Les Ecoles privées au Cameroun

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Les Ecoles privées au Cameroun
Document de travail de la série :
Mécanismes et stratégies de financement de l’éducation
Les écoles privées
au Cameroun
R. Djamé, P. Esquieu,
Marie M. Onana et B. Mvogo
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© UNESCO décembre 2000
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Mécanismes et stratégies de financement de l’éducation
Les écoles privées au Cameroun
Raymond Djamé
Paul Esquieu
Marie Mbah Onana
Barthélémy Mvogo
Institut international de planification de l’éducation
Les idées et les opinions exprimées dans ce volume sont celles des
auteurs et ne représentent pas nécessairement celles de l’UNESCO
ou de l’IIPE. Les appellations employées dans ce volume et la
présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de
l’UNESCO ou de l’IIPE aucune prise de position quant au statut
juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités,
ni quant à leurs frontières ou limites.
La publication de ce document a été financée grâce à la subvention
de l’UNESCO et aux contributions de plusieurs Etats membres de
l’UNESCO dont la liste figure à la fin de ce document.
Publié par
l’Institut international de planification de l’éducation
7-9, rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris, France
Maquette de couverture : Pierre Finot
Composition : Linéale Production
Impression et brochage : atelier d’impression de l’IIPE
Document de travail
© UNESCO décembre 2000
AVANT-PROPOS
Tous les pays d’Afrique subsaharienne sont confrontés au
problème du financement de leur système éducatif. D’un côté, l’accès
à l’enseignement de base est loin d’être généralisé dans la majorité
d’entre eux, et des efforts à la fois quantitatifs et qualitatifs doivent
être accomplis avant d’atteindre cet objectif. D’un autre côté, la
nécessité de rétablir les équilibres macroéconomiques et les
programmes d’ajustement structurel successifs limitent les
financements publics pour l’éducation.
Le développement de formes diverses d’écoles privées ou
communautaires est dans beaucoup de pays encouragé par l’État afin
de contribuer à l’expansion souhaitée de la scolarisation tout en
limitant la charge financière pour les budgets publics. Pour les
familles, la création d’écoles communautaires ou le recours aux écoles
privées constitue un moyen de pallier l’offre insuffisante de l’État ou
d’échapper aux mauvaises conditions de fonctionnement des écoles
publiques.
L’IIPE a entrepris une série d’études de cas avec plusieurs pays
d’Afrique subsaharienne, portant soit sur les écoles communautaires,
soit sur les écoles privées. Ces études analysent la situation des
différents types d’écoles, le cadre juridique dans lequel elles
fonctionnent, l’encadrement administratif et pédagogique, l’appui de
l’État, pour esquisser les conditions et les perspectives de leur
développement futur.
La situation du Cameroun est particulièrement intéressante à
étudier : le secteur privé est depuis longtemps développé, accueillant
plus du quart des effectifs scolarisés ; il est également très diversifié,
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Les écoles privées au Cameroun
avec des écoles rattachées aux grandes confessions religieuses
présentes dans le pays, ou non confessionnelles ; il doit aujourd’hui
affronter les difficultés nées de la crise économique et financière qui
a durement affecté les possibilités d’intervention de l’État et la
capacité financière des familles.
Entreprise en collaboration avec le ministère camerounais de
l’Éducation nationale, cette étude a été possible grâce à la mobilisation
de nombreuses personnes et institutions. L’IIPE remercie
particulièrement :
• les présidents, secrétaires nationaux et secrétaires des quatre
organisations de l’enseignement privé,
• les directeurs provinciaux de l’éducation de l’Extrême Nord, du
Centre et leurs collaborateurs,
• les fondateurs et directeurs des établissements scolaires, les
enseignants et parents qui ont été sollicités lors des visites d’écoles
ou qui ont participé à des réunions.
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TABLE DES MATIÈRES
Page
Avant-propos
5
Liste des tableaux, graphiques et illustrations
9
Liste des sigles
11
Résumé
13
Présentation du pays
15
I.
19
19
Principales caractéristiques du système éducatif
L’organisation du système d’enseignement
Les progrès actuels ne compensent pas le grave
fléchissement de la scolarisation primaire observé
au milieu des années 1990
Les filles restent minoritaires à l’école
D’assez fortes disparités régionales
Des difficultés nées de la crise économique et financière
Les familles et l’enseignement privé apportent un
complément à l’effort de l’État
22
25
26
29
31
II.
Les quatre grandes familles d’établissements privés
L’enseignement catholique
L’enseignement protestant
L’enseignement islamique
L’enseignement laïc
Les problèmes financiers
Les problèmes pédagogiques
La demande : les raisons du choix du privé
35
36
40
43
45
51
54
56
III.
L’organisation et le fonctionnement de
l’enseignement privé
Les organisations de l’enseignement privé
La tutelle de l’État
La création d’un établissement privé
L’organisation des établissements
Les ressources des établissements
La subvention de l’État
Les associations de parents d’élèves
Les circuits financiers de l’enseignement privé
et leurs acteurs
59
59
62
64
65
66
68
69
69
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Table des matières
IV.
La place du privé et les conditions de son
développement
Constrastes et paradoxes
Les conditions de fonctionnement
Les conditions de développement
Annexes
Tableaux statistiques
Liste des experts ayant participé à l’étude
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75
75
78
79
85
85
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LISTE DES TABLEAUX, GRAPHIQUES ET ILLUSTRATIONS
Schémas
n° 1
Le système d’enseignement au Cameroun
n° 2
Circuits de financement et de fonctionnement de
l’enseignement privé
n° 3
Circuits de financement et de fonctionnement de
l’enseignement primaire catholique
Cartes
n° 1
n° 2
n° 3
n° 4
L’organisation territoriale du Cameroun
Taux brut de scolarisation primaire par province en
1998-1999 selon la province
Pourcentage des filles dans l’enseignement primaire
en 1998-1999
Poids de l’enseignement privé selon les provinces
(1998-1999)
21
73
73
22
26
27
33
Graphiques
n° 1
n° 2
n° 3
n° 4
n° 5
n° 6
n° 7
Évolution de la population scolarisable et des effectifs
d’élèves
Taux brut de scolarisation et nombre d’élèves
par maître (1997-1998)
Évolution de la dépense publique pour l’éducation
et de sa part dans le PIB
Évolution des effectifs d’élèves dans les écoles
primaires
Évolution des effectifs d’élèves de l’enseignement
secondaire
Élèves des écoles primaires privées par organisation
(1998-1999)
Élèves du secondaire privé par organisation
(1998-1999)
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23
28
30
32
32
35
36
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Tableaux
A
Grille des taux d’écolage, de pension et de cantine
annexée à l’arrêté n° 330/A/386/MINEDUC/DEP
du 18 août 1988 (en francs CFA)
n° 1
67
Effectifs scolaires de l’année 1998-1999 par province
et niveau, garçons + filles
n° 2
85
Effectifs scolaires de l’année 1998-1999 par province
et niveau, filles
n° 3
86
Proportion de filles dans les effectifs scolaires de
l’année 1998-1999
87
n° 4
Part du privé dans les effectifs scolarisés en 1998-1999 88
n° 5
Part du privé dans les effectifs des filles scolarisées
en 1998-1999
89
n° 6
Indicateurs régionaux
90
n° 7
Évolution du nombre des écoles primaires
91
n° 8
Évolution des effectifs d’élèves des écoles primaires
91
n° 9
Évolution du nombre des établissements secondaires
92
n° 10
Évolution des effectifs d’élèves de l’enseignement
secondaire
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LISTE DES SIGLES
APE
Association des parents d’élèves
BEPC
Brevet d’études du premier cycle
CAP
Certificat d’aptitude professionnelle
CEPE
Certificat d’études primaires et élémentaires
CFA (franc) Unité monétaire du Cameroun
1 franc CFA = 0,01 franc français
CGE
Certificate of General Education
CNPS
Caisse nationale de prévoyance sociale
DPRD
Direction de la prospective et des ressources
documentaires
EELC
Église évangélique luthérienne du Cameroun
ENS
École nationale supérieure
FLSC
First Leaving School Certificate
IIPE
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MINEDUC
Ministère de l’Éducation nationale
PIB
Produit intérieur brut
PNEU
Parents National Educational Union
PNUD
Programme des Nations Unies pour le développement
RED
Réseau École - Développement
SAR
Sections artisanales rurales
SEDUC
Secrétariat à l’éducation
SIL
Section d’initiation linguistique
SM
Sections ménagères
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RÉSUMÉ
Après un rappel général des conditions actuelles de scolarisation,
relativement perturbées au milieu des années 1990 par la crise
économique et par des ajustements radicaux intervenus dans les
finances publiques, cette étude s’attache à décrire le système de
l’enseignement privé, du primaire au secondaire, qui accueille un
quart des effectifs des élèves, et précise le cadre juridique des
établissements, sous tutelle du ministère de l’Éducation, et leur mode
de financement. Les écoles privées ont la souplesse nécessaire pour
s’adapter à la grande diversité géographique, linguistique, ethnique
et culturelle qui caractérise le Cameroun et qui se reflète dans un
système éducatif très hétérogène ; les établissements privés se
répartissent en quatre catégories religieuses et juridiques :
catholique, protestante, islamique et privée laïque. Soumis à la même
législation, ils suivent les programmes d’enseignement officiels, et
leur fonctionnement repose principalement sur l’aide financière des
familles.
L’étude aborde ensuite les différents problèmes auxquels sont
confrontées les écoles privées : problèmes de financement et
difficultés pédagogiques. Répondant à une demande sociale certaine,
apportant des modes de formation adaptés à des cultures et des
contextes particuliers, l’enseignement privé constitue une richesse
éducative incontestable, mais ses handicaps financiers menacent sa
croissance potentielle.
Conscient de l’apport du modèle privé pour le système éducatif
national, l’État tente de lui fournir un soutien financier et
pédagogique, malgré ses graves difficultés de financement. La
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Les écoles privées au Cameroun
présente étude examine ainsi les types d’intervention qui pourraient
guider l’action de l’État, en vue d’assurer les meilleures conditions
possibles à la scolarisation des jeunes Camerounais. Il apparaît aux
auteurs qu’un système d’information fiable et exhaustif, à la fois
qualitatif et quantitatif, doit impérativement être mis en place pour
évaluer de façon précise la réalité du terrain et permettre ainsi une
politique publique efficace pour réguler et coordonner le système
d’enseignement privé (carte scolaire, répartition des subventions,
gestion et statut des enseignants, situation financière des
établissements).
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PRÉSENTATION DU PAYS
S’il est un lieu commun de dire que le Cameroun, pays de
dimensions moyennes avec 475 000 km² et 14 millions d’habitants,
constitue une « Afrique en miniature », il présente bien une pluralité
singulière, à la fois géographique et écologique (tous types de
paysages, de climats, de formations végétales), ethnique et culturelle
(avec les deux familles majeures – soudanaise et bantoue – de
civilisation traditionnelle), de même que religieuse, avec l’éventail
des principales croyances (animiste, chrétienne et musulmane). Cette
pluralité issue d’une histoire et d’un peuplement progressif assez
complexes implique sans doute une certaine fragilité sociale, mais
fonde aussi la richesse du pays, dont on trouve de multiples traces
dans son identité actuelle, et plus particulièrement, nous le verrons,
dans l’organisation et la variété de son système éducatif.
Terre de contact entre les Bantous et les Soudanais, le Cameroun
a connu, dans le passé, un phénomène important de migrations dans
sa partie nord tandis qu’au sud, la côte atlantique était fréquentée
depuis le XVe siècle par les Portugais. Autour de l’embouchure du
Wouri (le rio dos camaroes, qui a donné son nom au pays), le groupe
des Doualas faisait l’intermédiaire entre l’intérieur et les traitants
européens : c’est lui qui acceptera plus tard le protectorat de
l’Allemagne, ouvrant du même coup à la colonisation l’intérieur
camerounais. Le XIe siècle connaît une « bousculade de peuples »
fuyant la conquête peule, pour affluer vers le sud : Bayas, Makas,
Bassas, Etons, Ewondos, Boulous et Fangs, qui « laisseront à l’errance
des Pygmées les solitudes forestières ». Ici comme ailleurs en Afrique,
le pouvoir colonial contribuera à fixer définitivement la répartition
spatiale de ces différentes ethnies.
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Les écoles privées au Cameroun
Colonisation et construction nationale
À partir du littoral atlantique, la pénétration européenne a d’abord
été le fait des commerçants, missionnaires et explorateurs anglais
durant tout le XIX e siècle. Une fois leur protectorat reconnu
(en 1884), les Allemands établissent peu à peu leur autorité sur
l’intérieur, avant que l’espace camerounais ne soit, en 1919, partagé
entre deux territoires sous mandat (plus tard sous tutelle) de la
France et du Royaume-Uni. La politique de « mise en valeur » inaugurée
par les Allemands sera poursuivie et amplifiée. En l’espace de trois
quarts de siècle seront réunies les conditions propices à la naissance
d’une nation.
L’indépendance (acquise en 1960), puis la réunification (opérée,
partiellement, en 1961), la poursuite de la construction politicoadministrative, économique et sociale du pays, allaient conforter
l’idée nationale et sa concrétisation. Se heurtant d’abord, au tournant
de la décolonisation, à quelques velléités autonomistes, l’intégration
nationale et l’unité du pays, établies par un pouvoir fort sur fond de
relative prospérité, semblent de nos jours bien acquises : l’État
camerounais continue toutefois de reposer sur de délicats équilibres
ethnorégionaux.
De l’ethnie au parler commun
Si le Cameroun se présente comme un pays « bilingue », incluant
une partie « francophone » et une partie « anglophone » – deux
provinces sur huit, et 20 % environ de la population –, cette dualité
officielle n’efface pas la présence de multiples ethnies, la mosaïque
de peuples qui aiment à se définir par leur terroir d’origine (on dit
ici « son village »), leurs coutumes, modes d’agir et de penser. Comme
ailleurs en Afrique, l’affirmation strictement ethnique semble
cependant glisser vers une sorte de patriotisme régional.
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Présentation du pays
Sur le plan linguistique, on compte au moins 150 langues
appartenant à presque toutes les familles présentes sur le continent
africain. Langues officielles depuis 1961, le français et l’anglais
n’occupent pas une situation identique. L’anglais, guère pratiqué dans
l’ancien Cameroun britannique (les écoles de missions lui préférant
les langues africaines), voit son usage actuel dans l’enseignement,
l’administration et surtout les médias se heurter à la forte concurrence
du pidgin. Le français, largement propagé dans tout le pays dès
l’époque coloniale, est aujourd’hui avec 2,5 millions de locuteurs
habituels et au moins autant de locuteurs occasionnels, l’idiome le
plus diffusé et le facteur d’unification primordial du pays.
Avec 45 % de citadins, le Cameroun apparaît de nos jours comme
un des pays les plus urbanisés de l’Afrique tropicale, et
particulièrement jeune comme ses voisins (50 % de moins de 20 ans).
À la recherche de la prospérité d’antan
La diversité écologique et humaine de l’espace camerounais a
depuis longtemps aussi contribué à son développement économique,
dans le secteur de l’agriculture notamment. Grâce à un bon réseau
de communication, tout cela alimente un commerce intense et, pour
partie, une activité manufacturière importante et diversifiée qui a
connu jusqu’aux années 80 une remarquable expansion, à laquelle
s’ajoute la production de pétrole sur le littoral.
En dépit de ces atouts, qui avaient mis il y a vingt ans le Cameroun
sur la voie du décollage, la dernière décennie a vu s’installer une
récession économique très forte, tandis que l’aide étrangère
s’essoufflait (elle représente 10,7 % du PIB) et que la dette extérieure,
écrasante ($7,3 M), devenait une des plus lourdes du continent.
Tel est, brièvement retracé, le contexte historique, culturel et
économique dans lequel s’inscrit cette étude de l’enseignement privé
au Cameroun.
Etude qui s’appuie aussi, dans sa première partie, sur
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Les écoles privées au Cameroun
un rappel général des conditions actuelles de scolarisation,
relativement perturbées, au milieu des années 1990, par les effets de
la crise économique et des ajustements radicaux intervenus dans les
finances publiques. La deuxième partie du document décrit la variété
des établissements privés, de l’enseignement primaire et secondaire,
dont les quatre grandes familles accueillent un quart de l’ensemble
des élèves. La troisième partie précise dans quel cadre juridique
fonctionnent ces établissements, dont certains jouissent d’une
relative aisance financière, beaucoup d’autres éprouvant de sérieuses
difficultés pour équilibrer leurs ressources et leurs dépenses.
Malgré les contraintes qu’il rencontre, mais conscient que
l’existence et le développement de l’enseignement privé constituent
un apport et une richesse indéniables pour le système éducatif
national, l’État se doit de lui apporter son soutien. La quatrième partie
examine ainsi les types d’intervention qui pourraient guider l’action
de l’État, en vue d’assurer les meilleures conditions et le meilleur
équilibre possible dans les nouveaux progrès, nécessaires, de la
scolarisation des jeunes Camerounais.
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I.
PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME
ÉDUCATIF ET DE LA SCOLARISATION AU CAMEROUN
L’organisation du système d’enseignement
Répondant au bilinguisme officiel de la nation camerounaise, son
système éducatif
comprend deux composantes légèrement
différenciées. Le système francophone, majoritaire dans huit des dix
provinces, et le système anglophone, dominant dans les provinces
du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (voir schéma 1 et carte 1).
