Autour du film "Indigènes"
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Autour du film "Indigènes"
Autour d"Indigènes" Sommaire de la page : Dossier documentaire réalisé par Mme Jouanneau : Entretien avec l'historien Belkacem Recham réalisé par Rosa Moussaoui et paru dans l'Humanité du 27 septembre 2006 DATES-CLÉS - Carte Ces soldats venus du Sud pour libérer la France par Par Hassane Zerrouky, journaliste algérien au "Matin" Sélection de sites : Sur le film Sur l'histoire de ces tirailleurs indigènes Bibliographie les documents sur ce sujet présents au CDI Le film Date de sortie : 27 Septembre 2006 Réalisé par Rachid Bouchareb.. Avec Jamel Debbouze, Samy Naceri, Roschdy Zem Film français. Genre : Guerre, Historique, Drame Durée : 2h 8min. Année de production : 2005 Distribué par Mars Distribution L'histoire ou synopsis 1943. Ils n'avaient encore jamais foulé le sol français, mais parce que c'est la guerre, Saïd, Abdelkader, Messaoud et Yassir vont s'engager comme 130 000 autres "Indigènes" dans l'armée française pour libérer "la mère patrie" de l'ennemi nazi. Ces héros que l'histoire a oubliés vaincront en Italie, en Provence, et dans les Vosges, avant de se retrouver seuls à défendre un village alsacien contre un bataillon allemand. Entretien avec l'historien Belkacem Recham réalisé par Rosa Moussaoui et paru dans l'Humanité du 27 septembre 2006 Dès 1830, la France a levé des troupes dans ses colonies. L’historien Belkacem Recham revient sur la contribution de ces hommes durant la Seconde Guerre mondiale. Belkacem Recham est historien, chargé de cours à l’université Marc-Bloch de Strasbourg. Il est également l’auteur des Musulmans algériens dans l’armée française 1919-1945, Éditions L’Harmattan, 1996. Pourquoi l’armée française recrute-t-elle, très tôt, des soldats issus des colonies ? Belkacem Recham: Dès 1830, la France lève des troupes autochtones pour la seconder dans la conquête de territoires en Algérie. Des officiers français complètent alors les rangs de l’armée française par un recrutement local, avec des hommes bénéficiant d’une parfaite connaissance du terrain et des populations. Différents corps auxiliaires sont formés jusqu’en 1841, date à laquelle des ordonnances royales créent les régiments de tirailleurs et de spahis, dont le nombre ne cesse de croître à mesure que la conquête progresse vers l’intérieur du pays. Ce n’est qu’à partir de 1870, puis à l’occasion des Première et Seconde Guerres mondiales, que ces contingents sont utilisés pour défendre la France métropolitaine. Compte tenu des besoins, la France est obligée, à ces occasions, de recourir au recrutement au-delà de la Méditerranée. Après la défaite de 1940, que deviennent ces soldats indigènes ? Certains rejoignent-ils la Résistance? Belkacem Recham. Avec l’aide de résistants français, certains s’évadent des camps de prisonniers qui leur sont réservés en zone occupée et entrent dans la clandestinité. Mais il est vrai que les résistants originaires des colonies sont davantage issus de l’élite intellectuelle résidant en France. Les soldats, eux, connaissent le même sort que le reste de l’armée française : ils sont tués lors des combats ou faits prisonniers. Lorsque cette armée est reconstituée en 1942, après le débarquement allié à Alger, quel est, en son sein, le statut des indigènes mobilisés pour libérer la France ? Belkacem Recham. Le statut des soldats indigènes est régi par plusieurs textes, selon qu’ils viennent d’Algérie, du Maroc, de Tunisie ou d’Afrique noire. Mais ces textes ont en commun d’entériner une triple discrimination. Après plus d’un siècle d’existence des régiments de tirailleurs et de spahis, les soldes des indigènes sont restées nettement inférieures à celles des Européens. Il faut attendre le mois d’août 1943 pour que le général de Gaulle décide d’établir la parité