gouttes, comme
provenant d'une rivière souterraine. Ces gouttes qui tombent résonnent d'un écho sinistre dans leur solitude
infinie. Pris d'un élan sépulcral, le tombeau oublié d'Ash Ra laisse s'échapper les dernières clameurs de son
peuple prisonnier de ses sarcophages millénaires en formes de râles indéchiffrables (claviers ? cordes ? effet
sur la guitare ?) vers 16min30. Dans ce caveau humide vierge de toute présence humaine depuis des lustres,
l'eau stagnante - la seule forme de vie qui subsiste encore - semble soudain prise de soubresauts étranges.
Serait-ce une entité vivante ? En tout cas, son réveil a provoqué l'effondrement du tombeau. Ses secrets
resteront a jamais enfouis sous les éboulis, à l'abri du regard des mortels, prisonniers de la volonté séculaire
de son créateur, fusse-t-il humain, pharaon ou même le dieu soleil lui-même.
Note : 5/6
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BEREAVED : The spirit driven by hate
Chronique réalisée par pokemonslaughter
Dire que j'ai failli me faire avoir !!! Cette grosse prod', ces gros riffs, ce gros dynamisme, Bereaved un groupe
de gros ? non même pas. Ce "spirit driven by hate" est un (gros) soufflé, le genre de disque qui vious explose
au premières écoutes et qui s'oublie aussi vite. Alors pfff, un peu marre de toujours tenir le même discours, cet
album, signé chez Konklav (entendez Deadsun records maquillé), c'est un peu comme les disinter, Shadows
Fall etc, c'est cool bien produit mais ça me procure pas grand chose. Bon je l'avoue, ce Bereaved c'est quand
même assez au-dessus car la hargne est bien présente du début à la fin, le jeu du batteur, ultra dynamique,
sauvant un groupe se perdant dans un exercice de style dont il n'avait sûrement pas besoin au vu de ses
qualités harmoniques et "riffiques". Le pire restant quand même quand le groupe s'essaye à des breaks
heavy/death mélo, complètement inutiles et mal foutus... Enfin bon, quand on voit que l'argument principal de la
bio et que ces gars sont super potes avec Ritual Carnage on peut devenir vite suscpicieux... Mais non
finalement, le plus gros défaut de cet album restera sa longueur et sa répétitivité (chaque morceau se
ressemble beaucoup trop), car en terme d'efficacité et de "puissance de feu", Bereaved n'a pas grand chose à
envier aux grands du genre : dynamisme, riffs ultra brutaux, breaks efficaces, accélérations opportunes,
l'exercice de style est très réussi... Et à vrai dire, on pourra même dire que je suis un peu mauvaise langue
concernant la répétitivité des riffs, car certaines harmonies sont vraiment bien senties (d'où le 4/6), parfois
d'obédience black metal, parfois carrément dark metal ("the storm master", la petite bombe de l'album), ceux-ci
font souvent mouche dans leurs parties mélodiques,un peu à la Necrophobic dernière période, les parties
brutales demeurant très conventionnelles bien qu'efficaces... Ajoutez à cela un chant bien arraché et hargneux,
dont la prononciation "à la japonaise" renforce encore cet aspect "on va en découdre", et vous avez un album
de death/thrash plutôt mélo qui vous tiendra en haleine un petit moment, sans non plus réellement tout péter...
Un bon disque tout simplement.
Note : 4/6
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ARKAN : Burning flesh
Chronique réalisée par pokemonslaughter
Je vois les mauvaises langues venir d'ici, ouille un groupe de death metal se revendiquant d'influences
orientales, et qui plus est composé à 90% de maghrébins... Dans un milieu où les préjugés et "traditions" sont
nombreuses, je sens que ça va jaser... Bref quoiqu'il en soit, Arkan, comptant en son sein Foued, batteur de
The Old Dead Tree, nous propose ici son premier maxi et le résultat est fort sympathique. Le groupe évite la
surenchère de violence et donne plutôt dans un death assez old school -quand je vous disais que cela revenait
à la mode- mâtiné de quelques harmonies vaguement orientaux et quelques arrangements tribaux bienvenus
(claviers, percussions, samples un peu cheaps...). Alors soyons honnête, si le groupe ne me convaint
absolument pas sur ce côté "atmosphérique", il se montre en revanche beaucoup plus efficace dans ses
parties les plus brutales. Les riffs sans être géniaux sont ainsi très bien mis en valeur par des rythmiques
simples et bien trouvées, une espèce de recette déjà trouvée il y a dix ans mais qui marche toujours autant.
Petit solo à la Death, riffs parfois thrashy ou mélodiques d'autres moments carrément brutal death, chant
classique mais toujours de bon ton, Arkan sans réellement casser la barraque (en effet, finalement tout a quand
même déjà été entendu) parvient à proposer 20 minutes tout simplement fort plaisantes, qu'il est très bon
d'écouter à plein volume. En attendant un full lenght dôté d'une meilleure prod' et d'une meilleure intégration
des influences orientales, voici donc un bon petit maxi de death comme cela fait plaisir d'en entendre...
Note : 4/6
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SOLACE OF REQUIEM : Utopia reborn
Chronique réalisée par pokemonslaughter
Oh ! Ils ont même fait un second disque.. Ca devient rare, nous, pauvres chroniqueurs étant habitués aux
promos pourris "one shot" : un disque (de merde) et puis c'est le split dans l'anonymat le plus total... Bon,
Solace Of Requiem, ce n'était pas non plus complètement daubé, juste super commun et sans grosse efficacité.
Et bien avec ce "Utopia Reborn", le groupe passe un cap. Gros paquet sur la promo, boitier dvd, photos
promos sur papier kodak photo (!!!), partie cd-rom ultra complète... Ouais bon ta gueule, la zik elle vaut quoi ?
Et bien, si le groupe reste cantonné à un death metal assez conventionnel malgré quelques avancées dark
(leads de ci et là, harmonies diverses...), ces ricains sont parvenus à proposer des compos tout à fait
intéressantes, riches et efficaces. Exit les influences trop nordiques, le groupe revient à une efficacité toute
américaine, citons pêle-mêle les vieux Deicide, Malevolent Creation, avec mêmes quelques incursions dans le
gros brutal death façon Hate Eternal (l'intensité en moins malheureusement). Et là je crois que je n'ai plus grand
chose à dire, c'est du death metal quoi avec quelques côtés thrashy par moment, voire même Bolt-Throwerien
(toukours un peu pauvre), puissant mais pas trop, inspiré mais pas débordant... Bref, un disque assez
passe-partout, que j'imagine très efficace live, mais sans grands coups de génie. Je tenais en fait simplement à
montrer l'evéolution par rapport au disque précédent, ici tout est mieux et surtout digne d'intérêt pour un
amateur de death metal... Après quant à la grande explosion dont rêve le groupe au vu de sa promo
monstrueuse, je crois que les gars vont encore devoir bosser, mais nul doute qu'ils en sont capables... Et je ne
dis pas ça souvent. Plaisant.
Note : 4/6
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ZORN (John) : Moonchild
Chronique réalisée par Progmonster
Zorn n'est jamais aussi bon que quand il met ses idées en pratique grâce aux autres. Et pour "Moonchild", les
autres ce sont Mike Patton, Trevor Dunn et Joey Baron. Belle affiche. Sur papier, le compositeur américain
nous raconte que son inspiration pour le projet, il a été la puiser du côté de Aleister Crowley, Antonin Artaud et
Edgard Varèse ; une autre belle brochette de références qui titillera notre curiosité mais, très franchement, à
part alimenter son côté artiste sérieux qu'il prend parfois plus de soin à entretenir que ses propres disques, je
n'y attache aucune importance. Devrais-je ? Je ne vais pas perdre mon temps - ni faire perdre le vôtre - à
essayer de voir de quelle manière les enseignements laissés par les trois maudits se retrouvent dans ses onze
nouvelles compositions. Qui dit Zorn en trio pense Painkiller. Qui voit Dunn et Patton pense Fantômas. Ce sera
en effet du côté de ce dernier qu'il faudra aller chercher un parallèle. Le saxophoniste ne participe pas mais
dirige le groupe, à l'instar de ce qu'il a toujours fait avec Naked City. Et on sent bien cette main mise au détour
des chemins obliques qu'empruntent parfois les morceaux ("Ghost of Thelema", "616", le très Ruins "Le Part
Maudit"). De ce point de vue, "Moonchild", contrairement à un "Amenaza Al Mundo", possède une cohérence et
un aplomb que tous les essais à moitié réussis de Fantômas n'ont jamais eu. En digne héritier de Bill Laswell,
Trevor Dunn occupe l'espace et utilisant sa basse pour générer des ondes de choc. Joey Baron se montre
prodigieux en maître vaudou guidant cette procession cabale. Quant à Patton, à part eructer comme il le fait
d'habitude, il en surprendra plus d'un à donner sa meilleure personnification de Captain Beefheart
("Possession"), voire Tom Waits (cfr. la plage titre). Sur "Moonchild", John Zorn et les siens jouent à se faire
peur, à nous faire peur aussi. Le résultat est à la hauteur, plus noir, malsain et malade que purement agressif.
Note : 5/6
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ZORN (John) : Astronome
Chronique réalisée par Progmonster
Déjà deuxième installation de cet ambitieux nouveau projet du compositeur américain à seulement six mois
d'intervalle (espérons qu'il sache s'arrêter à temps cette fois), "Astronome" qui se veut sans doute plus extrême
que "Moonchild" dans son approche, me semble surtout beaucoup plus confus. Articulé autour de trois
longues pièces aux thèmes bien distincts si bien que l'on peut compter en réalité sept titres au lieu de trois en
l'absence d'indexation appropriée, l'exercice de style charrie avec lui plus que jamais l'odeur de Fantômas,
celle de "Delirium Cordia" en particulier. Quand on connaît mon amour immodéré pour ce chef-d'oeuvre
incompris de ce début de vingt-et-unième siècle, il n'y a aucun mystère à déceler quelle sera mon appréciation
générale au sujet de "Astronome". L'acteur de l'ombre qu'est John Zorn semble particulièrement en retrait ici,
faisant le choix volontaire de laisser les principaux acteurs de ce spectacle sonore jouer en roue libre, ce qui
nous apporte un nombre considérable de longueurs inutiles. De fait, on a droit à quelques belles
démonstrations de la redoutable efficacité dont sait faire preuve la paire rythmique constituée de Trevor Dunn
et Joey Baron, indivisibles comme une paire de fesses ("A Barren Plain at Midnight"). Pour autant, je ne me fais
aucun soucis pour les amateurs éclairés qui, quoi qu'il arrive, ne verront aucune utilité à reçevoir un avis
extérieur sur ce qui leur semble, de prime abord, être tout simplement un grand disque. Comment pourrait-il en
être autrement ? Vu les artistes impliqués (y a même Laswell à la console)... À choisir, je préfère quand même
"Moonchild", déclinaison plus succinte et, me semble-t-il, bien plus efficace, d'un même thème auquel
"Astronome", dans l'absolu, n'apporte strictement rien. Reste l'objet, de toute beauté, qui représente à mes
yeux le seul véritable argument de vente capable de faire plier les réticents comme les plus indécis.
Note : 3/6
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YAKUZA : Way of the dead
Chronique réalisée par Progmonster
Ce qu'il y a de bien à Chicago, c'est qu'il y a Ken Vandermark. Les excités du bulbe de Yakuza le savent bien, et
auraient eu tort de se passer de ses services, eux qui habitent la même ville, eux qui parviennent avec une rare
sagacité à insuffler un véritable souffle free jazz à leurs assauts hardcore. Faut dire aussi que Bruce Lamont,
hurleur attitré des Yakuza, palpe lui aussi des lèvres le bec de ce superbe instrument qu'est le saxophone. Ça
aide. L'éloquent "Chicago Typewriter", un peu tiède, "Obscurity", mais surtout "Vergasso", qui déboule à du
trois cent à l'heure sur des rythmiques qui se tendent et se détendent, en sont les manifestations les plus
concrètes. À côté de ça, un titre comme "Miami Device" (joli clin d'oeil au passage) nous résumera en quatre
minutes montre en main tout ce que System of A Down a volontairement ou non oublié de demeurer. C'est
heureux, parce que ce System of A Down là, je pense ne pas être le seul à le regretter. Mais dans le même
temps, "Way of The Dead" nous montre que Yakuza n'est pas encore tout à fait parvenu à développer son
propre univers, comme ce sera le cas sur "Samsara". Cette tranche de violence compacte, tributaire de Anthrax
par instants ("T.M.S.") est suivi d'une incroyablement longue plage beaucoup plus atmosphérique, culminant à
plus de quarante trois minutes alors que les six titres qui le précèdent n'en font que vingt-sept tous réunis !
Parti pris audacieux et payant qui donne toute son aura au disque. On aurait tort de zapper cette plage, bien
que je conçois que sa durée puisse en décourager plus d'un. Car je ne suis pas loin de croire que "Way of The
Dead" n'a de sens que si l'on écoute ce gros pavé, sorte de "Leng Tch'e" planant, usant de la même technique
studio que "In A Silent Way" et dont l'extrême tension vous prend à la gorge parce que justement le groupe fait
sciemment le choix de poursuivre ses errances sans se laisser aller aux débordements faciles que d'aucun
aurait souhaité. Un album qui vaut donc largement le détour.
Note : 4/6
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UFOMAMMUT : Snailking
Chronique réalisée par Progmonster
Allons bon... Si les italiens se mettent aussi au stoner, désolé, mais je ne réponds vraiment plus de rien ! Qu'on
se rassure ; heureusement ils nous évitent la pochette de mauvais goût, bien que j'en soupçonne quelques uns
qui seraient encore capable de faire la fine bouche au sujet de celle qui donne si bien son identité à "Snailking",
leur déjà second album. Monochrome. Mystérieux. Intriguant. Revêche. Et hypnotique. Ça sature d'entrée de jeu
avec "Blotch" et ses infrabasses telluriques sur fond de bande sonore sf. La spécificité première des
Ufomammut n'est pas le chant comme on aurait pu le craindre - du stoner en italien, ça vous dit ? - le plus
souvent il est étouffé, lointain, derrière le mur d'effets omniprésent qui guide la musique. En l'occurence, il
s'agit du synthétiseur sur base duquel les opinions ont par ailleurs le plus de chance de se scinder. Entre
gargarisme à la pothead pixies et modulations contrôlées à la "Space Ritual", les sons utilisés sont souvent fort
typés et contrastent pas mal avec la puissance dégagée par le trio basse/batterie/guitare. Tout n'est pas réussit
sur ce disque, mais son homogénéité singulière force l'adhésion. "Odio" est particulièrement agréable ; ça
commence comme du Kyuss, puis on se laisse emporter sans trop s'en rendre compte dans des espaces plus
aérés mais toujours aussi pesants, coup de frein révélateur de beauté noire dont la lenteur rappele les rêves
apocalyptiques mis en musique par Steve Von Till et ses joyeux drilles. De vous à moi, je n'aurais jamais cru
une seule seconde que le space rock comme on l'appelait jadis allait faire autant d'émules à notre époque ; à se
demander si cet engouement avéré ne répond pas au désir de plus en plus grand parmi nos proches de vouloir
échapper de toutes les manières possibles et imaginables à la réalité. Le refuge proposé par Ufomammut est
celui d'un tourbillon gluant et opaque. S'y complaire jusqu'à le trouver accueillant nous donne une idée à quel
point la situation de ce côté-ci de la barrière est devenue préoccupante.
Note : 5/6
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SULA BASSANA : Dreamer
Chronique réalisée par Progmonster
On continue dans le trip retro avec Sula Bassana, un one man band qui cache très bien son jeu. En effet,
difficile de croire que "Dreamer" est le travail d'un seul et même homme tant le travail accompli ici est maîtrisé
de bout en bout mais, plus encore, jouit d'une osmose parfaite qu'on ne trouve généralement qu'au sein d'un
groupe. Cette expérience collective, Dave Schmidt - le nom civil de l'hurluberlu qui se cache sous le pseudo de
Sula Bassana - y a déjà goûté et plus que de raison puisqu'il a déjà roulé sa bosse dans d'autres formations aux
accointances psychédéliques elles aussi, telles que Liquid Visions ou Zone Six. Mais notre ami allemand
semble bien décidé à devenir l'anti-Steve Wilson en prenant la même trajectoire que le britannique, mais à
rebours ! "Dreamer" est la preuve irréfutable qu'il est possible de réaliser un disque de rock planant en solitaire
sans pour autant faire de concessions douloureuses aux machines qui n'ont toujours pas compris ce que le
mot organique veut dire. Vous me voyez venir ; je serais d'une mauvaise foi crasse si je venais à me servir de
cette chronique en tant que tribune libre pour refaire le portrait, une fois encore, au piteux "On The Sunday of
Life...". Je préfère être constructif ; j'invite donc ceux qui le peuvent à se ruer sur cette réédition cd (l'album fût
publié au départ sur 33tours uniquement) et ainsi constater par eux-mêmes autant tout ce qui divise
(l'élaboration de véritables chansons pour l'anglais, celui de s'exprimer surtout par le biais de la musique pour
Schmidt) que tout ce qui (ré)unit les deux projets, à savoir leur admiration sans bornes pour Pink Floyd, Sula
Bassana poussant le vice jusqu'à interpréter l'inédit "Bay Blue Shuffle in D Major" pour clôturer l'album. Malgré
quelques parties de guitares endiablées ("My Blue Guitar"), rien de vraiment violent à se mettre sous la dent ;
juste un périple agréable dans lequel on s'enfonce avec délectation, nos membres s'engourdissant à mesure
que l'on contemple ce crépuscule ambré qui s'abat sur nous.
Note : 4/6
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VAN BOGAERT (Frank) : Nomads
Chronique réalisée par Phaedream
Voyager sans bouger. Être nomade par la pensée, l’illusion. C’est un peu ce que Frank Van Bogeart nous offre
avec son 7ème opus, Nomads. De Janvier 2005 à Octobre 2006, le musicien Belge a façonné un album aux
arrangements sublimes. Douze titres flamboyants, où les rythmes se moulent harmonieusement avec de
délicates symphonies, de belles mélodies orchestrales que le musicien Belge a su développer et structurer
avec les années. Un bel album avec un très beau livret où 12 photos nous accompagnent dans cette migration
virtuelle, où le chef d’orchestre nous réserve quelques petits bijoux musicaux.
Un bourdonnement se fait entendre au loin, comme un long appel menaçant. Cette intro se métamorphose en
une superbe mélodie soufflée sur un hautbois. Une fine ligne, doublée d’un gracieux mouvement de la basse,
se transforme en strate synthétiques valsante, qui se subdivise en milles harmonies. Une Ouverture pompeuse,
sur de bonnes percussions roulantes et un synthé symphonique qui arrache quelques soupirs nostalgiques.
Cette introduction à Nomads est tout à fait conforme au style de Frank Van Bogaert. Tout au long de ce nouvel
opus, il nous transporte d’un continent à l’autre, d’une époque à une autre, avec de superbes arrangements,
des échantillonnages discrets, mais très efficaces. Si l’intro m’amène aux arènes Romaines, Crack the Blue Sky
me transporte sur les quais de la Grèce antique avec une onde synthétique qui crescende pour s’épanouir sur
une ligne hésitante et syncopée. Chœurs et refrains sont emprisonnés dans un cercle séquentiel aux notes
résonnantes où Crack the Blue Sky explose sur une ligne aux pulsations synthétiques entraînantes. Un
tourbillon agressif et statique qui vrille sur de grosses percussions, de bonnes strates enveloppantes et
valseuses. Un titre intense aux arrangements orchestraux poignants comme Ritual qui nous secouera les
sentiments vers la fin de l’opus. Nomad est un autre titre très orchestral avec ses somptueuses envolées
synthétiques denses et harmonieuses, qui libèrent ses chœurs Greco romains à la Vangelis. Furious Jam est
un titre avec une séquence coulante qui ondule sur une tonalité rauque. Ambiance moderne, voire jazzy, elle
est surplombée de synthés menaçant, alors que le séquenceur devient plus bouillonnant, amenant un tempo
saccadé, qui respire sur une puissante batterie. Un titre tranchant dans cette atmosphère symphonique.
Aquatopia est une belle mélodie qui nous touche profondément. Un doux clavier serpente ses accords sur les
harmonies d’un piano. Une percussion pendulette sculpte un tempo romanesque qui s’entend fort bien avec le
piano. Une petite chorale de voix féminine enchante nos oreilles au-delà des gerbes d’eau qui entoure cette
belle mélodie qui se transforme en ballade rythmée avec grosses caisses et gros orchestration afin illuminer
nos oreilles pour un dernier tour. D’autres beaux titres comme on en entend beaucoup sur Nomads, doux et
soyeux comme les symphoniques Mont Blanc, Blue Down There et Heat. High qui est une sorte de Aquatopia,
mais en plus accéléré, comme Drive où l’intro me rappelle Arpegiator de Jean Michel Jarre. Là s’arrête la
comparaison, car Drive devient un titre très enjoué. Plus rythmé, avec une ligne saccadée et des percussions
spiralées. C’est avec une note plus ambiante, mais toute autant harmonieuse que se termine Nomads. Beneath
the Ice est une romance, une mélodie aux souffles spatiaux et au beau piano qui flotte, histoire de nous faire
rêver. Histoire de nous rappeler qu’un jour nous serons peut-être des nomades à la recherche d’une nouvelle
terre.
Frank Van Bogeart a un incroyable talent pour écrire de courtes pièces qui ont énormément à dire. Harmonieux,
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mélodieux et avec un sens inné des arrangements orchestraux, Nomads est un beau voyage musical qui se
forme aux grés de nos visions. À cet effet, vous y trouverez un beau petit livret montant 12 photos. Des photos
qui ont inspirées le photographe Pablo Magne et qui représentent les visions conjointes du photographe et du
compositeur. Bien que certaines se rapprochent, mon imaginaire va plus loin, comme plus près. Comme quoi
que la musique de Frank Van Bogaert, avec Nomads en tête, est une musique aux milles visions, à partir de la
même émotion.
Disponible au http://www.frankva185ogaert.com/
Note : 5/6
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GLEISBERG (Rüdiger) : Fragile Fairytales
Chronique réalisée par Phaedream
Je vous ai déjà parlez de ces trucs qu’on a jamais entendus parler et qui, comme ça, nous tombe du ciel? Ces
petites merveilles que l’on attend pas et qui nous séduisent à la 1ière écoute, comme à la suivante et ainsi de
suite? Fragile Fairytales de Rüdiger Gleisberg, fait partie de ces joyaux sonores que l’on trouve, là où nos
oreilles ne s’y attendaient pas. Il s’agit de son 6ième album solo, dont son 3ième sur le label Allemand
Prudence, pour le compositeur Allemand que se fascine pour la musique symphonique crée avec de
l’électronique. Fragile Fairytales est divisé en 2 parties; la 1ère partie contient les 9 premiers titres, étant un
concert donné à Essen en 2000, alors que la seconde inclut les trois dernières compositions, qui sont des
pièces inédites.
Une onde synthétique basse flotte et nous entoure d’une aura musicale dense où des voix grégoriennes se
mélangent aux coups des archets de violoncelles qui nuancent un climat lourd. À l’approche de son
paroxysme, cris de baleines et licornes effleurent nos oreilles dans cette ambiance lourde que le piano de
Indian Garden ramène à de justes proportions avec une très belle mélodie. Une séquence vrille avec douceur
sur des voix discrètes et des percussions tam tam, que de belles strates synthétiques tentent d’amadouer.
Indian Garden reflète le monde musical de Rüdiger Gleisberg qui aime rapprocher les frontières entre une
musique classique et électronique. Plus que ça, le maestro Allemand n’en veut pas. De la musique reste de la
musique, peu importe les sources. Sur Fragile Fairytales les synthés ont une sonorité symphonique si dense et
intense qu’on s’interroge à savoir si ce sont des synthés ou un vrai orchestre que l’on entend. Les
compositions ont une structure électronique, voire ambiante avec l’excellent Mind Diving, sur une sonorité plus
symphonique, plus orchestrale qu’électronique. Une superbe symbiose, comme la géniale Damania, sans
oublier, Ikarus et Initiation Ceremony qui sont aux frontières d’un monde électronique, aux pensées
symphoniques. Il faut se débarrasser des préjugés et entendre la profondeur de Mind Diving, un titre
incroyablement intense, sombre et mélodieux. Un monde d’extase entre Vangelis et Philip Glass, où les
émotions sont poignantes, comme sur Largo et Lucidity.
La 2ième partie, réalisée en studio démontre plus l’impact symphonique des équipements électroniques,
Fragile Fairytales est l’exemple parfait. Un titre intense qui vibre d’émotion avec les strates onctueuses que l’on
peut aisément confondre avec une section de musiciens à cordes chevronnés. Et, restez jusqu’à la toute fin
pour entendre la mordante Enlightenment, une exquise mélodie qui aurait pu jouer dans Diva.
Fragile Fairytales est un album étonnant qui va choquer les puristes. Et pourquoi? Parce qu’un artiste ose créer
de la musique classique avec des instruments électroniques? Et voilà, on revient à l’éternel débat. Pour moi
c’est de la foutaise. En Fragile Fairytales de Rüdiger Gleisberg, j’ai entendu un artiste qui a composé une
musique sensible, sombre et énigmatique qui a une âme, une chaleur et des sensations incroyablement bien
rendues. Un superbe album d’une infinie beauté. À se procurer, pour l’amour de la musique.
Disponible chez http://www.bscmusic.com/
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Note : 5/6
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PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Music from the Penguin Café Orchestra
Chronique réalisée par Progmonster
Faut que vous sachiez une chose ; comme une grande partie des personnes de ma génération, sans compter
toutes celles à la suite, j'ai moi aussi mes périodes jeux vidéos. Je ne vois là pour ma part rien d'étonnant. Et
vous, vous ne voyez certainement pas où je veux en venir... Sur les conseils d'un camarade chroniqueur, j'ai
consenti à claquer plus de cinquante euros pour acheter le dernier Pro Evolution Soccer 6. Il se fait que dans ce
jeu, entre autres curiosités, on peut débloquer des costumes loufoques pour son équipe comme, par exemple,
une tenue de manchot royal. Là où, je pense, la plupart d'entre vous aurait, de suite, songé à "La Marche de
l'Empereur" à la vue de ce onze plus qu'improbable, subitement, m'est revenu en mémoire le souvenir d'un
groupe dont on ne parle quasiment jamais, je veux parler du Penguin Café Orchestra, laboratoire néo-classique
proprement inclassable que l'on doit au défunt guitariste Simon Jeffes, que certains d'entre vous connaissent
peut-être pour avoir vu son nom traîner ça et là dans l'une ou l'autre production Realworld. C'est que le
guitariste de formation classique en a eu vite marre du rock. Dès 1973, il constitue un quartette qu'il
développera par la suite en cette entité polymorphe où quelques noms très respectables se croiseront (Anne
Whitehead, Steve Nye, Gavyn Wright, ...), délivrant une musique délicate, toujours sensible, à la croisée des
chemins entre folk, jazz, musique de chambre et pop. Un mariage unique en son genre où des mélopées de
cordes larmoyantes côtoient des filets de guitare généreux et des poussières de rêve au piano électrique. Les
plus pointilleux seront sans doute intéressés d'apprendre que le sixième mouvement de "Zopf", "Giles
Farnaby's Dream", a été non sans gêne quasi intégralement repompé par Kate Bush sur son "Eat The Music"
(titre ironique ?), confirmant ainsi toute l'inutilité de l'album "The Red Shoes". Et peut-être pour vous l'occasion
de (re)découvrir un groupe qui ne ressemble à aucun autre.
Note : 4/6
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PENGUIN CAFE ORCHESTRA : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
Passer d'une mélodie qui emprunte au folklore péruvien à une composition articulée sur une tonalité de
téléphone ("Telephone and Rubber Band", un des rares morceaux à avoir fait la réputation du groupe), oser une
reprise des Ventures ("Walk Don't Run") au ukulélé puis enchaîner sur une plage ambiant avec pour seuls
instruments une guitare et un violon, il n'y avait que le Penguin Café Orchestra pour se le permettre. Leur
première réalisation sans le soutien appuyé de Brian Eno aura nécessité trois années de travaux forcés
supplémentaires. En raison de son côté pour le moins inoffensif, on aura vite fait de ranger le Penguin Café
Orchestra du côté des formations cataloguées new age. Il n'en est rien. Pour le côté sombre, on repassera
aussi, il faut bien l'avouer. Mais expérimentaux, ils le sont et ô combien ! Il flotte sur cet album une désinvolture
élégante, un plaisir évident, un romantisme à fleur de peau et non pas une sensiblerie déplacée, qui lui
confèrent tout son charme. Aérien, ce sens de l'espace inimitable propre à Steve Nye sera bien vite
réquisitionné par David Sylvian, étudié puis reproduit par Tim Friese-Green (Talk Talk). Mais ce que l'on
retiendra avant toutes choses, c'est que c'est sur cet album-ci que l'amour véritable qu'entretient Simon Jeffes
pour les musiques des autres cultures éclate au grand jour ; comme si ce débalage de couleurs et de parfums
exotiques avait quelque chose de terriblement impudique, le tout se devait d'être contrebalancé par un fort
relant dépressif, ces violons larmoyants toujours, après un passage obligé à travers le filtre grisonnant d'un
ciel anglais qui a depuis longtemps perdu toute notion d'intensité lumineuse. Comme souvent, les pionniers - et
le Penguin Café Orchestra était un groupe pionnier, assurément - récoltent rarement le fruit de leur dur labeur.
Sans de telles réalisations, il y a fort à parier que des groupes comme Rachel's ou A Silver Mt.Zion auraient
réfléchi à deux fois avant de se lancer.
Note : 5/6
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PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Broadcasting from home
Chronique réalisée par Progmonster
"Broadcasting From Home" ne fait rien d'autre que de poursuivre la route que seul le Penguin Café Orchestra
pouvait emprunter pour en avoir été tout simplement le géniteur. Quelques menues nuances changent toutefois
la donne ; les titres sont désormais de longueur plus respectable, entre trois minutes trente et cinq minutes. Si
vous voulez mon avis - mais si vous me lisez, c'est que vous le voulez mon avis ou alors c'est que vous vous
emmerdez vraiment pour lire une chronique de disque dont finalement vous vous foutez pas mal - cela ne rend
pas service à la musique du groupe de Simon Jeffes. L'alternance de plages courtes, à la manière du "Music for
Films" de Brian Eno, au milieu de titres plus ambitieux dans le développement de leurs thèmes, apportait une
réelle dynamique d'écoute à leur album précédent. "Broadcasting From Home" ne jouit pas du même effet. Il y a
une linéarité gênante, d'autant plus gênante qu'aucun moment vraiment fort ne se dégage. En première partie
d'album, "White Mischief", boucle minimaliste obsédante, a son petit effet, tout comme "Music for a Found
Harmonium" que ni Glass ni Nyman ne renieraient. Mais ailleurs, les morceaux s'enchaînent dans une relative
platitude, une monotonie décevante. "In The Back of A Taxi", faux reggae (tout comme "Heartwind" plus loin),
et "Music by Numbers" introduisent pour la première fois des parties de cuivres dans leur univers cossu. N'y
cherchez rien de solennel ou de lyrique, on est plutôt dans le festif désabusé ici. Il faudra attendre le moment
du départ, sous le porche, alors que l'on s'apprête, amer, à dire au revoir pour que l'ensemble parvienne à nous
captiver de nouveau avec deux piécettes mélancoliques à souhait, le très musique de chambre "Isle of View" et
"Now Nothing", pour piano et cordes, qui résument à elles seules toute leur philosophie. L'un dans l'autre, le
troisième disque du Penguin Café Orchestra apparaît comme un second choix, surtout si on a eu l'opportunité
d'écouter le précédent.
