la PhotograPhie DanS le marché De l`art

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DANIEL MORI,
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La photographie
dans le marché de l'a rt
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Andreas Gursky, « Rhein II », valeur : 4,3 millions de dollars
ENTRE LES LIGNES
Fre ddy Gir arde t
Que vous inspire cette citation DE François-René de Chateaubriand ?
« Le goût est le bon sens du génie »
Freddy Girardet
Que voilà une affirmation péremptoire
qui, pour moi, va trop loin tant il est vrai,
aussi, que tous les goûts sont dans la nature.
Vouloir hiérarchiser, les lier au génie uniquement n’est, pour moi, rien d’autre qu’une
faute de… goût et même de mauvais goût.
ce sont des paramètres avec lesquels il faut
compter, mais de là à tout sacrifier sur l’autel
de la modernité, il y a un pas que je ne franchirai pas.
Connaître et savoir apprécier le goût des
choses, leurs qualités et leurs authenticités
pour ensuite les mettre en valeur, sont des
facultés qui relèvent du bon sens ou pour
le moins y font appel, mais avant tout, pour
moi, la gastronomie est aussi une affaire de
sensibilité, de partage et d’amour…que le
bon sens et le génie ne remplaceront jamais !
En revanche, j’ai toujours considéré que les
saveurs, surtout l’assemblage des celles-ci,
répondait à certains critères qu’un bon chef
de cuisine devait savoir respecter.
Certes, il ne s’agit pas d’enfermer la gastronomie dans un carcan qui empêcherait
toute évolution. Les temps changent, les
habitudes culinaires aussi et de nos jours
3
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é dit o / impre s s um
éditorial
Elena Budnikova
Journalistes et artistes ont en commun de n’exister vraiment que par
l’audience qu’ils agrègent autour
d’eux, laquelle est tributaire de ces
instances de légitimation. L’information et l’œuvre sont-elles pour
autant de qualité ? C’est une autre
affaire car, pour paraphraser le
sociologue américain Howard
Becker, ni l’une ni l’autre ne sont
le fruit d'un concepteur isolé, mais
résultent de « la coopération d'un
grand nombre d'individus qui
s'accordent sur des conventions
particulières ».
Arnaud dotézac, Directeur des rédactions
L’information et l’art contemporain ont en commun de reposer sur des instances de légitimation.
Pour l’information, il s’agit des intermédiaires
médiatiques que sont les agences de presse, les
grands journaux (papier, radio, tv), les blogs, mais
aussi les experts et les leaders d’opinion. Dans
l’art, ce sont les galeries, les musées, les grandes
maisons de ventes aux enchères, les critiques
d’art, les universitaires spécialisés et les grands
collectionneurs.
Éditeur
Swiss Business Media
49, route des Jeunes
1227 Carouge / Genève
tél. + 41 22 301 59 12
fax. + 41 22 301 59 14
ISSN 1661-934X
Directeur de la publication
Boris Sakowitsch
tél. + 41 22 301 59 12
[email protected]
Directeur des rédactions
Arnaud Dotézac
tél. + 41 22 301 59 16
[email protected]
Rédactrice en Chef
Cahier Patrimoine(s)
Anne Barrat
tél. + 41 78 300 54 64
[email protected]
Chef d’édition
Amandine Sasso
tél. + 41 22 301 59 12
[email protected]
Rédaction
Franck Belaich
Bertrand Carlier
Benoît Chappuis
Thomas Chapuis
Anton Dombrovsky
Michel Donegani
Alain Freymond
René-Georges Gaultier
La qualité n’est ni affaire d’objectivité, ni de subjectivité, mais de
conventions. Être communiste
en France durant la guerre froide,
incluait la convention de croire
en la « Pravda », la vérité légitimée
par les instances du Parti. Être collectionneur d’art contemporain
aujourd’hui, inclut d’adhérer aux
« conventions d’originalité » fixées
par les instances de l’art.
les époques féodales, classiques et
modernes, les outils de contrôle
de la pensée dominante ont certes
varié, mais pas leur nécessité. L’art
n’y a jamais échappé, pas plus hier
qu’aujourd’hui, laissant le public
dans les jeux d’illusion du vrai et du
créé, du juste et du beau. Mais s’il est
évident que l’art officiel de l’URSS
était commandité, ça le fut beaucoup moins pour l’art contemporain
d’Occident, même si c’est tout aussi
vrai. Ce qui est encore moins connu,
c’est que l’entrée de la photographie
dans le marché de l’art n’y a pas
échappé. Ce qui n’enlève en rien à
ces œuvres le plein droit d’y avoir
leur place.
Quant à la création de l’information,
elle aussi a toujours été un art.
Il existe un autre point commun
entre l’art contemporain et l’information, celui des influences clandestines. Le gouvernement des
humains n’a jamais pu se passer de
l’influence sur l’information. Entre
Pierre-Emmanuel Iseux
George Iwanicki
Daniel Kohler
Axel Marguet
Céline Moine
Antoine Praz
Jean-Sébastien Robine
François Savary
Loïc Schmid
Christian Staub
Thomas Veillet
Christian Zeitler
Correction
Caroline Gadenne
Marion Piroux
Directeurs de création
Vincent Nicolò
Aurélie Vogt
8
Direction artistique
Elena Budnikova
[email protected]
Graphiques et Infographies
Vincent Nicolò
Directeur commercial
John Hartung
tél. + 41 22 301 59 13
[email protected]
service Publicité
tél. + 41 22 301 59 13
[email protected]
Marianne Bechtel-Croze
tél. + 41 79 379 82 71
[email protected]
direction Marketing
Anne-Françoise Hulliger
tél. + 41 76 431 64 76
[email protected]
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SOMMAIRE N° 124
03Entre les lignes
06Contrechamp(s)
chronique(s)
12Photographies et droit d’auteur .
par François Besse
actualité
22
18Contexte(s)
dossier (couverture)
22La photographie
dans le marché de l'a rt
22 L’entrée de la photographie
dans le marché de l’art
par Arnaud Dotézac
32 Focus sur le marché de la photographie
par Arnaud Dotézac
36 Entretien avec Tatyana Franck,
directrice du musée de l’Élysée
cahier patrimoine(s)
42
41Sommaire détaillé
42 DOSSIER : Pour une performance durable
62IMMOSCOPE
66INVESTIR
82INvité : Daniel Mori, CEO de Visilab
index
82
86
10
86Immobilier :
13 acteurs d’influence
SOMMAIRE N° 124
culture(s)
102Le photographiable
par Boris Sakowitsch
106Marché de l’art :
Une cote à l'américaine, le cas Jackson Pollock
110
Philanthropie(s)
:
Sauveteurs sans frontières
114
hédonisme(S)
Jolis flacons
126
102
116 Photographe du mois
106
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INVESTIR
PHILANTHROPIE(S)
CULTURE(S)
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S’ENSOLEILLENT
SIGNIFICATIONS
DU RIRE
INDEX
TIBÈRE ADLER,
DIRECTEUR ROMAND
D’AVENIR SUISSE
MARCHÉ DE L’ART
ALBERTO
GIACOMETTI :
LA SCULPTURE
AU PLUS HAUT
ÉDUCATION :
15 MENTORS
D’INFLUENCE
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chro nique / re g ard ( s )
Elena Budnikova
Photographies
et droits d’auteur
François Besse
L’horloge de la mairie vient d’indiquer quinze
heures lorsqu’apparaît, sur le perron, un couple
fraîchement uni. L’épouse est magnifique, dans
sa robe d’organza. Elle provoque un attroupement de badauds qui rivalisent de commentaires et sortent leur téléphone portable pour
immortaliser cet instant et le partager sur la
toile. Quelques minutes ont suffi pour que
la photo de ce moment somme toute intime
soit ainsi livré au mieux à l’œil admiratif des
passants, selon le cas à leur regard critique ou
envieux, le cas échéant à leur œil mercantile.
Ce n’est qu’un exemple de scènes de la vie quotidienne. Avec l’avènement des réseaux que
l’on dit sociaux et depuis que les téléphones
portables permettent les prises de vue, et le
plus souvent de très grande qualité, la photographie et la diffusion d’images paraissent ne
plus avoir de limites.
La protection de la vie privée constitue pourtant
une limite parfaitement claire à la prise et à
l’utilisation de telles images. En effet, d’une
manière générale, que l’on raisonne sur la
base du droit suisse ou du droit des pays qui
nous entourent, toute personne est en droit de
s’opposer, quelle que soit d’ailleurs la nature
du support utilisé, à la reproduction et à la
12
diffusion, sans son autorisation expresse, de
son image. L'autorisation de la captation ou
de la diffusion de l'image d'une personne doit
être expresse et suffisamment précise quant
aux modalités de son utilisation. Les exceptions ne concernent en fin de compte que les
personnages publics ou les photographies prises
dans un lieu public sur lesquelles l’identification des personnes figurant sur la photo n’est
pas possible. Inutile de se voiler la face, même
si l’on pourra toujours tenter d’arguer d’un
consentement tacite à la prise et à la diffusion
de l’image, les moyens techniques modernes
nous mettent trop fréquemment en situation
d’infraction. Notre mariée en organza est donc
incontestablement en droit de refuser qu’un
inconnu saisisse son image – sous cet angle
cependant, l’artiste en herbe pourra tenter de
se prévaloir de son consentement tacite – mais
surtout que cet inconnu utilise cette photographie sur quelque support que ce soit. Dont acte !
Les techniques modernes sont décidément
formidables. Non seulement elles permettent
de capturer des images et de les diffuser dans
le monde entier au moyen d’un téléphone (oui
Monsieur Bell, vous avez bien lu, c’est bien
d’un téléphone dont il est question !), mais elles
permettent également à quiconque de les dupliquer, les partager ou les rediffuser, et ce sans
limite technique aucune. À ce jeu-là toutefois,
même les professionnels finissent par se faire
prendre. Qu’on se souvienne par exemple de
cette condamnation du quotidien 20 MINUTES,
intervenue au mois de juin 2008. En bref, les
rédacteurs de ce journal avaient publié sur leur
site Internet une photographie de Carla Bruni
dans le plus simple appareil, réserve étant faite
d’une bague et d’une paire de bottes. On eût pu
s’attendre à ce que celle qui n’était pas encore
Madame Sarkozy dépose une plainte. Elle ne
l’a pas fait à l’époque. Y renoncer était son droit
le plus strict. Il faut préciser en passant que
cette renonciation était juridiquement justifiée
puisque cette photo avait, bien entendu, été prise
et diffusée avec son accord. Le problème n’était
pas là. Ce qui a valu cette condamnation de 20
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MINUTES à la somme tout de même rondelette
de EUR 50 000.-, c’est que cette photo avait été
reproduite sans l’autorisation des auteurs du
cliché, et qui plus est sans mentionner leur
qualité d’auteur. Le Tribunal a en particulier
refusé l’argument du journal, qui tentait de
faire valoir que cette reproduction répondait
à un but exclusif d’information et était en
relation directe avec cette dernière. On le voit
à l’aune de cet exemple, la prise de vue ne pose
pas uniquement des questions liées aux droits
de la personnalité ou au droit à l’image. Elle
a également des implications en termes de
droits d’auteur, auxquels l’amateur de belles
reproductions ferait bien d’être attentif s’il
ne tient pas à être accusé de piraterie, terme
repris des flibustes d’antan pour qualifier la
copie d’œuvres protégées par le droit d’auteur.
Car les photographies sont des œuvres au sens
de la règlementation sur les droits d’auteur.
Elles sont donc protégées par cette législation,
à tout le moins si elles possèdent une certaine
individualité. Il suffit donc de peu – que les
photographes me pardonnent l’usage d’un
qualificatif qui, dans ce contexte, ne se veut en
rien dépréciatif – pour qu’une photographie
soit qualifiée d’œuvre au sens de la loi. Cette
individualité peut en effet découler de la multiplicité des choix que le photographe opère,
parmi lesquels bien entendu la sélection d’un
sujet, mais également l’éclairage, l’exposition
ou le cadrage, voire l’expression s’il s’agit d’un
portrait. De simples photos passeport ou de
banales photos de vacances ne sont en principe
pas protégées par le droit d’auteur, à moins
qu’elles soient le fruit de certains choix de la part
du photographe qui lui confèrent une certaine
individualité, ou à moins que le sujet puisse se
prévaloir de son droit à l’image ou d’un droit
de la personnalité. La limite est ténue et les
rares cas dans lesquels les tribunaux ont eu à se
pencher sur ces questions donnent des solutions
pour le moins contrastées. Un exemple suffira
à l’illustrer. Il s’agit de la fameuse voiture à
carreaux du peintre Yves Corbassière, qui est
à cet égard symptomatique. À la fin de la deuxième guerre mondiale, du haut de ses vingt
ans, Yves Corbassière avait eu l’idée de décorer
en damier jaune et noir la vieille Renault 6CV
cabriolet, modèle 1925, de la famille. Alors
qu’il se trouvait rue Dauphine à Paris devant
le cabaret Le Tabou cher à Boris Vian, Robert
Doisneau l’a photographié. Nous étions alors
en 1947. Plusieurs dizaines d’années plus tard, les tribunaux français
ont eu à trancher une question concernant les droits liés à ce cliché. La
Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 26 février 1991, a admis, non
sans raison, que la photographie de Robert Doisneau était suffisamment
individualisée, ou originale, pour bénéficier de la protection au titre
le s moye n s technique s mode r ne s
n o u s me t te n t t rop fré q ue mme n t
e n sit uatio n d ’infr ac tio n
du droit d’auteur. Le Tribunal a également considéré que la voiture à
carreaux imaginée par Yves Corbassière n’était quant à elle pas suffisamment originale pour bénéficier de cette protection. En revanche, ce
même tribunal a jugé que le droit à l’image d’Yves Corbassière était lésé
par l’exploitation commerciale de cette photographie de groupe sur des
affiches, des posters ou des cartes postales.
La photographie est un formidable outil d’expression, qui est à la portée
de tous. Les exemples d’Yves Corbassière et Carla Bruni nous rappellent
que, tel l’arroseur arrosé, à la fois victime et bourreau, le photographe
peut à tout moment se retrouver également sujet de photographe. \
14
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Information importante : Ce document ne constitue en aucun cas une offre ou une sollicitation à quelque personne que ce soit en vue de la souscription d’actions de Schroder International Selection Fund (la « Société »). Aucune information contenue dans ce document
ne doit être considérée comme un conseil et, par conséquent, comme une recommandation d’acheter ou de vendre des actions. L’offre d’actions peut, sous certaines juridictions, être limitée et, le cas échéant, les personnes peuvent, à la demande de la Société, devoir se
renseigner et observer ces limitations. Les souscriptions des actions de la Société ne peuvent être effectuées que sur la base du dernier prospectus en vigueur, accompagné du dernier rapport annuel audité (ainsi que de tout rapport semestriel non-audité si celui-ci a été
publié ultérieurement). Le prospectus et les informations clés pour l’investisseur pour la Suisse, les statuts, les rapports annuels et semestriels peuvent être obtenus gratuitement auprès des bureaux du représentant en Suisse, Schroder Investment Management (Switzerland)
AG, Central 2, Postfach 1828, CH-8021 Zurich (société agréée et contrôlée par la FINMA) et auprès de l’agent payeur en Suisse, Schroder & Co. Bank AG, Central 2, Postfach 1820, CH-8021 Zurich. La performance passée ne saurait préjuger de l’évolution de valeur
future des placements collectifs de capitaux. Celle-ci dépend de l’évolution des marchés, du revenu des placements et, le cas échéant, des taux de change, ainsi que du succès de la mise en œuvre de la politique d’investissement par le gérant
du portefeuille. Les données de performance ne tiennent pas compte des frais et commissions liés à l’émission et au rachat de parts. Les cours des actions ainsi que le revenu qui en découle peuvent évoluer à la baisse comme à la hausse et les
investisseurs peuvent ne pas récupérer le montant qu’ils ont investi initialement. Tout investissement dans la Société comporte des risques, qui sont décrits de manière détaillée dans le prospectus. La Société a son siège au Luxembourg et est sous la surveillance
de la Commission de Surveillance du Secteur Financier. Ce document est produit par Schroder Investment Management (Switzerland) AG, Central 2, Postfach 1828, CH-8021, Zurich. 1Source : Schroders, au 31 décembre 2014.
0215/w46595/CHFR0215
ac t ualité / CONTEXTE ( S )
Contexte(s)
Australie
Andrew Robb &
Gao Hucheng,
ministres australien
et chinois
du commerce,
signataires du
protocole final
Projet ferroviaire sino-birman qui devrait doubler le pipeline déjà existant, via le Kokang
le tapis rouge à une récipiendaire du Prix Nobel de la paix
(1991), et qui plus est, une intime du Dalaï-lama. Cette visite
de 4 jours (10-14 juin) l’a conduite de Pékin à Shanghai
mais surtout dans la province frontalière sino-birmane du
Yunnan. Sa rencontre au sommet avec Xi Jinping s’inscrit
dans un moment de tension très critique pour la Birmanie.
D’un côté la Chine s’exaspère de la répression birmane qui
reprend contre les rebelles du Kokang (Armée de l’alliance
démocratique nationale du Myanmar), issus d’une minorité
chinoise han. Pour bien le rappeler, la Chine a organisé
d’importants exercices militaires à tirs réels, dans le Yunnan,
juste avant l’arrivée d’Aung San Suu Kyi. Cette région est
stratégique pour la Chine qui espère y construire d’importantes infrastructures ferroviaires destinées à lui faciliter
l’accès direct à l’Océan indien, via le Golfe du Bengale.
D’un autre côté, une vaste opération de diabolisation des
bouddhistes birmans est orchestrée, principalement par
les États-Unis, qui leur reprochent une attitude agressive
envers les minorités islamiques Rohingya, sans crainte de
Accord de libre-échange avec la Chine
Le 17 juin, l’Australie et la Chine ont signé le protocole final
ouvrant les deux marchés à des centaines de produits en
libre-échange. Après une décennie de négociations ponctuée
de suspensions politiques, c’est un succès pour le gouvernement de Tony Abbott. La Chine est en effet déjà le premier
partenaire commercial de l’Australie avec 110 milliards
d’euros d’échanges. 30 % de ses exportations sont destinées à la
Chine malgré des droits pouvant aller jusqu’à 40 %. Ces droits
disparaîtront pour 85 % des produits échangés, c’est-à-dire
principalement dans les domaines des matières premières et
agroalimentaire vers la Chine et électronique, électroménager
et investissements hors agriculture vers l’Australie. L’Empire
du Milieu est également devenu, en 2014, le premier investisseur en Australie, devant les États-Unis. \
Birmanie
visite historique d’Aung San Suu Kyi
en Chine
C’est le président Xi Jinping en personne qui a imposé cette
invitation d’Aung San Suu Kyi, encore simple député au
parlement birman, à ses collègues récalcitrants du Parti.
C’est en effet la première fois que la Chine déroule ainsi
Aung San Suu Kyi reçue par le président Xi Jinping
16
ac t ualité / CONTEXTE ( S )
renverser les rôles. Une déstabilisation rampante qui pourrait contrer les
projets chinois, le jour où elle se transformera en conflit ouvert, selon une
partition aujourd’hui bien rôdée. Enfin, l’agacement de l’Inde qui subit des
attaques incessantes et mortelles, à ses frontières d’extrême Est du Manipur
et du Nagaland, de la part de groupes maoïstes basés en Birmanie. Agacement qui a conduit les forces spéciales indiennes à organiser une opération
punitive d’envergure, avec des incursions en territoire Birman, autorisées
par le pouvoir local, la veille précise du départ d’Aung San Suu Kyi pour
Pékin. Un timing qui relève d’un message politique sans ambigüité envers
la Chine mais également envers son allié stratégique contre l’Inde : le
Pakistan. Le secrétaire d’État indien à l’information, Rajyavardhan Singh
Rathore, a en effet indiqué à la presse que, sur ce modèle birman, l’Inde
n’hésitera plus à exercer aussi un droit de suite en territoire pakistanais en
cas d’attaques islamistes qui en proviendraient. \
GALVANISEZ
VOS FRANCS DE
PRÉVOYANCE
CHINE
Zhou Yongkang avant et après
Visite guidée d’une prison, pour épouses
de cadres à risque à Hubei (mai 2015)
de la chasse aux tigres…
C’est sous ce vocable de « chasse aux tigres » que Xi Jinping avait lancé son
immense opération anti-corruption dès son installation au pouvoir. Le dernier grand Oligarque à avoir été touché est teinté du plus grand symbolisme.
Zhou Yongkang fut le maître absolu de toute la sécurité chinoise, comme
patron du tout-puissant Gonganbu, le ministère de la sécurité publique.
Mais avant cela, il commença sa carrière dans le pétrole. Directeur général
adjoint de la China National Petroleum and Natural Gas Corporation dès
1988, il finira ministre du Territoire et des Ressources naturelles 10 ans
plus tard. Lorsqu’il passe à la sécurité de 2002 à 2007, ses liens avec le pétrole
demeurent. Ceux qui étaient ses anciens subordonnées à la sécurité n’ont
réussi à récupérer que 14 milliards de dollars d’actifs qu’il avait détournés
durant son irréprochable carrière. Déjà pas si mal.
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en toute flexibilité. L’épargne-titres
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…au domptage des tigresses
La rééducation morale des épouses : telle est la nouvelle technique de prévention de la corruption que l’administration de Xi Jinping a trouvée. Après les
avoir habillées en uniforme du parti datant de la révolution culturelle, on
les promène de prisons en prisons, où croupissent déjà des proches, en leur
offrant des séminaires de réorientation politico-maritale. Résultat garanti : les
épouses promettent de collaborer à remettre leur mari dans le droit chemin. \
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La banque de la clientèle privée et commerciale
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ac t ualité / CONTEXTE ( S )
Japon
avait vu d’un très bon œil le rachat en 2011 de toutes les stations Esso de Suisse à ExxonMobil, par Socar, la richissime
compagnie nationale pétrolière et gazière d’Azerbaïdjan.
Abrogation de l’interdiction de mener
une guerre hors de ses frontières
Ouverture des 1ers Jeux européens, Bakou 2015
Et voilà que l’OSCE apprend un beau matin du 4 juin dernier,
d’une simple missive non motivée provenant du ministère
des affaires étrangères azéri, que ses 56 membres locaux ont
un mois pour plier bagages. Certains y voient une réaction
du régime face aux critiques qu’on lui fait sur son manque
de respect des droits de l’homme, notamment à l’approche
des élections législatives qui devront se tenir en novembre
prochain. À quoi un député proche du pouvoir répond que
l’évaluation des droits de l’homme n’est pas de la compétence
de l’OSCE et que, de toute façon son mandat lié à la situation
du Haut Karabakh étant rempli, il n’y avait aucune raison
de maintenir cet établissement, déjà passé au rang de simple
bureau de coordination depuis janvier 2014.
Garde d’honneur japonaise
Jusqu’à présent, le Japon est le seul pays au monde à s’interdire de mener « à jamais » une guerre hors de ses frontières.
Renversement de l’histoire : alors que c’étaient les États-Unis
qui avaient imposé le fameux article « 9 » de la constitution
nippone de 1947 pour neutraliser l’âme martiale du Japon,
ce sont les mêmes qui poussent aujourd’hui à la réforme,
afin de s’ajouter un contributeur essentiel dans leur bras
de fer intense avec la Chine et la Russie. Décision du parlement : septembre 2015. \
…tandis que Didier Burkhalter
exfiltre un dissident azéri
Azerbaïdjan
Victoria Nuland, qu’on ne présente plus, déclarait lors d’une
visite effectuée à Bakou le 17 février 2015, que les États-Unis
voulaient voir un Azerbaïdjan « plus démocratique » et attendaient de lui qu’il continue « d’assurer l’indépendance de l’Europe
face à une seule source de gaz », dont on sait qu’il s’agit de la
Russie. Dans une menace à peine voilée, elle ajouta que « les
révolutions colorées arrivent lorsqu’il n’y a pas de dialogue
suffisant entre le gouvernement et la société civile ».
L’OSCE priée de faire ses valises…
Le président Ilham Aliyev, qui succéda à son père en 2003,
aura reçu les premiers Jeux européens du 12 au 28 juin,
pour un budget estimé à 10 milliards de dollars. Avec cette
opération de relations publiques, il espérait avoir encore une
fois doré son blason, lui qui fut si courtisé par l’Occident
pour contrebalancer l’offre russe sur le marché du pétrole
et du gaz.
État musulman à majorité chiite (70 %), l’Azerbaïdjan a par
ailleurs toujours refusé de faire allégeance à l’Iran. Et ce ne
sont pas ses plus de 15 millions d’Azéris, l’ethnie du guide
suprême Ali Khamenei, qui aura changé quelque chose.
Pour preuve, les relations très privilégiées entretenues avec
Israël, notamment en matière de pétrole et d’armement. Il est
vrai que Bakou garde un mauvais souvenir des tentatives de
déstabilisation du pays via des prêches de mollahs iraniens
dans ses mosquées, il y a une dizaine d’années. Même Berne
Victoria Nuland à l’ambassade US de Bakou (février 2015)
18
ac t ualité / CONTEXTE ( S )
En écho à cette évocation, voici que le 13 juin dernier,
Didier Burkhalter ramenait avec lui en Suisse, dans son
avion gouvernemental, le journaliste et dissident Emin
Huseynov réfugié depuis août 2014 à l’ambassade de la
Confédération à Bakou. Pour Siyavush Novruzov, secrétaire général du parti YAP au pouvoir, cette exfiltration
aurait été clandestine et illégale.
Turquie
l’accord gazoduc TurkStream
toujours pas signé
Vladimir Poutine a profité de sa présence à l’inauguration
des premiers Jeux européens de Bakou pour s’entretenir
longuement avec Recep Tayyip Erdogan. Accompagné
notamment de Sergueï Lavrov, ministre des Affaires
étrangères, d’Alexandre Novak, ministre de l’Énergie, de
Sergueï Kirienko, patron de Rosatom (l’agence russe de
l’énergie nucléaire) et d’Alexeï Miller, CEO de Gazprom,
le Président russe a sans doute tenté de convaincre son
homologue turc de parapher le contrat Turkstream qui
ne l’est toujours pas pour des raisons d’ajustement de prix
selon l’AFP, citant la presse russe. Les discussions ont aussi
porté sur la situation en Syrie. \
Selfie d’Emin
Huseynov avec
Ilkka Kanerva,
président
de l’assemblée
parlementaire
de l’OSCE
Il s’avère qu’Emin Huseynov fut un responsable local des
Révolutions de couleur à travers le mouvement Magam
(ou Mequam) très proche de Pora en Ukraine et dont
Magam est justement la traduction littérale en azéri
(« C’est l’heure ! »). Un câble Wikileaks 07BAKU1406 expose
d’ailleurs sa collaboration directe avec l’ambassade des
Etats-Unis à Bakou. Par ailleurs, son épouse américaine
Sarah Paulsworth, ancienne des Peace Corps Volunteers,
est aujourd’hui procureur militaire au sein d’une unité
des forces américaines basées en Allemagne. De son côté,
le président Ilham Aliyev a accepté la requête d’Huseynov
de renoncer à sa citoyenneté azérie, laquelle lui a donc
été retirée.
Ilham Aliyev (1er à droite) recevant les présidents Erdogan et Poutine
à l’ouverture des jeux de Bakou 2015
Syrie
Reprise d’un verrou stratégique
par les forces kurdes
Tell Abyad (ou Tal Abyad et Girê Sipi en kurde) est une
ville frontière stratégique pour l’État islamique, comme
l’un des passages routiers les plus vitaux entre la Syrie et
la Turquie, assurant l’accès direct à la capitale administrative de l’EI, la ville de Raqqa. Elle est le lieu de transit
d’une partie substantielle de sa contrebande de pétrole (2
millions de dollars/jour en tout via la Syrie) mais aussi de
coton, céréales et ciment. Certains évoquent également
les phosphates depuis les prises des mines proches de
Palmyre (Khnaifess). >
Emin Huseynov et son épouse Sarah Paulsworth / Le lieutenant S. Paulsworth
On verra si le Conseil fédéral osera placer un jour Ilham
Aliyev sous le régime des « potentats » et confisquera le
réseau suisse des stations Socar, au titre de la loi déjà passée au National sur le blocage des avoirs des « personnes
politiquement exposées ». \
19
ac t ualité / CONTEXTE ( S )
Le problème demeure en revanche entier pour la Turquie
car ce sont les combattants du Yekineyen Parastina Gel
(YPG), « Unités de protection du peuple », c’est-à-dire la
branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan
(PKK), classé comme organisation terroriste par la Turquie, qui ont remporté cette victoire, aidés par des frappes
aériennes américaines. Drôle de victoire tout de même,
lorsqu’on apprend que ce point stratégique n’était tenu
que par 150 hommes, et qu’il a suffi d’en éliminer 50 pour
gagner. Quoi qu’il en soit, Ankara a vu ce basculement
d’un très mauvais œil. En octobre 2014, le gouvernement
Erdogan avait d’ailleurs préféré bombarder les combattants kurdes, près de Kobané, plutôt que les djihadistes.
On se laisse dire également que sans les Turcs il n’y aurait
pas eu d’EI en Syrie. Ce sont eux qui auraient fourni la
logistique, les armes et l’entraînement militaire. Eux
également qui auraient permis le transit des fonds et des
combattants, sans parler de l’assistance sanitaire via les
ballets d’ambulances et les soins prodigués aux blessés de
l’EI sur le territoire turc. \
Région de Tell Abyad, au Nord de la Syrie, province de Raqqa
On rappellera que selon les estimations de Jean-Charles
Brisard, l’EI dispose d’un trésor d’actifs de près de 2000
milliards de dollars et fait un chiffre d’affaires annuel
d’environ 2,5 milliards de dollars, dont 38 % proviennent
du pétrole, 17 % du gaz naturel, 12 % des impôts et des extorsions de fonds, 10 % de la production de phosphate, 10 % de
la vente de ciment, 7 % de l’agriculture, 4 % des rançons et
2 % de donations privées. Toutefois, les spécialistes estiment
que l’EI n’est pas en mesure d’exploiter les phosphates, ne
maîtrisant pas les procédés imposant les transformations
successives en acide phosphorique, puis en diammonium
phosphaté (DAP) tandis, qu’en outre, leur transport par
route n’est pas rentable.
SUISSE
S’agissant des donations, celles-ci se font souvent en nature,
par simples livraisons de camions entiers de produits gratuits
en tous genres, comme des téléphones portables revendus
ensuite par l’EI à bas prix mais avec 100 % de marge. S’agissant des fonds monétaires et des armes, l’Arabie saoudite a
officiellement soutenu l’EI jusqu’à fin 2013. Ce n’est qu’à la
suite des attaques de l’EI contre le Front islamique, al-Nosra
(affilié à al Qaïda) et l’Armée syrienne libre (tous financés
ouvertement depuis les pays du Golfe), que l’Arabie saoudite
a placé l’EI sur sa liste d’organisations terroristes en janvier
2014, mais pas avant…
Vote de la loi sur le blocage
des avoirs des potentats
La loi fédérale sur le « Blocage et la restitution des avoirs
illicites de personnes politiquement exposées (“PPE”) à
l’étranger » a été votée mercredi 10 juin 2015 dans un
assourdissant silence médiatique, à une majorité de 71 %,
mercredi dernier au Conseil national. Seule l’UDC a fait
bloc contre, avec 54 voix.
Avec ce nouveau texte, le Conseil fédéral pourra ordonner
le blocage de fonds perçus comme étant d’origine criminelle, en vue d’une entraide judiciaire avec le nouveau
pouvoir, lors du renversement d’un potentat. C’est-à-dire
qu’il faudra que l’État en question accuse un niveau de
corruption « manifeste » et que les intérêts suisses soient en
jeu. C’est-à-dire que le potentat devient en droit suisse un
présumé coupable. Pour « équilibrer » cette entorse grave
au principe de présomption d’innocence, un amendement
a été voté, permettant au potentat d’invoquer la prescription pénale (ce qui démontre bien que ces sanctions
individuelles sont, comme les autres, de nature pénale).
Combattantes kurdes de l’YPG
20
ac t ualité / CONTEXTE ( S )
Le gel de fonds sera possible même pour des potentats
encore en place si leur chute est inexorable. Est-ce un
effet Maïdan qui aurait inspiré les rédacteurs du texte ?
L’UDC voulait imposer qu’on attende la chute effective
et légitime du potentat, mais ce n’est pas passé. Toutefois,
le National a limité l’extension de la « punition collective », classique en matière de sanctions individuelles, aux
seuls proches impliqués dans les détournements de fonds
présumés, alors que le projet ne prévoyait aucune limite.
Sanctions contre la Russie, la facture
pour l’Europe et la Suisse
La loi permettra également d’entamer une procédure
administrative devant les tribunaux suisses pour confisquer des valeurs déjà bloquées. Le but étant d’éviter de
rendre l’argent à un potentat en cas d’échec d’une demande
d’entraide judiciaire. C’est-à-dire que la justification politique d’une loi destinée à s’inscrire exclusivement dans
un processus d’entraide judiciaire n’est qu’un prétexte.
Quant à la restitution, elle ne se fera que via « des programmes d’intérêt public pour améliorer les conditions
de vie de la population du pays d’origine » mais rien ne
dit qui en sera juge. Et comme rien n’est gratuit, pas
même la confiscation, le Conseil fédéral pourra prélever
jusqu’à 2,5 % des fonds confisqués pour dédommager la
Confédération et les cantons de leurs frais. Pourquoi se
gêner ? La loi doit encore passer au Conseil des États, sans
doute à la prochaine session parlementaire d’automne (du
7 au 25 septembre). Elle devrait être votée, sans grand
problème, par des représentants du peuple de moins en
moins sensibles aux principes des garanties judiciaires
fondamentales. \
La facture des sanctions contre la Russie
Deux études, deux sons de cloche. Pour la Commission
européenne, organe non démocratique qui fonctionne à
huis clos et distribue les résultats de ses enquêtes sur le sujet
de manière arbitraire, les conséquences des sanctions contre
la Russie sur l’économie européenne seraient mineures. En
revanche, pour l’Institut indépendant autrichien WIFO,
ce sont à terme 2,5 millions d’emplois que l’Europe va
perdre et 100 milliards d’euros de richesses à produire
qui vont s’envoler. Un chiffre qui colle avec l’évaluation
du ministre espagnol des affaires étrangères José Manuel
García Margallo. En février 2015, il chiffrait déjà le manque
à gagner à 21 milliards d’euros.
Et la Suisse n’est pas en reste. 45000 emplois sont menacés.
En première ligne : les machines outils, l’horlogerie dont
les chiffres accusent une chute de 62 % pour le seul mois de
mai 2015 par rapport à 2014, le tourisme également avec
une chute de 40 % des demandes de visas russes pour la
Suisse. Et pour ceux qui pensent que les sanctions ne sont
qu’un élément d’explication à côté de la chute du rouble
et de la chute des cours de pétrole, on leur rappellera les
liens politiques intimes que ces facteurs ont ensemble, dans
une stratégie affichée d’affaiblir la Russie. On ne peut que
s’étonner du durcissement politique du Conseil fédéral à
l’égard de la Russie, comme s’en plaignent nos diplomates.
Cette perte assumée de neutralité ne devrait-elle pas des
explications au peuple ? A moins que le Conseil fédéral
ait déjà adopté la culture de travail de la Commission
européenne ? \
Répartition des votes, au Conseil National, sur la loi de blocage
des avoirs des potentats
21
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
L'entrée de la photo
dans le marché de l'art
Elena Budnikova
premier prototype d’appareil digital Kodak
ARNAUD dotézac, Directeur des rédactions
Il n’a fallu que quelques années pour que l’avènement du numérique bouleverse toute la donne
du marché de la photo. Mais on oublie souvent
que c’est Kodak qui mit au point le premier
appareil numérique. C’est en 1975 que ce prototype vit le jour. Pesant près de 4 kg, il produisait
des images noir et blanc, dont l’enregistrement
en 100x100 pixels prenait 23 secondes et s’effectuait sur les mêmes « minicassettes » que celles
utilisées pour écouter de la musique disco ! Il
fallait ensuite un lecteur spécial, relié à une
télévision, pour voir apparaître l’image à l’écran.
