Qu`est-ce qui fait givrer les détendeurs?

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Qu`est-ce qui fait givrer les détendeurs?
Qu’est-ce qui fait givrer les détendeurs?
Lors de plongées dans des eaux froides et à de grandes profondeurs, des accidents de plongée se
produisent régulièrement. Leur cause, ou du moins un des événements déclencheurs est très
souvent le givrage d’un détendeur. Quelle est la cause d’un givrage ? Que se passe-t-il exactement ?
Pourquoi est-ce si dangereux ?
Causes
Comme lors de chaque défaillance technique et lors de chaque accident, le givrage de détendeurs est
lui aussi lié à des conditions préalables et est la conséquence d’une chaine d’événements
malheureux. Pour l’analyser il faut d’abord comprendre le mode de fonctionnement de l’alimentation
en air du plongeur.
Lorsque nous respirons à l’aide d’un détendeur, nous prélevons de l’air de la bouteille. Lors de cette
extraction, l’air se détend dans le premier étage.
La pression de la bouteille (qui se situe généralement entre 200 et 50 bars) est abaissée à une
pression d’environ 10 bars supérieurs à la pression ambiante. Lors de cette détente, l’air se refroidit et
sa température peut chuter de 40°C.
A travers le tuyau moyenne pression, l’air s’écoule ensuite vers le deuxième étage où il est une
nouvelle fois détendu à la pression ambiante. Un réchauffement de l’air lors de son passage dans le
tuyau moyenne pression dépend grandement de la température de l’eau. Cela signifie que dans une
eau à une température de 4°C, comme c’est le cas dans un lac de montagne, on ne peut s’attendre
qu’à un léger réchauffement de l’air.
La première condition pour un givrage est donnée : le froid
Si l’agent déshydratant du compresseur a été remplacé de manière tardive ou si de l’eau se trouve
dans la bouteille ou dans le détendeur, on se trouve en présence de la deuxième condition préalable.
La deuxième condition est la présence d’eau, respectivement d’humidité
Si l’eau provient de l’intérieur, on parle de givrage interne. Naturellement l’eau se trouve aussi à
l’extérieur. Dans ce cas lorsque celle-ci gèle on parlera de givrage extérieur. Le fait que le givrage soit
externe ou interne n’a pas d’importance pour le plongeur. En pratique sous l’eau on ne peut pas faire
de différence quant à la cause et de toute façon la manière de réagir à un givrage de détendeur est la
même dans les deux cas.
Que se passe-t-il?
L’humidité et le froid généré par la détente de l’air provoquent un givrage du détendeur. Comme le
froid est produit près du piston, ce sont dans la plupart des cas les parties mobiles du piston qui sont
concernées. Concrètement le piston du premier étage ou celui du deuxième étage, voir le levier placé
au-dessus de celui-ci, sont bloqués par la glace. Etant bloqué, le piston concerné ne se ferme plus.
L’air fuse de manière continue produisant encore plus de froid, ce qui a pour effet de bloquer encore
plus le piston en position ouverte.
La troisième condition est la présence d’une pièce mobile (piston) qui peut geler
Lorsque les trois conditions sont réunies, une défaillance du détendeur suite à un givrage se produit.
Conséquences d’un givrage
Comme décrit ci-dessus, le givrage ainsi que la production accrue de froid bloquent le piston en
position ouverte. Il s’ensuit que:
•
Le détendeur continue de délivrer de l’air.
•
L’air s’échappe de la bouteille de manière continue et en grande quantité. En fonction de son
volume et de sa pression au moment du givrage la bouteille se vide plus ou moins vite.
Une situation inconnue en relation avec la peur de ne plus recevoir d’air, ajoutée à des conditions de
mauvaise visibilité, de froid et éventuellement d’une perte du partenaire peut facilement conduire à la
panique, qui est le fondement de la plupart des accidents de plongées.
Mesures préventives
La meilleure manière de procéder est de minimiser les risques au préalable et ce de la manière
suivante :
•
Optimisation de l’équipement
•
Conditionnement adéquat de l’air
•
Comportement approprié en plongée
Optimisation de l’équipement
Séparer le mieux possible l’humidité et le froid dans les premiers et deuxièmes étages. Les
détendeurs les plus performants dans ce domaine sont les détendeurs à membrane.
Les kits de protection antigivre proposent plus une amélioration qu’une solution du problème.
Le deuxième étage est tout autant concerné par un givrage que le premier étage. Ici aussi le type de
construction est très important. Plus l’humidité, l’air froid et les pièces mobiles du piston sont séparés,
plus grande est la sécurité de ne pas avoir de givrage.
Dans le cas du deuxième étage, comme la conductivité thermique joue un grand rôle, les boîtiers
métalliques avec des radiateurs donnent de meilleurs résultats par rapport aux boîtiers en matière
plastique, mais :
•
Il n’existe pas de garantie absolue. Il n’existe que des détendeurs qui sont plus ou moins
sensibles au givrage.
