PETER WHAT ?

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PETER WHAT ?
PETER WHAT ?
INFONOFORME
2.TID.1.2.3 TIA1 2010/11
http://francois-bourgaux.infographie-heaj.eu/blog/
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PETER WHAT ?
PETER WATKINS
http://pwatkins.mnsi.net/index.htm
MONOFORME
2.TID.1.2.3 TIA1 2010/11
http://francois-bourgaux.infographie-heaj.eu/blog/
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VOS INFORMATIONS :
Une vidéo d’introduction
Retrouver le texte de cet interview :
http://www.zalea.org/ancien/ungi/programme/peterwatkins/entretienpw.html
Deux textes à interpréter :
1. LA MONOFORME
Source : http://www.zalea.org/ancien/ungi/programme/peterwatkins/pwcineastecritique.html
Ce résumé décrit la crise dans les mass-médias de l'audiovisuel (MMA)
telle qu'analysée par Peter Watkins, et le film La Commune, ainsi que
l'association Rebond pour La Commune, formée par certains de ses
acteurs et techniciens.
La crise dans les MMA
La crise affectant la relation entre les MMA et le public a atteint des
proportions extrêmes. La forme de langage autoritaire, manipulatrice,
arrogante et opaque de la télévision aux mains de décideurs avides de
pouvoir n'est toujours pas débattue dans notre société. Cette situation, qui
bloque l'interaction humaine et l'engagement collectif, est acceptée sans
réserves par la société de consommation et le système éducatif. Les
industries du cinéma -- sans que cela ne suscite le moindre débat public -investissent dans des films violents et simplistes qui favorisent
l'hégémonie grandissante de la sous-culture populaire américaine, au lieu
de travailler pour l'amélioration des systèmes d'éducation, de santé et de
couverture sociale. Il en va de même pour la production des émissions de
télévision : non seulement il n'existe aucun dialogue avec les
téléspectateurs, mais la sous-culture populaire audiovisuelle ne constitue
même pas une véritable source d'information, sans parler de
communication interactive.
Peter Watkins a formulé le terme : la "Monoforme". Il l'utilise pour décrire
les modes de langage et structures narratives principales du cinéma et de
la télévision, leur standardisation, et leur manière fragmentée de délivrer
des messages sous de fausses apparences lisses et fluides. Les
nombreuses manifestations de la Monoforme – dans les sitcoms, les
policiers, les films d'Hollywood, les talk-shows ou sur MTV– sont basées
sur une méthode universelle de structurer le temps et l'espace dans le
processus du montage.
Celle-ci peut être représentée comme suit :
|-|-| -- -|-| -- -|-|-|-|-| -- |
(où les lignes verticales représentent une coupure et celles horizontales
une assez petite unité de temps). Les coupures (à peu près toutes les trois
secondes) maintiennent le suspense, et empêchent l'installation d'espaces
de réflexion ! Cette standardisation répétée contribue à brouiller les
frontières entre la publicité et les informations, entre la violence réelle et sa
mise en scène, etc. Les mass-médias présument que le public a besoin de
formes de représentation prévisibles afin d'être " impliqué " (c.-à.-d.
manipulé). Malgré l'influence décisive qu'a la Monoforme sur notre
capacité à absorber l'information, cette structure dominante n’est ni
débattue, ni remise en cause, que ce soit par les professionnels ou le
public.
Il est vital qu'émergent de nouvelles formes d'enseignement critique des
médias, qui doivent inclure un travail de conscientisation sur cette crise,
l'enseignement de nouvelles techniques de " décodage " des formes de
langage manipulatrices, l'encouragement à la création d'un débat public,
et la création de formes nouvelles pouvant opposer l'hégémonie sans cesse
croissante des mass-médias. à l'heure actuelle, il n'existe pas de forme de
production créative au sein des MMA qui confronte véritablement ses
propres techniques répressives, son conformisme et son accumulation
monopolisante de pouvoir. Bien qu'il existe d'infinies possibilités de
processus médiatiques alternatifs, nous assistons actuellement à
l'effondrement complet de la télévision comme média potentiellement
démocratique, et au refus exprimé par les systèmes politiques et la
majorité des professionnels des médias à l'encontre de toutes les tentatives
en faveur de mesures sociales, économiques ou créatives nouvelles.
Watkins est convaincu que nous serions dans un monde plus humain et
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plus juste aujourd'hui si, dans les années soixante et soixantedix, la
télévision (en ouvrant ses structures de pouvoir) avait collaboré et été à
l'écoute des différentes catégories sociales composant l'opinions publique,
et s'il avait adopté des formes d’expressions plus ouvertes et plus
complexes.