Un brevet fut déposé en 1978 mais personne
n’y crut au sein de la firme de Rochester. Une
occasion manquée qui contribuera à la mener
au dépôt de bilan en 2012. Triste destin pour
l’inventeur du premier appareil photo portable
en 1888, la fameuse « Kodak Camera » dont la
publicité signa toute l’histoire de la compagnie :
« pressez le bouton et on s’occupe du reste ». Le
« Kodak » était effectivement d’un maniement
très simple : déjà chargé d’un négatif maison
pour 100 clichés, le photographe amateur le
renvoyait chez Kodak une fois le rouleau terminé. En retour, il recevait ses tirages et son
appareil rechargé d’un nouveau négatif, prêt
22
première publicité de la Kodak Camera
à l’emploi. Et pourtant, on était encore au 19e
siècle.Après cent ans dominés par les films
argentiques, la révolution numérique n'aura
pris quant à elle qu'une dizaine d'année qu’une
dizaine d’années.
LA REVOLUTION NUMERIQUE
Sony dévoile un premier prototype Mavica en
1981 permettant de prendre des images couleur,
suivi d’un prototype Nikon en 1986, mais c’est
Canon qui arrive à commercialiser le premier
appareil réflex numérique du marché la même
année, le RC701. Malgré son prix exorbitant de
$ 30 000 avec équipement complet, la course est
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
lancée. Les fabricants n’auront alors de cesse
d’améliorer la définition des images, couplée
avec la performance des objectifs, les capacités
de stockage, d’indexation et de transmission,
mais aussi l’intégration des retouches, l’ergonomie, l’esthétique, etc.
Canon innove encore avec un numérique grand
public deux ans plus tard, le Xapshot, accessible
cette fois au grand public à seulement $ 500.
Kodak tente de revenir dans le jeu en créant
dès 1990 le premier appareil numérique réflex
(« Digital Single-Lens Reflex », DSLR) intégré
dans un boîtier Nikon F3 et en l’accompagnant du premier écran de contrôle numérique,
ancêtre des « dos numériques » de nos appareils
actuels. Son prix de $ 13 000, le réservait encore
aux seuls professionnels. Avec l’apparition de
Windows, du premier navigateur internet, de la
norme JPG (Joint Photographic Expert Group),
des deux premiers appareils connectables Fotoman de Logitech pour PC (sous licence Dycam)
Fotoman Logitech
et Quicktake d’Apple pour Macintosh, 1992 est l’année charnière qui
préfigure la combinaison des technologies actuelles. En 2007, 15 ans
après le Quicktake, Steve Jobs lançait le premier IPhone, qui ouvrait l’ère
frénétique de la photo de masse, dopée par la gratuité de l’enregistrement
de l’image et le contrôle instantané du résultat.
Où se situent alors les grands changements sociaux qui découlent de ces
transformations technologiques ? Alors que la photo amateur du siècle
Kodak soutenait la sociabilité familiale, les nouvelles dynasties des
Smartphones et autres Camcorders (GoPro) règnent sur leurs propres
écosystèmes numériques, construisant (et déconstruisant) les identités et
les réputations de leurs sujets, sur fond de convergences avec les réseaux
sociaux. Comme le confirme le philosophe Stéphane Vial, « la technique
structure notre perception » de sorte qu’aujourd’hui nous ne sommes
présents aux choses et aux êtres « qu’en tant qu’ils nous apparaissent à
travers des appareils numériques ».
Facebook ne s’y est pas trompé en n’hésitant pas à débourser 1 milliard de
dollars pour racheter Instagram en 2012. Une start-up qui n’avait que deux
ans d’existence. Comme pour Google, Twitter, Apple et autres, ce business
model ne se contente pas d’affecter la vie en société, il siphonne littéralement
la valeur des photos téléchargées sous forme de capitalisation boursière, sans
que les photographes (amateurs ou professionnels) en profitent pour un sou.
Ces groupes détrônent-ils pour autant les grandes marques de la photo,
qui sont, à part Leica et Hasselblad, toutes japonaises (Canon, Nikon,
Panasonic, Sony, Fuji, Olympus, Samsung, etc.) ? Oui et non. Certes,
Apple a installé le ludique et la simplicité d’usage, alors que le monde
traditionnel des appareils photo peut vite devenir abscond pour le profane. Mais la frénésie des prises de vues effectuées avec un Smartphone
dès l’adolescence, voire la préadolescence, présente aussi des aspects très
positifs pour ce dernier. Elle prédispose en effet très activement les jeunes
à une culture photographique de la qualité, qui pour l’instant ne peut
les conduire que vers des appareils « classiques ». Même si la production
d’appareils numériques est vouée à décliner lentement mais sûrement
en volume2, la nouvelle culture des prises de vue tire le renouvellement
constant des appareils classiques vers le haut et soutient dès lors le marché en valeur. Signe que les marques investissent dans l’hyper-qualité
pour creuser l’écart avec les Smartphones : la généralisation en cours
des capteurs numériques « plein-format3 » et la montée en gamme des
lentilles et des objectifs. Et à cet égard, les leaders du marché ont de la
réserve, autant en expérience historique qu’en recherche et développement, pour continuer à nous surprendre.
1)L’être et l’écran, PUF, Paris, 2013.
2)Les dernières estimations de TechNavio (Londres) prévoient
une baisse de 13 % de la production japonaise d’ici 2019
mais confirment la progression des appareils et des équipe ments haut de gamme.
3)Capteur électronique photosensible dont l'ensemble
de la surface contribue à la détection, généralement
en format 24x36.
Apple Quicktake 100
23
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
En revanche, le travail des photographes, lXui,
a totalement changé. Ils disposent certes de
nouveaux champs de création et profitent de
la circulation en ligne de leurs travaux ; ils
maîtrisent également comme jamais la postproduction, grâce notamment à des logiciels de
plus en plus performants, qui organisent leur
travail depuis l’indexation des images jusqu’à
leur développement et leur tirage, en passant
par le repérage GPS ou l’édition de livres. Mais
le domaine réservé qui était le leur en matière
de presse, d’illustration (publicité, corporate,
édition) et de commandes privées (événements,
notamment familiaux), s’est trouvé d’un coup
concurrencé par des banques d’images simples
d’accès ou à bas prix (Corbis, Getty, Jupiter,
Fotolia), des photographes amateurs suréquipés ou simplement présents au bon endroit au
bon moment, munis de leur Smartphone, sans
parler de la contrefaçon endémique constituée
par les « emprunts » sur internet, ni de la crise
de la grande presse qui n’a plus les moyens de
les payer, elle aussi à cause de la concurrence de
l’information en ligne. Tout cela s’est traduit
par une érosion significative de leurs revenus.
Le marché des tirages,
entre amour de l'art et opérations clandestines
Dans les années 1960, un tirage ne valait pas plus que les coûts de laboratoire, quelle que soit la valeur esthétique ou documentaire du cliché.
90 % de la création graphique du XIXe et du début du XXe a même été
jetée, les gens pensant que ce n’était pas de l’art ! On connaît la célèbre
remarque d’Ingres sur les « plaques » de Nadar4 en 1860. Comprenant
immédiatement la concurrence que la photo pouvait faire aux peintres
portraitistes qui, comme lui, vivaient de leur art, il déclara que « la
photographie est une si belle chose, mais il ne faut pas que ça se sache ! ».
On trouvait encore il y a quelques années des marines, scènes de rue ou
portraits anciens dans les brocantes à 100 €, qui valent aujourd’hui jusqu’au
million. D’après Margaret Loke dès « les années 1950, l'arrière-salle du
Limelight, le café d'Helen Gee à Greenwich Village, était consacrée aux
expositions de photographies et présentait le travail des grands maîtres
comme Paul Strand, Robert Frank, et Imogene Cunningham. Mais
même à un prix de 15 $, il ne s’en vendait que quelques-unes5 ».
C’est au tournant des années 1980 que le marché frémit. Les ventes aux
enchères de tirages n’atteignent cette année-là, et pour le monde entier,
qu’un timide 5 millions de dollars. Mais en 2005, des tirages d’art de
Richard Prince (Cowboy) et d’Alfred Stieglitz (Nu de Goergia O’Keefe),
dépassent pour la première fois cette barre symbolique du million de dollars.
Cowboy, Richard Prince ($ 1,2m)
Nu de Georgia O'Keefe, Alfred Stieglitz ($ 1,4m)
Reste à comprendre l’impact de cette rupture numérique, sur le marché de la photo
elle-même, c’est-à-dire en particulier celui
des tirages.
4)Gaspard Félix Tournachon, dit Nadar (1820-1910), journaliste, dessinateur, aéronaute
et photographe. On lui doit les portraits de très nombreuses personnalités de son époque,
notamment George Sand, Franz Liszt, Hector Berlioz, Claude Monet, Charles Baudelaire,
Victor Hugo, Sarah Bernard, etc.
5)Margarett Loke, « Harry Lunn Jr., 65, Art Dealer Who Championned Photography »,
The New York Times, 24 août 1998, Section A, p. 15.
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DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
En 2011, le record était franchi par Andreas Gursky, cumulant trois
ventes, respectivement à $ 3,3m (Sotheby’s, 2007), $ 2,9m (Sotheby’s,
2008) et $ 4,3m (Christie’s, 2011), c’est-à-dire le niveau de prix d'un
grand Bonnard ou d'un Jean-Michel Basquiat.
Comment une telle progression a-t-elle pu
se réaliser depuis un degré zéro ? Comment
est-il possible de donner à un seul tirage une
valeur marchande aussi élevée, alors qu’il
est dans la nature même d’un cliché d’être
reproductible à l’infini ? Quel sens donner à
la valeur d’un Gursky dépassant les 4 millions
de dollars, quand on sait que six tirages de la
même œuvre on été exécutés6 ?
Pour répondre à ces questions, il faut en premier lieu comprendre comment ce marché s’est
auto-organisé. Le philosophe et historien de
l'art allemand Walter Benjamin (1892-1940)
posa la question un jour en ces termes : « On
s’était dépensé en vaines subtilités pour décider
si la photographie devait être ou non un art,
mais on ne s’était pas demandé si cette invention même ne transformait pas le caractère
général de l’art7 ». La manière dont la photographie s’est structurée ces 40 dernières années,
comme œuvre d’art, démontre que non : elle
s’est adaptée aux conventions générales de l’art,
qu’il soit classique, moderne ou contemporain
et cela, indépendamment de son époque8.
Andreas Gursky : « Los Angeles » (1998)
En d'autres termes, une oeuvre photographique actuelle peut très bien appartenir à la
catégorie « classique », parce qu’elle s’inscrit
dans des canons esthétiques mimétiques et
dans une conformité à des modèles de figuration et de composition que définissent des
styles ou des écoles spécifiques. La catégorie
« moderne » regroupera quant à elle des œuvres
qui se départissent des règles de la figuration
classique, mais à la condition de continuer
de travailler avec des matériaux classiques et
que l’artiste demeure en retrait de son œuvre.
En revanche le genre « contemporain » se
reconnaîtra nettement dans la transgression « des règles de l’art ». Comment à présent
faire correspondre ces trois catégories avec
un modèle économique ?
Andreas Gursky : « 99 Cent II » (2001)
Les travaux des deux économistes de l’art
Dominique Sagot-Duvauroux et Nathalie
Moureaux 9 vont nous y aider en rappelant
l’apport du sociologue Howard Becker depuis
la publication de son ouvrage Art worlds en
1982, démontrant que « l'œuvre d'art n'est pas
le fruit d'un créateur isolé, mais résulte de la
coopération d'un grand nombre d'individus qui
s'accordent sur des conventions particulières10 ».
Andreas Gursky : « Rhein II »(1999)
26
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
En premier lieu, elles affinent les trois catégories précitées en distinguant les modèles
« corporatiste », « académique » et « mercantile »,
les deux premières pouvant, selon nous, se
rapporter à la catégorie « classique ». Dans sa
corporation l’artiste est d’abord un artisan qui
fera la plupart du temps son apprentissage sur
de très longues années. Il aura appris à s’en
tenir aux étalons prédéfinis du beau, travaillant généralement sur commande, avec des
l'œ u vre d'ar t
n'e s t pa s le fruit d'u n
cré ate ur is olé , mais
ré s ulte de l a c oopé r atio n
d'u n gr a nd n omb re
d'individ u s q ui s'acc orde n t
s ur de s c o n ve n tio n s
par tic uliè re s
responsabilités proportionnelles à ses qualifications contrôlées. La valeur de ses œuvres
sera fonction de la notoriété de son habileté
et de la qualité des matériaux utilisés. Dans
le modèle académique, l’artiste devient un
savant qui connaît les règles du beau grâce à ses
études théoriques et pratiques (académies des
beaux-arts), de sorte que la valeur économique
se reporte sur le traitement esthétique du sujet.
Le modèle économique des « modernes » se fonde sur des critères plus
subjectifs, en particulier des systèmes de reconnaissance de groupes
(phénomène des Écoles et des mouvements). Enfin les « contemporains »,
ne revendiquent la reconnaissance que de leur seule « originalité »
propre. Ils ne sont pas nécessairement soumis à une formation poussée et peuvent même être des autodidactes. En revanche, ils doivent
absolument afficher un fort degré de socialisation pour que la reconnaissance, cette fois du marché, soit suffisamment étendue pour leur
être profitable. C’est donc ici l’originalité de l’approche artistique qui
détermine la valeur de l’œuvre, mais à condition que sa nature soit
théorisable comme une étape dans l’histoire de l’art et que l’artiste
lui-même et pas seulement son œuvre, soit fortement reconnaissable
(voire mis en scène). Un discours très distinctif et individualisé doit
donc pour cela se développer dans la communauté de l’art. C’est parce
que cette forme de légitimation ne repose que marginalement sur les
qualités intrinsèques de l’œuvre, que la reconnaissance de l’artiste est
tributaire du discours de conviction des intermédiaires qui soutiennent
l’artiste et sa cote. Ils deviennent des instances de légitimation à charge
pour l’artiste en vue de gérer la rareté afin de maintenir les prix et
d’authentifier ses œuvres.
Les artistes qui auront suivi un cursus académique seront certainement
avantagés dans la mesure où le programme de leur cursus prévoit de
leur apprendre à construire un discours sur eux-mêmes et leur œuvre.
Ensuite, les professeurs soutiendront les plus capables de leurs étudiants,
en n’hésitant pas à leur ouvrir leurs réseaux sociaux. Ces mêmes étudiants
feront évidemment tout ce qu’ils peuvent pour y être acceptés pleinement
et à leur tour se les approprier. Avec un peu de chance et de détermination, quelques-uns d’entre eux pourront devenir célèbres rapidement.
Dominique Sagot-Duvauroux et Nathalie
Moureaux observent que la conformité à des
critères objectifs (modèle de la nature ou du
maître) qu’exige l’appartenance à la catégorie
classique (corporation et académie), réduit le
rôle des intermédiaires dans la légitimation
de l’artiste et la valorisation de l’œuvre. En
effet la fidélité au réel (marché artisanal) ou
aux règles du beau (marché académique), sont
des critères immédiatement mesurables. C’est
d’ailleurs sur des critères internes à l’œuvre
que Roger de Piles proposait déjà en 1708 de
classer les artistes dans une sorte de top 100
avant l’heure, qu’il nommait la « Balance des
peintres »11. Les paramètres évalués étaient
au nombre de quatre, chacun noté sur 20 : la
composition, le coloris, le dessin, l’expression
(de la « pensée du cœur humain »). Plus on avait
de points, meilleur peintre on était.
6)
Quatre exemplaires font partie des collections des musées,
notamment le MoMA de New-York et la Tate Modern
de Londres, la dernière est restée quelques années en prêt de
l’auteur à l’ambassade d’Allemagne de Paris.
7)In L’œuvre d’art à l’ère de sa reproductibilité technique,
(trad. fr. de 1936), Éditions Allia, Paris, 2003, p.34.
8) Selon l’approche de Nathalie Heinich, directrice de
recherche au CNRS (Centre de recherche sur les arts
et le langage).
9) « Les conventions de qualité sur le marché de l’art, d’un
académisme à l’autre ? » Esprit, Octobre 1992, pp.43-54.
10)« Le marché de la photographie contemporaine est-il soluble
dans celui de l'art contemporain ? » Dominique
Sagot-Duvauroux, document de travail du GRANEM
n° 2008-11-011, décembre 2008, université d’Angers, p.4.¨
11)« Peintre, théoricien de l’art, collectionneur, expert et diplo mate français dont le classement est exposé dans son
ouvrage « Cours de peinture par principes » (Éditeur Jacques
Estienne, Paris, 1708, p. 489).
27
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
Lanfranco Colombo, premier galeriste spécialisé en photo d'art (Milan)
La convergence coordonnée de soutiens conférant une légitimité à
un artiste par les intermédiaires du marché de l’art, c’est ce que les
économistes précités dénomment la « convention d’originalité ». Ce
sont les acteurs du marché de l’art qui créent et stabilisent leur propre
discours de qualité, non plus seulement sur l’œuvre mais d’abord et
avant tout sur l’artiste lui-même, en tant qu’il offre une innovation au
marché qui le place dans l’histoire de l’art. Le discours de l’objectivité
passe ainsi des qualités intrinsèques de l’œuvre (modèle classique) au
caractère novatoire du champ artistique créé et appartenant à l’artiste
(modèle contemporain). Ce renvoi à un individu se traduit par l’obligation pour lui de se conformer à son propre style afin de demeurer
reconnaissable ensuite par tous et pas seulement par les acteurs du
marché qui ont soutenu son lancement. La contemplation des objets
comme résultat d’une création ne suffit plus. Il s’y ajoute la louange des
capacités de l’artiste à l’avoir produite, c’est-à-dire un récit mythique sur
sa personne, dont les intermédiaires de légitimation sur le marché, en
nombre réduit, sont des dépositaires quasi-infaillibles (conservateurs
de musées, galeristes, organismes d’enchères, critiques d’art, médias
spécialisés, universitaires, collectionneurs).
Force est de constater que l’entrée de la photo dans le marché de l’art a
exactement suivi ces règles.
La première étape a été de faire entrer les tirages photo dans les lieux
réservés aux objets d’art : musées, galeries et foires d’art contemporain.
Il n’existait pas de galerie spécialisée avant le tournant des années 1960.
Milan fut la pionnière avec l’ouverture de la galerie Il Diaframma le
13 avril 1967, au 10 de la Via Brera pour y accueillir une exposition de
Paolo Monti (1908-1982), un des grands maîtres de la photo italienne
d’après-guerre. Elle fut créée par Lanfranco Colombo qui vient de
s’étreindre en avril dernier, à 91 ans. Ce grand passionné, lui-même
photographe, après avoir été industriel, joua un rôle fondamental dans
l’histoire de la photographie italienne. Il était le mari de la grande
photographe italienne Giulianna Traverso.
28
Deux ans plus tard, c’est la célèbre galerie de Lee
D. Witkin (1935-1984) qui ouvre donc en 1969,
à New-York. Elle aura notamment vu passer
des Alfred Stieglitz, Edward Steichen, Edward
Weston, Edward Curtis, Manuel Alvarez Bravo,
Brassai, Robert Doisneau et bien d’autres. Et
pourtant, tous les experts l’avaient prévenu : « la
galerie ne tiendra pas 6 mois, un an maximum
avec beaucoup de chance, parce que personne
ne collectionne les photos.12 ». D’autres suivront
de Boston à San Francisco. Mais des personnages hors du commun se détachent, comme
Harry H. Lunn (1933-1998). Ancien diplomate
à l'ambassade américaine à Paris, puis président
de la puissante association des étudiants américains, la National Student Association (NSA),
sa fonction d’agent de la CIA est révélée en
mars 1967 par le magazine Ramparts. De tout
nouveaux détails viennent par ailleurs d’être
dévoilés par Karen Paget, en mars 201513. Elle
établit en particulier des liens entre la NSA et
le fameux Congress for Cultural Freedom, un
L a pho t o gr a phie s’e s t
a da p tée au x c o n ve n tio n s
gé né r ale s de l’ar t
autre programme de la CIA14 qui fit couler
beaucoup d’encre. Il s’agissait d’infiltrer l’intelligentsia, de soutenir financièrement certains
grands noms des sciences et de la culture, afin
d’orienter les opinions de pas moins de 35 pays,
en faveur du modèle américain, face aux sympathies que le communisme pouvait attirer à
lui, dans ces milieux. Parmi les membres les
plus connus de ce que le New York Times et à
nouveau Rampart, dévoileront en 1966 comme
étant une antenne de la CIA, figuraient Karl
Jaspers, Arthur Schlesinger Jr., Bertrand Russell, Raymond Aron, Arthur Koestler, Robert
Montgomery ou encore Tennessee Williams.
Harry Lunn fut placé par la CIA pour tenir
les rênes de la NSA en 1954-55, puis jusqu’en
1958, il travailla donc bien sous couverture de
l’international Student Conference (ISC) avant
de se former à l’analyse au Pentagone. À partir
de 1961, il est installé comme officier du US
Information Service (USIS) à l’ambassade des
États-Unis de Paris, sous couverture d’attaché
culturel, tandis que les opérations d’influence
du Congress for Cultural Freedom battent leur
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
plein. Il se marie à Paris en 1963 et poursuit ses
activités comme secrétaire général de la Foundation for Youth and Student Affairs (FYSA)
dès 1965, après un passage par l’agence d’aide
au développement américaine (USAID). C'est
une fois que sa réelle activité fut dévoilée par les
médias qu’il ouvrit une galerie à Washington
pour y vendre ses tirages d’art, soigneusement
collectés dans l’exercice de ses fonctions d’agent
de la CIA à Paris. L’avait-il fait en vue d’utiliser
la photo comme outil d’influence ? La question
reste ouverte. Depuis les révélations de Donald
Jameson au journal The Independent en 199515,
on sait que « la décision d'inclure la culture et
l'art dans l'arsenal américain pendant la guerre
froide a été prise dès la création de la CIA en
1947 ». Par exemple, c’est elle qui a presque
intégralement financé l'expressionnisme abstrait, avec des peintres tels que Jackson Pollock,
Robert Motherwell, ou Mark Rothko. « Comme
un prince de la Renaissance, la CIA a soutenu et
promu les toiles des maîtres de l'expressionnisme
abstrait américain dans le monde pendant plus
de vingt ans » explique Jameson. Et c’est ainsi
qu’on retrouvait au conseil d’administration
du Museum of Modern Art (MOMA) de NewYork, des gens comme William Paley (un des
créateurs de la CIA), John Hay Whitney (l'OSS,
précurseur de la CIA) et Tom Braden (ex-patron
de la division internationale de la CIA). Le but
de ces opérations sur la culture, dont le nom
de code était « Longue laisse » (long leash), était
de marquer et de contrôler la rupture existant
entre la liberté intellectuelle et le foisonnement
de la créativité américaines, d'une part et le
conformisme de l'URSS et sa politique de la pensée unique, d'autre part. La CIA était présente
partout, de l’industrie du film à la littérature,
en passant par la sociologie et la musique. Elle
finançait notamment des récitals lyriques, des
orchestres symphoniques (Boston) ou encore des
artistes de jazz. Cette dernière catégorie nous
intéresse car c’était la spécialité du producteur
et agent de la CIA Hank O’Neal. Comme il
le raconte sans complexe dans une interview
à Jazz Wax en 200916, c’est pendant l’exercice
de ses fonctions qu’il construisit son premier
studio d’enregistrement dédié au Jazz. Mais il
est aussi un photographe de talent, initié par
Bérénice Abbot dont il partageait suffisamment
l’amitié avec Harry Lunn pour se retrouver avec
lui chaque année, à l’occasion de l’anniversaire
de la grande photographe. Ce n’est évidemment
Hank O'Neal, agent de la CIA
pas par hasard qu’O’Neal était un intime de Harry Lunn : ils faisaient
le même métier d’expert en influence culturelle, au service du même
employeur, qui leur apprit même à en vivre, et bien. Preuve s’il en est de
leurs hautes responsabilités. Peu importe leur implication avérée dans
des dommages collatéraux, comme celle de Lunn dans le sabotage de la
conférence de Bandung en 1956.
12)In The Photograph Collector’s Guide, Little Brown & Co (T) ; Londres, 1980.
13)Karen M. Paget, « Patriotic Betrayal : The Inside Story of the CIA's Secret Campaign
to Enroll American Students in the Crusade Against Communism » Yale University Press,
New Haven, CT, 2015.
14)Parmi les très nombreuses références existant sur le sujet, on citera « The Cultural Cold War :
The CIA and the World of Arts and Letters » de Frances Stonor Saunders, The New Press, NY,
2001, et The First Resort of Kings, American Cultural Diplomacy in the Twentieth Century,
Potomac Books, Virginia, 2007, de Richard T. Arndt.
15)« Modern art was CIA 'weapon' » Frances Stonor Saunders, The Independent, 22 octobre 1995
http ://www.independent.co.uk/news/world/modern-art-was-cia-weapon-1578808.html
16)« http ://www.jazzwax.com/2009/06/interview-hank-oneal.html
29
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
Ce n’est donc pas au titre d’une reconversion
que Harry Lunn va s’investir à fond dans le
marché de la photo et imaginer, puis faire
adopter, les procédures nécessaires à l’organisation de ce marché tout juste naissant
et les normes que nous connaissons encore
aujourd’hui en matière d’évaluation. C’est
ainsi qu’il saura imposer la nomenclature des
tirages, aujourd’hui décrite par Dominique
Sagot-Duvauroux et Nathalie Moureaux17 et
qui permettront d’agir sur les prix :
- Le vintage, tirage contemporain à la prise
de vue, fait par le photographe ou sous son
contrôle direct;
-Le tirage original fait à partir du négatif
original mais qui peut être fait posté rieurement par le photographe ou sous son
contrôle;
-Le retirage, tirage effectué après la mort
de l'auteur à partir du négatif original;
-Le contretype, obtenu à partir d'une
épreuve photographique rephotographiée;
-Les épreuves de lecture, tirages intermé diaires réalisés par le photographe avant
le tirage définitif ;
-Les tirages de presse, destinés aux entre prises de presse en vue de la publication ;
-Les tirages définitifs, dont la fonction est
normalement l'exposition et qui consti tuent l'œuvre finie (taille, contraste, etc.);
-Tirages signés ou non et/ou numérotés
ou non.
Lorsqu’il ouvre sa première galerie à Washington, il sait que le marché de la photo va croître
puisque c’est lui qui va s’en occuper personnellement et sans relâche, avec tous les soutiens
dont il dispose dans les réseaux clandestins de
ses anciens collègues toujours actifs, notamment financiers, médiatiques, universitaires,
institutionnels. Et en plus, il aimait la photo !
Harry Lunn va notamment standardiser la
rareté des tirages, leur numérotation, leur
traitement et leur authentification par l’auteur,
portait académique de George Sand par Nadar (1864)
ou encore la segmentation des œuvres en différents genres selon qu’elles
sont classiques, modernes ou contemporaines. Il contribue à organiser
les réseaux « d’instances légitimantes » fort de ses compétences d’officier traitant. C’est ainsi qu’il se démène pour instituer l’Association of
International Photography Art Dealers (AIPAD) en 1978 ou pour que le
succès des premières éditions de Paris Photo, à partir de 1996, lui assure
sa pérennité. Il est également le premier galeriste photo à prendre un
stand (immense) à la Foire internationale de Bâle en 1975. Il y emmènera
avec lui des germanophones de poids comme Rudi Kicken, fondateur
de l’une des plus anciennes galeries en Allemagne, les collectionneurs
de Cologne Ann et Jurgen Wilde, l’historienne de la photo Anna Auer,
professeur à Vienne, ou encore le photographe Wilhelm Schürmann,
de Dortmund, qui documenta justement la présence de la culture amé30
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
ne soient trop connus. Grâce à cette politique,
il thésaurisa quantité d’œuvres et put sans
difficulté se profiler comme grossiste, anticipant sur un marché de galeries qui n’allait
pas tarder à exploser, avec en particulier le
soutien significatif de ses anciens collègues
actifs au sein du MoMa. Il se mit aussi à publier
des catalogues très haut de gamme, fixant
les tendances et se dota ainsi d’une stature
d’expert incontournable. Ses fonctions de
L a c o n te mpl atio n
de s ob je t s c omme
ré s ultat d ’u ne cré atio n
ne s uffit pl u s
représentant de grandes successions telles que
les Diane Arbus, Walker Evans et bien d’autres,
renforcera encore sa place car elles avaient
toutes en commun de posséder des fonds photographiques exceptionnels. Le voici donc
devenu le pivot incontournable d’un marché
qui s’inscrivait dans la stratégie d’influence
américaine, exactement comme ses collègues
traitant l’expressionisme abstrait, avec lesquels
il collaborait en permanence. Comme certains
d’entre eux en peinture, il réussit le tour de
force de s’arroger la maîtrise des prix, ce qui
lui permit au passage de faire fortune. \
Lee D. Witkin, par Martha Casanave
17)Dominique Sagot-Duvauroux et Nathalie Moureaux,
Op. cit.13)
18)Interview au journal « Le Monde », 14 novembre 2013.
Larr y H. Lunn, ex-agent de la CIA, par Carol Harrison
ricaine dans l’Allemagne de la guerre froide et participa à la création
de la galerie de Rudi Kicken. Côté anglophone, il fit venir le galeriste
londonien Robert Hershkowitz et la directrice du musée des sciences de
Londres Maggie Weston. C’est là qu’il confiera à la galeriste française
Michèle Chomette que pour lui ce qui est « la clé de tout », c’est que « la
valeur d’une photo se mesure à son importance pour l’histoire de l’art18 ».
C’est dans ce contexte très particulier qu’il s’engagea dans une stratégie
d’acquisition de collections complètes, comptant chacune des milliers
de tirages, et cela directement auprès des artistes, si possible avant qu’ils
31
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
Le marché
de la photo en chiffres
par artmarketinsight
Artprice .com
La photographie représente
une partie congrue du marché
de l'art (moins de 1,5 % des
recettes globales). Logique,
puisque c'est un marché
neuf, contrairement à ceux,
séculaires, de la peinture,
la sculpture et l'estampe.
L'achat de photographies
s'est entièrement décomplexé
sur la dernière décennie,
avec plusieurs enchères
millionnaires à la clef. Il
faut dire que l'arrivée massive
de clichés aux enchères ne
répond pas seulement à une
demande contextuelle liée à
notre culture de l'image... La
photographie cumule bien
des atouts, dont des modes de
transport et de stockage aisés,
et une grande adaptabilité
aux transactions en ligne.
Des prémices à l'arrivée des
contemporains
Le marché débute timidement dans les années
70 avec une photographie historique en noir
& blanc et de petit format. En 1971, la société
de ventes américaine Sotheby’s innove en
lançant le premier département dédié à la
photographie au niveau international. Ce
segment de marché mettra quelques années à
se révéler... Une vingtaine d'années pour tout
dire avant que les amateurs d'art considèrent
l'œuvre photographique sans défiance et au
même niveau que les médias traditionnels.
Le marché se renforce véritablement dans les années 90, époque de la
première foire exclusivement dédiée à la photographie, à savoir Paris
Photo, en 1997. C'est aussi l'époque des grands formats « tableaux »,
notamment avec l’École de Düsseldorf. La création contemporaine
prend alors ses marques, avec des éditions limitées et numérotées qui
rassurent les collectionneurs. Au milieu des années 90, le marché de la
photographie contemporaine se cantonnait à 300 ou 400 clichés vendus
chaque année en salles. Depuis, la demande et les prix ont véritablement
explosé, notamment pour l'art contemporain, tant et si bien que le
meilleur prix payé pour une photographie se hisse à 7,2 m€ frais inclus.
Un tel résultat reste exceptionnel. Il ne pouvait que récompenser une
icône de l'art actuel, en l'occurrence, Jeff Koons, de surcroît pour un
autoportrait (The New Jeff Koons, photographie sous caisson lumineux
cédée 9,4 m$ frais inclus le 14 mai 2013 chez Sotheby's New York). Avec
un budget si conséquent, il est aussi possible d'accéder à une huile sur
toile signée Pablo Picasso, telle que la Femme assise dans un fauteuil noir
de 1938, vendue 7,2 m€ en mai dernier chez Sotheby's. C'est un fait, la
photographie a définitivement fait ses preuves sur le marché haut de
gamme en tutoyant la cote des plus grands artistes modernes.
La photographie millionnaire
L'accès de la photographie au palier millionnaire est un phénomène
relativement récent. Ce niveau de prix est atteint pour la première
RÉPARTITION DES LOTS PHOTOGRAPHIQUES
VENDUS AUX ENCHÈRES PUBLIQUESPAR GAMME DE PRIX (2014)
> 500 000 €
50 000 à 500 000 €
5 à 50 000 €
1 à 5 000 €
< 1 000 €
0
32
2000
4000
6000
8000
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
RÉPARTITION DU PRODUIT DES VENTES AUX ENCHÈRES
PUBLIQUES DE PHOTOGRAPHIEPAR PAYS (2014)
fois en 2005 avec un portfolio d'Edward Curtis (The North American
Indian). Il sacre d'abord les photographes modernes avant de gagner la
production du XXIe siècle. À ce jour, une quarantaine de photographies
ont dépassé le seuil symbolique du million d'euros aux enchères et rares
sont les artistes parvenus à cet exploit. Outre Edward Curtis et Jeff
Koons, la fine fleur de la photographie haut de gamme compte avec
Andreas Gursky, Richard Prince, Cindy Sherman, Gilbert & George,
Edward Steichen, Albert Stieglitz, Hiroshi Sugimoto, Jeff Wall, Mike
Kelley, et fraîchement Thomas Struth, qui signait son record absolu
en mai dernier avec son tirage Pantheon, Rome (édition 5/10, 1,6 m€
frais inclus, Sotheby's New-York). Précisons que cette même œuvre
était accessible pour 600 000 € de moins il y a seulement deux ans... Les
prix peuvent s'envoler tant la vitalité du marché contemporain est une
aubaine pour la niche photographique en plein essor.
L'amplitude de prix touche les artistes historiques
AUTRE: 6%
HONG KONG: 2 %
ALLEMAGNE: 3%
FRANCE: 12%
ROYAUME-UNI: 17%
ÉTATS-UNIS: 61%
L'un des socles de la photographie moderne tient à l'esprit dada et
surréaliste de Man Ray, dont les solarisations et les rayogrammes ont
ouvert de nouvelles perspectives dès les années 1920. Man Ray est bien
l'un des fondateurs de la photographie moderne et incarne à ce titre
la hausse de prix naturelle des maîtres du XXe siècle dans ce domaine
33
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / MARCHÉ PHOTO
particulier. En novembre dernier, Sotheby's orchestrait la plus importante vente dédiée à Man Ray depuis 20 ans, proposant une manne de
400 œuvres en provenance de la succession de l'artiste, dont 186 photographies. Dense et historique, la vacation a néanmoins manqué de
clichés emblématiques, si bien que le meilleur prix s'arrête à 79 500 €
pour Lee Miller au Collier d'Éponges, un tirage argentique de 1930. Le
second résultat notable étant les 51 900 € emportés pour À l'heure de
l'observatoire, les amoureux, photographie d'un célèbre tableau de Man
Ray qui représente la bouche de Lee Miller flottant dans le ciel, une
bouche dont le prix a grimpé de 300 % en 20 ans.
Outre ces résultats conséquents, nombre d'épreuves de qualité et de
provenance irréprochables sont parties entre 4000 et 8000 € seulement.
Certaines furent plus accessibles encore, dont une vue de la skyline de
New-York achetée 1600 € ou un photomontage adjugé 2400 € (Design
for the Rolling Stones, Exile on Main Street). Man Ray est abordable donc,
dans la majorité des cas. Pourtant, si Man Ray n'a pas encore rejoint
le sérail des photographes millionnaires en euros, ce n'est qu'une
question de temps. Il a d'ailleurs déjà atteint ce seuil en dollars l'an
dernier, lorsque Christie's eut le privilège d'adjuger un rayogramme
au quadruple de son estimation basse. Prix final : 1,2 m$ avec frais
(Untitled Rayograph, plus de 938 000 €, le 4 avril 2013). C'est la première
fois qu'une photographie de l'artiste surréaliste atteignait le million de
dollars, un seuil déjà dépassé plusieurs fois pour ses huiles sur toile. Il
ÉVOLUTION DE L'INDICE DES PRIX DE LA PHOTOGRAPHIE
BASE 100 AU 1ER JANVIER 2005
magnifiques acquisitions sont encore possibles, un de Brassaï (autour de 10 000 €) ou La
Lecture, Esztergom, réalisé par André Kertész
en 1915 et payé 1560 € en novembre dernier
chez Artcurial.