Note : 3/6
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PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Signs of life
Chronique réalisée par Progmonster
Moins d'excentricité. Voilà, en deux mots, le résumé de cette ultime recueil de titres originaux enregistrés par le
Penguin Café Orchestra pour le compte du label E'G Records. Et un minimalisme encore accru comme en
témoigne cette conséquente succession de titres en solitaire, "Horns of The Bull" pour guitare acoustique,
"Ocean Tango" pour piano et violon et "The Snake and The Lotus" pour basse fretless. Une facette intimiste
qui, quand elle est pleinement assumée comme c'est le cas ici, peut nous transmettre son lot d'émotions. Cela
risque nettement moins d'arriver avec des ritournelles aussi convenues et consensuelles que "Dirt". Mais il y a
aussi, heureusement, des réussites absolues comme "Perpetuum Mobile", du Penguin Café Orchestra grand
cru, utilisé - voire usé - jusqu'à la corde par une armada de publicitaires qui ne s'y sont pas trompés en jetant
leur dévolu sur cette mélodie forte et accrocheuse qu'ils croient pouvoir les aider à nous vendre cuisine,
dentifrice, assurances, téléphone cellulaire ou papier cul, c'est du pareil au même. Mais après tout, le bonheur
des uns fait le malheur des autres... Aussi n'est-il peut-être pas utopique de penser que "Signs of Life" a tout le
potentiel pour convaincre les plus sceptiques ; en effet, débarassé de leurs incartades en musique du monde
qui auraient pu en incommoder certains (bein oui, c'est triste à dire, mais c'est comme ça) ou en tout cas
réduits à leur plus simple expression ("Swing The Cat"), recentré sur lui-même en quelque sorte, le Penguin
Café Orchestra se permet comme ultime pied de nez une sortie sur la pointe des pieds avec la longue plage
"Wildlife", ambient et abstraite à la fois. De quoi se demander à juste titre si le périmètre d'influence du Penguin
Café Orchestra avait été finalement bien plus grand qu'on ne se l'imagine ? Officiellement, le groupe restera
encore une bonne décennie en activité, principalement pour se produire en concert, mais disparaîtra avec son
leader, en 1997.
Note : 4/6
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ARCADE FIRE : Funeral
Chronique réalisée par dariev stands
A force de chercher le groupe qui surnagerait au dessus de la nuée des groupes en "the", il a fini par s'imposer,
directement, sans passer par la case "hype"... Arcade Fire, une chose est sûre, personne ne les avait vus venir.
Après un premier Ep et quelques concerts, débarque ce premier album à la pochette quelconque, "Funeral"
qu'il s'appelle. Ouais, encore un pseudo radiohead, a-t-on grommelé à l'époque. Sauf qu'il s'agit justement là du
plus grand disque de rock depuis "Ok Computer". Sauf que, après une bonne décennie (depuis d'autres
funérailles, celles du blond, vous savez, celui qui se lavait pas entre les doigts de pieds) de disques qui se la
jouent "dépressif" tout en laissant une sale impression de préfabriqué, ce truc tout simplement nommé
"Funeral" est débarqué, et plus rien ne sera jamais pareil. Evoquant pourtant des groupes dont tout le monde
se réclame depuis un moment ; à savoir Joy Division et les Talking Heads (non, ne partez pas, lisez la suite),
Arcade Fire est un groupe habité par une ferveur complètement inexplicable dans notre époque frileuse.
Enregistrant en partie à la maison sur des magnetos et en partie à l'Hotel 2 Tango, le manoir désaffecté de
Godspeed You Black Emperor, le groupe devait sacrément se geler durant ce fameux "terrible hiver 2004" dont
parle le livret (en forme de faire-part de décès...), pour avoir envie de se réchauffer en allumant un feu pareil.
C'est bien simple, TOUTES les chansons de l'album feraient pleurer la mort en personne. Et de mort il est bien
question ici. Triste anecdote, 9 proches des membres du groupe ont trouvé la mort pendant l'enregistrement de
l'album. On comprend mieux pourquoi on a envie de chialer en entendant cette voix hantée, paniquée, et ces
choeurs, présents sur tout l'album, indistincts et en même temps bouleversants... Ecoutez ceux de la coda de
"Tunnels", on dirait bien... mais oui, des fantômes ! Et pourtant il n'y a rien à craindre, "funeral" ne fait pleurer
que pour nous faire nous sentir mieux. Soulagés. Content d'avoir traversé avec eux cet hiver-là, la rude tempête
québécoise, les flocons de neige gros comme des poings, le ciel noir de jais, le tonnerre qui gronde... Tout est
dans l'album. Vous avez déjà entendu le son de quelqu'un qui marche contre le vent glacial, avançant
centimètre par centimètre, en souffrant de tous ses os noyés, trempés, détrempés, lavés, délavés ? Evoquer
une chanson en particulier d'un pareil chef d'oeuvre est un crève-coeur. Parlons quand-même de la
""tétralogie"" Neighborhood, qui compte l'histoire d'enfants dont le village a disparu sous des tonnes de neige
et qui, livrés à eux mêmes, leur familles décédées, sont bien forcés de grandir et de s'endurcir. C'est un peu
l'histoire racontée sur tout l'album, de manière encore plus déchirante sur le presque insoutenable "In the
backseat", le truc le plus poignant entendu depuis "No Surprises". Il y a aussi "Crown Of Love", une complainte
sur l'amour qui s'éteint, d'une justesse effarante ('My love keeps growing/like a cancer/and you won't give me/a
straight answer"), "Haïti", titre ironique pour un album qui se veut froid et hivernal mais qui n'en est pas moins
lugubre ("Tous les morts-nés forment une armée"). Ah oui, j'oubliais, Régine Chassagne, la compagne du
chanteur-leader Win Butler, est en quelque sorte la touche française du groupe, apportant des paroles en
français et quelques notes d'accordéon qui fleurent bon le pub ou on se serre pour se réchauffer, nottament sur
"Laïka". Pour le reste, les Arcade Fire sont des adeptes de l'échange d'instruments, et de la transe collective.
Ca s'entend pas mal ici, vu la section rythmique qui fait du "Lust for life" à contre-emploi sur "Wake Up" ("lust
for life... quelle ironie), quand elle n'est pas franchement spasmodique sur le titanesque "Power Out" - qui
évoque des milliers de lemmings se jetant dans l'eau glacée - et toujours ce prêcheur maniaque, au bord des
sanglots, qui nous accuse subitement vers 3min30 dans un accès de fureur. Bref, vous l'aurez compris,
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"Funeral" est un disque vivant. Après tout, pleurer c'est être vivant, tout comme rire, non ? Il y a toutes sortes
d'instruments ici, dont beaucoup n'apparaissent pas sur les disques de rock "ordinaires", des xylophones, des
cordes à foison, des tambourins en pagaille, des orgues, une harpe... Mais il y a aussi - et surtout - un autre
genre d'instrument, qui lui aussi ne s'entend pas souvent : l'ÂME. Si on veut comprendre ce qui manque à
Franz Ferdinand pour nous décrocher autre chose que des sarcasmes, il faut écouter "Funeral". Une oeuvre
singulière, qui dépasse les genres, quoique l'on puisse éventuellement le rapprocher des productions du label
Constellation pour l'intensité et la profusion d'instruments justement. C'est qu'Arcade Fire est aussi une
joyeuse troupe de frappés, aux prestations scéniques plus que singulières (je vous invite à parcourir le web
pour vous faire une opinion). Bien sûr, comme moi au début, vous êtes sceptiques... C'est difficile en premier
lieu, de réaliser que l'un des meilleurs disques de l'histoire du rock vient de sortir, sous nos yeux, et que une
fois de plus, c'est sorti de nulle-part... sans prévenir. Il y aurait donc un petit espoir. Notez au passage qu'aucun
des membres du groupe n'a une gueule de star, (la rumeur a même couru qu'ils étaient mormons), qu'il n'est
question ni de sexe, ni de drogues, ni de rock'n'roll, mais simplement d'une lutte contre la mort et contre la
perte, un truc totalement sincère et premier degré. Pas de concept postmoderne, pas de revendications, pas de
romantisme exacerbé non plus. Mais qu'on ne s'y trompe pas, ce sont les clichés qu'on enterre, pas le
rock'n'roll.
Note : 6/6
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E=MOTION : Telepath
Chronique réalisée par Phaedream
On ne peut qu’aimer ce nouvel album de E=Motion. C’est énergique, plein de rythmes, de vie et de percussions
électroniques qui facilitent une écoute aisée. Avec Telepath, Jacek Spruch ne perd pas son temps dans des
dédales complexes en élaborant des longs mouvements aux contorsions multiples. Non, il va droit au cœur des
rythmes synthétiques. Avec Impulse, le synthésiste polonais passe en mode rythme et harmonie avec une
légère séquence sautillante, derrière un synthé au magnétisme évident, qui étend ses nappes en arrière scène.
Les premières pulsations trépidantes se font entendre. Fébriles, elle hoquètent sur des percussions volages et
un mouvement bouclé aux synthés déviants et harmonieux. De beaux solos virevoltent dans ce mini tourbillon,
qui gagne en puissance à la mesure de sa progression. Les synthés sont plus audacieux dans leurs solos, sur
une structure pesante, jusqu’à ce que le calme plat résonne de son silence. Des notes métalliques se
répercutent sur une sirène synthétique qui scrute l’horizon de son scanner sonore. Brain Connection est un
beau titre fort mélodieux où des notes séquencées se dandinent sur un mouvement qui se balance au même
rythme. Un titre aux odeurs de déjà entendu et qui ressemble énormément à Berlin Wavelength de
Re-trance-mission, paru en 2004. Mais peu importe son origine, ça demeure une superbe pièce de MÉ. L’intro
de Mind Transmission est fumante. Un beau synthé s’enroule autour d’une basse juteuse au rythme traînant,
comme un vieux heavy rock qui cherche à décoller. Les synthés sont dominant et nuancent les ambiances avec
de lourdes strates lancinantes et de beaux solos aux arcs sonores flexibles. Le tempo casse un peu avant la
5ième minute pour prendre une séquence plus dynamique, genre soft techno, appuyé des cymbales ‘’tschitt
tschitt‘’. Le beat et les percussions sont efficaces dans une faune sonore aux étranges réverbérations
métalliques, qui ajoutent une profondeur à des séquences synthétiques qui vrillent de fabuleux solos. Le début
très ‘’lounge‘’ et doux de Distant Vision, fait contraste avec la nature lourde que l’on retrouve sur Telepath. Des
belles notes glockenspiel voltigent sur un synthé en harmonie avec la légèreté des notes. Une belle séquence à
la Blondie, dans Heart of Glass, murmure un tempo plus allumé, alors que le synthé serpente une longue ligne
complexe, d’un solo qui nous fait revivre les mouvements ‘’soft dance’’ d’Orbital. Close-Up et Mental sont deux
autres titres rythmés où E=Motion multiplie les envolées, les passages et les refrains synthétiques, bouclés et
harmonieux. Disconnection termine Telepath sur un superbe mouvement séquentiel qui percute sur ses effets
de percussions échotiques. Un superbe titre, avec de beaux effets sonores qui ravivent l’intérêt cosmique et un
synthé aussi magnifique depuis le début de cet opus, qui termine son voyage télépathique sur un autre solo
aux longues étendues sonores.
Telepath est un bon album. Un album sans prétention qui ne cherche qu’à nous faire passer un bon moment. Et
c’est réussi. Des rythmes solides sur de superbes mouvements synthétiques et des séquences qui nous font
taper du pied. De la MÉ rythmée, dénuée de toutes formes de complexité abstraite, avec de bons séquenceurs
et des solos étonnants de synthé, vous adorerez Telepath de E=Motion.
Disponible au http://www.underwatermusic.of.pl/
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Note : 4/6
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ESP : The Gate
Chronique réalisée par Phaedream
Un bon album, riche et diversifié, ça vous tenterait? Voici ESP, pour Extra Sensory Perception, un groupe
nouveau genre qui se sont connus grâce à Internet. Mark Ashby des USA et Jacek Spruch (E=Motion) de
Poland ont composé cet album à distance. Chacun est fan de Tangerine Dream et ça s’entend, comme on peut
entendre les fortes influences du rock progressif de Mark Asby, ainsi que les superbes segments et
mouvements synthétiques de Jacek Spruch, lui qui affectionne les séquences bouclées. Le résultat est
étonnant, et c’est juste triste que seulement 1 cd soit sorti de cette collaboration.
Deux ex Machina est un titre à 2 segments. Emergence démarre sur une intro flottante avec des choeurs
discrets qu’on distingue à peine d’une fine ligne synthétique qui construit un premier mouvement. Ondulantes,
les notes créent un court mouvement harmonieux, sous des effets sonores chimériques aux étranges cris
d’enfants. Un bref silence amène une séquence plus rythmée qui roule sur de sombres ondulations, aux
mouvements hachurés, incertains. Les synthés sont mélodieux et symphoniques. Les lignes s’entrecroisent;
l’une en serpentin harmonieux aux impulsions variées, alors qu’une reste soumise à la structure, maintenant le
rythme égale. Une superbe pièce qui crescende, menaçante et qui explose avec de lourds riffs synthétiques qui
déchirent la quiétude mélodieuse d’une agressivité insoupçonnée qui nous conduit aux derniers souffles
d’Emergence. La transition avec Brainwave est mélodieuse; un synthé aux souffles épuisés qui rejoint les
fraîcheurs flûtés d’un comparse virtuel. Brainwave progresse avec des tintements, sur un synthé grondant et
des percussions sèches et nettes. Le mouvement s’intensifie pour revenir sur des riffs explosifs, soutenu par
une séquence ondulante, des percussions martelantes et des superbes solos de synthés et de guitares. Une
finale puissante qui s’éteint brusquement pour tomber sur le rythme minimalisme de Hubris qui crescende en
rythmes avec un synthé coulant sur un tempo fluide. Catharsis est un beau petit carrousel hypnotique aux
notes limpides qui tournoient avec harmonie. Mark Ashby introduit sa guitare pour accompagner cette
comptine aux notes de plus en plus glockenspiel.
Des notes électrifiées tombent. Menaçantes dans une ambiance contradictoire où le sombre marche côte à
côte, avec l’harmonie. Transcendence étend ses formes pour développer une mélodie spiralée, avec
Metamorphosis, qui se développe sur des synthés scintillants et enveloppants et de belles percussions. L’effet
spiral continu sur Perception. Un titre qui évolue sur de belles percussions, une guitare qui unit ses portées
avec un synth aux rotations sur le déclin. Float est un superbe mouvement linéaire qui flotte doucement
jusqu’aux portes de Crossover. Une superbe mélodie séquencée qui vrille sur de beaux solos et un séquenceur
fluide.
The Gate, de ESP, est définitivement un bon album de MÉ, style Berlin School. Plus agressif que la majorité des
autres opus, il conserve tout de même ses ondulations séquentielles avec de beaux mouvements synthétiques.
Très peu de passage ambiants, il a l’étoffe et la profondeur pour plaire aux fans de TD, fin des années 70, début
80. Lourd et harmonieux, complexe et fluide, c’est un excellent compromis pour amateurs de musique
progressive ainsi qu’électronique.
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Disponible au http://www.underwatermusic.of.pl/
Note : 5/6
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HANCOCK (Herbie) : Takin' off
Chronique réalisée par Progmonster
Je vous ai parlé de Miles. Je vous ai parlé de Wayne Shorter et Anthony Williams. Et bien que je ne songe pas à
m'attarder sur le cas nettement moins intéressant de Ron Carter, si je veux paraître un tant soit peu complet et
cohérent dans ma démarche, il va de soi qu'il me fallait tôt ou tard refermer cette quadrature du cercle en
abordant la carrière étonnante du pianiste prodige Herbie Hancock. Rendez-vous compte ; ses premiers pas sur
disque, il les fit aux côtés de Donald Byrd sur son album "Chant" en 1961 sur Blue Note, en lieu et place de
Duke Pearson - ce qui, déjà, n'est pas rien - et en moins de temps qu'il m'en faut pour vous l'écrire, voilà
qu'Herbie est promu du jour au lendemain, réalisant son premier disque sous son nom pour le susdit label. Le
plus impressionnant sur "Takin' Off", c'est l'incroyable mâturité d'écriture du musicien ; on croirait que le
bonhomme a fait ça toute sa vie, qu'il pèse ses quarante ans bien tassées (il a alors seulement vingt deux ans)
et qu'il en est déjà à son quatorzième disque... Peu d'artistes jazz à ma connaissance ont connu un départ si
tonitruant. Un premier disque assumé seul, constitué de six compositions originales dont une, au moins, va
très rapidement devenir un standard ("Watermelon Man") mais peut-être plus encore ; une borne réferentielle
autour de laquelle le pianiste ne cessera de graviter tout au long de sa riche et dense carrière. Pour ce premier
rendez-vous, il est de plus entouré par une fine équipe : la section rythmique Butch Warren et Billy Higgins,
classique, mais aussi le trop rare Dexter Gordon au saxophone ténor et l'indécrottable Freddie Hubbard avec
qui il réalisera quelques uns de ses plus beaux disques pour la compagnie. "Takin' Off" ne bouscule pas les
conventions. Mais son tour de force réside avant tout dans le vibrant manifeste qu'il constitue : la naissance
d'une étoile qui, sans se faire prier, brille déjà haut dans le firmament pourtant déjà bien encombré des plus
grands artistes jazz.
Note : 4/6
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HANCOCK (Herbie) : My point of view
Chronique réalisée par Progmonster
"Blind Man, Blind Man" sonne trop comme une relecture à peine retravaillée de "Watermelon Man". Que faut-il
donc en conclure ? Est-ce là la transposition évidente du souhait pressant des directeurs du label à rééditer
l'exploit auquel Hancock aurait cédé, par facilité, pour obtenir en contrepartie une plus grande liberté artistique
? L'hypothèse n'est pas fantaisiste. D'ailleurs, c'est du jamais vu ; Blue Note a poussé le vice jusqu'à faire
imprimer sur la pochette "Includes His New Composition : Blind Man, Blind Man" qui passe difficilement pour
autre chose que du racolage bassement mercantile. Mais dans l'ensemble, bien plus posé que son
prédécesseur, on verra dans "My Point of View" le disque où, déjà, Herbie Hancock montre les premiers signes
tangibles d'un jazz modal dans lequel il va d'ici peu pleinement se réaliser. Je fais référence aux
développements tout en nuances exécutés sur des titres comme "A Tribute to Someone" ou encore "The
Pleasure is Mine". Mais plus étonnant encore, Herbie Hancock adopte un point de vue parfaitement atypique en
enrôlant un septet qui comprend, outre le saxophone de Hank Mobley et la trompette de Donald Byrd (échange
de bons procédés), le tromboniste Grachan Moncur III et la guitare de Grant Green ! Même Anthony Williams est
de la partie, Hancock exploitant à merveille sa vision moderne de la batterie dans la conclusion abstraite de
"King Cobra". Bien que de facture tout-à-fait classique et tout aussi respectable en bien des points que "Takin'
Off", il est difficile d'apprécier "My Point of View" autrement que comme une excroissance divertissante qui ne
porte pas à conséquence. On y décelerait presque une pointe d'insolence dans sa manière désinvolte et
pourtant toujours parfaitement contrôlée d'aborder la suite de sa carrière. C'est là pointer du doigt une des
caractéristiques de l'artiste ; si lisse en apparence, mais d'une nature profondément contestataire assez
jubilatoire.
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Inventions & dimensions
Chronique réalisée par Progmonster
Dès les premières mesures de "Succotash", il ne fait aucun doute que le champ d'exploration du nouvel album
d'Herbie Hancock n'a d'ores et déjà plus rien à voir avec ses deux précédentes réalisations, pourtant
enregistrées il y a quelques mois à peine. Saccadé, répétitif, minimal, abstrait, il ne trahit pas l'intitulé de
l'album qui, de fait, cherche à innover en explorant d'autres manières d'aborder le langage jazz. Herbie Hancock
se retrouve une fois de plus à la tête d'une formation inédite où, derrière son piano, il incarne le seul élément
mélodique de l'ensemble. Son quartette pour le moins original n'accorde en effet pas la moindre place à tout
autre instrument soliste ; pas de saxophone, pas de trompette, chose à laquelle on se serait attendu, ni même
de guitare électrique, bien que ce soit beaucoup plus rare. Non, Hancock fait beaucoup plus fort en associant
au contrebassiste Paul Chambers - respectable instrumentiste bop s'il en est - le batteur Willy Bobo et le
percussioniste Osvaldo "Chihuahua" Martinez ! Du rythme, du rythme et encore du rythme semble donc être le
credo de "Inventions & Dimensions" qui, s'il arbore parfois les couleurs du latin jazz tel que le pratiquait alors
quelqu'un comme Kenny Dorham, principalement à cause de l'apport des percussions ("Jack Rabbit",
"Mimosa"), partage en réalité de bien plus nombreux points communs avec une musique typique d'avant-garde.
Le toucher impressionniste du pianiste s'efface ainsi sans peine pour laisser sa place à un phrasé
conceptualisé et oblique, aussi fascinant que dérangeant, jouant avec les répétitions comme un charmeur de
serpent. "A Jump Ahead" qui referme la session est peut-être encoe le seul titre du lot à tenter de préserver les
apparences du hard bop grâce à sa dynamique plus soutenue. Au bout du compte, je serais presque tenté de
mettre une note encore plus élevée à ce disque, mais compte tenu des autres réussites que le pianiste va
aligner, je m'efforce d'aborder l'ensemble de son oeuvre dans un semblant de hiérarchie.
Note : 4/6
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HANCOCK (Herbie) : Empyrean isles
Chronique réalisée par Progmonster
Voilà à peu près un an que Herbie Hancock, Ron Carter et Tony Williams ont intégré ce qui allait devenir le
mythique second quintette de Miles avec l'arrivée de Wayne Shorter. Au printemps '64, nos trois acolytes se
retrouvent pour la première de leurs deux rencontres au sommet avec Freddie Hubbard sur "Empyrean Isles",
un des fleurons du catalogue Blue Note, un des tous grands disques de la période dite classique de Herbie
Hancock. Un excellent album de post bop et de jazz modal tout simplement. "One Finger Snap" et "Oliloqui
Valley" répondent à la première définition, avec le swing inimitable de Tony Williams qui fait d'emblée toute la
différence. Bien que relevés et audacieux dans leur genre, je peux aisément comprendre que ces titres ne
provoquent ni envie ni frénésie chez celles et ceux encore étrangers à cette grammaire. Mais la face B est
d'anthologie. Tout le monde (ou presque) connaît "Cantaloupe Island", popularisé trente ans plus tard au plus
fort de la vague acid jazz par US3 (le seul succès à mettre à leur crédit d'ailleurs, c'est tout dire). Mais le gros
morceau, c'est encore "The Egg", certes moins connu, certes moins groovy - et pour cause - mais quelle
superbe pièce de jazz innovant, curieux, progressiste... Adaptant à cette nouvelle formule les enseignements
tirés de "Inventions & Dimensions", Hancock nous propose une nouvelle pièce abstraite articulée autour d'un
phrasé lancinant au piano, soutenu par une batterie minimale qui ne garde du jazz que sa grande versatilité. La
pièce se transforme peu à peu en pleine de jeu où chaque intervenant s'amuse à briser les conventions pour
s'abandonner à une forme hybride de free jazz et d'avant-garde. Ron Carter, déjà excellent sur "Oliloqui Valley",
nous gratifie d'un nouveau superbe solo à la contrebasse, faisant sonner ce dernier comme un violoncelle
grâce à son travail à l'archet. Mystérieux, brumeux, "Empyrean Isles" ne pourra que séduire les amateurs de
musique aux pavillons déployés à trois-cent-soixante degrés.
Note : 5/6
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HANCOCK (Herbie) : Maiden voyage
Chronique réalisée par Progmonster
"Maiden Voyage"... ou "Empyrean Isles + 1". Le surnombre en l'occurence, c'est George Coleman,
saxophoniste de l'ombre qui, bien qu'ayant intégré le Miles Davis Group du temps de "Seven Steps to Heaven",
continue en vers et contre tout à ne pas vouloir froisser son égo dans des collaborations qui auraient pu avoir
sur son mental d'irrémédiables conséquences. Lesquelles ? Allez le lui demander... Pendant ce temps, le
"traître" (souvenez-vous ; c'est tout de même lui qui a claqué la porte au nez de Miles, et non l'inverse... bonjour
l'affront !) est malgré tout accueilli à bras ouvert par Hancock pour enregistrer une nouvelle session Blue Note
en compagnie du même line-up qui nous avait déjà gratifié de l'excellent "Empyrean Isles". "E.S.P." n'est pas
encore sorti que "Maiden Voyage" nous donne déjà un sérieux avant-goût de ce qui nous attend. Hubbard
Davise, Coleman Shorterise... L'effet en trompe-l'oeil est saisissant. Moins radical dans son approche que son
essai précédent, "Maiden Voyage" incarne malgré tout l'apogée stylistique du pianiste, et est à ce dernier ce
que "Ju Ju" ou "Speak No Evil" est à Wayne Shorter. Les phrasés abstraits et dégingandés, les mêmes qui
feront la marque de fabrique du quintette de Miles (et comprenez moi bien ; quand je dis "les mêmes" je veux
dire "dans le même genre" - s'il y en a encore après ça pour me reprendre, c'est sans espoir) s'insèrent ici au
détour des thèmes de "The Eye of The Hurricane" ou "Survival of The Fittest". Écrites avec une infinie précision
et une vision claire de l'objectif visé, les pièces de Hancock sont assez maléables que pour permettre à tous de
laisser libre cours à leur imagination. Tour à tour mélodique et rythmique, Herbie Hancock maîtrise son propos
avec doigté. Le tout étant circonscrit par deux titres devenus depuis des classiques indémodables, à savoir la
plage titre et le magnifique "Dolphin Dance", irréels, subtils, vaporeux. Avec "Empyrean Isles", le Hancock
période Blue Note qu'il faut avoir écouté (à défaut de les posséder).
Note : 5/6
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HANCOCK (Herbie) : Speak like a child
Chronique réalisée par Progmonster
Herbie Hancock s'est intensivement consacré au quintette de Miles Davis ces dernières années. C'est ce qui
explique le temps relativement long (en jazz, trois ans, c'est énorme) qui s'est écoulé entre "Maiden Voyage" et
ce "Speak No Evil" qui, d'office, partait perdant. Pour éviter l'attaque facile, le pianiste choisit une nouvelle fois
de surprendre en choisissant une perspective inédite. Durant ces sept années chez Blue Note, l'artiste aura pris
un soin particulier à ne jamais évoluer deux fois dans le même contexte, c'est à souligner. Pour cette session
de mars 1968, il opte pour un sextet, formation élargie comme sur "My Point of View", mais ne répondant pas
aux critères classiques, comme sur "Inventions & Dimensions"... Pas de percussions, mais des cuivres,
seulement dans une combinaison qui n'a rien de bien commun : flûte, trombone et flugelhorn ! Toutefois, ce
n'est sans doute pas encore suffisant puisque Hancock, qui s'entête décidément à ne rien faire comme tout le
monde, va se servir du triumvirat constitué pour la peine de Jerry Dodgion, Peter Phillips et Thad Jones comme
d'un véritable ensemble orchestral juste bon à agrandir la palette des timbres et des harmonies employées. Les
arrangements ainsi obtenus tendent ainsi à rapprocher "Speak Like A Child" des travaux de Gil Evans, dans un
créneau plus intimiste cependant. Le pianiste reste donc seul maître à bord et tout ce beau monde de voguer en
pilotage automatique sur un disque finalement plaisant, riche par endroits, pas loin du smooth jazz de salon (la
plage titre tout particulièrement), mais qui ne cherche pas spécialement à forcer son talent. Les mordus auront
cependant deux bonnes raisons de vouloir jeter une oreille à ce disque de par la présence de "Riot" et
"Sorcerer", morceaux que Hancock a concédé au répertoire Davisien et que l'on peut apprécier ici sous le strict
angle de vue de son auteur.
Note : 4/6
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HANCOCK (Herbie) : The prisoner
Chronique réalisée par Progmonster
À vrai dire, pour son ultime session Blue Note, on ne sent pas tout de suite la différence entre "Speak Like A
Child" et "The Prisoner" ; "I Have A Dream", premier titre de ce nouvel album, lui emprunte le même travail
d'orchestration, quoi que plus raffiné et étoffé (le groupe de six s'enrichit de trois musiciens supplémentaires).
Mais stylistiquement, on reste imperturbablement en territoire connu ; un jazz décontracté qui, bien que porté
cette fois par des pointes de lyrisme que l'on doit à Johnny Coles, Jerome Richardson ou Joe Henderson (autre
grand oublié qu'il me tarde de pouvoir décortiquer pour vous tôt ou tard), ne parvient pas à nous soustraire à
l'ennui relatif qui peu à peu s'installe dans des exposés souvent trop longs. Les déambulations hésitantes de "I
Have A Dream" ou le mystérieux "Promise of The Sun" et ses mélodies dissonantes reprises par les cuivres ont
néanmoins une qualité cinématographique indéniable que le claviériste ne tardera pas à exploiter. Mais ce n'est
finalement que sur "The Prisoner", le titre qui donne son nom au disque, et "He Who Lives In Fear" que,
timidement, notre attention est sollicitée. Hancock y utilise pour la première fois - pour son propre compte
s'entend - un piano électrique de façon très pointilliste, mais peut-être encore de manière trop discrète à mon
goût. Il faut dire qu'après avoir essayé l'engin sur des titres comme le kilométrique (au montage) "Circle In The
Round" ou, de manière plus extensive, sur les albums "Miles In The Sky" et "Filles de Kilimanjaro", comme
beaucoup à l'époque, le claviériste s'est finalement décidé à reprendre ces quelques innovations pour lui et lui
seul afin de les insérer dans une carrière solo à laquelle il désire alors exclusivement se consacrer. "The
Prisoner" marque donc la fin d'une époque ; la fin de sa collaboration avec Miles, la fin de son contrat avec
Blue Note, la fin aussi de ce jazz modal qu'il a su si bien mettre en valeur. Mais c'est ce qui vient à sa suite qui
nous intéresse...
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Fat Albert Rotunda
Chronique réalisée par Progmonster
Bien que transitant chez Warner, Herbie Hancock ne va même pas se donner la peine de rameuter avec lui une
grosse partie de la fine équipe qui officiait déjà sur "The Prisoner". Il va faire plus fort encore ; enregistrer "Fat
Albert Rotunda", destiné au départ à illustrer une production animée signée Bill Cosby, dans les studios Van
Gelder ! Paradoxalement, même si la composition du line-up est sensiblement identique (le guitariste Eric Gale
n'apparaissant que sur deux titres), il se dégage de ce disque une énergie, un entrain que "The Prisoner" tentait
péniblement d'atteindre. Si cet album doit être vu comme le développement immédiat de l'aventure "The
Prisoner", on peut dire que la transformation est pour le moins radicale ! Les éléments jazz perdent du terrain
face à un groove funk martelé par deux bassistes et trois batteurs, soutenus par un ensemble de cuivres
généreux et un Herbie Hancock désormais scotché au Fender Rhodes, même pour les plages plus complexes
comme "Tell Me A Bedtime Story". Il n'en faut pas plus pour se rendre compte que l'univers du claviériste est
tout doucement en train de basculer, plus proche de Isaac Hayes que de Bill Evans si vous voulez... Ainsi, avec
"Fat Albert Rotunda", c'est comme si ce bon vieux Herbie venait d'enregistrer une bande son blaxploitation pur
jus sans même le savoir, marchant pour ainsi dire sur les plates bandes d'un Quincy Jones. Entraînant,
généreux, somme toute sympathique, "Fat Albert Rotunda" reste encore trop ancré dans son époque. C'est
aussi cependant un premier pas nécessaire vers un ailleurs qu'il reste encore à explorer. Et c'est bien ce que
Herbie Hancock va faire en publiant sa trilogie psychédélique, "Mwandishi", "Crossings" et "Sextant", où il aura
tout le loisir d'étendre sa nouvelle formule dans des formats extensibles à l'envi, tellement loin à mon sens qu'il
fera la nique aux meilleurs essais du Miles électrique et des premiers Weather Report.
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Head hunters
Chronique réalisée par Progmonster
"Eh... Mais il est où le Head Hunters ?" "Pourquoi y a pas le Head Hunters sur Guts ?" "Non, mais qu'est-ce que
c'est que ce bordel ? Y a même pas le Head Hunters ???"... Le voilà votre "Head Hunters". Il aura fallu attendre
un jour de janvier 2007 pour qu'il apparaisse dans nos colonnes. Alors ? Heureux ? Maintenant, allez-y ; vous
croyez que je n'ai pas compris votre petit jeux, désireux que vous êtes de voir apparaître ce disque dans
l'unique but d'être parmi les premiers à y laisser un commentaire et montrer derechef à la face de notre large
commité que, vous aussi, vous avez écouté le "Head Hunters" de Herbie Hancock ? Que puis-je ajouter de plus
pour que cette chronique ne paraisse pas comme redondante face à ce que vous allez bientôt pouvoir écrire
ci-dessous ? Voyons voir... Avec ce disque, Herbie Hancock entame un virage commercial appuyé qui ne fera
que se confirmer au fil des ans. Une manière élégante de refermer la boucle qu'il avait ouverte seulement trois
ans plus tôt avec "Fat Albert Rotunda" dont il retrouve ici les gimmicks les plus funky. L'épisode délirant sera
hélas définitivement relégué aux oubliettes, d'autant qu'avec ce douzième album studio, le claviériste réalise un
coup de poker jusque là inimaginable en propulsant son disque en tête de liste des albums les plus vendus, et
ça, c'est pas TF1 qui vous l'aurait appris ! Tout le succès de "Head Hunters" repose sur ses deux premiers
titres, le célèbre "Chameleon" d'une part, mais surtout la première relecture on ne peut plus surprenante de
"Watermelon Man" par son auteur. C'est une synthèse certes réussie mais peut-être trop carrée que pour
vraiment passionner les amateurs de musique qui aiment se perdre dans quelque chose de plus dense, de plus
élaboré, histoire de satisfaire leur besoin de revenir sans cesse écouter l'oeuvre dans le détail dans l'espoir un
peu fou d'y dénicher le détail de plus qui les avait échappé lors de leur précédente écoute. Et si vous aimez tant
"Head Hunters", s'il vous plaît, ne vous arrêtez pas en si bon chemin et lisez aussi la suite...
