Point sur le programme de recherche par le Dr Viki Kalatzis, Inserm

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Point sur le programme de recherche par le Dr Viki Kalatzis, Inserm
Assemblée Générale de France Choroïdérémie - 23 mars 2013
Point sur le programme de recherche par le Dr Viki Kalatzis, Inserm U1051
Etude préclinique de nouvelles thérapies pour la choroïdérémie
Les recherches poursuivent un double objectif: mieux comprendre la maladie et tester in-vitro de nouvelles
thérapies.
Dans un premier temps, Viki nous rappelle les premières étapes du programme de recherche qu’elle mène avec son
équipe. Elle utilise des cellules souches pluripotentes induites (iPS), obtenues à partir de cellules déjà différenciées
(ici des cellules de peau), qui sont reprogrammées pour devenir pluripotentes (= elles ont la propriété de pouvoir se
transformer en tout type de cellule). Ces iPS sont ensuite différenciées pour devenir des cellules rétiniennes et
plus précisément des cellules d’épithélium pigmentaire reconnaissables notamment à leur pigmentation foncée.
Elle a ensuite vérifié que les cellules obtenues ne produisaient aucune protéine caractéristique du gène CHM (dans
son fonctionnement normal), ce qui signifiait qu’il s’agissait bien de cellules de patients CHM.
A ce jour, 5 biopsies de peau ont pu être réalisées sur 5 patients CHM. Elles vont permettre d'obtenir des cellules
portant le gène de la choroïdérémie mais par des mutations différentes. Parallèlement des cellules contrôle, c’est à
dire de personnes non atteintes par la choroïdérémie, sont nécessaires pour valider les résultats.
Etude physiopathologique
Les chercheurs se sont intéressés aux cellules d'épithélium pigmentaire (EPR). L'EPR est situé entre les
photorécepteurs et la choroïde. Il a comme fonction d’évacuer vers la choroïde, les déchets et l'eau émis par les
photorécepteurs. Il permet aussi de récupérer de l'oxygène et des nutriments de la choroïde pour les envoyer aux
photorécepteurs et il phagocyte certains déchets largués notamment par des photorécepteurs. L'EPR intervient
également dans le cycle visuel en renouvelant un pigment visuel nécessaire à la vue et en sécrétant des facteurs de
croissance qui nourrissent les photorécepteurs et la choroïde. Il y a donc une forte interdépendance de tous ces
tissus. Les cellules de l'EPR présente une morphologie spécifique.
Le fait d’observer les différences entre l’EPR CHM et l’EPR saines permet aux chercheurs de mieux comprendre la
maladie :
• Les chercheurs étudient notamment les mélanosomes, un des constituants de l'EPR qui lui donne sa pigmentation.
Leur nombre est identique pour les cellules atteintes et les cellules saines. En revanche, la constitution de ces
mélanosomes semble différer entre les deux types cellulaires.
• Leur étude a permis de démontrer qu’in vitro l'EPR assure bien sa fonction d’évacuation de l’eau, mais avec une
efficacité moindre dans les cellules CHM : les cellules atteintes boivent moins !
• L'EPR atteint présente bien la fonction de phagocytose mais avec plus d'efficacité pour les cellules CHM que les
cellules contrôle : les cellules atteintes mangent plus !!
• Les tests ont été concluants pour le cycle visuel et actuellement, Viki et son équipe ont lancé de nouveaux tests
pour étudier la sécrétion de facteurs de croissance.
Programme de thérapie pharmacologique
Il s’agit du 2e programme de recherche mené par l’équipe du Dr Viki Kalatzis sous la direction du Pr Hamel. Les
études ont débutées en Octobre 2012, en parallèle à Londres par le Dr Moosajee sur des embryons de poissonzèbre CHM et à Montpellier, sur le modèle cellulaire CHM. Des mises au point doivent avoir lieu sur les outils
utilisés pour détecter l'efficacité de l'Ataluren en fonction de son dosage dans les cellules.
NB : Ce type de thérapie est valable uniquement pour soigner les mutations1 de type non sens que l’on retrouve dans
30% des cas de choroïdérémie.
1 Il
existe plusieurs types de mutation du gène CHM :
•
Les mutations par délétion où une partie du gène manque, entrainant souvent la terminaison précoce de la protéine
•
Les mutations faux-sens, quand un acide aminé est remplacé par un autre,
•
Les mutations non-sens quand une erreur dans le gène stoppe la production de protéine
Assemblée Générale de France Choroïdérémie - 23 mars 2013
Etudes de thérapie génique
Les cellules obtenues permettent aussi d’étudier l’efficacité de nouvelles thérapies, comme la thérapie génique2.