Pour une population totale d’environ 14 millions d’habitants, on
recensait en 1998-1999 près de 3 millions d’élèves et d’étudiants.
L’enseignement maternel, en expansion, accueille une fraction
toujours réduite des plus jeunes enfants, un peu plus de 100 000 en
1998-1999, âgés normalement de 4 à 6 ans. Il est présent surtout dans
les agglomérations urbaines.
L’enseignement primaire est, sans surprise, le niveau
d’enseignement qui accueille le plus grand nombre d’élèves, environ
2 millions. L’enseignement primaire comprend six années dans le
système francophone et sept années dans le système anglophone. Il
est sanctionné par un diplôme : le Certificat d’études primaires et
élémentaires (CEPE), ou le First Leaving School Certificate (FLSC).
Le taux brut de scolarisation primaire est proche de 82 % pour
l’année 1998-1999, en recul depuis le début des années 1990.
L’enseignement postprimaire est dispensé dans des sections
artisanales rurales (SAR) et les sections ménagères (SM). Environ
14 000 élèves suivent ces formations mises en place pour lutter contre
le chômage des jeunes et l’exode rural.
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19
Les écoles privées au Cameroun
L’enseignement secondaire est ouvert sur concours aux élèves issus
du niveau primaire et âgés de 11 à 14 ans. Il dure sept années réparties
en deux cycles. Le premier cycle dure quatre années (cinq dans le
système anglophone) et le second cycle trois années (deux dans le
système anglophone). Plus de 600 000 élèves sont scolarisés dans les
établissements secondaires. Les deux filières, enseignement général
ou enseignement technique, sont proposées dès le début du cycle
secondaire.
L’enseignement supérieur (environ 30 000 étudiants) accueille les
diplômés de l’enseignement secondaire, sur dossier par les facultés
des universités, ou sur concours pour les grandes écoles.
Le ministère de l’Éducation nationale est responsable des
enseignements primaire et secondaire. Il gère le réseau des écoles et
établissements publics et assure la tutelle administrative des
différentes catégories d’écoles privées ou communautaires.
Pour mener son action le ministère dispose d’une administration
centrale à Yaoundé, d’une délégation provinciale de l’éducation dans
chacune des dix provinces et de délégations départementales. Le
ministère de l’Enseignement supérieur assure la tutelle des
universités et des établissements privés supérieurs.
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Principales caractéristiques du système éducatif
Schéma n° 1.
Le système d’enseignement du Cameroun
Système anglophone
Université et grandes écoles
Bac général Bac technique
Term
Term
1re
1re
nde
2
2nde
BEPC
3e
e
4 générale
5e
6e
CAP
4e
e
3 technique
2e
1e
CEPE
CM2
CM1
CE2
CE1
CP
SIL
Enseignement
primaire
Enseignement
secondaire
Enseignement
supérieur
Système francophone
⇑
Structures de
formation
professionnelle
SAR
SM
Structures de
formation
professionnelle
SAR
SM
CGE
2 Tech.
1
CGE
2 Gen.
1
5 Technical
4 Education
3
2
1
CGE 0 level
5 General
4 Education
3
2
1
FSLC
7
6
5
4
3
2
1
⇑
⇑
Enseignement
maternel
CAP :
⇑
Kindergarden
Certificat d’aptitude générale
CEPE : Certificat d’études primaires et élémentaires
CGE :
Certificate of General Education
FSLC : First Leaving School Certificate
SAR :
Sections artisanales rurales
SIL :
Section d’initiative linguistique
SM :
Sections ménagères
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Les écoles privées au Cameroun
Carte n° 1.
L’organisation territoriale du Cameroun
Extrême-Nord
Nord
Adamaoua
Nord-Ouest
Sud-Ouest
Ouest
Centre
Littoral
Est
Sud
Les progrès actuels ne compensent pas le grave fléchissement
de la scolarisation primaire observé au milieu des années 1990
L’importance des effectifs scolaires, leur poids relativement
important par rapport à l’ensemble de la population du Cameroun,
qui traduit sa jeunesse, ne doit pas cependant cacher un phénomène
de relative stagnation, voire de diminution au milieu des années 1990.
Ce constat vaut tout particulièrement pour le primaire qui, avec
environ 2 millions d’écoliers, compte à peine plus d’élèves qu’en 1990
alors qu’en raison de la vitalité démographique du pays, le nombre
total de jeunes Camerounais en âge de fréquenter l’école ne cesse
dans le même temps d’augmenter (sur un rythme annuel estimé à
2,8 %) (graphique n° 1).
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Principales caractéristiques du système éducatif
Graphique 1.
Évolution de la population scolarisable et des
effectifs d’élèves
4 000 000
3 000 000
population 6-11 ans
2 000 000
élèves du primaire
1 000 000
0
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1995
1996
1998
Malgré la difficulté à pouvoir mesurer avec précision l’intensité
et l’évolution de l’accès à l’école des jeunes générations (voir encadré,
p. 17), on estime que le taux brut de scolarisation dans l’enseignement
primaire de la tranche d’âge 6-11 ans s’élève actuellement à 80 % pour
les années scolaires 1997-1998 et 1998-1999. Par rapport au début
des années 1990, où il dépassait 90 %, le taux brut de scolarisation
accuse un recul sensible, d’environ 10 points ; ce mouvement de
relative déscolarisation semble avoir été particulièrement aigu au
moment de la rentrée 1995, tandis que les rentrées suivantes montrent
au contraire une certaine reprise de la scolarisation. Il ne faut surtout
pas en conclure que plus de 80 % de la tranche d’âge concernée
fréquente effectivement l’école primaire, puisque le calcul des taux
bruts prend en compte, au numérateur, les élèves de tous âges, y
compris de plus de 11 ans, encore nombreux dans les dernières classes
du primaire. Les répartitions par âge des populations scolaires
fournies par le MINEDUC pour l’année 1998-1999 permettent d’isoler
les effectifs du primaire âgés de 6 à 11 ans et d’évaluer à environ 65 %
le taux net de scolarisation. On peut estimer que la proportion de
jeunes Camerounais en âge de fréquenter l’enseignement primaire
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Les écoles privées au Cameroun
mais qui ne sont pas scolarisés se situe en réalité aux environs d’un
tiers.
Si l’accueil dans l’enseignement primaire, qui a connu un
fléchissement inquiétant au milieu des années 1990, est loin d’être
général et reste en retrait par rapport aux objectifs particulièrement
ambitieux, tracés en 1990 à la conférence de Jomtien (auxquels bien
des pays ont dû renoncer), on obser ve aussi que les jeunes
Camerounais qui ont la chance de fréquenter l’école y rencontrent
de sérieuses difficultés, sanctionnées par un ou plusieurs
redoublements. Les dernières données disponibles, relatives au milieu
des années 1990, faisaient état d’un taux moyen de 25 % sur
l’ensemble du primaire, plutôt en régression par rapport aux années
antérieures et un peu plus prononcé en première et troisième années
d’enseignement (classe 1 ou SIL et classe 3 ou CE1). On doit rappeler
la double conséquence d’un tel phénomène, d’abord sur le coût global
de la scolarisation (un quart des effectifs à accueillir sont constitués
de redoublants), et surtout sur la progression scolaire des enfants.
On sait en effet que l’accumulation de retards consécutifs à des
difficultés d’apprentissage favorise l’abandon des études, notamment
avant la fin de la scolarité primaire où l’on considère l’alphabétisation
comme étant acquise de manière irréversible.
Les années durant lesquelles des informations sur les flux d’élèves
de classe en classe sont disponibles apportent quelques précisions
supplémentaires, notamment sur le taux d’accès des jeunes
générations (6-7 ans) à l’école : au début des années 1990, il connaît,
lui aussi, un recul sensible, passant de valeurs proches de 100 % à
73 % à la rentrée 1995, avant une probable reprise lors des rentrées
suivantes. Pour ces années, d’autres indicateurs de scolarisation sont
également disponibles, comme le taux de survie dans l’enseignement,
ou les taux d’accès des cohortes d’entrants aux classes successives
du primaire : on peut ainsi estimer que la moitié seulement des
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Principales caractéristiques du système éducatif
enfants entrés à l’école parviendrait en cinquième année, et à peu
près 40 % en sixième année. Comme les taux de succès à l’examen
final, le CEPE, restent assez modestes, de l’ordre de 60 %, on évalue à
moins d’un tiers la proportion des enfants qui, ayant engagé une
scolarité primaire, la poursuivent intégralement et l’achèvent avec
succès.
Les filles restent minoritaires à l’école
La dégradation assez sensible des fréquences mais aussi des
conditions de scolarisation à laquelle le Cameroun a été confronté
au milieu des années 1990 se double de disparités voire d’inégalités
d’accès à l’enseignement, non seulement entre garçons et filles, mais
aussi selon la situation géographique.
Comme dans la plupart des pays d’Afrique noire, les filles
continuent aujourd’hui d’accuser un retard de scolarisation par
rapport aux garçons, retard que l’on retrouve évidemment dans le
degré d’alphabétisation de la population. À l’école, les filles sont
toujours minoritaires parmi les élèves : elles représentent environ
46 % des effectifs du primaire, et moins de 42 % dans le secondaire
en 1997-98 (mais près de 45 % en 1998-1999), cette proportion
tombant même légèrement en dessous de 40 % dans le seul
enseignement secondaire technique. Même si les différences relevées
dans le primaire apparaissent assez faibles, elles demeurent et aucune
amélioration notable n’est intervenue depuis la fin des années 1980 :
globalement, la part des filles a même légèrement régressé, de 45,9 à
45,1 % en 1997-1998 et 45,7 % en 1998-1999.
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25
Les écoles privées au Cameroun
D’assez fortes disparités régionales
Entre les différentes régions du Cameroun, on relève aussi des
disparités, parfois particulièrement prononcées, de scolarisation : si
les taux bruts de fréquentation de l’enseignement primaire, se
rapportant toujours à la tranche d’âge 6-11 ans, dépassent 100 % en
1998-1999 dans les régions Centre, Sud et Ouest, ils restent proches
de 50 % voire inférieurs en Adamaoua, dans le Nord et surtout
l’Extrême Nord. Cela renvoie, pour partie, à des oppositions ruralurbain et aux difficultés plus grandes pour assurer une offre de
formation suffisante dans des régions reculées ou à habitat dispersé.
Cela tient aussi, comme pour le retard de scolarisation des filles, à
des facteurs historiques, culturels et économiques, dont nous verrons
plus loin l’influence qu’ils peuvent exercer sur les possibilités de
développement de l’éducation (carte n° 2).
Carte n° 2.
Taux brut de scolarisation primaire en 1998-1999
selon la province
(effectifs de l’enseignement primaire / tranche d’âge
6-11 ans)
105-120
90-105
75-90
60-75
0-60
26
Source : d’après Tableau de bord statistique, MINEDUC-DPRD
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Principales caractéristiques du système éducatif
Ce constat d’un inégal accès à l’école est d’autant plus préoccupant
que les différences signalées sont cumulatives. Le retard des filles
sur les garçons apparaît ainsi plus prononcé dans les régions les moins
scolarisées. Cette situation est manifeste dans l’Extrême Nord qui
possède le plus faible taux brut de scolarisation et où, de surcroît,
les filles sont deux fois moins nombreuses que les garçons dans les
écoles primaires : moins d’un quart d’entre elles bénéficient d’une
scolarisation, pourtant obligatoire. Le Nord et l’Adamaoua présentent,
mais à un moindre degré, le même phénomène de sous-scolarisation
féminine (carte n° 3).
Carte n° 3.
Pourcentage des filles dans l’enseignement
primaire en 1998-1999
% de filles
48-50 (4)
42-48 (3)
0-42 (3)
Source : d’après Tableau de bord statistique, MINEDUC-DPRD
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27
Les écoles privées au Cameroun
Autre facteur cumulatif : les régions les plus fortement, si ce n’est
totalement, scolarisées sont plutôt celles qui offrent les meilleures
conditions d’accueil ou, tout au moins, les meilleurs taux
d’encadrement. Si l’on considère le nombre moyen d’élèves par
maître, le Centre ou le Sud bénéficient de ratios nettement meilleurs
que les autres provinces (respectivement 45 et 37 pour une moyenne
nationale de 55 en 1997-1998). À l’inverse, il y a plus de 60 élèves par
maître en Adamaoua et dans les trois régions du Nord du pays. La
situation est à peu près similaire quand on considère le nombre
d’élèves par classe, qui tend à s’élever dans les régions qui accueillent
pourtant à l’école les plus faibles proportions de leurs enfants
(graphique n° 2).
Graphique 2.
Taux brut de scolarisation et nombre d’élèves
par maître (1997-1998)
140
Sud
Taux brut de scolarisation
120
•
Centre
100
• Ouest• • Littoral
Cameroun
80
Est
60
40
••• Sud-Ouest
• Nord-Ouest
• Adamaoua
•
Nord
Extrême Nord
•
20
0
0
20
40
60
80
Élèves par maître
28
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100
Principales caractéristiques du système éducatif
Le recul des principaux indicateurs de scolarisation enregistré au
milieu des années 1990, tendance que le Cameroun tente actuellement
d’inverser, se double donc d’inégalités sociales ou régionales qui ne
semblent pas se réduire. De tels constats vont à l’encontre de la
nouvelle loi d’orientation (n° 98-004 du 14 avril 1998) qui prône une
généralisation et un meilleur équilibre dans l’accès à l’éducation :
Art. 6 : L’État assure à l’enfant le droit à l’éducation.
Art. 7 : L’État garantit à tous l’égalité de chances d’accès à l’éducation
sans discrimination de sexe, d’opinion politique, philosophique et
religieuse, d’origine sociale, culturelle, linguistique ou géographique.
Art. 9 : L’enseignement primaire est obligatoire.
Des difficultés nées de la crise économique et financière
La situation économique générale, et la situation financière de
l’État camerounais en particulier, ne sont bien sûr pas étrangères aux
difficultés actuelles du système d’enseignement. En septembre 1993,
l’État a décidé de diminuer de 60 % les salaires des fonctionnaires.
Quelques mois plus tard intervenait la dévaluation de 50 % du franc
CFA. Ces deux événements ont marqué durablement les budgets
publics, celui de l’éducation en particulier. Si les budgets consacrés à
la formation (éducation, enseignement supérieur et alphabétisation)
représentaient plus de 3 % du produit intérieur brut au début des
années quatre-vingt-dix, ils n’en représentent plus que 1,5 % dans les
années 1995 et 1997, une proportion particulièrement faible au regard
des comparaisons internationales (graphique n° 3).
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29
Les écoles privées au Cameroun
Graphique 3.
Évolution de la dépense publique pour
l’éducation et de sa part dans le PIB
milliards CFA
140
6,0 %
116
120
100
106,6
96,7
80
60
•
•
5,0 %
101,4
96,5
4,0 %
•
3,7 %
3,3 %
•
66,2
69,8
75,5
3,0 %
3,0 %
2,8 %
40
•
20
1,6 %
•
•
1,5 %
1,5 %
1994
1995
1996
•
2,0 %
1,8 %
1,0 %
0
0,0 %
1990
1991
1992
1993
1997
Source des données : Rapport du Cameroun pour le forum mondial sur l’éducation pour tous
Cet ajustement brutal des finances publiques portant sur les
salaires des fonctionnaires a atteint très fortement le pouvoir d’achat
des enseignants, et pas uniquement des titulaires dont le recrutement
a d’ailleurs cessé depuis plusieurs années dans l’enseignement public.
La crise économique et financière a affecté aussi le niveau de vie
général de la population et les familles éprouvent plus de difficultés
à financer les diverses dépenses entraînées par la scolarisation de
leurs enfants.
Un récent rapport du PNUD s’est penché sur les problèmes
particuliers que le Cameroun rencontre depuis plusieurs années : « La
pauvreté s’est largement répandue entre 1983 et 1996 [...] on a assisté
à l’émergence d’une nouvelle catégorie de pauvres, essentiellement
en milieu urbain : près de 51 % de la population est frappée de
pauvreté, contre 40 % en 1983. Les indicateurs révèlent un manque
important en ce qui concerne les services sociaux de base : éducation,
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Principales caractéristiques du système éducatif
santé, accès à l’eau potable. » Pour faire face à la dégradation des
termes de l’échange et répondre à la croissance de la dette extérieure,
l’État camerounais a dû suivre un programme d’ajustement structurel.
Le rapport du PNUD note que « la maîtrise et la restructuration des
dépenses de l’État, la rationalisation du choix des investissements
publics se sont traduites par le désengagement relatif de l’État des
services sociaux de base ».
Les dernières années marquent cependant les signes d’une certaine
reprise économique.
Les familles et l’enseignement privé apportent un complément
à l’effort de l’État
Les difficultés et les contraintes financières lourdes que connaît
actuellement le Cameroun rejaillissent à l’évidence sur le
fonctionnement de son système éducatif. Aujourd’hui, l’État n’a plus
les moyens de « rester seul » face aux problèmes de l’éducation, dont
les besoins de développement sont pourtant vitaux. Cessant de
recruter de nouveaux enseignants titulaires, dans l’incapacité de
pouvoir tous les rémunérer, l’État tente de promouvoir l’idée de
« communauté éducative », susceptible d’épauler ce développement,
et qui repose notamment sur une mobilisation large des familles :
APE, comités de gestion, aide financière pour les cantines, l’achat des
livres. L’État cherche aussi à s’appuyer sur l’existence et l’essor de
l’enseignement privé, qui fait directement appel au financement des
parents.