Note : 4/6
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HANCOCK (Herbie) : Thrust
Chronique réalisée par Progmonster
Ce n'est pas Dieu qui a rendu Herbie funky. C'est Sly Stone. D'ailleurs, le titre "Sly" de son précédent album lui
était dédié. Funk jusqu'au bout des ongles, cette partie de carrière, que l'on peut grosso modo situer entre 1973
et 1977, le pianiste jazz de formation classique va s'y abandonner sans compter. Heureusement moins insipide
que les essais que Bob James ou Donald Byrd vendaient malgré tout comme des petits pains, "Thrust" est tout
de même un cran en dessous de ce que faisait alors un groupe comme Weather Report (qui venait par ailleurs
de publier son fantastique "Mysterious Traveller"). On s'en souvient, à l'époque pas si lointaine de "Crossings"
ou "Sextant", on aurait dit plutôt l'inverse... Même les Headhunters, le groupe qui sortira de la cuisse de l'album
du même nom, paraissent sur disque plus aventureux, c'est dire ! C'est que, comme je tentais de vous
l'expliquer auparavant, on rêve moins sur ces dernières productions, c'est moins inventif, moins ambitieux. Il y
a bien "Butterfly", qui suspend le temps dans un brouillard mystérieux où nappe de synthés et saxophone
soprano sont nos seules repères avant que la rythmique imposée par Paul Jackson et Mike Clark ne s'emballe à
mi-parcours, mais sinon, la cuvée 1974 de notre ami Herbie ne peut cacher plus longtemps sa nature véritable ;
tout simplement, celle d'une déclinaison pas vraiment impérissable de son album précédent. Ça n'a pas
empêché les artistes électro de tout bord, house ou french touch d'ailleurs, de s'attarder longuement sur ce
genre d'exercice qui représente pour eux un filon intarissable de beats et de samples sur mesure. Mais si, dans
vos rêves les plus fous, vous aviez toujours secrètement souhaité mettre un jour la main sur la bande son d'un
épisode inédit de Starsky et Hutch, un épisode qui s'attarderait en particulier sur les frasques de ce bon vieux
Huggy Les Bons Tuyaux, je ne vois aucune raison pour que vous passiez à côté de ce "Thrust", nettement
moins planant qu'il s'en donne l'air...
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Man-child
Chronique réalisée par Progmonster
À ce stade, je doute que Herbie Hancock veuille encore tenter de se susprendre et, à fortiori, nous surprendre
par la même occasion. Il est bien trop préoccupé à se demander comment faire pour garder un minimum de
cohésion dans cette formule toute faite désormais bien rôdée qui lui apporte gloire et plus encore. En amateur
avisé de nouvelles technologies, chaque disque est pour lui l'occasion d'essayer ces dernières acquisitions en
la matière, et voir une bonne fois pour toutes ce qu'elles ont dans les tripes. Certaines sonorités sont nouvelles
- c'est un fait certain - mais elles ne possèdent pas les qualités disons "spatiales" qui ont fait de "Sextant"
l'ovni que l'on sait (si j'ai pas un peu l'air d'insister là, c'est normal). Au lieu de viser l'étoile la plus haute dans
le ciel et partir pour une expédition dans l'espace après avoir rentré dans l'ordinateur les coordonnées exactes
de cet astre lointain, on se limite à faire trois ou quatre fois le survol de la Terre en quarante cinq petites
minutes. Un périple pas déplaisant en soi, mais comme pour tout, on a sans doute fini par s'y habituer trop vite,
si bien que l'exceptionnel - pour tout exceptionnel que ce soit - ne nous surprend plus. Et on continue en vers
et contre tout à aspirer à un ailleurs inaccessible que l'on avait pourtant approché autrefois à bord du même
vaisseau. Si, si, je n'ai pas rêvé ! L'architecture même de "Man-Child" est plutôt boîteuse, alternant titres funky
avec plages plus posées, plus atmosphériques, en guise de ballade ("Sun Touch", "Bubbles"). Même au sein de
cette formation considérablement élargie, incluant cette fois plusieurs batteurs, guitares et une large section de
cuivres, le déclic ne s'opère pas comme on l'aurait souhaité. Dommage. Car pourtant "Man-Child" s'ouvrait sur
"Hang Up Your Hang Ups", un funk atomique tout bonnement irrésistible, sans doute ce que Hancock a fait de
meilleur dans le genre. Oui, mieux que "Head Hunters" j'ai dit.
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Flood
Chronique réalisée par Progmonster
Plus qu'une agréable surprise ce "Flood" ! Destiné exclusivement au marché japonais, ce double album peut
heureusement aujourd'hui être contenu sur un seul cd. Niveau prix, vous ne verrez pas la différence puisque
c'est un import, mais dites vous que, double, c'eut été bien plus cher encore. Dites vous aussi que si vous avez
la chance de le voir en chinant ou en allant faire vos emplettes pour maintenir votre oreille alerte, ne vous
posez pas trente mille questions inutiles ; prenez-le ! Une performance en concert de haute volée qui a
quelques solides avantages à son actif, vous jugerez par vous-mêmes de leur importance ; une pochette qui
déchire (je trouve) et qui établit tout de suite la filiation évidente qui unit un album comme celui-ci avec, par
exemple, "Live Evil". Toujours aussi carré et groovy, il est tout à fait illusoire d'espérer y entendre un sursaut
psychédélique. Néanmoins, "Flood", de par son habile construction, est un disque qui monte lentement mais
sûrement en puissance, avec un choix de titres des plus pertinents, parfait résumé de ce qu'il y a à retenir des
travaux de Hancock depuis "Head Hunters". Mieux qu'une compilation. Ça démarre sur la pointe des pieds avec
"Maiden Voyage" au piano et Herbie de poursuivre sur sa lancée avec "Actual Proof" dont le traîtement
acoustique en révèle enfin la beauté, débarassé de ses masques parfois trop outranciers. Le jazz paraissait si
loin ces derniers temps. Puis c'est l'escalade ; "Spank-A-Lee", "Watermelon Man", "Butterfly"... La machine à
groove s'installe et commence à triper solide (les délires de Hancock sur "Chameleon", plus experimental que
ça tu meurs). Mais ce ne serait rien sans cette version à rallonge de "Hang up Your Hang Ups" (près de vingt
minutes !) où tout le monde s'éclate de bout en bout, délivrant une interprétation extrême et marathonienne de
ce titre déjà haletant à la base et dont vous me direz des nouvelles. Tout le monde est en très grande forme, et
en particulier Bennie Maupin, tout simplement magistral.
Note : 5/6
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HANCOCK (Herbie) : Secrets
Chronique réalisée par Progmonster
Ça lui pendait au nez, fallait bien que ça arrive un jour ou l'autre... Tout le monde y a succombé ; je ne vois pas
comment ni pour quelle bonne raison Herbie Hancock allait pouvoir, comme par miracle, résister à l'appel du
funk de salon qui, parce que dominant, projète depuis toujours une fausse image sur des productions de ce
genre autrement plus burnées. Notre afroman avait déjà flirté avec ce type de développement lénifiant par le
passé (je songe à certains titres sur "Thrust" et plus encore "Man-Child"), mais il y a ici des signes qui ne
trompent pas, voire des revirements impardonnables. "Doin'It" semble indiquer que le claviériste ne compte
pas changer de direction d'un iota ; mais quand surgit le refrain abominable, indigne, on comprend que la
cause est perdue. À cela s'ajoute du chant, des choeurs, on ne sait plus très bien, on ne veut même pas le
savoir, et subitement on se met à penser que "Thrust" et "Man-Child" n'étaient pas si mal que ça... Pour
poursuivre dans la grande tradition des relectures de son répertoire, c'est "Cantaloupe Island" qui cette fois se
fait charcuter sur la table d'opération ; méconnaissable, l'intervention chirurgicale lui donne des airs jamaïcains
prononcés qui n'ont de raison d'être que dans le seul soucis d'être à la pointe de la mode. Aussi peu
passionnant que du mauvais Weather Report, "Secrets" aurait bien pu le rester, secret, que personne n'y aurait
trouvé le moindre inconvénient. Disque estival, disque de saison, disque de mode qui se démode. Alors, à
moins que vous me réclamiez à corps et à cris les chroniques des disques tendance disco enregistrés par la
suite par Herbie Hancock (mais j'en doute), si vous n'y voyez pas d'objection, je vais donc, à partir d'ici,
m'octroyer le droit de procéder à un petit tri sélectif afin de faire ressortir la substantifique moëlle de ce qu'il
reste encore à découvrir dans la discographie bigarrée de ce diable de caméléon.
Note : 2/6
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HANCOCK (Herbie) : Directstep
Chronique réalisée par Progmonster
Au milieu de cette ribambelle de pochettes colorées et de portraits qui finissent par devenir kitsch avec le
temps, "Directstep" apparaît comme une anomalie. L'observation dans le détail des notes de pochettes nous
informe sur la genèse de cette réalisation pas courante. Pour faire court, on pourrait presque considérer cet
album comme une commande, un coup d'essai dans le vide qui ne doit son existence qu'à la volonté de l'artiste
à se frotter aux nouvelles technologies. En l'occurence, celle de l'enregistrement direct-to-disc qui consiste à
directement graver sur support numérique ce que les musiciens jouent. Dire Straits s'était bien associé à
Philips pour le lancement du cd et du dcc (arf, qui s'en souvient encore du dcc ?) ; la démarche de Herbie
Hancock est sensiblement la même et investit donc les studios Sony de Tokyo pour emballer en deux jours
cette petite demi-heure sans enjeux particuliers. Indirectement, ce procédé a de bons côtés ; c'est que,
enregistré dans les conditions du live, Hancock fût bien obligé de repenser son implication au sein du groupe,
ce qui explique la présence d'un second claviériste en la personne de Webster Lewis, chargé de rajouter une
louche d'effets supplémentaires que les mains trop occupées du leader ne pourraient gérer en même temps. Du
coup, on se retrouve avec un album de fusion funk un peu complexé, où l'on sent que le moindre écart de
conduite ne sera pas toléré. Exécuté avec talent mais sans véritable esprit. Pas question de se fouler outre
mesure ; c'est la raison pour laquelle Hancock en profite pour nous donner une nouvelle version de "Butterfly"
ainsi qu'une autre du toujours aussi mièvre de "I Thought It Was You" tiré de l'insipide "Sunlight" paru plus tôt
dans l'année. Seul l'inédit "Shiftless Shuffle" tire son épingle du jeu, sauvé in extremis par un toujours aussi
brillant Bennie Maupin. "Directstep" nous présente donc une facette beaucoup plus modeste de ce funk
qu'Herbie Hancock cultive depuis presque une décennie. En cela, "Directstep" est une curiosité.
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Future shock
Chronique réalisée par Progmonster
"Future Shock" est autant l'enfant de Bill Laswell que celui de Herbie Hancock. Après avoir inutilement tourné
en rond et s'être enfoncé disques après disques dans la médiocrité, mélangeant, sans trop savoir comment,
sonorités synthétiques derniers cris, electro funk ampoulé et vocoder emprunté à Zapp, notre pianiste jazz a
tenu à s'entourer de sang neuf pour redonner un coup d'élan à sa carrière qui en avait bien besoin, c'est le
moins que l'on puisse dire. Toute l'équipe Material est conviée (Michael Beinhorn, Anton Fier, et en renforts les
fidèles seconds Nicky Skopelitis, Sly Du185ar, Aiyb Dieng, déjà aspirés dans la galaxie Laswell) pour un résultat
finalement très en deça des espérances mais qui aura au moins eu le mérite de déboucher sur une vision que
l'on qualifierait de moderne aujourd'hui mais qui en son temps passait pour tout simplement futuriste ; je parle
bien entendu du tube mondial "Rockit" et son clip inoubliable sur le succès duquel Hancock va s'appuyer pour
aligner d'autres albums dans la même veine, sans jamais parvenir à égaler l'original. "Future Shock", pour
l'effet mode, c'est donc un peu "Head Hunters II", avec dix ans de plus dans les dents. En tout bien tout
honneur, ce nouveau succès inespéré aurait dès lors difficilement pu dissuader le claviériste de changer de
stratégie. Des titres comme "Earthbeat" ou "Autodrive" par exemple trahissent l'importance de l'apport
véritable de Material en ce qui concerne la réalisation de l'album, mais ces sonorités plastiques terriblement
datées ne tiennent tout simplement pas la route face à "Rockit", seule véritable réussite du disque, intemporel,
et peut-être même - qui sait ? - accidentel... Et puis, la reprise de Curtis Mayfield qui donne son titre à l'album
fait elle carrément pitié. Tout ça pour dire que je ne pouvais pas passer sous silence ce disque, rien qu'à cause
de ce titre emblématique de toute une génération. Essayez de le pêcher sur une compile quelconque mais
évitez l'album.
Note : 3/6
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HANCOCK (Herbie) : Future 2 future
Chronique réalisée par Progmonster
Septembre 2001. Pas de bol. Herbie Hancock aura mal choisi le moment pour tenter de revenir au devant de la
scène avec un album nostalgique comme on en attend de toutes les vieilles gloires en manque d'affection ou
de thunes, parfois elles confondent les deux. Après avoir tâté du classique en compagnie de Chick Corea et
après avoir jeté l'éponge, admettant, un peu tard, que Keith Jarrett faisait ça beaucoup mieux que lui, après
moultes réunions en commité plus large ou plus restreint avec ses vieux comparses Wayne Shorter et Tony
Williams, après enfin être tombé lui aussi dans l'exercice des reprises pop façon jazz ("New Standard" en 1995),
les deux seules alternatives qui s'offraient à lui c'était soit tout arrêter, soit reprendre à son compte le credo
"c'était mieux avant". Increvable, notre homme a bien entendu décidé de poursuivre. Regardons à présent si
nous avons de bonnes raisons de nous plaindre de ce choix... Avec un titre tel que "Future 2 Future", Hancock
s'amuse à brouiller les pistes ; en rappelant Laswell, le voile de mystère se lève sur l'un des deux futurs dont
l'artiste voudrait nous parler. L'autre futur, c'est encore dans le passé qu'il va aller le piocher, en remontant
jusqu'à "Sextant" puisque le gros morceau de l'album porte le doux nom de "Virtual Hornets". C'est en tout cas
ce que semble vouloir nous indiquer les deux parties de "Kebero", généreux en gouttelettes de piano
électrique. Mais grâce au carnet d'adresse étoffé du bassiste, "Future 2 Future" hérite d'un casting up-to-date,
mis au goût du jour des dernières tendances ; drum'n'bass à la Roni Size sur "The Essence", hip hop sur "This
is Rob Swift"... Hancock bouffe vraiment à tous les rateliers pour essayer de prouver à tout le monde - et
peut-être lui en premier - que Monsieur reste à la pointe. Pour tout futuriste qu'elle soit, on retiendra surtout que
la méthode est, elle, avant tout on ne peut plus opportuniste. L'album contient tout de même quelques réussites
- avec un tel casting, le contraire aurait frisé l'inacceptable - mais aucune magie ne s'opère au fil des titres, mis
les uns derrière les autres sans cohérence, sans âme, dans des transitions parfois trop boîteuses.
Note : 3/6
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VAN DER WOUDEN (René) : Recreation
Chronique réalisée par Phaedream
Ce nouvel album de René Van Der Wouden est issu d’une session de studio durant l’été 2004, un peu avant Pro
Sequentia. Tout à fait conforme avec son titre, Recreation m’apparaît comme un album léger. Le synthésiste
néerlandais semble s’amuser en mélangeant les genres et les époques. D’austère il peut passer à la frivolité, et
vice versa, donnant un album coloré, sans frontières et sans encadrements, un peu comme les gosses qui
s’amusent en récréation.
Zigzagante, l’intro de Recreation est métal contre métal, jusqu’à une très belle ligne synthétique se subtilise en
violon et dessine une mélodie classique aux notes hautes et harmonieuses. Sous l’effet tendresse de cette
mélodieuse intro, où les souffles violonés se perdent dans le temps, des notes volontaires frappent une
séquence répétitive qui ondulent ses nuances sur des stries synthétiques éparses, qui survolent une structure
rythmique sobre. L’intro de Recreation 2 est plus dramatique avec ses notes sèches qui entrecroisent ses
équivalences séquencées. Un clavecin perce un nuage synthétique dense qui flotte doucement jusqu’à ce que
la structure s’anime sur un rythme plus débridé. Strates mouvantes et émouvantes entourent ce morceau aux
intonations variées. Sur Recreation 3, on a l’impression d’entendre un accordéon qui s’harmonise avec une
séquence fluide ondulante. Un beau moment où une nuée d’accords, de différents instruments, s’entrecroisent
avec émotion et réceptivité. Le rythme devient plus saccadé, sautillant sur une belle ligne synthétique qui
serpente les séquenceurs aux émanations syncopées et nerveuses, que les lourdes strates de René Van Der
Wouden caressent avec la passion de notre écoute. Sur des pulsations ventousées, Recreation 3 diminue son
intensité sur une finale plus accablante, avec l’arrivée d’un violoncelle aux souffles amers.
Sur Recreation 4, les notes forcent contre vent pour tourner sur une superbe ballade électronique comme une
harmonieuse fantaisie. C’est beau, c’est fin et ça accroche à l’instant. Recreation 5 est un bouillon
atmosphérique qui prend fin sur le rythme très Jarrien et bien percussionné de Recreation 6. Un titre aux
percussions claquantes, aux tintements réguliers, au synthé coulant comme Jarre a oublié de faire. Un
excellent titre qui a tout pour faire un succès sur une compilation de MÉ rythmé. Les strates ondulantes et
paresseuses de Recreation 7 sont croisées de notes sombres qui résonnent dans une atmosphère cosmique
étoilée. Cette valse statique est traversée par une belle ligne clavecinnée qui berce le néant, avant d’être
foudroyé par un puissant jeu de percussion aux frappes solides et furieuses. Un solo de synthé ceinture ce
mouvement furieux qui se multiplie de solos aux sonorités diverses, pour retomber dans une tranquillité latente
qui se moule parfaitement au début harmonieux de The last Recreation. Ce dernier titre de cette session de
studio possède un léger intro, comme la finale d’ailleurs, atmosphérique très enveloppante. Entre les deux, il y
a du rythme, beaucoup de rythme qui file à fond de train sur un séquenceur saccadé par des pulsations et qui
forment ses modulations dans des structures harmonieuses, peu importe les cadences. Les riffs sont lourds,
les percussions froides et les pulsations filtrées par une ligne séquentielle qui ne manque pas d’imagination.
Par-dessus tout, le sublime synthé de René Van Der Wouden aux strates lourdes et enveloppantes qu’il peint
d’une tendresse si chaleureuse, qu’ils en sont uniques et qu’ils sortent des notes carillonnées, qui serpentent
un mouvement énergique et vivant, comme une étonnante récréation.
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Disponible au : http://www.renevanderwouden.net/
Note : 5/6
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SCALD : Vermiculatus
Chronique réalisée par Yog Sothoth
« Progressive sludge grinding doom ». Forcement, présenté comme ça, ça aurait presque de la gueule Scald
(ne pas confondre avec l’homonyme russe, ce Scald là est irlandais), ça donnerait même envie de s'y pencher.
"One instrumental track, 47 minutes"... Bon ok, c'est parti. Une écoute... deux écoutes... vingt écoutes (le promo
traine sur mon étagère depuis une éternité). Et voilà qu'aujourd'hui, 18 Janvier 2007, je ne sais toujours pas
quoi dire d'intéressant de ce disque. La musique de Scald se présente globalement comme une espèce de
zapping barré de tout ce qui marche à ce moment. On peut oublier le "Sludge grinding Doom", le son ici n'est ni
gras, ni crade, et se rapproche bien plus de dissonances et de structures Post rock adaptées à un son limite
Meshuggesque, ultra sec et rentre dedans. Une cassure rythmique… 3 mesures… un break planant… un petit
coup de pilonnage pour la forme… un trip psyché zarb… *Je me fais chier*… *Ah non, tiens là c’est sympa*…
*pfiou ce partage en vrille !*. Vermiculatus se traine pendant ses 25 premières minutes, (volontairement ?)
hermétique, (un peu) glauque et (surtout) complètement barré. Quitte à coller une étiquette, je me serai plutôt
lancé sur du « Free Progressive Power Metal », mais bon, ça sonnait moins dans le vent. Passé ce cap, le
disque bascule progressivement vers une espèce d’Ambient industriel parfaitement creux et insignifiant, à base
de bruitages lointains vaguement trafiqués, dont le seul résultat est d’accréditer la théorie selon laquelle le
début du disque tiendrait plus de la fumisterie pseudo conceptuelle que d’une véritable démarche artistique «
Progressive ». On se retrouve donc avec un album en demi-teinte, qui, de plus, n’ouvre pas vraiment de
perspectives pour le groupe, l’effet de ce genre de délire étant en général assez limité dans le temps.
Note : 3/6
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MAXXESS : Offroad
Chronique réalisée par Phaedream
Vous aimez la guitare? Les rythmes lourds, sur des riffs acérés, et, évidemment, les ballades? Voilà qui devrait
vous intéressez. Maxxess est ce guitariste Allemand qui a rencontré Axel Stupplich, de Pyramid Peak, lors d’un
festival de MÉ. Une amitié s’est développée entre les deux artistes qui ont réalisé Contact en 2004. Depuis,
Maxxess a réalisé 4 albums solos et ce dernier est, de loin, le plus rock, le plus lourd qu’il ait produit. De son
aveu, il veut s’éloigner des structures aléatoires de la MÉ pour forger un style plus près du rock progressif
pesant. Les équipements électroniques supportant les structures rythmiques.
Dès Pulse, la stridence des six cordes nous arrache les tympans. Il aurait fallu lire la pochette, Maxxess nous
sert une mise en garde; il a composé le cd le plus puissant, un défonceur d’amplis. Et de toutes évidences, les
riffs sont hyper lourds, excités par les percussions et des solos qui survolent les structures comme un synthé
tranchant qui coupe l’ambiance avec des accords secs, vifs et rudes. Un rock veineux au rythme absolu sur des
solos vrillants et bouclés où l’agilité des doigts dépasse presque la vitesse de la pensée coercitive. Un titre
puissant, assassin comme Adrenaline qui pourrait faire passer Eddie Van Halen comme sclérosé devant la
rapidité du doigté de Maxxess. Par contre, il ne faut pas penser que Maxxess nous balancent 9 titres sans
inspirations, juste pour faire du tapage. Dès Miracle, il démontre sa versatilité dans les modulations et les
évolutions des structures harmonieuses. Sans être une ballade, Miracle permute entre le rythme et le non
rythme, tout comme la MÉ, et la musique progressive d’ailleurs, sur un synthé qui se moule aux fluctuations
des passages. La pièce titre est un pur bijou de cette symbiose rock/électronique. Sur des boucles vaporeuses,
et des percussions métalliques feutrées, la guitare valse un soyeux solo planant qui déchire l’ambiance
brumeuse de l’intro. Le côté rock ressurgit avec des riffs crevantes sur un synthé enveloppant. Une union
parfaite, comme sur Crazy Blue Thing. Maxxess est étonnant avec cette structure ambivalente où la guitare est
aussi magique et agile que n’importe quel synthé. Un titre aux modulations surprenantes, aux effets sonores
saisissants, nappé d’un rock cru. Incroyablement bon Sleepwalk et Avebury-Henge, sont les deux plus belles
pièces de Offroad. Sur des rythmes ambivalents, où les passages lents sont d’une sensibilité bleusy, la guitare
de Maxxess explore les confins du désordre de cette union musicale sur des passages rythmés puissants et
tranchants. Slowmotion termine cet opus sur une guitare solitaire, enveloppée de beaux synths et soutenu par
de belles percussions. Une finale qui fait contrepoids à toute la pesanteur d’Offroad.
Offroad est le 1ier album de Maxxess que j’écoute, et j’ai été agréablement surpris. C’est l’équivalent d’un
album électronique, le synthé remplacé par une guitare. Une guitare hurlante, qui boucle ses solos avec une
sonorité stridente. Une tonalité unique à Maxxess puisque similaire à celle retrouvée sur Contact avec Axel
Stupplich. Un très bon opus qui mérite que l’on fouille un peu plus près la carrière de ce guitariste de feu.
Disponible au http://www.maxxess.de
Note : 4/6
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COMPILATION DIVERS : Père-Lachaise
Chronique réalisée par Marco
La nouvelle livraison Divine Comedy s'attache ici à retranscrire une atmosphère plus grave et funèbre qu'à
l'accoutumée. Un hommage à l'un des sites les plus visités au monde aurait pu se transformer en poncifs
écumant toutes les sonorités possibles d'une ambient sépulcrale. De même, les photos et le texte illustrant le
livret auraient pu s'adonner à une allégorie pompeuse et usée jusqu'à la corde. Heureusement il n'en est rien :
bien qu'au final les participants n'offrent ici qu'un vague aperçu de leurs capacités à créer des atmosphères
particulières (voire en-deça de ce qu'ils ont par ailleurs déjà produit), les huit parties de "Père-Lachaise"
s'enchaînent avec une fluidité assez appréciable, les boucles et les nappes déambulent inlassablement tel le
promeneur perdu dans les méandres du cimetière. L'occasion nous est également donnée de découvrir Project
Winter, seul inconnu de cette réunion, versé dans une ambient rituelle aux saveurs électroniques, assez proche
par moments de leur compatriote de Artefactum. Plutôt que d'appuyer ostensiblement le caractère mythique du
lieu (romantisme, personnalités de la littérature et des arts etc.) "Père-Lachaise" en esquisse plutôt les
sentiments et les pensées de ses visiteurs à mesure qu'ils croisent monuments de caractères modestes ou
démesurés, en lisent les épitaphes enorgueillis de formules latines ou de témoignages troublants par leur
dépouillement. Loin de toute pompe gothique tout en conservant l'essence de la mélancolie, les photographies
de Fabrice Billard abondent dans le sens d'une esthétique sobre et définitivement humaine et au-delà des
stèles. On regrettera simplement le petit nombre de ces mêmes photos. Un bon disque, honnête dans sa
démarche, qui manque quelque peu d'ambition malgré tout mais recelle le grand mérite de l'évocation sans
pathos. Mors Ultima Ratio.
Note : 4/6
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HOROLOGIUM : Songs for hunters
Chronique réalisée par Marco
Belle présentation que ce MCD au packaging sobre mais attractif. L'inépuisable Horologium cite Herman Hesse
et entend évoquer l'héroïsme par la mythologie de la chasse. Il n'est pas particulièrement question d'une
thématique guerrière ou d'une glorification quelconque de cette horreur, mais visiblement d'une métaphore sur
la prédation. Côté musique, la recette Horologium faite de collages d'arragements orchestraux et de samples de
voix ou de sons incongrus prend un tour assez inattendu. Si le charme opérait sur les oeuvres précédentes car
distillé par une approche plutôt personnelle, il faut avouer que les cinq compositions de ce "Songs for hunters"
relèvent beaucoup plus de simples collages qu'autre chose et par voie de conséquence d'une juxtapositions
d'éléments disparates qui ici ne font finalement pas très bon ménage. Petite déception, l'ami Grzegorz nous
gratifiant de nombreuses productions, considérons ce mini comme mineur, mais que cela ne devienne pas une
habitude surtout !
Note : 3/6
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DIE KRUPPS : I
Chronique réalisée par Marco
Ah Die Krupps. Qui n'a pas saisi l'occasion de se défouler sur les dance-floors sur l'EBM de "Germaniac", le
crossover "Metal machine music" ou les tubes des albums suivants ? Pourtant, Die Krupps existe depuis 10
ans quand Jürgen Engler décide de muscler son projet après la découverte du metal et notamment Metallica.
Après des débuts très industriels ("Stahlwerksynfonie")et entre autres un accouplement avec les rois de
l'électro-pour-faire-pompes Nitzer Ebb ("The Machineries Of Joy"), l'allemand débarque un beau jour avec un
mini-tribute aux Four Horsemen de San Francisco. Si l'on excepte Ministry qui aura su populariser le mélange
machines-guitares, c'est également à Die Krupps que l'on doit l'intrusion du metal proprement dit dans cet
univers froid et mécanique. Le tribute est ainsi très rapidement suivi en cette année 1992 par ce "I" à l'intitulé
emblématique d'un nouveau départ et à la pochette faisant également référence à un autre grand nom de
l'histoire du rock (je vous laisse deviner). La "Metal machine music" est née, incarnée entre autres par le
morceau addictif qui lui donne son nom. Les autres tubes de l'album, "The dawning of doom" (au riff repompé
plus tard par les Laibach-guitares du pauvre, Rammstein) "The power" ou "High tech/Low life" imprègnent donc
leur beat assez groovy de guitares qui se veulent mordantes mais entraînantes. Passons sur l'inutile (mais
amusante) cover de Metallica pour évoquer les plus atmosphériques et "dark" "Ministry of fear" ou "Disciples
of discipline", autre facette d'un groupe qui sait varier les ambiances. Hélas, et malgré l'attachement que l'on
peut éprouver pour cet opus somme toute sympathique, notons le manque incroyable de relief et de puissance
de la production qui ne rend vraiment pas justice à l'énergie et la conviction déployée par Engler et ses
accolytes (et pourtant, John Fryer est de la partie !). Un bémol heureusement rattrapé par l'excellente suite,
"The final option".
Note : 3/6
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COMPILATION DIVERS : Extreme music from Africa
Chronique réalisée par Progmonster
Susan Lawly est un label noise dédié exclusivement aux oeuvres de Whitehouse, groupe indus britannique
dont Marco ou Twilight pourront un jour vous parler dans des termes certainement beaucoup plus élogieux que
les miens. Enfin, quand je dis exclusivement... Presque ! Parfois, il leur arrive aussi de proposer des
compilations étonnantes. Ils ont entre autres initié la passionnante série "Extreme Music" à travers laquelle le
label nous permet de découvrir des bidouilleurs sans peur et sans reproche éparpillés aux quatre coins de la
planète. On a déjà eu droit aux volumes consacrés aux femmes de la scène noise, à la Russie, un autre - le
premier de la série - au Japon (jusque là rien d'étonnant), en attendant celui annoncé au sujet de la Chine (!).
Mais le plus étonnant de tous, celui qui vous décrochera à coup sûr la mâchoire, c'est celui consacré à
l'Afrique. Oui, vous lisez bien. Je dois bien l'avouer, même moi, au début, j'ai cru qu'il s'agissait là d'une vaste
blague tant nous sommes généralement à mille lieues de penser un seul instant que des marocains, des
angolais, des ougandais ou des sudafricains puissent aborder la musique en tant que matière brute, loin de
tout folklore et de toute tradition, mais, à contrario, farouchement ancré dans une attitude déconstructiviste
post moderne et extrême. Et c'est sans doute là l'intérêt premier de cette compilation ; faire tomber les
préjugés. Faute d'un manque cruel d'informations, je ne pourrais pas replacer les artistes ici présents dans un
cadre qui nous permettrait d'en appréhender beaucoup mieux le travail. Quoi qu'il en soit, "Extreme Music From
Africa" nous plonge dans un voyage palpitant, un des plus inédits et des plus étonnants qui soit, où pure noise,
indus et dark ambient se côtoient, loin, très loin des stéréotypes auxquelles on associe généralement les
musiques "dites" du monde, et ce malgré la présence inévitable - mais toutefois on ne peut plus discrète - des
percussions et des chants typiques. Grand prix de la découverte.