Outre la photographie d'avant-garde, précieuse
pour l'histoire, d'autres pans sont à explorer,
dont la photographie indienne et africaine. En
Afrique par exemple, la tradition du studio
photo a fait vivre des milliers de photographes
qui eurent un succès populaire formidable dès
les années 50. Bien qu'ils soient nombreux à
avoir exercé cette activité, peu de photographes
sont sortis de l'anonymat. Les portraitistes
les plus cotés aujourd'hui sont Seydou Keita,
Malick Sidibé et Samuel Fosso et ils passent
pourtant rarement les 10 000 €. Le meilleur
de la photographie n'est pas inabordable, loin
de là, puisque 40 % des œuvres valent moins
de 1000 € sur le marché des enchères. Avec
un budget de 5000 €, le choix s'élargit à plus
de 75 % du marché de la photographie. Il est
même possible, avec cette enveloppe, d'accéder à certaines épreuves de la grande artiste
américaine Cindy Sherman. \
150
INVESTISSEZ DANS
LE NOUVEAU MARKET.
100
LE MÉDIA SUISSE DES HIGH NET
WORTH INDIVIDUALS
UN
E
50
PHILANTHROPIE(S)
CULTURE(S)
JAPON : CAP SUR
LE SOLEIL LEVANT
ANOUK
FOUNDATION :
POUR QUE LES MURS
S’ENSOLEILLENT
SIGNIFICATIONS
DU RIRE
INDEX
TIBÈRE ADLER,
DIRECTEUR ROMAND
D’AVENIR SUISSE
MARCHÉ DE L’ART
ALBERTO
GIACOMETTI :
LA SCULPTURE
AU PLUS HAUT
fallait un cliché fort, en superbe état et bien daté pour décrocher un tel
prix. C'était justement le cas de ce tirage réalisé en 1922, l'année même
où l'artiste invente les rayogrammes en plaçant sur du papier sensible
divers objets, puis en exposant le tout à la lumière.
Rayogrammes. Solarisations... Ces expériences fertiles sont au cœur
du travail de László Moholy-Nagy, Christian Shad, William Henry
Fox Talbot, Théodore Brauner, Raoul Ubac, Alfred Wols. Des artistes
à surveiller de près, tant leurs petits chefs-d’œuvre se trouvent encore
abordables comparés aux signatures contemporaines à la mode. De
34
INVITÉ
JAN. 15
JAN. 14
JAN. 13
JAN. 12
JAN. 11
JAN. 10
JAN. 09
JAN. 08
JAN. 07
JAN. 06
JAN. 05
0
ÉDUCATION :
15 MENTORS
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DOSSIER PHOTOGRA PHIE / ENTRETIEN
Le point de vue
de Tatyana Franck
Entretien avec Tat yana Franck,
Directrice du musée de l’Élysée
Tatyana Franck vient tout juste de succéder
à Sam Stourdzé à la direction du très prestigieux Musée de l’Élysée, depuis le 2 mars de cette
année. Elle aime certainement les défis et s’y
sent à l’aise. Ancienne championne de ski, elle
est née dans le milieu de la photo, avec un père
galeriste renommé à Londres et une tante photographe, épouse d’Henri Cartier-Bresson en
personne. À tout juste 30 ans, l’âge de la création du Musée de l’Élysée, elle a déjà une solide
expérience. Forte de son master en droit des
affaires, de sa licence en histoire de l’art et de
sa formation en MBA, elle est passée par Christie’s, et le fonds d’investissement londonien
Fine art Fund. Elle a aussi travaillé pour la
célèbre imprimerie d’art « Idem » à Paris, carrefour international des plus grands musées et
des plus grands artistes, allant des peintres
Bernard Buffet, Sam Szafran ou Matisse, aux
photographes David Lynch, Prune Nourry ou JR,
avec qui elle s’est liée d’amitié.
Elle a également pris en charge des expositions très importantes allant
de la collection d’estampes de Pablo Picasso à Singapour, au travail de
Prune Nourry au Mexique qu’elle a contribué à faire connaître. C’est
déjà comme ancienne directrice des archives de Claude Picasso, riches
de milliers de tirages photo, qu’elle a pris les rênes du Musée de l’Élysée
avec enthousiasme, notamment dans la perspective de son déménagement au Pôle muséal de Lausanne d’ici cinq ans.
Quelle est pour vous la place de la photo dans le marché de l’art ?
Elle reste encore inégale. La photo est à la fois un medium qui touche
tout le monde et qui demande beaucoup de connaissances et de temps
pour être apprécié dans toute sa valeur artistique. Revenant tout juste
d’Art Basel, qui est tout de même l'une des plus importantes foires
annuelles d'art contemporain au monde, j’ai pu constater que la photo
y était cette année sous-représentée. Il y avait trop peu de galeries
36
photo, même si certaines qui comptent comme
Howard Greenberg, Thomas Zander, Kicken
et Daniel Blau, étaient là. Mais il n’est pas
impossible que certains collectionneurs soient
restés sur leur faim.
Quel est le salon photo qui dynamise le plus
le domaine ?
Paris Photo arrive bien sûr en tête mais la première édition de Photo London, en mai dernier,
était très prometteuse. Tout le monde était là,
grandes galeries et grands collectionneurs.
Contrairement à des foires comme l’AIPAD
à New-York, qui conservent un certain côté
très « Upper East », on se rend aux foires de
N o u s s omme s e n
pe rma ne nce à l’éc o u te d u
marché , t rè s vigil a n t s .
Paris, Londres et Basel d’abord pour acheter,
avec des collectionneurs venant des quatre
coins du monde, en particulier des BRICS.
On doit savoir que le collectionneur photo
qui est sans doute l'un des plus importants
aujourd’hui, est un Asiatique. Je veux parler
de Lee Kun-hee, le propriétaire du groupe
Samsung en Corée.
Que recherchent les collectionneurs ?
Des grands formats couleur, dont les auteurs sont immédiatement identifiables.
Par exemple lorsque vous voyez un cowboy,
vous savez que c’est un Richard Prince. C’est
aussi le figuratif qui prime, bien que des
artistes comme Hishori Sugimoto produisent
des œuvres quasi abstraites, notamment ses
célèbres triptyques de la mer Tyrrhénienne,
en dégradés de gris.
Elena Budnikova
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / ENTRETIEN
Avec des enchères sur des grandes œuvres
photographiques qui dépassent les 4 millions de dollars, le budget d’acquisition du
Musée de l’Élysée lui permet-il de demeurer
dans la course ?
réseau est donc essentiel dans notre domaine, y compris avec d’autres
musées. Je souhaite d’ailleurs renforcer les synergies, notamment avec
Winterthur et fédérer nos forces en Suisse.
Le Musée de l’Élysée compte parmi les plus
importants musées de photographies du
monde et n’hésitera pas à acheter une œuvre
majeure qui viendrait compléter son fonds
ou s’inscrirait dans sa stratégie d’acquisition.
Nous devons néanmoins nous en tenir à nos
budgets, c’est pourquoi nous essayons de procéder le plus en amont possible des tendances
haussières. Nous sommes en permanence à
l’écoute du marché, très vigilants. Et puis si
vraiment les valeurs dépassent nos capacités
du moment, nous essayons de nous assurer
du soutien de mécènes qui n’hésitent pas
à s’engager pour le Musée. Ceci nécessite
d‘entretenir un haut niveau de confiance
avec eux et de les informer en continu. Indépendamment des acquisitions, il nous arrive
aussi de recevoir de très belles donations
d’œuvres et collections. Le développement du
Le Musée de l’Élysée lance un vaste programme de numérisation,
sur plusieurs années, de l'ensemble de ses collections et de ses livres
de photographie (près de 20 000 livres). Il sera dès lors en mesure de
proposer la première bibliothèque dématérialisée de livres de pho-
Quelles sont les priorités du Musée de l’Élysée aujourd’hui ?
L a multidis ciplin arité (… )
s’in s crit da n s n o t re s t r até gie
de s o u tie n à l a pho t o gr a phie in n ova n te ,
ca pable d ’in ve s tir de n o u ve au x
te rrit oire s de cré atio n.
tographie et entend ainsi s’affirmer comme un pôle de recherche et
d’excellence en matière numérique avec en ligne de mire le déménagement au Pôle muséal d'ici 2020. Et puis nous sommes un musée
cantonal et il nous appartient de soutenir les jeunes artistes locaux, ce
que nous faisons jusqu’au bout. Notre responsabilité est très importante
37
DOSSIER PHOTOGRA PHIE / ENTRETIEN
Comment considérez-vous les évolutions de
la photo dans le cadre des réseaux sociaux et
de l’innovation technologique ?
Elena Budnikova
Qui aurait pu imaginer il y a quelques années
que 2 milliards de photos puissent s’échanger
chaque jour sur internet ? C’est évidemment
un sujet auquel je suis très sensible. Nous avons
notamment planifié l’intégration des réseaux
sociaux au futur Pôle muséal de Lausanne.
Par ailleurs, nous faisons déjà développer des
applications smartphone et tablette, intégrant
la réalité augmentée, comme celle que nous
avons créée dans le catalogue destinée à enrichir les visites de notre nouvelle exposition
reGeneration3. Elle donne directement accès
à des sources documentaires externes. Je tiens
d’ailleurs à souligner que cette 3e édition de
reGeneration valorise fortement la multidisciplinarité, ce qui s’inscrit dans notre stratégie de
soutien à la photographie innovante, capable
d’investir de nouveaux territoires de création.
à cet égard pour les faire émerger et donner une légitimité à leur
travail, avec néanmoins certaines constantes comme les photos de
voyages et de montagne. Nous préparons d’ailleurs une grande exposition sur la montagne qui aura lieu dans deux ans. Nous soutenons
également l’intégration de techniques et appareils traditionnels de
type chambres, tirages argentiques spéciaux, dans des recherches
elles-mêmes innovantes.
Notre engagement à soutenir de bons photographes qui apportent
des propositions inédites se traduit aussi par leur mise en avant dans
notre magazine ELSE (une toute nouvelle formule voit le jour avec
notre numéro de juin), ainsi qu’avec des événements comme la « Nuit
des images » de Lausanne, qui s’inscrit dans les célébrations des 30
ans du Musée et que vos lecteurs pourront découvrir sur notre site.
Dans le cadre de cet anniversaire, le Musée a aussi imaginé un
projet conjoint avec Paléo Festival n’est-ce pas ?
Oui. Il se trouve que le Paléo Festival fête quant à lui ses 40 ans. Alors,
nous avons décidé de marquer ce double anniversaire en mandatant 5
jeunes photographes locaux de talent (Claude Baechtold, Anne Golaz,
Nicolas Haeni, Olivier Christinat et Elisa Larvego) pour apporter
« Un autre regard sur Paléo », c’est le titre choisi. Ils ont travaillé sur
le festival l’année dernière et leurs œuvres seront présentées cette
année du 20 au 26 juillet 2015 à Paléo. Ce projet permet à la fois de
valoriser un travail artistique photo en résonance avec la musique, et
de croiser les intérêts de chacun des deux publics concernés.
38
Comment avez-vous procédé pour la sélection des artistes ?
Dans cette exposition, le but est de révéler
de jeunes talents et d’offrir une large visibilité aux meilleurs. Il existe certes une part
de subjectivité dans un tel processus, mais le
choix du Musée a été de solliciter plus de 350
écoles d’art dans le monde entier pour nous
présenter leurs candidats les plus talentueux.
Et nous n’avons pas été déçus ! Nous avons
ensuite retenu 50 projets de 25 nationalités
différentes (y compris la Suisse) qui donnent
une vision très riche des inspirations de ces
jeunes et un concentré unique de la création
photographique contemporaine. Nous avons
regroupé leurs œuvres en trois thématiques
distinctes : l’expression documentaire, le lien
entre photographie et mémoire, et enfin la
dématérialisation de l’image.
Vous qui avez baigné dans l’univers de la photographie depuis votre plus jeune âge, quels
sont vos goûts personnels dans ce domaine ?
Oui bien entendu. Je suis très sensible aux
œuvres à la fois figuratives et humanistes,
c’est-à-dire exprimant des valeurs. Ensuite, je
laisse mon cœur et mon intuition me guider
librement. \
la
invité
Culture(s)
Le nOn COté a
La COte
Jérôme Lambert :
CeO de mOntbLanC
L’art de
La méChanCeté
index
pHilantHropie(s)
marCHé de l’art
10 gérants de
fOrtune
d’infLuenCe
mieux traiter
Le CanCer
des enfants
L’expansiOn
du mOyen-Orient
Géopolitique(s)
L’ineptie des sanctions
économiques
39
20
9 771661 934966
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9 771661 934966
11
10
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pr n t
u
investir
DOSSIER / IMMOSCOPE / INVESTIR
patrimoine ( s )
42 DOSSIER :
Pour une performance durable
Comment les entreprises intègrent-elles
la problématique de la durabilité dans leurs activités ?
par Anne Barrat
46 Optimalité et durabilité
par Anne Barrat
50L’obligation à impact social : l’économie au service
de l’humain, et non l’inverse
par Édouard Crestin-Billet
54 Investissement responsable : l’éthique sans exclure
la performance financière
par Tony Campione
56 Trois questions à Raphaël Domjan, fondateur
de Solarplanet et Solarstratos
42
Plus de la moitié de l’économie modiale est aujourd’hui sous l’influence d’une politique de taux
d’intérêt nul, 70 % du PIB mondial sous celle de
taux directeurs de banques centrales négatifs.
Ce contexte, indissociable de politiques monétaires accommodantes, a fortement contribué à
renforcer les marchés – 62 % de la capitalisation
boursière mondiale sont soutenus par des politiques de taux zéro. Aux Etats-Unis, qui sortent
de leur 3e programme de quantitative easing
depuis mars 2009, la capitalisation boursière
(plus de 71 trillions de dollars) a dépassé de 10
trillions le pic de 2007.
Nouveau paradigme, ou excès de complaisance ?
Il ne faut « pas laisser ce qui était impensable hier
devenir la norme demain » répond la Banque
des Règlements Internationaux (BRI) dans son
85e rapport annuel. L’institution, qui pointe le
niveau trop bas des taux d'intérêt à l'échelle mondiale, appelle à une normalisation des politiques
monétaires et à une réorientation des politiques
publiques vers des objectifs à plus long terme,
pour rétablir les conditions d'une croissance
viable et équilibrée.
60 DOSSIER :
Actions américaines
56
L’équilibre de la terreur
entretien avec Emmanuel Ferry
La gestion active avisée ouvre la voie
à de nouvelles performances
Par Daniel Nicholas
64
66INVESTIR
66Gouvernance : Le serpent de mer de la révision
du droit de la société anonyme
par Dominique Freymond
68 Immoscope : Immobilier prime :
les acheteurs internationaux sont de retour
par François Mollat du Jourdin
70La chronique de l’ISAG : La Grèce : dedans ou dehors ?
par Marie Owens Thomsen
74La chronique du BAS : SMIXIN
par Frank Gerritzen
78 Indices BBGI
par Alain Freymond
ANNE BARRAT
41
pat rimoine ( S )
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Comment les entreprises
intègrent-elles la problématique
de durabilité dans leurs activités ?
La parole aux entrepreneurs
Les entreprises ont de plus en plus de contraintes
réglementaires, en matière de transparence et
de reporting sur leur performance environnementale, sociale et de gouvernance, avec des
coûts induits significatifs. Quelle est leur vision
sur une problématique qui va bien au-delà de la
notation des agences dont elles dépendent pour
être intégrées dans tel indice et/ou instrument
financier ? Quelques éléments de réponse avec des
entrepreneurs qualifiés.
Alain Guttmann, président du conseil
d’administration de la société BOBST
Bobst est une entreprise leader en termes de
part de marché dans le domaine des équipements (impression, découpage, plieuse colleuse)
utilisés pour le packaging. Elle affichait un
chiffre d’affaires de 1,3 milliards de francs en
2014. Ses clients ? Des intermédiaires entre les
grandes marques (P&G, Nestlé, pour ne citer
qu’elles) et l’entreprise suisse créée il y a 125
ans, aujourd’hui présente à Mex dans le canton
de Vaud. Le nouveau site parle de lui-même
de l’approche de Bobst en matière de responsabilité sociétale : une part importante (plus
de 40 %) est générée à l’interne dont une partie
(5,9 %) provient des panneaux photovoltaïques
installés sur les toits de son usine, permettant
de générer une énergie propre. Nous avons le
souci constant d’éviter les déchets : que ce soit
dans les équipements que nous vendons à nos
clients ou dans le fonctionnement quotidien
de la société. Est-ce que nos installations à
énergie solaire sont rentables ? Pas vraiment
aujourd’hui, mais peu importe, cela contribue à un objectif plus large de protection de
l’environnement.
Résultat : sur les six indicateurs que Bobst
a inscrits dans son agenda de performance
durable, cinq sont au vert grâce à ses partis pris
technologiques, préconisés par ses ingénieurs
indépendamment des coûts (élevés) de cette
poursuite de l’excellence : -17 % de déchets
en volume, -30 % d’émissions de CO2, -14 %
d’accidents professionnels. La consommation
d’électricité globale et par employé est en baisse.
L’entreprise n’est pas en reste d’innovation
du côté humain : elle emploie plus de 230
apprentis, avec l’objectif de former les ressources de demain. Et ce, en les initiant aux
Alain Guttmann
42
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
technologies avant-gardistes, qui remplaceront certains savoir-faire traditionnels que
le franc fort et le coût du travail en Suisse
risquent de tuer. Parmi ces technologies, le
digital. Une véritable révolution dans l’industrie, qui modifie radicalement le temps
d’exécution d’une commande et l’opportunité
d’en modifier les composantes à l’infini avec
un minimum de gâche, et une réduction des
une cinquantaine d’années » se voit répondre « nous achetons pour un
horizon de trois à cinq ans, pourquoi investirions-nous sur 50 ans et
devrions-nous payer un SAV sur des pièces qui deviendront de plus en
plus chères ? ». Une bonne leçon : durer, c’est s’adapter quotidiennement
sans transiger sur les valeurs de long terme.
Jean-Marie Greindl, président de PPG EMEA
« L a d ur abilité ,
B ob s t l’a da n s s o n ADN. N o n
se ule me n t parce q ue
l a famille pré side
à l a de s tinée de l a s ocié té
de puis s a cré atio n ,
e t e n te nd l a t r a n s me t t re
au x fu t ure s gé né r atio n s ,
mais au s si parce q u’é ta n t
Suis se s , n o u s pe n s o n s
l o n g te rme . »
temps de gestion des stocks. Concrètement,
avec le digital, lorsqu’une marque décidera
de modifier la photo sur son emballage, elle
réduira drastiquement le temps d’introduction de son nouvel emballage mais surtout
diminuera le volume de ses stocks d’anciens
emballages à détruire.
Et de rappeler qu’emballer,
c’est d’abord protéger.
Les substrats de nos clients sont : le carton
ondulé (utilisé par exemple pour les transports
de marchandise telle que le vin), le carton plat
(un emballage pour boîte de corn-flakes par
exemple), et le carton flexible (pour emballer
par exemple des snacks). Ce sont les clients
finaux qui les achètent. Ils sont de plus en
plus recyclés.
Notre approche ne nous empêche pas d’être
pragmatiques. Quitte à nous adapter à des
situations dans lesquelles nos valeurs sont
bousculées. Ainsi, quand nous discutons avec
des partenaires chinois, notre promesse de
vente « nos machines sont faites pour durer
Jean-Marie Greindl
Pour PPG, leader mondial sur le marché de la peinture – 93 % de son
chiffre d’affaires, avec des marques telles Ripolin, Seigneurie, Decoral ou Sigma –, le développement durable fait partie de la promesse
de vente des produits qu’elle commercialise. Parce que la peinture
a d’abord une fonction de protection avant d’être décorative. Sans
peinture, la durée de vie de nombreux objets serait réduite de manière
significative. Une voiture par exemple : sans la peinture, la carrosserie
serait usée au bout d’un an et demi. Même constat pour un bateau :
43
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
la peinture le protège contre toutes sortes
de parasites marins qui viennent se coller
à la coque et diminuent sensiblement son
efficacité énergétique. La technologie SigmaGlide de PPG crée une surface non-toxique,
non-adhérente, qui empêche le bio-encrassement dû aux algues et aux coquillages et
réduit ainsi l’accumulation sur les bateaux
ou vaisseaux. Tout dépôt est emporté par
« Le dé vel oppe me n t
d ur able e s t ava n t
to u t u ne s o urce
d ’opp or t u nité s . »
la friction avec l’eau de mer, la coque reste
propre et la résistance à l’eau est améliorée,
ce qui réduit la consommation de fuel et les
coûts. La durabilité est naturellement au
cœur des programmes de R&D de l’entreprise originaire de Pittsburg aux États-Unis,
dont le siège européen est basé à Rolle. Nous
cherchons en permanence à développer des
systèmes de protection plus performants, en
particulier en matière d’anti-corrosion.
Ca a un coût, bien évidemment, mais surtout, ça vaut le coup. Et ce, bien au-delà de la
conformité aux nouvelles règles qui poussent
nos clients à demander des technologies
plus performantes, pour la réduction des
émissions de CO2 notamment. Revenons
à la voiture : nous avons inventé il y a une
dizaine d’années le « compact process », qui
permet non seulement de diminuer de 30 % la
consommation d’énergie nécessaire à peindre
le véhicule, mais aussi les émissions des CO2
liées au processus de peinture. Nous avons
par ailleurs lancé Agilon®, une nouvelle
technologie basée sur le gel de silice utilisé
dans la fabrication des pneus, nous avons
augmenté la résistance à l’usure – donc la
durée de vie, de 10 % –, tout en améliorant
l’adhérence. Enfin, parce que l’allègement du
poids des véhicules est clé dans la réduction
des émissions et qu’il est aujourd’hui obtenu
en remplaçant l’acier par des matériaux composites, donc la soudure par de la colle, nous
avons investi dans un acteur important des
adhésifs automobiles, Revocoat, en avril 2015.
Cela étant dit, nous prenons également continuellement des mesures
pour réduire l’impact environnemental de nos activités – que ce soit
en termes de consommation énergétique, de gestion des déchets, etc.
Et ce, aussi bien dans nos usines que dans nos magasins. Les résultats
sont surprenants : la consommation énergétique a décru de 15 % en
2014 par rapport à 2012, les émissions de CO2 de 12 % sur la même
période. Un autre axe de notre stratégie durable concerne bien évidemment nos ressources humaines, leur sécurité notamment. Nous
faisons tout ce qui est possible afin que chacun de nos employés rentre
en bonne santé chez lui. Le taux d’accident a chuté de 17 % depuis 2012.
Par ailleurs, 90 % des unités bénéficient d’un programme de bien-être
qui vise à aider les collaborateurs à trouver le bon équilibre entre
vie professionnelle et personnelle. Mon modèle : Solar Impulse. La
maquette est sur mon bureau, qui me rappelle tous les jours que se
lancer dans une aventure, c’est voir à long terme et qu’il y a toujours
des solutions, même si ce n’est pas facile, aux problèmes environnementaux. Il suffit de bien les poser.
Pierre-Henri Bovsovers,
directeur général de l’hôtel W. Verbier
Pierre-Henri Bovsovers
44
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
« Twenty by twenty », c’est-à-dire une économie de 20 % d’ici à 2020
sur la consommation d’eau : voici l’un des objectifs ambitieux que
Starwood a fixé aux 1200 hôtels qu’elle gère – auxquels s’ajoutent
en moyenne une centaine de nouveaux hôtels par an. Ce plan global,
qui prévoit également une réduction de 30 % de la consommation
électrique, s’inscrit dans un axe stratégique majeur pour le groupe
propriétaire des marques St. Regis, The Luxury Collection, Sheraton,
Westin, ALoft, Element, Four Points by Sheraton, Le Méridien et W
Hotels. « Do the Right Thing » : autrement dit, minimiser l’impact
environnemental en réduisant tout ce qui peut l’être (déchets, émissions de CO2, etc.).
Ils viennent parce que W Verbier est le lieu
idéal pour une escapade alpine unique en son
genre et l’un des hôtels les plus luxueux de la
station. Il serait juste de conclure en disant
que la durabilité répond chez Starwood à un
réel engagement.
Les hôtels ont une certaine marge de manœuvre pour atteindre cet
objectif en prenant des mesures locales, adaptées aux réglementations
domestiques. Avec deux contraintes fortes : d’une part, la charge des
travaux de rénovation et d’adaptation nécessaires pour être conforme
aux normes environnementales ; d’autre part, le reporting.
« E n ré s umé ,
n ou s pre n o n s de s ce n taine s d ’initiative s
p our at teind re n o t re b u t ; be auc o up
de pe tite s cho se s q ui o n t u n gro s impac t
s ur l’e n viro n ne me n t. »
Nous dépendons des propriétaires des murs de nos hôtels – c’est là
une spécificité du secteur hôtelier – qui peuvent accepter ou refuser
de revoir les installations pour les rendre plus écologiques. S’agissant
du second point, nous devons renseigner régulièrement le site sur le
suivi des consommations. Ce qui permet au Groupe d’avoir une image
précise et comparative d’un hôtel à l’autre, des données énergétiques.
L’inventaire complet inclut les instructions et interdictions que nous
avons sur certains clients, quelle que soit leur capacité de paiement,
en vertu du code de conduite.
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LE MÉDIA SUISSE DES HIGH NET
WORTH INDIVIDUALS
UN
E
Parmi les initiatives locales qui capitalisent sur les traditions locales,
nous avons choisi le pellet (bois recomposé) pour chauffer l’hôtel,
bien plus efficace et moins polluant que le mazout. Nous faisons par
ailleurs essentiellement et prioritairement appel à des fournisseurs
locaux – induisant ainsi moins de transport, donc moins de pollution
et une contribution à l’économie locale. Nos collaborateurs participent
au nettoyage des montagnes.
Ceci nous apporte incontestablement un élément de différenciation
par rapport à nos concurrents, locaux notamment. De là à dire que
nos clients l’apprécient à sa juste valeur, et nous choisissent pour notre
engagement vis-à-vis du développement durable, il y a un grand pas.
45
INVESTIR
PHILANTHROPIE(S)
CULTURE(S)
JAPON : CAP SUR
LE SOLEIL LEVANT
ANOUK
FOUNDATION :
POUR QUE LES MURS
S’ENSOLEILLENT
SIGNIFICATIONS
DU RIRE
INDEX
TIBÈRE ADLER,
DIRECTEUR ROMAND
D’AVENIR SUISSE
MARCHÉ DE L’ART
ALBERTO
GIACOMETTI :
LA SCULPTURE
AU PLUS HAUT
ÉDUCATION :
15 MENTORS
D’INFLUENCE
TE
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SÉ RÊ M
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A S L’E X
À
Parmi les mesures imposées par le Groupe figure le ‘Green Choice’ un choix laissé au client pour contribuer à réduire les consommations
d’eau, énergie et de produits ménagers.
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pat rimoine ( S )
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Optimalité et durabilité
La recherche d’un nouvel
équilibre économique optimal
Elle doit être appréhendée à travers l’analyse du comportement des
agents économiques, que Ludwig von Mises a définie dans son ouvrage
L’action humaine sous le terme de praxéologie. Or, aujourd’hui, nous
pouvons déjà observer une prise de conscience par les États, les consommateurs et les entrepreneurs, que l’avenir de notre société doit désormais
reposer sur un développement durable. Après avoir été bouleversée
par l’invention de l’agriculture, puis par la révolution industrielle et,
au siècle dernier, par l’essor de la technologie de l’information, l’économie mondiale sera transformée profondément au XXIe siècle par la
création et la diffusion d’une nouvelle éthologie, celle de la durabilité.
ÉVOLUTION D’UN PORTEFEUILLE INVESTI DEPUIS 1990 EN ACTIONS PONDÉRÉES
EN FONCTION DE LEUR CAPITALISATION BOURSIÈRE AVEC UN MONTANT INITIAL DE USD 1
25,00
20,00
15,00
10,00
5,00
46
2010
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
0,00
2009
HAUT
BAS
1994
L’économie mondiale doit faire face aujourd’hui à quatre sources d’instabilité, à savoir
économiques, politiques, mais aussi sociales et
environnementales. Sur le plan macroéconomique, l’environnement reste caractérisé par
une création monétaire excessive rendue inefficace par un multiplicateur bancaire grippé,
alors que le surendettement du secteur public
ne permet plus aux gouvernements de mettre
en place des politiques économiques crédibles
pour permettre une résorption des ressources
productives excédentaires. Au niveau social, les
vicissitudes extrêmes induites par des niveaux
de chômage et par des inégalités sociales sont
devenues difficilement supportables. Quant à
l’environnement, il ne cesse de se détériorer
par une exploitation désordonnée des ressources naturelles, responsable notamment
du réchauffement climatique.
Contraintes par la réduction des déficits budgétaires, les autorités
politiques doivent dorénavant assurer un fonctionnement optimal
des mécanismes de prix. Elles intensifieront la taxation des externalités telles que l’émission de gaz toxiques ou le traitement de certains
déchets. Elles imposeront de façon accrue les entreprises bénéficiant
d’une situation monopolistique. Elles devront en outre mettre en œuvre
des incitations fiscales ou administratives permettant de favoriser
le financement des services sociaux pris en charge progressivement
par le secteur privé, en Europe plus particulièrement. Le comporte-
1993
Confrontée à des déséquilibres
qui n’ont jamais été aussi importants, l’épargne peut-elle encore
être gérée de façon optimale ?
1992
Edouard Crestin-Billet, Head of Institutionnal Asset
Management, 1875 Finance
« Le rôle de l’État changera radicalement. Après avoir été chargé de
développer des services publics, les gouvernements vont devoir externaliser l’exécution de la majorité de leurs prestations pour se concentrer
sur leur fonction de régulateur. »
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
ment des consommateurs sera influencé par
la recherche d’un bien-être plus immatériel.
Le consumérisme que nous avons connu au
cours du siècle dernier se réduira au profit
d’une prise de conscience collective que notre
santé, à laquelle nous donnons une priorité de
plus en plus grande, est dépendante de notre
environnement. L’origine des aliments, les
procédés de fabrication et l’incidence sur les
équilibres écologiques et sociaux prendront
un poids décisif dans le choix des ménages.
Les entreprises seront soumises à la fois à des
forces politiques, mais aussi et surtout sociales,
dues aux nouvelles exigences de leur clientèle.
Elles devront intégrer de façon accrue les
critères environnementaux, sociaux et de
gouvernance (ESG) dans leur gestion pour
rester compétitives et conserver leur niveau
de profitabilité, ainsi que pour maintenir le
coût de financement de leurs investissements
à des niveaux avantageux.
Incidence de l’éthologie de la durabilité sur l’allocation optimale du capital
Désormais, une sélection efficiente des investissements ne peut plus
se faire en se focalisant uniquement sur les critères financiers, mais
doit désormais s’élargir aux facteurs ESG, extra-financiers. Comme
l’ont démontré un certain nombre d’études empiriques, la matérialité
induite par l’intégration des critères environnementaux, sociaux et de
gouvernance sur la performance des actifs est bien réelle.
Malgré l’adhésion croissante des investisseurs institutionnels aux
principes onusiens pour l’investissement responsable (PRI), un grand
nombre de fonds de pension ou de gérants de portefeuilles se montrent
cependant encore très sceptiques à l’égard des gestions dites « responsables ». La principale raison de ce scepticisme est le rendement
insuffisant qui a été réalisé jusqu’à ce jour par les placements durables.
Or, la performance demeure à juste titre aux yeux des institutions de
prévoyance et des épargnants un objectif prioritaire. « Les sous-performances de l’ISR découlent essentiellement d’une mauvaise gestion de
l’exposition aux risques de marché, de surpondérations sectorielles et
de l’utilisation abusive de filtres qualitatifs. » Les sous-performances
Pics de volatilité, baisse des rendements, taux d’intérêts
au plus bas.
Et si le moment était venu d’appréhender les marchés sous
un angle différent pour mieux répondre à vos besoins ?
Chez Natixis Global Asset Management, c’est précisément
notre ambition.
Le fruit de cette réflexion se nomme Durable Portfolio
Construction®, une toute nouvelle approche destinée à
relever les défis d’aujourd’hui.
Parce que l’environnement actuel exige un autre regard.
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Distribué en Suisse pour les investisseurs qualifiés par NGAM, Suisse Sàrl. Siège social : Rue du Vieux Collège 10, 1204 Genève, Suisse. NGAM, Suisse Sàrl est une unité de
développement de Natixis Global Asset Management filiale de Natixis et la société holding d’un ensemble mondial de sociétés de gestion et de distribution spécialisées.
47
ADINT613-1114
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
engendrées par les investissements socialement responsables (IRS) ne
résultent cependant pas du fondement sur lequel ils ont été choisis.
Elles découlent essentiellement d’une mauvaise gestion de l’exposition
aux risques de marché, induisant notamment des surpondérations
sectorielles malencontreuses prises indépendamment des conditions
économiques. Elles s’expliquent aussi par une utilisation abusive de
filtres qualitatifs qui a conduit à la sélection de sociétés trop onéreuses.
- une quantification de la durabilité et l’exercice
des droits de vote;
- une application élargie aux actions et aux
obligations;
- une réplicabilité facilitée par le nombre plus
réduit de composantes par rapport aux indices
standards.
Après avoir analysé les fondements de la durabilité et démontré qu’une
gestion ne peut plus être optimale si elle n’est pas durable, il s’agit de
savoir comment nous pouvons intégrer les critères ESG de façon efficiente. Une intégration financière optimale des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance repose sur les 3 principes suivants :
– une exclusion limitée des sociétés grevées d’un rating ESG trop bas;
– la prise en considération du niveau des scores ESG, tout en donnant
un poids plus important à l’évolution de leur tendance;
– une réduction de l’influence des risques liés aux facteurs régionaux,
sectoriels et de style en minimisant le tracking error systématique.
Cette stratégie de placement s’applique de
façon passive sur les marchés spécifiques, mais
peut aussi être utilisée comme base de sélection
de titres pour des politiques d’investissement
plus actives ou plus globales, telles que pour
les mandats et les fonds balancés.
La gestion indicielle, la plus adaptée
La meilleure réponse pour la mise en œuvre des quatre principes
permettant une intégration efficiente des critères ESG est la gestion
indicielle Elle offre en effet les avantages suivants :
– une performance excédentaire par rapport aux indices financiers
(+0,40 % pour les actions et +0,15 % pour les obligations);
– une intégration optimale des critères extra-financiers minimisant le ‘r
systématique et maximisant les rendements spécifiques liés aux facteurs ESG;
- une reproductibilité du processus de gestion réduisant la subjectivité
liée à la valorisation des intangibles (80 % de la valeur du S&P 500 est
représentée par les intangibles);
En conclusion, la gestion indicielle durable répond
aux quatre exigences nécessaires au développement d’une gestion de portefeuille optimale, à
savoir création d’un rendement excédentaire,
réduction du tracking error systématique, amélioration de la durabilité et reproductibilité du
processus de sélection. Elle s’inscrit en conséquence pleinement dans ce nouvel équilibre où
durabilité et performance deviennent pour les
investisseurs deux objectifs indissociables.
2004*
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015**
ÉVOLUTION HISTORIQUE
base 100 = 30.09.2014
240,00
220,00
200,00
180,00
160,00
1875 sustainable
global equity
TR IN USD
MSCI WORLD DM
TR IN USD
12,4 %
12,1 %
20,3 %
8,8 %
-41,0 %
34,4 %
14,5 %
-4,4 %
17,1 %
29,2 %
5,3 %
4,8 %
99 725
60 356
58 604
56 980
47 749
46 757
45 454
42 397
38 938
38 639
38 621
38 444
*30.09.2004 – 31.12.2014
Mesure de risque ex ante
140,00
** 31.12.2014 – 30.04.2015
120,00
100,00
80,00
60,00
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
1875 SUSTAINABLE GLOBAL EQUITY INDEX (USD) TR
2011
2012
2013
2014
2015
2016
MSCI WORLD DM TR (USD)
Source : APT
48
vol tot
Vol syst
vol spec
beta syst
corr syst
1875
MSCI
T/E
12,5
12,5
0,76
1,03
99.89
12,2
12,1
0,84
1,02
0,72
0,72
Des paroles aux actes nº 62
Le plus important,
ça reste la famille!
Nos veaux Natura-Beef sont particulièrement heureux. Ils grandissent avec leur mère et leurs
semblables au sein du troupeau et ont très souvent accès aux prés. Et ce n’est que l’un des
nombreux exemples de nos exigences élevées, auxquelles nous nous tenons depuis plus de 35 ans.