L’enseignement privé occupe depuis de nombreuses années une
part importante dans l’enseignement primaire et secondaire
camerounais. Aujourd’hui, il regroupe 27 % des effectifs du primaire,
26 % dans le secondaire général et 37 % dans le secondaire technique.
Il comprend en fait 4 réseaux relativement distincts (voir plus loin),
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Les écoles privées au Cameroun
auxquels il convient de rattacher l’école des parents, type
d’enseignement d’initiative communautaire, plutôt développé en
zone anglophone (notamment dans les régions rurales du nord-ouest
du pays, mais pas uniquement (carte n° 4, graphiques n° 4 et 5).
Graphique 4.
Évolution des effectifs d’élèves dans les
écoles primaires
2 500 000
2 000 000
écoles publiques
1 500 000
1 000 000
écoles privées
500 000
0
90-91
Graphique 5.
92-93
94-95
96-97
98-99
Évolution des effectifs d’élèves de
l’enseignement secondaire
500 000
établissements publiques
400 000
300 000
établissements privés
200 000
100 000
0
90-91
32
92-93
94-95
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96-97
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98-99
Principales caractéristiques du système éducatif
Carte n° 4.
Poids de l’enseignement privé selon les
provinces (1998-1999)
Enseignement primaire
Enseignement secondaire
% des élèves dans le privé
40-50 (2)
30-40 (1)
20-30 (2)
10-20 (3)
0-10 (2)
Source : d’après Tableau de bord statistique, MINEDUC-DPRD
Toutefois, s’il y a des facteurs incontestablement favorables à
l’essor du secteur privé, encouragé par l’État et qui répond à une
demande certaine, la crise économique tend aussi à en freiner
l’extension. Beaucoup de parents ne peuvent plus acquitter les droits
de scolarité, des écoles perdent des effectifs, certaines doivent
fermer, faute d’arriver à équilibrer leurs comptes.
Connaissance du fonctionnement du système
éducatif camerounais
Les limites du dispositif d’information statistique actuel
Les informations statistiques disponibles pour les dernières années
renseignent sur l’importance des effectifs scolarisés aux différents niveaux
de formation (garçons, filles, maternelle, primaire, secondaire général,
secondaire technique), les effectifs d’enseignants, de classes et les nombres
d’établissements correspondants. Ces éléments permettent d’apprécier la
répartition des populations scolaires, y compris au niveau régional, de calculer
les taux d’encadrement et les taux brut de scolarisation (rapport des
effectifs totaux d’un niveau à une tranche d’âge donnée de la population).
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33
Les écoles privées au Cameroun
Outre les problèmes de cohérence et de continuité que peuvent présenter
les séries actuelles (couverture et exhaustivité des enquêtes, sans doute
variables selon les années), l’absence d’information sur quelques
« variables » fondamentales limite les possibilités d’approfondir l’analyse
statistique des conditions actuelles de scolarisation au Cameroun.
Ainsi, l’absence d’information précise sur l’âge des élèves ne permet pas
d’exprimer des taux nets de scolarisation, mesurant dans quelles
proportions exactes les jeunes Camerounais fréquentent, à tel ou tel âge, un
établissement scolaire.
L’absence d’éléments sur la répartition par classe, distinguant entrants et
redoublants, empêche pour sa part de repérer les flux d’élèves, d’apprécier
les taux d’accès (à l’enseignement primaire, secondaire ...), taux de passage
ou de promotion de classe en classe, ainsi que le phénomène d’abandon
scolaire. L’enrichissement de l’information sur la démographie scolaire (qui
pourrait être un sous-produit direct des modes de gestion, de contrôle des
établissements ou d’allocation de subventions) améliorerait non seulement
l’analyse et l’expertise du système d’enseignement, mais aussi la pertinence
des politiques qui pourraient être mises en œuvre.
Il apparaît en outre que les recensements actuels des effectifs scolaires auprès
des établissements publics tendent à minorer le nombre total des élèves. En
effet, les statistiques fournies aux délégations provinciales ne portent parfois
que sur le nombre des élèves acquittant l’écolage (également perçu dans
l’enseignement public), et non pas sur l’ensemble des effectifs accueillis. La
suppression de l’écolage dans l’enseignement primaire public peut donc
conduire à partir de 2000-2001, à une brusque réévaluation des populations
scolaires recensées, et par conséquent des taux de scolarisation.
34
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II.
LES QUATRE GRANDES FAMILLES D’ÉTABLISSEMENTS
PRIVÉS
Une grande diversité de situations et de problèmes
La diversité géographique, linguistique, ethnique et culturelle qui
caractérise le Cameroun, va de pair avec un système éducatif, et tout
particulièrement un enseignement privé, riche en nuances.
Les établissements d’enseignement privés se rattachent à quatre
grandes familles traduisant leur appartenance religieuse, mais aussi
juridique : l’enseignement catholique, l’enseignement protestant,
l’enseignement islamique et l’enseignement privé laïc.
Ces quatre grandes familles de l’enseignement privé cachent en
fait une variété bien plus considérable d’établissements, tenant à leur
histoire propre, leur recrutement, leurs moyens et leurs résultats. Il
convient cependant de relever les points communs à l’ensemble de
ces établissements : soumis à une même législation, ils suivent les
programmes officiels, et leur fonctionnement repose principalement,
parfois même uniquement, sur l’aide financière des familles.
Graphique 6. Élèves des écoles primaires privées (1998-1999)
Laïc
18 %
Islamique
5%
Catholique
53 %
Protestant
24 %
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35
Les écoles privées au Cameroun
Graphique 7. Élèves du secondaire privé (1998-1999)
Catholique
26 %
Laïc
59 %
Protestant
14 %
Islamique
1%
Source : d’après Tableau de bord statistique, MINEDUC-DPRD
L’enseignement catholique
Comme dans de nombreux autres pays africains, ce réseau est
relativement ancien (fondé le plus souvent par des missionnaires, au
temps de la colonisation) et fortement structuré (sous la
responsabilité et même l’autorité des différents diocèses).
Plus particulièrement développé dans l’enseignement primaire,
où il regroupe 15 % de l’ensemble des écoliers, et plus de la moitié
des effectifs des établissements privés (contre respectivement moins
de 10 % et 30 % dans l’enseignement secondaire), l’enseignement
catholique prend donc une part importante dans la scolarisation des
jeunes
Camerounais.
Bien
au-delà
des
appartenances
confessionnelles, il attire et accueille des élèves issus de différentes
couches sociales, rurales ou urbaines, et présente, notamment dans
le primaire, un éventail de recrutement assez large.
Au milieu des années 1990, l’enseignement catholique a pu subir,
comme les familles dont il accueille les enfants, les effets de la crise
économique, enregistrant des baisses d’effectifs parfois sensibles,
36
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
pouvant conduire à des fermetures d’établissements. Dans le primaire,
où les écoles ne bénéficient d’aucune autonomie financière, l’Église
ou, du moins, les diocèses ont ajouté à leur rigueur pédagogique
traditionnelle (illustrée par une série de projets ou actions
spécifiques, dont l’une dite de « gestion mentale »), une rigueur
financière assez sévère. L’Église n’apporte pas ou plus de contribution
financière propre, y compris en matière d’investissement : dans le
diocèse de Yaoundé, très peu d’établissements ont ainsi été ouverts
au cours des dernières années. En l’absence d’autres aides extérieures,
et dans un contexte de soutien réduit de l’État, par le biais de la
subvention, il a donc fallu serrer les cordons de la bourse. Toujours
dans la région de Yaoundé, le programme « sans pitié » prévoit ainsi
l’exclusion de l’école des enfants de familles qui, après avertissement,
ne versent pas leurs frais de scolarité.
GESTION MENTALE
I. MISE EN PROJET (4 étapes) :
(a) Annonce du sujet de la leçon
(b) Contrat passé avec les élèves
(c) Utilité de la leçon à l’école ou ailleurs
(d) Réutilisation de la connaissance
II. ÉVOCATION (4 étapes) :
(1) Lecture silencieuse
(2) Lecture individuelle à haute voix
(3) Revoir – Réentendre – Redire en tête – Temps de silence
(4) Vérification
III. LES TROIS NIVEAUX D’APPRENTISSAGE
A. Assimilation (phase de découverte) :
J’observe ➔ Je manipule ➔ Je mémorise ➔ SAVOIR
B. Application (phase d’entraînement) :
J’utilise la connaissance dans les exercices (oraux et écrits) ➔ SAVOIR-FAIRE
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Les écoles privées au Cameroun
C. Transfert (phase d’utilisation) :
Je crée ➔ J’imagine ➔ J’invente ➔ J’utilise la connaissance dans d’autres
circonstances ➔ SAVOIR ÊTRE
DEVISE ET RÈGLE D’OR
–
Si j’entends seulement, je peux oublier
–
Si je vois, je peux me souvenir
–
Si je manipule, je comprends mieux
Si les diocèses cherchent à équilibrer les comptes de l’ensemble
des écoles de leur ressort, et peuvent faire jouer une certaine solidarité
financière au profit des écoles les moins favorisées, malheur à celles
qui n’arrivent plus à générer les ressources suffisantes. Elles sont
incitées à prendre, peut-être provisoirement, congé du réseau :
reclassées dans la catégorie des « écoles paroissiales », elles continuent
à bénéficier d’un soutien et d’une animation pédagogiques
« officiels », mais leur gestion financière est transférée à la paroisse,
en attendant les jours meilleurs qui verront leur situation s’améliorer.
Cette présence, relativement attentive mais ferme, de l’institution
et de l’organisation catholique dans l’encadrement et la régulation
du réseau des écoles primaires est moins sensible dans l’enseignement
secondaire, où les collèges et lycées disposent de plus grandes marges
de manœuvre et d’autonomie. Cela se vérifie sur le plan pédagogique,
mais aussi financier : les établissements secondaires, « bénéficiant »
de recrutements sociaux plus sélectifs, se trouvent moins soumis aux
problèmes de solvabilité des familles et peuvent davantage échapper
aux barèmes officiels de frais de scolarité, qui contraignent beaucoup
d’écoles primaires.
38
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
École primaire Saint-Pierre Apôtre
(école primaire catholique)
L’école, créée en 1968 dans un environnement largement rural, appartient
aujourd’hui à la grande banlieue de Yaoundé, à 10 km du centre-ville. Elle
présente de fait un recrutement assez mixte, mêlant enfants de paysans et
de fonctionnaires ou d’employés travaillant dans la capitale.
Cet établissement relativement important (674 enfants répartis en 12 classes)
frappe par sa discipline, sa propreté, sa bonne tenue, sous l’autorité directe
du secrétaire à l’Éducation et du diocèse. Chaque classe est organisée selon
un schéma bien établi, précis et pensé, et arbore sur ses murs la règle d’or
du programme de « gestion mentale ».
Les frais de scolarité respectent le barème de 24 000 FCFA par écolier, et les
quelque 30 familles qui ne peuvent pas payer sont sanctionnées par
l’exclusion de leurs enfants. Les livres, nombreux, achetés par les parents
sont spécialement fabriqués pour les écoles catholiques. Les enfants, souvent
accueillis dès l’école maternelle catholique voisine, sont suivis par un
enseignant responsable de la discipline et obtiennent de bons résultats au
CEPE.
Fortement encadrés et bons pédagogues, des enseignants ont tendance à
estimer que leur paye (44 000 FCFA pour un titulaire du BEPC, 54 000 FCFA
pour le probatoire, et 71 000 FCFA pour un bachelier ou un titulaire du
CAPI) n’est pas, ou n’est plus aujourd’hui, à la hauteur des efforts qu’ils
continuent de déployer.
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Les écoles privées au Cameroun
Collège Vogt
(établissement secondaire catholique)
Premier collège privé catholique du pays créé en 1951, ce gros établissement
(2 050 collégiens et lycéens) assez « largement » installé à proximité du centre
de Yaoundé connaît une rénovation importante, sous la direction de religieux
expatriés. Il recrute ses élèves dans la bourgeoisie de la capitale, dont il a les
faveurs avec le lycée français Fustel de Coulanges.
Avec 80 000 FCFA de frais de scolarité par élève du 1er cycle, et 90 000 FCFA
dans le second cycle, l’établissement dispose d’un budget global de
200 millions, qui lui donne une aisance et une autonomie financière
certaines. Les prêtres qui en assurent la direction, ouverts à la modernisation
des structures comme aux nouvelles technologies, entendent conforter sa
réputation et son efficacité par une gestion pédagogique mais aussi financière
dynamique. Ils disposent d’un corps enseignant majoritairement constitué
de vacataires, rémunérés 1 500 FCFA par heure, en plus de leur emploi de
professeur titulaire dans les collèges ou lycées publics, ce qui leur assure
une rémunération régulière et mensuelle tout à fait convenable.
L’enseignement protestant
Ce réseau présente par certains aspects des similitudes avec le
réseau catholique. Comme lui, il est mieux représenté dans
l’enseignement primaire que secondaire, tout en accueillant des
effectifs nettement moindres : 6 % de l’ensemble des écoliers et un
peu moins d’un quart des effectifs du privé dans l’enseignement
primaire, contre respectivement 4 et 15 % dans le secondaire.
L’histoire de l’enseignement protestant est, elle aussi, relativement
ancienne, ses origines remontant au XIXe siècle, avec l’arrivée de
missionnaires américains. Son organisation apparaît toutefois plus
complexe que celle du réseau catholique, puisqu’elle comprend en
fait plusieurs familles d’établissements, relevant de différentes Églises
40
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
(adventiste, Églises évangélique ou fraternelle luthériennes, église
presbytérienne ou bien baptiste). On reste cependant frappé par la
dimension confessionnelle forte de l’enseignement protestant, aussi
bien parmi ses dirigeants, directeurs d’écoles, que parmi les parents
qui leur confient leurs enfants. Il cherche l’épanouissement total de
l’élève, au travers de son éducation intellectuelle, physique, manuelle,
civique, et évidemment morale.
La notion de communauté éducative, particulièrement vive et
développée dans le réseau protestant, s’appuie non seulement sur
une forte identité confessionnelle et morale, mais aussi sur
l’organisation d’un ensemble d’activités communes ou collectives :
mouvements de jeunes, associations de femmes, groupes d’anciens
élèves.
Malgré l’existence d’aides et de soutiens extérieurs, beaucoup
d’écoles protestantes rencontrent cependant de très sérieuses
difficultés financières, ayant des répercussions sur la régularité et le
montant des salaires versés aux enseignants. Comme le mentionne le
pasteur, secrétaire national de l’organisation, dans son dernier
rapport annuel : « Depuis plus de dix ans, nous marchons sur une piste
boueuse et glissante [...] Les enseignants de nos institutions supportent
de plus en plus mal leur condition de vie. »
Ce réseau est aussi marqué, comme l’enseignement catholique,
par des préoccupations pédagogiques fortes. Il est ainsi associé au
projet « Réseau École - Développement » (RED – mis en œuvre dans
une série d’écoles pilotes de différents pays africains) qui vise à
adapter l’enseignement à l’environnement et à rendre la pédagogie
plus active et participative (introduction d’enseignements à
l’agriculture, l’élevage, l’art, l’artisanat). Il s’est également lancé dans
l’expérimentation du projet EPMS-DYFOP, dit de « dynamisation
fonctionnelle pédagogique », qui veut favoriser l’efficacité de
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Les écoles privées au Cameroun
l’enseignement (équipement, encadrement pédagogique, stimulation
des aptitudes des enfants ...). Ces actions peuvent faire appel à l’aide
d’organismes extérieurs ou étrangers, notamment d’Allemagne (EZE :
Evangelishe Zentralstelle für Entwickklung).
Centre technique de Maroua
(privé protestant)
Agréablement installé près du centre-ville, cet établissement spécialisé en
menuiserie et mécanique, très propre et bien tenu, regroupe « seulement »
80 élèves pour une dizaine d’enseignants.
Né il y a 25 ans d’une collaboration entre les Églises baptiste camerounaise
et allemande, afin d’« aider et former les jeunes hommes », ce centre
d’apprentissage d’abord sous tutelle du ministère du Travail est ensuite
devenu collège technique : depuis 1988, il prépare au CAP en cinq ans (au
lieu de quatre dans le public), avec un renforcement de la formation pratique.
La réputation du centre attire nombre de candidats, sélectionnés par des
tests d’entrée. Si le niveau de recrutement théorique correspond au début
du cycle secondaire, la plupart des admis ont déjà fréquenté le collège, parfois
pendant plusieurs années.
Les ressources tirées du garage professionnel et les aides de bailleurs de
fonds assurent au collège un budget confortable de 70 millions de FCFA,
auxquels s’ajoute 1,5 million de subventions de l’État (reversées pour partie
au secrétariat de l’organisation). Les frais de scolarité sont en revanche
relativement faibles (15 000 FCFA à partir de la troisième année), certains
élèves bénéficiant de bourses (parfois nécessaires pour leur logement).