Note : 4/6
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NURSE WITH WOUND : Chance meeting on a dissecting table of a sewing machine and an
umbrella
Chronique réalisée par Progmonster
"Chance meeting on a dissecting table of a sewing machine and an umbrella" (super titre qui fait gagner pas
mal de lignes à un chroniqueur qui n'a pas spécialement grand chose à dire) est l'unique Nurse With Wound à
se rapprocher encore de quelque chose d'un tant soit peu familier pour l'oreille humaine. Un format dans lequel
il ne sent pas tout de suite largué et dont le fil conducteur est... la guitare ! Et principalement sur son premier
titre, "Two Mock Projections". Aussi étonnant que cela puisse paraître, à ses prémices, ce lieu d'expérience
collective qui deviendra très vite un espace totalitaire, s'encombrait encore de cet artefact hérité du rock et qui,
il faut bien l'avouer, fait tâche au beau milieu de ces abstractions malades et angoissantes qui vont très vite
définir l'identité même du groupe de Steven Stapleton. Un exercice finalement contre nature et qui, même sans
connaissance au préalable de ce que deviendra leur carrière par la suite, trahit un habillage forcé, la cruche
d'eau que l'on met dans son vin, pas spécialement pour aider l'auditeur à pouvoir mieux pénétrer l'oeuvre, mais
pour se rassurer, par peur d'avoir fait le mauvais choix. Le vrai Nurse With Wound se révèle une fois débarassé
de ce gênant invité sur la longue plage "Blank Capsules of Embroidered Cellophane" ; un cauchemar en noir et
blanc mit en musique par des passionnés de musique qui vraisemblablement n'ont aucune connaissance des
harmonies, ni aucun sens du rythme, mais qui savent parfaitement comment couper une barre de fer avec une
scie à métaux, comment forer un trou dans un mur, comment mal ranger la vaisselle, bref, comment faire du
bruit... Un happening sonore intéressant qui, même s'il s'exprime gauchement à travers les doigts
inexpérimentés de nos jeunes anglais, prouve malgré tout que la musique, comme la vie, se fout pas mal de
nos états d'âmes ; "Chance meeting on a dissecting table of a sewing machine and an umbrella" perpétue l'acte
musical, l'acte de créer. Et c'est là l'essentiel.
Note : 3/6
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ANTIGAMA / DEFORMED : Roots of chaos
Chronique réalisée par Saïmone
Antigama c'est du grindcore. Pour autant que je m'en souvienne, leur précédente production n'était pas
exceptionnelle, mais envoyait suffisament la purée pour qu'on retienne le nom de ces polonais (si ma mémoire
est toujours bonne). On les retrouve sur ce split avec un interessant morceaux de 12 min, aux antipodes de ce
que le groupe a pu nous offrir par le passé: fini les blasts, là c'est une sorte de descente dans une usines avec
le metal qui heurte une tôle rouillée; ambiance indus, voix distordue, guitare désarticulée, larsens, sons
electroniques stridents, noise. Ça impressionne, ça part un peu dans tout les sens, sans queue ni tête, avec
une ambiance du tonnerre de dieu, un peu malsain, un peu glauque, un peu drôle aussi – mais plutôt rire jaune,
étonnant, frais et vraiment surprenant ! Deformed quant à lui, nous fait du gore grind de base, chiant, inutile,
une boite à rythme mal mixée, une voix insupportable, on oublie ! Antigama: 5/6; Deformed: 2/6. Téléchargez
Antigama
Note : 3/6
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MISERY SIGNALS : Mirrors
Chronique réalisée par Saïmone
A la vue de la pochette, je m'attendais à un disque de pop sucreusement fatigant. On ouvre le livret, et la classe
à l'état pure: ces jolies minois qui sont défoncés, echymosés, sanguinolants, on peut pas s'tromper, ça va
poutrer. Gros son, gosier brûlant, double grosse caisse qui mouline bien, riffs épiques, on navigue dans des
eux troubles entre la facilité mélodique d'un metalcore et l'efficacité brute de gros bras à la Burnt By The Sun.
On dépolorera les arpèges MTV-esque mais on headbangera comme des sauvages lors des breaks entrainants
ou des mosh-parts-chugga-chugga à fumer un ours. Gras, gros, puissant, sans véritable fond mais dont la
forme suffit à nous mettre de bonne humeur. Cool !
Note : 4/6
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DEAD HEARTS : Bitter verses
Chronique réalisée par Saïmone
Signé chez Ferret (responsable de l'énorme split Luddite Clone / Burnt By The Sun), Dead Hearts erre dans les
mêmes méandres que son voisin de de label Misery Signals: du gros metalcore gras, aux harmonies ridicules
mais à la puissance de frappe interessante. Le son est là aussi énorme, mais on navigue dans de la mélodie
chewing-gum télévisuelle et la grosse voix hurlée testostéronée, les choeurs guerriers et les accélérations
fatales. Le mélange est assez étrange, pas toujours très convaincant, n'hésitant pas à se vautrer dans la boue
du cliché « Amérique du Nord metalcore », mais arrive parfois à se relever pour courir à toute vitesse. Curieux,
dansant, facile et ennuyeux. Faites votre choix.
Note : 3/6
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SKALDIC CURSE : Pathogen
Chronique réalisée par Iormungand Thrazar
Introduit au groupe par l'excellente demo "Contagious psychic misery", c'est avec une impatience non feinte
que j'attendais le premier album de ce très bon groupe anglais. Le voilà donc enfin, paru chez Forgotten
Wisdom Production à la fin de l'année 2006 et intitulé "Pathogen". La force de ce groupe est de proposer une
musique ultra bien foutue, précise, dense et fraîche, la puissance de conviction est réellement palpable. Le
qualité du son est supérieure à celui de la demo mais reste tout de même raw sur les bords. L'autre gros point
fort du groupe est la voix de Woundz: puissante, présente et réellement efficace. Il dégueule littéralement sa
haine et s'impose comme un vocaliste talentueux. Cet album me fait parfois penser au « Zakon velesa » de The
Stone par bien des aspects: d'abord, ces deux groupes sont injustement méconnus, pour des raisons qui me
sont inconnues (la provenance peut-être).Ensuite, ils me semblent partager la même perception du black metal,
en tout cas ils le retranscrivent d'une manière asseez similaire, à savoir un black metal très mélodique mais qui
repose aussi sur des rythmiques puissantes et rapides. Ce fier assaut de black metal comporte quelques
excellentes pièces: je citerais pour ma part un "Again, the knives" inspiré et direct qui reprend là ou s'arrêtait la
demo, un "Slaughter the useless", magnifiquement introduit par un début calme à la guitare, tout d'un coup, la
horde s'énerve et on comprend notre douleur. Ce titre est d'ailleurs tout simplement le meilleur de l'album, voire
du groupe tout court. Il mêle à merveille accélérations meutrières et passages mid-tempo lancinants avec un riff
de break excellent. "Carrionfields" ne déroge pas à la règle avec de très bons riffs vicieux. "Onset of decay"
reprend la même recette que "Slaughter the useless", avec une introduction calme de laquelle la tempête va
s'imposer. L'album se termine sur un "Decomposing reality" de presque huit minutes dans la même lignée que
l’album, c'est à dire excellent. "Pathogen", premier album du groupe anglais Skaldic curse, dévoile aux yeux de
la scène un groupe qui dispose déjà d'une réelle identité et qui fait preuve d'une grande maturité dans
l'élaboration de ses compositions. Le combo montre une belle capacité à mélanger mélodies et violence à
travers un album homogène et cohérent. Un premier essai absolument excellent qui j'espère en appellera
d'autres.
Note : 5/6
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ENSLAVED : Isa
Chronique réalisée par Iormungand Thrazar
C'est presque un pléonasme que de dire que cet album a fait couler beaucoup d'encre. Pour certains fans du
groupe de la première heure, il ferait même office de trahison. La connerie a ses échos partout. J'ai même
entendu dire qu'Enslaved n'avait sorti que trois albums, à savoir les trois premiers. Trahi quoi au juste? Devant
le talent des musiciens qui composent ce groupe, la qualité de l'époque purement black metal avec "Frost" et
"Eld" notamment, le groupe se serait irrémédiablement enfermé dans un style trop cloisonné pour lui s'il avait
perduré dans cette direction. Puis est arrivé "Below the lights", qui fait aujourd'hui preuve de transition parfaite
vers ce septième album intitulé "Isa", premier à paraître chez Tabu recordings. Passé d'un black metal alternant
passages épiques et moments rapides, Enslaved a évolué d'abord avec "Below the lights" puis avec "Isa"
ensuite, vers un black metal racé, raffiné, avec des influences progressives dans les riffs et les voix claires.
Evolution: le gros mot est lâché. Mais comment ne pas prendre son pied dès le premier titre de cet album
"Lunar force": puissant, très bonne production, varié, réfléchi, ce groupe a tout. On notera également la
participation excellente bien que courte d'Abbath aux vocaux sur ce titre vraiment énorme. Le triplé qui ouvre
cet album suite à l'introduction "Green reflection" est réellement excellent et m'a tout de suite mis d'accord sur
la pertinence de l'évolution du groupe. On poursuit avec le titre éponyme et la superbe alternance dans le
refrain entre voix black metal et de voix claires progressives. Les puristes seront peut-être choqués: "Non, des
voix claires!", qu'ils aillent au diable pour ne pas savoir reconnaître le talent là où il se trouve. Superbe
"Ascension" également et ses effets aux claviers (encore deux mots qui choqueront les puristes) qui
soutiennent le morceau de manière remarquable, presque en arrière fond et pourtant bien réels: la sauce prend
à merveille. On continue avec un "Bounded allegiance" qu'on aurait pu retrouver sur "Below the lights" tant le
riff me fait penser à un titre de cet album. "Violet dawning" et son énorme introduction continue le massacre.
L'instrumental "Secrets of the flesh" (enfin il y a quand même un cri) me met à genoux avant le coup de grâce
final et les douze minutes de "Neogenesis" : un chant clair excellent avant un break typique qui sonne tellement
Enslaved. Plus que jamais, Enslaved met en avant une identité forte et palpable au travers d'une musique
intelligente, travaillée et talentueuse. Enslaved n'a rien trahi, il a simplement progressé à travers les années,
aussi bien au niveau de l'écriture que de la capacité instrumentale. Je plains ceux qui ne réussissent pas à
comprendre ça et considère injustement le groupe comme des vendus. "Isa" est un monolithe lumineux (il reste
un puriste dans la salle qui n'a pas encore vomi ?) d'où déborde le talent, la conviction, une puissance
d'évocation monstrueuse et des musiciens qui savent se remettre en question, proposer ce qu'ils aiment et pas
simplement ce que l'on attend d'eux. En bref, un grand groupe soutenu par un grand album.
Note : 6/6
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HARMS WAY : Oxytocin
Chronique réalisée par Nicko
On va faire concis, simple et efficace, parce que Harms Way le permet. Ce quatuor suédois joue du bon
rock/metal communément appelé stoner metal plein de feeling tout à fait dans l'esprit de Queens Of The Stone
Age, bref, du heavy metal à la Black Sabbath en plus moderne en quelque sorte, mais sans le génie de ces
derniers. Par contre, c'est clair que l'influence du groupe se situe directement vers les Reines de l'Age de Pierre
! C'est bon, rapide, efficace, pas bateau non plus, les fans aimeront sans problème, les solos de guitares sont
directs tirés de ceux de Toni Iommi. Bref, du bon, bien fait et sans prétention.
Note : 4/6
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PAGANIZE : Evolution hour
Chronique réalisée par Nicko
Voilà des norvégiens censés révolutionner le heavy-metal ! Rien que ça ! Mouais, on va dire que Paganize (à ne
pas confondre avec les séudois de Paganizer !) joue du gros heavy metal moderne, limite power metal par
moment avec des influences très classiques comme Queensryche (pour son côté froid), Helloween (mais ce
n'est pas non plus du happy metal, loin de là !) ou Judas Priest (période Ripper Owens, surtout au niveau du
chant et de l'atmosphère très moderne). D'ailleurs, je trouve leur album vraiment proche du "Demolition" des
britanniques. L'entreprise est louable, mais franchement, ça manque de rythme et d'intensité tout ça. Et
pourtant, c'est Trym, batteur d'Emperor et de Zyklon est-il besoin de rappeler, qui tient les baguettes. Non, ça a
beau être bien exécuté, la sauce a du mal à prendre. Il manque définitivement de la personnalité à Paganize. Ce
n'est pas non plus désagréable à écouter, c'est juste un peu redondant et on a déjà entendu ce type de heavy
metal 1000 fois en 100 fois mieux par le passé. Très moyen...
Note : 3/6
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CRAFT : Fuck the universe
Chronique réalisée par Nicko
Je vous préviens, je découvre seulement Craft ! Je n'ai pas eu la chance d'entendre ne serait-ce qu'une seule
note de leurs précédents albums. C'est donc avec des oreilles vierges que j'écoute ce "Fuck the universe". Au
moins, avec un titre pareil, on est prévenu, Craft ne fait pas dans la dentelle ! Et effectivement, ils sont black
metal jusqu'au bout des ongles. En fait, c'est p'tet ce que j'ai écouté de plus true Norwegian black metal (alors
qu'ils sont suédois !) ces dernières années ! Ils sont els dignes héritiers de Darkthrone selon moi en moins rock
n' roll. Attention, il ne s'agit pas d'une copie de la sainte trinité ("A blaze in the northern sky" - "Under a funeral
moon" - "Transilvanian hunger"), mais plutôt d'une suite à "Panzerfaust" ou "Total death" avec une touche plus
que présente de riffs bourrés de feeling d'influence Satyricon. Bref, ça reste dans la même famile en quelque
sorte ! Les ambiances crades sont bel et bien là avec une alternance marquée entre blast destructeurs et
mid-tempo briseurs de nuques, le tout soutenu par un chant bien extrême et convainquant (lorgnant du côté de
Satyr). Craft ne révolutionne rien, il joue dans la pure tradition du black metal des années 90 et c'est déjà pas si
mal surtout quand on voit les tonnes de merdes qui pullulent en metal extrême ces derniers temps...
Note : 4/6
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SENSITIVE CHAOS : Leak
Chronique réalisée par Phaedream
Leak de Sensitive Chaos, est la fusion des atmosphères. Sur la pièce titre, un synthé nonchalant traîne ses
notes de guitares virtuelles qui résonnent dans une atmosphère vide. Graduellement, ces accords sont rejoints
par un sax isolé et des percussions qui deviennent plus présentes, dans une ambiance de soft jazz abstrait.
Sensitive Chaos, c’est Jim Combs, la moitié de duo américain très expérimental TouchXtone. En Leak, il nous
présente des compositions écrites, et enregistrées en direct, au cours des 2 dernières années. Très
expérimental, avec une approche bien personnelle, le style de Sensitive Chaos reflète son identité, du chaos
sensible. Prenons Android Cat Dreams Of Mice. Des percussions, style bouteilles, carillonnent dans une
ambiance placide. Doucement, un synthé s’amène avec ses notes douces et caressantes. Graduellement tout
devient plus intense ; d’étranges ronflements se mélangent aux notes basses et rauques, sur un beat des îles
au mouvement très sensuel. Une belle structure aux modulations bouclées, qui reviennent sur le même sentier
harmonieux, ajoutant toujours un élément musical nouveau, montrant d’un cran l’attente et la curiosité. Et
l’attente vaut le coup. Une belle mélodie, aux faibles carillons, émerge d’une nuit bercée par les souffles du sax
de Brian Good. Starry Night est un superbe titre qui monte en crescendo avec de puissantes percussions.
Superbe, le sax se lamente sur un rythme hachuré, par un beau jeu de percussions et des strates discrètes qui
entrecroisent ce mouvement envoûtant, où la petite mélodie carillonnée flotte toujours dans l’air ambiante
d’une nuit que l’on souhaiterait tous les jours. Le début de Painting Earthtones In Orbit exploite les notes
carillonnées avec des voix synthétiques inaudibles. Le rythme se dessine en boucle sur des percussions
feutrées et une bonne ligne de basse. La cadence augmente sur des nappes synthétiques qui semblent se
chercher, mais les percussions tablas martèlent le pas sur un rythme confus, plus près d’une atmosphère
statique que d’une évolution séquencée. Court, mais fort réussi Bullet Train aurait pu faire l’intro d’émissions
d’aventures et policières de ma jeunesse. Les percussions sont incroyablement mordantes. Une petite minute
qui passe bien. Nightshift At The Baby Mecha Nursery est le seul titre studio de Leak et termine dans la même
atmosphère harmonieuse et carillonnée qui a fait le charme de ce premier effort de Sensitive Chaos.
Leak de Sensitive Chaos est un album de MÉ expérimental. Les rythmes se balancent entre les notes d’un
clavier carillonné et des percussions aux essences et provenances variées. Avec une structure nettement plus
abstraite que la MÉ conventionnelle, Sensitive Chaos parvient à maintenir un niveau harmonieux qui captive
l’attention. Et un titre comme Starry Night n’est pas à la portée de n’importe quelle plume. Un très beau titre,
dans un album qui se dompte assez aisément. Pour amateurs de musique expérimentale, avec un côté très
harmonieux.
Note : 5/6
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COX (Ben) : On Water
Chronique réalisée par Phaedream
Écouter du Ben Cox, c’est comme entrer en contact avec un monde musical paranormal. Tout est obscur,
fortement nuancé sur des atmosphères sombres et ténébreuses, qui toisent quelques versets mélodieux,
comme des rayons de soleil dans des pénombres caverneuses. Et, qui dit sombre, ne dit pas nécessairement
ennuyeux, bien au contraire.
Un doux piano croise les accords d’une guitare sur un sourd bourdonnement. Depuis les vapes d’un monde
souterrain, Anhinga laisse filtrer des accords mélodieux qui hantent doucement les nappes synthétiques
sombres qui survolent une quiétude intrigante. On Water est ce qu’on appelle un album de musique ambiante et
sombre. Un monde caustique où les sonorités sont lugubres, effleurant une sensibilité morose.
Une ambiance à la fois sombre et tendre, comme les voiles de Merganser, où les accords d’une guitare
électrique rencontre une trompette errant sur une belle basse moulante. Un beau mouvement qui filtre une voix
fantomatique à l’ombre des souffles du sax. Le sublime piano de Willet, qui danse parmi des notes carillonnées,
est une raie de soleil dans cette noirceur apprivoisée. Même sous les tonnerres et la pluie, cette exquise
tendresse berce nos illusions, nos pensées secrètes que seul la noirceur peut révéler. Carrousel imparfait,
comme l’auteur l’a si bien sculpté, les abrogations des cycles harmonieux n’entachent en rien sa sublimité.
Moins mélodieuse, l’abstraite procession de Gannet est comme un lent tourbillon cosmique. Atonique Grebe
est une collection de sonorités où des segments d’accords, principalement de guitares, croisent des effets
sonores immobiles, des pulsations sans vie. Comme si un paysage chimérique se déroulait devant une
animation d’ombres chinoises.
Des souffles de trompettes s’entrelacent aux sombres nappes du synthé absent de Plover. Un titre qui
progresse avec les souffles du néant, modulant de belles et harmonieuses exhalaisons d’une trompette
solitaire. Pray for Rain fait entendre les premiers élans animés de On Water. De belles percussions manuelles
moulent un rythme sensuel, qui gonfle sur un mouvement hésitant, incertain. Initié par une intro de guitare,
Pray for Rain revient à ses sources pour solliciter une autre envolée exploratoire d’un monde aux illusions
sonores plus complexe qu’irréel.
Intrigant, pas tout à fait dénué d’intérêts, cet album de Ben Cox est une impressionnante incursion dans le
monde de la musique abstraite. Une collection de sonorités qui se moulent à des rythmes lents et des
atmosphères sombres, dans un climat de mélancolie prétexte à réflexion. Une bonne surprise qui élargit encore
plus mes horizons culturels.
Disponible chez http://www.lotuspike.com/index.php
Note : 5/6
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PADILLA & ZERO OHMS : Path of Least Resistance
Chronique réalisée par Phaedream
Craig Padilla et Zero Ohms est la rencontre d’un synthésiste qui peut jouer autant de finesse, que de puissance,
et un flûtiste de renommée nationale qui unissent leurs visions pour le plaisir des sons, des sens et de nos
oreilles
Comme un violoncelle esseulé, caressant ses cordes de solitude, un fin et sombre bourdonnement ouvre
Leaving This Shadow Of Heaven. Les fins synthé de Padilla suivent ce cortège astrale au bourdonnement
continu, à laquelle des chœurs austères se coulent. Un mouvement opaque, visité par une guitare aux
modulations contorsionnistes qui échappent ses complaintes dans une noirceur cosmique qui se transporte
sur The Everything That Is No Thing. De ce silence à la froideur spatiale, s’échappent les premières pulsations
séquentielles de Craig Padilla. Les notes lourdes résonnent dans ce silence magnétique pour suivre une
ondulation sombre, qui est entourée de stries synthétiques éparses et d’effets sonores cosmiques. Souple et
fluide, le synthé harmonise ses accords en de beaux solos qui se lovent à une séquence rotative qui
progressive sur les percussions qu’elle dessine pour se frayer un escalier vers le néant de Hollow Dreams Of
Worlds Passed. Un titre d’une lourdeur spatiale, où l’on perçoit les vibrations des lentes modulations qui
toisent des passages d’une tristesse amplifiée par le chœur de sirènes galactiques qui s’assombrissent sur un
lourd bourdonnement. Un bruit sourd et guttural qui se mue en onde cristalline sur Realizing The Infinite.
On peut conclure que Frequencies [Of Life] est la phase 2 de Path of Least Resistance. Un fin mouvement
spatial, se dessine sur une mer de tranquillité. Des passages agités secouent les ondes spatiales, provoquant
des remous statiques aux sonorités abstraites, comme des feux follets en captivité. Derrière cette plaine
atonique, nous entendons une superbe ligne synthétique, lustrée de chants d’oiseaux. Sur un séquenceur
souple, The One ondule sur les réverbérations synthétiques de la dernière tendresse de Frequencies [Of Life].
Fluide sur un mouvement saccadé, le rythme
The One devient une obscure danse tribale sur des rythmes incertains où des cercles sonores virevoltent dans
une frénésie circulaire. Flûtes et strates synthétiques s’entrecroisent sans vraiment avoir d’effet, tant la
lourdeur semble concentrée dans l’œil de ce cyclone virtuel. L’intensité diminuant, nous entendons la flûte
errer au travers ce champ de batailles sonores où multitude d’arpèges laissent filtrer leurs dernières notes.
Enchanteresse, cette flûte ouvre la pièce titre Path of Least Resistance, accompagné d’une guitare anonyme et
de faibles percussions. Une parfaite harmonie, aux inspirations asiatiques et aux frontières d’un nouvel âge
hautement mélodieux.
Lourd mais beau, lent et harmonieux; Path of Least Resistance navigue entre une MÉ Berlin School et une
musique ambiante sombre qui nous plonge dans l’univers hétéroclite d’un monde obscur et harmonieux. Craig
Padilla et Zero Ohms fusionnent 2 styles avec leur vision fantaisiste où tout se colle. Un beau cd, où les
amateurs de MÉ, tant Berlin School qu’ambiant, vont apprécier jusqu’à la toute fin.
Disponible chez http://www.lotuspike.com/index.php
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Note : 4/6
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SCHULZE (Klaus) : Miditerranean Pads
Chronique réalisée par Phaedream
Percussion Planante fut l’une des bonnes pièces du répertoire de Schulze dans ses années échantillonnages.
Un titre qui a joué longtemps dans mon baladeur, surtout dans mon auto. Sur Miditerranean Pads, Klaus
Schulze poursuit sa quête des échantillonnages amorcée avec En=Trance. Bien qu’on y retrouve des bribes et
des éclats d’opéra, de musique classique, les principaux samplers sont des percussions. Miditerranean Pads
est une affaire de percussions. Schulze exorcise ses démons d’antan avec la technologie d’aujourd’hui. L’effet
est monstre et multiplie les surprises sur un travail titanesque.
C’est d’ailleurs sur cet album, avec Decent Changes, que j’ai apprécié les 1ier collages phatosmagoriques de
Sieur Schulze et de ses orchestrations segmentées. Sur cette ré édition de Revisited Records, seulement 2 à 3
minutes additionnelles ont été rajoutées, l’original étant déjà près de la limite de temps; 70 minutes.
Decent Changes est un mouvement linéaire qui construit son intérêt sur ses percussions et ses nombreux
samplers. Le jeu des percussions est bien agencé avec la basse, donnant une structure rythmique solide qui
s’étalera sur plus de 30 minutes. Des violons, des strates synthétiques, du mellotron flûté et de brefs segments
de solos de synthés; tout est de mise pour assurer un rythme continu sur des percussions hachurées, aux
cadences incertaines sur une ligne continue qui ne subira qu’une à deux modulations. Un superbe titre, que
j’aurai raccourci, quitte à étirer les 2 pièces qui suivent.
Miditerranean Pads est une délicieuse romance dont la partition vocale est un échantillonnage de la voix d’Efli
Schulze, femme de Klaus. Sur un délicieux piano aux accords arraches cœurs, les voix soufflent l’amour, la vie,
l’attente et le désespoir dans mouvements aux intonations diverses et un piano divin. Un beau morceau où la
sensualité se combine à une sensibilité, sur un sax échantillonner. Schulze a pensé à tout sur cet album
percutant.
Percussion Planante est une ode à la percussion. Dans une fusion parfaite, où toutes formes de percussions se
serrent les pulsations et les vibrations qui s’échappent, pour injecter d’autres battements, d’autres puissances
réverbérarices sur un titre qui a les bras longs et qui ramassent tout ce qui se percussionne. Des voix, en
arrière scène sont les témoins privilégiés d’un mouvement de piano qui serpente et qui ondoie ses accords en
de superbes passages mélodieux, étoffés de fabuleuses strates et d’un jeu plus robuste. Vers la 20ième minute,
les percussions sont seules sur une modulation qui amène des lignes plus symphoniques, plus orchestrales
sur des frappes aussi claires, que saisissantes.
Bien qu’il ait été primé dans certains pays, donc les Pays-Bas, Miditerranean Pads est un album difficile
d’approche, mais si je vous garantissais la beauté, y croiriez-vous? Et pourtant, c’est un peu la malchance de
ce 21ième album solo de Klaus Schulze. Fidèle à son habitude, Schulze fuit la facilité pour incorporer des
beautés sublimables dans son œuvre. Ses œuvres, il les veut rebelles, difficiles d’accès. Car en fin de compte,
lorsque que le génie créateur nous habite, aurions-nous intérêt à l’étaler avec toute la facilité déconcertante qui
tue la passion?
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Note : 6/6
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LFO : Advance
Chronique réalisée par dariev stands
Si "Frequencies", album pilier s'il en est de l'électro britannique, apportait l'innovation de pouvoir s'écouter
chez soi et non seulement sur une piste de danse (ce qu'on ne peut pas dire de tous les disques de house de
l'époque), ce "Advance" est un pas de plus en avant (comme son nom l'indique...) vers une musique écoutable
at home, comme n'importe quel disque d'électro de nos jours... Mais un petit pas. Les collègues de label de LFO
en sont déjà plus loin. Qu'importe, le projet de Mark Bell continue son petit bonhomme de chemin, entre deux
productions pour Björk (et Depeche Mode...). Car à la sortie de ce disque, l'homme s'apprête à travailler sur la
charpente sonore de la cathédrale "Homogenic"... Un projet relativement ambitieux, qui déborde allègrement du
cadre de la pop ou de l'électro, pour aller toucher un grand public que Bell ne touchera jamais avec ses disques
à lui. Alors en écoutant ce "Advance" , bien des fans du disque suscité ont du rechercher les mêmes sons
extraterrestres, les mêmes habillages sonores cristallins... Ils ont du être déçus. Ceux qui ont écouté "I Go
Humble" de l'islandaise, eux, seront au moins surpris de constater que "Shove Piggy Shove" en est
l'instrumental (ou comment faire une face B collector pour les fans en faisant du karaoké sur un morceau déjà
existant). "Advance" reste un disque formellement basé sur le rythme, tout comme son prédécesseur. Résultat,
il est parfois bien aride en comparaison des autres productions Warp. Certaines pièces sont même
essentiellement rythmiques, décharnées de toute mélodie, comme ce "Jason Vorhees" (décidément ce disque
jette un froid) à la richesse polyrythmique indéniable, mais qui fait s'interroger sur la musicalité de telles
recherches : Où sont passés l'insouciance et le délire de "Frequencies" ? Bien plus froid qu'"Homogenic",
"Advance" est glacial. S'il fallait retranscrire musicalement une averse de grêle ("Forever"), ce serait
probablement le résultat obtenu. Les émotions sont bannies, et la mélodie avec. Alors c'est sur, quand les deux
réapparaissent le temps d'une pépite nocturne irréelle et baignant dans l'anxiété ("Goodnight Vienna"), ça
laisse sur le cul, comme dirait le sage. Mais pour le reste, les sonorités futuristes du premier album se font trop
timides. Le single, "Tied Up", entièrement rythmique, n'est qu'une débauche de beats surgonflés et
mécaniques. On pense à la dureté de l'EBM, également dans l'intro de "Kombat Drinking" qui s'achève en
nappes rêveuses typiques du style Warp, clôturant ainsi l'album par une digression musicale familière. Un
parfait avatar de la techno seconde génération (WipEout...), que ce "Advance"...
Note : 3/6
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COMPILATION DIVERS : ...All my dead friends
Chronique réalisée par Marco
Comme à son habitude et pour marquer un palier toutes les 50 références ou presque, le label culte suédois
livre sa nouvelle compilation (faisant suite à Flowers Made of Snow parue en 2004) à l’intitulé teinté d’humour
noir typique. Rappelant par son design (un beau digipack noir avec livret) et son éclectisme frappant la
fameuse compilation The Absolute Supper sortie en 1998, "…All my dead friends" a la saveur d’un retour à
l’âge d’or du label. Aux côtés des artistes de l’écurie CMI à l’actualité récente ou à venir apparaissent des
projets non résidents du label mais s’inscrivant par leur personnalité dans la logique de promoteur de talent de
Roger Karmanik, chef d’orchestre de cette macabre symphonie. Envolées martiales et néoclassiques avec
Coph Nia (qui offre un avant-goût de son futur diptyque rituel), l’inconnu Hrafn (au morceau prenant mais qui
traîne un peu trop en longueur) et For Greater Good. Un peu d’électronique avec Pimentola (intéressant mais
pas toujours pertinent, attendons l’album), les vétérans Beyond Sensory Experience et les Français
Tharmapsal, outsiders de cette collection avec un univers tribal efficace et véritablement personnel ; les
accords et litanies neofolk ou heavenly que le label a ostensiblement développé ces dernières années
s’incarnent pour le meilleur en Rome, All My Faith Lost, Medusa’s Spell et pour le pire en Decadence (sirupeux)
et Stormfagel (bancal et pénible). L’autre marque de fabrique de CMI, la dark-ambient, est ici représentée
dignement avec les excellentes participations de Foundation Hope, :Golgatha:, Letum et Atrium Carceri, ces
deux derniers relevant le niveau de leurs dernières productions plutôt fades. La diversité du label ainsi
habilement représentée confère à …All my Dead Friends une qualité que beaucoup de compilations du cru
oublient en cours de route, à savoir la capacité à simultanément se distinguer et rester cohérentes.
Note : 4/6
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ROACH (Steve) : Kairos
Chronique réalisée par Phaedream
La musique de Steve Roach est idéale pour visionner les territoires arides des déserts états-uniens et
australiens. C’est avec ses premières images que débutent Kairos. Malgré l’impression de déjà vu, sur Time of
the Earth, la musique de Roach est enveloppante et se marie superbement bien aux structures terrestres
aborigènes, qu’un jeu de caméra surplombe avec aisance. Dès que Soul’s Time se fusionne avec Core
Regeneration, les choses changent.
L’impression de déjà vu s’estompe net et la magie de l’animation assistée par ordinateur se moule intensément
à la musique de Steve Roach. Des lignes abstraites, multicouleurs où des formes moléculaires se
contorsionnent, se subdivisent pour épouser des sous formes et sous genres, sur une musique abstraite, aux
essences tribales nous rivent les yeux dans le fond de leurs orbites. Au dela des images, il y a la musique et
Core Regeneration est un titre agité avec des percussions tribales sur un mouvement de synthé qui fouette le
vent, comme ses instruments aborigènes que l’on tournoie pour simuler les sonorités éoliennes. Du bon Steve
Roach, qui nous plonge dans son univers atonic au coté des méduses décolorées sur Resonation Portal. Un
monde sous marin qui se transforme en karma tubulaire aux couleurs vivaces.