L'enseignement des médias d'aujourd'hui –appelés également "sciences
de la communication et des médias"– est devenu un commerce énorme,
avec des écoles de cinéma dotées du nec plus ultra de la technologie
préparant les étudiants à travailler au sein de la machine industrielle
d'Hollywood et pour ses clones européens et asiatiques. Il fût un temps où,
l'enseignement des médias incluait la notion d'analyse critique. Par
exemple, l'analyse d'orientation marxiste des années soixante soulignait la
puissance des liens entre les intérêts économiques et les médias. Mais
dans les années soixante-dix, les MMA et les programmes conventionnels
d'études de la communication (PCEC) sont devenus de plus en plus
fermés, au point que depuis les années quatre-vingt, ils "règnent", loin de
toutes mesures de contrôle, et, ce qui est encore pire, sans aucun débat
public. Le postmodernisme est devenu une sorte de culte obligatoire : il
faut'être branché, cool et techniquement équipé, bref, être "in". Presque
tous les PCEC aujourd'hui refusent de présenter des formes critiques
alternatives dans le cadre institutionnel, et inculquent à leur place la
Monoforme.
L'accès à une pédagogie critique, à des formes alternatives et plus
démocratiques d'enseignement des médias devrait être garanti comme
l'un des droits de l'Homme ! La prise de conscience est une première
étape, mais la mise en pratique de revendications fondamentales exige
qu'elles soient rendues constitutionnelles –c'est-à-dire, des droits de
l'Homme protégés par la loi.
Un problème majeur est l'acceptation générale –par un nombre croissant
de personnes– du processus social et politique inspiré par la sous-culture
populaire américaine. La propagation de la société de consommation est
orchestrée par la double actions des mass-médias et du système éducatif
et soutenue par la logique absolutiste de l'économie de marché. La très
habile propagande orchestrée par les MMA au service de la société de
consommation a développé une fausse perception de nos propres besoins.
Le résultat est un cercle vicieux de dépendance et de manipulation qui ne
fait que renforcer l’assise de ce système hiérarchique. Un cycle sans fin
transmet cette idéologie à la génération suivante de professionnels (y
compris
les enseignants), et –au delà– au public. Le mépris du public est devenu
l'idéologie officielle. La relation immuable entre les MMA et le public a
clairement été établie comme un flux à sens unique de ceux-là vers celuici, un processus hiérarchique qui ne permets aucune véritable interaction.
Watkins demande clairement plus de choix pour le téléspectateur –un
choix de forme, de langage, de thèmes, de style, d'idéologie. C'est, bien
sûr, tout le contraire qui se produit. Watkins parle de la théorie du "gardien
du temple" par lequel tout matériau médiatique est filtré avant d’être
présenté comme de l'"information". Cette forme de manipulation est
défendue par l'ensemble des médias (et les systèmes éducatifs) sous
couvert d'"objectivité".
L'industrie du divertissement reflète la crise morale et éthique de la société
contemporaine. Totalement indifférente, par exemple, à la souffrance
humaine et à la brutalité dépeinte à l'écran, l'Académie des Arts et
Sciences du cinéma récompensera Braveheart de Mel Gibson par cinq
Oscars –pour des images cyniques dépeignant des centaines de personnes
se faisant découper en morceaux. Sans aller jusqu'à établir un quelconque
lien direct entre la violence médiatique et les horreurs du génocide, nous
devons néanmoins considérer que ce que nous voyons dans les MMA est
l'administration organisée de la violence, ce que –dans le contexte de
l'Holocauste– Hannah Arendt décrivait comme "la banalisation du mal". De
plus en plus convaincus que le cinéma et la télévision sont du "pur
divertissement", les mass-médias feignent d’ignorer leur responsabilité
directe dans la banalisation de la violence dans nos vies quotidiennes,
tandis que le système éducatif ne permet pas aux jeunes d’en prendre
conscience. A l'ère de la culture populaire du divertissement qui prévaut
dans notre société de communication et d'information, les universitaires
des médias cherchent encore à transmettre l'ancien mythe d'une télévision
d'information et d'éducation. En réalité, le rôle de la sous-culture populaire
est de livrer un public et des clients aux experts du marketing et aux
corporations multinationales.
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2. LA MONOFORME ET LA CENTRALISATION
DU POUVOIR par le réalisateur Peter Watkins
Source : http://offensive.samizdat.net/spip.php?article46
Ce texte est tiré de la préface de « La face cachée de la lune », une analyse
de la crise des médias, de Peter Watkins, cinéaste engagé.