Le jeune directeur, entreprenant et ingénieur de formation, a le souci de
« professionnaliser le technique » et d’assurer une bonne insertion à ses
élèves. Conseillé et aidé par une ONG, il essaye de s’adapter aux besoins de
l’économie locale, d’ajuster mais aussi de diversifier ses modules de formation
(des cours de gestion pouvant compléter la formation en soudure ou
menuiserie), permettant ainsi à davantage de jeunes diplômés (munis d’une
caisse à outils comme cadeau de sortie) de pouvoir s’installer à leur compte.
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
L’enseignement islamique
C’est le réseau le plus petit sur le plan numérique, avec environ
30 000 élèves dans le primaire, où il connaît une extension régulière
ces dernières années, mais moins de 2 000 dans le secondaire, où il
reste encore embryonnaire. Ce réseau est en outre assez concentré
géographiquement, son implantation principale étant le nord du
Cameroun, où la religion musulmane est bien plus présente.
Même d’importance relativement plus faible, ce réseau recèle lui
aussi une dualité assez nette. Les écoles dites « franco-arabes », d’une
part, ont été mises en place par l’administration coloniale française.
Passées, depuis l’indépendance, dans le secteur privé, ces écoles et
les familles qui font le choix d’y placer leurs enfants gardent un fort
sentiment d’appartenance au réseau public : les parents manifestent
une certaine incompréhension ou réticence à devoir payer pour un
service éducatif, qu’ils estiment « dû ».
Les écoles islamiques, d’autre part, sont plus récentes et
connaissent un développement certain, notamment auprès des
milieux musulmans plus aisés (commerçants par exemple), qui
n’hésitent pas à verser une participation pour que leurs enfants, et
tout particulièrement leurs filles, puissent bénéficier de cet
enseignement à « dimension morale » marquée. Ces écoles peuvent
être issues d’anciennes écoles coraniques et consacrent un horaire
important à l’enseignement religieux.
Ce réseau, qui se transforme et veut s’affirmer en prenant une
place croissante, rencontre des problèmes spécifiques. Un forum sur
l’Enseignement privé islamique est en cours de préparation avec
l’appui de la Banque islamique de développement dans le but
d’améliorer les performances de ses structures d’encadrement, de
réaménager les programmes et d’harmoniser les contenus
linguistiques et religieux.
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43
Les écoles privées au Cameroun
École franco-arabe de Maroua
(école primaire islamique)
Dans un quartier proche du centre-ville, fait de rues étroites et de concessions
familiales, on trouve non loin de la mosquée cette école ancienne, remontant
à l’époque coloniale. Relativement vétuste, comme endormie dans ses 4 salles
de classe disposées autour d’une large place centrale servant de cour de
récréation, elle accueille à peine 176 élèves. La plupart sont des enfants du
quartier, de « souche non scolarisée », issus de familles nombreuses et de
condition modeste, qui ne comprennent pas qu’il faille acquitter des frais
de scolarité, pourtant minimes. Selon eux, l’État devrait toujours prendre en
charge l’enseignement en arabe.
Face à une situation financière très dégradée (plusieurs dizaines de mois
d’arriérés), on sent la directrice quelque peu démunie, attendant la
subvention du ministère : « Les parents payent quand ils peuvent ». Les
contributions des familles, versées de manière irrégulière, sont
immédiatement utilisées pour l’achat de craies ou de petit matériel. La
subvention du ministère sert à la rémunération des enseignants, payés
ainsi une fois par an.
École El Falah El Hairi
(école primaire et secondaire islamique)
L’école islamique El Falah El Hairi n’est sans doute pas riche, mais offre en
revanche les signes d’un dynamisme et d’un engagement certains.
Issue des écoles coraniques, créée en 1992 sur une initiative communautaire,
elle regroupe aujourd’hui 603 élèves, plutôt issus de milieux aisés ou
commerçants, qui acquittent, le plus souvent sans problème, les 14 750 FCFA
de droits (la dernière subvention de l’État – 750 000 FCFA – remonterait à
1993-1994). On sent l’affirmation d’une identité culturelle et religieuse forte.
Il ne s’agit pas ici de calquer le « modèle occidental », mais de répondre au
désir des parents, notamment de ne pas faire sortir les filles de la coutume,
et de leur conserver « l’accoutrement ».
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
Ce dynamisme s’étend maintenant à l’enseignement secondaire, avec
l’ouverture d’un collège du même nom, flambant neuf et pourvu d’un large
terrain, à l’entrée de la ville.
Les représentants de ces nouveaux établissements, en expansion, posent la
question de leur intégration et participation au réseau islamique officiel, et
des modes de fonctionnement et de solidarité collective qui devraient y régner.
Les enseignants, dont la paye n’est pas toujours régulière, pensent sans doute
et d’abord à aider « leurs frères », et peuvent être « partiellement » bénévoles.
Ils souffrent cependant d’un manque de reconnaissance et voudraient être
officiellement assimilés à de vrais enseignants.
L’enseignement laïc
Contrairement aux autres réseaux, il est proportionnellement
mieux représenté dans l’enseignement secondaire (où l’autonomie
et les marges de manœuvre financières, nous l’avons vu, sont
probablement plus importantes). Ses collèges et lycées accueillent
ainsi environ 100 000 élèves, soit un jeune Camerounais sur six
scolarisés dans le secondaire. Il se distingue aussi des autres
établissements privés du fait qu’il est non confessionnel, et souvent
d’initiative individuelle : l’établissement est ici créé par un fondateur,
qui va souvent en incarner, pendant de nombreuses années, l’identité
et chercher à en promouvoir et soutenir personnellement l’activité,
alors que les organisations collectives, églises ou diocèses, sont la
plupart du temps à l’origine des établissements confessionnels.
Mais il apparaît, une fois encore, que l’enseignement laïc ne
constitue pas un groupe uniforme ou homogène. Il n’est pas
systématiquement d’origine individuelle, mais parfois d’initiative
communautaire : ce peut être le cas en zone rurale (face au manque
d’école publique, un village peut décider d’ouvrir une école), ou bien
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45
Les écoles privées au Cameroun
en milieu anglophone, dans le nord-ouest du pays ; on parlera alors
d’« écoles des parents ».
L’initiative privée individuelle est elle-même diverse. Elle peut être
le fait d’un ancien enseignant ou directeur d’école, animé d’un souci
pédagogique fort (il n’est pas rare que les établissements se
distinguent alors par d’excellents résultats, en particulier aux
examens). Elle peut constituer aussi un simple investissement, à but
lucratif. De ce point de vue, le réseau d’établissements privés laïcs
dont l’histoire est relativement ancienne (créé en 1949) a été marqué
ces dernières années par un développement parfois quelque peu
anarchique et incontrôlé. Des établissements plus ou moins
clandestins et en marge du réseau officiel, constitué, reconnu, voient
ainsi le jour, de manière significative, notamment en milieu urbain
(Douala). Ces créations largement spontanées répondent parfois à
de vrais besoins, mais viennent aussi aviver des situations de
concurrence malsaine, sans respect de la carte scolaire, souvent au
détriment des élèves eux-mêmes en raison de la qualité médiocre de
leur enseignement. Dans son rapport annuel, le secrétaire national
de l’enseignement laïc fustige cette éclosion inquiétante de
nouveaux établissements, dans ces villes « où tout le monde se
découvre déjà comme ayant vocation à devenir fondateur d’école,
même les illettrés ». Et s’il ajoute ou espère que « la plupart des
mauvais établissements de leur secteur, qui sont souvent qualifiés
d’« écuries », vont mourir de leur propre mort et disparaître à jamais »,
il faut noter que, rentrée après rentrée, son souhait a bien du mal à
se réaliser.
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
Collège Matamfen
(collège privé laïc)
Exemple typique d’établissement managé de main ferme par un fondateur
individuel, véritable patron d’une petite entreprise, aussi soucieux de bonne
gestion que de pédagogie efficace (il aurait souhaité être enseignant).
Ce collège a un nom qui signifie « mère du père du chef » et un slogan, « le
temple du savoir », que l’on retrouve imprimé sur le tee-shirt de la plupart
des élèves : tout cela forge une forte identité de « groupe ».
Situé au centre-ville de Yaoundé, l’établissement comptait 500 élèves à
l’origine, en 1976, et environ 1 700 aujourd’hui, ce qui montre son succès
mais pose aussi des problèmes d’extension, et d’exiguïté des terrains. Faute
de place, le collège ne peut accroître sa capacité que par la construction
d’un étage supplémentaire.
Commercial à sa naissance, il a progressivement réorienté son enseignement
vers des formations moins bouchées ; en filière technico-commerciale, il
compte 450 élèves, plutôt d’origine modeste préparant un CAP (droits de
55 000 FCFA) ou un bac G (70 000 FCFA). Les autres élèves, aujourd’hui les
plus nombreux et qui sont majoritairement des filles, suivent les
enseignements généraux des 1er et 2nd cycles (beaucoup sont enfants de
fonctionnaires).
Le financement initial a représenté une lourde charge pour le fondateur, qui
serait très difficile à assumer aujourd’hui (coût du terrain). S’agissant du
fonctionnement, les enseignants sont payés 80 000 FCFA mensuels sur
12 mois, un peu moins que dans le public.
Comme le déclare un enseignant, soucieux de la qualité de son travail : « On
a un patron qui est prêt à hurler si le travail est mal fait ; dans le public, ils
ne connaissent pas beaucoup de contraintes. » Quant au fondateur : « Je ne
fais pas ma publicité ; ce sont les élèves, les parents qui la font. Ils me jugent. »
(En gestionnaire avisé, il accorde des bourses aux meilleurs élèves, pour ne
pas les voir repartir dans le public, et asseoir plus encore la réputation de
son établissement.)
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47
Les écoles privées au Cameroun
L’enseignement privé communautaire n’est pas non plus
monolithique, loin s’en faut, et l’on pourrait distinguer au moins
3 groupes différents. En zone urbaine, le privé laïc anglophone,
souvent fortement structuré et performant, à l’aise financièrement,
fondé par un groupe de familles attachées à ce mode d’enseignement
fait à la fois de discipline et de participation active des enfants. En
zone rurale, le privé communautaire villageois, « classique », souvent
primaire, qui pallie le manque d’écoles publiques ; il correspond à
une école de parents soucieux de proposer un cycle complet de
formation à leurs enfants, et envisageant à terme la « régularisation »
par l’inspecteur et l’intégration dans l’enseignement public. Enfin, le
privé communautaire « non formel », où les programmes et contenus
d’enseignement, plus flexibles, peuvent constituer de simples centres
d’alphabétisation ou bien, en milieu musulman, s’implanter dans les
écoles coraniques.
École PNEU
Parents National Educational Union
(école des parents, primaire anglophone)
Située en banlieue de Yaoundé, cette école maternelle et primaire est née en
1976 de la « nostalgie de parents anglophones » : venus du nord-ouest du
pays, réunis en association, ils ont acheté le terrain et financé sa construction
et son extension progressive (de nouveaux travaux sont en cours).
L’établissement se trouve donc solidement encadré, à la fois par l’association
des parents fondateurs (PNEU) et celle des parents d’élèves actuels (APE).
Vivement recherché malgré la présence à Yaoundé d’autres écoles
anglophones publiques, l’établissement regroupe 711 enfants (239 en
maternelle et 472 en primaire), plutôt mais pas uniquement issus de milieux
favorisés.
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
Le directeur, ami du président du conseil d’administration, gestionnaire averti,
doté d’un fort réseau de relations y compris dans l’administration, porte le
souci de méthodes pédagogiques motivantes et efficaces : avec des résultats
probants, puisque les taux de succès au CEPE sont de 100 %.
Les parents paient 80 000 FCFA de frais de scolarité, plus les livres et les
uniformes. Les recettes permettent de payer les 43 enseignants environ
70 000 FCFA par mois (leur employeur est le PNEU). S’il ne dégage pas de
bénéfice, cet établissement vit sans problème et se voit même allouer
3 millions de FCFA supplémentaires par l’État.
Quelque peu critique sur les programmes du primaire, le directeur tient à
former ses maîtres (mener un cours, une classe) et à développer quelques
expériences pédagogiques (plusieurs maîtres dans une même classe).
La diversité de l’enseignement privé dépasse donc la simple
appartenance à l’une des 4 grandes familles. Elle laisse apparaître
quelques différences fortes, voire quelques clivages ou oppositions
ou bien, au contraire, des similitudes de situations et de problèmes
qui peuvent traverser ces premières catégories « institutionnelles ».
• Le privé rural ou urbain, complément ou concurrent du
réseau public : comme dans d’autres pays africains, il y a une
dualité certaine du réseau privé par rapport à l’enseignement
public. Il y a d’abord les établissements privés dont l’ouverture
répond à un besoin non assuré par le public, notamment en zones
rurales, l’enseignement privé concourant alors à l’objectif, social,
de développer la scolarisation du plus grand nombre possible
d’enfants. Ce complément est plus particulièrement nécessaire
dans certaines régions ou pour améliorer la scolarisation féminine.
En zone urbaine, l’enseignement privé peut se poser en revanche
en concurrent de l’enseignement public, auprès des familles
soucieuses de donner à leurs enfants la meilleure éducation
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49
Les écoles privées au Cameroun
possible, leur évitant le présumé laisser-aller de l’enseignement
public.
• Le privé riche, de qualité, performant ou bien le privé démuni, en
difficulté ou clandestin : de par leur emplacement, leur
recrutement, les frais de scolarité qu’ils pratiquent, les
établissements privés jouissent de situations financières
extrêmement variables, qui se traduisent inévitablement par des
qualités et des résultats scolaires très inégaux. L’enseignement
privé comprend, dans ses différentes composantes, des
établissements remarquablement organisés, performants et
bénéficiant d’une forte demande, à côté d’établissements soit
menacés de fermeture, soit qui ne méritent pas ou ne devraient
pas mériter l’agrément du ministère, du fait de la médiocrité
relative de leurs prestations.
• Le privé communautaire ou à but lucratif : cette distinction
s’apparente sans doute, par bien des aspects, à celles qui opposent
le confessionnel au laïc, ou bien le rural à l’urbain, sans toutefois
leur correspondre tout à fait. On pourrait dire que le projet
prioritaire de l’enseignement communautaire est de satisfaire un
besoin collectif, tandis que le privé lucratif veut occuper et
prendre une place dans le « marché » éducatif. Le premier
prolonge et complète l’effort de l’État tandis que le second tire
profit de ses déficiences ou peut en récupérer les élèves exclus.
Il convient d’aborder maintenant quelques questions essentielles
qui concernent aujourd’hui, au Cameroun, les différentes familles de
l’enseignement privé et permettent de mieux cerner ses problèmes
et ses perspectives de développement.
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
Les problèmes financiers
La question du financement, même si elle épargne quelques
établissements privilégiés, se pose de manière particulièrement aiguë
depuis plusieurs années. Elle se pose dès l’investissement initial ou
quand des extensions se révèlent nécessaires, l’apport financier étant
à la charge du fondateur. S’il s’agit d’un particulier qui ne dispose pas
d’une parcelle prélevée sur son patrimoine personnel, le prix des
terrains, très élevé dans les grands centres urbains, devient vite un
gros obstacle. Les fondateurs les plus anciens reconnaissent qu’il leur
serait difficile de créer aujourd’hui une école. Certains ont pu
bénéficier d’apports de terrains publics, réser vés par le plan
d’urbanisation à des fins éducatives, mais cela semble marginal. La
législation exige en outre du fondateur la disponibilité de bâtiments
et d’équipements répondant à des normes précises, ainsi que le dépôt
dans une banque de l’équivalent de trois mois de salaire des
personnels, préalablement à l’autorisation d’ouverture (avant donc
toute possibilité de recrutement et de collecte des frais de scolarité).
Dans le cadre d’un système bancaire fragilisé par la crise
économique et financière, l’accès au crédit n’est plus aussi facile. Et
l’amortissement du capital investi n’est plus toujours assuré : il peut
être compromis par la solvabilité réduite des familles, l’impossibilité
de fixer des frais de scolarité à un niveau suffisant, si l’école ne se
place pas sur un créneau de clientèle aisée.
Elle se pose aussi, en permanence, pour le fonctionnement
courant de l’établissement et notamment la rémunération des
enseignants. Faute de contributions extérieures notables, et dans un
contexte de réduction des subventions de l’État, les ressources des
établissements privés sont pour l’essentiel supportées par les familles.
Les frais de scolarité, qui font l’objet d’un barème officiel édicté par
le ministère, mais susceptible de dérogations devenues plus
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51
Les écoles privées au Cameroun
fréquentes, couvrent en fait un éventail de valeurs assez large : ils
peuvent aller de 10 000 FCFA (voire moins dans des cas extrêmes,
notamment en zones rurales, dans le nord du pays ou pour
l’enseignement islamique) à 250 000 FCFA par an.
Compte tenu de leurs effectifs, du montant des frais demandés
ou autorisés, de la solvabilité des parents, les établissements sont donc
confrontés à des situations financières fortement contrastées. Tandis
que certains établissements privés vivent dans une aisance que
peuvent leur envier les écoles ou collèges publics, d’autres en sont
réduits à fonctionner avec des moyens sensiblement moindres. Quand
ils sont contraints de limiter le montant des frais de scolarité, les
fondateurs doivent alors, pour l’équilibre de leur budget, assurer le
recrutement d’un nombre d’élèves suffisant. Éviter des effectifs
« minables », qui génèrent des recettes trop faibles, devient souvent
l’obsession des dirigeants des écoles, exacerbant les sentiments de
concurrence et de compétition. De nombreux établissements
rencontrent de fait, ces dernières années, des difficultés croissantes
pour équilibrer recettes et dépenses, qui les conduisent soit au
« dépôt de bilan », soit à réduire ou différer la paye des enseignants.