Etheric Planet est un superbe mouvement flottant, aux effets sonores disparates qui insufflent des modulations
à peine perceptible sur des images d’une sombre beauté. Il n’y a pas de meilleure façon pour décrire les
mouvements ambiants. Comme les subtiles ondulations, les dessins abstraits épousent les formes proposées
par les effets sonores et les modulations qui gravitent autour d’une onde spectrale. Lifeforming amène un
rythme plus alerte, sur des percussions et une basse encerclante, plus près d’un monde rock progressif que
d’un monde ambiant. Les formes se modulent à cet étrange intro qui se transforme en mouvement séquentiel
lascif et sensuel, dans un festival de couleur aux formes géométriques réinventées, qui s’ajustent à la prise
rythmique de Lifeforming. Un tourbillon séquentiel d’une rare intensité qui virevolte sur une structure à la
basse fluide et aux effets sonores décapants, sous l’aile protectrice d’une nappe de synthé lourde et
enveloppante. Un excellent titre, l’un des bons de Steve Roach qui, comme le vin, est encore meilleur avec
l’âge. Edgar, l’as-tu entendu celle-là?
Dès les premiers souffles de l’ombre des accords de Biogenesis, ma peau s’est transformée en celle d’un petit
poulet déplumé. Sur des structures aussi lointaines que Structures From Silence, Biogenesis parcours une
ligne délicieusement spasmodique sur des couleurs vives aux formes saisissantes. Dans une onde spatiale
intense fuse les stries analogues, comme du psychédélique réinventé. Womb of Light revient sur les traces de
Lifeforming, alors que The Great Return conclut ce grand voyage coloré sur les ambiances et nuances des
atmosphères lourdes que des dessins fondants, comme des substances organiques, transposent sur écran.
Ce superbe DVD contient un court métrage d’une dizaine de minutes, nous montrant Steve Roach en concert au
Japon. Un document unique qui contient aussi le cd de Kairos.
Après toute ces années, Steve Roach réussit encore à surprendre et à émerveiller. Kairos c’est 75 minutes
saisissantes où la magie de Roach se transpose dans les mains de concepteurs graphiques qui ont compris
l’essence et le magnétisme entourant le personnage et ses œuvres. Des morceaux comme Lifeforming et
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Biogenesis, l’un après l’autre laisse ses empreintes émerveillantes.
Note : 6/6
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ROACH (Steve) : Core
Chronique réalisée par Phaedream
Des accords de guitares résonnent sur un coussin synthétique à la tonalité basse. Atmosphère intimiste, où les
notes serpentent en écho sur une rotation exigu, Way of Now est une douce spirale striée d’ondes synthétiques
planantes. C’est aussi le titre d’introduction de Core, un des bons albums pour s’initier à la culture tribale de
l’univers très cosmopolite de Steve Roach.
Core est un fabuleux opus où Steve Roach démontre sa maîtrise des rythmes, des tempos variés sur des
percussions et ou effets sonores à apparences trompeuses. Car, dans cet univers, Roach manipule les sons
comme un chirurgien le scalpel. Way of Now n’était qu’une douce intro, sans provocation. Une entrée en
matière pour mieux vous saisir, vous envoûtez.
Avec Wings of Icarus, Steve Roach étend ses ondes synthétiques sur un rythme nerveux, aux percussions
chambranlantes. Mouvement minimaliste, aux ondulations discrètes, elle se fond dans les rythmes sombres
aux souffles spectraux de Train of Thought. Un crescendo sombre accentue la cadence sur des effets sonores
et percussions qui se jumellent aisément à la vision que l’on peut avoir d’un train en progression. Une
impressionnante trouvaille.
Resonation Revelation se glisse doucement dans notre mémoire auditive. De belles pulsations hypnotiques et
minimalismes qui augmentent en cadence sur des effets sonores gutturaux. Comme si on humerait l’air près
d’un marais qui sert de dépotoir à une substance chimique. Tranquillement, le synthésiste américain s’introduit
par envoûtement, car cette lascivité hypnotique se poursuit sur Core Reflection. Ambiante et intrigante, cette
procession éolienne se métamorphose en déluge de percussions qui tournoie sur des impulsions variées. Très
tribal, on peut certes l’associer à des peuples souterrains (Matrix) communiant sur des danses, comme des
êtres possédés, avec des lignes synthétiques qui fouettent l’ambiance. Un titre fort qui module son rythme sur
l’intensité, et non le mouvement, donnant l’effet d’une vague sonore qui ralentit tout métabolisme. L’impact
dans une aire d’écoute restreinte est phénoménal. Hyper Portal, que l’on entend vers la fin de Core, est
construit sur les mêmes structures tribales. Tout à fait renversant. So it goes continue les approches
minimalismes sur des pulsations ventousées, juste avant Endorphin Dreamtime. Un bijou de mouvement
séquentiel à la Berlin School, aux superbes boucles minimalistes qui nous poigne à l’âme. Traversé par de
belles nappes synthétiques et mélodieuses, la ligne se dédouble pour en former une autre qui se love et
s’entortille avec son innocence de nouveau venu. Évidemment, il s’agit de mon meilleur morceau sur Core qui
s’éteint dans les souffles abyssaux de Indigo Yearning.
Core est une incursion dans l’univers tribale de Steve Roach. Bien qu’il y ait du rythme, il y a peu
d’interconnexion avec les rythmes séquencés à la Berlin School. En fait, il y a très peu de mouvements
séquencés, comme Endorphin Dreamtime. Les rythmes sont issus de la magie de Steve Roach à manipuler les
sonorités, les percussions et les effets sonores tribales. C’est un album qui cerne bien les capacités et la
diversité sonore du créateur de Dreamtime Return.
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Disponible au www.steveroach.com
Note : 4/6
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HINT : Product topology
Chronique réalisée par Marco
C'est un doux euphémisme que de considérer ce vinyle de Hint comme le Graal de la musique expérimentale
française des 90s. Tiré à 500 pièces à l'origine (bien qu'il y ait des doutes sur la pleine distribution de
l'intégralité du pressage), cet album de "remixes" passé presque inaperçu au point que tout le monde
s'empresse d'en dégotter en vain un exemplaire représente une apogée dans la courte mais intense carrière du
duo angevin. Apogée, pour ne pas dire aboutissement éclairé et vibrant, illuminé par ce qu'on apelle plus
communément un éclair de génie. Epaulés par l'un des producteurs phare la scène alternative/expérimentale et
assistés de compagnons de routes, Hervé Thomas et Arnaud Fournier décident de "déconstruire" leur premier
album, "100% white puzzle", paru chez feu-Black & Noir. Et on peut dire qu'ils ne font pas les choses à moitié,
puisque de l'original ne subsistent que de rares empreintes (séquences, thèmes, riffs) certes reconnaissables
mais au final transcendées par cette nouvelle approche. L'essence-même de Hint, la volonté de se démarquer
de toute étiquette tangible tout en osant les références et les influences (Zorn pour le saxo par exemple) est
diffusée sur chaque pièce "déconstruite" ici. Un feeling ambient, presque rituel parfois ("My second hand",
"Eyes in axis-diamond is carbon mix"), trip-hop industriel mâtiné de séquences ethniques du plus bel effet
("Foetus in tenebris-claustrophobix mix), rock noise habité ("Eyes in axis-diaphonic interferences mix" ou
Sonic Youth sous trip) et la liste pourrait être encore longue tant "Product topology" se situe à la croisée de
nombreuses familles musicales. Ainsi l'appellation de "remixes" en devient complètement inutile, voire ridicule.
Hint repense et restitue son propre univers malade et claustrophobique en ouvrant une fenêtre sur une
approche macroscopique du monde. On en rêverait presque de documentaires du National Geographic
sonorisés par cet incroyable duo qui vient de se reformer pour produire l'accompagnement sonore d'un roman
français. Un disque vraiment hors du temps, immensément riche, poétique, expérimental dans tous les sens du
terme (remise en "cause" de l'oeuvre personelle, ouverture sur de nouveaux champs d'expérimentations) et
définitivement la meilleure oeuvre de Hint. Une pièce de collection de par son extrême rareté, mais par-dessus
tout un joyau inépuisable.
Note : 6/6
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HINT : Wu-Wei
Chronique réalisée par Marco
Chaque album de Hint est une preuve de plus de l'insaisissabilité de l'inspiration des angevins. Après l'urgence
chaotique et apocalyptique de "100% white puzzle" puis sa refonte totale avec le fabuleux "Product topology",
"-Dys" remettait le duo sur les rails d'un feeling aux contrastes enthousiasmants, passant de la furie hardcore
au dub le plus classieux. Il est donc logique que "Wu-Wei" à son tour témoigne d'une couleur nouvelle tout en
maintenant le cap. Le maître-mot de "Wu-Wei" semble à ce titre être "patchwork". L'album se caractérise par
une approche toujours plus hétéroclite, la part belle revenant ici à un feeling jazzy/lounge, comme sur le
déroutant "Ten thousand things" au beat electro/house et aux cuivres joyeux. Même si la tentative est osée et le
résultat objectivement crédible, cette orientation tranche véritablement avec les "canons" de Hint tels que
l'excellent "The process" ou l'esprit post-hardcore de "Mr Investigator", tandis que des morceaux comme
"From room to room" ou "Wu-Wei" foulent des territoires post-rock (cordes lancinantes, mélancolie, onirisme).
On constate également l'interférence du propre projet solo de Hervé Thomas, Fragile, sur le superbe "Beautiful
old Betty", ainsi que des prémices de Dead Hollywood Stars, projet electro-dub atmosphérique aux saveurs
"westernisantes" (auquel participe aussi Hervé), sur "Limitless space". Telle une coda minimaliste et plutôt
inutile, "Sounds of karma" met fin à ce voyage encore une fois unique en son genre, moins attachant et
galvanisant que le reste de la discographie de Hint, mais révélateur d'une personnalité incroyable.
Note : 4/6
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GOLGATHA : Seven pillars - Reflections on the myth of Thomas Edward Lawrence
Chronique réalisée par Marco
Le destin exceptionnel de Thomas Edward Lawrence alias Lawrence d'Arabie (1888-1935) est une source
inépuisable d'inspiration pour peu que l'on se penche sur sa vie. Archéologue, officier de l'armée britannique et
écrivain, l'homme est devenu un mythe au-delà des frontières orientales dont il ébranla la rigidité. Courage,
abnégation, amour pour un pays qui le marqua dès ses premiers pas sur ces terres délicates et arides : un
héros au sens noble et pur du terme. Il ne fallait pas plus pour que :Golgatha: s'attèle à retranscrire sa vie en
musique. Dans la continuité de "Kydos qui explorait le concept d'héroïsme avec un mélange de fascination et
d'amertume, "Seven pillars" focalise donc ce concept sur un seul homme, celui qui aida une grande partie de la
communauté arabe à retrouver une identité loin du joug européen et extrême-oriental, en participant aux
guerres arabes du premier tiers du XXème siècle. L'échec également, avec non seulement la fin du rêve
d'indépendance mais également l'instabilité et le dur retour à une réalité à laquelle il ne souscrivit jamais. Une
fois de plus :Golgatha: explore les contrées les plus diverses, folk et neoclassique ("The loss", avec Tony
Wakeford en invité) et une grande palette d'atmosphères épiques et solennelles, entre l'ambient évocatrice d'un
désert onirique et les salves martiales d'une épopée guerrière. Si la plupart des productions du genre manquent
cruellement d'émotions, la forme prenant malheureusement le pas sur le reste, les allemands savent distiller
des sentiments contrastés et véritables. L'émotion est souvent au rendez-vous ("Reflections I") et l'intelligence
avec laquelle les éléments ethniques et traditionnels sont utilisés participe significativement à l'empathie
générée par les arrangements. Ainsi nous sommes encore une fois plongés dans un univers
cinématographique (notons par ailleurs que Charlie Clouser a sélectionné :Golgatha: pour une édition spéciale
européenne de la b.o. du film "Saw III") à la crédibilité duquel s'ajoute la qualité des visuels. Une somme de
travail effective que l'on ne peut qu'apprécier, passionante, hétéroclite et imprévisible.
Note : 5/6
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TANGERINE DREAM : Live At The Tempodrome Berlin 2006
Chronique réalisée par Phaedream
Enfin, un concert de Tangerine Dream sur DVD. Depuis le temps que la rumeur circulait, Edgar Froese cesse de
faire languir une légion, de plus en plus croissante de fans (Oui Oui-TD n’as jamais été aussi populaire), et
donne son accord à la publication d’un DVD. En fait, Tempodrom est le 2ième DVD, le premier du catalogue
Eastgate étant Dante’s Inferno.
C’est un Edgar tout frêle qui prend place, devant l’auditoire. Muni d’un simple harmonica, il entreprend l’intro de
Astrophel And Stella. Un long titre obscur, aux émanations claniques, sur un rythme lent, assez sensuel
d’ailleurs, qui réchauffe autant la salle que les musiciens, avant que Ça Va, Ça Marche, Ça Ira Encore ne débute
le concert.
Pendant plus de 2:30hres, le band à Froese nous sert un menu musical qui couvre à peu près toutes les
périodes de TD, allant jusqu’en 77 avec Encore. ERt dans ce menu, il y a des titres que l’on a entendus
rarement, ou jamais en concert. Succès après succès, sur de belles prises de vue et 7 musiciens qui rendent
justice au patrimoine culturel de tangerine Dream. Pourtant, il y a quelque chose qui cloche. Je regarde Jerome,
dont c’est un retour lui qui avait quitté depuis 1½ an, et il est morose. Pourtant, papa semble se noyer dans le
bonheur. Je regarde les autres musiciens et il y a quelque chose qui accroche, qui fait que tout est artificiel.
Pourtant l’ambiance est surchauffée, les musiciens, Bernhard Beibl en tête et Iris Camaa trépignés
d’impatience. Flashpoint débute avec les percussions assommantes. Mais tout semble simulé, froid.
L’ambiance ne va pas avec le contexte et la chaleur des premières musiques de TD n’arrive pas à percer
l’ambiance froide et placide. Comme si tous avaient déjà hâte au rappel. C’est un groupe déconnecté, avec peu
de complicité et de passion qui défile les classiques de TD. Et là! Ça frappe, c’est apparent comme un nez dans
le front. Tangerine Dream fait du simuling, du lipsync, comme Milli Vanelli, comme Britney Spears!
Je me dis que c’est impossible. Que cela doit être un effet de réverbération qui crée une distance échotique.
Que le son des claviers de Thorsten Quaeschning est trop faible, qu’il est trop collé sur les percussions, que
ces mêmes percussions sont noyées, lors de l’intro de Scuba Scuba, par les synthés de qui…???
Je me renseigne auprès de sources fiables qui confirment mes dires. Tangerine Dream ferait du simuling
depuis au moins 2005, selon un témoin visuel au concert du Shepherds Bush Empire en 2005. Selon plusieurs,
Edgar aurait commencé ce manège en 1999, lors du concert à Klangart en Allemagne.
Il n’y a pas juste moi qui ait remarqué ce subterfuge. Ça susciter tout un débat sur les groupes de discussion
de Tangerine Dream. Les fanatiques étaient aux barricades, alors que des gens près de TDI ont recommandé de
changer de sujet, car il se pourrait que cela soit le dernier DVD de TD. Pas beau ça? Pendant ce temps-là, le
DVD du concert de SBE dort sur les tablettes, parce que le simuling serait trop apparent.
Un autre pavé dans la mare d’Edgar qui n’en finit plus de créer de la controverse. Lipsync ou pas, l’apparence
est trop évidente pour que ça n’agace pas. Ce DVD est d’une froideur totale. Un beau setlist; un bel écran visuel
avec de belles images, de beaux paysages sur une mise en scène platonique. Le surnombre de musicien,
éparpillé et perdu sur une assez grande plate forme, et une interprétation sans âmes ternissent l’image d’un
homme qui a ternit un nom légendaire.
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Tellement froid que même le ‘’rehearsal’’ nous montre un Yéti à forme humaine, alors que les autres membres
sont tous sourires. Car l’argent sera facile.
Note : 3/6
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TANGERINE DREAM : Live at The Guild Hall Preston 1980
Chronique réalisée par Phaedream
Les concerts de Tangerine Dream sont toujours des œuvres de collection pour les fans du groupe mythique,
tant de la première heure, que des dernières. Évènements culturels fort prisés, les concerts du Rêve Mandarin
sont toujours des festins de Prince, comme en témoigne l’engouement populaire d’une possible tournée
mondiale pour 2007, évènement qui coïnciderait avec les 40 ans d’existence du Dream.
Initialement, l’apparition des Tangerine Tree n’inquiétait pas les comptables de Froese. C’est lorsque des
enregistrements d’excellente qualité ont fait surface, dans les derniers Tree, que les grands argentiers de TDI
ont flairé la bonne affaire. C’est ainsi que depuis 2003, différents albums en concert du trio Allemand ont fait
surface dans les boutiques virtuelles de TDI et les boutiques spécialisées. En tout, 17 titres ou boîtiers,
totalisant près de 30 concerts, sont apparus officiellement depuis 2003. C’est beaucoup d’enregistrements,
beaucoup d’argent et des heures d’écoute pour les fans. Mais, croyez le ou non, aucun concert de la tournée
1980 n’était encore réalisé. Avec Live at The Guild Hall Preston, toute les périodes de Tangerine Dream sont
maintenant couvertes.
Live at The Guild Hall Preston a été longtemps un pirate difficile à obtenir. Sorti sous plusieurs noms comme
Space Truckin et Event Horizon, il a toujours été incomplet, jusqu’à l’apparition du Volume 62 des Tangerine
Tree en Août 2005. Un concert complet, foudroyant avec une excellente sonorité, dont Bootmoon obtenait les
droits. C’est le 6ième concert de la série Bootmoon produit pour TDI, le dernier sera Detroit 77. Cette fois-ci,
Bootmoon livre un double live honnête, avec une très bonne sonorité, mis à part les rappels; Chorozon (écrit
Chrozon sur la pochette) et The Football Museum, qui contient un excellent solo de guitare. Est-ce remasterisé
ou est-ce le volume qui fut ajusté? Je penche plus vers cette hypothèse, car il y a beaucoup de bruit de fond
sur Grange Park, où Johannes Schmoelling nous offre un beau solo de piano. Toujours est-il que ce double cd
‘’officiel’’ possède une clarté étonnante, qui ne justifie en rien le prix demandé.
Ce concert de Preston est purement explosif. Undulation I est le seul moment atmosphérique du concert. Un
tourbillon statique et métallique avec une séquence hyper nerveuse qui déboule à fond de train. La sonorité est
difficile à adapter, car les modulations sont rapides et les boucles de basses tournent sur un train d’enfer. Cette
première partie roule sur une structure où la basse est omniprésente sur des synthés acuités. Mais chaque
subtilité est bien captée et le génie séquentiel de Franke est démesuré, surtout sur Undulation II. Nous avons
droit à un Tangerine Dream au sommet de sa forme dans des interprétations sulfureuses de pièces inédites
comme Undulation et l’étonnant Silver Scale. D’ailleurs, le cd 2 au complet tourne autour de cet titre ravageur et
incisif avec une structure riche en séquences et basses Des pièces survoltées avec des séquences en feu et
des solos incroyables. Très peu de moments atmosphériques, pour ne pas dire; aucun. Du rythme, des
séquences lourdes et un superbe solo de guitare sur Diamond Diary.
Un bon enregistrement. Je ne dirais pas remasterisé, mais nettoyé avec de la puissance sonore ajoutée. Est-ce
que cela vaut le prix? Je vous laisse seul juge. Par contre; lorsque l’on sait comment Bootmoon a obtenu
l’enregistrement; lorsque l’on voit la qualité de la pochette, comparativement à celles dessinées par les fans qui
ont mis le projet des Tangerine Trees sur pied, je me demande qui est le vrai ‘’bootleger’’? ENTK!!!!
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Ça reste un grand concert, avec un gros setlist, où TD joue pour vrai. Avec passion, émotion et conviction,
Franke, Froese et Schmoelling nous offre une performance à la hauteur de leur réputation. Et c’est lorsque on
entend un concert de ce genre, que l’on saisit le mieux le génie incontesté du Dream.
Note : 5/6
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MISSTRIP : Sibylline
Chronique réalisée par Progmonster
Impossible d'écouter d'une oreille distraite le premier album de Misstrip. Les angevins confirment la volonté de
diversification du label Prikosnovénie, sans que cela se fasse au détriment de leur recherche permanente pour
des musiques "sensibles" aptes à stimuler l'imaginaire. C'est peut-être une nouvelle ère qui s'ouvre en effet
tant la musique gravée sur "Sibylline" apparaît comme un tremplin idéal pour un rayonnement international.
Commercial, le terme est lâché, mais il ne faut pas y voir quoi que ce soit de péjoratif... Commercial dans le
sens où nous sommes loin ici des chansons à tendance folk ou gothique qui ont pendant longtemps représenté
la marque de fabrique du label. Mais qui ont fini par l'isoler également, devenant au fil du temps un gage de
qualité pour une communauté qui ne conçoit pas de vivre ailleurs que dans l'ombre. On n'échappera pas pour
autant à certaines caractéristiques propores au genre ; un chant féminin, des ambiances prenantes et
brumeuses, un rendu pour le moins glacé. C'est que Misstrip envisage son art à travers le filtre du trip hop, un
courant du musical qui, je le pensais, s'était depuis longtemps dissolu dans des tas d'autres déclinaisons. Le
groupe cite à juste titre Sneaker Pimps comme point de référence, mais alors cela doit être celui de leur tout
premier disque, "Becoming X". Se contenter de cela pour décrire la musique de Misstrip ne suffit pas. Ses
beats électroniques pesants et menaçants, sa guitare saturée qui jauge avec clairvoyance l'utilité de son
intervention, ses nappes angoissantes tantôt travaillée via synthétiseur, tantôt à renfort de violon et violoncelle
(la plage titre) l'inscrivent dans une intersection à définir où se croiseraient, pêle-mêle, Archive, The Gathering,
Goldfrapp, Depeche Mode, Portishead, Interlock, Curve ou même Björk... Y a de quoi faire.
Note : 4/6
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MAPLEBEE : Hello Eve
Chronique réalisée par Progmonster
Et Priskonovénie d'enchaîner sans plus attendre avec le projet Maplebee, patronyme derrière lequel se cache enfin, plus pour longtemps je crois - l'anglaise Melanie Garside qui a déjà ondulé de la croupe dans Queen
Adreena, les Vertigo Angels et les Mediaeval Baebes (j'avoue ne connaître que ces dernières, surtout pour la
qualité plastique qu'elles dégagent, digne de figurer dans le calendrier Pirelli). La belle concentre tout ce qu'elle
peut faire sur "Something", le titre en ouverture, où elle assure toutes les fonctions, un peu à l'instar d'une
Émilie Simon, point de comparaison qui n'est point fortuit. La débauche toute relative de rythme qui y figure ne
sera pas appelé à se répéter davantage au cours de l'album. Par la suite, on vogue en effet assez rapidement
dans une pop teintée de folk au tempo plus posé, agrémenté d'effets electro jamais prédominants, dans un
registre toujours délicat, plus intimiste, mais pas dénué de petites trouvailles amusantes en terme de
production (les bruits de bulles et le ronronnement de chat sur "Bell Song"). En cela, évoquer Kate Bush ne
relève pas de la pure fantaisie ; Mélanie parvenant tout aussi bien à créer son propre univers, magique,
mystérieux et sensible à la fois ("Sadness Landed" à la guitare acoustique). À certains égards, son timbre de
voix s'en rapproche également ("Turn In"). Sur la longueur, selon que l'on soit absorbé ou non par ce doux rêve
ainsi projeté tout au fond de notre boîte crânienne, selon l'humeur du moment aussi, on succombera,
recroquevillé, au charme de "Hello Eve", pour sa sincère délicatesse, ou, au contraire, on finira par s'en
détacher peu à peu, faute de pièces qui parfois tombent dans la facilité en utilisant des tics d'écriture
communs. Un disque qui, pour l'heure, se prête comme un gant au climat hivernal qui secoue l'Europe en cette
fin janvier 2007.
Note : 4/6
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JOHANSSON (Pär) : The empty palace
Chronique réalisée par Progmonster
Scarlett Johansson a deux frères : Adrian, son aîné, et Hunter, son jumeau paraît-il (je le plains). Mais alors qui
c'est ce Pär ? Pär Johansson n'a rien à voir avec la famille de la starlette, et c'est bien dommage. Car avec son
talent pour dépeindre des ambiances moites et lugubres, il aurait pu facilement se faire pistonner par sa gourde
de soeur pour signer la bande originale d'un Alien 5 qu'on attend toujours. Un rapide coup d'oeil aux titres de
cet album nous indique que Pär cultive une certaine attirance pour tout ce qui est sombre, et je dirais même
plus précisément pour l'occulte. "The Empty Palace" réunit à vrai dire cinq compositions de l'artiste suédois, la
plus ancienne datant de 1998, la plus récente de 2006. On peut donc considérer cet album comme un condensé
de son travail. Et celui-ci ne se développe qu'à partir de textures lancées par le biais d'un multipiste,
confrontant les sources audio dans un enchaînement de bruit et de dissonances où les zones de silence ont
heureusement encore le droit de citer. Héritier des démarches contemporaines d'un Stockhausen pour la forme,
Pär Johansson refute pourtant toute approche intellectuelle sur le fond. Le théoricien fonctionne plutôt à
l'instinct, puisant son inspiration aussi bien dans les philosophies que dans la littérature (on aura pu le
constater). Cela nous donne de longues plages abstraites dont le côté glacial transparaît au travers des
traîtements électroniques qu'ils subissent de plein fouet, ouragans noise qui fondent sur vous sans prévenir,
avec un côté envoûtant mais indéniablement malsain que l'on aurait pu retrouver dans les exercices ambient de
la clique à Edgar Froese si seulement ils avaient signé un pacte avec le diable... De la MÉ satanique ? Et
pourquoi pas au fond ?
Note : 3/6
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HAERETICUS : Our legions fight religions
Chronique réalisée par Yog Sothoth
Une fois n’est pas coutume, je vais commencer cette chronique du premier album d’Haereticus par les
nombreux « petits détails qui fâchent ». Déjà, ce disque est doté d’un son de merde. Plate, sans profondeur ni
puissance, cette production qui sent bon le fait-maison handicape d’ailleurs sérieusement la musique, un Black
Metal très connoté Darkthrone / Nargaroth, avec ces fameux riffs ultra typiques du genre, tellement usés et
abusés de partout qu’ils sont presque tombés dans le domaine public. Alternativement rapide et agressif ou
plus mélancolique, le groupe enchaine les passages bateaux, d’où seul surnage le chant particulièrement
déchiré, unique vecteur du feeling malsain que les musiciens tentent d’instaurer. Alors bien sûr, tout n’est pas
complètement à jeter dans ce premier effort, et certains titres surnagent vaguement (« Sous la bannière des
légions hérétiques » arrive loin en tête avec son coté épique plus poussé, pas désagréable), mais dans
l’ensemble, le groupe sudiste se positionne davantage en queue de peloton qu’à l’avant-garde de la scène «
raw » Black française. Très dispensable.
Note : 2/6
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LAC PLACIDE : Closer
Chronique réalisée par Progmonster
S'il y a bien une chose qu'on ne pourra pas retirer à Lac Placide, c'est leur foi absolue en ce qu'ils font. Ils
s'appliquent avec conviction et assument leurs choix à cent pour cent. Leur nouvel album en est la preuve
éclatante ; avant même que l'on s'attarde sur la musique, le soin apporté à la présentation du disque, l'univers
graphique développé par le groupe montrent une nouvelle fois avec quel sérieux, mais aussi avec quelle
ardente passion, tout cela a été conçu. On peut faire des choses légères le plus sérieusement du monde. Le
contraire est vrai aussi, et la communauté du Lac de nous prouver que, contrairement aux apparences, ils
cultivent l'auto-dérision ("Prologue", "Déambulogue", "Ventrilogue"...). "Closer" est un album dense qui ne peut
pas s'appréhender après un survol désintéressé. N'oublions pas que la grammaire du groupe est pour le moins
particulière, peut-être difficile, mais en tout cas beaucoup plus inédite qu'on ne le croit grâce notamment à son
duo de voix, ce qui identifie peut-être le plus immédiatement leur style ; à la croisée des chemins entre métal et
progressif symphonique, Lac Placide refuse catégoriquement de se voir enfermer dans l'une ou l'autre de ces
catégories. C'est ce qui explique ses va-et-vient incessants entre les deux grammaires qui pourraient être
interprétées comme un manque de direction précise. Or, c'est justement ce que le groupe recherche. À alterner
les ambiances, à passer du chaud au froid, à vous prendre par la main et vous transbahuter avec eux dans des
aventures épiques. On sait toujours comment ça commence, rarement comment ça se termine... Au delà du
travail accompli que personne ne peut remettre en question, reste une affaire de goût. Ce n'est parce que l'on
aime quelqu'un que l'on doit être forcément d'accord avec tout ce qu'il fait et tout ce qu'il dit. En toute
honnêteté, sur "Closer", il y a des directions prises auxquelles je n'adhère pas, mais à côté de ça, il y a
également de franches surprises ("Clown de Dieu", exercice casse-gueule s'il en est où Lac Placide s'en tire
avec les honneurs, puis les couleurs chamarrées qui apportent du relief à des titres comme "The Trials",
"Epilogue" ou encore "Ventrilogue" qui se souvient de "The Clap"), si bien que, dans l'ensemble, le constat
s'avère être des plus positifs.
Note : 4/6
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ALPHA LYRA : Music for the Stars
Chronique réalisée par Phaedream
Alpha Lyra c’est le synthésiste français Christian Piednoir. Un artiste fortement influencé par Klaus Schulze
ainsi que la musique électronique analogue et expérimentale. Music for the Stars est son 1ier opus. Une œuvre
étonnante, entre le rêve et le rythme, sur un fond cosmique étoilé entre le mythe et le rêve.
Comme dans une rêverie, une poussière nostalgique qui arpente nos souvenirs, North Star ouvre ce 1ier opus
d’Alpha Lyra avec une promesse mélodieuse. Limpides et cristallines, les notes du piano défilent un superbe
carrousel harmonieux. Une guitare acoustique, tout aussi douce, promène ses accords à l’ombre du
mouvement pianoté qui obsède notre passion. North star est une soie, un superbe morceau pour nous
introduire dans le doux monde musical d’Alpha Lyra. D’un couloir astral, l’intro de Bételgeuse progresse sur
une fine pulsation basse, créant le lien entre l’atmosphère et le rythme. Envoûtantes, aux textures profondes,
de sublimes strates synthétiseuses flottent dans une ambiance nuancée, entre l’atonie et l’errance
harmonieuse. Tranquillement, la séquence s’éteint pour laisser le synthé valser avec ses accords et s’enfuir sur
des mouvements solitaires. Altaïr est hallucinant de profondeur. Une onde synthétique se déploie, telle un
phare sonore, pour ausculter la noirceur avec des gestes gracieux sur des carillons légers. Dense avec de
longs mouvements passionnés Altaïr rejoint les silences et harmonise son environnement sur de lourdes
portées synthétiseuses mystérieuses.
Deneb est le plus beau titre sur Music for the Stars et probablement d’Alpha Lyra. Une longue exploration
musicale sur des mouvements séquencés et des passages ambiants, ornée de belles mélodies pianotées et de
segments mélodieux qui gravitent en suspension dans les méandres atmosphériques, bien exploitées par les
synthés de Christian Piednoir. La 2ième partie est ensorcelante à souhait, avec sa faible pulsation qui cohabite
avec une séquence croissante, alimenté de strates gourmandes. Minimalisme et hypnotique, Deneb nous
transpose dans les bras de Morphée avec une infinie douceur. Un excellent titre. Un remix de North Star conclut
cette 1ière œuvre d’Alpha Lyra. Tout aussi mélodieuse, les chœurs remplacent les strates synthétiseuses, alors
qu’un clavier déboucle les notes célestes de cette superbe chimère mélodieuse. Aux portes du Nouvel Âge que
nous serions que je m’en satisferais, tant la douceur est céleste.
Music for the Stars est une ode aux étoiles. De Véga, connue aussi sous le nom d’Alpha Lyra, une constellation
de la Lyre aux couleurs bleutées lumineuses, Christian Piednoir nous y fait entrer avec toute la splendeur d’une
beauté Boréale. Ce 1ier opus est une ondée de fraîcheur dans le paysage de la MÉ. Une musique harmonieuse
sur de longs mouvements aux modulations nuancées, entre les atmosphères et les séquences mélodieuses,
dans une ambiance céleste.
Disponible au http://www.alpha-lyra.net/
Note : 5/6
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ALPHA LYRA : Aquarius
Chronique réalisée par Phaedream
Après les étoiles, Alpha Lyra trace sa musique dans un monde plus près de nous; le monde halieutique.
Aquarius est le fruit d’un projet ambitieux qui consiste à écrire une musique pour un livre sur les poissons
intitulé ‘’Aquarius…sous le signe des poissons’’. L’écriture de la musique s’est effectuée en parallèle avec celle
du livre, sur une durée de 5 mois.