Des exigences qui ont fait de nous les pionniers de l’élevage adapté aux espèces et le numéro un
en matière de bien-être animal selon la Protection suisse des animaux PSA.
Pour tout savoir sur l’engagement de Coop en faveur du développement
durable, rendez-vous sur des-paroles-aux-actes.ch
pat rimoine ( S )
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
L’obligation à impact social :
l’économie au service de l’humain,
et non l’inverse
Entretien avec Iris Desforges, CEO & fondatrice de Foringest SA, et Sandro Gambuzza
Le « Social Impact Bond » ou obligation à impact
social (OIS), aussi appelé « Pay for success Bond »,
est un instrument financier novateur par qui
combine les aspets financiers, sociaux et environnementaux en une classe d’actifs traditionnels
(les obligations), mais avec une approche d’investissement différente. Il pourrait peser de 50 à 500
milliards de dollars dans la prochaine décade,
selon une étude publiée en 2014 par JP Morgan et la
fondation GIIN (Global Impact Investing Network)1.
Comment réunir l’État, des capital-risqueurs et des intermédiaires
qualifiés dans un projet commun à responsabilité sociale, tout en
ayant un retour sur investissement allant de 1 à 13 % par an ? Telle est
l’équation que vise à résoudre l’OIS, qui diffère de l’ISR (investisement
socialement responsable) en ce qu’il privilégie avant tout l’impact social.
Liée à des projets de coopération entre le secteur privé et public, l’OIS
propose au secteur privé, c’est-à-dire à l’investisseur, un instrument
qui permet de relever un défi social ou environnemental important
tout en favorisant une performance financière.
Un investissement à trois dimensions
Il permet au secteur public d’obtenir l’expertise du secteur privé, ainsi
qu’un financement, dont le but est l’efficacité du secteur public et le
bien-être de la société au sens large. L'OIS créé une passerelle entre
des défis sociaux, environnementaux et économiques qu'un individu,
une institution ou un gouvernement ne peuvent résoudre seuls, et les
moteurs les plus puissants du capitalisme – l’entreprenariat, l’innovation,
le capital et les marchés financiers. Elle permet ce faisant de financer
des hommes et structures capables de mettre en oeuvre des solutions
innovantes de sorte qu’ils puissent atteindre une taille critique en rapport avec la difficulté des problèmes sociaux ciblés. Et cela fait mouche.
Ainsi, selon l’enquête de JP Morgan précitée, en 2015 la motivation
principale des investisseurs à investir dans les « Social Impact Bonds »
a augmenté de 17 % avec 6332 bonds planifiés, contre 5404 exécutés
en 2014. Le montant moyen était de 10 millions de dollars en 2014 par
émission d’obligation ; en 2015 il sera de 14 millions. La grandeur du
marché des OIS comparé au marché des obligations traditionnelles
50
reste certes une niche (quelques milliards
contre des trilliards), néanmoins elle croît à
un vitesse rapide depuis 2009.
Des philanthropes du XIXe siècle
à l’obligation Peterborough
L’engagement des philanthropes pour améliorer l’existence des laissés pour compte n’est
pas d’hier. De plus en plus structurée au XIXe
siècle, leur générosité a donné naissance à des
fondations caritatives importantes qui ont
bénéficié d’incitations fiscales au début du
XXe siècle. Leur action a été relayée au milieu
des années 30 par les pouvoirs publics, qui ont
commencé à prendre en charge les moins bien
lotis, avant de créer une dizaine d’années plus
tard l’État providence un peu partout dans le
monde occidental. Aujourd’hui confrontés à
des prévisions de dépenses sociales largement
insuffisantes à couvrir les besoins et difficiles
à financer, ces États providence manquent
de ressources. Ils sont conscients qu’ils ne
sont pas les mieux placés pour trouver des
solutions innovantes aux problèmes sociaux.
Or, entre le secteur privé et le secteur public,
il existe un secteur social, qu’on appelle traditionnellement le « tiers secteur ». Méconnu,
il compte au seul Royaume-Uni, par exemple,
160 000 organismes caritatifs dont 60 000
entreprises sociales. Ces dernières s'engagent
à employer, sur la base de partenariats avec
les services sociaux, d’anciens prisonniers et
des chômeurs de longue durée en entreprise
afin de les réinsérer. Ce tiers-secteur emploie
800 000 personnes. Il est soutenu par des trusts
et des fondations caritatives dotées au total de
100 milliards de livres sterling. C'est pour le
financer que Social Finance a créé l’obligation
à impact social. Le ministère de la Justice
britannique a contractuellement accepté d'en
Elena Budnikova
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
le diabète de type 2. Concrètement, des programmes, des programmes contre la récidive,
pour les sans-abri, les jeunes menacés par le
chômage, les familles en détresse sociale, l’éducation préscolaire et l’asthme dans les familles
défavorisées sont mis sur pied. D’autres sont
à l’étude à travers le monde car, à l’évidence,
il existe beaucoup plus de résultats sociaux
quantifiables qu’on ne l’imaginait au départ. Il
existe de nombreux exemples concrets à travers
le monde. Le programme anti-récidive pour le
compte de l’État de New-York, dont La Fondation Rockefeller assume les premiers 10 % des
pertes potentielles. Aux États-Unis toujours,
Goldman Sachs a participé à l’émission de deux
obligations. Et plusieurs autres émissions sont
en préparation pour financer toute une série
de nouveaux programmes sociaux. En Israël,
c’est un programme de détection précoce et de
traitement du pré-diabète de type 2, qui touche
10 % de la population mondiale, les pauvres
en particulier, et représente 12 % des dépenses
globales de santé. En Italie, San Patrignano,
une organisation caritative qui a mis en place
un programme très efficace de désintoxication,
étudie la faisabilité d’une OIS pour le financer.
Iris Desforges
conditionner le remboursement et le rendement financier à la baisse du
taux de récidive chez les prisonniers libérés de la prison de Peterborough.
« L’obligation Peterborough a constitué une innovation dans la manière
de penser. Pour la première fois, la performance des organisations
caritatives concernées devait être précisément mesurée. » Une mesure
contractuellement liée au rendement financier des investisseurs qui
souhaitaient améliorer la vie des délinquants. Le capital et les intérêts
devaient être remboursés conjointement par le ministère de la Justice et
le Big Lottery Fund avec l’assurance que ces sommes représenteraient
une fraction des économies potentielles réalisées par le ministère. Si
le seuil minimum de performance fixé n’était pas atteint, les investisseurs perdaient leur argent. Ce qui revenait à avoir fait un don. Si,
au contraire, le seuil minimum était franchi, le rendement pour les
investisseurs augmentait de 3 à 13 % selon la baisse du taux de récidive.
On peut déjà envisager un jour où, pour chaque
problème social, chaque pays connaîtra le coût
d’une action sociale efficace, les économies que
les pouvoirs publics en tireraient et, par-dessus
tout, sa valeur pour la société. Les entrepreneurs comme les investisseurs philanthropes
s’intéresseront davantage aux résultats qu’aux
dons eux-mêmes.
Certes, tout ce qui compte ne peut pas être
compté et l’investissement impactant ne sera
pas adapté à tous les problèmes sociaux. Néanmoins, il a déjà commencé à modifier l’état
d’esprit de la philanthropie. Des fondations
cherchent désormais à mesurer précisément
l’effet de leurs dons par des critères qualitatifs,
sinon quantitatifs.
L’expansion internationale des OIS
L’obligation Peterborough est la première de plus de 20 OIS aujourd’hui
émises : 14 au Royaume-Uni, 5 aux États-Unis, 2 en Australie et 1 aux
Pays-Bas. Forte de 13,5 millions de dollars, c’est la plus importante d’entre
elles. Lesquelles financent à ce jour les réponses à sept questions sociales :
les programmes de désintoxication, des programmes pour lutter contre
l’échec dans l’enseignement supérieur, la malaria, la maladie du sommeil,
l’amélioration de l’emploi des femmes dans les pays en développement,
51
1) Source : Spotlight on the Market : The Impact Investor
Survey, 05/01/2014.
2)Créé à Londres en 2007, Social Finance Ltd. est le créateur
de l’obligation à impact social. Son objectif 1er est
le développement d’un marché d’investissement social.
Social Finance met en relation les investisseurs qui
ont des capitaux à investir et les secteurs sociaux qui ont
besoin de financements/conseils.
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Ni désengagement, ni privatisation
Quels sont les bénéfices de l’investissement impactant pour les pouvoirs
publics ? Le premier est l’innovation. Le deuxième est la ressource pour
la financer, sachant que le gouvernement rembourse si et seulement
si des résultats ont été obtenus. Le troisième est la prévention. Partout
dans le monde, les pouvoirs publics traitent d’abord les effets les plus
aigus des problèmes sociaux. Ils ont peu de moyens à consacrer à la
prévention. Les OIS s’efforcent en général de prévenir la récidive,
l’absentéisme scolaire, la perte de logement, etc., et fournissent une
base de comparaison de l’efficacité et du coût
de l’action sociale. « L’investissement impactant n’est pas une manière pour les pouvoirs
publics de renoncer à leur prise en charge des
problèmes sociaux. »
Il est au contraire une manière de les inciter
à payer pour des actions efficaces et à baisser
les coûts de ces programmes. Il ne s’agit pas
non plus de privatisation. Les investisseurs
Comment une OIS fonctionne-t-elle concrètement ?
Une obligation à impact social repose sur un contrat de paiement au
résultat dans lequel les pouvoirs publics acceptent de payer pour des
résultats sociaux améliorés. Elle repose sur un partenariat entre investisseurs, organismes de prestation de services, pouvoirs publics, voire un
intermédiaire financier. Si la solution atteint les résultats sociaux convenus, les pouvoirs publics payent aux investisseurs un montant établi selon
un barème accepté.
Ainsi, le risque de non-résultat est transféré
des pouvoirs publics aux investisseurs. La
figure 7 illustre une structure courante d’une
OIS. L'accès à ces OIS est domestique. Les
OIS sont liquides et garanties par les gouvernements émetteurs – Royaume-Uni, USA,
Australie et Canada pour l'instant.
SOCIAL IMPACT BONDS: FONCTIONNEMENT
Un social Impact Bond (SIB) permet le financement par des investisseurs privés de projets sociaux préventifs
permettant à l’Etat de réaliser des économies
Paiement en fonction
des résultats
SECTEUR PUBLIC
Apport de fonds
INTERMÉDIARE
FINANCIER
Attribution
des fonds et aide
à la gestion
du programme
Mesure d’impact
ACTEURS SOCIAUX
ÉVALUATEUR
INDÉPENDENT
Apport de services
Amélioration de résultats sociaux
Coût pour les services publics
Impact bénéfique pour la société
POPULATION
ACCOMPAGNÉE
INVESTISSEURS
Retour financier
en fonction
des résultats
UNE OBLIGATION À IMPACT SOCIAL VISE
AU FINANCEMENTD’UN PROJET
Générateur d’économies importantes
pour la collectivité publique
Au coût plus faible que les économies générées
Pouvant être répliqué à grande échelle
Ciblant une poppulation potentielle importante
Délivrant des résultats mesurables à moyen
terme (~3-5ans)
LE REMBOURSEMENT DES INVESTISSEURS PRIVÉS EST CONDITIONNÉ PAR LES RÉSULTATS DU PROGRAMME SOCIAL. LES PREMIÈRES OIS
MISES EN ŒVRE PRÉVOYAIENT UN RETOUR FINANCIER NUL SI L’OBJECTIF DE LA MISSION N’ÉTAIT PAS ATTEINT.
52
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
à but non lucratif – afin de financer quelque
250 milliards de livres de dépenses sociales en
2012. La moitié de cette somme environ pouvant être ciblée par l’investissement impactant.
En ajoutant les sommes contractées, il y aurait
ainsi un « marché » potentiel de plus de 150
milliards de livres. La part des associations
à but non lucratif a triplé au cours des neuf
dernières années au Royaume-Uni.
Elena Budnikova
Conclusion
Sandro Gambuzza
philanthropes financent des organisations à but non lucratif pour aider
les pouvoirs publics sur la base d’un intéressement aux résultats. Si les
pouvoirs publics sont en mesure de payer pour des résultats, de conserver
la moitié des économies réalisées grâce aux actions innovantes financées
par des investisseurs extérieurs, et d’améliorer ainsi la vie des citoyens,
ce modèle a tout pour plaire. À l’échelle nationale, le gouvernement
accroît ainsi le capital social du pays. Il augmente sa productivité, sa
compétitivité, et renforce les valeurs qui fondent la société.
Les États-Unis constituent un modèle avec leur Community Reinvestment Act et le New Markets Tax Credit, qui drainent plus de 20
milliards de dollars d’investissement par an dans les régions les plus
déshéritées du pays. Le gouvernement américain s’est engagé sur des
OIS et promeut activement l’investissement impactant. En France, les
flux de capitaux dans les organisations sociales ont bénéficié de l’obli-
Il est encore trop tôt pour dire lesquelles de ces
questions sociales donneront toute sa visibilité
à l’investissement impactant : l’enfance, le
chômage des jeunes, la pauvreté des personnes
âgées, les récidivistes, la santé ou le développement international. Ce qui est sur, c'est que
l'investissement impactant est porteur. d’une
véritable révolution tirée par l’innovation.
Il lui faudra dix à trente ans pour trouver
sa place entre les 60 milliards de dollars de
la micro-finance et les 3000 milliards du
capital-risque et du capital-investissement.
Il entraînera de grandes innovations et sera
la marque de notre époque.
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UN
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gation pour les plans d’épargne salariale de proposer à leurs salariés
un fonds investissant 5 à 10 % de ses actifs dans des entreprises agréées
« solidaires ». À l’échelle européenne, le Fonds d’investissement européen
(filiale de la Banque européenne d’investissement) mène l’effort pour
développer les sociétés d’investissement impactant. Le gouvernement
britannique n’est pas en reste, qui a contracté pour 61 milliards de livres
– 48 milliards auprès d’entreprises, 13 milliards auprès d’associations
53
INVESTIR
PHILANTHROPIE(S)
CULTURE(S)
JAPON : CAP SUR
LE SOLEIL LEVANT
ANOUK
FOUNDATION :
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S’ENSOLEILLENT
SIGNIFICATIONS
DU RIRE
INDEX
TIBÈRE ADLER,
DIRECTEUR ROMAND
D’AVENIR SUISSE
MARCHÉ DE L’ART
ALBERTO
GIACOMETTI :
LA SCULPTURE
AU PLUS HAUT
ÉDUCATION :
15 MENTORS
D’INFLUENCE
TE
AN
CE
AN
IS
F IN
DU E
SÉ RÊ M
IE T
A S L’E X
À
« L’oblig atio n Pe te rb oro ugh a c o n s tit ué
u ne in n ovatio n da n s l a ma niè re de pe n se r .
P our l a pre miè re fois , l a pe rforma nce
de s org a nis atio n s caritative s c o nce r née s
de vait ê t re précisé me n t me s urée . »
INVITÉ
DOSSIER
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DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Investissement responsable :
l’éthique sans exclure
la performance financière
Elena Budnikova
au quotidien, et analyse ainsi comment les sociétés gèrent les problématiques relatives à ces paramètres. Cette discipline n’est pas nouvelle.
Une première version d’investissement responsable est en effet née
aux États-Unis dans les années 20, alors que certaines congrégations
religieuses interdisaient d’investir dans certains secteurs tels l’alcool,
le tabac et les jeux. Cela a évolué dans les années 70 vers une approche
plus militante en ciblant des causes comme l’apartheid, la guerre du
Viêt-Nam, les droits de l’Homme. Une autre version d’IR est apparue
à partir des années 80 lorsque s’est développée l’idée que de bonnes
pratiques sociales, environnementales et de gouvernance pouvaient
avoir un impact positif sur les résultats financiers d’une entreprise
et sur sa valeur boursière.
Tony Campione , Spécialiste investissement actions,
Banque Julius Baer & Cie SA
Gestion éthique, investissement
socialement responsable (ISR),
investissement durable, beaucoup de termes différents qui
se rapportent à une même discipline souvent mal connue des
investisseurs et du public.
L’investissement responsable (ou « socialement » responsable), désigne les méthodes
d’intégration du développement durable
au sein de la gestion financière ; il s’agit de
prendre en compte des critères non financiers
(environnementaux, sociaux et de gouvernance, ou ESG) dans les choix d’investissement. Exemples de facteurs : les émissions de
CO2, la gestion des déchets (environnement),
les normes de travail, les règles de sécurité
(sociaux), les normes anti-corruption, le
traitement des actionnaires (gouvernance).
L’approche responsable considère que les facteurs ESG impactent la conduite des affaires
Un succès croissant, principalement
dans les pays développés
Aujourd’hui, ce sont plus de 1100 investisseurs institutionnels qui
s’engagent à intégrer la problématique ESG dans leur gestion. Ainsi,
en 2012 plus de 13,6 trillions de dollars US étaient concernés, soit près
de 22 % des avoir gérés globaux. L’Europe, les États-Unis et le Canada
représentaient la quasi-totalité des actifs sous gestion concernés (96 %).
Notons que l’Afrique se plaçait en quatrième position, devant l’Asie
qui devrait néanmoins connaître un fort développement à l’avenir. En
termes de classe d’actifs, les actions et les obligations représentaient
« E n ré s umé , l’in ve s tis se me n t
re s p o n s able in tè gre le s d o n née s ESG
au proce s s u s d ’in ve s tis se me n t e n
par allèle de l’a n aly se fin a nciè re ,
da n s le b u t de gé né re r à l o n g te rme
u ne pl u s gr a nde pe rforma nce . »
la majorité des investissements, alors que les actions des pays émergents, le private equity, le venture capital et les hedge funds n’étaient
que peu représentés. Un principe fondamental de l’investissement
responsable est que les paramètres ESG peuvent durablement affecter la rentabilité des entreprises. Mais, contrairement aux premières
versions qui excluaient de facto certains secteurs non conformes, la
nouvelle génération d’investissement responsable tend à examiner de
manière proactive les facteurs ESG qui peuvent affecter une société.
54
DOSSIER / DÉVELOPPE MENT D URABLE
De plus, il est important de noter que l’analyse responsable n’a pas
vocation à se substituer à l’analyse financière classique, mais est un
outil qui la complète. Il serait donc faux de penser que l’adoption des
principes responsables impacterait la performance des investissements. Au contraire, les travaux de recherche récents montrent qu’en
général un bon score aux facteurs ESG s’accompagne d’une meilleure
« Au jourd ’hui, le s e n t re prise s
in tè gre n t de pl u s e n pl u s le fait q ue
le s fac te ur s ESG pe u ve n t impac te r
direc te me n t le ur profitabilité . »
performance des actions sélectionnées. Ainsi, certains chercheurs de
l’université de Harvard ont étudié un échantillon de 90 entreprises
ayant adopté les principes responsables dans les années 90 et l’ont
comparé à un autre échantillon équivalent de sociétés qui n’avaient
pas adopté ces mêmes principes.
La performance au rendez-vous
La performance des titres ayant suivi les principes responsables a été
de 2160 % entre janvier 1993 et décembre 2010 contre 1440 % pour le
deuxième groupe. De plus, la meilleure performance s’est faite avec
une plus faible volatilité. À l’avenir, nous pensons qu’une orientation
de la gestion vers un modèle plus responsable devrait être favorisée
par l’émergence de quatre tendances fortes.
L’industrialisation au niveau mondial impacte durablement l’environnement. Nous sommes dans la période de développement la plus
forte de notre histoire, accentuée notamment par l’essor des pays dits
émergents. La pollution est devenue un problème global.
Ainsi, Julius Baer a rapidement souhaité
adopter cette philosophie en signant en septembre 2014 la Charte des Nations Unies sur
les « Principes d’investissement responsable ».
Nous utilisons pour cela la méthodologie du
groupe MSCI qui attribue à chaque action une
notation. Laquelle est progressivement étendue à l’ensemble de notre gestion de mandats,
car nous sommes convaincus que ce sera dans
l’intérêt de nos clients d’être investis dans des
sociétés qui optimiseront leur performance
financière en ménageant l’impact qu’elles
auront sur l’environnement et les pays dans
lesquels elles seront actives.
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A S L’E X
À
L’influence grandissante de l’opinion publique. On a vu comment les
sociétés de distribution ont dû améliorer leurs standards de production après l’écroulement d’un immeuble au Bangladesh qui fit plus
de 1200 victimes. Les réseaux sociaux tels Facebook ou Twitter ont
accéléré la propagation des nouvelles et ont ainsi accentué l’importance de l’opinion.
marque par le public. Ce qui peut à son tour
influencer les coûts de financement, donc
leur rentabilité. La rétention du personnel et
l’attraction de nouveaux talents peuvent s’en
trouver modifiées. Enfin la mise en place de
nouveaux axes de développement plus respectueux de l’environnement peut aussi favoriser
l’émergence de nouveaux produits/marchés
(exemple de Toyota et du succès de la Prius).
INVITÉ
Le poids croissant de la régulation. Les gouvernements sont de plus en
plus vigilants quant aux coûts provoqués par les mauvaises pratiques
de certaines entreprises mais supportés par eux (exemple : une usine
qui pollue une rivière ce qui affecte la santé des résidents).
DOSSIER
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L’importance des actifs intangibles dans la création de richesse. Parmi ces
actifs, citons la capacité d’innovation, la marque, la culture d’entreprise.
Certaines études ont montré qu’ils pouvaient représenter jusqu’à 85 %
de la valeur d’une entreprise, d’où l’importance de l’analyse des données
ESG. Et ce, de différentes manières, la réputation (par conséquence
leur image) notamment, qui peut peser sur la perception de leur
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Trois questions à :
Raphaël Domjan, fondateur de
Solarplanet et Solarstratos.
Le « serial aventurier » EcoExplorateur, qui se définit comme un
écologiste pragmatique et optimiste, est parti le 19 juin pour
un nouveau défi, celui d’effectuer la traversée du Passage du
Nord-Ouest en kayak propulsé à
l’énergie solaire. Un intermède
avant de s’attaquer à celui qu’il
poursuit avec SolarStratos, le
1er vol stratosphérique à bord
d’un avion solaire biplace.
Hier, PlanetSolar, le 1er tour du monde en
bateau solaire. Aujourd’hui, SolarArcticPassage, la 1re traversée de l’arctique en kayak
solaire. À votre retour, SolarStratos, le 1er
vol stratosphérique en avion solaire biplace.
Quel est le fil rouge de ces projets, abrités
par la Fondation SolarPlanet – la Swiss
Foundation for Sustainability ?
D’une part, se dépasser pour faire rêver. Le
but dans tous ces projets, c’est avant tout une
belle aventure. Il faut garder son âme d’enfant. J’aime faire des choses que personne n’a
jamais faites avant. D’autre part, montrer les
immenses possibilités que donnent les énergies
renouvelables.
J’ai commencé à travailler sur ce sujet en
2001 en concevant Horus Networks, le 1er
hébergement de sites web solaire au monde.
On l’avait lancé avec des amis en utilisant
des panneaux sur le toit de la maison de mes
parents. Une centrale solaire, c’était alors rare,
peu puissant (2,5kW/h). Aujourd’hui, il y en a
partout, beaucoup plus puissantes. Ingénieur
de formation, j’ai toujours eu la volonté de faire
beaucoup mieux avec beaucoup moins. Utiliser la propulsion électrique
par exemple : on peut tout faire avec de l’électricité ; le pétrole, il faut
le garder pour des applications où on est loin de pouvoir le remplacer, les avions de transport de ligne par exemple. Si on va dans cette
voie, celle d’une stratégie énergétique plus efficace, où le pétrole n’est
utilisé que là où il est encore non échangeable, on réduit de moitié les
émissions de CO2 et on aura du pétrole pour encore 1000 ans ! Il faut
avoir en tête que produire de l’énergie avec du gaz divise par cinq les
émissions de CO2.
L’expédition SolarArcticPassage, qui nous emmènera, Anne Quéméré
et moi-même, sera un véritable challenge, soit traverser l’Arctique en
kayak solaire, en toute autonomie énergétique. Nous devrons tracer
notre route parmi l’immense archipel arctique, le long d’un dédale
follement compliqué de golfes et chenaux, de bassins et détroits situés
Le 2 0 e siècle é tait le siècle
de s é ne rgie s fo s sile s , le 2 1 e siècle e s t
cel ui de s n o u velle s é ne rgie s
entre le territoire de Baffin et la terre de Banks. Les chemins sont
rares et souvent encombrés par les glaces. Ils s’ouvrent et se referment.
L’itinéraire n’est tracé sur aucune carte. D’une année à l’autre, les glaces
dessinent de nouvelles voies. Cela nous prendra plusieurs mois avant
d’arriver au terme de notre voyage. Même si nous avons tout planifié au
moindre détail près, il reste beaucoup d’inconnues. Mais cela ne nous
fait pas peur, bien au contraire ! Anne est la 1re femme à avoir traversé
l’Atlantique Nord et Sud à la rame, et ce n’est pas le moins qu’elle ait
à son étonnant palmarès, qui compte également la 1re traversée du
Pacifique en kyte boat.
Quelles leçons avez-vous tirées des projets passés pour ceux à venir,
SolarStratos notamment ?
La principale d’entre elles : avoir une ambition à long terme. Ne pas
réitérer par conséquence ce qui s’est passé avec PlanetSolar : chacun
est rentré chez soi, le savoir-faire a été d’une certaine manière perdu.
PlanetSolar a été donné par son propriétaire et sponsor à la Fondation
Race for Water, basée à Marseille, qui travaille à être une plate-forme
56
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Raphaël Domjan
de protection des mers et des océans. « AXvec
SolarStratos, qui sera le premier avion solaire
biplace de l’histoire, nous avons déjà en tête des
déclinaisons commerciales. » Il s’agirait d’abord
d’utiliser la puissance de SolarStratos, une fois
que l’on aura démontré que l’on peut monter
dans la stratosphère avec un avion solaire, pour
produire des alternatives aux satellites actuels.
Lesquelles coûteraient moins cher, tout en
contribuant à la protection de l’atmosphère.
Nous réfléchissons également à emmener, dès
2018, des passagers près de l’espace à bord d’avions de tourisme à énergie solaire.
Un mot sur SolarStratos : conçu en 2014 par
Calin Gologan, ingénieur aéronautique et
partenaire technologique au travers de sa
société PC - Aero GmbH –, cet avion solaire
vise à aller le plus haut possible. L’avion sera
construit cette année, pour un premier vol en
2016. Le record doit avoir lieu en 2017.
SolarStratos vise à démontrer le potentiel
de l’énergie solaire dans la verticalité, tout
comme Bertrand Piccard le démontre avec
SolarImpulse dans l’horizontalité, par le tour du monde. L’un comme
l’autre de ces projets se projettent bien au-delà d’un éventuel record.
Pour eux, une application commerciale est dans les tuyaux.
Pari fou pour ce biplace en tandem, d’une envergure de 25 mètres, d’un
poids de 450 kilos, qui vole comme n’importe quel avion, à cette réserve
près qu’il ne pourra pas voler perpétuellement. Ce sera le premier
avion solaire avec pilote à pénétrer la stratosphère. SolarStratos volera
à une altitude très peu fréquentée, dans un milieu fragile, propulsé
uniquement à l’énergie solaire, sans la moindre émission de polluant,
et nous donnera la possibilité de réaliser des mesures inédites, jamais
effectuées jusqu’à ce jour. L’équipe internationale qui m’entoure est
animée comme moi du désir de démontrer que grâce à l’énergie du
soleil, il est possible d’aller plus haut qu’un avion fonctionnant aux
énergies conventionnelles. Nous sommes conscients que ce vol sera
celui de tous les dangers. Même si je serai équipé d’une combinaison
spatiale notamment, nous serons proches des limites techniques et
humaines, et repousserons les frontières du possible. Mais, et c’est là un
autre enseignement de PlanetSolar : nous reviendrons de cette expérience unique – observer dans la stratosphère la courbure de la Terre
et la voûte céleste en plein jour – confortés dans nos convictions : en
mettant l’aventure au service de l’écologie, on peut changer le monde.
Comment voyez-vous l’écologie contribuer à un développement
durable de la planète ?
57
d o s sie r / DÉVELOPPE MENT D URABLE
Je commencerais par prendre l’exemple de SolarStratos : en explorant l’espace lointain, nous comprendrons mieux ce qui se passe dans l’atmosphère,
ce qui est la condition sine qua non pour mieux
la protéger et étudier les possibilités qu’elle offre
de prolonger, voire d’étendre, l’humanité. En cela,
SolarStratos réplique pour l’atmosphère ce que
nous avons cherché à faire avec PlanetSolar pour
les milieux marins.
De manière plus générale, je pense que l’écologie
ne peut servir le développement durable que si
elle est pragmatique. Je ne crois pas à l’écologie
telle qu’elle occupe le terrain, politique notamment, depuis 30 ou 40 ans. Elle a été dominée
par des revendications inutiles, qui privilégient
le contenu sur le contenant. Faire revenir les
gens au temps des cavernes, c’est non seulement
SolarStratos en chiffres
- Longueur : 8,5 mètres
- Envergure : 24,4 mètres
- Poids : 450 kg
- Autonomie : Plus de 24 heures
- Propulsion : Hélice (1,6 m, 3 pales)
- Moteur : Électrique (max 25 kW)
- Deux places en tandem
- Énergie : Solaire
- Cellules solaires : 22 m2 (22-24 % efficacité)
- Batteries : Jusqu’à 120 kg Lion (28 kWh)
utopiste mais cela n’a pas de sens. Il y a près de 8 milliards d’hommes, ils
doivent travailler. Prôner le retour au paléolithique, quelle valeur ajoutée ?
Sans parler des contradictions de ces « vendeurs de vent » : augmenter les
prix de l’énergie comme ils le veulent, c’est détériorer la situation des défa-
« Je s uis un éc ol o gis te op timis te ,
opp or t u nis te e t u tilitaris te . Le s
éc ol o gis te s t r a ditio n nel s , le s « K hme r s
ve r t s », e u x , s o n t c o n t re t o u t. »
vorisés. Notre approche est pragmatique : nous avons entrepris d’apporter
des services à des populations défavorisées près de l’équateur (12 heures de
jour, 12 heures de nuit). Pourquoi l’équateur ? Le soleil. C’est avec ce genre
de projets que l’on améliore la vie des gens. Et tout porte à croire que les
futures évolutions nous permettront d’abolir les limites actuelles. Il y a dix
ans seulement, on en était encore à démontrer ce que la technologie pouvait faire ! Aujourd’hui, on est à l’heure de la révolution verte, qui passera
notamment par la révolution électrique.
Contre les barrages, contre les centrales solaires, contre l’électricité d’origine
nucléaire, etc. Aujourd’hui, il faut bien reconnaître que même si les gens
sont acquis à la volonté de changer leurs habitudes en vertu d’un nouveau
paradigme écologique, ils ne peuvent concrètement pas faire grand-chose.
Un exemple amusant : l’État fédéral parle de taxer les voitures électriques
avant même qu’elles n’aient pénétré le marché automobile. Il faut 10 kW/h
pour faire 100 km à bord d’un véhicule électrique, sans aucune taxe spécifique sur l’électricité utilisée, contre 5 à 10 l d’essence, taxée à 70 %. Idem du
côté des avions : 40 l pour une heure de vol pour un avion conventionnel
contre 15 l pour un modèle ecolight (énergie 100 % renouvelable) et 10 kW/h
pour un avion électrique.
58
Créée en 2010 à Lausanne, la Fondation Race for Water
Race for Water collabore avec des organismes tels que
a pour mission de préserver la ressource la plus précieuse
l’UNESCO, l’UNEP, l’UICN, le WWF et la WBCSD.
de notre planète : l’eau. Reconnue d’utilité publique, l’orga-
En 2015, la Fondation organise la « Race for Water Odyssey ».
nisation s’emploie à mettre en place des actions concrètes
Son objectif : dresser un premier état des lieux global de la
et durables articulées autour de deux thématiques essen-
pollution des océans par les plastiques et mettre en exergue
tielles : la protection des océans et celle de l’eau douce.
les conséquences dramatiques de cette problématique
Race for Water initie des projets qui ont pour objectif
pour l’écosystème et les populations. Par la suite, Race for
la sensibilisation et des actions concrètes sur le terrain.
Water ambitionne d’exploiter ces résultats pour développer
Ces actions s’adressent à quatre audiences-cibles :
des solutions innovantes et viables permettant de secourir
les acteurs économiques, les instances politiques, la
les océans.
communauté scientifique ainsi que le grand public, avec
une attention particulière portée aux générations futures.
raceforwater.org
Avec le soutien de PIGUET GALLAND
pat rimoine ( S )
d o s sie r / ac tio n s U S
L’équilibre de la terreur
Entretien avec Emmanuel Ferry, Président de l’ISAG et CIO de la banque Pâris Bertrand Sturdza SA
D’un côté, une croissance molle qui ne parvient pas à dissiper les craintes déflationnistes
ancrées dans les esprits des Américains, ni les
doutes quant à un rebond de l’inflation au
niveau de 2 % ciblé par la FED. De l’autre, des
marchés actions au plus haut, qui valorisent
une croissance mature, et donnent de nombreux signaux d’une bulle financière. Le tout
sur fond de survalorisation des deux grandes
classes d’actifs (actions et obligations) qui, chacune, délivrent des messages opposés. Dans ce
contexte, toute erreur de communication de la
FED est susceptible de faire éclater cet équilibre
précaire. D’où l’importance aujourd’hui de se
préparer avec une gestion active et sélective,
plutôt que d’essayer de prévoir l’incertain.
de la reprise de la croissance : la plus longue depuis l’après-guerre,
car moins intense et plus modeste qu’attendue. Croissance faible sans
inflation demeure toutefois le meilleur compromis pour alimenter la
hausse des marchés. En conséquence, l’écart entre le taux de croissance
de la sphère réelle et celui de la sphère financière continue de se creuser.
ETATS-UNIS: PIB (CROISSANCE EN VALEUR), TAUX DE LA FED ET S&P500
10
2200
8
1700
6
4
1200
2
700
0
-2
-4
03/96
TAUX DES FED FUNDS
CROISSANCE DU PIB EN VALEUR
S&P500 (ÉCHELLE DE GAUCHE)
03/98
03/04
03/00
03/02
200
-300
03/06
03/08
03/10
03/12
03/14
À la croisée des chemins
Source : Banque Pâris Bertrand Sturdza
La période actuelle est atypique. Certes, les
actions entreprises par les banques centrales,
dont la FED, sont parvenues à revaloriser les
actifs. Depuis la crise de 2008, 640 baisses de
taux ont été effectuées, 11 000 milliards de
dollars d’actifs ont été rachetés. La trajectoire
sur cette période montre la troisième plus
longue progression des marchés actions depuis
l’après-guerre, une croissance de 153 % après
les premiers 20 % d’appréciation. L’année 2015
est ainsi la 7e année de hausse du S&P 500 (73
mois), ce qui place le cycle actuel juste derrière
celui de l’après-guerre (1946-1956, soit 81
mois). Une durée exceptionnelle du marché
cyclique haussier même si elle se situe encore
loin derrière celui de la période 1988-2000, qui
totalisait 145 mois de hausse ininterrompue
par une baisse supérieure à 20 %. La création
de richesse est phénoménale – 1600 milliards
de dollars au 1er trimestre de l’année pour
les ménages américains, soit une fortune de
85 000 milliards de dollars, un niveau supérieur à celui du précédent pic de 2007–, les
indices S&P500 et Nasdaq caracolent à des plus
hauts historiques. Si l’objectif de revalorisation
des actifs a été atteint, il n’en va pas de même
La fin du quantitative easing, suivie du rebond du dollar, a porté un
coup d’arrêt à la progression des actifs financiers américains, que ce
soit les actions ou les obligations. Autrement dit, une fois stoppée la
stimulation monétaire, la dynamique s’est elle aussi arrêtée. Ce qui
indique une nouvelle fois une phase mature sans vrais « drivers » : sans
stimulation monétaire additionnelle, le marché a du mal à s’apprécier,
faute de croissance économique. Alors que les risques, eux, augmentent.