Cette situation d’étranglement financier touche toutes les
catégories
d’établissements,
confessionnels
ou
non,
et
particulièrement les écoles primaires qui recrutent assez largement
parmi toutes les couches de la population.
L’enseignement catholique, très fortement structuré et encadré,
n’a pas échappé au problème. Lors de la vingtième session de la
commission nationale de l’enseignement privé, son secrétaire national
s’inquiétait : « Pour ne pas fermer bon nombre de nos établissements,
surtout en zone rurale, nous avons signé avec nos personnels des
protocoles d’accord dans lesquels ils acceptent de recevoir une fraction
de leur salaire, allant de 40 à 80 % du salaire dû. » Faisant le bilan
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
des rapports que lui transmettent les différents responsables
régionaux, il constate : « On voit ainsi beaucoup d’élèves qui sortent
en cours d’année pour aller chercher l’écolage et ne reviennent pas. »
Il apporte plusieurs témoignages précis, tel celui du SEDUC de
Nkongsamba : « Nous sommes à couteaux tirés avec les éducateurs
du fait qu’on ne peut régulièrement leur payer les salaires. » Celui de
Bafoussam lui a fait savoir que, « au 3 juin 1998, [leurs] enseignants
maternel et primaire totalisent 43,5 mois d’arriérés de salaire ».
Les enseignements protestant et arabophone dressent des constats
tout aussi alarmistes. Dans son document de présentation du plan
d’action 1999-2004, l’Église évangélique luthérienne du Cameroun
(EELC) fait état d’une situation financière relativement sombre : « Le
cumul des arriérés de salaire atteint en moyenne 34 mois par maître
et s’élève actuellement à plus de 285 millions de FCFA. On n’arrive
plus à payer les cotisations à la CNPS. L’entretien des bâtiments a dû
être suspendu. L’achat des livres ainsi que la formation continue des
enseignants posent problème. Pour l’année scolaire 1997-1998,
l’écolage a juste permis de couvrir un peu plus du tiers du coût de la
masse salariale, d’autant plus que le pourcentage de recouvrement
des frais n’a été que de 47 %. » Le rapporteur déplore : « Les écoles en
milieu rural sont les moins rentables, les plus déficitaires. Certains
tendent à les qualifier d’écoles non viables. Mais ce sont aussi les écoles
les plus indispensables, l’unique chance pour les enfants de zones
rurales d’avoir accès à l’éducation. »
Au fil des ans, les déficits et arriérés accumulés atteignent des
niveaux élevés. L’enseignement privé protestant a effectué une étude
sur son endettement de 1991 à 1997. Il en ressort 107,6 millions de
FCFA d’arriérés de salaire ; 64,9 millions de FCFA d’arriérés de
cotisations à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), et 35,4
millions de FCFA d’arriérés d’impôts.
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Les écoles privées au Cameroun
Les chiffres de l’enseignement catholique sont encore plus
impressionnants. Au 30 juin 1998, l’enseignement privé catholique
accumulait 8,2 milliards de FCFA d’arriérés de salaires ainsi que
2,2 milliards de FCFA d’arriérés de contributions à la CNPS et
633 millions de FCFA d’arriérés d’impôts dus au Trésor public.
De telles situations et de telles dérives ne sauraient se prolonger
durablement sans porter atteinte aux conditions minimales
nécessaires à la survie du secteur de l’enseignement privé, ou du
moins de certaines de ses composantes.
Les problèmes pédagogiques
L’école étant construite et en état de marche, il s’agit de procéder
au recrutement d’enseignants qualifiés, d’assurer leur information
et formation permanente, d’offrir les conditions matérielles et
pédagogiques requises pour un enseignement satisfaisant. Certains
établissements privés font preuve à cet égard d’une organisation
générale et pédagogique remarquable, centrée sur l’élève et sa
réussite (encadrement, discipline, suivi individuel, insertion...).
Concurrents redoutables d’un enseignement public volontiers décrié,
aux effectifs souvent pléthoriques, ils sont très recherchés, à la fois
par les familles qui ont le souci de la réussite de leurs enfants, de
même que par les enseignants qui apprécient ces conditions
privilégiées d’exercice de leur métier.
D’autres établissements privés rencontrent en revanche des
difficultés sensibles pour attirer et rémunérer des enseignants
suffisamment qualifiés. Cela vaut tout particulièrement pour
l’enseignement primaire, tandis que dans le secondaire les collèges
et lycées privés ont plus facilement la possibilité de recruter comme
vacataires des professeurs du public qui trouvent là un moyen
d’assurer des compléments de salaire.
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
Grâce à un personnel souvent motivé malgré les contraintes
financières qu’il peut subir, l’enseignement privé apporte aussi une
diversité et une richesse incontestables aux méthodes et pratiques
pédagogiques, ne se privant pas, au sein de programmes communs à
tous, d’affirmer sa propre identité, voire sa philosophie de
l’éducation. C’est le cas de l’enseignement catholique, encadré et
rigoureux (« la gestion mentale »), de l’enseignement privé laïc dont
l’efficacité scolaire est un gage de succès auprès des parents, de
l’enseignement islamique qui offre une dimension « religieuse et
morale », et de l’enseignement protestant qui prône une éducation
totale, plus intégrée au milieu. Ces pédagogies alternatives peuvent
en venir à critiquer « le système scolaire classique ». Il est « calqué sur
le modèle occidental, et aujourd’hui totalement inadapté aux besoins
d’une société en transition ». Notre enseignement est marqué par la
pédagogie traditionnelle, directive, frontale, autocratique, une
sollicitation excessive de la mémoire au détriment du savoir-faire »
(plan d’action de l’EELC). Ces démarches ou recherches pédagogiques
originales, créatrices, peuvent dépasser le champ strict de
l’enseignement ou de l’école, pour viser un impact social. Une
formation « élargie », l’éveil chez l’enfant de compétences multiples,
l’apprentissage de techniques artisanales, agropastorales sont de
nature à enrichir le capital humain du pays, à favoriser son
développement économique, à améliorer la productivité des
exploitations agricoles. De même, l’effort en faveur de la scolarisation
des filles aura d’heureuses retombées, les enfants d’une mère instruite
ayant eux-mêmes plus de chances d’être en bonne santé et instruits.
Les inspecteurs pédagogiques nationaux et provinciaux, les
inspecteurs d’arrondissement pour l’enseignement de base sont
chargés de l’encadrement des établissements. Ils organisent des
stages, séminaires, journées pédagogiques auxquels les enseignants
du privé sont invités à participer. Ils effectuent également des visites
de contrôle des écoles et d’inspection des classes.
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Les écoles privées au Cameroun
En complément à ces actions de l’État, les organisations de
l’enseignement privé ont chacune un ser vice de pédagogie
fonctionnant de manière autonome, permettant de « personnaliser »
la pédagogie mise en œuvre dans les différents réseaux.
Les établissements privés revendiquent une autonomie
pédagogique : ils peuvent hésiter à impliquer l’expertise du ministère
de l’Éducation dans leur projet et montrer des réticences à participer
aux actions proposées par celui-ci. L’organisation de l’enseignement
catholique envisage ainsi de créer sa propre école normale
d’instituteurs de façon à maîtriser totalement la formation
pédagogique initiale de ses enseignants.
Autre élément central, pour l’apprentissage scolaire, le fait de
pouvoir disposer de manuels, à titre personnel, dans les différentes
matières enseignées. Le manque de livres se révèle parfois criant dans
certaines écoles. Cela peut tenir, pour les écoles islamiques, à une
absence de manuels en langue arabe, mais plus souvent à un coût
sans doute prohibitif pour les parents (s’ajoutant, au moment de la
rentrée, au versement de tous les autres frais). Même si se développent
des systèmes d’entraide, de prêts de livres (par le biais par exemple
des APE), il apparaît souhaitable de pouvoir obtenir auprès des
éditeurs ou par le biais d’aides extérieures une réduction significative
des prix de vente proposés aux familles.
La demande : les raisons du choix du privé
Malgré les difficultés que peut actuellement traverser
l’enseignement privé et la charge financière qu’il représente pour
certaines familles, les incitations ne manquent pas pour « faire le
choix » du privé :
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Les quatre grandes familles d’établissements privés
• raisons religieuses ou morales, d’abord bien sûr dans le cas de
l’enseignement confessionnel et sans doute de manière plus
prononcée pour l’islamique et le protestant que pour le
catholique. Ces raisons dépassent le simple souci d’apprentissage
par les enfants des écritures saintes, Coran ou Bible ; elles
répondent aussi à des préoccupations morales, d’apprentissage
de comportements, du respect de certaines règles de vie. En milieu
musulman, ce souci porte plus particulièrement sur les filles dont
la scolarisation n’est souvent acceptée qu’à condition de suivre
un « code » de conduite, voire d’habillement : « elles doivent garder
l’accoutrement ».
• exigence de qualité, de suivi individuel, notamment pour les
familles choisissant l’enseignement laïc ou catholique. Cette
exigence est souvent satisfaite par la limitation des effectifs des
classes, rendant possible un enseignement plus personnalisé et
attentif. Si l’école publique se voit souvent accusée de compter
des classes pléthoriques, ce reproche n’est pas le seul. Les
enseignants, fonctionnaires, seraient trop souvent absents et peu
préoccupés de la réussite de leurs élèves, tandis que la nécessité
d’être efficace prévaut davantage dans le privé (qui doit satisfaire
les familles qui le financent).
• absence d’école publique : la carte scolaire présente des lacunes
manifestes, notamment en zone rurale (ce que confirme la
faiblesse de certains taux de scolarisation régionaux), les familles
n’ayant alors d’autre recours que de créer des locaux de
scolarisation au sein ou à proximité de leur village.
S’agissant des filles, on sait les freins traditionnels, culturels,
moraux mais aussi économiques, qui limitent leur scolarisation, même
primaire, dans beaucoup de pays africains. Nombreuses sont les
familles démunies qui renoncent à scolariser leurs enfants ou tous
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Les écoles privées au Cameroun
leurs enfants, les filles étant les premières à subir cette contrainte,
pour des raisons de coût mais aussi de réticence des parents, à partir
d’un certain âge, à les laisser quitter la maison.
Au Cameroun, les filles, minoritaires dans le public, sont un peu
mieux représentées dans le privé, l’écart étant encore plus net dans
l’enseignement secondaire. Beaucoup de parents choisissent donc
d’envoyer leurs filles dans le privé, et préfèrent consentir cet effort
financier plutôt que de les laisser fréquenter l’enseignement public :
cette attitude est manifeste dans certains milieux musulmans, où
l’école islamique est la seule forme « morale » acceptable, même
payante, de scolarisation des filles. Ce constat va de pair avec le fait
que les familles du privé ne sont pas nécessairement aisées, mais
acceptent souvent d’obérer leur budget pour éviter les « travers » de
l’enseignement public.
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III. L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DE
L’ENSEIGNEMENT PRIVÉ
Un arsenal législatif et réglementaire abondant
Le fonctionnement des établissements d’enseignement privé est
fortement encadré par un ensemble de textes législatifs et
réglementaires.
Le texte principal, celui de la loi 87/022 du 17 décembre 1987,
s’appuie dans l’exposé de ses motifs sur le préambule de la
Constitution : « L’État assure à l’enfant le droit à l’instruction.
L’organisation et le contrôle de l’enseignement à tous les degrés sont
des devoirs impérieux de l’État. » La loi pose le double principe de la
liberté d’exercice des activités scolaires et de la responsabilité des
fondateurs.
Les établissements privés poursuivent les mêmes objectifs que
ceux assignés aux écoles publiques ; ils appliquent les programmes
officiels et préparent aux diplômes correspondants. Ils peuvent
assurer, en plus des programmes officiels, un enseignement religieux
(art. 4). Les modalités d’application de la loi ont été fixées par le décret
90/1461 du 9 novembre 1990.
Les organisations de l’enseignement privé
Tout établissement privé est d’abord identifié par son fondateur.
Le fondateur d’une école privée est la personne physique ou morale
qui, sur sa demande, est autorisée par le gouvernement à créer un
établissement d’enseignement et à le faire fonctionner. Il en assure
la responsabilité administrative, financière et pédagogique (art. 7 et
8 de la loi).
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59
Les écoles privées au Cameroun
Les fondateurs d’écoles privées doivent obligatoirement adhérer
à l’une des quatre organisations légalement reconnues et dotées de
la personnalité juridique. Trois des organisations regroupent des
fondateurs d’établissements confessionnels : enseignement
catholique, protestant, islamique ; la quatrième organisation regroupe
les établissements privés non confessionnels ou laïcs (loi de 1987,
art. 10).
Le fonctionnement de ces organisations a été précisé par le décret
de 1990 (chap. II). Les organisations sont des associations de
fondateurs. Leur règlement intérieur doit être approuvé par le
ministre chargé de l’Éducation nationale. Chaque organisation
comprend : un président, élu pour trois ans parmi les fondateurs, qui
représente l’organisation ; un secrétariat national, organe
administratif dirigé par un secrétaire national et un secrétaire national
adjoint nommés par arrêté du ministre pour une période de trois ans
sur une liste de trois candidats proposés par l’organisation ; des
secrétaires à l’éducation placés au niveau régional également nommés
par décision du ministre.
Le secrétaire national est investi d’une mission permanente et
générale d’information, de coordination pédagogique et
administrative et de synthèse entre son organisation et le ministre
chargé de l’Éducation nationale (art. 18).
Les secrétaires à l’éducation sont chargés de la coordination et de
l’encadrement pédagogiques, de la coordination administrative et du
contrôle de gestion des établissements, sous l’autorité du secrétaire
national (art. 19).
Dans la pratique, les rôles administratifs des secrétaires à
l’éducation et des secrétaires nationaux peuvent être variables selon
les organisations. Dans le cas de l’enseignement privé laïc, les
60
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
fondateurs, le plus souvent des personnes individuelles, ont la
responsabilité directe de l’école, en assurent la gestion, sont les
employeurs de leurs personnels. Les secrétaires de l’organisation
jouent un rôle de coordination, de représentation auprès des services
de l’État, organisent des journées pédagogiques…
Dans le cas des écoles catholiques, l’organisation territoriale
recoupe celle des évêchés. L’évêque dirige l’Église catholique,
« fondatrice des écoles ». Les écoles primaires ne jouissent d’aucune
autonomie administrative ou financière. Le secrétaire à l’Éducation
centralise l’ensemble des ressources collectées par les établissements
et gère financièrement et administrativement son réseau. Le
secrétaire à l’éducation est ainsi l’employeur des enseignants. Cette
centralisation au niveau de l’évêché se traduit par le principe d’unicité
de caisse et ainsi de solidarité financière entre les différentes écoles.
Les écoles secondaires catholiques jouissent d’une plus grande
autonomie, avec une gestion financière assurée au niveau de l’école :
elles conservent les ressources financières qu’elles collectent pour
leur propre usage.
L’enseignement protestant est plutôt organisé autour des
différentes Églises fondatrices des écoles : adventiste, pentecôtiste…
La gestion financière des écoles n’est pas centralisée comme dans le
cas de leurs homologues catholiques. Dans leur rôle d’intermédiaire
avec les services du ministère, les secrétaires à l’éducation jouent un
rôle de redistribution des subventions de l’État.
Les secrétaires à l’éducation de l’enseignement islamique ont une
fonction qui va au-delà de la simple coordination et de la
redistribution des subventions d’État. Dans le cas des écoles francoarabes, les secrétaires à l’éducation assument une cogestion des
problèmes avec les communautés fondatrices et les directeurs des
établissements et un rôle de supervision administrative.
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61
Les écoles privées au Cameroun
La tutelle de l’État
La tutelle des établissements d’enseignement privé est assumée
par le ministre en charge de l’éducation. L’organisation et les missions
du ministère ont été précisées par le décret n° 95/041 du 7 mars 1995,
dont les articles 50 à 53 concernent la direction de l’enseignement
privé. À ce titre, il est chargé :
• des relations avec les organisations de l’enseignement privé. Il
nomme les secrétaires à l’éducation, sur proposition des
organisations ;
• du contrôle administratif et financier des établissements
d’enseignement privé des trois ordres d’enseignement : maternel
et primaire, secondaire général, technique et professionnel ;
• de l’octroi des autorisations d’ouverture, de réouverture et de
fermeture des établissements, après étude des dossiers de
demande ;
• de l’inspection et du contrôle pédagogique des établissements ;
• de l’attribution éventuelle de subventions dans la mesure des
moyens budgétaires disponibles. Il répartit la subvention et
contrôle son utilisation ;
• de la tenue, la préparation, l’organisation et l’exploitation des
travaux de la Commission nationale de l’enseignement privé ;
• de la détermination des infrastructures scolaires.
Le ministère de l’Éducation remplit cette mission à travers ses
structures administratives centrales et locales.
Au niveau central, la Direction de l’enseignement privé comprend
trois services. Le service du contrôle administratif et financier des
établissements privés d’enseignement maternel et primaire, le service
du contrôle administratif et financier des établissements
62
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
d’enseignement secondaire général, technique et professionnel, le
service des études et du contrôle pédagogique.
Les inspections générales de pédagogie, la direction de la
prospective ont également compétence pour les établissements
privés.