Des chœurs éclectiques montent des profondeurs abyssales de Crystal River. Un mouvement doux, sur un
synthé aux flûtes discrètes qui se moulent aux chœurs frêles, comme des sirènes qui chantent les beautés
cristallines des reflets d’une eau limpide. Incroyablement douces, les ondulations synthétiseuses se font sur
des nappes célestes aux voix fluides. Un beau voyage sur des flûtes et des cœurs enchantés qui nous font
découvrir les vertus de la tendresse, dans un univers captif. Aquatic Dream exploite la même quiétude sur de
belles harmonies fragmentées. Le mouvement progresse dans un couloir échotique où une belle mélodie
séquencée ondoie dans les reflets bleutés d’une surface agitée par un vent synthétisé, comme les siffles du
printemps. Le lent intro de Aquarius se fond sur un sublime synthé ondulant qui tourbillonne avec douceur
parmi des notes coulantes et des chœurs aux harmonies célestes. Un beau moment envoûtant qui inspire une
partition mélodieuse croissante, sur des synthés aux évolutions lentes. Comme si l’abîme des couches sous
marines serait le meilleur endroit sous terre. Ocean Waves est une longue kermesse d’une douceur
mélodieuse, avec un synthé aux strates enveloppantes. Une belle séquence soyeuse anime ce tempo léger, qui
se subdivise pour créer une autre mélodie qui évolue harmonieusement autour des chœurs et des lourdes
strates synthétisées. Un superbe passage d’une douceur hypnotique et reposante. Les synthés sont superbes
et laissent traîner multitudes de stries et striures stridentes, spectrales et enveloppantes. De leurs
réverbérations, un piano secoue ses notes, accompagné de chœurs aux harmonies variantes, comme les
gardiens de l’entrée secrète de Ocean Waves. Une excellente pièce qu’on ne se lasse d’écouter, tant pour
relaxer, rêver que pour le plaisir de déguster une mélodie synthétisée dans une harmonie sonore parfaite.
Batanga Reef termine ce 2ième opus de Christian Piednoir comme l’ensemble d’Aquarius; une mélodie en
totale cohésion avec les valeurs musicales et harmonieuses de ce banquet musical pour un monde aquatique.
De la musique pour accompagner un livre! De la musique pour poissons! Faut avoir les convictions de ses
croyances, et à ce niveau Alpha Lyra me semble tout à fait crédible. Aquarius est un superbe album mélodieux,
aux mouvements plus progressifs et plus audacieux que Music for the Stars, laissant présager que le meilleur
reste à venir de ce synthésiste français. J’y ai perçu une sensibilité et un effet d’être à portée de rêves des
cours d’eau que l’on entend tout au long de ce périple. Un beau voyage musical, où l’ambiant côtoie le rythme
léger et minimalisme, laissant amplement le temps de s’asseoir et de se promener à vol d’oiseau.
Disponible au http://www.alpha-lyra.net/
Note : 5/6
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JUSTICE : Waters of Nazareth
Chronique réalisée par dariev stands
Tel un monolithe chromé, un char d'assaut rutilant lancé à toute vitesse sur les dancefloors du monde entier, la
machine Justice a tout écrasé sur son passage en cet an de grâce 2006. Rien ne semble arrêter la hype
infernale consacrant nos deux "futurs daft punk", fraîchement adoubés par la presse anglaise, pour qui la
capitale française semble perpétuellement fournir de la matière première... Faut dire, ils ne sortent pas de
n'importe quel garage, les deux futurs Daft Punk. Déjà, présentons-les : Xavier de Rosnay et Gaspard Augé. Pas
mal. On reste dans la noblesse quoi (succession du trône oblige). Et ils s'appellent "Justice". Arf. Manquent
pas d'humour. Bref, trêve de ruminations, il s'agit d'un brûlot cradingue d'électro survoltée et bien crasseuse,
au son qui semble évoquer une pourriture avancée, comme si un champignon friand de composants
electroniques s'était infiltré dans les synthés du groupe, histoire de leur donner cette texture déchiquetée et
furieusement organique, à faire passer n'importe quel son de guitare saturée pour un gazouillis pro-tools sans
âme. De quoi vous faire régler le son de la chaîne (ou du poste, mais le son ne se règle pas sur un poste,
dommage). Parlons donc de cet EP, Waters of Nazareth, qui contient bien sûr, le terrifiant morceau titre, deux
fois remixé, dont une par Justice eux-mêmes, ainsi que deux autres tracks, les très médiévaux "Let there be
light" et "Carpates". Que du bon, même si les remixes sont dans la grande tradition des remixes, c'est-à-dire
inférieurs aux originaux et fatigants. Ce bon vieux DJ Funk (pionnier de la booty house sur le label Dance
Mania) l'a bien compris, et il ne reste plus grand chose de l'édifiant "let there be light" après son passage,
puisqu'il ne garde que la structure du morceau pour proférer toute sorte d'injections stupides ("b-b-b-b-bounce
that ass on the floor") avec un débit Flavor Flavesque. Voilà, ça c'est du remix. Alors malgré leur
street-credibilty qui fleure bon le auteuil-neuilly-passy (tel est leur ghetto), ne crachons pas dans la soupe,
n'oublions pas que les meilleurs disques pop français de cette dernière décennie sont l'oeuvre de bourges
patentés nés "sous le signe du V" comme dirait l'autre. Tant qu'ils nous abreuverons de skeuds comme celui-là,
ça ira !
Note : 4/6
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NEBELUNG : Mistelteinn
Chronique réalisée par Sheer-khan
Nebelung fait dans le strict nécessaire. Nebelung fait simple,
cru... il fait de la folk triste et nue. Pas de toucher d'or pur,
pas d'arrangements brilliants : Stefan Otto et Thomas List font
avec ce qu'ils ont : une indéfectible naïveté, à l'origine de leur
souffrance, et un sens profond de la vérité. Nebelung ce sont deux
guitares qui croisent leurs arpèges, la voix sincère de Stefan
Otto, profonde et hésitante, et un violoncelle grave et essentiel
qui asseoit l'acoustique et souligne l'harmonie. Le duo allemand
décline ensuite ses sobres matériaux sur des structures simples et
pondérées, des mélodies automnales, ponctuées d'une percussion
minimum qui rythme la complainte comme le battement du coeur.
Languissante comme "Heimsuchung" et "Regen...", fière, marquée
d'un rythme volontaire comme "Abel und Kain" et "Heimatlos",
picturalisme minimal avec les deux instrumentales, la musique que
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renferme "Mistelteinn" est à déconseiller aux coeurs secs et aux
universitaires autoproclamés du language musical. Celui qui ne se
sait pas faible aura bien du mal, bercé qu'il est de ses
illusions, à trouver son compte dans cet étalage parfois simpliste
d'humanité toute nue. Car écouter, et aimer Nebelung, c'est
écouter son âme peureuse, accepter son visage qui se reflète dans
l'eau, et qu'une seule goutte de pluie suffit à effacer.
Note : 5/6
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MERGENER ET AMICI : Nox Mystica
Chronique réalisée par Phaedream
La beauté de la musique électronique, et des composantes qui aide l’art à développer les sonorités les plus
extrêmes, est la possibilité de créer, de sculpter des œuvres complexes qui n’auraient sans doute jamais vu le
jour, à cause des frais financiers qu’elles engendrent. Évidemment, ça prend le talent. Savoir écrire, jouer de la
musique et avoir une imagination débordante pour être capable de transposer ses idées, ses visions sur
musique, car il n’y a pas de paroles. Peter Mergener est un artiste très talentueux, doublé d’un incroyable sens
de l’écriture et d’une immense connaissance des équipements électroniques. Ex membre de Software, Nox
Mystica est son 11ième album solo, une pièce de théâtre musicale d’un réalisme étonnant.
Soleae Umidi ouvre sur une intro théâtrale aux strates violonées, sur un échantillonnage sonore d’époque. Rien
n’est laissé au hasard, des coups d’épées aux crépitements du feu, Nox Mystica étincelle d’authenticité dès son
ouverture qui se fond sur Spectaculum. L’orateur de l’arène s’adresse à la foule en Latin et Spectaculum
secoue les colonnes du temple avec son ouverture pompeuse, ses grosses caisses et ses clairons qui nous
transportent à l’ère Romaine sur un tempo lent, lascif structuré de superbes strates synthétiseuses. Les
synthés sont d’une richesse sonore renversante. Fort bien structuré, chaque commande à son rôle dans cette
somptuosité musical dense. De mouvements flûtés aux strates orchestrales à l’équivalence d’une section
complète de violonistes, Peter Mergener livre un opus complexe dans les détails, mais harmonieux et
mélodieux dans les résultats. Fornix et Aquae Ductus sont des couloirs atmosphériques aux effets sonores
caverneux, structurant une ambiance détaillée, comme si nous y étions, sur la discrète et douce voix
d’Alquimia. Des accords de guitare s’entrelacent à des strates qui épousent les mêmes modulations, alors
qu’une fine percussion échotique perce l’atonie du moment, alimentant un rythme fluide et mélodieux. Une
belle pièce aux émanations tribales d’une Grèce antique, relevé par le flair incontestable de Peter Mergener à la
réalisation. Plus rêveuse, avec une guitare qui coule comme une harpe, Nox Mystica est une douce mélodie
avec une flûte enchantée et des arrangements orchestraux valsant qui imposent un rythme romanesque.
Pyrricha et Cuniculus sont des titres aux atmosphères tribales d’une jungle inexploitée qui ouvrent les portes
d’une arène sanguinaire avec les pratiques souterraines des gladiateurs, parmi les rugissements de lions
affamés. Avec une intro sous le signe des lions, les souffles austères de Bestiarius jètent une ambiance
inquiétante dans l’arène. Des tambours insufflent une marche progressive sur des strates à la symphonie de
l’Olympe, qui croisent les combats sur des modulations harmonieuses, aux effets sonores de percussions
enclumées. Une flûte bédouine perce le silence de Aquarum Calentium Fontes et se berce avec la merveilleuse
voix d’Alquimia formant une belle mélodie céleste. Te Deum termine ce théâtre musical sur une mélodie
progressive, dont les notes sillonnent un mini tourbillon séquentiel, guidée par un excellent solo de guitares et
la voix d’Alquimia. Un titre très près du répertoire mélodieux et spatial de Peter Mergener.
Nox Mystica est une splendeur aux strates synthétiseuses étonnantes d’émotions. J’ai rarement entendu un
synthé à la fois si structuré et si mélodieux dans des titres aussi courts. Intense et symphonique, Nox Mystica
est une histoire agréablement contée sur des arrangements stupéfiants, et là je ne parle pas seulement des
violons ou des sections à cordes. Je fais allusion aux effets sonores, à ces petites percussions éparses qui
gravitent ici et là, aux percussions manuelles et tribales, aux clairons, aux processions somptueuses, aux
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flûtes mellotronnées et aux sublimes agencements avec la voix céleste d’Alquimia. Bref, un travail colossal ou
rien n’est laissé au hasard. Et, pour les fans de Mergener qui se sentent un peu perdus dans cet univers
structuré, Te Deum est un superbe titre à l’essence d’un Mergener qui ne peut renier son passé. Mais après 1 à
2 écoutes, vous retrouverez les modulations mélodieuses et les coups de génie du synthé magique de Peter
Mergener, qui a juste dévié de son cours pour nous présenter une merveilleuse pièce de théâtre musicale.
Note : 5/6
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DELTRON3030 : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
Deltron 3030 n'est peut-être pas le meilleur album hip hop de tous les temps mais il possède suffisamment de
personnalité que pour surprendre positivement toutes celles et ceux que cela arrange finalement pas mal
d'avoir une idée arrêtée sur la grammaire hip hop. Derrière ce concept fumeux d'un avenir désolé décrit par les
rares survivants d'une humanité décimée, on retrouve un trio de choc qui a beaucoup à prouver. Il y a d'abord
The Cantankerous Captain Aptos, plus connu sous le nom de Dan The Automator, qui reste en territoire connu
après les aventures tordues de Dr.Octagon en compagnie de Kool Keith ; il porte certainement sur ses épaules
l'univers décalé et décadent qui donne son identité au projet Deltron. On l'attendait au tournant et il prouve pour cette fois du moins - qu'il est un producteur avisé plein d'imagination. Il y a ensuite Skiznod The Boy
Wonder, pseudonyme sous lequel se cache le jeune prodige Kid Koala qui avait déjà mis tout le monde sur les
genoux suite à la publication de son premier album solo, "Carpal Tunnel Syndrome" sur Ninja Tune un peu plus
tôt dans l'année. Il confirme son talent, même si ses coups d'éclats sont ici distillés pour servir l'ensemble. Il y
a enfin Deltron Zero, le maître de cérénomie et véritable surprise de ce disque. Il s'agit de Del Tha Funkee
Homosapien qui, curieusement, était parvenu à se faire oublier dans les années quatre-vingt dix dans
lesquelles il était pourtant entré en force. Au-delà des délires intergalactiques et apocalyptiques qui parcourent
le disque ("3030" sur un sample du "Lux Aeterna" de William Sheller dont la présence ici a peut-être poussé à
sa réédition tant attendue en cd), l'ambiance doucement schizoïde laisse déjà transparaître par endroits
("Virus", "Time Keeps On Slipping" avec Damon Albarn de Blur, "Memory Loss") ce qui sera déjà la prochaine
étape de Dan The Automator et sa fine équipe : Gorillaz.
Note : 4/6
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DYSRHYTHMIA : Barriers and passages
Chronique réalisée par Progmonster
L'histoire qui me lie à Dysrhythmia est compliquée et tumultueuse. Vous aurez sans doute déjà pu le constater
en parcourant les chroniques déjà rédigées au sujet de leurs précédentes réalisations dans ces mêmes pages.
Voilà en effet un groupe de métal instrumental au potentiel technique irréfutable et qui, selon des critères qui
me sont propres, ne sont toujours pas parvenus, pour une raison que je ne m'explique pas, à nous présenter un
album si pas irréprochable, en tout cas qui ne s'épuise pas aussi vite. Comme toujours, le trio américain
entame plutôt bien son propos, ce qui aussitôt nous pousse à croire qu'on le tient, enfin, ce disque idéal ! Eh
bien non... "Barriers and Passages" n'échappera pas à la règle en croulant lui aussi très rapidement sous le
poids de son auto-suffisance. Les structures sont complexes et touffues - ça s'arrête, ça repart, ça ralentit, ça
accélère ; c'est leur marque de fabrique - mais, contrairement au Don Caballero de l'âge d'or, c'est au détriment
de la réelle puissance que le groupe a pourtant les capacités de déployer. On peut lire ça et là que le groupe
emprunterait au passage à King Crimson. Il me semblerait plus juste de mettre leur travail en parallèle avec les
plages instrumentales du Rush le plus énèrgique et le plus audacieux. Les producteurs les plus émérites ont
beau se succéder derrière la console (Martin Bisi succède à Steve Albini), aucun n'est encore parvenu à trouver
la recette miracle. En fait, le constat est triste mais simple (l'inverse est vrai aussi) ; plus on s'éloigne de "No
Interference", leur second album pour lequel j'émettais pourtant déjà de solides réserves, plus "No
Interference" acquiert une place de choix dans leur discographie. On pourrait passer des heures, et des jours,
et des semaines, et des mois à se le réécouter en boucle pour se convaincre du contraire, mais un tel effort
n'aura pour seule conséquence que de renforcer ce sentiment de lassitude.
Note : 3/6
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THE BLACK HEART PROCESSION + SOLBAKKEN : In the fishtank/11
Chronique réalisée par Progmonster
Le onzième "In The Fishtank" est peut-être le plus singulier du lot à jamais avoir été publié par le label
Konkurrent. Cette fois, ce sont les américains de The Black Heart Procession qui sont venus soumettre leur
demande en suggérant de s'associer aux hollandais de Solbakken, groupe peu connu, avec lesquels ils avaient
déjà pu partager quelques souvenirs de tournée. Le point fort de cette série, ne l'oublions pas, c'est non
seulement la collaboration inédite qu'elle propose entre deux groupes, mais aussi le haut degré d'improvisation
dont ceux-ci peuvent parfois faire preuve. Ce n'est donc pas le fruit du pur hasard si des noms aussi
prestigieux que No Means No, Sonic Youth ou The Ex ont inscrit en lettre d'or leur nom au palmarès de cette
superbe initiative, unique en son genre. C'est là justement où le bât blesse avec The Black Heart Procession et
Solbakken ; au travers de leurs discographies respectives, ces deux formations nous ont bien montré qu'elles
étaient aux antipodes d'une telle démarche. Résultat ; ce EP trimballe tout de même une atmosphère
foncièrement dépressive, grâce à ses tempos lents, son piano tragique et ses voix sombres ou déchirées,
quelque part entre les Tindersticks et Nick Cave. Sur "Voiture en Rouge" ou "A Taste of You and Me", on sent
bien que pour tenter de combler ce déficit, on laisse tourner les thèmes un certain temps, dans l'attente qu'avec
un peu de chance quelque chose de plus prenant pourra venir s'y greffer. C'est d'autant plus vrai sur "Things
Go On With Mistakes", titre pas tout-à-fait ironique d'ailleurs, où The Black Heart Procession et Solbakken
s'embarquent dans un long périple aux échos post rock énervés. Face aux résultats explosifs que le label nous
a apporté par le passé, "In The Fishtank #11", sous ses airs pop plus modérés, pousse à dresser un constat en
demi-teinte. Il n'en reste pas moins une réalisation dont on ne pourrait mettre en cause aussi bien sa sincérité
que sa sensibilité.
Note : 3/6
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THE BLACK HEART PROCESSION : The spell
Chronique réalisée par Progmonster
Pall Jenkins et Tobias Nathaniel, les anciens Three Mile Pilot, reviennent plus de quatre ans après le presque
contre-emploi que fût "Amore del Tropico" avec le cinquième disque des Black Heart Procession, "The Spell",
titre qui, à lui seul, semble vouloir remettre les pendules à l'heure. Mélancolique mais sévère. Retour donc aux
ambiances noires et lugubres des origines tout en préservant l'assise plus carrée qui permettait au groupe de
sortir de la léthargie dans laquelle ils se complaisent d'habitude. Cette musique autrefois hantée et plaintive
assume plus que jamais le côté rock latent qu'elle a toujours eu et qui apparaît cette fois au grand jour. Parce
que les titres de "The Spell" se reposent pour la plupart sur une rythmique appuyée où la batterie martèle le
temps sans discontinuer - même sur les plages au profil plus apaisé et qui démarrent pourtant sur la pointe des
pieds comme "The Letter" ou "Return to Burn" - dans une formation recentrée sur elle-même où brillent de leur
aura noir un violon lointain et inquiétant, un piano grave et solennel, et une guitare perturbatrice et guide à la
fois. L'aisance mélodique du combo cherche l'émotion là où autrefois elle se concentrait presque
exclusivement sur la mise en place d'ambiances noires. La voix de Pall Jenkins, à rapprocher de dEUS par
instants, renforce le côté fataliste et sordide de leurs douloureuses complaintes dont le développement semble
parfois tourner à l'obsession ("GPS", "The Fix"). Avec le recul nécessaire qui s'impose, "The Spell" apparaît
aujourd'hui comme l'album tremplin dont les Black Heart Procession avaient tant besoin ; celui qui, sous ses
traits aguicheurs, parvient à faire une habile synthèse de leurs travaux précédents sans trahir leur intention
initiale. Ce revirement esthétique, loin d'être radical pour autant, destabilisera peut-être les amateurs de la
première heure qui appréciaient plus particulièrement chez eux l'aspect introverti de leur univers acoustique.
Un changement certes. Mais point une déception.
Note : 4/6
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TANGERINE DREAM : Three O'Clock High
Chronique réalisée par Phaedream
L’aventure de Tangerine Dream avec le cinéma et les studios américains se poursuit. Le trio Allemand se
spécialise de plus en plus sur les courtes pistes, quitte à en perdre son identité. Mais, l’important pour Edgar,
Chris et même Paul Haslinger, c’est de monter au plus vite leur propre studio d’enregistrement. Three O'Clock
High est un navet cinématographique, accompagné d’un navet musical. De courtes pistes, en manquent
d’inspiration. Les séquenceurs et les synthés de Sylvester Levay sont plus agressifs que ceux de Franke et de
Tangerine Dream. D’ailleurs, ses pistes sont les meilleures de cet album affreux.
La seule pièce significative de cet album est Go To The Head Of The Class. On sent un peu d’émotion, de
l’intérêt. Les pièces sont trop courtes et balancées en vitesse sur des fade out totalement ratés. Bonding By
Candlelight aun air de déjà entendu, alors que Kill Him (The Football Dummy), prépare la table à la prochaine
trame sonore, Near Dark. Un album épouvantable qui n’a absolument rien à voir avec l’univers de Tangerine
Dream. En ce qui me concerne, c’est avec cet album que la chute aux enfers de Tangerine Dream s’amorça. Un
album à éviter, à moins d’être un collectionneur.
Note : 2/6
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STAHLWERK 9 / COLD FUSION / RUKKANOR : Triumvire
Chronique réalisée par Marco
Si la qualité apporté par le label polonais à des packaging luxueux constitue sa marque de fabrique depuis ses
débuts, la productivité en matière d'indus et de neofolk également, et malheureusement pas toujours avec un
bonheur égal. Un revers de médaille qui ne tient finalement qu'à une politique éditoriale pas toujours
judicieuse. Il reste que certaines productions méritent que l'on s'y attarde, telles que ce "Trimuvire"
sympathique. La Rome Antique et les guerres civiles de la République sont donc mises à l'honneur, avec en
tête Stahlwerk 9, excellent projet allemand toujours sur la brèche de la dark-ambient et de l'industriel
old-school. Sa participation est d'ailleurs la plus hypnotique, nappes et mélodies éthérées, sentiment épique
diffus mais palpable. Cold Fusion alias Marcin Bachtiak (l'une des têtes pensantes du label) fait d'entrée sonner
la cavalerie avec son mix martial/atmosphérique qu'il a déjà éprouvé avec plus ou moins de réussite par le
passé. Il semble que le projet se soit plutôt bien amélioré, "Tesser arius" donnant une mesure martiale efficace,
tandis que "Regia" ouvre des horizons nouveaux avec son léger aspect ethnique. Son compatriote de
Rukkanor, auteur du superbe "Requiem For K-141 KYPCK" en 2004, incarne ici la partie la plus folk et
neoclassique. Un feeling plus "organique" qui rappelle étrangement Dead Can Dance sur "Alexandria",
influence pourtant souvent présente dans ce registre. Au final, sans bouleverser un univers souvent trop rigide
et campé sur ses gimmicks, "Triumvire" apporte un souffle agréable et crédible, ce qui est en soi une qualité
plus que notable.
Note : 4/6
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TANGERINE DREAM : Near Dark
Chronique réalisée par Phaedream
Je suis peut-être l’un des rares à avoir aimé cette bande sonore. Remarquez que j’ai bien aimé le film, ça peut
aider, mais il y a plus. On sent une atmosphère, une ambiance de mystère, qui colle au film, donc les membres
de TD étaient connectés au film.
Pourtant Caleb's Blues part bien mal. Un rock à la synth pop bien structuré, il ne manque que les perruques
platines, et ça y est, TD est devenu agent commercial. Ce sont plutôt des titres comme Pick Up At High Noon
qui jètent une atmosphère sombre et ténébreuse, rejoignant les passages sombres et tendus du film. La finale
est rude et violente, Fight At Dawn, que l’on retrouve plus loin, est le complément idéal pour ce titre explosif.
Rain In The Third House est un rock étouffé, sur une sonorité faiblarde. Les lignes de basse de Bus Station
ramènent une portion de l’atmosphère de Le Parc. Le titre a beau duré près de 9 minutes, mais TD ne l’exploite
pas dans son entier, se contentant de jouer la carte de l’atmosphérique, de l’atonique sur des bons accords de
basses rondes. Un titre facile qui démontre que la sécheresse avait traversé les rides désertiques de la pellicule
pour assécher quelques neurones de, jadis, mon groupe fétiche.
Good Times est un gros rock. Bonne percussions électroniques, qui ne cadrent pas vraiment, sur les bons riffs
et solos crevants d’Edgar. She's My Sister (Resurrection I) est un titre intéressant. Bien exploité et structuré, il
est dans l’ambiance du film, tout en y amenant une petite touche ÉM. Mae Comes Back et Father And Son
(Resurrection II), sont d’autres bons titres. Ils seraient des sessions de Legend ou The keep, que je n’en serais
pas surpris. Après le très nerveux et cacophonique Severin Dies, Fight At Dawn reprend les souffles et lignes
infernales de Pick Up At High Noon; deux titres très épicés. Mae's Transformation clôture Near Dark, sur une
ballade atonique, mélange d’amour et d’espoir sur un synthé léger, aux strates immobiles, comme des cousins
aux harmonies contingentées. Ce n’est pas mauvais, c’est aseptisé. C’est TD des années 85 à 90.
Near dark est une trame sonore honnête qui a le mérite de respecter les atmosphères de ce film de vampires
contemporain. J’ai trouvé ça bon, et c’est parce que j’ai vu le film. Sans images pour situer les séquences, je ne
suis pas trop certains.
Note : 4/6
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TANGERINE DREAM : Shy People
Chronique réalisée par Phaedream
Un élément de collection, Shy People est le dernier véritable album studio de Tangerine Dream, avec Chris
Franke. D’ailleurs, certaines rumeurs laissent entendre que Franke en a eu marre lors de cette session
d'enregistrement. Ce qu’Edgar Froese prévoyait être une commande facile se tourna en véritable cauchemar. Le
réalisateur du film, lui-même musicien, établit des horaires astreignants de 16hres par jour, dans un contexte
où l’inspiration manquait. En 2 mois d’un travail intense, le Dream n’avait qu’écrit 84 minutes de musique. À 4
jours de la date butoir, l’album n’était toujours pas complet. On peut s’imaginer la gueule d’Edgar.
Il a fallu qu’un jour l’album soit complet, et le résultat est loin d’être proportionnel à l’effort, ni aux problèmes
encourus. La version vocale de Shy People aurait pu se trouver sur Tyger, tant la similitude avec la session est
apparente. Les atmosphères et la guitare sont belles. Ça ressemble à du Pink Floyd sur Wish You Were Here.
Les lamentations vocales de Diamond Ross sont belles et coulent avec sensibilité. Dès qu’elle chante, ça se
dégrade un peu. Elle a les mêmes intonations que Jocelyn Bernadette Smith. Déjà que la structure musicale est
dans le même moule que Tyger… L’apparence est trop évidente pour ne pas y penser et ça agace, car soit c'est
un pauvre remix de Tyger ou un titre bâclé faute de temps et de moyens!
Joe’s Place est une courte atmosphérique très près des ambiances de Legend avec la flûte et une synthé
flottant, un bon titre comme Transparent Days et Swamp Voices, des titres aux atmosphères éthérés, mais
incompplet dans leurs structures et leurs impulsions. The Harbor est un gros rock symphonique avec solo de
guitare et des trompettes à la Phil Collins. Bref un TD en panne qui cherche à s’inspirer de n’importe quoi.
Nightfall est un titre au mouvement symphonique atonique. Civilized Illusions est un titre comme TD en a écrit
ses dernières années; du synth pop arrosé d’effets sonores sur un synthé agressif. Un titre pas si mal
considérant le reste.
Ouvrira-t-on un débat à savoir quel est le titre le plus niais de TD? Je vote pour Dancing On A White Moon.
C’est la plus pire des chansons que TD ait composé;cucu et rose bo185on d’un fétichisme enfantin dégradant.
Je ne peux pas croire que TD ait écrit, et endisquer un titre aussi nul. Mais je ne dois pas connaître la musique
de TD tant que cela, car ce fut le single de Shy People. La version musicale clôture cette bande sonore sur un
titre nettement plus harmonieux avec un clavier qui a pris la mauvaise décision de souffler des airs lugubres,
aux passages où Diamond Ross chantait.
C'est dommage que la fin d'une si belle association se produise sur un titre aussi poche. Remarquez que ça
peut expliquer des choses...La fin d'une époque, car le Dream tente un voyage financier vers les USA!
Note : 1/6
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TANGERINE DREAM : Optical Race
Chronique réalisée par Phaedream
C’est un Tangerine Dream, amputé de son bras séquentiel, qui entreprend l’écriture d’Optical Race. Un nouveau
venu, Ralf Wadephul, participe à la composition de l’album et à la tournée Nord Américaine qui s’ensuit, mais à
cause de différents irréconciliables (sic), il quittera TD à la fin de cette tournée. Nous sommes dans les années
Melrose, qui s’étalent à partir d’Optical Race jusqu’à Canyon Dream, soit les années Seattle en 91. D’emblée, ce
ne sont pas mes années préférées et cela aurait dû être le temps pour Edgar d’honorer ses comparses et de
changer le nom du groupe. Son refus de le faire, en explique long sur le mépris du personnage pour ceux qui
l’entoure. Pourtant cette 1ière mouture n’est pas si mauvaise.
Un peu comme le Parc, Optical Race est structuré sur de courtes pièces. Majoritairement mélodieuses, avec
une 1ière touche d’inspiration américaine avec les ‘’soundscapes‘’ comme sur l’intro de Mother of Rain ou
encore l’insupportable Twin Soul Tribe où TD tente d’importer le Berlin School, idem avec Turning Off The
Wheel, Optical Race verse dans un Nouvel Age facile. Il y a peu de séquences et de rythmes tordus, tout est flat
et uniforme, comme un groupe sans âme. Et c’est toute la différence d’avec Le Parc, qui était un album à courte
pièce, mais avec de la recherche, de la chaleur, de l’émotion. Dorénavant, tout ce qui va suivre Optical Race,
même les gros concerts, ne sera plus l’ombre de l’ombre qu’était jadis un si grand groupe.
Marakesh est sans doute le titre le plus intéressant d’Opticale Race. Rythme franc, bonne percussion et
séquences rondes bien huilées sur des modulations qui surprennent. Loin d’être un titre cucu, il est fort bien
développé avec tout ce qu’il faut pour plaire et étonner. Encore aujourd’hui, surtout avec la nouvelle édition
d’Optical Race, je me plais à l’écouter ainsi que la très suave et belle Mother of Rain, l’une des belles pièces de
Tangerine Dream.
Le reste est sans façon et manque totalement de conviction, de passion. Trop longue, Cat Scan finit par tomber
sur les nerfs avec sa redondance platonique. Sun Gate est une belle ballade, avec un beau solo de guitare, à la
mode synth pop des années 80, comme avec The Midnight Trail et Ghazal (Love Song). Il n’y manquait plus que
le blond platine.
Je peux comprendre que certains artistes plient sous la pression de leur compagnie de disques pour faire une
percée commerciale, mais Edgar a toujours maintenu que TD a été libre de ses choix. Ce virage américain, pour
s’entendre à la radio, fut une claque sur la gueule pour Froese et toute l’institution qu’était Tangerine Dream. Un
peu comme si Rogers Waters aurait conservé le nom de Pink Floyd pour faire du hip hop!
L’arrivée de Tangerine Dream et d’Optical Race devait ouvrir les portes de la MÉ sur le marché Nord Américain.
Il y a certes eu un engouement où les stations de radio ne présentaient des courtes pièces, des pièces avec de
la flûte de Pan (Zamfir) et ce fut l’éclatement du Nouvel Age
qui tua dans l’oeuf, une possible percée de la MÉ Berlin School et progressive. Qui aurait osé prédire que les
principaux précurseurs de cet art cosmique allait un jour y couper les souffles?
Note : 3/6
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SCHULZE (Klaus) : En=Trance
Chronique réalisée par Phaedream
Réalisé en 1988, En=Trance est le 20ième album de Klaus Schulze. À l’époque c’était un album double, avec 1
titre part côté. Un album qui a reçu un bon accueil, à cause de la très belle pièce FM Delight, mais surtout parce
que Klaus Schulze délaissait ses mouvances et errances numériques et digitales pour se concentrer sur un
album plus structuré aux nappes et strates synthétiseuses éthérées sur des modulations minimalistes.
Pourtant c’est en pleine cacophonie statique que débute En=Trance, la pièce titre. Un tintamarre métallique
hostile à l’oreille, d’où émerge un remarquable mouvement séquencé sur des chœurs doux qui se mêlent
agréablement à la flûte mellotronnée. Un beau morceau sur un mouvement minimalisme que Schulze habille de
belles strates synthétisées et d’accords de guitares virtuelles qui entourent ce titre d’un charme Schulzien des
années X. Les lourdes strates symphoniques qui introduisent @-Numerique projètent une atmosphère
dramatique où l’intrigue est au rendez-vous. Un beau mouvement dense qui dévie sur une belle ligne à
l’harmonie aisée sur de beaux xylophones qui copient les moindres ombres d’un clavier aux mains
exploratrices. À la mi-temps, @-Numerique s’efface sur une ligne basse aux strates boudeuses. Le rythme
xylophoné revient sur un piano nerveux et de bonnes percussions percutantes sur une modulation saccadée
qui se termine sur une fusion métallique des strates agitées par des percussions martelantes. Composé en une
nuit, soit à l’occasion de son 40ième anniversaire,FM Delight est un pur bonheur musical. Près de 20 minutes
d’un rythme coulant avec mélancolie sur un mouvement d’une étonnante ampleur. Les strates synthétiseuses
se suivent en un mouvement valsant. Tissées serrées, elles flottent en virevoltant sur une basse fluide qui
soutient une structure minimaliste, appuyée par un bon jeu de percussion. Des chœurs empreints de tristesse
se mêlent aux strates, aux harmonies troublantes.