•
C’est pourquoi, dans des eaux froides, il est impératif de plonger avec deux détendeurs
indépendants, montés sur des robinets séparés.
•
Le système « octopus » n’est pas un deuxième détendeur indépendant et ne procure donc
aucune solution sûre en eau froide. De plus son utilisation en cas d’urgence charge le
premier étage doublement ce qui accroît ainsi le danger de givrage de celui-ci.
Je recommande des détendeurs premiers étages à membrane et des deuxièmes étages avec un
boîtier métallique avec des radiateurs.
Répartition des débits d’air sur les deux premiers étages. Par exemple monter l’inflateur du gilet ou de
la combinaison étanche sur le premier étage du deuxième détendeur et n’utiliser le détendeur
principal que pour respirer.
En hiver il est préférable de laisser la bouteille et les détendeurs au chaud dans la voiture, ceci pour
minimiser leur refroidissement.
Conditionnement adéquat de l’air
Les cartouches filtrantes du compresseur doivent être changées selon les données du fabriquant dans
le but de garantir une qualité de l’air selon la norme DIN.
Les robinets des bouteilles doivent être ouverts de manière brève avant de gonfler les bouteilles afin
d’éliminer d’éventuelles gouttes d’eau. La plus grande quantité d’eau trouvée dans les bouteilles
provient de restes d’eau situés dans les robinets et qui se retrouvent projetés dans les bouteilles lors
de leur remplissage. Dans ce cas une nouvelle cartouche filtrante sur le compresseur n’est d’aucun
secours !
Les robinets des bouteilles qui ne sont pas utilisés lors d’une plongée (lors d’exercices en piscine par
exemple) doivent être correctement fermés.
Il est important de fermer l’entrée haute pression des détendeurs avec des capuchons correspondants
tout de suite après la plongée, ceci pour éviter toute entrée d’eau dans le détendeur.
Comportement approprié en plongée
•
Emporter une grande quantité d’air.
•
Avant la plongée, se familiariser avec le matériel, notamment avec celui de son partenaire.
Deux détendeurs représentent plus de tuyaux et donc plus de possibilités de s’embrouiller. Le
plus important est de savoir à quels robinets sont associés le premier et le second détendeur.
•
Ne pas laisser fuser de l’air (par exemple lors d’essais de remplissage de sac de levage) et ne
pas presser la purge d’air inutilement.
•
Lors de la mise à l’eau, plonger tout de suite, notamment en hiver. Ne pas faire fuser de l’air
en surface. Le détendeur givre plus rapidement en surface que sous l’eau!
•
En hiver, éviter de faire surface inutilement.
•
Protéger le deuxième détendeur contre une mise en purge de manière incongrue. Les
capuchons qui couvrent l’embout et qui permettent de les fixer au gilet ont fait leurs preuves.
•
Avoir toujours à portée de main le deuxième détendeur. Le mieux étant de l’avoir dans son
champ de vision. Un tuyau de plus grande longueur peut être utile, car en cas de problème le
partenaire a plus de liberté de mouvements.
Comment réagir si cela se produit malgré tout
Je conseille de :
1.
Rester calme, le détendeur délivre encore de l‘air !
2.
Rester en contact avec son partenaire !
3.
Prendre en bouche son deuxième détendeur et laisser fermer le robinet du premier détendeur
par son partenaire. Ceci présuppose un briefing approprié avant la plongée et une
connaissance parfaite de son équipement. Garder son premier détendeur en main dans le cas
où le partenaire ferme le mauvais robinet.
4.
Garder à l’œil le deuxième détendeur de son partenaire tout en commençant à remonter
calmement.
5.
Respecter la vitesse de remontée et effectuer les paliers.
6.
Discuter le déroulement de la plongée lors du débriefing. Avoir une discussion ouverte sur ce
qui s’est bien passé ou sur d’éventuels problèmes.
Il est aussi très important de pratiquer et d’exercer ce genre de situation de temps à autre.
D’après mes propres expériences les risques augmentent en fonction des facteurs suivants :
•
Température de l’eau en-dessous de 10°C.
•
Augmentation de la profondeur de la plongée.
•
Augmentation de la consommation d’air. Par exemple : utilisation d’un vêtement étanche, un
trop grand lestage, une respiration incontrôlée, etc.
•
Respiration et gonflage du gilet ou du vêtement étanche en même temps.
•
Partage d’air avec son partenaire au moyen d’un « octopus »
•
Température de l’air en-dessous de 5°C.
Si l’on prend en compte les conseils donnés ci-dessus, un givrage de détendeur sera très improbable,
mais il ne sera jamais complètement exclu !
Source: NullZeit.at
Traduction FTU, 8.2.2011, Denis Paratte