des soldes entre Européens et indigènes. Autre discrimination : les indigènes reçoivent très peu de commandement, du fait de la méfiance de l’état-major vis-à-vis des cadres musulmans, pourtant très loyaux. Du point de vue de l’avancement, enfin, jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les soldats indigènes ne peuvent dépasser le grade de capitaine, promotion qui n’intervient, le plus souvent, qu’à la veille de la retraite. Cet avancement est en outre très lent. Alors que deux ans suffisent aux Européens pour passer du grade de sous-lieutenant à celui de lieutenant, il en faut jusqu’à six pour un soldat indigène. Ces discriminations subsistent jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Avec la guerre d’Indochine, la France consent à promouvoir quelques rares officiers supérieurs. Mais ils se comptent sur les doigts de la main. Cette expérience du combat pour la libération de la France renforce-t-elle chez les indigènes l’aspiration à l’indépendance ? Belkacem Recham. Dans le cas de l’Algérie, c’est une évidence. On peut citer des cas illustres de soldats qui ont participé à la libération de la France et sont ensuite devenus des cadres de l’Armée de libération nationale : Ben Bella, Boudiaf, Krim Belkacem et bien d’autres. En fait, la majorité des cadres de l’ALN sont issus de l’armée française. Leur participation à la libération de la France sert de déclencheur, d’accélérateur, dans la prise en charge du mouvement national algérien. Cette expérience, d’une certaine manière, leur ouvre les yeux sur la situation qui prévaut en Algérie. Une prise de conscience attisée par les événements dramatiques qui embrasent, à partir du 8 mai 1945, la région de Sétif et Guelma. Entretien réalisé par Rosa Moussaoui et paru dans l'Humanité du 27 septembre 2006 DATES-CLÉS 13 mai 1940 : Les Allemands percent le front français à Sedan 18 juin 1940 : Appel du Général de Gaulle à continuer le combat contre l’ennemi 22 juin 1940 : Signature de l’Armistice par le Maréchal Pétain 8 novembre 1942 : Débarquement allié en Afrique du Nord (Opération Torch) Été 1943 : 233 000 «Nord - Africains» sont mobilisés. Le Corps Expéditionnaire Français (CEF) compte 700 000 hommes et femmes. Février - mai 1943 : Campagne de Tunisie 10 juillet 1943 : Débarquement allié en Sicile (Opération Husky) Septembre 1943 - juin 1944 : Campagne d’Italie. Le CEF d’Italie compte 130 000 hommes Février - mai 1944 : Bataille de Monte Cassino 5 juin 1944 : Entrée à Rome du Général Clark et du Général Juin 15 août 1944 : Débarquement allié en Provence sous le commandement du Général De Lattre de Tassigny (Opération Anvil-Dragoon) Fin août 1944 : Libération de Toulon et Marseille Septembre - octobre 1944 : Bataille des Vosges 25 novembre 1944 : Libération de Belfort suite à de violents combats 16 décembre 1944 : Déclenchement de l’offensive allemande des Ardennes 8 février 1945 : Le Général De Lattre de Tassigny annonce la libération de l’Alsace 8 mai 1945 : Capitulation de l’Allemagne. Plus de 50 000 soldats «indigènes» ont été tués, blessés ou ont disparu depuis 1942 26 décembre 1959 : Loi de «Cristallisation» qui gèle les pensions des anciens combattants des colonies 30 novembre 2001 : En 1996, Amadou Diop, ancien sergent-chef sénégalais, porte plainte contre le gouvernement français. Le Conseil d’État lui donne raison en 2001... à titre posthume. Quoiqu’il en soit, cette Loi de Cristallisation doit être révisée et les anciens combattants indigènes remboursés. Les gouvernements successifs ont pourtant repoussé ces paiements ou décidé de les indexer sur le coût de la vie dans le pays d’origine, ce qui revient à les dévaloriser à nouveau. Septembre 2006: le président de la République française propose en conseil des ministres le relèvement des pensions des anciens combattants de l'armée française originaires