ETATS-UNIS: CROISSANCE DU PIB
6
4
2
0
-2
-4
-6
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
2013
2015
Source : Banque Pâris Bertrand Sturdza
De la bulle en question
On a aujourd’hui tous les ingrédients d’une bulle financière : les taux
d’intérêt sont trop bas par rapport au rythme de la croissance économique, si modérée voire décevante soit-elle. Et, plus on attend, plus la
vulnérabilité augmente. Or, et c’est là une différence avec des situations
60
antérieures, cette situation est voulue par la
FED qui temporise pour éloigner les menaces
déflationnistes, pour que le secteur bancaire
fonctionne normalement et pour qu’il diffuse
aux ménages et aux entreprises des conditions
propices à l’investissement. Dans ce contexte,
où les trois grands déterminants macroéconomiques sont le prix du pétrole, les taux et
le dollar, l’arbitrage de la FED est crucial. Son
timing également. Le débat qui agite la FED est
à cet égard intéressant. D’un côté, les partisans
d’une action rapide de la FED pour remonter
les taux et éviter un éclatement de la bulle. De
l’autre, les attentistes, parmi lesquels Stanley
Fisher, le vice-président de la FED. L’essentiel
est aux yeux de ces derniers de ne pas prendre
de risque de casser une croissance fragile, quel
qu’en soit le prix, repousser la remontée des
taux notamment. Un débat devenu international puisque le FMI, pour la première fois,
s’est invité dans ce débat interne en appelant
à retarder la remontée des taux. Et ce, au nom
de la stabilité financière internationale, que
l’institution de Washington voit menacée.
Pour preuve, l’impact de l’appréciation du
dollar sur les pays émergents, qui rappelle le
rôle central du billet vert dans la volatilité
des marchés. Ainsi, toute mini-correction
du dollar par rapport à l’euro impacte-t-elle
les taux long terme allemands, donc la valeur
du Bund.
Aucun filet de sécurité
Les marchés actions sont désormais dans une
zone de surévaluation, estimée à près de 20 %,
tandis que les taux d’intérêt sont historiquement
bas. Or, fait unique dans l’histoire économique
des 50 dernières années, ces deux marchés
sont chers en même temps. Autrement dit,
le marché obligataire ne peut jouer son rôle
classique d’amortisseur, comme il l’avait fait
en 2000 et en 2007. Les taux courts étaient
de 5,25 % en 2007, ils sont aujourd’hui nuls,
voire négatifs (le rendement du T-Note, taux
à 10 ans américain qui est de 2,3 %, s’inscrit
dans un contexte général : plus de la moitié
du marché obligataire souverain mondial a
un rendement inférieur à 1 %). Dans un tel
environnement, affaibli par ailleurs par la
panne d’idées fondamentales pour relancer la
croissance, toute erreur de la FED ne pourrait
qu’avoir des effets amplifiés par les marchés.
Elena Budnikova
d o s sie r / ac tio n s U S
Emmanuel Ferr y
Et ce, d’autant plus qu’il y a de plus en plus de chocs de volatilité et
qu’en dépit de la création de valeur financière, persistent beaucoup de
doutes, pour ne pas dire de scepticisme, sur la réalité et la pérennité de
la croissance américaine. Combien de temps cette situation peut-elle
durer ? Comment éviter une récession liée à un resserrement monétaire
« T o u t p or te à croire
q ue l’e s se n tiel de l a hau s se de s marché s
e s t de rriè re n o u s . »
trop prononcé, comme cela a été historiquement souvent le cas ? Une
certitude : rien ne sert de regarder dans le rétroviseur, ni d’avoir raison
trop tôt. Phase transitoire, le second semestre verra un changement de
cap, que de nombreux indicateurs annoncent.
Changement de leadership sur les marchés actions
Le premier d’entre eux est la rotation de leadership des small & mid caps
vers les large caps, qui a commencé dès la fin janvier 2014, indicateur
avancé d’un marché mature. Autrement dit, la valorisation devient un
enjeu de discrimination. Comme cela avait été le cas en 2007. Rotation
sectorielle ensuite, étroitement liée à l’anticipation que font les marchés
d’une remontée des taux fin 2015. Après avoir connu une 1re phase
61
d o s sie r / ac tio n s U S
d’expansion des multiples de valorisation – le PE ratio est passé de 10x
à 18x –, il sont désormais dans la 2e phase, dirigés par la croissance
des résultats. Les fondamentaux sont clés. Ce contexte est favorable à
la dispersion. Ainsi qu’à la sélection. Certaines sociétés continuent à
« Le s marché s ac tio n s re s te n t at t r ac tif s
à c o nditio n d ’ê t re sélec tif s »
croître, d’autres pas. Les entreprises les plus cycliques devraient prendre
le relais : banques, industriels, IT, matières premières, etc. Ces secteurs
sont toujours décotés et tendent à surperformer quand la FED relève ses
taux directeurs. Quant aux secteurs défensifs (santé, consommation non
discrétionnaire, telcos, utilities…), qui génèrent des cash flows réguliers, ils
se comportent comme des obligations. Ils sont très chers aujourd’hui. Les
ETATS-UNIS: RATIO CAPITALISATION / PIB
160%
140%
Autre indicateur : l’accélération des opérations
de fusion-acquisition – pour un total de 3500
milliards de dollars annualisés sur la base des
cinq premiers mois de l’année, soit un niveau
proche du plus haut connu en 2009, mais loin
de 2000. Et il reste du potentiel. Les sociétés
du S&P 500 totalisent 2000 milliards de cash
au bilan, qu’elles redistribuent soit sous forme
de dividendes, soit à travers des programmes
de rachat d’actions. Elles restent prudentes. Si
toutefois la croissance se normalise comme
nous le pensons, elles investiront ce cash. On
peut s’attendre à des méga transactions dans
les médias sociaux, les biotechs et le secteur de
la santé notamment (pour mémoire, quelques
grosses transactions : Mannesmann par Vodafone en 1999 : 202,8 milliards de dollars ;
Time Warner par AOL : 164,7 milliards de
dollars en 2000 ; ABN-Amro par RBS : 98,5
milliards de dollars en 2007).
La valorisation de long terme ensuite, l’indicateur cher à Warren Buffet – le ratio entre la
capitalisation boursière et le PIB : il a dépassé
les 120 % aujourd’hui, soit deux écarts-types audessus de la moyenne de long terme. Le précédent
pic était en 1999 (plus de 150 %).
120%
100%
80%
60%
40%
20%
0%
1951 1955 1959 1963 1967 1971 1975 1979 1983 1987 1991 1995 1999 2003 2007 2011
Source : Banque Pâris Bertrand Sturdza
actions « low risk », qui ont beaucoup attiré les investisseurs ces dernières
années, affichent une forte surévaluation, qui devient vulnérable avec
la hausse des taux d’intérêt. Rotation géographique enfin. Des sociétés
internationales pénalisées par la force du billet vert, qui a beaucoup
freiné la croissance des bénéfices, vers les domestiques.
S&P500 – cycles haussiers et baissiers depuis 1949
Duration
Since Nov-1949
Bear Market
% Time
22 %
Perf
MedianAnn.
Perf.
Median
Average
Average
332,04 %
17.45
17.29
-32 %
-35 %
-29 %
3.5333
3.39
20 %
20 %
n.m
57
60
75 %
128 %
15 %
Bear / Reco
Recovery Market
78 %
Cyclical Bull
Source : Banque Pâris Bertrand Sturdza
62
Enfin, le nombre conséquent d’IPO, dont un
grand nombre de sociétés affichent des pertes,
renforce la conviction d’un marché en excès
de confiance : on achète des business plans, en
Chine comme aux États-Unis, dans les newtech
et la biotech.
Autant de signaux révélateurs d’une complaisance,
d’un excès de confiance qu’il est important d’avoir
à l’esprit au moment d’aborder le 2e semestre de
l’année. Il sera celui d’une dynamique en phase
avec le resserrement monétaire annoncé, ainsi
qu’avec les effets liés à l’année « pré-électorale »
– historiquement très favorable aux marchés
actions jusqu’en juillet. C’est la condition pour
pouvoir profiter d’opportunités de plus en plus
sélectives dans une phase de divergence et de
volatilité accrue, où l’arbitrage sectoriel, la gestion active, la différenciation seront clés. Sans
perdre de vue que le marché américain est 78 %
du temps en phase haussière cyclique, avec une
performance médiane annualisée de 15 %. Un
marché leader – la capitalisation boursière totale
de l’Union européenne ne dépasse pas celle du
secteur IT aux États-Unis.
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pat rimoine ( S )
DOSSIER / ACTIONS U S
La gestion active avisée
ouvre la voie à de nouvelles
performances
rien perdu de sa pertinence. Cependant, comme nombre d’investisseurs
ont pu le constater ces dernières années, tous les gérants actifs ne se valent
pas. Selon nous, les commissions prélevées par certains d’entre eux ne
sont pas justifiées au regard de leurs performances, tandis que d’autres
paraissent suivre leur indice de référence de trop près pour mériter une
commission. « Pour s’assurer de payer le prix juste, l’une des solutions
consiste à examiner la part active du gérant. »
En 2009, Antti Petajisto et Martijn Cremers1 ont défini le concept de « part
active », qui permet de mesurer, en pourcentage, la différence entre la
composition d’un portefeuille d’actions et son indice de référence. Leur
étude parvient aux conclusions suivantes :
Daniel Nichol as, Client Portfolio Manager,
Harris Associates L .P.
La gestion active fondée sur une
part active élevée, des convictions fortes et une approche
intégrée de la gestion du risque
con t in uen t d’avoir de r éels
effets, notamment sur la volatilité des actions américaines
sur six ans.
–Les gérants dont la part active est élevée tendent à surperformer
leur indice de référence.
–La part active permet souvent de prédire la performance d’un fonds.
–Lorsqu’il s’agit de sélectionner un fonds de placement,
ces auteurs recommandent de limiter son choix aux « stock pickers »
les plus actifs.
Selon cette étude, seuls les stock pickers les plus actifs ont apporté de la
valeur ajoutée aux investisseurs. Ces derniers surperforment leur indice
de 1,26 % par an après déduction des frais. À l’inverse, les fonds quasiindiciels, ou « closet indexers » (fonds gérés activement tout en restant
proches de leur indice de référence) ont tendance à sous-performer après
commissions, compte tenu de la faible proportion de leurs paris actifs,
et représentent pourtant un tiers de l’actif total des fonds communs de
placement2.
Une part active importante pour dégager de l’alpha
Ces dernières années, les investisseurs ont transféré des milliards hors de fonds à gestion active
en faveur de stratégies passives, profitant de la
tendance haussière durable des marchés. Mais
qu’en sera-t-il une fois ce rebond boursier arrivé
à son terme ? Les portefeuilles à gestion purement passive ne risquent-ils pas de se retrouver
davantage exposés en cas de baisse des marchés ?
D’où proviendront les sources de rendement
excédentaire (alpha) au sein des portefeuilles ?
Manifestement, l’intégration de la gestion
active dans l’élaboration d’un portefeuille n’a
Chez Harris Associates, nous nous efforçons de prendre des décisions
d’investissement fondées sur nos propres convictions et sur les conclusions de nos analyses au lieu de répliquer un indice de référence. La part
active élevée découle de notre processus de placement. Nous élaborons
des portefeuilles composés d’actions qui reflètent nos convictions les
plus fortes, présentant à nos yeux le meilleur profil risque-rendement
disponible sur le marché, qu’elles soient ou non incluses dans l’indice de
référence du fonds. Nous investissons uniquement dans des entreprises
que nous estimons être de haute qualité et assorties de valorisations
attrayantes, et nos pondérations peuvent s’écarter sensiblement de celles
de l’indice. C’est cela qui nous permet de générer de l’alpha au niveau
de nos portefeuilles.
64
d o s sie r / ac tio n U S
Des fonds constitués des meilleures idées
Une gestion des risques intégrée
Alors que les fonds d’actions américaines se composent en moyenne de
104 sociétés2, certains des fonds que nous gérons ne détiennent pas plus de
20 positions, ou jusqu’à 70 positions dans le cas de nos plus grands fonds.
À l’opposé, les fonds quasi-indiciels détiennent 161 titres en moyenne. En
outre, nos fonds sont élaborés de sorte que chaque position soit en mesure
En tant qu’investisseurs à long terme, nous considérons la volatilité comme une opportunité.
Autrement dit, nous visons à identifier des actions
présentant une décote importante par rapport à
ce que nous estimons être leur valeur intrinsèque.
Nous cherchons à les acheter avec une décote
de 40 % et les conservons généralement pour
une période de trois à cinq ans. Nous attendons
ensuite le moment opportun pour les revendre
à environ 90 % de leur valeur intrinsèque. Cette
approche contribue à limiter notre risque de perte,
tout en offrant à nos portefeuilles la meilleure
chance de surperformer sur le long terme dans
la mesure où elle s’inscrit en permanence dans
une logique prospective. Indépendamment de
la tendance haussière ou baissière du marché,
nous estimons que les gérants compétents dont la
part active est importante ont toujours leur place
dans un portefeuille orienté sur le long terme.
« P o ur s’a s s ure r de paye r le prix ju s te ,
l’u ne de s s ol u tio n s c o n sis te à e x amine r
l a par t ac tive d u gé r a n t. »
de contribuer de façon significative à la performance. Nous attribuons les
pondérations les plus importantes aux actions dont le potentiel de hausse
est le plus élevé au regard de notre estimation de la valeur intrinsèque
de l’entreprise concernée. Lorsqu’une entreprise répond à nos critères
de qualité mais nous semble surévaluée, nous attendons patiemment
l’opportunité de l’acheter à un prix inférieur.
1)K. J. Martijn Cremers et Antti Petajisto, « How Active Is Your Fund Manager ? A New
Measure That Predicts Performance », publié par Oxford University Press pour le compte
de The Society for Financial Studies (2009), www.petajisto.net/research.html
2)Antti Petajisto, « Active Share and Mutual Fund Performance », Financial Analysts
Journal (janvier 2013), www.petajisto.net/research.html
65
Nota Bene : La surperformance attribuée aux gérants
dont la part active est importante correspond à la
moyenne pour le groupe concerné. Certains gérants dont
la part active est importante sont susceptibles de ne pas
surperformer leur indice de référence.
pat rimoine ( S )
in ve s tir / gou ve r n a nce
Gouvernance : Le serpent
de mer de la révision
du droit de la société anonyme
des États, le Conseil fédéral et les Chambres vont délibérer pour accoucher
d’un contre-projet qui conférait à l’entreprise une plus grande latitude
dans l’aménagement de la structure du capital. Il permettait l’utilisation
de médias électroniques pour assurer la préparation et le déroulement de
l’assemblée générale, et remplaçait le droit comptable par une nouvelle
réglementation. Les révélations sur les rémunérations de départ du CEO de
Novartis contribueront à encourager le peuple à plébisciter cette initiative
le 3 mars 2013, et à rejeter cette révision du droit de la SA.
L’ordonnance actuelle concerne surtout les sociétés cotées et les institutions de prévoyance
Dominique Freymond, vice-président de l’Institut suisse
des administrateurs (Isade)
Les premières interventions parlementaires pour demander au
Conseil fédéral d’améliorer le
droit suisse dans le domaine du
« gouvernement d’entreprise »
datent de 2001. La première procé du r e de consu ltat ion ét é
l a nc é e e n dé c e m br e 20 05. E t
il fallut encore deux ans au
Conseil fédéral pour approuver son message concernant la
révision du droit de la société
anonyme et du droit comptable.
Comment l’initiative Minder a
tué le projet de révision
Le 26 février 2008, l’initiative « contre les rémunérations abusives » est déposée munie de 114
260 signatures valables. Pendant cinq ans, la
Commission des affaires juridiques du Conseil
Après la votation, le Département fédéral de justice et police (DFJP) rédige
une ordonnance qui entre en vigueur au 1er janvier 2014. Elle prévoit
notamment que l’assemblée générale vote chaque année les rémunérations des membres du conseil d’administration, de la direction et du
conseil consultatif ; les indemnités de départ, les indemnités anticipées
et les provisions pour une restructuration au sein du groupe de sociétés
sont interdites ; enfin, les institutions de prévoyance devront voter – dans
l’intérêt des assurés – sur les propositions énumérées dans l’ordonnance et
devront assurer une certaine transparence quant à la manière dont elles
exercent leurs droits.
Les sociétés anonymes cotées en bourse et les institutions de prévoyance,
seules concernées actuellement, essaient d’appliquer au mieux les exigences
de l’ordonnance. Elles ont jusqu’à la deuxième assemblée générale suivant
le 1er janvier 2014 pour adapter leurs statuts et règlements. La mise en
œuvre de l’ordonnance se fait un peu dans le désordre, chacun essayant
de trouver le bon équilibre et observant ses voisins…
Simonetta Sommaruga, chef du DFJP, remet le métier
sur l’ouvrage et l’adapte à l’air du temps
Un nouveau projet de révision est rédigé par le DFJP, dirigé par Simonetta
Sommaruga, visant à intégrer l’initiative Minder dans la loi formelle. Il
reprend également des propositions déjà émises dans le contreprojet de
2013 pour améliorer la gouvernance d’entreprise et les étendre aux sociétés
non cotées. Par exemple, les dispositions sur la fondation et sur le capital
sont rendues plus flexibles, et le droit de la société anonyme est adapté au
nouveau droit comptable. Ce projet ajoute aux thèmes déjà connus deux
propositions d’actualité. D’une part, une réglementation sur la transparence
dans les grandes sociétés extractrices de matières premières. D’autre part,
l’obligation, pour les grandes sociétés cotées en bourse, d’une représentation
66
in ve s tir / go u ve r n a nce
de 30 % au minimum de chaque sexe au sein du conseil d’administration
et de la direction générale ; ce « quota » devra être atteint dans les cinq ans.
Malgré ses qualités, le nouveau projet est très critiqué, par les milieux économiques notamment
Le 28 novembre 2014, le Conseil fédéral met son nouveau projet en consultation jusqu’au 25 mars 2015. Ce projet est pris très au sérieux, et ce, en
raison de son importance économique : il touche en effet l’ensemble des
sociétés anonymes, tant les plus grandes cotées en bourse (SMI), que les
petites et moyennes entreprises (PME), que celles-ci soient cotées ou non.
Certaines propositions sont bien acceptées, notamment les nouvelles
normes afférentes à la structure du capital de la société. Avec quelques
réserves, les dispositions légales qui mettent en œuvre l’initiative Minder
sont applicables aux PME.
Toutefois, la représentation des sexes au sein du conseil d’administration et
de la direction, ainsi que les exigences de transparence dans les entreprises
de matières premières sont largement refusées. Et ce, notamment parce
qu’elles manquent de lien logique suffisant avec le projet de révision du
droit de la SA ou représentent des intrusions clairement injustifiées et
disproportionnées dans l’autonomie interne des entreprises.
Pour des raisons de « sécurité juridique », le DFJP
peut alors proposer une version minimale de
révision du droit de la SA intégrant l’ordonnance
Minder, en y ajoutant les quelques améliorations
pragmatiques qui ont été acceptées dans le cadre
de la consultation.
Par contre, une révision plus en profondeur du
droit de la SA incluant des innovations comme
le forum des actionnaires, les actions disponibles,
les quotas de femmes dans les directions, ne sera
pas prête avant deux ou trois ans. Elle devra clarifier certaines règles, simplifier et flexibiliser
la gouvernance d’entreprise, ouvrir des opportunités dans le dialogue avec les actionnaires
et favoriser une plus grande diversité. Le défi
majeur étant de ne pas augmenter inutilement
la complexité de la gestion des entreprises, particulièrement des PME.
La gouvernance fait des progrès malgré tout !
Les délais évoqués pour cette révision du Code des Obligations n’empêchent
pas d’autres avancées. Prenons l’exemple de la diversité des genres qui est
déjà largement acceptée dans son principe. De nombreux pays européens
ont introduit des quotas à l’instar de la Norvège (40 %), mais aussi la France
(CAC 40), l’Allemagne (DAX), l’Italie, etc. Ces dispositions concernent
avant tout les femmes au sein des conseils d’administration. En Suisse, le
Conseil fédéral a déjà introduit un quota de 30 % dans les conseils des sociétés
dont il est actionnaire, qui doit être respecté d’ici fin 2020. Le Canton de
Bâle Ville a fait de même suite à la votation populaire du 9 février 2014.
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À
Enfin, l’économie privée prend aussi des mesures dans ce sens. Le 21 avril
dernier, l’Union patronale suisse, de concert avec les partenaires du projet
(dont Triple A Associés pour la Suisse romande), a publié un catalogue
détaillé de 400 femmes susceptibles de briguer un mandat d’administratrice, dont 200 sont déjà membres d’un conseil d’administration de
grande entreprise.
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INVITÉ
Que va-t-il se passer maintenant ?
De notre point de vue, Simonetta Sommaruga ne peut pas proposer une
version même légèrement remaniée de son projet aux Chambres fédérales.
Il y a trop de thèmes à clarifier, à approfondir et à adapter à la réalité de
l’économie suisse, notamment de ses PME.
D’autre part, les élections fédérales de cet automne, suivies par l’élection
d’un nouveau Conseil fédéral en décembre, font que ce thème ne pourra
sérieusement être traité par les Chambres avant la session d’été 2016.
67
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in ve s tir / immo s c ope
Immobilier Prime : les acheteurs
internationaux sont de retour
Les Ultra High Net Worth Individuals (UHNWI) internationaux semblent
donc de retour sur de nombreux marchés, américains mais aussi européens, même si le marché n’est pas encore reparti de façon homogène.
Ainsi, en Suisse, selon ce même rapport, qui classe 100 sites prisés des
UHNWI, Verbier a connu une hausse de 8 % des prix. Gstaad n’enregistre
une augmentation « que » de 2,5 %. En revanche, Genève a vu ses prix
baisser de 2 %, Lausanne de 5 %, Zurich de 8 %, la baisse la plus marquée
étant enregistrée à Crans-Montana, -15 %, à égalité avec Buenos Aires !
En matière de prix, Genève reste bien évidemment une région onéreuse,
classée au 6e rang (5e en 2013) des villes les plus chères pour l’immobilier
résidentiel de luxe (biens d’une valeur supérieure à 5 millions de francs).
Et pourtant… Dans le segment haut de gamme (représentant environ 22 %
des transactions effectuées à Genève en 2014), on observe une baisse de
20 à 25 % des prix depuis 2012. La hausse de la devise en janvier dernier
va très probablement fortement impacter ces données en 2015 !
François Moll at du Jourdin, Fondateur de MJ&Cie
(Independent Family Wealth Advisors)
Selon le We alth Report 2015 de
Knight Frank, l’immobilier « prime »
dans le monde a connu une progression globale, en valeur, de 2 % en
2014 (contre 3 % en 2013). Une hausse
modérée, qui tranche avec l’envolée enregistrée sur plusieurs villes,
notamment américaines. Ainsi, le
haut de gamme new-yorkais est
au sommet, avec un bond annuel
de 19 %, faisant craindre une bulle.
De son côté, Aspen grimpait de 16 %,
San Francisco de 14 % et Los Angeles
de 13 %. Parmi les rares villes non
américaines ayant connu une telle
croissance de leur immobilier de
luxe, on relève Bali, Istanbul (+15 %)
et Abou Dhabi (+14,7 %).
Sur le marché des bureaux, le nombre de surfaces mises en location est
actuellement élevé. Mais la quantité raisonnable de permis de construire
délivrés annonce une baisse à moyen terme des nouvelles surfaces. Dans
toutes les régions, particulièrement à Genève et Zurich, les loyers pourraient ainsi être amenés à baisser.
La Suisse continue néanmoins à s’affirmer comme
un marché immobilier attrayant
Les investisseurs internationaux continuent de priser le marché helvète
en raison de la stabilité politique et économique du pays, même si les
possibilités de rendement y sont souvent moindres qu’à l’étranger. Dans le
contexte économique actuel, marqué par des flux d’argent importants et
des taux d’intérêts faibles, pour des résultats économiques « acceptables »,
l’immobilier en Suisse continue d’être regardé comme une valeur refuge.
« Ces dernières années, ce sont surtout les Européens qui se sont intéressés
au marché suisse, Allemands et Anglais en tête, suivis par des acheteurs
des pays d’Europe de l’Est ».
En France, les chiffres des notaires sur 2014 constatent toujours une
baisse des prix, même si elle tend à ralentir. Du côté des transactions, on
a observé un léger mieux à Paris : les ventes ont en effet très légèrement
crû de 2 % sur un an. Mais par rapport à la moyenne de la période faste de
1999-2007, l’activité est encore en retrait de 25 %. Les prix de l’immobilier
prime parisien ont quant à eux reculé de 3,5 % en 2014, mais l’activité
semble marquer un retournement.
68
iin ve s tir / immo s c ope
S'étant tenus éloignés du marché parisien
ces dernières années, les étrangers paraissent
désormais opérer leur grand retour. Un retrait
qui ne se cantonnait d'ailleurs pas à la seule capitale mais pouvait être observé sur l'ensemble
du territoire. À l'échelle française, entre 2012
et 2013, le nombre de transactions opérées par
des étrangers non-résidents s’était ainsi replié
« Ce s de r niè re s a n née s ,
ce s o n t s ur t o u t
le s Europée n s qui se s o n t
in té re s sé s au marché
s uis se , Alle ma nd s e t
A n gl ais e n tê te , s uivis
par de s ache te ur s de s pay s
d ’Europe de l’E s t. »
de 13 %. Mais Paris a toujours su jouer de ses
charmes auprès de ces acheteurs. Un jeu de
séduction qui semble aujourd'hui porter ses
fruits, la part des transactions conclues en
faveur d'acheteurs étrangers s'établissant en
2014 à 8,3 %, contre 6,3 % en 2010.
Si le premier semestre 2015 ne laisse donc pas encore apparaître de
signes vigoureux de reprise, une stabilisation paraît s’être opérée, et le
retour des étrangers, tant sur le résidentiel que dans l’investissement
commercial, peut être perçu comme un signe encourageant.
Mais la rareté prévaut toujours, qui ne doit jamais empêcher la sélectivité
Créé en 2001 à Paris, MJ&Cie intervient comme coordinateur global de
grands patrimoines privés internationaux. Constitué d’une équipe pluridisciplinaire, ce family office place au coeur de son activité l'alignement
d’intérêts avec ses clients. ll travaille en partenariat avec les prestataires
historiques de ses clients (banquiers, avocats, experts comptables,…).
Après Paris, puis la mise en place d’un correspondant au Moyen Orient,
MJ&Cie a ouvert en 2014 un bureau à Genève afin de capitaliser sur les
ressources et les savoir-faire internationaux en matière de gestion de
patrimoines offerts par la place de référence helvétique. »
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Concernant les nationalités animant ce marché, les Italiens occupent le devant de la scène
en s'adjugeant 16,6 % des transactions opérées
par des étrangers. Loin derrière avec 6,7 %, les
Britanniques ne font que modérément écho
à l’activisme italien et font pâle figure au
regard du nombre d’investisseurs français
Sur un marché fortement concurrentiel en raison d’une offre limitée,
les capitaux actuellement en circulation sont plus que jamais en quête
de gros volumes, notamment de portefeuilles qui permettent aux
nouveaux entrants d’atteindre rapidement une taille de patrimoine
critique et offrent une mutualisation du risque.
E
Les Italiens en tête,
les Américains de retour
En dehors du résidentiel, et avec € 14,6Mrd à fin septembre, les montants
investis dans l'immobilier d'entreprise en France sont en hausse de
33 % sur un an. Les grandes transactions ont continué de se multiplier,
confirmant l’attrait du marché hexagonal et l’afflux de capitaux français
et étrangers grâce à un environnement de taux d’intérêt extrêmement
favorable et au retour des financements.
UN
Après avoir fui une fiscalité de plus en plus
lourde, les étrangers retrouvent le goût de
l'achat, aidés en cela par des prix passés sous
la barre des 8000 €/m². Du 3e trimestre 2012
au 4e trimestre 2014, le prix des appartements
a baissé de 5,6 % dans Paris. Néanmoins, et ce
n'est évidemment pas une surprise, certains
micromarchés parisiens connaissent des fortunes diverses. Le 7e arrondissement et ses 18 %
d'acheteurs étrangers, mais également le 4e
(16,3 % d'acquéreurs étrangers) ou encore le
1er arrondissement (14,6 %) l’illustrent parfaitement.
outre-manche, largement représentés à Londres en particulier. Quant
aux Américains, ils profitent d'une dévalorisation de l'euro face au
dollar pour revenir dans la course (6,5 % des ventes aux étrangers). Ce
rééquilibrage monétaire permet aux Américains d'afficher un gain
de pouvoir d'achat de l'ordre de 30 à 35 %.
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La Grèce : dedans ou dehors ?
La dette en pourcent du PIB paraît plus élevée quand le PIB est petit.
Ainsi, vous trouverez surprenant peut-être, le fait que ce sont les ÉtatsUnis qui sont les plus endettés au monde en dollars, dépassant de 40 %
la dette du Japon. La Grèce, pour ainsi dire, ne joue pas dans la même
cour : son PIB, relativement peu élevé, ne représente que 1,8 % du PIB
nominal de la zone euro, et l’encours de sa dette brute s’élève à 3,4 % de
Classement pays, poids de la dette par habitant, 2014
Dette brute
Rang
Pays
Dette par
habitant, usd
Pib à prix
des administracourants 2014, tions publiques
rapportée au
mdusd
Population
2014
Elena Budnikova
pib, 2014, %
Marie Owens Thomsen, Membre de l'ISAG,
Chef-Economiste au Crédit Agricole Private Banking Suisse
Si la situation de la Grèce est
l oin d’êt r e posi t i v e , l a m ise
en perspective de son endettement et la prise de distance par
rapport au battage médiatique
permettent d’appréhender avec
moins d’émotion la situation.
(In)Solvabilité
Un endettement excessif n’est pas chose souhaitable, personne ne dira le contraire. Il faut bien
admettre pourtant que certaines économies
croulant sous les dettes se portent relativement
bien. Le Japon, par exemple, affiche le ratio de
dette brute rapportée au PIB le plus élevé au
monde : 242,3 %, contre 174 % pour la Grèce
(au 31 déc. 2014, Bloomberg). Or n’est-ce pas
le niveau de vie des Grecs qui, de loin, est le
plus menacé des deux ?
1
Japon
99 725
5 228,5
242,3
127,1
2
Irlande
60 356
231,6
121
4,6
3
USA
58 604
17 437,9
107,3
319,3
4
Singapour
56 980
296,0
106,2
5,5
5
Belgique
47 749
527,8
101,2
11,2
6
Italie
46 757
2148,0
133,1
61,2
7
Canada
45 454
1 886,7
85,6
35,5
8
France
42 397
2862,5
94,8
64,0
9
Royaume Uni
38 938
2627,4
95,3
64,3
10
Suisse
38 639
671,9
46,6
8,1
11
Autriche
38 621
440,0
74,8
8,5
12
Grèce
38 444
248,2
174
11,2
13
Pays-Bas
37 233
830,0
75,6
16,8
14
Allemagne
35 881
3747,1
78,1
81,6
15
Norvège
34 910
527,0
34,1
5,2
16
Espagne
30 031
1394,4
99,1
46,0
17
Finlande
29 930
274,0
59,8
5,5
18
Danemark
28 778
338,1
47,8
5,6
19
Portugal
26 7w70
227,0
125,3
10,6
20
Suède
25 155
578,9
42,2
9,7
Source : Bloomberg, Crédit Agricole Private Banking
70
in ve s tir / l a t rib u ne de l’is ag
la dette de la zone euro (Eurostat, 2014). La dette
grecque en dollars n’occupe « que » le 11e rang
mondial, et en poids par habitant, elle se place
12e, derrière, étonnamment, la Suisse. Regardons les choses sous un autre angle : entend-on
beaucoup parler de la dette abyssale de Porto
Rico ? L’île doit quelque 73 milliards de dollars
à ses créanciers, quatre fois l’encours qui a fait
basculer la ville de Detroit dans la faillite il y
a deux ans, « seulement » 0,6 % de la dette américaine (pour un PIB de proportion similaire).
La comparaison avec la Grèce est cependant
quelque peu injuste, puisqu’en termes de PIB,
la Grèce pèse plus lourd dans l’économie de la
zone euro, que Porto Rico dans celle des ÉtatsUnis. N’est-il pas étonnant que Porto Rico traverse une telle crise sans causer véritablement
de remous ? Notons enfin que de 1990 à 2009,
les transferts fiscaux des États-Unis vers Porto
Rico se sont élevés à 291 % du PIB 2009 de l’île
(The Economist, août 2011), c’est-à-dire presque
trois fois son PIB.
Une capitulation partielle ou totale ?
Les banques grecques souffrent. Les retraits de capitaux se sont récemment accélérés au point que l’on peut craindre un phénomène de ruée
vers les guichets et, dans son sillage, la faillite de grandes banques (voir
graphique ci-après). N’ayant pas à lui seul les moyens de les renflouer,
le gouvernement ne pourrait compter dans cette éventualité que sur
le système européen de gestion de la crise, pour lequel une adhésion
aux réformes énoncées serait bien évidemment une condition sine qua
non. Cette issue reviendrait pour le gouvernement Tsipras à balayer
entièrement ses promesses électorales.
Un défaut unilatéral de la Grèce provoquerait immanquablement une
ruée vers les guichets. Le pays ne pourrait plus que mettre en place un
contrôle des capitaux, accepter le plan d’aide de l’UE et subordonner ses
politiques aux règles européennes. Il y a fort à parier que les dirigeants
grecs trouvent cette perspective bien plus amère que la recherche d’un
compromis avec les créanciers, qui permettrait de sauver la face en se
résignant à une capitulation, non plus totale mais partielle.
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71
in ve s tir / l a t rib u ne de l’is ag
La Grèce pourrait bien évidemment choisir aussi de sortir de l’euro. Il
n’y aurait alors aucun plan de secours venu de l’UE, ni aucun État ni
aucune banque alentour pour la renflouer. Aucune dépréciation du
change, aussi sévère soit-elle, ne suffirait à résoudre le problème de
liquidités, et l’hyperinflation risquerait de rapidement gagner l’économie. En bref, la situation ressemblerait fort à celle du Venezuela, mais
sans le pétrole. Le désastre serait tel qu’on imagine difficilement qu’il
puisse même avoir lieu.
« L a Grèce e s t c o nfro n tée
à u n problè me de s olvabilité , c ’e s t
inc o n te s table , mais p o ur l’he ure , elle
ma n que de liq uidité s ava n t t o u t. »
Un défaut négocié impliquerait de réviser l’échéancier des remboursements, et peut-être d’inclure un moratoire sur le paiement des intérêts,
en contrepartie d’un engagement sur un calendrier de réformes. Sachant
que les obligations grecques se négocient déjà à une forte décote, les
pertes seraient sans doute limitées. C’est donc bien là, pour chacune des
parties, le scénario le plus favorable. Pourquoi alors n’a-t-il pas encore
été adopté ? La réponse est à chercher du côté du « moral hazard », le
fameux risque moral décrit en son temps par Adam Smith.
Aléa moral et capital politique
Accorder à la Grèce la possibilité d’annuler
sa dette sous quelque forme que ce soit risque
en effet de perturber le fonctionnement de la
zone euro, incitant ses autres membres en crise
à réclamer un traitement similaire, voire les
encourageant à transgresser les règles, puisque
ne s’en suivrait apparemment aucune sanction.
Ajoutons que la remise de dette n’a aucun
bénéfice électoral. Les États-Unis se sont posés
exactement la même question à propos de la
dette hypothécaire (et se la posent encore, mais
dans une moindre mesure). Ainsi, une solution
simple à la crise du logement aux États-Unis
aurait été d’annuler une part de l’encours. Une
solution simple, mais politiquement hors de
question. Les États-Unis ont préféré instaurer
des garanties étatiques opaques, toujours en
vigueur, sur presque la totalité de l’encours,
une option dont les électeurs ont et auront
toujours du mal à identifier et plus encore
à calculer le coût. Décevant, certes, mais le
pragmatisme l’emporte sur la stratégie du
bord de l’abîme.
DÉPÔTS DANS LES BANQUES GRECQUES DU SECTEUR PRIVÉ, MDEUR
0.24M
GDEPBBH Index - last price: 0.139M
0.22M
0.20M
0.18M
0.16M
0.14M
MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC MAR JUN SEP DEC
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
GDEPBBHH Index (Greece Domestic Deposits Households And Businesses) Greece Depos
Source : Bloomberg, Crédit Agricole Private Banking
72
APPUIE SUR
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TOUTE L’OFFRE VIDÉO DE LA RTS
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RTS.ch/play
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in ve s tir / b u sine s s a n gel s s wit ze rl a nd
smixin : la révolution
du lavage de mains
Elena Budnikova
lieu pendant un repas), le calme s’est fait dans la salle, et Denis Crottet,
l’entrepreneur en chef de Smixin et co-directeur actuel, a enfin capté
toute notre attention.