Oh qu’il s’en est versé des larmes sur ce mouvement d’une tristesse inexplicable. Un classique qui fut voté ‘’
Hit Of The Year‘’ sur les ondes d’une radio Allemande, en 1988.
En douceur, et un peu à l’image de FM Delight, Velvet System suit la courbe mélodieuse des strates violonées
jusqu’à l’éclat synthétique où la modulation se modifie subtilement en mouvement plus agile. Tranquillement, la
candeur harmonieuse se permute en mouvement plus agressif, dont les percussions facilitent l’évolution. Les
échantillonnages baroques imposent une finale à éclats, sur d’onctueuses strates à l’approche nettement plus
musicale que tonitruant.
Cours séquenceur 101; Elvish Sequencer est la possession séquentielle. Enregistrée en 75, alors que Klaus
Schulze s’exerçait sur un prototype de séquence. Une pièce intacte qui démontre la vraie nature d’un
séquenceur, sa portée et son utilisation. Et, si on écoute attentivement, on peut sentir des séquences qui ont
servi pour des albums comme Timewind et Picture Music.
Écrit et réaliser en seulement 3 semaines, En=Trance marquait un retour aux sources pour Schulze, ainsi que
ses fans. Un grand disque que l’on redécouvre avec plaisir avec cette ré édition de Revisited Records. Et,
comme le veut la coutume, les fans débattent de la qualité sonore de cette édition. Je tiens juste à rappeler que
SPV n’as pas le mandat de remixer, mais de réunir les œuvres de Schulze sous une nouvelle bannière, ce
faisant, et pour inciter les fans à se les procurer, des pièces en prime, ainsi qu’un beau livret accompagnent
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chaque ré édition. De ce que j’ai entendu, la qualité est très bonne, sauf pour un Mirage qui avait des
grincements au début. SVP a remplacé les cd défectueux, donc faut faire gaffe si on achète Mirage en usagé.
Note : 5/6
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AIR : Talkie walkie
Chronique réalisée par dariev stands
Quand je vous disais que la meilleure pop française de ces dernières années provenait du XVIeme ou bien de
Versailles, vous vous en doutiez, je pensais – entre autres – à Air. Le classieux duo versaillais nous livrait en
2004 son fort attendu cinquième album (sixième si l'on compte le très atmosphérique projet City
Reading/Baricco). Nicolas Godin et Jean-Benoît Dunckel nous avaient plus ou moins habitués à changer de
visage à chaque nouveau disque : ludiques et un brin rétro sur Moon Safari, sombres et psyché pour Virgin
Suicides, et enfin mégalos et barrés pour l'immense 10 000Hz Legend, les voilà acoustiques et dévoilés sur
Talkie Walkie. Tout en ambiances ouatées et confortables ; ce disque se veut rassurant, là ou certaines des
précédentes créations de Air étaient parfois inquiétantes. Le groupe peut se targuer de réunir Nigel Godrich
(qui a produit l'album aux mythiques studios Ocean Way à Hollywood) et Michel Colombier (le plus grand
arrangeur de cordes au monde ?) sur un même disque, et le résultat ne déçoit pas. On a souvent comparé Air à
Pink Floyd, ce qui ne manquait pas de les énerver; eh bien, ces comparaisons hâtives n'ont désormais plus lieu
d'être : ils s'affranchissent ici de toutes les influences pour créer leur album le plus personnel. Oui, personnel.
Après avoir intrigué par les textes étranges de leur précédent opus, ils dévoilent ici leurs sentiments et
renoncent à tout cynisme. Ce qui donne un grand album romantique. Seul bémol : trop court ! On aurait aimé en
entendre plus, surtout que Alone In Kyoto, la dernière chanson, figurait déjà sur la B.O. de Lost In Translation.
D'ailleurs, la réécouter nous replonge dans cette scène magnifique où l'angélique Scarlett Johansson erre dans
un univers qu'elle ne comprend pas. A noter que le gimmick d’intro peut rappeler « 5 Years » de Björk, ce qui
est loin d’être une tare. Et puis il y a le tubesque Alpha Beta Gaga, incroyable siffloterie destinée à l'origine à
Madonna! L'impudente bougresse (comme la nomme le rédacteur en chef d’un certain magazine français) a
refusé le morceau. Tant mieux. Il trône bien mieux sur le velours de Talkie Walkie qu'au milieu de la rébellion en
carton pâte de la vieille Ciccone. C'est assez incroyable de se laisser prendre au piège moelleux de ces
mélopées archi-simplistes (presque tous les titres sont d’un dépouillement enfantin) après l'electro quasi
progressive de 10 000hz. Venus, l'entrée en matière, captive à la première seconde avec ses quatre notes bien
sonnées qui semblent vous regarder de haut. Cherry Blossom Girl séduit par des paroles touchantes (on ne
pensait vraiment pas entendre ça de la bouche de Air après le désespoir de Virgin Suicides!). Il faut d'ailleurs
remarquer que la plupart des paroles de ce disque sont destinées à la gent féminine. Run est le sommet du
disque, poétique et intimiste, proche de Françoise Hardy ( ! ) à sa manière. Suit le lumineux Universal Traveler,
l'instrumental baroque Mike Mills (dédié au graphiste du groupe), et Another Day, sorte de ballade qu'on ne
peut plus se sortir de la tête après deux écoutes… et encore une mélodie simple comme bonjour, mais où les
trouvent-ils? Je crois qu'on a fait le tour… Nous voici avec un autre chef d'œuvre. Peut être moins magistral
que 10 000hz Legend (difficile de faire mieux), cet album confirme ce que l’on pensait déjà : les Air ont le don
d'instaurer une ambiance unique en trois accords. Ils prennent en tout cas un sacré risque en dénudant leur
chansons de tous les artifices et en se dévoilant bien plus que d’accoutumée dans les paroles. Ou comment
faire un disque fleur bleue sans se ridiculiser et en gardant la classe.
Note : 5/6
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WILT : Dark meadows
Chronique réalisée par Marco
Un nouveau Wilt est toujours la promesse d'un séjour dans le néant, un appel à se débarrasser des parasites
quotidiens qui entraveraient la bonne réception de perverses comptines. Plus qu'une simple écoute, la musique
de Wilt relève souvent d'une expérience sonore à l'immersion exigeante. L'avalanche de productions de James
P. Keeler chaque année est d'ailleurs une preuve supplémentaire de sa boulimie de savant fou du son. "Dark
meadows", sa nouvelle livraison pour Ad Noiseam, se caractérise par une noirceur toute particulière, plus
organique que d'ordinaire. Nous conviant à faire le tour d'un domaine dévasté, l'américain accompagne la visite
d'une bande-son très épurée, proche de la dark-ambient pure par moment et d'où émanent régulièrement des
esquisses de mélodies plus proches du cauchemar que de la transe extatique. Cauchemar est bien le mot, "For
Blake", "Dark meadows" ou "Keeper of lanterns" témoignent d'un univers désolé et froid, presque aseptisé,
tandis que "Amerikan zombie" ou "The Devil's rai185ow" se chargent d'en exprimer le versant le plus
dérangeant et bruitiste. Et même lorsque l'acoustique s'en mêle comme sur "Harmonic convergence" il
subsiste peu d'espoir de voir apparaître un semblant de lueur. Peu de "field recordings" cette fois-ci, Wilt
s'enferme plus volontier dans un univers isolationiste, au rendu minimal mais qui fait forte impression. Une des
meilleures réalisations de l'américain, farouche mais attractive et vénéneuse.
Note : 5/6
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ARTEFACTUM : Rosarium hermeticum
Chronique réalisée par Marco
Un pas de plus sur le chemin escarpé et étroit de la philosophie hermétique : un pas qui se veut gracieux,
soucieux et pleinement acquis au but à atteindre. "Rosarium hermeticum" honore une fois de plus les capacités
de la Merissa à infuser des atmosphères mystérieuses et oniriques à son ambient toute particulière. Sensualité
délicate, glorification de la beauté des éléments à la fois tenant de la célébration rituelle ("Misterium magnum"),
du mystère des fluides et des sens ("Sperm of the philosopher") et de la subjugation (le très hypnotique
"Rosenkrieg"), "Rosarium hermeticum" se démarque des autres oeuvres de la polonaise par une poésie
mystique relayée par une voix envoûtante qui délivre des litanies gorgées d'allégories et de métaphores. Le
livret superbement illustré offre à ce propos une continuité esthétique à cette initiation rituelle qui s'efforce
d'invoquer le retour à l'innocence primordiale. Une oeuvre de toute beauté, tour à tour apaisante et inquiétante.
Note : 5/6
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GHOULTOWN : Bury them deep
Chronique réalisée par Twilight
Cuidado, Hombres ! Les Ghoultown sont de retour traînant sur les pistes abandonnées d'un Ouest oublié de
Dieu et des hommes le cuir noir et fatigué de leurs bottes de desperados...Le vent souffle, une trompette s'élève
comme un glas avant que n'éclate la cavalcade infernale. En effet, si nos cow-boys de l'enfer restent fidèles à
leur recette à base de country gothique ('Bury them deep'), d'horror punk, avec une touche rockabilly sauvage,
ils semblent plus inspirés que jamais. On note en effet une énergie punky plus marquée ce qui les rapproche
parfois d'un psychobilly sans contrebasse et plus électrifié ('Tekilla', 'Mexican moonshine'...). Quant aux
arrangements, ils sont fouillés et variés. Une version psycho de New Model Army ? C'est un peu ça...Les
Ghoultown ont un univers qui leur est propre et ils s'y sentent chez eux...Après le western spaghetti, le western
gothique ?
Note : 5/6
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QUADRA : First Contact
Chronique réalisée par Phaedream
Quadra est le dernier des super groupes de MÉ anglaise. Composé de Brendan Pollard (Rogue Elment) Steve
Humphries (Create et Astrogator) Jez Creek (Astrogator) et John Sherwood (4m33s); les 4 synthésistes Anglais
se sont donné rendez-vous dans les studios de Brendan Pollard, en Février 2006, pour y faire un jam session
qui résulte en ce double cd. Une musique étonnamment riche aux influences très moulantes d’une douce Berlin
School mellotronnée, avec un côté exploratoire psychédélique qui augmente l’aspect délirant d’une musique
sans frontières.
Une impulsion bourdonnante, qui oscille tel un phare sonore rotatif, dessine les premières ondulations de
Convergence. Terrée dans l’ombre de sa vibration, une pulsation trace une séquence fine, appuyée par une
légère mélodie issue d’un clavier aux notes carillonnées. La chaleur analogue qui se dégage des flûtes
mellotronnées ravive la flamme harmonieuse, tout en accélérant la séquence qui élargit sa portée, avec une
double ligne sur un synthé spectrale. Une belle entrée qui nous plonge dans un Berlin School rétro, aux
dimensions encore inexplorées. Minimaliste, le rythme coule doucement, sur de belles nuances de basses et,
vers la 11ième minute, le tempo diminue sur des chœurs mellotronnés.
Nous pénétrons dans un univers abstrait, où une flûte enchanteresse caresse des émanations sonores
hétéroclites, sur des séquences intermittentes aux mouvances errantes. Un purgatoire sonore où tout se crée,
sans prendre forme, dans l‘incursion d’un monde psychédélique et industriel aux profondeurs ténébreuses.
Des souffles de velours dans une aridité céleste, où de frêles mélodies se lovent dans le confort et la sécurité
des mellotrons flûtés, gravitent dans ce vide cylindrique qui graduellement s’anime autour d’une pulsation.
Et c’est le charme des longues pièces. Les musiciens ont toute la latitude nécessaire pour façonner et jouer
autour de leurs structures, explorant toutes ses possibilités. Ce que Quadra a amplement expérimenté avec
Convergence, qui renoue avec son mouvement séquentiel d’origine, sur de bonnes percussions métalliques, de
beaux solos de synthé et cette superbe fascinante séquence aux strates synthétiques imprégnantes qui avait
captivé notre ouïe à l’intro.
Pastorale, c’est du bo185on. Une belle pièce aux strates synthétiseuses denses et mélodieuses, accompagnées
de belles notes cristallines qui tintent sur un mellotron flûté et un rythme séquentiel léger. Du vrai bo185on pour
les oreilles, ça s’écoute sans effort comme Starbirth. Plus flottante avec un synthé aux accords rêveurs,
Heritage est une tendresse subliminale.
Un léger tourbillon sonore aux émanations très cosmique ouvre Emergence. Une intro éclectique qui se moule
à de belles strates synthétiseuses, d’où se forme une belle ligne séquentielle basse qui ondule dans une
ambiance synthétisée. Mouvement feutré, inondé de mellotron flûté et d’harmonieuses toiles synthétisées qui
flottant dans une ambiance très spatiale. Un croisement entre les atmosphères cosmiques de Schulze sur Black
Dance et de Software dans Electronic Universe; 2 classiques de la MÉ contemporaine. Une séquence basse et
fluide se forme sous les flûtes mellotronnées, amenant Emergence dans un flot synthétisé où strates et solos
s’entrecroisent sur une séquence circulaire aux percussions staccato. Rythme libre et bouclé, cet intense
segment percute un récif sonore qui éclate le rythme en une longue fresque psychédélique. Comme sur
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Convergence, Quadra explore les sonorités chimériques sur des accords fragmentés où mellotron et synthé
subdivisent les ambiances dans un univers psychédélico-spatial.
Astral Plane est une douceur qui défile sur une séquence basse aux ondulations subtiles. Minimalisme, le
tempo évolue sur de belles incursions synthétiseuses qui filtrent ses strates et solos avec acuité, accentuant
une cadence timide sur des modulations hachurées. Callisto est une pièce flottante et atmosphérique, un doux
intro avant de tomber sous les envoûtantes voiles synthétiseuses de Take-Off. Un titre lourd, aux ambiances
industrielles, sur un rythme cassé par des percussions métalliques et des synthés aux courbes épineuses. Un
excellent titre, aux dimensions insoupçonnées que les amateurs de Redshift et Ramp vont apprécier avec
délire.
Quadra est un excellent album de MÉ contemporaine. Un album génial qui exploite un côté psychédélique, trop
souvent négligé, facilitant la digestion auditive de ses longues explorations atmosphériques. Une fresque
harmonieuse, où les mellotrons se moulent harmonieusement aux strates synthétiseuses progressives et
enveloppantes, dans un monde musical sans frontières, sauf celles que l’ont s’imposent, de nos oreilles
frileuses.
Disponible au http://www.modulator-esp.co.uk/quadra/
Note : 5/6
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HUYGEN (Michel) : Angkor
Chronique réalisée par Phaedream
Angkor est le 1ier volume d’une série de la collection Extrême Méditation, par Michel Huygen, Principalement
inspiré par ses voyages en Asie, notre bohème espagnol se sent l’âme d’un poète virtuel à la quête de la beauté
intérieure et de la beauté spirituelle. Passé maître dans l’art de transposer les émotions les plus intimes, par les
notes de ses claviers, le synthésiste Espagnol va encore plus loin que la simple réflexion ou relaxation avec
Angkor. Je dirais que c’est un voyage mélodieux, sur des mouvements lents et flottants. Mais avec de
l’émotion, de la profondeur sur des modulations sensibles.
L’intro Tibétaine, avec les souffles d’un violon chinois, de Siem Reap est un beau segment mélodieux qui flotte
sur une essence tribale des peuples claniques. Une belle sonorité à la Neuronium vient relever les délicats
arômes, sur un synthé moulant et enveloppant. La beauté de la musique planante du leader de Neuronium est
sa capacité à épouser les nuances, aussi discrètes soient-elles. Sur Siem Reap c’est plus qu’évident; les
mouvements de tendresse suivent les souffles harmonieux qui se scindent dans une passion retenue par une
superbe flûte sur de fines modulations. Naga est un mouvement carillonné avec des échantillonnages de voix
mélancoliques hachurés. Un message de désespoir, de tristesse. Ta Prohm est un superbe titre en suspension,
qui progresse de façon hésitante et nerveuse, pour se transformer en sublimité onctueuse avec une fusion
chœurs/synthé aux profondeurs émotives. Cette finale aux strates caressantes et enveloppantes, comme les
charmes innés des violons romantiques, se transporte sur les structures mouvantes de Bayon, Apsaras, After
the rain et Angkor Wat; 4 titres d’une douceur envoûtante, Bayon est incroyablement beau, qui nous transporte
dans des mondes féeriques qui n’ont de beauté que leurs cultures et leurs histoires que Michel Huygen dessine
avec une émotion étonnante. Une beauté qui pleure, une beauté qui a mal.
Il ne faut pas fuir l’appellation d’Extrême Méditation, car de méditation, point je n’entends. J’entends par contre
la beauté, l’innocence, la virginité sur des souffles pudiques, comme si tout était fragile. Trop fragile pour être
étreint, même caressé.
Disponible au http://www.neuronium.com
Note : 5/6
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WOLFMOTHER : Wolfmother
Chronique réalisée par Nicko
Parfois, les jeux vidéos, ça a du bon. L'autre jour, j'ai joué chez un pote à un jeu bien fun, "Guitar Hero II". Le
concept du jeu, c'est tout simplement du "Air Guitar" sur ordi. Bref, si vous savez pas jouer de guitare, vous
pouvez toujours vous prendre pour n'importe quel monstre sacré de la six-cordes et vous éclatez sur des tubes
intemporels. Dans ce jeu en plus, on est servi avec du Lynyrd Skynyrd, du Guns N' Roses, du Black Sabbath,
du Megadeth et j'en passe... Enfin non, je passe pas tout à fait. Au milieu de tout cela il y avait aussi des
groupes plus récents comme ces australiens de Wolfmother. Et franchement, le morceau du groupe présenté
sur ce jeu, "Woman" est une tuerie sans nom ! Je pèse mes mots. Je ne pense pas avoir entendu un hit qui soit
aussi énorme que le "Paranoid" de Black Sabbath. Putain, comme ce morceau est fabuleux. D'ailleurs, c'est
plus qu'inspiré par le morceau du quatuor de Birmingham. Autant dire qu'à mon retour en France après avoir
joué à ce jeu, je me suis rué sur l'album du trio. Et bien quelle claque mes aïeux ! Wolfmother, c'est pas dur,
c'est un condensé de ce qui s'est fait de mieux dans les années 70 en matière de rock. Et encore, le riff d'intro
de "Joker & the thief" est directement inspiré par celui de "Flesh of the blade" d'Iron Maiden ! Nan,
sérieusement, cet album est excellent. Il y a du Deep Purple dedans (arrgh les claviers !), des Doors (les
claviers aussi !), du Led Zep, du Black Sab' (surtout !), du Lynyrd Skynyrd (un peu). C'est bourré de feeling et le
chanteur chante (!) comme à l'époque. Bref, on s'y croirait. Alors, ok, c'est remis à la sauce 2006 avec une
production un peu trop proprête faisant un peu pop actuelle sur les bords (style White Stripes & co.), mais
putain, ça fait du bien d'entendre du BON rock burné tourner avec des compos de 3-4 minutes sans se prendre
la tête et avec de bonnes mélodies et une envie de tout balancer dans la maison ! Et oui, il y a de la chaleur, du
gros son (hélas, pas assez lourd par moment), de l'énergie et ce feeling 70's présent du début à la fin. Et puis ce
"Woman"... Putain, LE morceau de l'année... voir de la décennie...
Note : 5/6
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LE VENE DI LUCRETIA : Le vene di Lucretia
Chronique réalisée par Twilight
'...Lasciami piangere la morte nelle mie vene...', dernière ligne d'une citation d'un texte baptisé 'Le Grida di
Parijinkoff' (je n'en sais pas plus, navré)...le deathrock italien, c'est quelque chose de sérieux, presque sacré,
une musique qui semble prendre un malin plaisir à perpétuer le culte de l'obscur avec classe et
esthétisme...Sans originalité mais avec une grande efficacité, les Florentins de Vene di Lucretia s'avancent pour
prendre le flambeau. C'est le spectre de Madre del Vizio qui flotte sur leurs compositions : des guitares
deathrock torturées et glauques, une basse sombre, des vocaux hantés en Italien entre chant et récitation
('lamentation' serait plus juste mais avec une touche de colère), une touche d'orgue et de programmation pour
ajouter la touche atmosphérique, sans compter la froideur de la batterie qui sonne comme une boîte à
rythmes...rien de bien neuf mais ça marche ! On se laisse vite prendre par ces atmosphère nocturnes, cette
fascination ambiguë pour une Mort crainte et respectée, fascinante et terrifiante...La plupart des formations
italiennes ont cette foi, cette passion de la noirceur qui rend crédible leur démarche, que l'originalité soit au
rendez-vous ou non. S'ils n'ont pas la classe de Chants of Maldoror, les climats étouffants de Il Giardino
Violetto ou la pêche de Artica, le Vene di Lucretia s'affirment néanmoins comme des seconds couteaux de
talent.
Note : 5/6
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COMPILATION DIVERS : Hampshire Jam 'Jam' 2006
Chronique réalisée par Phaedream
Depuis le 27 Octobre 2001, a lieu à Liphook Angleterre, un festival de MÉ intitulé Hampshire Jam. Très prisé par
les fans, ce festival attire des milliers d’amateurs des quatre coins du globe pour assister à festival unique de
Berlin School rétro. Les amateurs du dernier Hampshire Jam, le 5ième, eurent toute une surprise en pouvant
assister à une soirée d’improvisation la veille du festival. John Sherwood (4m33s), Jez Creek (Modulator ESP et
Astrogator), Steve Humphries (Astrogator et Create), Dave Gurr et Xan Alexander (The Omega Syndicate),
Brendan Pollard (Rogue Element) et Stephan Whitlan (Narcosis) étaient les artistes invités à cette session
improvisée de musique électronique.
Une jolie brochette d’invités. Des gros noms, des artistes alléchants qui offrent un spectacle de plus de 21/2
hres d’une musique étourdissante aux modulations minimalismes, rythmées et complexes, dans les difficiles
conditions d’improvisations. De belles lignes serpentines, qui glissent dans l’intensité abstraite, ouvrent le
concert avec une dense intro atmosphérique. Tout semble en place pour une soirée magique. De lourdes
pulsations, sur des tintements métalliques, bourdonnent dans une ambiance sombre. Une belle mélodie
s’échappe de cet environnement éclectique pour croiser un segment plus animé, qui bat sur une bonne
pulsation méthodique, des accords de guitare et un synthé aux notes discrètes. Cette soirée d’improvisation
décolle en harmonie, chacun des musiciens semblant connaître la suite des évènements tant la complicité
semble tissée serré. Vers la 8ième minute, le tempo modifie son axe musical pour initier un mouvement plus
ambiant avec des pulsations rapides et des ondes synthétiseuses qui scrutent l’horizon de son voile verticale.
Un superbe jeu de percussion s’installe, donnant un tempo suave et lent arrosé de belles strates
synthétiseuses. Un séquenceur nerveux, aux battements saccadés dessine une ligne rythmique où les accords
et les solos de synthés sont moulants et mélodieux, dans une ambiance truffée d’effets sonores. À cet endroit,
ont perçoit les hésitations improvisées, ajoutant un cachet d’authenticité à un titre assez bien structuré, un
petit bijou musical qui se joue sur l’étendue de la cette première partie. Les percussions minimalistes
structurent une aire d’improvisation assez vague et chacun des musiciens apportent sa touche personnelle,
avec de beaux solos qui gravitent dans une ambiance striée d’effets synthétisés, grossissant encore plus les
impulsions mélodieuses qui foisonnent de partout. Statique, l’intro de la 2ième partie vrombie sourdement
avant d’embraser une séquence lourde aux chœurs et flûtes mellotronnés. Intense, la migration musicale
s’étend jusqu’aux ombres ténébreuses des synthés symphoniques et spectraux, à la TD, sur un mouvement
moulant qui atténue sa course dans une ambiance atmosphérique sombre. C’est la 1ière portion atmosphérique
de ce concert improvisé. Imprégnée d’une belle flûte, de beaux et délicats solos et un mellotron dense, une fine
ligne pianotée circule en spirale ascendante. Le synthé et le mellotron sont lourds et forment une ambiance aux
chœurs et aux ombres lugubres. La 4ième partie revient sur les rythmes séquencés aux structures lourdes et
moulantes. Sans dynamisme, ni prédominance cette partie s’écoule sans grands intérêts, un peu comme si tout
le monde se cherchait. Un long prélude à une 5ième partie nettement plus allumée, avec ses synthés aux stries
fantomatiques et une séquence ondulante qui serpente une atmosphère psychédélique dans une jungle aux
sonorités syncrétiques, où tout se fond pour reformer des segments ambiguës sur des séquences
époustouflantes. Un excellent titre qui ralentit le tempo en pénétrant dans le territoire de la 6ième partie. Un titre
aux mouvances incertaines qui jouit d’un superbe mouvement séquentiel de courte durée, avant d’explorer des
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territoires incertains aux errances aléatoires. Une fin un peu amer, qui finit en queue de poisson.
La 2ième partie de ce concert improvisée débute merveilleusement bien. Une séquence minimaliste, aux notes
valseuses et rotatives, sillonne une atmosphère éclectique, aux solos tortueux et atoniques. Des chœurs se
moulent à une séquence en mutation sur de longs et intenses solos de synthétiseurs alertes. La 2ième partie
connaît un départ mélodieux avec une belle voix, virtuelle, qui chantonne sur un beau mouvement de carrousel
harmonieux. Une intro douce et soyeuse qu’une séquence bien structurée nous amène en territoire
harmonieux. Un superbe titre, sauf que la sonorité est déficiente par endroit, surtout lorsque le rythme
s’intensifie sur de beaux solos de synthé. La 3ième partie est un genre de ballade avec des strates traînantes et
lascives sur un suave mellotron. Après les longs fleuves tranquilles et atmosphériques de la partie 4 et l’intro
de la partie 5, un lourd séquenceur spirale la 2ième moitié de la partie 5 sur un rythme sinueux et lent, comme
un carrousel vrillant sur de lourdes strates aux mouvements symétriques.
Tout un spectacle et tout un cd. Malgré quelques longueurs, Hampshire Jam 'Jam' 2006 demeure un cd
attrayant. Un album live qui souffre des défauts de l’improvisation, par moments on à l’impression que le
monde se cherche, et qui a des carences au niveau du mixage final. En contrepartie, c’est un opus qui réunit
tous les ingrédients pour plaire aux fans de MÉ. Dans un contexte où l’inspiration est nuancée par
l’improvisation, nous retrouvons d’excellents moments, où nous voyageons au travers différentes époques de
la Berlin School, qui méritent l’écoute et qui seront isolés dans ce double cd, à moins que ce groupe improvisé
songe à prendre la route des studios. Une décision justifiée, parce que le talent et la chimie crève nos tympans,
malgré un long concert improvisé.
Disponible au www.ambientlive.com
Note : 4/6
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LA KEMIA : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
One shot unique qui joue à fond la carte de la diversité, La Kemia a pour socle trois influences majeures qui
vont s'entrochoquer dans un feu d'artifice qui n'a rien à envier au spectacle pyrotechnique, mystérieux,
fascinant, irréel, donné par l'assaut des forces américaines sur la capitale irakienne au début des années
quatre-vingt dix ; electro, jazz et world. L'aspect electro, presque tous les participants du projet le revendiquent,
même s'il traduit avant tout une volonté de se fondre dans une grammaire aujourd'hui fédératrice.
Culturellement parlant, les membres de La Kemia sont plus rattachés au jazz : le trompettiste Antoine Illouz, le
très actif Cyril Atef (batteur des méconnus Olympic Gramofon), qui est alors à quelques mois de connaître le
succès public au travers de Bumcello - sorte de prolongement plus lisse de la formule exposée ici - et enfin
Mehdi Haddab, collaborateur de Smadj dans le projet DuOud, joueur de oud donc mais pas seulement. Reste
donc le côté world music, dans son sens le plus large, qui cimente littéralement toute la musique contenue sur
cet album. On passe par la musique moyen-orientale, dominante comme on peut s'en douter, mais on fait aussi
des escapades pas toujours heureuses en musique africaine sur "Hell Yo Police", un peu trop facile à mon
goût, asiatique sur "Kotomania" ou encore latino américaine sur "Berimbau". L'approche est résolument
moderne, une fusion des genres surprenante qui fonctionne à plein tube sur des titres comme "Bagdad" ou
"Las Ultimas", aventureux et ténébreux à la fois, souvent moins téléphonés que les expérimentations d'Erik
Truffaz, devenues redondantes depuis le temps. N'attendez donc pas le chef-d'oeuvre, on en reste bien loin,
mais un album qui a toutes les cartes en main pour titiller puis, espérons le, satisfaire les quelques curieux
amateurs des trois genres musicaux précités et plus particulièrement friands des combinaisons hybrides.
Note : 4/6
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VEDETTE : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
Si vous pensiez avoir déjà tout entendu, le duo Vedette risque de vous prendre en défaut. Et plutôt deux fois
qu'une ; c'est à deux, justement, qu'ils se sont mis pour nous concocter cet univers foutraque qui ne ressemble
à aucun autre, si ce n'est au reflet de leur cerveau malade, collage dadaiste extrême où l'electro abstract se
cogne la tête contre les murs, une poésie décharnée s'extrayant du plâtre ainsi morcelé, non sans évoquer les
plus belles heure d'un autre tendem, celui de Martin Rev et Alan Vega. Aux manettes, Manuel Stagars, au micro
Neil Carlill dont les intonations et le timbre renforcent cette impression. Derrière ce bouclier d'émotions
contrariées, servant paradoxalement à protéger les deux artistes d'une pudeur qui transparaît tout de même par
endroits ("Chessmaniaque" proche du Radiohead de "Kid A"), se bousculent en permanence folie douce,
mélancolie aux ailes brûlées et sentimentalisme blessée qui se débat comme il peut pour faire entendre sa voix
dans un monde qui a compris tout le bénéfice qu'il pouvait tirer à l'exploiter en le vidant de son sens premier.
Remarqué par le courageux label indépendant Stilll qui s'est aussitôt senti investi de la mission délicate qui
consiste à propager leur parole pour contrer l'aseptisation ambiante, Vedette n'a aucun scrupule à ouvrir
grandes les portes d'une demeure depuis longtemps désertée où rôdent encore les fantômes d'une époque
révolue, et où chaque pièce, malgré le fatras qui y règne et qui nous empêche de distinguer la nature même du
sol surlequel il repose, possèdent un charme et une personnalité intimement lié à leur condition de faux
abandon. Telle une oeuvre de Escher, ses structures sans dessus dessous possèdent une logique interne qui
échappe à la logique communément admise, et ce en dépit des apparences. Un album pour le moins difficile
donc mais dont la nébuleuse beauté finira bien assez tôt par avoir raison de vous d'une manière ou d'une autre.
Note : 4/6
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BAJA : Maps/systemalheur
Chronique réalisée par Progmonster
Il y a les voyages organisés. Et puis, il y a ceux qui se décident sur un coup de tête, à l'écart des sentiers
balisés. Ce sont souvent ceux-là qui nous procurent les émotions les plus authentiques, ceux dont on se
souviendra encore longtemps pour toutes les anecdotes, tous les accidents, tous les bons moments que l'on
vit alors à cent pour cent parce qu'on a préféré s'en remettre à la part d'imprévisible qui peut parfois guider nos
existences. Phrase longue et laborieuse qui tente de traduire modestement tout ce qui se passe sur le disque
de l'allemand Daniel Vujanic sous la bannière de Baja. La nature schizoïde du projet "Maps/Systemalheur", il ne
faut pas nécessairement aller le chercher dans l'origine même du projet, combinaison de deux approches qui
auraient pu donner deux disques indépendants mais que l'oreille avisée du producteur a réussi à concentrer en
un seul élan de générosité (soixante-dix minutes). Les plages instrumentales de ce disque, les plus longues du
moins, sont très souvent fragementées, à un point tel que le découpage passerait presque pour anarchique
puisqu'au sein de ces morceaux langoureux qui ne négligent jamais le silence on peut découvrir toute une série
d'instants volés comme autant de photos souvenirs que l'on passe en revue les unes après les autres,
stimulant nos sens à la réminiscence d'embruns tantôt suaves tantôt musqués qui auraient égrené notre
parcours. "Maps/Systemalheur" s'écoute d'une traîte ou ne s'écoute pas. Mieux ; "Maps/Systemalheur" se vit !