des anciennes colonies d'Afrique et d'Asie. Ces soldats venus du Sud pour libérer la France Indigènes de Rachid Bouchareb (…) est le premier film à mettre en scène ces soldats maghrébins et africains qui se sont battus pour la libération de l’Europe du joug nazi (1). Jusque-là, les films concernant cette guerre (il y en a eu des dizaines) ne montraient à voir que l’héroïsme des soldats américains, voire européens. Le soldat maghrébin était invisible. Il n’existait pas. Pas plus d’ailleurs que le soldat africain. Le recrutement de ces hommes était fonction du statut du pays d’origine. En Algérie, territoire français à part entière, organisé en trois départements, où la citoyenneté leur était refusée (il fallait renoncer à sa religion pour être français à part entière), la conscription était obligatoire pour tout jeune Algérien ayant vingt ans. Les premiers régiments de tirailleurs algériens ont été créés en 1841 et envoyés en Crimée en 1854, avant de prendre part à la Première Guerre mondiale. En 1942, lors du débarquement américain à Alger, ils s’engagent par milliers non seulement pour libérer la France mais pour que l’Algérie retrouve son indépendance (2). Au Maroc, pays sous protectorat, c’était le volontariat qui primait : les engagés restaient fidèles au roi. Les premiers régiments marocains ont été mis en place en 1912. En Afrique noire, comme le relate l’historien camerounais Théodore Ateba Yene, ils étaient souvent enrôlés de force (3). Les premiers régiments de tirailleurs sénégalais voient le jour en 1881. Ces Maghrébins et Africains participent aux combats de mai-juin 1940 : 105 000 seront faits prisonniers dont 60 000 Algériens et 15 000 Africains. Ces derniers, moins bien traités par les nazis que les Maghrébins, subissent les pires exactions : certains sont décapités, d’autres ont les mains coupées, beaucoup meurent de tuberculose. À partir de 1943, ces soldats venus du Sud prennent part aux campagnes de Tunisie, d’Italie et de France. Peu savent que ce sont les tirailleurs marocains qui ont libéré la Corse ; que ce sont les tirailleurs algériens, aidés par les FFI, qui ont libéré Marseille, Toulon, Lyon et Mulhouse ; qu’ils étaient nombreux, ces Algériens et Marocains, dans la fameuse 2e DB du général Leclerc qui a libéré Paris ; qu’ils étaient parmi les premiers soldats alliés à traverser le Rhin et à fouler le sol allemand. Ces oubliés de l’histoire ne demandaient pas seulement une amélioration de leurs pensions, ils demandaient à être reconnus. (1) Parmi ces soldats, les futurs fondateurs du FLN comme Mohamed Boudiaf, Ahmed Ben Bella, premier président de l’Algérie indépendante, Krim Belkacem, Mohamed Mechati... (2) À leur retour en Algérie, plusieurs centaines de ces soldats découvrent que leurs parents, proches et amis sont morts lors des massacres du 8 mai 1945 à Sétif et Guelma. (3) Cité par Dominique Lormier dans son livre C’est nous les Africains, l’épopée de l’armée française d’Afrique, Calmann-Levy. Paris 2006. 20 euros. Par Hassane Zerrouky, journaliste algérien au "Matin" Quelques sites sur le film : Le site officiel du film : le dossier Télédoc rédigé par Philippe Leclercq, professeur de lettres, et quelques compléments en ligne (interview du réalisateur et des acteurs principaux) sur le site "Actualités pour la classe" du CNDP. Tele-doc Un dossier d'orientation plus cinéphile, réalisé par un enseignant de cinéma (commandé par la région Ile de France, il a été réalisé par l'ACRIF, opérateur du dispositif "Lycéens au cinéma"). Quelques sites pour découvrir l'histoire de ces tirailleurs indigènes L'espace histoire du site officiel propose textes et documents sur le contexte historique du film à savoir la 2ème guerre mondiale Un dossier de France 5, donne les principales dates de l'histoire de ces soldats : de la création du premier bataillon de