FRANK Gerritzen, Président Suisse romande, BAS
Et voilà Smixin qui en 2009 vient au BAS présenter, à un stade de concept, une « borne » de
lavage de mains. D’abord, nous nous sommes
gratté la tête : qu’est-ce qu’il pourrait bien y
avoir à raconter sur le lavage des mains ? Avec
l’arrivée des épidémies de Sars et autres maladies
hautement contagieuses, nous avons vu l’arrivée
de petites bouteilles de gel désinfectant dont
de nombreuses personnes, voyageurs surtout,
sont devenues adeptes (en fait, addicts !). Il y a
des toilettes, de l’eau, du savon partout dans les
pays occidentaux. Que peut-on bien amener
de plus à une fonction qui depuis la fin du 19e
siècle, avec la découverte des microbes, a fait
ses preuves ? Notre attention, toujours prête à
s’échapper lors de présentations de nouveaux
projets (pauvres entrepreneurs !), a d’abord été
retenue quand on a mentionné Elmar Mock,
co-inventeur de la Swatch et fondateur de la
« fabrique d’innovation » Creaholic. Smixin
était l’un des bébés de ce bureau d’études, dont
les fondateurs et dirigeants sont des « serial
innovateurs ». Ils bûchaient depuis quatre ans
pour révolutionner le lavage de mains. Une fois
l’attention de l’audience BAS captée, quelques
fourchettes se sont posées (nos réunions ont
Maintenant nos lecteurs veulent aussi en savoir plus : que fait Smixin
et pourquoi est-ce intéressant ? Smixin a développé et breveté (très
breveté devrions-nous préciser) un système composé d’un produit et
de recharges (Nespresso™ anyone ?) qui permet le mélange d’eau et de
savon en proportions idéales permettant un lavage de main efficace et
économisant jusqu’à 90 % d’eau. Avec 1 dl d’eau vous vous lavez ET vous
vous rincez les mains. Faites le test à la maison et nous vous défions d’y
arriver. D’ailleurs, une fois que l’on parle d’économies d’eau, pour ceux
qui s’intéressent, au hasard, à ce qui se passe en Californie, les oreilles
se dressent. Mais l’économie de savon est aussi substantielle (60 %), car
l’art réside dans l’optimalisation du mélange eau-air-savon. Point non
négligeable, il en résulte un sentiment soyeux lors du lavage des mains
mais aucune frustration de sentiment de manque d’eau. Résumons donc,
Smixin arrive à délivrer une qualité de lavage de mains supérieure au
lavage classique, de façon plus hygiénique (pas de savonnette à la couleur douteuse avec quelques poils collés dessus) et ce, en réduisant d’un
facteur 10 la consommation d’eau. De plus, grâce à une version mobile,
pas de branchement obligatoire au réseau d’eau. Hygiène garantie, geste
aisé. Et surtout, la corrélation entre la disponibilité et la proximité d’un
point de lavage et son usage sont très forts.
Malgré les commentaires encourageants de l’époque – « projet séduisant
mais encore au stade du concept » – « Bon business model (captif) » « Excellent projet, appelez-moi ! » - « Très bonne présentation » - « Produit
intéressant » - juste un projet et un brevet ne nous convainquaient pas
suffisamment. Alors Denis Crottet a repris sa présentation, est retourné
dans son laboratoire et a continué à travailler. Comme nous avions bien
aimé le projet, nous l’avons réinvité quelque trois ans plus tard, et là, le
coup de foudre. Claude Papas, membre du BAS, actuellement dans le
conseil d’administration de Smixin, a pris la due diligence en mains et
sa conviction a enthousiasmé de nombreux membres du BAS qui ont
finalement investi.
Les applications sont maintenant cristallisées et Smixin poursuit les
marchés suivants :
-La restauration rapide : plusieurs restaurants KFC à Hong Kong – vous
savez, le poulet frit que l’on mange avec les mains – ont acheté le produit
et l’utilisent avec succès depuis l’année passée. Comme toujours, mettre
le pied dans une chaîne et devenir un fournisseur officiel change les
règles du jeu. L’avantage pour ces restaurants est un service amélioré,
le client n’a pas besoin d’aller aux toilettes pour se laver les mains ou
74
in ve s tir / b u sine s s a n gel s s wit ze rl a nd
de surconsommer des serviettes humides (qui ont leur coût au final), il
ressort avec un vrai sentiment de propreté.
- Les bureaux : à côté de la machine à café et du distributeur d’eau, la borne
pour se laver les mains permet une forme de socialisation améliorée
tout en aidant à minimiser les épidémies de grippe, et ainsi contribuer
à réduire les absences pour cause de maladie.
- Le marché de la publicité : comme nous l’avons vu dans les années 80,
les annonceurs cherchent des supports et des services différents pour
la publicité : Decaux s’est rendu célèbre avec les toilettes publiques à
Paris. Dans un marché basé sur l’appel d’offres, la différentiation est
le maître-mot.
- Le dernier marché, plus complexe à aborder car affligé de cycles de
vente très longs, est celui de l’aviation. Pour les constructeurs aéronautiques, le poids, donc la quantité d’eau, est un enjeu réel qui se traduit
directement en monnaie sonnante et trébuchante aussi bien pour des
questions de poids que de place.
En plus de ces 4 marchés principaux, il existe évidemment aussi celui
des applications industrielles et de l’OEM1. Smixin est dans une phase
de croissance intense et a commencé l’industrialisation de la production, ce qui représente pour toute jeune entreprise un défi en soi :
terminé le bricolage, des clients attendent les
livraisons, ils attendent un produit fiable et
on ne peut plus se permettre des maladies de
jeunesse. Mais le fait d’être à ce stade est déjà
une reconnaissance en soi. Comme rien n’est
simple dans la vie, les obstacles qui entravent
une croissance linéaire de Smixin sont que
l’utilisateur n’est pas l’acheteur et pour l’acheteur, ce n’est pas un « core business » mais un
service annexe amené aux clients. Il faut le
convaincre qu’offrir ce service permet de
mieux satisfaire et fidéliser ses clients.
Smixin a de beaux jours devant elle, mais aussi
des défis, à commencer par une levée de fonds2
pour financer l’industrialisation de la production, phase si délicate. Pour quiconque s’y
intéresse : www.smixin.com
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75
in ve s tir / b u sine s s a n gel s s wit ze rl a nd
6 questions à Denis Crottet, co-directeur de Smixin :
Le lavage des mains est un acte tellement banal, du moins sous nos
latitudes, comment arrivez-vous à intéresser des prospects pour un
service auquel vos clients potentiels ne doivent pas réfléchir longtemps ?
Au contraire de ce qu’on pourrait penser, le fait d’apporter une innovation de rupture dans un acte aussi banal intrigue et interpelle les gens.
On se dit que ce n’est pas possible de révolutionner le lavage de mains.
Et lorsqu’une personne expérimente notre système pour la première fois,
il reste bluffé de la sensation agréable avec si peu d’eau. En fait,
Ωutiliser le système Smixin doit être une expérience inoubliable, car
beaucoup de personnes l’ayant essayé me disent qu’elles y pensent à
chaque fois qu’elles se lavent les mains dans un lieu public.
Quel marché est à votre avis le plus prometteur, en termes de volume
et de chiffres d’affaires ?
Denis Crot tet
Comment avez-vous vécu le fait de présenter une première fois au BAS sans succès ?
Plutôt sereinement. Lorsqu’on recherche
des fonds pour un projet start-up, il est évident
qu’il faudra multiplier les contacts et les présentations afin d’avoir une ou deux réponses
positives au final. Cela fait partie de l’aventure
entrepreneuriale. Le fait que les commentaires
soient très positifs était pour moi le plus important. Du moment qu’un groupe d’investisseurs
trouve le projet intéressant, mais pas encore
assez mature, cela est plutôt encourageant.
Et la question qui est forcément liée, le fait
d’être réinvité ?
Très fier. Cela confirmait donc mon appréciation initiale. Le fond du projet était bon la première fois, il fallait donc montrer les progrès,
la maturité, que c’était le moment d’investir.
Ce qui s’est passé.
En fait cela dépend à quel horizon nous regardons. À long terme, c’est
probablement le système compact, en tant que remplaçant des robinets
dans tous les lieux publics, professionnels et autres. Mais il est trop tôt
pour faire face à une structure de marché plus qu’établie avec des entreprises centenaires. C’est pourquoi nous avons opté pour une stratégie
en deux étapes, tout d’abord offrir une nouvelle catégorie de produits,
des unités de lavage de mains, pour des lieux bien ciblés.
Ces segments sont déjà très intéressants pour notre rentabilité. Une fois
que le système est connu, il sera alors possible de croître de manière
encore plus importante sur les marchés de masse.
La composante « écologique », économie d’eau, est-elle vraiment un
argument ou est-ce juste un objet pour se donner bonne conscience
(pour Smixin ainsi que pour les clients) ?
Il est évident que Smixin seul ne sauvera pas le monde. Mais il y contribue. Le système Smixin fournit un résultat optimal avec une utilisation
minimale de ressources. La définition même de l’efficience. Ce n’est
donc pas « pour se donner bonne conscience », mais une approche naturelle et logique. Et pas seulement sur un plan technique ou écologique.
L’utilisation optimale des ressources n’est-elle pas l’une des règles économiques de toute entreprise ?
Votre identification à Creaholic / Elmar Mock n’est-elle pas un peu
restrictive ? En d’autres termes, ne pensez-vous pas ne plus avoir
besoin de cette référence pour être crédible ?
Ce n’est pas une question d’identification, mais une question d’origine.
Oui, nous venons d’un terrain fertile en termes d’innovation et nous le
revendiquons. Nous avons hérité d’un bagage important et nous l’amenons plus loin. Nous construisons donc sur des fondations larges et solides, ce qui ne restreint pas les édifices qu’il est possible d’y construire.
Au contraire, cela ouvre beaucoup de perspectives.
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pat rimoine ( S )
in ve s tir / INDICES BBGI PRIVATE BANK ING
Des résultats positifs
grâce à l’effet de change
notamment grâce à la bonne tenue des marchés actions. Les indices
« risque modéré » et « risque faible » enregistrent respectivement +0,43 %
et + 0,17 %.
Alors que le baromètre conjoncturel du KOF affichait une légère progression en mai à 93,1 points, les données trimestrielles de croissance
du PIB décevaient les investisseurs. Après treize trimestres de hausse
pour l’économie suisse, le PIB s’est en effet contracté de -0,2 %, suite à
la fin du taux plancher EUR/CHF.
Elena Budnikova
La reprise du billet vert
Alain Freymond, Associé BBGI Group
Les indices BBGI Private Banking en francs
suisses profitent en mai d’un effet de change
positif, le billet vert gagnant +0,85 % sur le
franc suisse au cours de la période. Les trois
stratégies enregistrent par ailleurs des résultats légèrement positifs sur le mois. L’indice
« risque dynamique » s’affiche en tête (+0,69 %),
L’effet de change favorable, soit la reprise du dollar, s’explique par la
publication de données positives pour l’emploi US et la hausse de l’inflation (+0,3 % en avril) : l’objectif de la Fed n’est en effet plus si loin, laissant
craindre une prochaine remontée des taux d’intérêt. Du côté des classes
d’actifs, l’immobilier international (-0,57 %) et les matières premières
(-1,16 %) limitaient leur correction, tandis que les obligations internationales cédaient -1,52 % en CHF. Le private equity, au contraire, progressait
de +3,08 % et la gestion alternative parvenait à enregistrer +1,11 %. Les
actions suisses gagnent +1,84 % et les actions internationales +1,19 %. Enfin,
les obligations helvétiques parvenaient tout juste à rester en terrain positif
(+0,17 %). Au regard des performances depuis le début de l’année, les actions
suisses, auparavant talonnées par les obligations suisses, occupent la place
de meilleur contributeur depuis deux mois. Elles progressent désormais
de +5,88 %, creusant leur écart avec les obligations suisses (+2,98 %).
Performances du mois de mai
0,8%
0,17%
0,43%
0,69%
0,7%
4%
0,17%
1,84%
1,19%
3,08%
1,11%
3%
0,6%
2%
0,5%
0,4%
1%
0,3%
0%
0,2%
-1%
0,1%
-1,52%
-2%
0%
PB LOW RISK
PB MEDIUM
RISK
PB DYNAMIC
RISK
OBLIGATIONS
CH
OBLIGATIONS
INT.
78
ACTIONS
CH
ACTIONS
INT.
PRIVATE
EQUITY
GESTION
ALTERN.
-0,57%
-1,16%
IMMOBILIER
INT.
MATIÈRES
PREMIÈRES
in ve s tir / INDICES BBGI PRIVATE BANK ING
En mai, les obligations internationales ont obtenu la moins bonne
performance du mois (-1,52 %, pour rappel), dans un contexte international marqué par les inquiétudes continues quant à la capacité de
la Grèce à rembourser l’intégralité de sa dette. Ainsi, en raison d’une
pondération moins importante de cette classe d’actifs dans l’indice
BBGI Private Banking « risque dynamique », celui-ci arrive en tête en
mai. Il progresse ainsi de +0,69 %, suivi des indices « risque modéré »
(+0,43 %) et « risque dynamique » (+0,17 %).
L’impact de la volatilité
Depuis le début de l’année, les fonds de placement observés obtiennent
des performances positives mais peu affirmées, conséquence d’une
forte volatilité des marchés. Les fonds de placement présentant un
niveau de risque élevé arrivent en tête avec une moyenne de +1,11 %,
suivis de performances de +1,06 % pour la catégorie « risque modéré »
et de +0,14 % pour les fonds de placement les moins risqués. En hausse
de +0,64 %, l’indice BBGI Private Banking « risque faible » affiche la
plus grande surperformance sur l’univers de fonds de placement correspondant (près de 50 PDB).
Sur dix ans glissants (mai 2005 – mai 2015), les
trois indices BBGI Private Banking obtiennent
des performances proches les unes des autres
avec +3,36 % pour l’indice « risque dynamique »,
+3,37 % pour l’indice « risque modéré » et +3,29 %
pour l’indice « risque faible ». La moyenne des
fonds caractérisés par un niveau de risque
faible atteignant un résultat de +1,60 % sur
la période, l’écart de performance entre les
résultats de l’indice « low risk » et la progression moyenne de ces fonds atteint près de 170
points de base.
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in ve s tir / INDICES BBGI PRIVATE BANK ING
Votre portefeuille le mois dernier,
depuis le début de l’année et sur dix ans
Indice BBGI Private Banking « risque faible » (ipbl)
Indice BBGI Private Banking « risque modéré » (IPBM)
Mai
IPBL
0,17 %
Moyenne des fonds
-0,01 %
écarts en PdB
17,471
YTD
0,64 %
0,14 %
10 ans
3,29 %
1,60 %
Mai
ipbm
0,43 %
Moyenne des fonds
0,29 %
écarts en PdB
14,312
49,873
YTD
0,72 %
1,06 %
-33,70
169,68
10 ans
3,37 %
2,25 %
111,85
Mai
ipbd
0,69 %
Moyenne des fonds
0,46 %
Écarts en PdB
23,230
YTD
0,75 %
1,11 %
-35,55
10 ans
3,36 %
2,52 %
83,340
Indice BBGI Private Banking « risque dynamique » (IPBD)
*L’univers de fonds suisses est constitué de fonds diversifiés, regroupés
en trois catégories de risques correspondant aux indices BBGI Private
Banking. Ces trois univers ont été constitués sur la base des indications
fournies par les promoteurs des fonds et des allocations d’actifs publiées.
Relevons que, au contraire des fonds, les indices BBGI n’incluent pas
de frais de transactions.
Sans être totalement exhaustifs, ces univers sont représentatifs du marché
suisse des fonds destinés au public. Les compositions détaillées des univers
et des indices sont disponibles auprès du service de recherche de BBGI Group
(022 595 96 11).
80
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INVITé
Le prisme
d’une vision
familiale
Entretien avec DANIEL MORI, CEO de VISILAB
Cela fait 100 ans que la première génération des familles
de Toledo et Mori a créé la Pharmacie Principale à Genève,
à l’origine du groupe GPPH, qui a fondé aujourd’hui VISILAB. L’histoire de VISILAB quant à elle, commence un
peu plus tard, dans les années 1980. Son fondateur, Daniel
Mori, alors étudiant aux États-Unis, y découvre le processus visant à accélerer la fabrication des verres optiques en
décentralisant la production dans les magasins mêmes, tout
en préservant la qualité. C’est de retour à Genève en 1988,
qu’il ouvre son tout premier magasin, qui révolutionnera
le marché suisse de l’optique en proposant la fabrication
des lunettes en 1 heure seulement.
« le rôle d ’u ne e n t re prise ne se
b or ne pa s à l’a s pec t éc o n omique »
83
INVITé
Comment les arbitrages entre les intérêts de la famille
et ceux de l’entreprise se font-ils ou se préparent-ils,
notamment le passage du relais aux jeunes générations ?
Nous avons régulièrement des réunions formelles et informelles d’actionnaires familiaux. Celles-ci permettent de
discuter de tous les thèmes souhaités et de trouver ensemble
des solutions pour concilier intérêts familiaux et intérêts
Il y a cl aire me n t
u n e s prit de famille propice
à l’e n t re pre ne uriat
professionnels. Cette structure est très importante pour
améliorer la transparence et donc la confiance. Nous organisons également, de façon plus épisodique, des réunions
destinées aux jeunes générations.
Est-ce toujours une force ou parfois une faiblesse d’être
une entreprise familiale ?
Comme dans toutes choses, il y a des points forts et des points
faibles. Mais je vois plus d’avantages que d’inconvénients :
comme je vous le disais, l’entreprise familiale permet une
vision à long terme, ce qui se ressent dans la façon de la
gérer. C’est grâce à cela que, dans une entreprise comme la
nôtre, nous sommes en mesure de faire des concessions sur
le court terme et ainsi consolider la position de l’entreprise
sur la durée. Économiquement parlant, les entreprises familiales sont mieux équipées pour faire face à des pressions
conjoncturelles, car elles savent qu’elles peuvent davantage
tenir leur projet à long terme, ce qui va guider leurs actions.
Votre grand-père, Sam Mori, était l’un des fondateurs
de ce groupe. Que signifie pour vous le concept d’entreprise familiale ?
Pour moi le concept d’entreprise familiale s’inscrit dans
le temps. Il est indissociable d’une forme de continuité
trans-générationnelle. Dans notre cas, c’est une épopée
qui a commencé au début du 20 e siècle et qui a encore de
bonnes perspectives. Dans ce contexte, la notion d’individu s’efface au profit d’une structure pérenne. L’apport
individuel reste évidemment valorisé, mais en ce qu’il
œuvre dans le sens d’une culture liée à la fois à une famille
et une entreprise.
Côté privé
Musique la plus appréciée : Soul et R&B
Film ou acteur/trice préféré : Marylin Monroe
L’esprit de famille est donc un élément de succès de
l’entreprise ?
Personnage historique de référence : Henri Dunant
Livre de chevet : Kotler « Marketing management »
Oui, il y a clairement un esprit de famille propice à
l’entrepreneuriat. Même si c’est implicitement, celui-ci
se ressent et se transmet au travers de certaines valeurs et
de certains comportements. En revanche, les sensibilités
de chaque membre de la famille s’expriment pleinement
dans les compétences spécifiques de chacun. On peut dire
que jusqu’à présent cela nous a bien réussi.
Lieu d’inspiration : La baignoire
Ville préférée : Genève
Souhait le plus important : Favoriser le développement
de l’entreprise et participer au bien-être de la collectivité.
84
INVITé
VISILAB soutient plusieurs causes, comme la Fondation
Theodora, la distribution de lunettes dans les pays défavorisés, mais aussi la formation et le sport. Comment
se déterminent et s’articulent les choix stratégiques
dans ces domaines ?
classés dans le top 10 au niveau mondial. C’est quand
même exceptionnel, pour un petit pays comme le nôtre,
et le tennis mérite donc qu’on s’y intéresse. Je pense qu’il
est important d’encourager la pratique de ce sport, très
attractif pour nos jeunes, et c’est pourquoi nous sommes
très fiers de pouvoir compter Stan Wawrinka parmi nos
ambassadeurs. \
UN
Je pense que le rôle d’une entreprise ne se borne pas à
l’aspect économique. Elle a nécessairement un rôle à jouer
au niveau social et humanitaire, en tout cas c’est ce qui
correspond à notre philosophie. Pour nous la récolte et
la distribution de lunettes aux populations défavorisées
était une évidence. Pour le reste, nous plaçons au premier
plan le soutien aux professions de santé.
E
Quant au sport, pourquoi le tennis ? Par inclination
personnelle ?
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Je pratique le tennis, mais ce n’est pas cela qui m’a poussé
à être actif dans ce domaine. Le tennis est un sport très
populaire en Suisse et très pratiqué. Il bénéficie d’une
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L’ÉQUATION ISLAMIQUE :
UNE AFFAIRE DE COMPLIANCE
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Immobilier :
13 acteurs
d’influence
On qualifie d’« immobilier », un
bien ou un objet qui ne peut être
déplacé : la racine latine im-mobilis est la négation de l’adjectif
latin mobilis qui signifie « qui
peut être mû ou remué ». Or le
marché immobilier est tout sauf
« immobile », en tout cas si l’on en
croit les acteurs de ce 8e « market
influence index ». Perspectives
pour l’avenir ? Dans le désordre :
densification de la construction,
changement dans les rapports
de communication, innovations
technologiques et informatiques
sont les maîtres mots d’un futur
qui s’annonce prometteur.
86
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Bernard Nicod
Fondateur et Directeur général de Bernard Nicod
Diplômé en gestion économique, Bernard Nicod vécut sa première expérience du bâtiment à l’âge de 7 ans,
passionné par le travail d’un architecte.
Il a depuis fondé une dizaine de sociétés et neuf filiales qui constituent le
Groupe Bernard Nicod, dont il est le
Directeur général.
« Avoir de l’influence, c’est être capable
d’orienter les idées, les comportements,
les produits fabriqués en fonction
d’une vision du monde et de la société. Il existe des métiers d’influence :
l’enseignement, la communication, la
politique. Pour les autres, c’est dans le
réseau né de leurs activités professionnelles, qu’on peut parler d’influence,
dans leur milieu d’abord, puis au-delà, auprès de relais
dans d’autres milieux ou au sein de l’opinion. L’influence
repose sur la reconnaissance d’une expertise, d’une réussite,
dans un domaine particulier. Autrement dit, sur le travail,
sur les compétences acquises au fil du temps qui vous permettent d’analyser correctement une situation, de prévoir
ce qui va se passer et de décider rapidement. L’influence
se mesure au résultat obtenu. Quand vous arrivez, grâce
au combat mené avec d’autres, à faire adopter en votation
populaire une tour de 117 mètres dans le quartier des Cèdres,
J’acc orde be auc o up
d ’imp or ta nce au re s pec t de
l a parole d o n née .
à Chavannes-près-Renens, c’est une réussite évidente.
Mais, bien sûr, il y a aussi des échecs. La transmission de
ses connaissances est la tâche essentielle d’un patron. C’est
tellement évident qu’on le fait pratiquement sans y penser.
J’y consacre sans doute - à ma manière - à peu près deux
tiers de mon temps : auprès de mes collaborateurs, de mes
partenaires, de mes contacts. L’exemple est la meilleure
manière de promouvoir les valeurs auxquelles on croit.
Travail, compétence, efficacité, sont les valeurs indispensables à la réussite d’une affaire. Mais il y a d’autres
valeurs auxquelles j’accorde beaucoup
d’importance : l’attachement au pays et
la défense de ses intérêts, par exemple,
ou le respect de la parole donnée. Tous
ceux qui me connaissent le savent.
Ma présence médiatique peut parfois
être utile, non seulement au développement de mon entreprise, mais aussi
à la compréhension des conditions qui
permettent au secteur immobilier, et
à l’économie en général, de bien fonctionner. Ce n’est pas facile dans une
ambiance de plus en plus émotionnelle
où les gens finissent par croire qu’on
peut construire plus de logements en
multipliant les lois. Alors que c’est le
phénomène inverse qui se produit partout où les régimes en place ont pris ou prennent ce chemin.
J’essaie – c’est en tout cas mon but – de mettre sur le marché
des biens immobiliers qui ne répondent pas seulement
au besoin de se loger. L’esthétique, le confort, le meilleur
rapport qualité-prix possible, l’aspect durable du bien dont
l’entreprise assure la construction ou la promotion, sont
des critères permanents de mes choix et de mes décisions.
L’aspect durable auquel j’ai toujours été sensible, inclut
aujourd’hui le respect de l’environnement, les économies
d’énergie et le recours à leurs formes renouvelables. Tous
ces critères imposent une capacité d’adaptation et d’innovation permanente sans laquelle il n’y a tout simplement
pas de survie.
La Suisse est un petit pays en termes de km². Ses surfaces
habitables sont encore plus réduites. Si l’on ne veut pas
« miter » le territoire, il n’y a qu’une seule manière de faire.
Il faut densifier la construction. Ce n’est pas dans l’intérêt
des promoteurs et des architectes, c’est dans l’intérêt de
tous. Cela permet de protéger le paysage, de mettre plus de
logements à disposition et de réduire les coûts. Mais cela
suppose deux conditions : la première, que les citoyens
acceptent cette densification, non pas seulement chez les
autres, mais devant leur porte, ce qui n’est pas évident au
pays du référendum, et la seconde, que les infrastructures,
notamment de transports, suivent, ce qui n’est pas davantage
acquis. Ce sera l’un des enjeux de notre proche avenir ». \
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Jérôme Félicité
Président de Barnes Suisse
Diplômé de l’École hôtelière de Lausanne
et autodidacte de l’immobilier, cela fait 18
ans que Jérôme Félicité travaille dans ce
domaine. Directeur des ventes chez Rham
Sotheby’s durant 10 ans, il s’est par la suite
associé avec son père Pierre, fondateur de
Gérofinance SA. En 2006, il devient donc
CEO de Gérofinance-Dunand SA /Régie
de la Couronne, puis Président du Conseil
d’administration en 2014. Il est également
le Président de Barnes Suisse.
leurs besoins. Avec au cœur de ce dialogue,
une volonté forte de partager les valeurs
constitutives aussi bien de ma personne,
que de ma société. Mon style est d’être là
où les autres ne sont pas. Par exemple, le
fait d’avoir déménagé nos bureaux dans la
zone industrielle du Lignon a été un acte
symbolique fort. Initialement, nous étions
depuis 2001, rue des Bains. Notre travail
quotidien est d’être en mouvement, d’aller
à la rencontre des clients. Nous devons leur
offrir toujours plus de services et leur faciliter la vie en tant que mandataire. Les gens
ont de moins en moins de temps pour visiter un appartement, louer ou acheter une
maison, procéder au paiement de leurs charges, etc. : à nous de
leur amener des solutions à distance. Dans l’immobilier, nous
sommes comme beaucoup d’autres, des acteurs économiques
importants pour une région, pour une ville. De là à dire que
j’ai de l’influence et du pouvoir sur les décisions politiques, cela
serait prétentieux. Je pense que les exécutifs et les législatifs
connaissent très bien les règles du jeu. Ce n’est que lorsqu’un
projet répond à une demande des citoyens, que je peux faire
valoir mon influence. Pour ce qui est de l’environnement,
notre pays est en avance sur son temps et nos constructions
répondent à des cahiers des charges précis. Tous les acteurs
immobiliers suivent la tendance non pas par opportunisme,
mais parce qu’ils sont conscients de l’importance de notre
impact environnemental et des coûts. Le potentiel d’influence
« Selon moi, l’influence est intrinsèquement
liée à la relation de confiance développée
avec mes collaborateurs, mes partenaires
et également mes clients. Certes l’influence est inhérente à
la fonction et s’exerce corollairement à l’importance de cette
dernière. En qualité de chef d’entreprise, il est évident que j’ai
de l’influence, surtout face à mes collaborateurs. Mais cette
influence peut rapidement prendre une coloration négative
à partir du moment où elle démontre une relation de pouvoir
entre celui qui impose ses idées et ceux qui les appliquent de
manière forcée. L’influence devient positive et productive quand
elle s’exerce au sein d’un climat de dialogue, de manière non
coercitive, mais délibérative. Je la mesure à travers ma capacité
à fédérer l’approbation de mes équipes sur un projet qui ne fait
pas, a priori, l’unanimité. Avec mes clients, mon influence se
mesure à mon degré de persuasion lorsque je présente un projet.
À ce titre, il est important que mon influence soit perçue par
le client comme découlant de mon expérience du monde de
l’immobilier, et non de ma fonction de Directeur.
L a t r a n smis sio n e s t l a clé
d ’u n b o n ma n age me n t
La transmission est la clé d’un bon management : je l’ai appris
avec mon père qui m’a transmis durant des années son expertise
et surtout ses valeurs humaines. Depuis mon plus jeune âge,
j’ai découvert qu’il traitait tout le monde de la même manière :
des clients - quelle que soit leur importance - aux prestataires
de services. Cette notion de respect fait partie intégrante de
mes valeurs et je mets un point d’honneur à la transmettre à
l’ensemble de mes équipes. J’ai toujours privilégié une accessibilité à toute heure et suis ouvert à la critique constructive.
Et si mon temps est compté, je fais de ce dialogue une priorité.
J’aime les relations humaines, autrement je ne ferais pas ce
métier. Il est donc important d’échanger avec mes clients,
mes partenaires et mes collaborateurs, afin de comprendre
des différents acteurs de l’immobilier se situe au niveau de
la taille de l’entreprise et des offres de services. Le fait que
Gérofinance-Dunand/Régie la Couronne offre un service
global comprenant la gérance d’immeubles de rendement,
la gestion de copropriété, la location, le courtage au niveau
régional, national et international, la promotion, la rénovation,
le pilotage d’opérations immobilières, ainsi que la gestion de
fortune, me semble décisif. En effet, compte tenu de la diversité
de nos services, nous touchons un spectre très large d’acteurs
qui nous confère logiquement une influence différente. » \
88
Chez nous,
quand vous voulez
rencontrer le président,
vous rencontrez
le président.
Gaultier Collette
Leader des agences de communication indépendantes
de Suisse Romande (classement bsw 2014)
gaultiercollette.ch
GAULTIER COLLETTE - WTC II - 29 route de Pré-Bois - CP 635 - CH 1215 Genève 15 - tél. +41 (0)22 884 39 60 - [email protected]
89
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Claude Atallah
Directeur des ventes de SPG Finest Properties
Ses études en ingénierie électronique ne le prédestinaient pas à travailler dans l’immobilier.
Mais en 1986, le hasard a voulu qu’il débute
sa carrière professionnelle dans l’immobilier en tant que courtier, avec un promoteur
spécialiste de la villa. Il a donc découvert ce
métier qu’il n’a plus quitté, puisqu’en 1991, il
a eu l’opportunité d’intégrer le groupe SPG et
d’évoluer vers un poste de directeur. Nommé
en 2000, il est aujourd’hui en charge des ventes
immobilières d’appartements et de villas, y compris les objets de
luxe via la marque SPG Finest Properties, affiliée à Christie’s,
leader dans ce segment.
fraîcheur et une volonté d’apprendre. J’aime
beaucoup m’entourer de jeunes talents dynamiques. Grâce à eux, les idées fusent ! C’est très
bénéfique pour l’entreprise. L’éthique et l’équité
sont des valeurs, qui sont source d’inspiration
dans ma vie personnelle et professionnelle. La
promotion en zone de développement est un
parfait exemple de l’application de celles-ci.
En effet, je porte une grande attention à la
sélection de candidats dans le cadre d’attributions d’appartements bon marché. Lorsqu’une promotion
telle que l’éco quartier des Vergers (80 appartements en zone
de développement) se présente, il est difficile de contenter tous
les potentiels acquéreurs. Nous privilégions alors les personnes
accédant pour la première fois à la propriété et aux revenus
modestes et appliquons un principe d’équité dans l’attribution
d’un appartement (les grands appartements vont par exemple
aux grandes familles). Autre exemple, la promotion de la Résidence Peillonnex ; nous avons reçu plusieurs candidats pour le
même appartement. Nous nous étions fixés avec les promoteurs,
de sélectionner le candidat le plus approprié pour chaque
appartement. Nous n’avons sélectionné aucun investisseur et
avons donné la priorité aux personnes ne pouvant accéder à
« Avoir de l’influence c’est avoir de l’ascendant sur les êtres, c’est
exercer un certain pouvoir. Cela ne correspond absolument
pas à ma nature partageuse, tournée vers les autres. Échanger,
encourager, dialoguer, conseiller, transmettre, représentent
des valeurs indispensables, qui sont difficilement compatibles
avec la volonté de faire adhérer à une idée ou une opinion.
Dans le cadre de l’achat d’un bien immobilier, nous avons de
réels échanges avec nos clients. Nous les écoutons, puis nous les
conseillons, les guidons dans la concrétisation de leurs projets
de vie. Nous devons répondre au mieux à leur demande, c’est
un échange constant, nous ne leur imposons rien. L’influence
est très souvent inconsciente, car notre attitude, notre posture
et même nos mots provoquent sans doute des réactions diverses
chez les autres et inversement. Je ne tiens pas à avoir plus
d’influence « consciente », cela va à l’encontre de mes valeurs
évoquées ci-dessus. Toutefois, le fait que des clients s’adressent
à moi et donc à la SPG peut être interprété comme tel, mais je
pense qu’ils reconnaissent tout simplement nos compétences
et notre savoir-faire. C’est pour moi une preuve indubitable
d’une confiance dans notre travail et un indice de notre attractivité. Dans le cas du projet immobilier Alexandre Gavard par
exemple, nous avons pu réserver tous les appartements avant
même que le chantier ne démarre. Preuve que nous avons une
forte crédibilité et que nous sommes vus comme des professionnels sérieux. Cela fait 25 ans que je travaille à la SPG et
chaque jour est une occasion de recevoir et de transmettre. En
tant que directeur des ventes, mon devoir est d’apporter mon
savoir-faire et de le partager avec mes collaborateurs. Tout
devient matière à enseigner et je suis toujours aussi agréablement surpris de constater que j’en apprends tout autant de
jeunes courtiers, car ils viennent avec un regard neuf, une
L’é thiq ue e t l’é q uité s o n t
de s vale ur s , q ui s o n t s o urce
d ’in s pir atio n da n s ma vie
pe r s o n nelle e t profe s sio n nelle
la propriété que par le biais de ce type d’offre. Malgré toutes
ces précautions, nous ne sommes pas à l’abri qu’un acquéreur
décide de ne pas occuper le logement pour des raisons personnelles ou professionnelles. Je crois que nous intégrons plus que
nous n’imposons des tendances, car nous travaillons au cœur
d’un marché, dans lequel nous devons être en phase avec les
nouvelles technologies et les nouveaux processus-métiers qui
existent. Ces nouvelles tendances impliquent de nouvelles
manières de travailler, de la formation continue pour les
collaborateurs, une remise en question de nos méthodes et
processus, afin que notre relation avec le client soit toujours
plus confortable, sûre et enrichissante. Il se crée ainsi au cœur
de l’entreprise une dynamique de l’innovation et donc du
dialogue, qui n’est pas sans me déplaire. » \
90
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Thomas Mader
Président de Brolliet Investissements et membre
du conseil de direction de Brolliet SA
Diplômé de l’Institut d’Études Immobilières de Genève et de sciences commerciales et industrielles, Thomas
Mader a débuté sa carrière en 1988,
au sein de la société « Propriété à tous »
dont le but est de faciliter à chacun,
l’acquisition d’un logement à prix
modéré. C’est en 1990 qu’il a rejoint
le service des promotions de la régie
Brolliet, dont il a rapidement assumé
la direction. Par la suite, il a également
pris la direction des départements
architecture et commercial. Cela fait
aujourd’hui plus de 20 ans qu’il évolue
dans le domaine immobilier. « À mes
yeux, l’influence est intimement liée à
la notion de leadership. En effet, pour
exercer de l’influence, que ce soit pour
agir sur le cours des événements ou alors posséder un ascendant sur une personne ou un groupe de personnes, il faut
être doté de leadership. S’il peut être de l’ordre de l’inné pour
certains, je suis convaincu que l’expérience et les compétences
sont des conditions sine qua non permettant d’influencer
ou de mener un groupe. En d’autres termes, l’influence se
blement une richesse, cela exige par
ailleurs qu’une partie importante de
mon temps soit dédiée au management, pour insuffler une dynamique
d’ensemble, orienter les collaborateurs
dans le sens de la culture de notre
entreprise et de leurs missions, tout en
favorisant une cohésion et une collaboration entre les différents services.