Dans la crise de la démocratie que je vais décrire, un des éléments clef est
l’absence totale de discussion au sein des médias de masse, ainsi que, en
grande partie, dans le domaine apparenté des études de communication,
sur la « monoforme » : sur les questions de connaître sa nature et ses effets
sur le développement artistique du cinéma et de la télévision, ses
incidences sur la société et sur la politique, son lien étroit avec la
mondialisation. « monoforme » est le mot que j’ai donné, il y a vingt ans
environ, au langage central utilisé (au niveau du montage, de la structure
narrative, etc.) par la télévision et le cinéma commercial pour présenter
leurs messages. C’est un torrent d’images et de sons, au montage nerveux,
une structure composite dont les éléments sont assemblés sans coutures
apparentes et qui est pourtant fragmentée ; ce langage est devenu presque
omniprésent dans le cinéma et la télévision d’aujourd’hui. Il est apparu tôt
dans l’évolution du cinéma, dans les films de pionniers tels que D.W.
Griffith, qui ont lancé l’usage d’enchaînements de plans courts, d’actions
parallèles, de passages entre plans de perspective différente (plan
d’ensemble, plan rapproché), etc. De nos jours, il comprend aussi des
couches denses de musique, le bruitage et les effets vocaux, des coupures
de son brusques destinées à créer un effet de choc, d’innombrables scènes
saturées de musique, des formes de dialogue rythmées et répétitives, une
caméra en perpétuel mouvement qui plonge, bouge, se trémousse, décrit
des cercles, etc. Il y a plusieurs grandes variantes de la « monoforme » : 1.
la principale, celle qui domine le plus, est la structure narrative
monolinéaire traditionnelle et classique des soap-opéras, des séries
policières, et de plus de 98% des films provenant d’Hollywood (le film
hollywoodien The Insider, en emploie la forme la plus moderne) ; 2. celle
utilisée dans les journaux télévisés ; 3. celle que l’on trouve dans les jeux
télévisés et les talk-shows ; 4. le mélange apparemment libre, décousu et
fluide de thèmes et de motifs visuels des clips de MTV. Toutes les variantes
de la « monoforme » présentent des similitudes caractéristiques, et on voit
qu’elles dérivent de la même racine ; elles sont répétitives, prévisibles, et
fermées dans leur rapport avec les spectateurs. Contrairement aux
apparences, elles utilisent toutes le temps et l’espace d’une manière
rigidement maîtrisée, adaptée aux diktats des médias, et non pas aux
possibilités plus vastes, infinies même, des spectateurs. Ces variantes de
la « monoforme » sont toutes basées sur le principe, traditionnel chez les
médias, selon lequel les spectateurs sont immatures et ont besoin de
formes familières de présentation pour « être accrochés » (euphémisme
qui veut dire « être manipulés »). C’est pourquoi beaucoup de
professionnels de l’audiovisuel dépendent de la vitesse, du montage choc,
et du fait de ne pas laisser aux spectateurs le temps de réfléchir. Une des
manières les plus faciles d’identifier la « monoforme » est de regarder les
informations télévisées pendant quelques jours, pour examiner la façon
dont « l’information » ou « les faits » sont présentés. Les aspects les plus
évidents de cette présentation sont les mots choisis par les commentateurs
et les journalistes, le temps consacré à différents sujets, l’ordre
d’importance dans lequel ils sont abordés, les gens qu’on voit à l’écran,
l’espace de temps dont ils disposent pour parler, les images utilisées pour
illustrer le reportage, etc. Un examen détaillé de ces premiers aspects
révélera déjà des préjugés éditoriaux et des méthodes narratives
répétitives. Cette partie visible de la narration est cadrée, découpée,
compartimentée et restreinte par la partie la plus profonde de la
« monoforme », qui comprend la structuration du temps et de l’espace au
moyen du montage. Les mouvements de la caméra, le cadrage et
l’utilisation du son jouent également des rôles importants. La meilleure
façon de décrire cette structuration est d’imaginer une grille :
|-|-|---|-|---|-|-|-|-|—| (les barres verticales représentant des coupes
pratiquées au montage) plaquée sur le tissu vivant du reportage et des gens
concernés, et à nos réactions, à la manière d’une machine à fabriquer des
frites. Un des éléments principaux de la « monoforme », surtout dans ses
deux premières variantes, et souvent dans la troisième, est la structure
narrative monolinéaire et ondulée : des scènes accrocheuses au début, la
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présentation des personnages principaux, le développement de l’intrigue,
divers temps morts et paroxysmes, et enfin le dénouement. C’est une
structure narrative anglo-saxonne de base, employée dans au moins 95%
des récits qui passent à la télévision et au cinéma. La grille temporelle et
spatiale de la « monoforme », |-|-|---|-|---|-|-|-|-|—|, est posée sur la
structure narrative (qui lui sert de rails, pour ainsi dire), de sorte que le tout
ressemble à des montagnes russes, sur lesquelles les spectateurs montent
et descendent à toute allure, en avançant toujours dans la même direction.