tirailleurs indigènes en 1842 à 'l'arrêt DIOP" du conseil d'état qui déclare la cristallisation illégale et discriminatoire le 30 novembre 2001 Un dossier du CRDP de Champagne Ardenne : " Les soldats indigènes, oubliés des deux guerres mondiales" L'interview de Pascal Blanchard, historien, chercheur associé au CNRS de Marseille, président de l’Association pour la Connaissance de l’Histoire de l’Afrique Contemporaine, conseiller historique du film. Le point de vue de l'historien Benjamin Stora sur le film : "Les indigènes ont découvert la société MONDE | 26.09.06 française" LE Quelques documents du CDI Onana, Charles /.- La France et ses tirailleurs. Enquête sur les combattants de la République. 1939-2003.- Duboiris /, 2003.- 243 p.; photo. en N&B;.- Préface de Amadou Mahtar M'Bow, ancien directeur générale de l'UNESCO et engagé volontaire dans l'armée française en 1940..ISBN 2-9513159-4-5 /, Résumé : A maintes reprises, la question de la reconnaissance des Africains qui ont participé à la deuxième guerre mondiale aux côtés de la France a été posée. Soigneusement évités par les livres d'histoire, oubliés de la mémoire nationale, les soldats français originaires d'Afrique (les tirailleurs sénégalais) sont désormais contraints à la mendicité et à l'humiliation. Leur pension, "cristallisée" en 1959, différente de celle de leurs frères d'armes français, fait aujourd'hui l'objet de procès devant les tribunaux. Comment une telle situation a-t-elle pu se produire ?. Cote : 944 :325.3 ONA Article Périodique Mandelbaum, Jacques /.- Rachid Bouchareb : au nom de tous les siens morts pour la patrie.Le Monde (Paris. 1944), 30/05/2006, 19079, p.20.Résumé : Présentation, en 2006, de Rachib Bouchareb, cinéaste français d'ascendance algérienne, lors de la diffusion de son film 'Indigènes" : son parcours personnel d'enfant issu de l'immigration, de cinéaste et de producteur ; l'évocation des tirailleurs de pays d'Afrique, combattants français du deuxième conflit mondial ; l'intégration des immigrés. Dossier thématique Périodique Hakem, Tewfik / Joubin, Arnaud /.- Samy Naceri, Sami Bouajila, Jamel Debbouze et Roschdy Zem : les tirailleurs de l'écran.- Le Monde2 (Paris), 20/11/2004, H0040, p.28-37.Résumé : Présentation du film de Rachid Bouchareb, "Indigènes" consacré aux soldats nordafricains enrôlés pour la Libération de la France en 1944 et 1945. Rencontre avec les acteurs principaux de cette production Sami Bouajila, Jamel Debbouze, Samy Naceri et Roschdy Zem. Importance de ce film. Leur situation de comédiens d'origine immigrée. Filmographies. Article Périodique Ceaux, Pascal / Rémy, Jean-Philippe / Renard, Lilian /.- Débarquement de Provence : la France retrouve sa mémoire de l'Afrique.- Le Monde (Paris. 1944), 15/08/2004, 18523, p.7.Résumé : Reportage, en 2004, sur les commémorations du 60e anniversaire du débarquement allié en Provence. Hommages aux combattants africains. Bref entretien avec l'historien et cinéaste Grégoire Georges-Picot, qui recueille depuis 1994 les témoignages des anciens combattants africains. Article Périodique Bedarida, Catherine /.- Toulon salue ses libérateurs africains.- Le Monde (Paris. 1944), 08/01/2004, 18336, p.25.Résumé : Présentation de l'exposition "Nos libérateurs, Toulon août 1944", consacrée à la libération de Toulon par les troupes coloniales, organisée par le Musée d'art de Toulon en 2004. Rappels historiques. Commentaires de documents. Témoignages. Evocation de ces troupes venues d'Afrique. Perspectives quant à un musée de l'immigration en France. Webographie. Article Périodique En mémoire des anciens combattants d'Afrique.- Géo (Ed. française), 11/1997, 225, 177-190 :.Résumé : Témoignages de militaires africains (tirailleurs sénégalais, goumiers et spahis nordafricains) engagés dans l'armée française pendant les guerres 14-18, 39-45, et d'Indochine.