Cela peut se traduire par des réunions
organisées sur une base hebdomadaire
avec les collaborateurs assumant un
rôle d’encadrement, aussi bien que
par des séances individuelles sous la
forme « one-to-one ».
La satisfaction du client est au cœur
de nos préoccupations. Cela va de pair
avec l’excellence et la personnalisation de nos services, des
valeurs fondatrices de Brolliet SA. Celles-ci sont les véritables
clefs de voûte de la culture de notre entreprise et lui confèrent
son identité propre, son esprit unique nous différenciant de
nos confrères. Par ailleurs, dans le cadre des mandats confiés,
nous observons discrétion et confidentialité absolues tout en
suivant des critères stricts d’intégrité et de transparence. De
plus, une des valeurs phare de Brolliet SA est bien entendu
celle de l’innovation permanente. Si notre entreprise a
récemment fêté ses 110 ans, une des clefs de ce succès réside
en grande partie dans notre rapport à l’innovation et le
fait d’avoir toujours su relever les défis ayant jalonné notre
histoire en y répondant par des solutions innovantes.
L’infl ue nce e s t in time me n t liée
à l a n o tio n de le a de r ship.
gagne. Je pense que ma voix revêt aujourd’hui une certaine
importance au sein de l’immobilier genevois. Cette influence
résulte notamment des 20 années d’expérience réalisées au
sein de Brolliet SA, une maison jouissant d’une solide réputation, qui compte parmi les acteurs immobiliers importants
de la place. Elle s’explique aussi par mon engagement actif
dans le secteur de l’immobilier depuis plusieurs années
déjà en tant que membre de l’Association des Promoteurs et
Constructeurs Genevois (APCG) et Président de la Fondation
du Centre International de Genève.
Enfin, notre société s’est construite autour d’une stratégie privilégiant une vision sur le long terme, une vision
durable, et ce, que ce soit dans la conduite de nos affaires
aussi bien que dans nos relations avec nos clients. C’est la
raison pour laquelle nous avons créé en 2008 un service
dédié au développement durable. Ce faisant, nous avons fait
office de pionniers et leaders en la matière au sein du secteur.
Parallèlement, nous sommes certifiés chaque année par le
Label vert de l’USPI depuis sa fondation et conduisons notre
activité dans le respect des exigences liées au développement
durable menant une politique énergétique respectueuse de
l’environnement. » \
En assumant la direction des équipes promotion, architecture
et commerciale, j’encadre une trentaine de collaborateurs avec
lesquels je travaille quotidiennement. Si cette taille d’équipe
dotée d’une grande pluridisciplinarité constitue indénia91
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Anthony Collé
CEO du Groupe MK
Né en 1967 à Genève, Anthony
Collé est diplômé de l’ISMA et de
la SAWI. De formation commerciale, il a accompli l’essentiel de
sa carrière dans l’immobilier dès
l’âge de 22 ans. Successivement
courtier, puis gérant, responsable
de ventes et marketing, il a rapidement dirigé des entités immobilières en Suisse romande jusqu’à
rejoindre et prendre la direction
générale du Groupe MK en 2002.
ne retient que peu de contenu. La
personne qui travaille avec moi
doit savoir se débrouiller par ellemême, mais elle reste cependant
encadrée par quelqu’un qui est à
sa disposition pour répondre à ses
questions.
Je défends l’engagement, la résistance, la résilience et l’assiduité, et
mes valeurs clés sont l’engagement,
l’innovation et le professionnalisme. C’est grâce à la communication qu’elles sont transmises
tant au sein de l’entreprise, qu’à
l’extérieur. La transparence est
ma marque de fabrique : je n’aime
pas pratiquer la langue de bois.
Ma présence médiatique est un
mal nécessaire, car elle permet de montrer notre niveau
d’expertise : on dit le plus souvent qu’une entreprise
ressemble à son chef.
« L’influence, c’est être considéré
comme un expert dans son domaine, une référence, le tout sans
arrogance. C’est également maîtriser son sujet, avec la capacité
de pouvoir l’expliquer à divers
publics avec des degrés de technicité différents. Je pense
avoir une influence plutôt pragmatique. Elle transparaît
dans ma force de persuasion et ma maîtrise du sujet et
se mesure à travers l’attractivité de la société, par des
messages de sympathie, y compris venant des milieux
avec lesquels on n’a pas les mêmes points de vue.
En tant qu’acteur de l’immobilier, je ne fais que refléter
le marché. Je n’ai pas le pouvoir de le créer, de même
que je n’ai pas d’influence sur les décisions politiques.
Je pressens de très grands changements dans l’avenir de
l’immobilier à l’image de cette compagnie californienne
La transmission d’un savoir-faire se traduit par la croissance de l’entreprise. Sans lui, il n’y a pas d’expansion
possible. Notre groupe reçoit régulièrement des stagiaires
– le plus souvent des universitaires très cultivés –, mais
qui doivent acquérir une expérience pratique. Deux types
de cercles travaillent pour moi : ceux qui sont très expérimentés – des spécialistes – à qui je ne transmets rien,
mais que je dois surtout écouter. Car transmettre son
savoir-faire, c’est également savoir être à la disposition
de cadres dirigeants, en les laissant évoluer. On est plutôt
dans l’ordre du mentoring.
L a t r a n smis sio n d ’u n s avoir -faire
se t r a d uit par l a crois s a nce
de l’e n t re prise . S a n s l ui, il n’ y a
pa s d ’e x pa n sio n p o s sible
qui a bouleversé l’ordre des taxis genevois et lausannois.
Il y aura donc un véritable changement de modèle dans
l’intermédiation, et ce dès 2020. On ne sera plus dans le
B2C, mais plutôt dans le C2C et en cela, le rapport entre
le vendeur et l’acheteur, le modèle de rémunération
seront modifiés. Le courtier renforcera son côté expert,
et deviendra un estimateur qui se retrouvera au début
et à la fin de cette chaîne, avec bien sûr son talent de
négociateur qu’un algorithme ne saurait remplacer. » \
Le second cercle est composé de la jeune génération et
de ceux qui se sont reconvertis : j’aime leur donner leur
chance. Je crois à l’apprentissage par l’immersion totale,
quitte à sortir de sa zone de confort. Je suis parfois critique avec les processus purement académiques. Je relève
volontiers la méthodologie – savoir prendre du recul,
réfléchir – mais je suis persuadé que pour le reste, on
92
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Charles Spierer
Président de CGI Immobilier
Après une carrière de chercheur
et d’enseignant en économétrie,
Charles Spierer se lance dans
le domaine de l’investissement
immobilier et de la gérance dans
lequel il exerce depuis plus de 30
ans. Actuellement Président de
CGi IMMOBILIER, il est également Président de l’IEI (Institut d’études immobilières) et
Président de la FTI (Fondation
pour les terrains industriels de
Genève).
Travaillant de la même manière
depuis plusieurs décennies, je ne
souhaite rien imposer au marché.
Au contraire, je cherche à satisfaire ses besoins en appliquant
mon savoir-faire et mon expertise. L’innovation est essentielle.
Qui imagine écrire efficacement
sans traitement de texte, conduire
dans une ville inconnue sans
GPS ? Ainsi, pour la conception
et la réalisation de projets immobiliers pilotés par CGi IMMOBILIER, nous intégrons autant que
possible l’innovation et adaptons
nos méthodes de travail en fonction. Notre objectif est d’augmenter la qualité et la fiabilité
de nos immeubles et de proposer
des nouveautés. Au cœur de nos
priorités se trouve notamment
le développement durable. Ce
que je souhaite pour l’avenir de
l’immobilier ? Essentiellement l’espoir de construire suffisamment de logements pour satisfaire tous les besoins.
« Avoir de l’influence, c’est avant
tout convaincre les autres d’adhérer à votre vision et donc de vous
suivre dans un projet professionnel, social ou privé. L’essentiel
n’est pas d’avoir de l’influence,
mais de laisser à chacun la possibilité de s’exprimer et de faire
son choix, dans le respect des
valeurs de CGi IMMOBILIER. Je ne cherche pas à avoir
de l’influence. Je donne mes idées et me réjouis lorsqu’elles
ont de l’impact.
Ce sont surtout les compétences de nos 100 collaborateurs
qui permettent le développement de CGi IMMOBILIER.
Et si une présence médiatique de certains d’entre nous
peut également y contribuer, c’est tant mieux. Cepen-
La transmission de connaissances et du savoir-faire est une
priorité. Cela étant, il est aussi important de transmettre
mes idées que de permettre aux autres de me transmettre
les leurs. La réussite d’un projet immobilier, par exemple,
est un succès grâce à une collaboration constructive et au
travail d’équipe des différents intervenants et corps de
métier. Le partage des « best practices » est essentiel.
CGi IMMOBILIER e s t in s pirée
par t rois vale ur s fo ndame n tale s :
l a c o nfia nce , l a re s p o n s abilité
e t l’é thique .
CGi IMMOBILIER est inspirée par trois valeurs fondamentales : la confiance, la responsabilité et l’éthique. Elles
favorisent une relation privilégiée, dans l’optique d’une
collaboration qualitative et pérenne avec ses interlocuteurs : clients, partenaires et collaborateurs. Trois valeurs
que je partage et que je véhicule au quotidien. Le meilleur
vecteur de promotion de celles-ci est l’exemplarité, et il
ne faut pas oublier la communication ! Avec plus de 30
ans d’activité dans l’immobilier, il me paraît évident de
communiquer mes valeurs et de transmettre mon expertise.
dant, notre influence se passe avant tout sur le terrain
et non sur la scène politique. Ainsi, en matière d’environnement, c’est grâce à l’impact des mesures que nous
prenons dans le développement de projets immobiliers
et la gestion d’immeubles pour utiliser moins d’énergie
et d’eau, pour favoriser des produits biodégradables, etc.
qu’elle transparaît. » \
93
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Jean-Jacques Morard
CEO de De Rham Immobilier
Jean-Jacques Morard a débuté sa carrière immobilière à Montreux et à Vevey comme stagiaire courtier d’abord,
puis comme gérant d’immeuble. Il a
ensuite travaillé pour des sociétés de
gestion immobilières nationales dont
il a dirigé les succursales de Lausanne,
puis il est devenu Directeur de Lausanne et membre de la direction suisse
pour le groupe PSP Swiss Property
à Zürich. En 2014, il a été engagé
comme CEO du groupe immobilier
De Rham. « Selon moi, avoir de l’influence, c’est représenter
un modèle en ayant une attitude qui prône l’exemplarité.
Autant il est difficile d’avoir une influence sur un secteur
économique, autant il est possible de faire certaines choses afin
qu’elles donnent une image positive du secteur immobilier,
et de combattre les préjugés sur ce métier. C’est au travers de
plusieurs anecdotes que j’ai pu la mesurer. Par exemple en
2014, j’ai été élu parmi les 100 personnalités immobilières de
Suisse dans le magazine Immobilien Business, ainsi que par
l’Hebdo en 2013. Je crois que le fait d’avoir été le cofondateur
et Président de l’antenne romande de l’Association suisse de
l’économie immobilière (SVIT Romandie) m’a donné une
bonne visibilité. Ce qui me tient à cœur, c’est la transmission
et le savoir. J’ai également participé à l’implantation en Suisse
romande, de la Swiss Real Estate School (SVIT), école dédiée
à la formation dans le domaine immobilier et dont je fais
partie du conseil d’administration. C’est un des différents
vecteurs dont je me sers pour transmettre mes connaissances.
D’un point de vue professionnel, en tant qu’administrateur
délégué, je passe mon temps à transmettre mon savoir-faire,
à donner des conseils. Cela fait partie intégrante de la fonction dirigeante. Nous sommes une entreprise très axée sur la
formation. Nous formons des apprentis, des stagiaires, et la
formation continue interne est essentielle.
et pour cela la communication est
essentielle. Nous plaçons l’humain
au premier plan de notre entreprise,
en témoigne la récente campagne
de pub que nous avons réalisée sur
le thème « être De Rham immobilier,
c’est être aussi la gérance de : Lila », qui
utilisait les prénoms de nos locataires.
Car si rien ne distingue une régie
d’une autre sur le plan des produits,
ce sont les services qui feront toute
la différence, ainsi que la manière
de les proposer. Je suis confiant sur l’avenir de l’économie
immobilière, car nous sommes un secteur qui concerne un
besoin fondamental. Toutefois, le premier constat c’est que
nous sommes dans une période de transition entre une précédente très porteuse durant laquelle nous, acteurs immobiliers, avons profité du développement économique de notre
N o u s pl aç o n s l’humain au pre mie r
pl a n de n o t re e n t re prise
région en termes de valeurs. Mais aujourd’hui, cela tend à se
réguler ; l’économie immobilière étant à mon sens - un peu
à contretemps - le reflet de la santé de l’économie générale.
Hormis un léger ralentissement provoqué par des facteurs
réglementaires, je prédis une météo clémente sur notre économie dans les prochaines années.
L’adage Si le bâtiment va, tout va date un peu de nos grandsparents, mais il est relativement juste. Car nous sommes au
bout de la chaîne. Si l’économie est saine, le bâtiment va et
donc le reste suit. Jusqu’à l’année dernière, on mesurait le poids
de l’immobilier avec l’indice de construction : il représente
5 % du PIB de la Suisse, mais une étude zurichoise a démontré
que si l’on cumule tous les métiers de l’économie immobilière,
elle représente 18 % du PIB. Les milieux immobiliers ont, dès
lors, de plus en plus de poids et d’influence sur la politique du
logement, de l’urbanisme, de l’aménagement du territoire et
de la politique énergétique. C’est à nous, acteurs immobiliers,
d’avoir un meilleur lobbysme et de faire comprendre aux
politiques l’importance de notre secteur économique, en
ayant un droit de regard sur les décisions qui en découlent. » \
Notre valeur fondamentale est l’intégrité. Étant dans un métier
qui n’a pas toujours bonne presse, c’est une notion que nous
développons tout particulièrement. Tous nos processus tendent
vers cette valeur. Le respect est également très important à
nos yeux, que ce soit envers les futurs et actuels locataires
ou les propriétaires. Nous attachons également une grande
importance à l’esprit d’équipe entre les différents métiers de
l’entreprise, car nous travaillons de façon conjointe et croisée,
94
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Teresa Astorina
Directrice de Lake Geneva Prestige
(John Taylor Genève et Megève)
« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan
de l’entreprise : sa réputation et ses
hommes », déclare Henry Ford.
C’est l’une des citations préférées
de Teresa Astorina, active dans le
domaine immobilier depuis plus
de 20 ans dans différents secteurs.
Après l’obtention d’un Master of
Advanced Studies FHO en Real
Estate Management en 2006 et
au bénéfice de ses compétences
linguistiques, elle a occupé plusieurs postes en tant que membre
de la direction générale auprès
de différentes sociétés immobilières nationales. Elle rejoint CGi
IMMOBILIER en mars 2015.
moi fondamental. Dans l’entreprise, cela signifie mettre à profit
ses expériences pour que chacun
puisse enrichir ses connaissances
et ses pratiques. Vivre ses propres
valeurs au quotidien est le meilleur moyen de les transmettre au
mieux. Elles sont souvent cachées,
or c’est important de les mettre
en avant. Étant une personne
extravertie et vivant au quotidien
mes convictions, je pense que mon
entourage (professionnel et privé)
les connaît.
Ce sont les tendances et les styles
qui influencent le marché et
pas le contraire : nous sommes
là pour les anticiper et satisfaire
les nouveaux besoins et les nouvelles exigences. L’innovation
est très importante car le secteur
immobilier est un secteur en constante mutation, qui permet d’innover tous les jours. Dans l’avenir, les placements
immobiliers resteront très intéressants. Ces derniers sont
d’autant plus favorisés en raison des faibles taux d’intérêt
sur l’épargne, ainsi que de la crainte des taux négatifs. Dans
le domaine de l’immobilier de luxe, le cœur d’activité de
JOHN TAYLOR, après des années avec une hausse des prix
constante, une correction s’est faite et se poursuit d’ailleurs.
La tendance des prix à la hausse se calme. Ceci est aussi dû
au fait de l’offre importante de biens à vendre sur le marché.
« Avoir de l’influence, c’est avoir
un effet positif sur quelqu’un et
le convaincre de vous suivre, c’est
également partager avec passion vos convictions. J’espère
en avoir sur mes enfants et être un modèle pour eux. Je
souhaite également en avoir dans le cadre de ma profession,
enthousiasmer mon entourage avec ma motivation, ma
passion et mes ambitions de mener à bien les projets qui
nous sont confiés. Je dirais que je perçois cette influence
grâce au feedback de mon entourage, tant personnel, que
professionnel. Une grande partie de notre clientèle est
fidèle grâce à notre contact personnel et à notre capacité
à les satisfaire, en les conseillant et en leur proposant des
solutions adaptées.
Je n’ai aucun pouvoir sur les décisions politiques, car le
rôle d’un courtier de JOHN TAYLOR consiste seulement à
mettre en relation un vendeur et un acheteur et à les aider
à conclure une transaction satisfaisante pour les deux. Je
suis toutefois convaincue que tout le monde a un potentiel
d’influence au quotidien, chacun dans son domaine spécifique. Le potentiel va être accentué par le fait de travailler
ensemble, en tendant vers une vision et un but communs.
L’architecte et le promoteur planifient un projet « durable »
en respectant l’environnement, les gestionnaires et gérants
font en sorte que les biens soient entretenus tout en respectant l’environnement, etc. ».\
Il m’est impossible de quantifier le temps que je consacre
à transmettre mes connaissances et mon savoir-faire, car
c’est au quotidien que cela se passe. Je m’efforce d’être à
l’écoute et d’aider, afin que les bonnes idées se concrétisent.
Je transmets par chacune des mes actions mon amour pour
la profession et je me tiens à disposition pour conseiller et
soutenir mes équipes.
Je crois au respect, à l’effort et au partage : ce sont les valeurs
de notre entreprise, qui reflètent notre personnalité et
représentent la base de nos décisions. Le partage est pour
95
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Byron Baciocchi
CEO de Byron Baciocchi Immobilier SA
Après avoir suivi un apprentissage de commerce,
Byron Baciocchi s’est formé durant 4 ans auprès
de sa famille, qui compte
déjà trois générations dans
l’immobilier. Mais, c’est à
l’âge de 20 ans, qu’il décide
de se mettre à son compte,
en créant une société à son
nom.
lors de l’achat de sa maison. La seconde concerne
le fonctionnement de la
modernité, à travers une
technolog ie de pointe.
Mon savoir-faire est là :
je fais gagner aux gens 6
mois sur l’achat de leur
maison, en concentrant
tous les acteurs en amont
et en aval dans un même
pôle, et j’y ai intégré une
reconnaissance personnalisée, pour envoyer de
l’information ciblée. Par
ailleurs, j’invite tout le
monde à ven i r v isiter
ce nouveau pôle immobilier, le 1er novembre 2015. Les
maîtres mots qui me définissent : qualité, rapidité sur la
construction et qualité de structure exceptionnelle, car
je suis entouré d’équipes jeunes, dynamiques, avec une
vision moderne et tournée vers l’avenir, contrairement
à d’autres qui sont plus passéistes. Je mets l’innovation
au premier plan sur chacun de mes projets, si bien sûr
celle-ci est concrète, réalisable.
« Avoir de l’influence, c’est
arriver à finaliser ses projets. C’est pour cela que je
pense avoir de l’influence
dans mon domaine, car
mes projets sont porteurs d’une grande touche de modernité - qui le plus souvent perturbe le côté conservateur des
Suisses -, même s’ils finissent par y adhérer. Cela n’a pas
toujours été facile de mener à terme tous ces projets de
grande envergure, mais aujourd’hui je me rends compte
que cela en valait la peine. C’est à la fin de chaque projet,
que je réalise si j’ai eu les résultats escomptés.
Je suis prêt à sacrifier 100 % de mon temps pour transmettre
mon savoir-faire, mais il faut que mes interlocuteurs soient
motivés et déterminés. Et je considère que c’est important
d’être le plus disponible possible, même si parfois on
Je suis totalement le marché, par contre j’essaie toujours d’y
apporter une touche « jeune », en ayant un temps d’avance
sur les autres. En dépit de ce qu’on pourrait penser, mon
âge est en atout au sein de ce milieu. Je voyage énormément et j’aime analyser toutes les structures hors normes
des villes de ce monde. C’est ma première source d’inspiration, même si je ne suis pas un créateur. L’immobilier
c’est purement de la copie, mais on y intègre toujours sa
touche personnelle. Cela revient à adapter le plus souvent
ce qu’on a vu ailleurs.
J’ai u ne visio n mode r ne e t t o ur née
ve r s l’ave nir , c o n t r aire me n t à
d ’au t re s qui s o n t pl u s pa s séis te s
croule sous le travail. C’est au fur et à mesure de l’avancement, du développement des projets, que j’enseigne mes
connaissances à mes équipes. Quant aux clients, c’est grâce
aux concepts qui ont été mis en place, qu’ils se rendent
compte que le projet est réel, et que grâce à notre savoir,
nous avons une avance sur le marché immobilier. Je prends
pour exemple le projet Etoy, qui a dix ans d’avance sur
le marché. Nous avons tout basé sur deux choses : le fait
d’avoir tout à portée de main, une forme de « clés en main »,
Pour pallier le manque de terrains constructibles, la
pénurie du logement, l’idéal serait d’augmenter le nombre
de logements, en élevant la hauteur des bâtiments. Aujourd’hui les bâtiments que nous construisons ont un
nombre d’étages inadapté à la demande, alors que la
Suisse a la possibilité de voir plus grand. J’espère avoir
un jour la chance de construire une belle tour, à l’image
de celles de Dubaï. » \
96
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Philippe Cardis
CEO associé de Cardis/Sotheby’s International Realty
À sa sortie de HEC Lausanne, Philippe
Cardis a commencé sa carrière dans le
milieu bancaire. Puis, passionné de voile,
il s’est associé et a créé une entreprise pour
construire des mâts de bateau à voile. C’est
en 1985 qu’il fait son entrée dans le monde
immobilier, travaillant d’abord 10 ans
dans une entreprise à Villars, il rejoint
le groupe de Rham en 1993 en qualité de
directeur de la société de courtage puis dès
2008, il devient le CEO du groupe. En 2013,
Yvan de Rham prend la décision de simplifier la structure de
ses sociétés et vend sa société de courtage de Rham | Sotheby’s
International Realty à ses cadres dirigeants dans le cadre d’un
Management Buy-Out (MBO). Cardis | Sotheby’s International
Realty est née. Cela fait 30 ans aujourd’hui que Philippe Cardis
travaille dans le secteur immobilier. « Je suis persuadé que
l’ADN d’une société, le management et le message que l’on
véhicule dans le public sont liés à la personne dirigeante. Donc,
là où je vois une forte influence, c’est au travers du CEO d’une
entreprise, qui doit être un homme passionné, autrement il
consensuelle sur la direction à suivre. Le
rôle de la direction est de partager un
but sur lequel les collaborateurs doivent
travailler et qu’ils ont à atteindre. C’est
de la responsabilité d’y adhérer ou non,
mais surtout de rester en harmonie avec
ses choix. La première valeur, dans ma
vie professionnelle, est le plaisir. Je suis
persuadé que celui-ci décuple les facultés
d’un être humain, quel que soit son niveau
de compétences : cela le rend doué. Nous
sommes une société de services, nous nous devons d’être bons.
Pour les clients, cette notion est également essentielle, car si
la transaction est bonne, mon client éprouve du plaisir, cela
signifie donc que j’ai réussi à le satisfaire. D’autre part, les valeurs
de ma société sont très helvétiques : l’honnêteté et la fiabilité,
qui sont très importantes chez nous. C’est ce que j’appelle « le
devoir de résultat ». Nous ne travaillons que dans le but d’obtenir un résultat, sans fioritures. Beaucoup de gens font de leur
mieux, nous c’est d’atteindre notre but. Si je pose un regard
sur le futur de l’immobilier, je fais une première constatation :
dans le mot « immobilier », il y a l’adjectif « immobile », or le
marché immobilier est tout sauf immobile. On y a vu en deux
ans, des changements que personne ne pouvait imaginer. Cela
signifie qu’aujourd’hui, il faut être anticipatif, avoir toujours
un coup d’avance. Par exemple, actuellement il y une fenêtre
exceptionnelle, qui a un potentiel énorme pour une catégorie
spécifique de personnes : ceux qui payent un loyer cher. Ils
devraient être propriétaires, car les conditions de crédit sont
remarquables. Mais, à cause de nouvelles négatives, il y a une
forme de psychose chez ces locataires qui sont convaincus de
ne pouvoir accéder à la propriété.
Je s uis pe r s ua dé q ue l’ADN
d ’u ne s ocié té , le ma n age me n t
e t le me s s age q ue l’o n véhic ule
da n s le public, s o n t lié s
à l a pe r s o n ne dirige a n te
n’occuperait pas ce poste. Un homme de convictions, qui tend
à regrouper ses collaborateurs, clients et partenaires autour
de son mode de pensée, son système de valeurs. En ce sens, je
crois que tant personnellement que comme CEO de ma propre
entreprise, j’ai une influence qui se manifeste par une attitude,
une façon d’aborder les problèmes. Et elle est perceptible au
quotidien, à tous les niveaux. J’ai fait beaucoup de bateau, et
j’aime faire des parallèles entre la régate et la conduite d’une
société. Un bateau ne peut aller que dans une direction. Dans
une course, nous sommes une équipe de six, il faut donc faire
un choix commun qui parfois s’avère judicieux, et dans ce cas,
nous gagnons, ou nous faisons une erreur, et nous perdons.
On ne peut faire des zigzags en changeant de direction toutes
les cinq minutes. À cette image, j’aime me faire une opinion
En début d’année, nous avons lancé un nouveau projet de
120 appartements, à Prilly, qui se vendent entre 200 000 et 1
million de francs. Et les personnes qui peuvent les acquérir
ont majoritairement un salaire médian annuel entre 80 000
et 140 000, ce qui ne constitue pas une élite. Nous avons lancé
ce projet au Salon immobilier de Lausanne avec un partenaire
financier. Et en trois mois, nous en avons vendu 95 sur les
120, à des personnes qui n’auraient jamais pensé pouvoir être
propriétaires. Concernant le marché plus haut de gamme, il
y a de nouveau une forte demande de personnes voulant être
résidents suisses, et l’effet de l’euro se tasse un peu. En conclusion, le marché se « détend » un peu ». \
97
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Émile Garcin et Frédéric Quennoz
Fondateur et associé de Émile Garcin
En 1963, Émile Garcin ouvre son premier bureau à SaintRémy-de-Provence.
Quarante-cinq ans
plus tard, c’est au
tour de Genève et
de la Riviera lémanique. Son associé,
Frédéric Quennoz,
architecte de formation, a été actif
dans l’architecture
haut de gamme et la
rénovation d’objets
du patrimoine durant plus de 20 ans,
avant de s’associer
à É m ile Garci n
Suisse en 2010. « À
partir du moment
où l’individu se réalise dans une activité quelle qu’elle soit, la question de
l’influence ne se pose pas. Si on pratique notre métier
avec une vision plus profonde, l’inconscient collectif se
charge de porter cette influence. Celle-ci se mesurant
dentialité absolue
e s t le c i me nt de
notre groupe. Surtout lorsque l’on
travaille au niveau
local et international, avec plus de
cent collaborateurs
à travers l’Europe.
Le meilleur vecteur
de transmission de
ces valeurs réside
d a n s l a s a t i s fa c tion de nos clients,
qui ont le plaisir de
vivre dans des maisons que nous leur
avons vendues, tout
en sachant que lors
d’une éventuelle revente, la plus-value
sera au rendez-vous. Notre signature et notre état d’esprit
sont de plus en plus sollicités par nos clients, fidèles sur
plusieurs générations, depuis plus de 50 ans.
Le style est très important, que ce soit dans l’art, le sport
ou la transaction. Il s’acquiert par la durée et l’expérience.
D’ailleurs, aujourd’hui certains clients disent qu’ils ont
« acheté une Garcin » comme s’il s’agissait d’une voiture
de collection ou d’une peinture. Tout autant que le style,
l’innovation est une notion fondamentale, car elle figure
le mouvement perpétuel, la remise en question : la certitude, c’est l’immobilité.
Au jourd ’hui ce r tain s clie n t s
dise n t q u’il s o n t « ache té
u ne G arcin » c omme s’il s’agis s ait
d ’u ne voit ure de c ollec tio n
ou d ’u ne pein t ure
Dans les années à venir, la population urbaine est vouée à
se multiplier et les territoires à se morceler, ce qui donnera
une valeur encore plus rare aux grands domaines. Dans
notre secteur, la vision sera l’hypersélection. Concernant
le volet environnemental, nous n’avons pas attendu que
l’écologie devienne un sujet à la mode. L’art de vivre
des grands domaines que nous vendons intègre déjà les
notions de conservation du patrimoine, d’autosuffisance
énergétique, et de consommation locale ; et cela depuis
plus d’un siècle. » \
aux résultats obtenus. La transmission du savoir-faire
et des connaissances est un travail à cent pour cent, car
ce métier est une remise en question permanente et une
guerre contre la certitude.
Notre profession est basée sur l’écoute et la confidentialité. D’ailleurs Confucius aurait dit : « Si l’homme a deux
oreilles et une bouche, c’est pour écouter deux fois plus
qu’il ne parle ». L’échange d’informations dans la confi98
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Étienne Nagy
Administrateur et Directeur général du groupe Naef
Titulaire d’une licence en
sciences économiques et
d’un master en expertises
immobilières, Étienne Nagy
est actif dans le domaine
de l’immobilier depuis 25
ans. Il est entré chez Naef
comme collaborateur au
service promotion, puis
a dirigé un fonds immobilier et enfin, est devenu
Directeur du secteur des
ventes Naef, jusqu’à sa prise
en charge de la Direction
générale du groupe. « Avoir
de l’influence dans le cadre de la conduite de l’entreprise
signifie porter la responsabilité et la pérennité du groupe,
la responsabilité de l’entreprise vis-à-vis de ses partenaires,
ses collaborateurs et ses clients. Elle suppose un échange,
un partage avec autrui. Il ne s’agit pas de dominer par son
pouvoir d’influence mais de convaincre sur les priorités de
l’entreprise. Par ailleurs, qui dit influence, dit aussi savoir
se nourrir de celle des autres.
de nos valeurs, à savoir sur
la professionnalisation de
notre activité avec toute une
série d’analyses sur nos métiers et le marché, ainsi que
sur les valeurs humaines
et environnementales qui
nous sont propres. À cet effet, nous venons de rédiger
notre premier rapport sur
le développement durable.
Par notre innovation technologique et informatique,
nous avons certainement
contribué à faire évoluer
le métier de régisseur, voire de courtier ou de promoteur,
notamment grâce à nos plateformes internet en ligne, qui
permettent un échange instantané avec l’ensemble de nos
partenaires et clients. L’innovation est la clé du succès de
toute entreprise qui doit savoir évoluer avec son environnement et étudier les nouveaux besoins de ses clients.
Dans le futur, on peut imaginer une concentration des
acteurs dans cette phase de mutation structurelle de nos
métiers, qui nécessite des investissements technologiques
et informatiques importants. Quant au marché, après
L’activité immobilière se complexifie en raison de l’ensemble
des composantes qui la caractérisent, qu’elles soient technologiques, environnementales, économiques, politiques ou
encore juridiques. Pour exercer ce métier, il est nécessaire
d’avoir l’addition de toutes ces connaissances et un patron
d’une entreprise comme la nôtre doit s’avoir s’entourer
de personnes bénéficiant de ces compétences spécifiques.
Dès lors, l’échange et la transmission des connaissances
se fait en permanence à travers la conduite des projets de
l’entreprise.
L’infl ue nce s upp o se un écha n ge ,
u n par tage avec au t rui.
une hausse spectaculaire sur les douze années précédant
la correction du marché de 2012, nous avons atteint une
phase de stabilisation du marché. L’immobilier reste un
produit très attractif qui, par ailleurs, est lié à la bonne
santé économique et politique de notre pays.
Les valeurs que je défends sont principalement celles
de l’effort, du travail bien fait, des réponses pratiques
apportées à nos clients et ceci dans le strict respect des
valeurs éthiques. Par ailleurs, nous sommes une entreprise
familiale où la valorisation de l’humain est primordiale.
Les meilleurs vecteurs de promotion de celles-ci sont assurément nos collaborateurs, qui s’identifient à la culture
et aux projets de l’entreprise. À travers leurs fonctions et
leurs motivations, ils assurent au mieux la satisfaction
de notre clientèle. Nous communiquons beaucoup autour
La touche environnementale est fondamentale aujourd’hui
dans nos secteurs. Le bâtiment représente une empreinte
écologique de l’ordre de 50 % des dépenses d’énergies fossiles.
Nous devons, et sommes en train de révolutionner ce secteur
d’activités pour répondre principalement à l’objectif de
réduire les consommations d’énergie. Et nous ne sommes
qu’à l’aube de cette révolution technologique. » \
99
mark e t infl ue nce inde x / immobilie r
Thierry Naz
Administrateur de Bory & Cie agence immobilière SA
Cela fait 30 ans que
Thierry Naz travaille
dans le domaine immobilier. Il est entré
dans le métier auprès
d’un promoteur, avec
lequel il a collaboré
durant 10 ans et qui
lui a appris toutes les
ficelles du métier, qu’il
a pu mettre en pratique
lors de la crise immobilière des années 90. Cela
fait 20 ans aujourd’hui,
qu’il œuvre au sein de
la régie Bory.
Nous sommes dans un
processus à long terme
de s ucce s sion , donc
d’une forme d’héritage.
Et qui dit héritage, dit
filiation, c’est-à-dire
que seules certaines
personnes dont on a
e nt r e v u le s c a p a c ité s e xce pt ion nel le s ,
auront les codes pour
nous succéder. Pour le
reste, nous n’avons pas
de programme particulier en interne, nous
suivons en fonction des
opportunités des formations proposées par
des organismes reconnus. L’honnêteté et la confiance sont la base de toutes les
relations, qu’elles soient personnelles ou professionnelles.
J’ajouterais que le bon sens et la bonne foi sont également
essentielles à une relation saine. Ce sont des valeurs qui
ont fait leurs preuves depuis bien longtemps, elles sont
fondatrices d’une certaine manière.
« L’influence, c’est donner le bon conseil au
bon moment. Elle découle le plus souvent de l’image que
vous renvoyez, de la confiance que vous avez su cultiver.
Elle peut se faire valoir auprès du marché, d’un client.
Et on ne peut la mesurer qu’à l’aune du résultat, qui
vient infirmer ou confirmer la justesse et la pertinence
de votre conseil : le feedback est en général très rapide.
Pour transmettre son savoir-faire et ses connaissances, je
Bory est une maison que je qualifierais de traditionnelle,
dans le sens où nous sommes dans une ligne conservatrice, mais tout en gardant nos outils à la pointe. Nous
sommes incisifs, mais attachés au respect et à l’éthique,
contrairement à d’autres. Ma présence en première ligne
est indispensable à l’image de notre société, toutefois il
faut qu’elle représente une plus-value et qu’elle soit utilisée à bon escient, autrement elle ne sert à rien, voire
elle peut desservir.
L’ho n nê te té e t
l a c o nfia nce s o n t l a b a se
de t o u te s le s rel atio n s ,
q u’elle s s oie n t pe r s o n nelle s
o u profe s sio n nelle s .
trouve qu’il faut avoir une proximité avec les personnes
envers lesquelles on a envie de transmettre, être dans
une relation d’écoute et de confiance réciproque, et que
cela soit fait avec cœur. En résumé, être sur la même
longueur d’onde et partager des valeurs communes. Cette
transmission se fait avec le temps, et plus on avance dans
ce développement, plus il faut savoir se mettre en retrait,
pour laisser à l’autre la possibilité de s’épanouir, et de
développer sa propre influence.