Au niveau déconcentré, les délégations provinciales représentent
le Ministre pour l’exercice de la tutelle des établissements privés. Les
organisations de l’enseignement privé souhaiteraient la création de
ser vices provinciaux de l’enseignement privé qui seraient un
interlocuteur privilégié pour les secrétaires à l’éducation.
Créée par le décret de 1990, la Commission nationale de
l’enseignement privé est un organe consultatif qui doit se réunir au
moins une fois par an. Présidée par le ministre de l’Éducation
nationale, elle comprend des représentants de la présidence de la
République et de l’Assemblée nationale, du Conseil économique et
social, de différents ministères (Finances, Plan, Travail), de
l’Organisation syndicale des travailleurs, de la Caisse nationale de
prévoyance sociale, les présidents des quatre organisations, les
secrétaires nationaux et leurs adjoints, les secrétaires à l’éducation,
plusieurs directeurs du ministère de l’Éducation nationale, les
délégués provinciaux de l’éducation. Elle a pour mission de faire le
bilan administratif, financier et pédagogique des quatre organisations,
d’examiner les problèmes que rencontrent les établissements, et de
proposer au ministre des mesures nécessaires à leur bon
fonctionnement.
Les secrétaires nationaux doivent présenter chaque année, par
écrit et par oral, un bilan administratif, financier et pédagogique
devant la Commission.
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63
Les écoles privées au Cameroun
La création d’un établissement privé
Soumises à l’autorisation du ministère de l’Éducation nationale, la
création et l’ouverture d’un établissement privé font l’objet de deux
procédures distinctes et successives, également précisées par le
décret du 9 novembre 1990 (chap. I, sect. I et II).
L’autorisation de création d’un établissement scolaire ou de
formation privé constitue la première étape. Le futur fondateur
soumet son projet sous forme d’un dossier normalisé comprenant
une demande timbrée, un bulletin de casier judiciaire, un dossier
technique avec les études des fondations, des bâtiments à construire
assorties d’un devis estimatif ainsi qu’un certificat de propriété du
terrain (art. 5). Le dossier est déposé à la Délégation provinciale de
l’Éducation nationale et le ministère dispose de 90 jours pour
éventuellement rejeter le dossier. L’autorisation de création est
accordée pour une durée de trois ans (art. 5).
L’autorisation d’ouverture constitue la deuxième étape et la
procédure à suivre par le fondateur est analogue. Le dossier à déposer
à la Délégation provinciale comprend une copie de l’autorisation de
bâtir, un certificat d’adhésion à l’une des quatre organisations de
fondateurs, la liste nominative des personnels administratifs et
enseignants, une attestation bancaire pour un compte séparé du
compte personnel du fondateur et créditeur d’un montant égal à trois
mois de salaire de l’ensemble du personnel, la liste des équipements
didactiques. L’autorisation d’ouverture est prononcée par un arrêté
du ministère de l’Éducation nationale et vaut pour une durée
illimitée.
À la fin de cette procédure, le fondateur pourra annoncer
publiquement l’ouverture de l’école, commencer le recrutement des
élèves et la collecte des frais de scolarité.
64
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
Les conditions mises à l’ouverture d’un établissement privé
entraînent des charges lourdes pour le candidat fondateur : propriété
du terrain, financement des investissements, réserve représentant au
moins trois mois de masse salariale. C’est là sans doute un frein à la
création d’écoles privées. Il semble aussi que les procédures
d’autorisation puissent prendre plus de temps que les limites posées
par le décret.
L’organisation des établissements
L’organisation des établissements fait elle aussi l’objet d’une
réglementation précise. Tout établissement ouvert avec l’autorisation
du ministre de l’Éducation doit avoir une appellation (art. 23) et
comporter des cycles complets (art. 24). Le nombre des élèves par
salle de classe est fixé à 60 pour l’enseignement général, 25 pour les
ateliers et les salles spécialisées (art. 25). Les organes administratifs
et leurs responsabilités sont décrits : conseil d’établissement,
fondateur, directeur et conseil des maîtres pour les écoles primaires
(art. 26), conseil d’établissement, fondateur, principal, vice-principal,
conseil des professeurs, conseil de discipline, surveillant général,
agent financier pour les établissements secondaires (art. 27).
Les rôles respectifs du fondateur et du directeur ou principal sont
précisés par l’arrêté n° 41 du 17 juillet 1991. Conformément à la loi de
1987, le fondateur exerce la pleine responsabilité du fonctionnement
administratif, financier et pédagogique, assortie de l’obligation de
faire fonctionner l’établissement. Il recrute le personnel enseignant
et adresse au délégué provincial les demandes d’agrément aux
fonctions de gestion de son établissement (art. 12). Le directeur ou
principal est le responsable administratif de l’établissement, dont il
dirige et contrôle tous les agents. Il veille sur le régime pédagogique
(art. 19) et procède notamment au recrutement des élèves. Le cumul
des fonctions de fondateur et de directeur est possible (art. 13), à
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65
Les écoles privées au Cameroun
condition que la personne soit dégagée de toute autre fonction
extérieure.
Les ressources des établissements
Après avoir souligné que les frais d’investissement et de
fonctionnement incombent au fondateur, la loi de 1987 liste les
ressources financières des établissements privés (art. 15). Les
ressources comprennent les fonds propres, les frais de scolarité
(écolage, pension, cantine), les produits d’activités diverses de
l’établissement, les dons et legs et les aides éventuelles des APE.
Éventuellement l’État peut, pour un établissement déterminé,
accorder des subventions au fondateur, compte tenu des moyens
disponibles (art. 16).
Les taux des frais de scolarité, de pension et de cantine sont fixés
par un arrêté conjoint des ministres chargés des prix et de l’Éducation
nationale, sur proposition du fondateur (art. 17). En fait, un arrêté
fixe les taux maximaux des frais de scolarité et de cantine selon le
niveau d’enseignement et les zones rurales, semi-urbaines, (chefslieux de départements) ou urbaines (chefs-lieux des provinces). Les
frais de scolarité comprenant la bibliothèque, les frais médicaux,
l’assurance coopérative, l’association sportive étaient fixés pour les
écoles primaires à 9 000 FCFA en zone rurale, 13 000 FCFA en zone
semi-urbaine et 14 000 FCFA en zone urbaine (cf. encadré).
L’application de tels barèmes et leur contrôle par l’État ont été
assouplis par le processus de libéralisation économique. Il semble
que les écoles confessionnelles secondaires et les écoles privées
laïques, qui recrutent leurs enfants auprès des milieux plus aisés,
soient les principales bénéficiaires de ce processus qui leur a permis
d’augmenter fortement leurs frais de scolarité. Les écoles primaires
confessionnelles, dont le recrutement social est plus « ouvert », n’ont
66
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
pas pu augmenter le niveau de leurs droits qui seraient devenus
insupportables pour les parents. Pris en étau entre les difficultés
économiques des familles et la baisse de la subvention de l’État, ces
établissements connaissent pour beaucoup une situation financière
délicate que l’augmentation du nombre d’élèves par classe ne suffit
pas à résoudre.
Tableau A.
Grille des taux d’écolage, de pension et de
cantine annexée à l’arrêté n° 330/A/386/
MINEDUC/DEP du 18 août 1988 (en francs CFA)
Types de formation
Zone Rurale
Zone
Semi-urbaine
Zone Urbaine
Enseignement maternel
6 000 F
10 000 F
20 000 F
et 50 000 F
pour Yaoundé
et Douala
Enseignement primaire
de 6 000 F
à 9 000F
de 9 000 F
à 13 000 F
14 000 F
* Premier cycle
Enseignement secondaire
général
de 30 000 F
à 34 000 F
de 34 000
à 38 000 F
de 38 000 F
à 42 000 F
* Second cycle
Enseignement secondaire
général
de 40 000 F
à 44 000 F
de 44 000 F
à 48 000 F
de 48 000 F
à 53 000 F
* Premier cycle
Enseignement secondaire
tech. commer.
de 34 000 F
à 38 000 F
de 38 000 F
à 42 000 F
de 42 000 F
à 46 000 F
* Second cycle
Enseignement secondaire
tech. commer.
de 46 000 F
à 50 000 F
de 50 000 F
à 55 000 F
de 55 000 F
à 60 000 F
* Premier cycle
Enseignement secondaire
tech. indust.
de 42 000 F
à 46 000 F
de 46 000 F
à 50 000 F
de 50 000 F
à 58 000 F
* Second cycle
Enseignement secondaire
tech. indust.
de 50 000 F
à 54 000 F
de 54 000 F
à 60 000 F
de 60 000 F
à 70 000 F
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67
Les écoles privées au Cameroun
La subvention de l’État
Tout d’abord, elle n’est qu’éventuelle. Ce point de la loi est
fortement souligné par le ministère de l’Éducation qui ne veut pas
laisser ouvrir un droit à la subvention et met plutôt les fondateurs
devant leurs responsabilités et leur obligation légale de faire
fonctionner l’école. La subvention de l’État concourt au paiement du
salaire des enseignants (art. 53 du décret de 1990). L’État peut à tout
moment ordonner le contrôle de la gestion de la subvention (art.
56), qui doit être versée sur un compte bancaire séparé (art. 55).
L’administration refuse ainsi toute responsabilité dans l’accumulation
d’arriérés de salaires.
Réparties par le ministère de l’Éducation nationale entre les quatre
organisations, les subventions sont allouées globalement pour
l’enseignement primaire, et par établissement pour les établissements
secondaires ; elles transitent par l’intermédiaire du secrétaire national
et des secrétaires à l’éducation. Dans le cas des écoles laïques, les
subventions sont attribuées et versées directement aux fondateurs
des établissements.
Dans la pratique, la subvention de l’État a un impact très différent
selon l’aisance financière de l’établissement. Dans les établissements
riches, où elle représente une part négligeable du budget, elle est
reçue comme un geste, une récompense. Dans les écoles les plus en
difficulté, la subvention de l’État constitue en revanche la principale,
parfois même l’unique pour le cas des écoles franco-arabes, source
de financement des rémunérations des enseignants. On comprend
dès lors avec quelle impatience la subvention annuelle, aléatoire dans
son calendrier et dans son montant, est attendue par les secrétaires à
l’éducation, les directeurs et les enseignants. Elle ne suffit toutefois
pas à payer la totalité des salaires contractuellement dus et de
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
nombreuses écoles conservent des arriérés de salaires, de versement
des cotisations à la CNPS ou d’impôts à reverser au Trésor public.
Le montant total de la subvention de l’État n’a pas été épargné par
les ajustements budgétaires de l’État. Il est passé de 7,35 milliards de
FCFA en 1986-87 à 3,5 milliards en 1998-1999. Les responsables de
l’enseignement privé voient dans ce désengagement financier de
l’État l’une des raisons de leurs difficultés financières, et le
représentant de l’enseignement laïc adresse cette demande lors de
la 20e commission : « La relance économique devenant désormais une
évidence, la révision du taux de subvention à la hausse est un de nos
souhaits ardents. »
Pour les responsables du ministère de l’Éducation nationale, les
charges de fonctionnement des établissements privés – et notamment
le règlement des salaires des personnels – sont restées, à tort,
tributaires du versement des subventions qui ne sont qu’éventuelles
et visent à apporter un complément aux rémunérations. La
paupérisation des familles, la baisse des effectifs, la mauvaise gestion
et l’absence de sanction contribuent sans doute aux difficultés
financières accrues de certains établissements : l’État ne l’ignore pas,
mais ne peut ni ne veut « éponger les dettes ».
Les associations de parents d’élèves
Le rôle des associations de parents d’élèves (APE) est défini par
l’arrêté interministériel n° 242 du 25 octobre 1979. L’APE a pour but
de promouvoir et défendre les intérêts matériels et culturels de
l’établissement, d’étudier et de favoriser la réalisation de toute
activité post et périscolaire, de représenter, par ses mandataires, les
parents d’élèves auprès des autorités scolaires et administratives.
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69
Les écoles privées au Cameroun
(a) L’APE et son dynamisme sont particulièrement significatifs de
l’existence d’une communauté éducative, qui se manifeste plus
volontiers dans l’enseignement privé.
Mais, outre sa vocation à contribuer au rapprochement entre
l’institution scolaire et les parents, l’APE a un rôle d’assistance
financière que le ministère de l’Éducation nationale a tenu à rappeler
ou à affirmer dans une lettre circulaire du 14 mai 1990. Soucieux de
voir les familles intensifier leur soutien à l’État ou aux établissements,
le ministère leur suggère donc très explicitement d’inscrire à leur
« programme culturel d’action » les charges ou préoccupations
suivantes :
• recrutement de personnel d’appoint,
• travaux de construction et de maintenance divers,
• fournitures et matériels pédagogiques.
(b) La contrepartie d’un tel effort ou devoir est nécessairement un
droit de « regard » accru dans le fonctionnement des
établissements. L’APE doit pouvoir participer au contrôle des flux
financiers (entre les 3 acteurs institutionnels : ministère,
associations, fondateurs). Comme l’indiquait le Secrétaire national
de l’enseignement catholique à la dix-neuvième session : « C’est
en grande partie grâce à elles que, cette année, on a enregistré
moins de détournements des frais de scolarité. »
Les circuits financiers de l’enseignement privé et leurs acteurs
L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
génèrent un ensemble de flux financiers « croisés » (voir schéma n° 2),
d’un montant total de plusieurs milliards de FCFA, qui mettent en jeu
et « intéressent » quatre groupes d’acteurs principaux :
70
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
• l’établissement et ses reponsables (fondateur, directeur) ;
• les parents (regroupés dans les APE) qui assurent une grande part
des ressources par le versement de frais de scolarité ou aides
diverses ; les personnels qui perçoivent leurs salaires ;
• les organisations qui perçoivent de chaque établissement de leur
secteur une cotisation annuelle (250 FCFA par élève du primaire,
500 FCFA dans le secondaire), destinée à financer le
fonctionnement de leur secrétariat et l’organisation des activités
de formation des enseignants. Leur rôle d’encadrement des quatre
réseaux respectifs est plus affirmé dans l’enseignement primaire,
notamment catholique, où les organisations peuvent directement
intervenir dans la gestion financière des établissements (voir
schéma n° 3) ;
• les pouvoirs publics, qui versent la subvention et qui perçoivent
des prestations et taxes diverses (CNPS, impôts).
Situé au cœur de ce système, l’établissement dispose d’un degré
d’autonomie variable, particulièrement réduit dans le cas des écoles
primaires catholiques. Elles sont gérées par le secrétaire à l’Éducation,
bras administratif du diocèse, fondateur des écoles. Dans chaque
diocèse, le secrétaire à l’Éducation centralise à son niveau les frais de
scolarité payés par les familles, dont il fixe le niveau, et reçoit les
subventions de l’État. Il gère les établissements, et autorise toutes
les dépenses. Le principe d’unicité de caisse lui permettant de mettre
en œuvre une solidarité financière entre écoles riches, plutôt
urbaines, et écoles pauvres, plutôt rurales, les écoles ne sont pas
assurées de pouvoir disposer des ressources collectées auprès de leurs
élèves.
Les écoles secondaires dans toutes les organisations, ou les écoles
primaires laïques, bénéficient d’une plus grande autonomie, gérant
à leur niveau les ressources collectées auprès des familles, ou la
subvention de l’État.
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71
Les écoles privées au Cameroun
Les différents flux financiers sont régis par un ensemble de textes,
lois, arrêtés ou circulaires, venant fixer les règles du jeu communes,
la plupart, si ce n’est la totalité, des barèmes applicables aux frais,
taxes ou salaires.
Un tel régime, égalitaire dans son inspiration, se révèle souvent
très contraignant sur le terrain, parfois inapplicable et donc
contourné. L’enseignement privé camerounais, qu’il recherche le
profit immédiat ou simplement les moyens de sa survie, tend dès lors
à s’affranchir des textes qui le réglementent.
L’État lui-même a d’ailleurs introduit, ces dernières années, plus
de souplesse, en autorisant par exemple des dérogations aux barèmes
officiels des frais de scolarité. Ces nécessaires assouplissements ne
suffisent pas et des pratiques contraires aux textes, libres de contrôles
et de sanctions, s’observent quotidiennement.
La nécessité d’un tel contrôle devrait pourtant rencontrer l’intérêt
des différents acteurs concernés. Pour l’État, il y va de son autorité,
du respect de la loi, du bon recouvrement des taxes et cotisations
qui lui sont dues, comme de la préservation des intérêts des parents,
des citoyens. Les familles, qui doivent pouvoir consulter les comptes
financiers qu’elles alimentent, attendent des établissements une
gestion efficace, transparente. Les organisations, soucieuses de leur
image de marque, ne sauraient tolérer en leur sein des établissements
peu scrupuleux, en marge des règlements que d’autres respecteraient.
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L’organisation et le fonctionnement de l’enseignement privé
Schéma n° 2.
Circuits de financement et de
fonctionnement de l’enseignement privé
Ministère de l'Éducation
subvention
Organisation
Secrétariat national
ONG, jumelage
Aide extérieure
contributions
création,
ouverture
Délégation provinciale
Secrétaire à l'éducation
contributions
Scolarité, pensions,
cantines
Parents
Coordination,
subvention d'État
Contribution
250 FCFA / élève
Coordination,
subvention d'État
Contrôle
création, ouverture
cotisations
École / Fondateur
contributions
APE
Cotisation CNPS
Travaux, équipement
produits d'activités
Achats directe
livres, fournitures
Reversement impôts
Assurance scolaire
Sport scolaire
rémunération enseignants
et non-enseignants
Schéma n° 3.