L’introduction in vitro de ce vecteur viral contenant le gène CHM dans des cellules de malade a permis l’expression
de la protéine REP1 qui était absente auparavant.
Avec ce résultat, l’équipe de chercheurs montpelliérains a obtenu une preuve de concept (« proof of concept ») de
l’efficacité de la thérapie génique pour la choroïdérémie ! Il reste maintenant à confirmer ce résultat sur l’EPR
d’autres patients avec différents types de mutations CHM.
En route vers les essais cliniques : la preuve de concept a marqué une étape essentielle permettant d’envisager
de passer aux essais cliniques en appliquant chez l’homme les résultats réalisés in vitro.
•
Etapes à réaliser en 2013 : Production des lots de vecteurs viraux et tests toxicologiques sur le singe (pour
valider la non-toxicité du virus porteur).
•
Etapes pour 2014 : production d’un lot de vecteurs viraux dit « clinique » car pour une utilisation chez
l’homme et obtention de l’agrément des autorités de contrôle.
•
Si tout déroule comme espéré, le démarrage des essais cliniques est prévu en 2015.
Financement des essais cliniques
Pour conduire ce projet jusqu’aux tests cliniques le plus efficacement possible, l'équipe de Montpellier, s’est
associée à l’Inserm de Nantes et à un entrepreneur Mr Denis Cayet pour créer une start-up appelée Horama
(« Vision » en grec ancien). NB : Horama reprend le projet VisioGenex que nous avions évoqué lors de l’AG 2012.
Genèse d’Horama: Denis Cayet n'est pas un investisseur ordinaire, car il est lui-même atteint non pas de CHM, mais
de la maladie de Stargardt qui atteint elle aussi la rétine. C'est la raison pour laquelle, après avoir été avec succès
chef d’entreprise, il a vendu son entreprise et décidé de s'impliquer dans la recherche afin d'aider les chercheurs à
trouver des traitements pour les personnes souffrant de maladies oculaires comme lui.
Par hasard (car ils sont tous deux fans de voile), il a rencontré le Pr Moullier qui travaille sur la recherche sur
l’Amaurose Congénitale de Leber à l’Inserm de Nantes et est proche du Pr Hamel. Il est intéressant de noter que
les 7 actionnaires (à l'exception de Denis Cayet) sont tous des scientifiques (parmi lesquels Viki et Pr Hamel) qui
détiennent la majorité des actions et dont le poids décisionnel est proportionnellement plus important. Jusqu'à
présent, ils n’envisagent pas de faire appel à des investisseurs externes, mais espèrent obtenir des financements
nationaux d’aide à l’innovation et à la recherche et des subventions des conseils régionaux, ce qui leur permettra de
garder le contrôle de la structure et de sa stratégie.
L’objectif d’HORAMA est de faciliter le passage aux essais cliniques pour les maladies rétiniennes rares en
couvrant toutes les étapes du processus de la preuve de concept aux essais cliniques (ex: embauche du personnel
nécessaire, réalisation d'études de toxicologie, obtention des agréments des organismes de réglementation,
production de vecteurs GMP, etc.). Et comme il s’agit d’une structure privée, son fonctionnement est beaucoup plus
souple et moins lourd que celui d’un institut public comme l’Inserm. La première maladie sur leur liste est la
choroïdérémie car c'est celle pour laquelle la recherche est la plus avancée. NB: ils n’envisagent pas de travailler
sur les traitements pharmacologiques.
Parallèlement, dans l’objectif de collecter des dons pour financer Horama, Denis Cayet a créé le Fonds de dotation
pour le Développement des Protocoles de Traitement des Rétinopathies (FDPTR) sur lequel il a effectué un 1er
versement de 100,000€ à titre personnel. 4 membres du bureau de FCHM ont rencontré Denis Cayet dans son
bureau à Paris le 26 mars 2013 afin de voir dans quelle mesure France Choroïdérémie pourrait œuvrer en
collaboration avec ce fonds de dotation et Horama.
Il s'agit d'introduire un nouveau gène dans le noyau de la cellule défectueuse en utilisant un virus rendu inoffensif (appelé alors
vecteur viral). Dans le cas de la CHM, on introduit un gène CHM sain dans le noyau de la cellule de façon à ce que son ADN puisse
produire à nouveau la protéine nécessaire à son fonctionnement.
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