Notre métier est en train de se complexifier de façon
drastique. Nous avons adapté et continuons de peaufiner
nos outils, de manière à garder la corde d’un virage qui
sera fatal pour certains. D’un point de vue législatif, entre
autres en matière d’environnement, notre profession est
ballotée. Nous sommes acteurs alors que nous devrions
pouvoir participer à l’écriture du scénario. À nous de
reprendre les cartes en main pour avoir du poids quant
aux décisions prises. » \
10 0
c ult ure ( S ) / le pho togr a phiable
Le photographiable
Elena Budnikova
les photographes artistes à se distinguer du
réalisme documentaire. En somme plus les
appareils sont sophistiqués (et donc toujours
plus aptes à retranscrire la réalité), moins les
artistes revendiquent la prétention à la véracité
de leur travail. Comme si la photographie,
pourtant originairement « machine à voir »,
avait besoin de s’affranchir de la réalité pour
pouvoir enfin exister en tant qu’art autonome.
Paradoxe des paradoxes, pour une pratique
qui s’est entièrement érigée sur l’argument
de la représentation la plus fidèle de la réalité.
Boris Sakowitsch, Directeur de la publication
Réfléchir sur le sens de la photographie, c’est
réfléchir sur son rapport au réel, et donc plus
largement sur la notion de photographiable.
S’incluent naturellement dans cette réflexion
la question de la perception humaine (qu’estce qu’une image ?) ainsi que la problématique
technique liée à l’appareil photo (à quel moment la photographie devient un art, et non
plus un acte automatique ?). En effet la photographie possède la particularité d’être le
seul art « technologique » à proprement parler.
Le souci de reproduire le plus exactement
possible le réel existait déjà depuis l’Antiquité :
la camera obscura, sorte de boîte noire permettant de dessiner le plus fidèlement possible
un paysage à partir de sa projection sur une
feuille à travers un trou minuscule, fournissait déjà un moyen fidèle de représentation
pour les peintres. À partir des années 1880
La photographie est un art jeune. Pas seulement parce qu’elle naît au milieu du 19e
siècle : en effet sa légitimité culturelle et
Le pho t o gr a phiable
n ’e s t pa s u ne proprié té
originelle de s cho se s :
il e s t t o u jo ur s d ’ord re
c o nce p t uel
artistique est encore beaucoup plus récente,
et depuis les années 1970 on peut constater
que le perfectionnement de la technique et
du dispositif photographiques conduisent
10 2
Earthrise (1968). Le soir de noël 1968, les astronautes de la mission
Apollo 8, Frank Borman et William Anders, réalisent ce qui allait
devenir un symbole pour toute l’humanité : la première photo
du clair de Terre. En tant qu’objet photographique, la Terre nous
apparaît soudain petite, fragile et vulnérable.
avec le développement de l’instantané il sera
finalement possible de saisir en une fraction
de seconde la physionomie complète d’un objet
ou d’un individu. La concurrence farouche
entre la photographie et la peinture, la grande
sœur rivale, est définitivement consommée :
d’un côté les peintres crient au superficiel en
dénonçant l’incapacité pour la photographie
de saisir intimement la compréhension d’un
c ult ure ( S ) / le pho togr a phiable
sujet intérieur ; de l’autre les photographes
insistent sur l’instantanéité de leur technique,
elle seule véritablement à même de fixer l’air
révélateur, fugitif par nature.
Idée reçu : le photographe prend, le peintre
compose. Dans les années 30, Paul Valéry
dénonçait déjà le manque d’humanisme de la
photographie. Cependant à trop insister sur
l’automaticité de l’enregistrement « on enferme
la photographie dans une fonction de réceptivité passive et neutre, et l’on se condamne à ne
voir en elle qu’un réceptacle, qu’un en-deçà de
la représentation1 ». Aujourd’hui le débat s’est
largement recentré parmi les photographes,
en quête de légitimer leur démarche en tant
qu’activité artistique : la finalité de la photographie n’est pas seulement iconique, automatique et quantitative (dans ce cas-là elle ne
serait qu’une simple banque de données, sans
auteur ni forme), elle est avant tout de nature
indicielle et qualitative, c’est-à-dire capable
de fixer des expressions révélatrices.
La conscience moderne progresse au fur et à
mesure que les techniques dont elle dispose
l'aident à réaliser que la perception, la fabrication et la réception des images référentielles ne sont pas naturelles, mais au contraire
foncièrement tributaires d’appareils, et par
n ou s vivo n s
e t n ou s pe rce vo n s
da n s u ne s or te
de « l ogiq ue pho t o »
conséquent artificielles et historiques. En
effet « la fonction du voir, la mise en lumière
par l’esprit ne peuvent jamais être expliquées
de façon réaliste à partir des choses ni de ce
qui est vu. Car il ne s’agit pas ici de ce qui est
aperçu en elles, mais de la direction originelle
du regard2 ».
En développant la thèse centrale du philosophe tchèque Vilem Flusser3 on pourrait
distinguer 2 grands stades historiques dans
la fabrication de ces images référentielles :
le stade mythologique caractérisé par l’oralité,
des poèmes homériques aux fables du moyenâge où la réalité est contée : ici la perception
Helmut Newton, Self-portrait, with his wife, June, and models, Paris (1981). Dans un travail de
composition non sans rappeler le chef-d’œuvre « Les ménines » du grand peintre espagnol Diego
Vélasquez, Newton nous livre ici un grand moment de composition, sorte de réflexion sur le sens de
la photographie et la place de l’artiste (ici en double retrait, hors-champ et derrière le modèle) ; au
centre de la photo, l’appareil, symbole de l’omniscience, le lieu de la vérité, et donc fatalement lié à la
notion d’auto-réflexivité (le miroir) ; un peu à l’écart et de côté, le spectateur (son épouse), et enfin au
centre de la scène, la beauté ainsi révélée dans son plus simple appareil (le modèle nu, double face).
des images est originairement de nature prophétique. Le deuxième
grand moment est celui des images techniques présentes un peu partout
depuis les temps modernes, notamment avec l’émergence du document
photographique. C’est l’ère du photologique, plus à même de retranscrire l’avènement d’une réalité en accélération toujours croissante, qui
a emboîté le pas au mythologique. Ainsi à proprement parler nous
ne « percevons » plus vraiment les photographies puisqu’elles font
intégralement partie de nos habitudes. Quand nous pensons à notre
enfance, plus qu’à la voix de nos grands-parents et aux livres de contes
qu’ils nous lisaient, nous repensons surtout aux images des instants
photographiés, des photos de nourrissons bien triées dans l’album
de famille, aux images marquantes qui peuplent notre adolescence.
En somme nous vivons et nous percevons dans une sorte de « logique
photo ». Et bien plus que des images figées et enfermées dans un livre
ou dans le passé, la mémoire photologique est une mémoire vivante,
1)André Rouillet, La photographie, Gallimard, Folio, 2005, p.78.
2)Ernst Cassirer, Langage et mythe, Paris, Éditions de Minuit, 1973, p. 20.
3)Vilem Flusser, Pour une philosophie de la photographie, Circé, 1996
10 3
c ult ure ( S ) / le pho togr a phiable
Elena Budnikova, St Petersbourg (2015). Les pêcheurs du matin et le lever du soleil se convoquent mutuellement pour célébrer le réveil de la grande cité de Pierre le Grand. C’est aussi le
temps de l’introspection et le lieu de la méditation, révélés dans le jeu de miroirs des reflets de la ville sur la Neva. À l’inverse de ce qui se passe dans la réalité, l’image photographique,
sorte de surface signifiante, réconcilie les contraires et les éléments disparates en les faisant coexister dans une extrême harmonie.
toujours présente, actualisante et consultable
à chaque instant. Dès lors notre monde réel
ne préexiste plus à ces images, il s'induit avec
et dans les opérations mêmes prévues, en
l'espèce, par le geste de la photographie qui
informe la réalité.
Le photographe peut inventer son monde. Mystère de l’image : dans
la réalité historique, le lever du soleil entraîne le chant du coq5. Dans
le monde des images, les deux sont intimement et magiquement liés,
jusqu’à parfois se confondre. En aliénant les relations de cause à effet,
la réalité photologique donne un éclairage nouveau aux éléments
Or c’est bien l'image créée qui est source de
réalité. L’image est une passerelle vivante
entre le passé et le présent. Car le réel n’est pas
la matière que l’image reproduit, au contraire
c’est le matériau que les images informent
dans le processus d’élaboration graphique4.
Dès lors le photographiable n’est pas une
propriété originelle des choses : il est toujours
d’ordre conceptuel. Et si le photographiable
n’est plus dans le monde, alors il se tient dans
les limites de l’appareil, c’est-à-dire dans son
caractère formellement structurant du réel.
C omme si l a pho t o gr a phie
avait be s oin de s’affr a nchir de l a ré alité
p o ur p o u voir e nfin e x is te r e n ta n t qu’u n
ar t au t o n ome
qui la constituent. L’image agit comme une forme symbolique qui
transcende le réel. Ainsi quand le photographe définit le cadre de sa
photo, il n’effectue jamais une délimitation au sens strict : il s’agit
plutôt d’une limite de débordement comprise comme ouverture au
possible. L’évènement photographique qui s’ensuit (le cliché) est un
acte de « capture des forces », et qui les rend perceptibles. Penser la
10 4
c ult ure ( S ) / le pho togr a phiable
Daryoush Assadi, Sans titre (2005).
4)Voir le bel article de Michel Guérin, « Du phénoménolo gique au photologique », in Le photographiable, PUP, 2013
5)Vilem Flusser, Pour une philosophie de la photographie,
Circé, 1996, p. 11
Gyula Halasz, dit Brassaï, Linge, Megève (1946). Le leitmotiv du linge qui sèche, conjugué à un lieu en
contre-champ, devient le révélateur intime d'une condition sociale. Ici la chemise de paysan dans une vallée
des Alpes parle ainsi de manière pudique mais révélatrice du quotidien de leurs possesseurs.
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PHILANTHROPIE(S)
CULTURE(S)
JAPON : CAP SUR
LE SOLEIL LEVANT
ANOUK
FOUNDATION :
POUR QUE LES MURS
S’ENSOLEILLENT
SIGNIFICATIONS
DU RIRE
INDEX
TIBÈRE ADLER,
DIRECTEUR ROMAND
D’AVENIR SUISSE
MARCHÉ DE L’ART
ALBERTO
GIACOMETTI :
LA SCULPTURE
AU PLUS HAUT
ÉDUCATION :
15 MENTORS
D’INFLUENCE
TE
AN
CE
AN
IS
F IN
DU E
SÉ RÊ M
IE T
A S L’E X
À
10 5
E
L’art plus réel que la vie ? Dans un certain sens, puisque la photographie
détermine une manière de voir les choses et non pas une vision du
monde. Les peintres du Quattrocento avaient inventé la perspective
dans ce dessein, car, pour rationaliser l’espace projeté, il avait bien
fallu au préalable décider que le monde devrait dorénavant se donner dans une autre vue. Chaque art et chaque période de l’art sont
soutenus et structurés par un ou des appareils techniques. D’ailleurs
les historiens parlent bien « d’appareil perspectif » quand ils évoquent
l’innovation technique à l’œuvre dans la peinture de la renaissance.
Ainsi pourquoi, dans un monde régi par les images, serait-il si incongru que l’appareil photographique ait pris le pas sur le pinceau ? Et à
ceux qui penseraient que le savoir-cadrer auraient remplacé tout le
savoir-faire de l'artiste, rappelons-leur que la retouche digitale relève
finalement autant de l’artisanat que la palette du peintre. \
LE MÉDIA SUISSE DES HIGH NET
WORTH INDIVIDUALS
UN
photographie en termes de forces signifie d’emblée penser le multiple,
puisque toute force est dans un rapport essentiel avec une autre force.
Dans son célèbre livre sur la photographie (La chambre claire), Roland
Barthes souligne que ce n’est plus le « notable » qui est photographié,
mais ce qui est photographié devient notable.
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c ult ure ( S ) / marché de l’ar t
Une cote à l’américaine,
le cas
Jackson Pollock
par artmarketinsight
Artprice .com
New-York ne rivalise avec
aucune autre ville du monde
pour défendre ses artistes et
en faire de véritables stars
du marché de l’art : Andy
Warhol et Jeff Koons sont certainement les artistes les
plus emblématiques de la puissance du marché new-yorkais.
Leur travail respectif séduit
largement, d’autant plus largement qu’il est figuratif et
coloré, donc accessible au plus
grand nombre. Mais il en est
de même pour le grand abstrait contemporain Jackson
Pollock (1912-1956) qui incarne
les prémices de l’art contemporain américain en tant
que tel et qui s’est imposé
comme une figure mythique
de l’art et du marché.
Jackson Pollock, Number 19 (1948)
10 6
c ult ure ( S ) / marché de l’ar t
Jackson Pollock, Number 5 (1948)
Jackson Pollock est en effet l’un des acteurs majeurs de l’Expressionnisme abstrait, un mouvement né officiellement en 1948, considéré
depuis comme le premier grand mouvement artistique des États-Unis.
Au sein de ce mouvement, Pollock doit sa célébrité à l’invention d’une
nouvelle façon de peindre. Il s’est en effet imposé avec des compositions
abstraites impulsives, des drippings (to drip : égoutter), constituées
de coulures réalisées à l’aide d’un bâton ou directement avec le pot
de peinture préalablement percé de trous. Ses toiles sont autant de
Sur le marché de s e nchè re s ,
le pri x de s œ u vre s de P oll ock ne
ce s se de grimpe r car il re s te t rè s
pe u d ’œ u vre s e n circ ul atio n
territoires sur lesquels s’expriment une intention et par là même une
force inconsciente. Expliquant son travail, il déclare « J’utilise une
peinture liquide, très fluide (…) les pinceaux, je m’en sers comme des
baguettes – le pinceau ne touche pas la surface de la toile : il reste
juste au-dessus. J’ai une idée globale de ce que je fais et de ce qui en
résultera. C’est le résultat qui compte ». Or, l’obtention d’un résultat
satisfaisant est pour Pollock un parcours du combattant car l’artiste
a des démons... Buveur invétéré (un abus par ailleurs séduisant pour
10 7
la culture populaire à l’époque de la prohibition des années 20-30), Pollock oscillait
entre des périodes d’ivresse et de prolifération
créatrice. Cette addiction le conduisit de psychiatre en psychiatre, tandis que les analyses
lui ont parfois permis de comprendre certains rouages inconscients et de nourrir son
œuvre. Pollock a l’ivresse de la peinture, dans
une gestualité et un engagement physique
et psychique proche du chamanisme. C’est
cette puissance qui va séduire les critiques
d’art et les collectionneurs de son temps. Il
profite aussi, dès la fin des années 40, d’un
engagement ferme de la part du gouvernement américain et de riches mécènes, lesquels
souhaitent faire entendre l’art américain face
au triomphe multiséculaire de l’art européen.
Une première exposition itinérante, réalisée
avec l’aide de la Fairfield Foundation, et intitulée « La nouvelle peinture américaine » fit
découvrir cette peinture neuve en 1958 au
Museum of Modern Art (MoMA) de NewYork et outre-Manche pour rejoindre la Tate
Gallery (17 peintres sont sélectionnés dont
Jackson Pollock).
c ult ure ( S ) / marché de l’ar t
Jackson Pollock en train d’expérimenter sa technique du dripping
Pollock est alors accueilli comme le plus
grand peintre américain vivant et suscite un
enthousiasme irrépressible dans un monde
de l’art en quête d’authenticité. L’enthousiasme se confirme chaque année en salles
des ventes car sa signature est toujours l’une
des plus convoitées.
Une course aux chefs-d’œuvre
Pollock fait aujourd’hui partie du cénacle très
fermé des peintres les plus chers du monde...
Une œuvre défrayait la chronique en 2006
en devenant la plus chère (connue) du monde
après une transaction privée. La toile en question, intitulée Number 5 et réalisée en 1948,
changeait de mains pour 140 m$. Or, le marché haut de gamme n’a cessé de battre des
records depuis 2006. La plus haute transaction
connue de gré à gré pour une œuvre d’art
s’élève aujourd’hui à 300 m$, payés pour la
toile Nafea faa ipoipo (Q uand te maries-tu ?)
de Gauguin, en février dernier.
Sur le marché des enchères, le prix des œuvres de Pollock ne cesse de
grimper car il reste très peu d’oeuvres en circulation. Aucun Pollock
n’a encore atteint le seuil des 100 m$ en salles mais ce palier n’est
qu’une question d’opportunité, l’opportunité d’obtenir à la vente
l’œuvre phare que recherchent les grandes maisons. Son record actuel
en salles fut atteint en 2013 avec Number 19, une toile de 1948 estimée
35 m$ et finalement cédée pour 52 m$ au marteau (soit 58,3 m$ frais
inclus, Christie’s)… Dès lors que l’œuvre est puissante, les estimations
ne veulent plus dire grand-chose. Quelques-uns sont près à mettre le
prix fort. Number 19 s’est évidemment vendue à New-York, où se joue
presque tout le marché de Pollock. Les derniers drippings apparus en
salles se sont tous vendus entre 3 et 16 millions de dollars. Reste-t-il
des œuvres abordables ? La réponse est oui. Il faut compter entre 5000
et 10 000$ pour les estampes et il faut surtout courir après tant elles
sont rares, mais leurs prix ne flambent pas trop… Une sérigraphie
sur 50 exemplaires portant le cachet de la succession Pollock s’est
par exemple vendue l’équivalent de 4400$ en juin dernier à Cologne
(œuvre sans titre vendue chez Van Ham Kunstauktionen le 3 juin 2015).
L’achat de cette valeur sûre du marché, portée aux nues par les collectionneurs et les musées du monde entier, y compris en Asie, est, à
l’image de son œuvre, un véritable combat. \
10 8
c ult ure ( S ) / marché de l’ar t
évolution des ventes aux enchères publiques
© A r t p r ice . c o m
Année
Produit des ventes en $
Lots vendus
2005
965’075
9
M e il l e u r e A d j u d i c at i o n e n $
280’000
2006
4 ’ 8 5 1’ 8 0 7
13
1’ 9 0 0 ’ 0 0 0
2007
535’500
6
380’000
2008
362’592
4
300’000
2009
3 ’ 0 14 ’ 10 0
10
2’500’000
2 0 10
14 ’ 3 4 0 ’ 116
9
7’750’000
2 0 11
4’70 2’6 0 4
15
1’ 5 0 0 ’ 0 0 0
2 0 12
5 6 ’ 6 13 ’ 3 4 3
9
36’000’000
2 0 13
10 0 ’ 7 8 9 ’ 18 9
10
52’000’000
2 0 14
20’757’940
7
10 ’ 0 0 0 ’ 0 0 0
Répartition par gammes de prix (2005-2014)
© A r t p r ice . c o m
g a mm e d e p r i x e n $
Produit des ventes en $
Lots vendus
0 — 5’000
48’879
16
5’000 — 50’000
623’805
34
50’000 — 500’000
4’62 9’5 82
22
> 500’000
2 0 1’ 6 3 0 ’ 0 0 0
20
Top 5 prix d’adjudication
© A r t p r ice . c o m
ŒUvre
Prix au marteau en $
Num b e r 19 ( 19 4 8 )
52’000’000
P r i x av e c f r a i s e n $
58’363’750
Num b e r 4 ( 19 5 1 )
36’000’000
4 0 ’4 0 2 ’ 5 0 0
Num b e r 16 ( 19 4 9 )
29’000’000
32’645’000
Num b e r 2 8 ( 19 5 1 )
20’500’000
23’042’500
T h e B l u e U n c o n s c i o u s ( 19 4 6 )
18 ’ 5 0 0 ’ 0 0 0
20’885’000
Num b e r 12 ( 19 5 0 )
16 ’ 10 0 ’ 0 0 0
18 ’ 2 8 2 ’ 0 0 0
Num b e r 12 ( 19 4 9 )
10 ’4 0 0 ’ 0 0 0
11’ 6 5 5 ’ 5 0 0
Num b e r 5 ( 19 5 1 ) ; E l e g a n t L a d y ( 19 5 1 )
10 ’ 0 0 0 ’ 0 0 0
11’ 3 6 5 ’ 0 0 0
Num b e r 12 A ( 19 4 8 ) ; Y e l l o w, G r ay B l a c k ( 19 4 8 )
7’750’000
8’762’500
B l a c k a n d W h i t e Pa i n t i n g ( 19 5 2 )
7’500’000
8’565’000
10 9
C ULT URE ( S ) / PHILANTHROPIE ( S )
Elena Budnikova
SAUVER DES VIES,
LA VOCATION DES « SAUVETEURS
SANS FRONTIÈRES »
Arié Lévy, Président de SSF
110
C ULT URE ( S ) / PHILANTHROPIE ( S )
Cela fait plus de 20 ans que je me rends au Népal et c’est
sans doute parce que, comme des centaines de milliers
d’autres, j’aime ce pays. Les ravages qu’a causé la série de
tremblements de terre des mois d’avril et mai derniers
(plus de 8000 morts et au moins le double de blessés, outre
plus de 700 disparus), ne font plus la une des journaux.
Jusqu’aux prochaines graves secousses.
Comme tous les amoureux de cet ancien royaume, encore enlisé dans une transition politique épuisante avec le maoïsme,
j’ai bien sûr voulu tout de suite aider les Népalais du mieux
que je pouvais, et j’ai commencé à lister les programmes les
plus crédibles, notamment parmi ceux que je connais déjà.
En dehors des grandes structures, comme la Croix Rouge
Internationale et les aides d’États, quantité d’ONG sont
déjà présentes au Népal depuis des décennies et y drainent
des soutiens principalement pour l’alimentation, la santé
et l’éducation. En recherchant une information qui me
manquait dans ce dernier domaine, ma requête internet
m’a délivré des images de ces frontons d’écoles typiques,
ornés d’une étoile à six branches, la Sat-kona. Sa présence
étonne toujours les nouveaux venus, pensant y voir quelque
succursale d’ONG israéliennes, avant de comprendre que
c’est un emblème national que ces deux pays partagent.
Cartons de secours d’urgence israéliens débarqués au Népal
Le Népal nous raconterait-il une autre histoire que celle
des clivages irrémédiables existant depuis la création de
l’État d’Israël ? Il semble que oui, comme si cette étoile à
six branches était ici chez elle. Alors j’ai voulu en savoir
plus, profitant du passage à Genève d’une équipe de
sauveteurs franco-israéliens, revenant tout juste de leur
mission au Népal et dirigée par Arié Lévy, le président de
Sauveteurs Sans Frontières, lequel a bien voulu répondre
à mes questions.
Et puis, au fil des photos, une des étoiles qui apparaît sur un
carton de secours est accompagnée de quelques mots d’hébreu.
Oui c’est bien une équipe israélienne de secours qui est
là cette fois. Vérification faite, l’armée israélienne a bien
installé un hôpital de campagne, tandis que des ONG,
portant une étoile rouge, népalaise à s’y méprendre, ont
déjà été déployées sur le terrain.
Vous revenez du Népal avec quel sentiment ?
C’était la première fois qu’une équipe de SSF se rendait au
Népal. Nous avons tous été impressionnés par l’incroyable
résistance, et toute la douceur à la fois, de la population
face à une catastrophe d’une telle ampleur. Le sourire était
toujours là, même dans les pires souffrances, tout comme
l’ardeur des solidarités ou les expressions de reconnaissance
d’une rare pureté.
Les statistiques de l’ONU indiquent qu’Israël a fourni le
plus nombreux personnel médical, dès les premières heures.
Quantité d’images les montrent travaillant en parfaite
intelligence avec d’autres organismes de secours occidentaux et asiatiques.
Emblèmes d’écoles, d’universités népalaises et de l’armée népalaise
111
C ULT URE ( S ) / PHILANTHROPIE ( S )
Comment se composent vos équipes ?
Qu’avez-pris avec vous ?
SSF rassemble des médecins, des ophtalmologues, des
dentistes, des infirmiers, des secouristes, des logisticiens
ou encore des psychologues, provenant du monde entier et
prêts à intervenir à tout moment. Chacun est muni d’un
beeper qui ne le quitte pas et sait exactement ce qu’il doit
faire. Par ailleurs, nous sommes des bénévoles à 100 % qui
exerçons tous une activité professionnelle en parallèle.
Tout notre matériel est prêt au domicile des volontaires
et dans nos entrepôts, et nous savons exactement quels
types de traumatismes et blessures nous allons rencontrer
dans une telle situation. Alors nous avons emporté de
grandes quantités de pansements, plâtres, médicaments
antidouleur, antibiotiques, etc. Nous anticipons aussi
l’absence d’électricité avec des groupes électrogènes, le
climat, les conditions de déplacements sur place, d’abris,
de ravitaillement, de communication, etc.
Quelle est la spécificité de votre travail ?
Comment se sont déroulées vos journées au Népal ?
C’est très simple, nous savons que plus on intervient tôt,
plus les chances de sauver des vies sont grandes. Cela se
calcule parfois en minutes lors de catastrophes naturelles
ou d’attentats et en heures pour un déplacement aussi
éloigné que le Népal. Notre première spécificité, c’est
donc la rapidité d’intervention et la précision d’accès aux
personnes en détresse, selon les normes internationales
SAR (Search and Rescue). Notre seconde spécificité,
c’est de servir de relais. Nous stabilisons l’état médical
du plus de victimes possibles, pour qu’elles survivent le
temps que la grosse logistique des ONG et des secours
À Katmandou, dès notre arrivée, nous avons pu prendre
en charge des prématurés dont les couveuses d’un hôpital
excentré n’étaient plus alimentées en électricité. Puis nous
sommes intervenus à l’hôpital de Bir, au centre de la capitale,
dont nous avons transformé l’entrée, déjà surchargée de
blessés à même le sol, en salle de triage. Nous y avons pris
N o u s s tabilis o n s l’é tat
mé dical d u pl u s de vic time s
p o s sible s , p o ur q u’elle s s urvive n t
le te mp s q ue le s sec o ur s
se me t te n t e n pl ace
d’États se mette en place, quelquefois un ou plusieurs
jours après. Par ailleurs, nous sommes entraînés à évaluer les différents degrés de gravité afin, d’un côté de
parer au plus urgent, y compris en soutien à des équipes
médicales locales rapidement débordées, et de l’autre,
afin d’accélérer le travail de ceux qui prendront le relais
après nous. Il nous arrive aussi de commencer à fédérer
sur place des personnes qualifiées (secouristes, interprètes,
guides, etc.). Il faut comprendre que dans le prolongement
immédiat d’un séisme aussi dévastateur, tout s’arrête, la
désorganisation s’installe à grande vitesse, notre rôle est
donc aussi de créer des repères dans cette émergence de
chaos et de stupeur.
Sauveteurs népalais et israéliens
en charge des dizaines de victimes. Les ONG arrivant, nous
sommes partis là où elles avaient encore du mal à parvenir,
en commençant par Bhaktapur, une ville ravagée, à moins
de 20 km à l’est de Katmandou. Après quoi nous sommes
montés plus au nord, à la demande des autorités, dans la
région de Melamchi. Nous y avons monté un dispensaire
de campagne pour prendre en charge des dizaines de blessés
amenés par petits hélicoptères, qui étaient restés sans aucun
soin pendant les 4 jours écoulés depuis le séisme. Lorsque le
gros hélico de transport MI-17 de l’armée népalaise arriva
Combien de temps vous a-t-il fallu pour arriver ?
Le premier séisme a eu lieu le samedi 25 avril. Une première
équipe s’est envolée par le premier avion de ligne disponible,
pour arriver sur place dans les 24 heures du séisme. Puis une
seconde équipe nous a rejoint une dizaine d’heures plus tard.
112
C ULT URE ( S ) / PHILANTHROPIE ( S )
pour rapatrier les cas les plus graves vers Katmandou, nous
étions en mesure de faire les choix des blessés à évacuer
en priorité. Puis nous sommes allés dans des villages plus
reculés, accessibles uniquement à pied, avec notre matériel
sur le dos, escortés et aidés par un groupe d’une vingtaine
de militaires népalais. Nous avons pu y soigner près de
Nous y formons des volontaires aux techniques urgentistes
qui sont les nôtres, mais en respectant toujours strictement
les traditions locales. Par exemple, c’est nous qui avons formé
les équipes du Croissant-Rouge palestinien. En plus de la
formation, nous fournissons ces antennes en kits de secours
et en kits médicaux et de réanimation, que nous finançons
grâce à des appels aux dons.
s a n s auc u n s oin
pe nda n t le s 4 jo ur s éc o ulé s
de puis le séisme .
200 blessés laissés pour compte. Nous avons terminé notre
mission par une opération de ravitaillement de plus de 600
familles, qui avaient tout perdu pendant le séisme. Après
quoi nous sommes rentrés chez nous reprendre nos activités,
avec cette satisfaction immense d’avoir sauvé des vies et
soulagé autant de souffrance que nous l’avons pu.
Quelle est la suite que vous avez donnée à votre mission
au Népal ?
Elle n’est pas terminée. Nous avons laissé sur place tout
notre matériel et deux membres de l’équipe (un infirmier et
un logisticien) pour qu’ils continuent le travail et puissent
immédiatement évaluer les besoins en cas de reprise des
secousses. Ensuite nous avons décidé d’ouvrir une antenne
locale permanente, tellement les besoins sont importants.
Kit médical SSF
Combien faut-il de temps pour acquérir vos savoir-faire ?
Environ 60 heures pour le premier niveau de sauveteurs,
avec le kit correspondant, un peu plus pour les médecins
et leur matériel propre. Depuis 2012, nous formons une
centaine de sauveteurs par an. Nous comptons aujourd’hui
plus de 600 volontaires.
Et ces kits, qu’ont-ils de particulier ?
Leur composition et leur maniement ont été mis au point
pour une efficacité de pointe, notamment à partir de notre
expérience d’un terrain très complexe. Par ailleurs, chaque kit
est parrainé par un ou plusieurs donateurs et porte l’identifiant
correspondant, ce qui permet de donner des nouvelles sur
l’usage des kits aux parrains en temps réel, en particulier sur
les accomplissements qu’il a permis. En moyenne, avec un kit
de survie, il est possible de secourir 180 personnes, c’est-à-dire
au coût que représente le parrainage d’un kit de base (1800 €),
10 € permettent de contribuer à sauver une vie. \
Soins d’urgence des SSF à Melamchi
C’est la première fois que vous ouvrez une antenne
permanente à l’étranger ?
Non, nous en avons déjà ouvert plus d’une dizaine, notamment
au Mali, au Kenya, au Sri Lanka, en Birmanie, à Haïti, aux
Philippines, ou encore auprès des réfugiés chrétiens d’Irak.
Propos recueillis par Arnaud Dotézac.
113
hé d o nisme ( S ) / jolis fl ac o n s
sud de la france :
8 « vins d’été »
à l’honneur
3. Domaine La Rose des Vents
Rosé 2014
Type : Vin rosé (Grenage, cinsault, syrah)
La robe de ce rosé évoque le marbre rose, le nez exprime la
pêche, la fraise et l’abricot. La bouche est fraîche, ronde et
gourmande, et s’étire avec élégance sur des notes de fruits
frais. Il se déguste volontiers en apéritif, ou lors d’un barbecue accompagné de salades composées.
4. Domaine Puech-Haut
Tête de Bélier 2013
Type : Vin blanc (Roussanne,
Marsanne, Grenache blanc)
La Tête de Bélier a une robe jaune dorée très brillante. C’est un
vin plein de charme, à la fois opulent et élégant avec une longeur en bouche. Le nez est à la fois éclatant de fruits exotiques
et d’abricot, et chaleureux avec des notes de chocolat blanc et
de pêche de vigne. La bouche est équilibrée et pleine, sur des
notes à la fois fraîches en attaque, qui évoquent les agrumes,
et plus ronde en finale, rappelant la douceur du miel d’acacias.
4.
5. Domaine cuilleron
3.
5.
Condrieu la Petite côte 2013
Type : Vin blanc (Viognier)
Issu de vignes exposées du Sud/Sud-Est, ce Condrieu est
élevé 9 mois en barriques sur lies, avec les levures naturelles.
Le nez plaisant est intense, avec des arômes de fruits mûrs
à souhait, d’abricot confit, de pêche et de notes miellées,
réveillées par quelques zestes d’agrumes. La bouche est
séduisante par sa rondeur et sa fraîcheur citronnée en final.
L’ensemble est équilibré et harmonieux. Il réhaussera tout
naturellement les carpaccios de poissons délicats.
1.Château La Tour de l’Évêque
Pétale de rose 2014
Type : Vin rosé
(Grenache, Cinsault, Mourvèdre)
Le vignoble du Château de la Tour de l’Évêque s’étend près
de Pierrefeu, dans le Var. Ce rosé aux reflets cristallins
développe un nez très fruité, avec une bouche ample et
fine à la fois. Il donne de la vivacité aux apéritifs et s’allie
agréablement aux viandes blanches et poissons, ainsi qu’à
la gastronomie asiatique.
2.Château Minuty
Rose et Or 2014
Type : Vin rosé (Grenache, Syrah)
Rose et Or de Minuty est un rosé vibrant d’expression,
concentré d’arômes gourmands d’une fraîcheur intense
et dont la bouche laisse place à l’expression des fruits. Il
est le compagnon idéal de la cuisine méditerranéenne :
légumes en anchoïade, tarte fine aux sardines et pesto. Il
peut se garder durant 3 ans.
1.
114
2.
hé d o nisme ( S ) / jolis fl ac o n s
6. Domaine Ott
« Clos Mireille » Blanc de blancs 2013
Type : Vin blanc (Sémillon,
Ugni blanc, Rolle)
Issu d’un terroir très ancien qui s’étend jusqu’en bord de mer,
ce Blanc de Blancs a tous les atouts d’un vin d’exception. Un
bouquet bien développé, complexe et distingué, où s’entremêlent des effluves de fruits à noyau, d’épices et de fleurs
sauvages. Il est sec, souple et élégant en bouche. Il se sert à
l’apéritif ou en alliance avec les poissons grillés, la soupe de
poisson, les crustacés et les coquillages.
La suggestion
de nos spécialistes:
Corbières Boutenac
Solus Château
de Caraguilhes bio
Coop Naturaplan, 75 cl
19.95
6.
7.
8.
7.Mas de Daumas Gassac
Vin de Pays de l’Hérault 2012
Type : Vin rouge (cabernet sauvignon)
Un Français méridional
en qualité bio.
Ce vin est constitué à 80 % de cabernet sauvignon, associé à
une collection de 10 cépages différents. La robe rubis pourpre
dévoile des arômes de petits fruits noirs. La bouche s’avère
fruitée et savoureuse, avec une belle finale. Il accompagne
agréablement un tajine de mouton, une pintade rôtie ou encore
un gigot d’agneau au thym.
Ce vin rouge produit selon
des méthodes biologiques
fera des merveilles avec des
grillades ou des fromages
corsés. D’autres suggestions
de vins vous attendent sur
mondovino.ch
8. Domaine Gérin
Côte-Rôtie « Champin le Seigneur » 2012
Type : Vin rouge (Syrah et Viognier)
Coop ne vend pas d’alcool aux jeunes de moins de
18 ans. En vente dans les grands supermarchés Coop et
sur www.mondovino.ch
Le mélange de Syrah et de Viognier apporte une touche de
finesse au vin et dégage des arômes de fruits noirs macérés, de
cacao, de café et d’épices. La robe est soutenue avec des nuances
grenat. Le palais est équilibré sur des tanins souples et soyeux.
Quelques années de garde permettront à ce millésime de se
révéler entièrement ! C’est le parfait partenaire d’une côte de
bœuf grillée au barbecue.
115
50_300_86x225_Coop_Mondovino_Market_f 1
09.06.15 11:18
pho to GRA PHE d u mois
Maia Flore
Maia Flore
Maia Flore est la co-lauréate 2015 du Prix HSBC
pour la Photographie, avec Guillaume Martial.
Voici comment François Cheval, conseiller artistique de cette édition 2015, évoque mieux que
quiconque, les qualités de Maia Flore.
situations poétiques et métaphoriques. Cette
photographie relève de la poésie élisabéthaine !
Le travail est fortement imprégné des caractéristiques de son anatomie, ces longs cheveux
roux, cette peau si blanche, tout en retenue et
rejetant l’exhibition. Ce corps est un pont, un
arbre, un objet. Il fusionne avec le monde, il a
une respiration, comme une langue qui divague. »
« Maia Flore croit aux vertus d’une photographie enfin débarrassée de la réalité crue. Le réel
n’a d’intérêt que transfiguré. Avec sa personne
comme modèle, ou plutôt comme sujet agissant,
elle s’amuse à mettre en scène d’improbables
116
Zum Wohl
Santé !
Cheers
Les Vins du Valais.
Les goûter, c’est les aimer.
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