Fonctionnement Investissement
Circuits de financement et de
fonctionnement de l’enseignement primaire
catholique
Ministère de l'Éducation
subvention
ONG, jumelage
Aide extérieure
Organisation
Secrétariat national
contributions
contributions
subvention
Évêché
Fondateur
Délégation provinciale
Contrôle
création, ouverture
Secrétaire
à l'éducation
Cotisation CNPS
Parents
Scolarité, pensions,
cantines
Reversement
des ressources
Assurance scolaire
cotisations
Sport scolaire
APE
contributions
Achats directe
livres, fournitures
Reversement impôts
Écoles primaires
catholiques
Institut international de planification de l'éducation
Rémunération enseignants
et non-enseignants
Fonctionnement
Investissement
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73
Les écoles privées au Cameroun
Malgré cet ensemble d’intérêts et de moyens de pression
relativement convergents, le fonctionnement, le financement, le
développement de l’enseignement privé semblent pourtant échapper
aux nécessaires outils de contrôle et de transparence. Un contrôle
strict et permanent pourrait d’ailleurs se révéler impossible à mettre
en œuvre (coût, absence de pièces et de preuves comptables), ou
tout simplement inopportun voire néfaste (faut-il fermer un
établissement ou le laisser prendre des libertés avec les règles ?).
Il semble cependant aujourd’hui nécessaire d’assurer davantage
la maîtrise du système, son équilibre, sa justice. Probablement par la
mise en place d’instances nationales et régionales de régulation tenant
compte de la diversité des situations et de la nécessité d’assurer à
chacun les moyens de sa subsistance pour peu qu’il remplisse les
conditions d’un enseignement de qualité.
« L’enseignement privé laïc ne ramasse que les miettes qui tombent
lorsque le partage (de la subvention) injuste a lieu. » (Privé laïc –
vingtième Commission.)
74
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IV.
LA PLACE DU PRIVÉ ET LES CONDITIONS
DE SON DÉVELOPPEMENT
En tentant, sur la base des informations quantitatives et
qualitatives dont elle a pu disposer, de dresser un état des lieux le
plus complet possible du fonctionnement actuel de l’enseignement
privé camerounais, cette étude se fixait évidemment comme projet
d’examiner aussi quel concours les établissements privés sont
susceptibles d’apporter, au cours des prochaines années, au
nécessaire développement de la scolarisation au Cameroun.
Contrastes et paradoxes
Le premier constat, dominant, concerne la coexistence,
aujourd’hui, au sein du réseau privé (qui doit sans doute suivre des
règles communes) de situations profondément disparates, appelant
des réponses appropriées et distinctes.
Ensemble hétérogène, l’enseignement privé est aussi un lieu de
paradoxes et de contradictions. Répondant à une demande sociale
certaine, apportant des modes de formation adaptés à des contextes
et des cultures particuliers, il est une source de richesse éducative
incontestable ; mais c’est, globalement, une entreprise endettée, dont
la croissance potentielle rencontre des freins financiers très sérieux.
Ces paradoxes traversent son fonctionnement même.
(a) Les enseignants du privé sont plutôt plus mal payés et travaillent
pourtant dans un système plus efficace, plus motivé, sans le
« laisser-aller » souvent reproché à l’enseignement public. Comme
le déclare un secrétaire général de l’enseignement confessionnel,
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75
Les écoles privées au Cameroun
« la foi est leur premier secours », mais cet argument ou cet appui
ont des limites, et les enseignants du privé ne pourront
durablement adhérer à un système souvent performant que s’ils
y trouvent une juste reconnaissance de leurs mérites. Cette
reconnaissance est évidemment financière, de la part de leurs
employeurs mais aussi de l’État dont on attend qu’il sache
récompenser ceux qui travaillent bien. Il leur arrive, dans ces
conditions, de marquer un certain agacement face aux contraintes
et contrôles pédagogiques dont ils peuvent faire l’objet (respect
du système des séquences, application et respect des instructions
des inspecteurs...)
(b) L’enseignement privé est soumis à un « arsenal juridique aussi
impressionnant qu’inefficace ».
Malgré l’abondance de textes réglementant l’enseignement privé,
il reste un certain flou dans les conditions et le contrôle de son
fonctionnement (maîtrise des ouvertures et fermetures
d’établissements, contrôle des comptes financiers, versement des
subventions de l’État...).
La loi, les arrêtés, les circulaires émanant du ministère de
l’Éducation ont régulièrement précisé les conditions juridiques,
administratives, financières et pédagogiques de fonctionnement des
établissements privés, sans empêcher toutefois des dérives répétées :
maintien et développement d’établissements clandestins, absence de
contrôle sur le statut des enseignants du privé, le versement de leurs
cotisations sociales.
Dans le même temps où les établissements privés et leurs
représentants montrent des réticences, voire une incapacité pure et
simple, à respecter ces règles (parfois très contraignantes, comme
pour la réglementation du système de séquences), ils attendent de
l’État et des pouvoirs publics qu’ils jouent un véritable rôle de
76
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La place du privé et les conditions de son développement
régulation : équilibre de la carte scolaire, politique juste et ciblée de
subventions, cohérence et coordination des réseaux privés.
« Sur le plan administratif, le problème soulevé depuis des années
est celui de l’absence, au niveau des délégations tant provinciales que
départementales, d’une structure spéciale chargée des problèmes
spécifiques de l’enseignement privé dans son ensemble. » (Privé laïc –
vingtième Commission.)
« Pour un encadrement approprié de l’enseignement privé, la mise
sur pied d’une structure adéquate dans les délégations provinciales
est souhaitée. Cette structure s’occuperait des activités de
l’enseignement privé, et permettrait de mieux préparer les assises des
comités provinciaux de l’enseignement privé. » (Protestant –
dix-neuvième Commission.)
« Les établissements scolaires doivent être judicieusement répartis,
selon leur nature, sur toute l’étendue d’une zone géographique donnée
dont ils se partagent les élèves, selon un choix libre de leurs parents. »
(Privé laïc – vingtième Commission.)
(c) Comme dans d’autres pays africains, la réf lexion sur
l’enseignement privé doit prendre en compte sa dualité profonde
de secteur complément et (ou) concurrent du public. On ne peut
qu’encourager ce qui complète l’offre de formation publique, sans
pour autant décourager ce qui la concurrence ou la stimule, et
qui apporte souvent un gage de qualité.
La complémentarité du privé revêt plusieurs formes. Elle permet,
surtout dans l’enseignement primaire, de pallier les carences du
réseau public, de contribuer à la réalisation de l’obligation scolaire
prévue par la loi, surtout dans certaines régions ou zones très
éloignées de la scolarisation totale.
Institut international de planification de l'éducation
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77
Les écoles privées au Cameroun
Elle donne aussi accès à des modes de scolarisation moralement
ou « culturellement » acceptables par certaines catégories de la
population, ou contribue, dans le secondaire, à la diversification des
filières de formation, notamment techniques (dont le coût peut se
révéler prohibitif pour l’enseignement public).
Quant à la concurrence, qui suppose un libre choix des parents,
elle n’est pas nécessairement celle que le privé exerce « au détriment »
du public. Elle peut être interne au privé (développement anarchique
et incontrôlé). Certains secrétaires nationaux dénoncent également
celle qu’exerce le public, en particulier en acceptant de remplir
exagérément ses classes.
Les conditions de fonctionnement
La plupart des établissements privés, à la recherche d’un équilibre
financier, ont à faire un arbitrage : remplir leurs classes et donc leur
caisse, mais au détriment des conditions et de la qualité
d’enseignement, ou bien pratiquer une sélection numérique
rigoureuse, mais qui limite leurs ressources ou leurs capacités
d’investissement. Cette alternative se pose notamment pour ceux qui
bénéficient d’une demande forte, excédant leurs capacités d’accueil
théoriques. Ils peuvent alors mettre en place un système de régulation,
et de sélection, par le biais d’examens d’entrée, et choisir les effectifs
voulus ou nécessaires, en quantité et en qualité, ce qui sera souvent
à la source des bons résultats qu’ils pourront afficher.
D’autres moyens d’ajustement se présentent à eux : moduler par
exemple, après accord du ministère, le montant des frais de scolarité
(ce qui permet, à ressources égales, de limiter encore la taille des
classes, de renforcer la sélection sociale ou selon le mérite,
d’améliorer les prestations ou équipements pédagogiques de
l’établissement).
78
Institut international de planification de l'éducation
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La place du privé et les conditions de son développement
Des stratégies plus ciblées sont également possibles, en faveur
notamment des bons élèves issus de milieux populaires. En leur
accordant un avantage financier particulier (système de bourses,
exonération des frais de scolarité), l’établissement peut chercher à
les retenir : l’apport social et collectif du privé (favoriser la réussite
des enfants de tous milieux) rencontre alors l’intérêt individuel ou
personnel (promouvoir l’image de marque de l’établissement,
stimuler son enseignement par la présence d’une élite scolaire).
Les conditions de développement
Sortir des impasses financières actuelles
La crise économique et financière que le Cameroun a traversée
au début des années 1990 n’a pas épargné son système éducatif, et
tout particulièrement l’enseignement privé, dont les ressources ont
subi une forte érosion. Les établissements rencontrent aujourd’hui
plus de mal à équilibrer leurs comptes (moindre solvabilité des
familles dont les revenus ont baissé, pertes d’effectifs, diminution
de l’aide de l’État). Les déficits de gestion (pas toujours suffisamment
rigoureuse), les dettes ou les impayés ont pris ces dernières années
une ampleur croissante, creusant les arriérés de salaires, de cotisations
CNPS, d’impôts. Cette situation fragilise fortement les conditions
d’enseignement et la motivation des personnels. Elle aggrave souvent
des inégalités de situation qui ne pourront être durablement tolérées,
et vient limiter les capacités de développement de la scolarisation,
singulièrement dans les zones les plus démunies où ces progrès
seraient pourtant les plus nécessaires.
L’État doit prendre une exacte mesure de ces difficultés, des
risques de dérives et de dégradation qu’elles comportent. Il ne saurait
en effet se désintéresser du fonctionnement de l’enseignement privé,
des conditions d’un juste équilibre, de la sur vie fortement
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79
Les écoles privées au Cameroun
compromise de certains établissements. Il ne peut se contenter de
s’en remettre aux bons soins des organisations concernées ou aux
qualités de pédagogue et de gestionnaire des fondateurs, en se disant
qu’après tout, sur le « marché » de l’enseignement privé, ce sont les
« branches pourries » qui périssent, en justes victimes, faute d’avoir
su mener leurs affaires habilement ou honnêtement.
L’apport de l’enseignement privé est manifeste. D’abord
quantitatif, en contribuant à se rapprocher de l’objectif de
scolarisation primaire totale (surtout au lendemain du phénomène
de déscolarisation constaté au milieu des années 1990), ou bien en
soulageant l’État dans son effort budgétaire. Mais le privé contribue
aussi, par sa diversité, à l’enrichissement de l’offre de formation,
cherchant de meilleures réponses aux besoins de la population, visant
l’instruction, la réussite, mais aussi l’éducation de ses enfants. Il
revient donc à l’État de rechercher activement les moyens permettant
à l’enseignement privé de sortir des impasses actuelles.
Résorption du passif : de même que les pays en développement
par viennent à faire annuler ou réduire leurs dettes, liées à
l’accumulation de déficits budgétaires ou de la balance commerciale,
on doit pouvoir envisager de tirer un trait sur les passifs et les impayés
des établissements, sous des conditions justes et équitables
(impossibilité avérée de ne pouvoir « honorer ses dettes »,
responsabilisation des organisations et des fondateurs).
Mobiliser des financements suffisants : pour repartir sur des bases
financières saines et équilibrées, beaucoup d’établissements auront
besoin d’accroître le volume de leurs ressources, ne serait-ce que pour
pouvoir payer régulièrement et décemment leurs personnels.
Sans le retour d’une croissance économique soutenue et durable,
susceptible d’améliorer significativement le pouvoir d’achat des
80
Institut international de planification de l'éducation
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La place du privé et les conditions de son développement
familles, il apparaît difficile d’envisager un soutien financier
supplémentaire de leur part. Dans la conjoncture actuelle, on constate
qu’elles sont souvent amenées à s’endetter et à contracter des
emprunts lors des rentrées scolaires, pour faire face aux frais divers
de scolarisation.
Le recours à une aide extérieure accrue et ciblée (manuels,
matériels, aide alimentaire…) semble en revanche une voie à explorer,
compte tenu de sa relative faiblesse actuelle.
Même s’il a pris la précaution juridique de rendre la subvention
éventuelle, et de ne pas ouvrir ainsi un droit à l’aide publique, l’État
ne peut pas ne pas reconnaître que les coupes budgétaires
intervenues depuis le début des années 1990 sont une des causes des
problèmes financiers de certains établissements, notamment les
écoles primaires confessionnelles : recrutant une clientèle moins
aisée, elles n’ont pu compenser les baisses de recettes par
l’augmentation des droits d’inscription. Face aux services rendus par
l’enseignement privé, l’État doit non seulement accroître, mais aussi
diversifier son aide, et rendre sa répartition la plus efficace possible.
Redéfinir les interventions de l’État
Revues à la baisse, les subventions qu’il accorde aujourd’hui sont
plus un saupoudrage, qui récompense souvent les établissements plus
prospères ou les « plus en vue », qu’une aide indispensable aux plus
démunis.
Un
effort
budgétaire
accru
pourrait
ramener
progressivement leur montant au niveau du début des années 1990,
et bénéficier prioritairement aux écoles primaires pratiquant les frais
de scolarité les plus faibles. Une affectation et une concentration plus
justes de l’aide de l’État, limitées aux établissements sous contrat,
viendraient restaurer les équilibres financiers les plus précaires,
engageant des solutions aux problèmes récurrents d’arriérés de
salaires, de non-versement des impôts ou cotisations sociales. L’État
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81
Les écoles privées au Cameroun
pourrait en revanche laisser se développer un secteur
d’établissements libres de pratiquer les droits de scolarité en fonction
du marché, soumis uniquement à des contraintes de nature
pédagogique, mais ne bénéficiant d’aucune subvention publique.
L’enseignement privé pourrait en outre voir certaines charges, liées
notamment à l’ouverture et à l’équipement d’un établissement, ne
plus être entièrement supportées par les particuliers, les familles
contribuant d’une façon ou d’une autre, par le versement des frais
de scolarité, à rembourser l’investissement initial consenti par le
fondateur. L’État doit pouvoir prendre sa part et venir épauler des
initiatives privées, en accordant par exemple davantage de facilités
dans la cession ou la libération de terrains, de bâtiments.
Dans le domaine des livres scolaires et des matériels pédagogiques,
l’État pourrait être à même de mobiliser des financements extérieurs,
utiles aux écoles et familles les plus modestes, et les plus fortement
démunies. Aujourd’hui, le Cameroun présente parmi les pays d’Afrique
subsaharienne une position singulière : il laisse l’achat des manuels
scolaires à la charge principale des familles (pas uniquement de
l’enseignement privé).
Il doit aussi examiner la question du statut des enseignants des
écoles privées, de leur formation initiale et continue et de leur
encadrement pédagogique, en concertation avec les organisations et
les représentants des personnels. L’établissement d’une convention
collective permettrait d’offrir un cadre approprié au développement
de leur carrière.
Créer les bases d’une véritable politique de
l’enseignement privé
Pour assurer pleinement sa responsabilité constitutionnelle, l’État
a le devoir impérieux de piloter l’ensemble du système
d’enseignement, qu’il soit public ou privé.
82
Institut international de planification de l'éducation
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La place du privé et les conditions de son développement
Un tel pilotage ne peut se concevoir en l’absence d’un système
d’information minimal, qu’il s’agit aujourd’hui de restaurer.
Information détaillée d’abord sur le coût de l’éducation (quelles
dépenses, pour quel type d’enseignement ?), où les données
strictement budgétaires sont à rapprocher des autres sources de
financement (familles, entreprises, ONG …), et qui demande de
pouvoir disposer des comptes financiers des établissements.
Information ensuite sur l’état de la scolarisation, qui doit pouvoir
s’appuyer sur les enquêtes« scolaires » renseignées par tous les
établissements, et adressées à leurs responsables régionaux puis
nationaux respectifs (les éléments recueillis sur les effectifs scolarisés
par classe, âge, sexe permettant notamment de répondre à ces
questions fondamentales : combien de jeunes Camerounais et
Camerounaises accèdent à l’école, y sont scolarisés, parviennent au
terme des scolarités primaire et secondaire, obtiennent leurs
diplômes ?).
Cette connaissance de base apparaît bien comme une condition
décisive pour mieux guider aujourd’hui l’action de l’État, assurer la
pertinence des priorités ou objectifs qu’il fixera dans le cadre de ses
interventions, en particulier dans le domaine de l’enseignement privé.
Assurer une régulation et une coordination des réseaux
privés
La vitalité et l’efficacité de cette démarche demandent que la
Commission nationale constitue une véritable instance de
concertation, mais que ce dialogue s’instaure aussi de manière
permanente au niveau provincial, le plus à même de prendre l’exacte
mesure des problèmes rencontrés et des besoins à satisfaire.