D’un examen détaillé des informations télévisées, par exemple, il se
dégage que cette même méthode narrative s’emploie heure après heure,
année après année, quelle que soit la dimension affective du thème ou du
sujet abordé. Voilà le première signe d’une défaillance grave. Ni les médias
de masse, ni l’enseignement des médias ne mettent en question le
principe élémentaire selon lequel la manière dont une information est
présentée (y compris le langage employé) a des effets importants sur notre
compréhension de cette information, et sur nos réactions. Pourtant, la
« monoforme » reproduit à chaque fois une organisation similaire de sons
et d’images, avec une précision à la seconde près, ce qui estompe les
différences entre un sujet et un autre, ainsi qu’entre des réactions
affectives qui, sans cela, seraient peut-être très contrastées. La tragédie
d’un accident d’avion est présentée de la même manière que quelqu’un
qui a peint ses concombres en rose, c’est-à-dire, à travers la même
structure narrative quadrillée. Par conséquent, il est de plus en plus
difficile d’établir une distinction entre publicité et informations, entre
violence réelle et violence simulée, entre acte cynique et acte de
compassion ; tout est coulé dans le même moule rigide par les médias de
masse d’aujourd’hui. Ce schéma narratif répétitif, qui est fermé dans la
mesure où il ne laisse aux spectateurs ni le temps de réfléchir, ni le temps
d’intervenir, et qui bombarde le spectateur de juxtapositions violentes
d’images, de sons et de thèmes contradictoires, a eu un effet dévastateur
sur la société pendant les dernières décennies. Coupure. Coupure. Bruit.
Inclinaison. Secousse. Coupure. Musique. Zoom. Mouvement circulaire.
Petite phrase. Coupure. Bruit. Inclinaison. Panoramique. Coupure. Zoom.
Coupure. Inclinaison. Secousse. Coupure. Musique. Choc. Boum. Coupure.
Coupure. Mouvement circulaire. Coupure. Paroxysme. Coupure. Scène
suivante. Répétition du procédé. Coupure. Coupure. Bruit. Inclinaison.
Secousse. Coupure. Parmi les effets de cette utilisation des médias de
masse, on peut citer : • Des transformations et des altérations dans nos
rapports avec le temps et l’histoire (passé, présent et futur) et leurs
processus. • Des violences à l’intérieur de la famille et au niveau de la
société, stimulées tant par le fait de voir des actes brutaux à l’écran que par
l’agression sous-jacente du langage de l’audiovisuel. • Une acceptation
accrue de structures hiérarchiques dans la vie quotidienne, et dans les
processus sociaux et politiques. • Une frustration et une agressivité
refoulées, causées par notre réaction aux expériences secondaires
artificielles fournies par les informations télévisées et par beaucoup de
documentaires (on sait qu’on doit douter : « Est-ce que je devrais vraiment
y croire ? C’est de la manipulation, n’est-ce pas ? Comment peut-on savoir
si c’est vrai ? Ça n’a pas l’air d’être objectif. J’ai l’impression qu’on se sert
de moi, et que je n’y peux rien », etc.), et des espérances trompeuses
suscitées par la publicité, par des images de la société de consommation,
par les sitcoms, etc. • Le rétrécissement de notre expérience et de notre
connaissance de formes audiovisuelles alternatives qui soient plus
complexes et démocratiques. • Un éclatement du lien social et, par
conséquent, un affaiblissement de notre envie de discuter collectivement
des choix de société, et d’échanger des idées sur les voies d’évolution
possibles de notre monde et sur la question de savoir comment on peut
empêcher que la société de consommation ne détruise la planète.
Peter Watkins
ET POUR CONTINUER VOTRE LECTURE :
Pour étendre éventuellement votre connaissance de la Monoforme :
http://lesensdesimages.blogvie.com/2009/01/06/les-fondementshistoriques-de-la-%C2%AB-monoforme-%C2%BB/
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