Même si le système d'écriture employé par Baja transpire trop le dictat du laptop, l'album n'en est pas pour
autant dépourvu d'âme. Les couleurs pastels apportées par les percussions (vibraphone, marimba), la guitare
électro-acoustique et les rares cuivres (clarinette, soprano ?) donnent toute sa profondeur à un disque
éminemment poétique, cristallisant une rencontre jusque là encore inédite entre Kieren Hebden (Four Tet) et
Mark Hollis (Talk Talk).
Note : 5/6
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KONONO N°1 : Congotronics
Chronique réalisée par Progmonster
Prodigieux ! Konono N°1 est le fer de lance d'une nouvelle tendance qui fleurit depuis un certain temps dans les
bas quartiers de Kinshasa. Mawangu Mingiedi, joueur de likembé de son état et instigateur du présent projet,
explique que si ce dernier a vu le jour, c'est en réaction aux aléas de la vie moderne. Musicien traditionnel,
Mingiedi et les siens ont en effet de plus en plus de mal à se faire entendre dans une ville qui s'étend,
s'agrandit, se développe, apportant son lot quotidien de pollution aussi bien matérielle que sonore. Aussi, et
pour paraphraser Metallica, les Konono N°1 ne vont pas devoir combattre le feu par le feu, mais bien le bruit par
le bruit, en optant pour l'amplification ! Mégaphones pour propager le son, microphones faits maison à base de
bois sobrement rebaptisés lance-voix, batterie de fortune en récupérant et en empilant les vieilles casseroles
usagées de mama yebo et, cerise sur le gâteau, électrification des pianos à main africain, les fameux likembés,
dans un large orchestre où danseurs et danseuses (dommage, pas de photos), chanteurs et musiciens se
disputent la vedette. Ce n'est pas encore sur ce disque qu'on pourra saluer l'émergence du Jimi Hendrix des
mille collines, bien que Mingiedi soit un musicien hors pair (il manipule trois likembés simultanément, assurant
à la fois les rôles de pilier rythmique et de soliste), mais les sons générés par l'ensemble ont de quoi
surprendre ; même s'ils prennent racine dans le contexte familier des musiques traditionnelles, ils leur
apportent néanmoins une toute nouvelle dimension, pour le moins atypique et originale. C'est le label Crammed
Discs qui aura dégainé le plus vite en produisant ce premier volume des "Congotronics", initiative bienvenue
puisque, saluée par tant de succès, elle s'est depuis déjà enrichie d'un deuxième tome ! Et qu'on ne vienne pas
me dire cette fois que ces musiciens n'existent pas ; Konono N°1 est bel et bien réel, pas de doute là-dessus !
Note : 4/6
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LAST EXIT : S/t
Chronique réalisée par Progmonster
Mi-janvier 2007. Je vis mes dernières heures de liberté. Las, j'ai tourné en rond et cherché pendant longtemps
une porte de sortie qui puisse me satisfaire. Mais quel choix plus judicieux pouvait s'offrir à moi si ce n'est jeter
mon dévolu sur Last Exit, la dernière issue, le rendez-vous de l'extrême où quatre monstres sacrés allient leur
force pour donner forme à une créature hélas fort peu connue mais qui fût à l'origine d'un genre nouveau. J'en
suis conscient ; découvrir Last Exit vingt ans après sa première sortie officielle pourrait bien laisser sur sa faim
les quelques acharnés qui ingurgitent du Painkiller ou du Naked City matin, midi et soir. Pourtant, force est de
constater que sans Last Exit, le terrorisme jazzcore de John Zorn aurait sans doute eu bien du mal à s'extirper
de son imagination (on ne remettra pas en cause sa débordante créativité... en terme de marketing). Last Exit,
c'est la réunion exceptionnelle de quatre des jazzmen les plus fous furieux de la planète : Bill Laswell à la basse
- vous voyez, pas de quoi être franchement dépaysé - Peter Brötzmann au ténor, contorsionniste des voies
respiratoires devant l'éternel, Ronald "Shannon" Jackson à la batterie et le regretté Sonny Sharrock à la guitare,
sans doute le moins connu des quatre musiciens impliqués ici et qui est pourtant celui qui va le mieux sortir
son épingle du jeu. Des connexions subtiles unissent déjà nos quatre hommes (c'est à se demander avec qui
Laswell n'a jamais joué, Shannon Jackson étant pour beaucoup dans la réussite de son fameux "Baselines"),
elles sont aussi concrètes, physiques, que purement symboliques. Assurant un rôle qu'aurait très bien pu
remplir quelqu'un comme James "Blood" Ulmer dont il est finalement fort proche, Sharrock et Jackson
adaptent les préceptes du Prime Time d'Ornette Coleman à la violence d'un Brötzmann et à la vitesse d'un
Laswell fraîchement rôdé du côté de Material et Massacre. C'est toute cette énergie qui est concentrée dans les
quarante premières minutes de ce témoignage enregistré en concert à Paris en 1986. Une vraie révolution pour
l'époque, injustement passée sous silence.
Note : 4/6
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LAST EXIT : The noise of trouble
Chronique réalisée par Progmonster
Tout comme le premier Last Exit, "The Noise of Trouble" est lui aussi un enregistrement live, assemblé cette
fois autour de deux performances données par le groupe fin 1986 respectivement au Parco Space et au Pit Inn
de Tokyo. En fait, excepté "Iron Path" qui suivra d'ici peu, tous les albums de Last Exit proviennent de la scène,
ce qui en dit long sur le caractère unique de cette formation à la durée de vie expéditive (pas plus de deux ans)
dont le terrain de jeu principal restait les salles de concerts où leur immuable volonté d'improviser leur
permettait de se réinventer un peu plus chaque jour. Trois petites subtilités, de la plus anodine à la plus
significative, permettent de déterminer quelle place dans la hiérarchie de leur discographie cette nouvelle
réalisation se doit d'occuper. "The Noise of Trouble" se fait un point d'honneur à signaler la présence du
clarinettiste japonais Akira Sakata, ainsi que celle de Herbie Hancock. Il faut rétablir la vérité historique ; en
réalité, les deux musiciens ne participent pas à l'effort de groupe, chacun d'eux contribuant à en élargir la
palette sonore, l'un sur "Needles Balls" pour un duo d'instruments à vents à vocation volontairement comique
par instants, l'autre sur "Help Me Mo', I'm Blind", où rien de vraiment déterminant ne se produit. De manière
générale, ce live au Japon est celui où les racines blues transparaissent le plus, notamment à cause (ou grâce)
aux interventions vocales de Ronald Shannon Jackson (le medley "Straw Dog/You Got Me Rockin'/Take
Cover/Ma Rainey/Crack Butter" qui sent le chaud et le froid, et parfois même le réchauffé). On est en droit de se
poser la question : quel réel besoin de le revendiquer ? Le blues restant au demeurant le langage musical sur
lequel il est le plus facile d'improviser... Le propos n'en est pas fondamentalement déforcé mais au milieu de
ces diversions et autres exercices de style ("Panzer Be-Bop", "Pig Cheese"), "The Noise of Trouble" est certes
un nouvel élément à rajouter au dossier, mais pas un de ceux qui nous en apprendra le plus sur Last Exit.
Note : 3/6
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LAST EXIT : Iron path
Chronique réalisée par Progmonster
"Iron Path" est la mise en abîme d'un devenir volé. Cet unique album studio de Last Exit nous montre à quel
point le contexte a une incidence considérable sur la musique - même si nous le savions déjà - mais plus
particulièrement en matière de jazz, fusse-t-il aussi aventureux que celui-ci. Le sentiment d'urgence inhérent au
groupe et à l'improvisation dont il se nourrit est toujours palpable, mais la construction des titres laisse à
penser que, dans de telles circonstances, le trait se fait plus sûr et maîtrisé, là où d'habitude on s'en remet plus
volontiers à un brouillon réalisé à main levée, quitte à affiner les traits du croquis au fur et à mesure. Celui qui
en bénéficie sans doute le plus, c'est Sonny Sharrock ; le guitariste double ses pistes, juxtaposant riffs et
nappes de sons inquiétants générés à partir d'effets larsens (plus sans doute de légères touches de
synthétiseurs non crédités). Cela a pour conséquence immédiate de circonscrire Last Exit dans un espace
prédéterminé où le groupe a l'occasion de tailler un costume sur mesure aux explorations thématiques qui leur
sont si chères. Les titres s'enchaînent sans temps morts et se présentent souvent comme autant de manières
différentes d'aborder le même problème à chaque fois sous un nouveau jour, seulement interrompus dans cette
progression par l'ensoleillé "Sand Dancer". Moins hystérique et donc finalement beaucoup plus posé que les
innombrables témoignages en concert qui constituent la charpente de leur oeuvre, "Iron Path" nous permet
d'envisager le laboratoire Last Exit sous un angle inédit par choix, mais unique par raison, dessinant les
perspectives d'un groupe qui visiblement pouvait être bien plus que simplement une bête aveugle et
dangeureuse mûe seulement par la rage et la colère ; une bête en pleine possession de ses moyens et qui sait
exactement quoi faire et comment pour parvenir à ses fins et assouvir ainsi ses plus bas instincts. C'est sans
doute nettement moins spectaculaire, mais en tout cas beaucoup plus sournois.
Note : 4/6
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LAST EXIT : Köln
Chronique réalisée par Progmonster
Épineux cas que celui de "Köln". Pour une obscure question de droits opposant Bill Laswell à l'ancien label
Enemy, la publication officielle de ce disque fût gelée pendant plus de quatre ans (!) alors qu'il s'agit, d'un point
de vue purement historique, parmi les toutes premières captations de Last Exit en concert, avant même ce qui
allait donner la matière première à leur album éponyme... Pour ses débuts, Last Exit se trouve encore sur les
terres du hurleur Brötzmann et "Köln" de s'imposer très vite comme le Last Exit qu'il faut avoir écouté.
Pourtant, ça me gêne terriblement d'écrire en ces termes ; c'est typiquement le genre de phrases définitives que
certains lecteurs attendent pour s'éviter des investigations laborieuses, trop pressés d'atteindre le Saint Graal
tout de suite, sans efforts. Le mauvais côté de la chose - et vous le savez - c'est que vous vous mettez alors
volontairement à l'écart de découvertes qui pourrait peut-être bien vous toucher davantage. Pourtant, il m'est
bien difficile d'envisager de parler autrement de ce disque tant ce qu'il nous propose semble à l'abri de toutes
formes d'objections. Faut bien se dire une chose ; c'est que, même si constitués de vieux routiers, en 1986,
Last Exit est alors un jeune groupe. Et c'est cette débordante vitalité qu'on entend sur "Köln", avant que les
habitudes et la routine viennent entâcher la dose de spontanéité propre à toute musique improvisée. Est-ce
parce qu'il est ici face à son public que Brötzmann hurle tant ? En tandem avec Sharrock sur les traces d'un
chaos électrique qu'ils sont alors les premiers à rôder, la section rythmique Laswell/Jackson fait front avec
bravoure (et non pas bravitude), redoublant d'inventivité. Du monumental "Hard School" aux plus expéditifs
"Take A Beating" ou "Last Call", Last Exit se ballade comme un chien fou pendant près de quarante minute, à la
recherche d'une issue qui a pour seul nom liberté. Ah, et dernière chose : Atavistic a eu la grande idée de
rééditer ce disque en 2005. Vous savez ce qu'il vous reste à faire avant qu'il ne disparaisse à son tour de leur
catalogue...
Note : 5/6
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LAST EXIT : Headfirst into the flames
Chronique réalisée par Progmonster
Fond de tirroir qui émergera en 1993 seulement, alors que la messe est dite depuis longtemps et que de
nombreux autres groupes se sont empressés de reprendre à leur compte la formule que Last Exit avait initié
sans jamais récontrer le moindre succès critique ou public, "Headfirst Into The Flames" vient compléter la
légende du quatuor jazzcore avec ce qui s'apparente à un pamphlet noise. La reproduction sonore de ce
montage audio restituant des bribes de concerts accumulés aux quatre coins de l'Europe à la fin des années
quatre-vingt perd en définition ce qu'elle gagne en dynamique. Avec une qualité qui frise le bootleg par
moments, ne serait-ce que dans le mauvais équilibrage des balances et une prise de son qui se ballade parfois
on ne sait trop pourquoi, "Headfirst Into The Flames" est peut-être bien l'album de Last Exit le plus destroy, au
propre comme au figuré. La manière dont les titres ont été édités y est pour beaucoup aussi, déboulant souvent
au coeur de l'action, quand le groupe est en plein boeuf et semble ne plus trop prêter attention à ce qui se
passe, fascinés qu'ils sont eux-mêmes par le boucan qu'ils parviennent à générer. Sharrock et Brötzmann (ce
dernier étant malheureusement relativement sous-mixé par rapport à l'ensemble, à moins que Sharrock soit lui
sur-mixé...) s'abandonnent sans compter, rappelant la sauvagerie déployée par le King Crimson de la grande
époque comme illustré dans le coffret "The Great Deceiver" (les notes hautes et tendues du guitariste sur
"Jesus ! What Gorgeous Monkeys We Are" ou "Hanged Man Are Always Naked" n'en sont qu'un bref aperçu).
Brutal et dense la plupart du temps, malgré quelques zones de repos judicieusement placées sur leur parcours
accidenté, "Headfirst Into the flames" est peut-être aussi un peu trop long, ses soixantes généreuses minutes
risquant de friser la lobotomie parmi les profanes. Comme en toutes bonnes choses, à consommer avec
modération si vous désirez en préserver toute la saveur. Et c'est plutôt corsé...
Note : 5/6
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LAST EXIT : From the board
Chronique réalisée par Progmonster
Connu aussi sous le nom de "Cassette Recordings '87" paru en 1988 sur le label Celluloid, "From The Board"
est une réédition tardive que l'on doit à Enemy et qui ne propose aucune autre amélioration (ni détérioration
d'ailleurs) du pressage d'origine, si ce n'est que le tout est présenté sous un titre et un emballage différent, de
quoi alimenter la confusion... Si l'on devait le comparer à "Headfirst Into the Flames", "From The Board" jouit
d'une production plus soignée, attachée au détail, mais qui perd aussi par conséquent en profondeur. On ne
peut décidément pas tout avoir... Paradoxalement, bien qu'enregistré lors de leur tournée de 1986 à travers
l'Europe et les États-Unis, cette série de performances mises elles aussi bout à bout parviennent difficilement à
dégager la même puissance que celles, plus tardives de "Headfirst Into the Flames". Mais pourquoi donc avoir
décidé de le publier ? C'est sans doute qu'alors Last Exit n'avait pas encore mieux à proposer. La longue suite
"Line of Fire" tourne en rond pendant trop longtemps avant de finalement se fixer sur un thème où le groupe
préfère assurer ses arrières plutôt que de tenter vraiment quelque chose. "Hard School" ne tombait jamais dans
ce travers. C'est assez embêtant, d'autant qu'à lui seul "Line of Fire" représente plus de cinquante pour cent de
l'album... Le constat est malheureusement de même nature sur les pièces plus courtes, laissant apparaître ça et
là quelques tics de langage acculant Last Exit au rang d'institution et non plus de révolution. Les quelques
trouvailles sonores se développent sur base d'une recherche texturale sans réelle incidence au détriment d'une
pure énergie ("Ulli Bulli Fooli" et nouvelle version de "Ma Rainey" où Ronald Shannon Jackson se souvient de
Buddy Miles). Le plus triste dans tout ça, c'est que les personnes que ce discours ne touche pas n'entenderont
jamais aucune différence entre cet album et, par exemple, "Köln". Pour eux, cela restera toujours du n'importe
quoi. Tant qu'à faire, je préfère que ce n'importe quoi en ait des grosses comme ça.
Note : 3/6
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HOFFMANN-HOOCK & FRIENDS : Psychedelic Breakfast
Chronique réalisée par Phaedream
Il n’y a vraiment que Klaus Hoffmann Hoock pour réaliser un tel projet. Psychedelic Breakfast est vraiment ce
que ça veut dire; un déjeuner musique entre amis, histoire de profiter de la vie, de s’épanouir avec les sourires
amicaux qui vous entoure.
Et c’est avec Paradiso que ce déjeuner psychédélique débute. Une des premières œuvres de MOM, Paradiso
est une lente procession qui démarre ici avec un étrange bourdonnement tribal et la prière matinale. Les
premiers accords filtrent une réverbération qui se mélange parfaitement à une basse à progression sensuelle.
Le piano de Stephen Parsick est d’une douceur virginale sur un mellotron dense, aux voiles lourdes et
sensibles qui se moulent en parfaite symbiose avec un mouvement crescendo d’une infini tendresse. Ceux qui
ne connaissent pas le mellotron, ni son effet romanesque ont tout intérêt à découvrir le charme profond de cet
instrument. Ici, Klaus Hoffmann Hook nous sert toute une prestance; des moments magiques, ondulatoires où
les ondes et les vagues sonores s’entrecroisent dans une atmosphère paradisiaque. Raga reflète l’aspect
psychédélique du déjeuner. Le sitar de KHH est tranchant sur des vocales errantes et des percussions
maisons. MoM-Medley est un collectif de guitares acoustiques aux accords vifs, où les hôtes interprètent des
segments du répertoire de MOM, avec une dextérité étonnante et un sens du rythme bien affûté. Un très beau
moment qui nous amène à l’atmosphérique et très Ashraienne Sehnsucht. Spatiale et flottante, la guitare
électrique résonne dans une ambiance lunaire où de placides voiles de synthétiseurs flottent dans la stridence
d’une six-cordes planante. Un merveilleux moment d’une ère Krautrock planant que l’on retrouve d’une façon
plus élaborée sur le splendide Ganges.
Heart of the Sun est une interprétation, aux riffs coulants, de cet hymne psychédélique de Pink Floyd.
L’interprétation est d’un réalisme étonnant, dépassant même les lubies les délirantes du quatuor Anglais. Un
vrai tourbillon d’une violence psychédélique statique, dans une atmosphère musicale survoltée, sur un
magnifique jeu de guitare enflammée. Plus animé que Ganges, Sri D exploite les mêmes sentiers flottants d’un
rock spatial des années 70 avec un jeu de clavier discret, une orgue lancinante, des tablas et une basse
moulante, qui donnent plus de vigueur à une impulsion passive qui se terre dans la noirceur d’un silence
cosmique.
Psychedelic Breakfast de Mind Over Matter répond nettement aux attentes crées par son titre. Dans une
ambiance très intimiste, les musiciens de MOM donnent un concert qui nous rejoint. Un concert auquel on
s’identifie sans problème, grâce à une magnifique prise de son, qui nous rapproche plus. Une fois assis bien
relaxe, on a l’impression d’y être. Et ce n’est pas parce que c’est un déjeuner que c’est nécessairement
tranquille. Certes, il y a des moments doux, mais le côté sauvage et rebelle de Klaus Hoffmann Hoock jaillit
assez souvent, pour le plus grand plaisir de l’écoute. Un autre bon album pour Mind Over Matter, un groupe qui
résiste au temps tout en gardant son identité.
DISPONIBLE AU : http://www.mindala.de/
Note : 5/6
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MIND OVER MATTER : On the Wings of the Wind
Chronique réalisée par Phaedream
De délicats bruits de la nature ouvrent Crossing Jamuna River (Balloonflight Of Our Fantasy). Des insectes qui
chantent, qui charment sur un clapotis d’eau. Avec le titre et la pochette, nous savons que nous survolons la
rivière Jumani, par un moment paisible qui nous permet d’entendre aussi loin que le vent n’interfère. Le synthé
flotte parmi les merveilleux souffles d’une flûte à bec.
La tranquillité de l’atmosphère, la fusion entre la flûte et le synthé sur les accords d’un sitar sont des moments
d’apaisement unique qui s’étend aussi loin que nos yeux percent l’horizon. Klaus Hoffmann-Hoock est au
paradis. Aussi haut que les nuages, lui et son comparse flûtiste, Volker Kuinke 2 fois champion Européen de
montgolfières, sillonnent les hauteurs d’Asie à la recherche d’inspiration. Et sur cette première pièce, nous y
sommes. On se ferme les yeux et la connexion ce fait. On a l’impression d’y être, de voir les images que la
musique décrie si habillement, avec tendresse et émerveillement. C’est avec d’étonnants tonnerres que débute
Mountain Thunder. Un titre à essence tribale avec ses percussions tablas qui flottent sur d’épaisses strates
mellotronnées aux mouvements lascifs. Le bruit de l’eau qui coule, se mélange avec les souffles magiques de
la flûte de Volker Kuinke, sur l’intro de Journey to Brittany. Une voix céleste s’élève parmi cette transition. Mi
animal, mi humaine elle se mue en souffles éthérés, comme les passages synthétiques que le vent soulève au
dessus des nuages. Flottant, avec de mélodieuses harmonies flûtées Journey to Brittany doit sa beauté à son
environnement. Un étrange tic tac émerge d’un concerto pour insectes qu’un infime tourbillon carillonné
enterre à moitié. Fullmoon Desert devient une superbe mélodie, sur un mouvement atonique, truffée de
carillons et serpentins scintillants de notes harmonieuses qui spiralent avec tendresse. Cloud Ghosts ouvre sur
des bourdonnements qui se joignent à de doux souffles flûtés. Bercé par des nappes synthétiques, à peine
muable, cette lente procession progresse sur une belle basse sensuelle qui ondule une intonation animée de
fines percussions tablas. Cloud Ghosts est un beau titre d’une douceur nostalgique qu’une belle flûte
surdimensionne la beauté sur de splendides strates synthétiques qui soufflent dans une ambiance aux
murmures hostiles.
On the Wings of the Wind est tout un voyage musical où Mind Over Matter trace un portrait romantique d’un
bout de planète que nos yeux ne fouleront sans doute jamais, mais que nos oreilles auront vues, grâce à la
perspicacité de Mind Over Matter.
Note : 4/6
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Informations
Vous pouvez retrouvez nos chroniques et nos articles sur www.gutsofdarkness.com.
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Table des matières
Les chroniques ........................................................................................................................................................................... 3
ISIS + AEREOGRAMME : In the fishtank/14 .................................................................................................................. 4
CALLISTO : Signal to the Stars ........................................................................................................................................ 5
XIMENG / SOLAZZO (Domenico) : Ximeng vs. Domenico Solazzo split EP................................................................ 7
VAN DER WOUDEN (René) : Pro Sequentia .................................................................................................................. 8
VAN DER WOUDEN (René) : Alchemia ....................................................................................................................... 10
EBIA : Elosophy .............................................................................................................................................................. 12
COUTURIER (François) : Nostalghia - Song for Tarkovsky.......................................................................................... 14
ARTEMIEV (Edouard) : Tarkovski par Artemiev : Solaris, Le miroir, Stalker.............................................................. 15
CAVE AND THE BAD SEEDS (Nick) : Your funeral...my trial ................................................................................... 17
CAVE AND THE BAD SEEDS (Nick) : Murder ballads ............................................................................................... 18
LUDMILA : Disadorne .................................................................................................................................................... 19
MIND OVER MATTER : Indian Meditation Vol. 2 ....................................................................................................... 20
DEAD MAN IN RENO : Dead Man In Reno.................................................................................................................. 21
BOYS FIRST TIME : The Final Soul Trade ................................................................................................................... 22
SALVING THY AMISS : Horsewreck, Oh Trail's Highlight ......................................................................................... 23
VAN BOGAERT (Frank) : One Out Of Five The Best of Frank Van Bogaert ............................................................... 24
SVARTSYN : Skinning the lambs................................................................................................................................... 26
LA BARBARA (Joan) : Voice is the original instrument................................................................................................ 27
ELEMENT 4 : Neotunes .................................................................................................................................................. 28
BRAINWORK : Back to Future ...................................................................................................................................... 30
BLUT AUS NORD : Mort ............................................................................................................................................... 32
TRIBES OF NEUROT : Meridian ................................................................................................................................... 33
KOEPPER (Jeffrey) : Momentium................................................................................................................................... 34
ROACH (Steve) : Life Sequences.................................................................................................................................... 36
TANGERINE DREAM : Live Brighton 1986 ................................................................................................................. 38
TANGERINE DREAM : Live Cleveland 1986 ............................................................................................................... 40
TANGERINE DREAM : Live Ottawa 1986.................................................................................................................... 42
JAMES TRIO (Bob) : Explosions.................................................................................................................................... 44
BYBLOS : Energy............................................................................................................................................................ 45
INDRA : Ocean of Silence............................................................................................................................................... 47
MYTHOS : Mysteria - An Electronic Journey Into Sound.............................................................................................. 48
[´ramp] : Looking Back in Anger..................................................................................................................................... 50
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FOREST SILENCE : Philosophy of winter ..................................................................................................................... 52
FURZE : Necromanzee cogent......................................................................................................................................... 53
[´ramp] : Oughtibridge ..................................................................................................................................................... 54
MAMMATUS : S/t .......................................................................................................................................................... 56
LA DIAGONALE DU FOU : La forme du vent.............................................................................................................. 57
ASH RA TEMPEL : S/t ................................................................................................................................................... 58
BEREAVED : The spirit driven by hate .......................................................................................................................... 60
ARKAN : Burning flesh................................................................................................................................................... 61
SOLACE OF REQUIEM : Utopia reborn........................................................................................................................ 62
ZORN (John) : Moonchild ............................................................................................................................................... 63
ZORN (John) : Astronome ............................................................................................................................................... 64
YAKUZA : Way of the dead............................................................................................................................................ 65
UFOMAMMUT : Snailking............................................................................................................................................. 66
SULA BASSANA : Dreamer........................................................................................................................................... 67
VAN BOGAERT (Frank) : Nomads ................................................................................................................................ 68
GLEISBERG (Rüdiger) : Fragile Fairytales .................................................................................................................... 70
PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Music from the Penguin Café Orchestra ................................................................. 72
PENGUIN CAFE ORCHESTRA : S/t............................................................................................................................. 73
PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Broadcasting from home.......................................................................................... 74
PENGUIN CAFE ORCHESTRA : Signs of life.............................................................................................................. 75
ARCADE FIRE : Funeral................................................................................................................................................. 76
E=MOTION : Telepath .................................................................................................................................................... 78
ESP : The Gate ................................................................................................................................................................. 80
HANCOCK (Herbie) : Takin' off..................................................................................................................................... 82
HANCOCK (Herbie) : My point of view......................................................................................................................... 83
HANCOCK (Herbie) : Inventions & dimensions ............................................................................................................ 84
HANCOCK (Herbie) : Empyrean isles ............................................................................................................................ 85
HANCOCK (Herbie) : Maiden voyage............................................................................................................................ 86
HANCOCK (Herbie) : Speak like a child ........................................................................................................................ 87
HANCOCK (Herbie) : The prisoner ................................................................................................................................ 88
HANCOCK (Herbie) : Fat Albert Rotunda...................................................................................................................... 89
HANCOCK (Herbie) : Head hunters ............................................................................................................................... 90
HANCOCK (Herbie) : Thrust .......................................................................................................................................... 91
HANCOCK (Herbie) : Man-child.................................................................................................................................... 92
HANCOCK (Herbie) : Flood ........................................................................................................................................... 93
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HANCOCK (Herbie) : Secrets ......................................................................................................................................... 94
HANCOCK (Herbie) : Directstep .................................................................................................................................... 95
HANCOCK (Herbie) : Future shock................................................................................................................................ 96
HANCOCK (Herbie) : Future 2 future............................................................................................................................. 97
VAN DER WOUDEN (René) : Recreation ..................................................................................................................... 98
SCALD : Vermiculatus .................................................................................................................................................. 100
MAXXESS : Offroad ..................................................................................................................................................... 101
COMPILATION DIVERS : Père-Lachaise ................................................................................................................... 102
HOROLOGIUM : Songs for hunters ............................................................................................................................. 103
DIE KRUPPS : I............................................................................................................................................................. 104
COMPILATION DIVERS : Extreme music from Africa.............................................................................................. 105
NURSE WITH WOUND : Chance meeting on a dissecting table of a sewing machine and an umbrella.................... 106
ANTIGAMA / DEFORMED : Roots of chaos .............................................................................................................. 107
MISERY SIGNALS : Mirrors........................................................................................................................................ 108
DEAD HEARTS : Bitter verses ..................................................................................................................................... 109
SKALDIC CURSE : Pathogen....................................................................................................................................... 110
ENSLAVED : Isa ........................................................................................................................................................... 111
HARMS WAY : Oxytocin ............................................................................................................................................. 112
PAGANIZE : Evolution hour......................................................................................................................................... 113
CRAFT : Fuck the universe............................................................................................................................................ 114
SENSITIVE CHAOS : Leak .......................................................................................................................................... 115
COX (Ben) : On Water................................................................................................................................................... 116
PADILLA & ZERO OHMS : Path of Least Resistance ................................................................................................ 117
SCHULZE (Klaus) : Miditerranean Pads....................................................................................................................... 119
LFO : Advance ............................................................................................................................................................... 121
COMPILATION DIVERS : ...All my dead friends ....................................................................................................... 122
ROACH (Steve) : Kairos................................................................................................................................................ 123
ROACH (Steve) : Core................................................................................................................................................... 125
HINT : Product topology................................................................................................................................................ 127
HINT : Wu-Wei.............................................................................................................................................................. 128
GOLGATHA : Seven pillars - Reflections on the myth of Thomas Edward Lawrence................................................ 129
TANGERINE DREAM : Live At The Tempodrome Berlin 2006 ................................................................................ 130
TANGERINE DREAM : Live at The Guild Hall Preston 1980 .................................................................................... 132
MISSTRIP : Sibylline .................................................................................................................................................... 134
MAPLEBEE : Hello Eve................................................................................................................................................ 135
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JOHANSSON (Pär) : The empty palace ........................................................................................................................ 136
HAERETICUS : Our legions fight religions.................................................................................................................. 137
LAC PLACIDE : Closer................................................................................................................................................. 138
ALPHA LYRA : Music for the Stars ............................................................................................................................. 139
ALPHA LYRA : Aquarius ............................................................................................................................................. 140
JUSTICE : Waters of Nazareth ...................................................................................................................................... 141
NEBELUNG : Mistelteinn ............................................................................................................................................. 142
MERGENER ET AMICI : Nox Mystica ....................................................................................................................... 144
DELTRON3030 : S/t...................................................................................................................................................... 146
DYSRHYTHMIA : Barriers and passages..................................................................................................................... 147
THE BLACK HEART PROCESSION + SOLBAKKEN : In the fishtank/11 .............................................................. 148
THE BLACK HEART PROCESSION : The spell ........................................................................................................ 149
TANGERINE DREAM : Three O'Clock High .............................................................................................................. 150
STAHLWERK 9 / COLD FUSION / RUKKANOR : Triumvire................................................................................. 151
TANGERINE DREAM : Near Dark.............................................................................................................................. 152
TANGERINE DREAM : Shy People ............................................................................................................................ 153
TANGERINE DREAM : Optical Race.......................................................................................................................... 154
SCHULZE (Klaus) : En=Trance .................................................................................................................................... 155
AIR : Talkie walkie ........................................................................................................................................................ 157
WILT : Dark meadows................................................................................................................................................... 158
ARTEFACTUM : Rosarium hermeticum ...................................................................................................................... 159
GHOULTOWN : Bury them deep ................................................................................................................................. 160
QUADRA : First Contact ............................................................................................................................................... 161
HUYGEN (Michel) : Angkor......................................................................................................................................... 163
WOLFMOTHER : Wolfmother ..................................................................................................................................... 164
LE VENE DI LUCRETIA : Le vene di Lucretia ........................................................................................................... 165
COMPILATION DIVERS : Hampshire Jam 'Jam' 2006 ............................................................................................... 166
LA KEMIA : S/t ............................................................................................................................................................. 168
VEDETTE : S/t .............................................................................................................................................................. 169
BAJA : Maps/systemalheur............................................................................................................................................ 170
KONONO N°1 : Congotronics....................................................................................................................................... 171
LAST EXIT : S/t ............................................................................................................................................................ 172
LAST EXIT : The noise of trouble ................................................................................................................................ 173
LAST EXIT : Iron path .................................................................................................................................................. 174
LAST EXIT : Köln......................................................................................................................................................... 175
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LAST EXIT : Headfirst into the flames ......................................................................................................................... 176
LAST EXIT : From the board ........................................................................................................................................ 177
HOFFMANN-HOOCK & FRIENDS : Psychedelic Breakfast...................................................................................... 178
MIND OVER MATTER : On the Wings of the Wind................................................................................................... 179
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