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83
Les écoles privées au Cameroun
Ce pilotage collectif, sous l’autorité de l’État, aurait notamment à
débattre des sujets suivants :
• carte scolaire : une réflexion globale est réclamée par les diverses
organisations privées ; elle doit aboutir à éviter les situations de
concurrence malsaine et économiquement néfaste, et contribuer
à mieux protéger les établissements publics et privés, pour peu
que ces derniers respectent une relative modération de leurs
tarifs ;
• critères d’affectation de la subvention (principes d’équilibre et
de justice entre réseaux et entre établissements) ;
• examen de la situation, en particulier financière, des
établissements ;
• gestion et statut des enseignants.
84
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312 495
Centre
Institut international de planification de l'éducation
104 464
Sud-Ouest
54 385
11 976
158 849
95 785
379 940
267 255
111 963
283 524
215 019
90 015
425 880
64 560
TOTAL
27 886
20 751
60 985
31 010
15 699
68 476
24 119
12 303
91 086
9 529
Public
142 833
13 115
4 021
21 285
16 655
2 409
49 212
884
2 892
30 281
2 079
Privé
504 677
41 001
24 772
82 270
47 665
18 108
117 688
25 003
15 195
121 367
11 608
TOTAL
Secondaire général
1 502 328 590 462 2 092 790 361 844
83 809
TOTAL
115 859
277 245 102 695
Sud
Ouest
151 396
Nord-Ouest
7 429
104 534
Nord
30 374
153 085 130 439
184 645
13 617
113 385
10 303
Privé
Littoral
Nord
Extrême
76 398
54 257
Adamaoua
Est
Public
primaire
Enseignement
garçons + filles
77 055
5 499
6 699
12 012
5 991
3 221
14 007
3 344
5 018
19 522
1 742
Public
45 067
1 413
1 371
7 037
4 473
224
18 751
81
1 202
10 459
56
Privé
122 122
6 912
8 070
19 049
10 464
3 445
32 758
3 425
6 220
29 981
1 798
TOTAL
Secondaire technique
438 899
33 385
27 450
72 997
37 001
18 920
82 483
27 463
17 321
110 608
11 271
Public
187 900
14 528
5 392
28 322
21 128
2 633
67 963
965
4 094
40 740
2 135
Privé
secondaire
626 799
47 913
32 842
101 319
58 129
21 553
150 446
28 428
21 415
151 348
13 406
TOTAL
Enseignement
Effectifs scolaires de l’année 1998-1999 par province et niveau,
+ Filles
Garçons
Tableau 1.
ANNEXES
Tableaux statistiques
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85
86
153 123
34 903
61 219
Centre
Est
Extrême
Institut international de planification de l'éducation
675 498
49 111
Sud-Ouest
TOTAL
40 458
Sud
68 037
Nord-Ouest
135 888
35 417
Nord
Ouest
75 452
Littoral
Nord
21 890
Adamaoua
281 808
27 323
5 841
49 494
56 055
3 168
63 996
9 780
6 220
55 559
4 372
Privé
957 306
76 434
46 299
185 382
124 092
38 585
139 448
70 999
41 123
208 682
26 262
TOTAL
158 651
13 513
8 860
28 599
14 567
4 321
32 102
4 266
5 231
43 927
3 265
Public
74 306
6 991
1 884
12 378
8 966
862
25 281
218
1 467
15 295
964
Privé
général
primaire
Public
Secondaire
Enseignement
232 957
20 504
10 744
40 977
23 533
5 183
57 383
4 484
6 698
59 222
4 229
TOTAL
28 943
1 873
2 444
3 912
2 666
958
5 375
1 187
1 968
8 025
535
Public
19 788
688
738
2 173
2 592
91
7 350
0
360
5 794
2
Privé
technique
Secondaire
48 731
2 561
3 182
6 085
5 258
1 049
12 725
1 187
2 328
13 819
537
TOTAL
187 594
15 386
11 304
32 511
17 233
5 279
37 477
5 453
7 199
51 952
3 800
94 094
7 679
2 622
14 551
11 558
953
32 631
218
1 827
21 089
966
Privé
secondaire
281 688
23 065
13 926
47 062
28 791
6 232
70 108
5 671
9 026
73 041
4 766
TOTAL
Enseignement
Public
Effectifs scolaires de l’année 1998-1999 par province et niveau, filles
Filles
Tableau 2.
Les écoles privées au Cameroun
http://www.unesco.org/iiep
Institut international de planification de l'éducation
44,9
49,0
Nord-Ouest
Ouest
45,0
33,9
Nord
TOTAL
49,3
Littoral
47,0
33,2
Extrême Nord
Sud-Ouest
45,7
Est
48,3
49,0
Centre
Sud
40,3
47,7
50,2
48,8
48,2
48,4
42,6
49,1
32,2
45,7
49,0
42,4
Privé
45,7
48,1
48,3
48,8
46,4
34,5
49,2
33,0
45,7
49,0
40,7
TOTAL
43,8
48,5
42,7
46,9
47,0
27,5
46,9
17,7
42,5
48,2
34,3
Public
52,0
53,3
46,9
58,2
53,8
35,8
51,4
24,7
50,7
50,5
46,4
Privé
général
primaire
Public
Secondaire
Enseignement
46,2
50,0
43,4
49,8
49,4
28,6
48,8
17,9
44,1
48,8
36,4
TOTAL
37,6
34,1
36,5
32,6
44,5
29,7
38,4
35,5
39,2
41,1
30,7
Public
43,9
48,7
53,8
30,9
57,9
40,6
39,2
0,0
30,0
55,4
3,6
Privé
technique
Secondaire
39,9
37,1
39,4
31,9
50,2
30,4
38,8
34,7
37,4
46,1
29,9
TOTAL
42,7
46,1
41,2
44,5
46,6
27,9
45,4
19,9
41,6
47,0
33,7
50,1
52,9
48,6
51,4
54,7
36,2
48,0
22,6
44,6
51,8
45,2
Privé
secondaire
44,9
48,1
42,4
46,4
49,5
28,9
46,6
19,9
42,1
48,3
35,6
TOTAL
Enseignement
Public
Proportion de filles dans les effectifs scolaires de l’année 1998-1999
Adamaoua
Tableau 3.
Annexes
http://www.unesco.org/iiep
87
Les écoles privées au Cameroun
Tableau 4. Part du privé dans les effectifs
scolarisés
en 1998-1999
Secondaire
Secondaire
général
technique
Total
Total
Total
Total
Adamaoua
16,0
17,9
3,1
15,9
Centre
26,6
24,9
34,9
26,9
Est
15,1
19,0
19,3
19,1
Extrême Nord
14,1
3,5
2,4
3,4
Littoral
46,0
41,8
57,2
45,2
Nord
6,6
13,3
6,5
12,2
Nord-Ouest
43,4
34,9
42,7
36,3
Ouest
27,0
25,9
36,9
28,0
Sud
12,5
16,2
17,0
16,4
Sud-Ouest
34,2
32,0
20,4
30,3
TOTAL
28,2
28,3
36,9
30,0
Part du privé
Primaire
Garçons + Filles
88
Institut international de planification de l'éducation
Secondaire
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Annexes
Tableau 5.
Part du privé dans les effectifs des filles
scolarisées en 1998-1999
Secondaire
Secondaire
général
technique
Total
Total
Total
Total
Adamaoua
16,6
22,8
0,4
20,3
Centre
26,6
25,8
41,9
28,9
Est
15,1
21,9
15,5
20,2
Extrême Nord
13,8
4,9
0,0
3,8
Littoral
45,9
44,1
57,8
46,5
Nord
8,2
16,6
8,7
15,3
Nord-Ouest
45,2
38,1
49,3
40,1
Ouest
26,7
30,2
35,7
30,9
Sud
12,6
17,5
23,2
18,8
Sud-Ouest
35,7
34,1
26,9
33,3
TOTAL
29,4
31,9
40,6
33,4
Part du privé
Primaire
Filles
Institut international de planification de l'éducation
Secondaire
http://www.unesco.org/iiep
89
Les écoles privées au Cameroun
Tableau 6.
Indicateurs régionaux
Régions
Enseignement primaire
Secondaire
Taux brut
Ratio
Proportion de filles
scolarisation élève/maître
en
en
1997/1998
1997/1998 1997/1998 1998/1999
Adamaoua
48,4
66
41,2
40,7
35,2
35,6
113,0
45
49,6
49,0
45,1
48,3
Est
77,8
55
45,5
45,7
38,3
42,1
Extrême
Nord
36,8
90
32,7
33,0
21,4
19,9
Littoral
111,0
55
42,0
49,2
38,3
46,6
Nord
56,2
85
35,6
34,5
29,5
28,9
Nord-Ouest
64,3
60
46,9
46,4
48,9
49,5
Ouest
111,2
52
48,5
48,8
45,6
46,4
Sud
122,6
37
48,6
48,3
41,6
42,4
Sud-Ouest
77,6
56
47,2
48,1
45,2
48,1
TOTAL
80,2
55
45,1
45,7
41,9
44,9
Centre
90
Proportion de filles
en
en
1997/1998 1998/1999
Institut international de planification de l'éducation
http://www.unesco.org/iiep
51
islamiques
Institut international de planification de l'éducation
6 665
297 403
129 782
dont : catholiques
protestantes
http://www.unesco.org/iiep
Total public et privé
laïques
1 919 596
40 930
8 360
476 475
1 443 121
1990-1991
écoles privées
islamiques
6 973
174
54
601
954
1 783
5 190
1991-1992
7 033
233
61
478
956
1 728
5 305
1992-1993
7 055
260
61
458
915
1 694
5 361
1993-1994
7 099
355
61
450
907
1 773
5 326
1994-1995
1 849 434
26 246
9 192
123 764
256 505
415 707
1 433 727
1991-1992
1 870 570
56 561
12 161
104 895
262 013
435 630
1 434 940
1992-1993
1 840 955
78 681
13 373
99 359
221 828
413 241
1 427 714
1993-1994
1 857 385
88 365
16 937
105 086
245 718
456 106
1 401 279
1994-1995
1 882 478
61 765
19 729
113 986
275 403
470 883
1 411 595
1995-1996
7 567
298
78
454
926
1 756
5 811
1995-1996
Évolution des effectifs d’élèves des écoles primaires
écoles publiques
Tableau 8.
Total public et privé
120
615
protestantes
laïques
995
catholiques
1 781
écoles privées
dont :
4 884
1990-1991
Évolution du nombre des écoles primaires
écoles publiques
Tableau 7.
1 978 186
92 288
23 477
124 159
288 079
528 003
1 450 183
1996-1997
8 514
428
87
475
923
1 913
6 601
1996-1997
2 023 809
97 019
29 022
128 939
292 501
547 481
1 476 328
1997-1998
8 971
532
115
476
924
2 047
6 924
1997-1998
2 092 782
105 000
32 022
143 931
309 501
590 454
1 502 328
1998-1999
9 163
567
129
562
981
2 239
6 924
1998-1999
Annexes
91
92
98
54
1
dont : catholiques
protestantes
islamiques
667
759
258
2
55
99
414
345
1991-1992
838
305
2
55
101
463
375
1992-1993
899
342
2
55
99
498
401
1993-1994
903
342
2
57
100
501
402
1994-1995
943
365
3
57
99
524
419
1995-1996
1 141
Institut international de planification de l'éducation
51 649
28 696
dont : catholiques
protestantes
http://www.unesco.org/iiep
Total public et privé
laïques
511 742
144 455
199
224 999
écoles privées
islamiques
286 743
écoles publiques
1990-1991
540 939
123 000
300
24 349
56 695
204 344
336 595
1991-1992
543 138
120 500
300
21 349
51 471
193 620
349 518
1992-1993
581 935
158 865
300
23 925
45 188
228 278
353 657
1993-1994
576 271
150 865
925
24 142
44 545
220 477
355 794
1994-1995
612 456
146 300
1 100
21 721
45 135
214 256
398 200
1995-1996
394
3
56
104
557
584
1996-1997
548 992
104 698
1 200
22 396
47 875
176 169
372 823
1996-1997
Tableau 10. Évolution des effectifs d’élèves de l’enseignement secondaire
Total public et privé
217
370
écoles privées
laïques
297
1990-1991
Évolution du nombre des établissements secondaires
écoles publiques
Tableau 9.
587 611
90 603
1 750
24 120
47 890
164 363
423 248
1997-1998
1 220
351
5
57
131
544
676
1997-1998
626 799
112 416
1 800
25 649
48 035
187 900
438 899
1998-1999
1 296
399
5
68
146
618
678
1998-1999
Les écoles privées au Cameroun
Annexes
LISTE DES EXPERTS AYANT PARTICIPÉ À L’ÉTUDE
Ministère de l’Éducation nationale
– Mme Marie Mbah Onana
Directrice de l’Enseignement privé
Coordonnatrice nationale
– M. Barthélémy Mvogo
Chef de la cellule juridique
– M. Raymond Djamé
Directeur de la prospective et
des ressources documentaires
Institut international de planification de l’éducation
– M. Paul Esquieu
Consultant
– M. Serge Péano
Spécialiste du programme
Coordonnateur international
Institut international de planification de l'éducation
http://www.unesco.org/iiep
93
Institut international de planification de l'éducation
http://www.unesco.org/iiep
Publications et documents de l’IIPE
Plus de 1 200 ouvrages sur la planification de l’éducation ont été
publiés par l’Institut international de planification de l’éducation.
Un catalogue détaillé est disponible ; il présente les sujets suivants :
Planification de l’éducation
Généralité– contexte du développement
Administration et gestion de l’éducation
Décentralisation – participation – enseignement à distance – carte scolaire –
enseignants
Économie de l’éducation
Coûts et financement – emploi – coopération internationale
Qualité de l’éducation
Évaluation – innovations – inspection
Différents niveaux d’éducation formelle
De l’enseignement primaire au supérieur
Stratégies alternatives pour l’éducation
Éducation permanente – éducation non formelle – groupes défavorisés –
éducation des filles
Pour obtenir le catalogue, s’adresser à : IIPE, Diffusion des
publications ([email protected]). Les titres et les
résumés des nouvelles publications peuvent être consultés sur le
site web de l’IIPE, à l’adresse suivante : http:www.unesco.org/
Institut international de planification de l'éducation
http://www.unesco.org/iiep
Institut international de planification de l'éducation
http://www.unesco.org/iiep
L’Institut international de planification de l’éducation
L’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) est un centre international,
créé par l’UNESCO en 1963, pour la formation et la recherche dans le domaine de la
planification de l’éducation. Le financement de l’Institut est assuré par l’UNESCO et
les contributions volontaires des États membres. Au cours des dernières années,
l’Institut a reçu des contributions volontaires des États membres suivants : Allemagne,
Danemark, Inde, Irlande, Islande, Norvège, Suède et Suisse.
L’Institut a pour but de contribuer au développement de l’éducation à travers le monde
par l’accroissement aussi bien des connaissances que du nombre d’experts
compétents en matière de planification de l’éducation. Pour atteindre ce but, l’Institut
apporte sa collaboration aux organisations dans les États membres qui s’intéressent
à cet aspect de la formation et de la recherche. Le Conseil d’administration de l’IIPE,
qui donne son accord au programme et au budget de l’Institut, se compose d’un
maximum de huit membres élus et de quatre membres désignés par l’Organisation
des Nations Unies et par certains de ses institutions et instituts spécialisés.
Président :
Dato’Asiah bt. Abu Samah (Malaisie)
Directrice, Lang Education, Kuala Lumpur, Malaisie.
Membres désignés :
Torkel Alfthan
Responsable de l’Unité des politiques de formation et de l’employabilité,
Département de l’amélioration des compétences, Bureau international du travail
(BIT), Genève, Suisse.
Eduardo A. Doryan
Vice-Président, Réseau du développement humain (HDN), Banque mondiale,
Washington D.C., États-Unis d’Amérique.
Carlos Fortin
Secrétaire-général adjoint, Conférence des Nations Unies sur le commerce et le
développement (CNUCED), Genève, Suisse.
Edgar Ortegon
Coordinateur de ILPES et Liaison avec le Bureau du Secrétaire exécutif de l’ECLAC,
Institut de la planification économique et social (ILPES) pour l’Amérique latine
et les Caraïbes, Santiago, Chili.
Membres élus :
José Joaquin Brunner (Chili)
Directeur, Programme d’Éducation, Fundación Chile, Santiago, Chili.
Klaus Hüfner (Allemagne)
Professeur, Université Libre de Berlin, Berlin, Allemagne.
Faïza Kefi (Tunisie)
Ministre de l’Environnement et de l’Aménagement du territoire, Ariana, Tunisie.
Tamas Kozma (Hongrie)
Directeur général, Institut hongrois pour la recherche en éducation, Budapest,
Hongrie.
Teboho Moja (Afrique du Sud)
Professeur invité, Université de New York, New York, États-Unis d’Amérique.
Teiichi Sato (Japon)
Vice-Ministre de l’Éducation, Ministère de l’Éducation, des Sciences , des Sports
et de la Culture, Tokyo, Japon.
Michel Vernières (France)
Professeur, Université de Paris-I Panthéon-Sorbonne, Paris, France.
Pour obtenir des renseignements sur l’Institut, s’adresser au :
Secrétariat du Directeur, Institut international de planification de l’éducation,
7-9, rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris, France.
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