Le 3G anticipé (2)

Transcription

Le 3G anticipé (2)
Le 3G anticipé (2)
Dans un article précédent, nous avons fait état de la progression des technologies de
communications cellulaires vers la téléphonie de troisième génération (3G). Mais quelles sont
les nouvelles avenues entrouvertes par les performances supérieures de ces réseaux de
communication cellulaires de nouvelle génération ? Où en est leur déploiement dans le
monde ?
Les performances du 3G
Les performances des réseaux 3G seront nettement supérieures aux niveaux que nous avons
connus jusqu'à présent. Théoriquement, une utilisation stationnaire du terminal 3G pourra offrir
des performances de 2Mbps, une personne circulant à pied pourra utiliser une bande passante
allant jusqu'à 384kbps et l'utilisation du terminal dans un véhicule en mouvement n'accédera
qu'à une bande passante de 144kbps.
Toutefois, il faudra un certain temps avant que les performances du 3G atteignent les niveaux
originalement prévus par les ingénieurs. Par exemple, le réseau inauguré par Bell Mobilité à
Montréal, tout récemment, offre un débit moyen de 86kbps pouvant atteindre 144kbps et ce,
même en mode stationnaire. D'autre part, le réseau 3G implanté au Japon par NTT DoCoMo
est un réseau de capacité asymétrique. Les vitesses de téléchargement sont fixées à 384kbps
en aval (vers le téléphone) et à 64kbps en amont. Des vitesses supérieures seront atteintes lors
d'améliorations successives du réseau.
Les niveaux de performance des réseaux 3G augmenteront certainement en fonction de la
demande des consommateurs.
De nouvelles possibilités
La bande passante accrue du réseau 3G ainsi que les caractéristiques particulières des
appareils cellulaires augmenteront la probabilité d’une approche client léger / serveur lourd. En
effet, le développement de ces appareils ne laisse pas entrevoir l'existence de capacité de
stockage importante, ce qui laisse supposer que cette dernière sera prise en charge par des
serveurs Internet, auxquels les appareils cellulaires pourront se relier. Actuellement, les efforts
de développement sont davantage axés sur la performance du réseau que sur celle du
processeur de l'appareil.
Cependant, les développements de la plate-forme .NET de Microsoft permettent de croire que
le 3G sera certainement un environnement propice au développement d'applications novatrices.
La puissance de traitement incorporée au téléphone 3G pourra servir uniquement à contrôler
l'interface utilisateur, laissant entrevoir la possibilité d'effectuer la reconnaissance de la parole si
la puissance de calcul de l'unité centrale de traitement est suffisante.
Une interface plus naturelle : la parole
Les téléphones mobiles sont plus disséminés dans une société en mouvement que les PC
conventionnels, mais ils manquent de convivialité quand vient le moment d'effectuer des tâches
1
plus complexes ou spécifiques que la simple transmission de la parole. La reconnaissance de la
parole tient donc un rôle important dans les applications futures qui seront développées pour les
réseaux et appareils 3G. Pour l’instant, seule une petite fraction de l'information disponible sur
Internet est accessible au moyen des téléphones mobiles. Les approches proposées pour
permettre l'accès à cette information (WAP, i-mode) sont certainement un pas dans la bonne
direction, mais bénéficieraient en convivialité d'une interface en reconnaissance de la parole.
Imaginez un environnement pleinement intégré incorporant la reconnaissance de la parole, la
téléphonie mobile et l'accès à l'information Internet !…
C'est la direction que prennent bien des entreprises de ce secteur de développement. La
reconnaissance vocale en mobilité présente en effet nombre d'opportunités et de solutions,
parce qu’elle offre une interface plus naturelle et aisée à la navigation à l'aide d'un téléphone
cellulaire, tout en permettant un accès plus « populaire » au contenu du réseau Internet.
Dans le but de créer une série de normes pour le développement d'applications vocales et
multi-modales pour appareils mobiles, un consortium du nom de SALT a été formé. SALT est
l'acronyme de Speech Application Language Tags. Au sein de ce consortium, nous retrouvons
les entreprises suivantes : Cisco, Commverse, Intel, Microsoft, Phillips et SpeechWorks.
L'approche présentée par SALT ressemble à celle proposée par le VoiceXML, un consortium
cherchant à créer des normes dans l’utilisation de la reconnaissance vocale. Toutefois, le forum
SALT s'oriente plus particulièrement vers le marché des appareils mobiles en plus de proposer
l'approche multi-modale pour une interface usager.
Les approches de mise en marché
Deux approches sont privilégiées par les manufacturiers pour lancer leurs appareils 3G sur le
marché. Certains introduisent leurs appareils sous forme de « super-PDA » ayant des capacités
de communications cellulaires : la firme Verizon (É.-U.) propose une carte PCMCIA qui permet
de communiquer sur réseaux 3G. D'autres préfèrent présenter leurs produits sous forme de
téléphones cellulaires aux capacités augmentées (NTT DoCoMo au Japon).
L’industrie du 3G devra composer avec les notions de vie privée et de protection de
l'information, qui prennent une nouvelle tournure avec l'implantation des réseaux 3G. Si les
fournisseurs Internet peuvent suivre la progression sur l'Internet de leurs abonnés, il en est de
même des fournisseurs 3G. Toutefois, l'utilisation d'un compte Internet ne suppose pas le
changement de fournisseur à chaque déplacement. L'architecture globale 3G prévoit une
possibilité de partage d'informations entre les différents fournisseurs, pour permettre aux
utilisateurs de changer de réseau librement. Les habitudes de furetage suivront-elles les
informations de compte des internautes mobiles ? Quels impacts auront ce partage
d'informations ?
Le déploiement 3G dans le monde
Au Japon
C’est bien connu, le Japon a une longueur d'avance dans le déploiement des réseaux 3G. À la
suite de l'introduction du téléphone i-mode, la compagnie japonaise NTT- DoCoMo a rendu
disponible le réseau 3G, baptisé FOMA, ainsi que les appareils pouvant utiliser ce réseau dans
les villes de Tokyo, Yokohama et Kawasaki. En plus de l'infrastructure du réseau de
communication, NTT DoCoMo offre déjà des services concrets qui permettent aux utilisateurs
2
de jouir des possibilités réelles de ce réseau fort prometteur. Plusieurs applications sont
présentement en développement.
En Europe
Un réseau a été déployé par la firme Manx Telecom sur l'île nommée « Isle of man » en
décembre 2001. En date du 4 février 2002, 200 utilisateurs ont reçu des appareils 3G,
permettant de vérifier les performances du réseau sur cette île. Toutefois les appareils utilisant
ce réseau ne seront pas disponibles avant 2003.
Les pays scandinaves démontrent beaucoup de dynamisme dans l'adoption des réseaux 3G.
Un réseau a été déployé en Suède (Vodafone - février 2002) et un autre en Norvège (Telenor).
La France ainsi que certains pays voisins prévoient entrer, en 2003, dans le groupe des pays
équipés du 3G.
Aux États-Unis
La firme Verizon vient de déployer un réseau compatible 3G aux États-Unis, le 28 janvier 2002.
Ce déploiement est limité à une certaine section du pays, soit de la Virginie au Maine, à Salt
Lake City et à San Francisco. De son côté, Sprint inaugurera son réseau 3G d'ici quelques mois
tandis que AT&T sera prêt pour la distribution 3G d'ici la fin de l'année. D'autres entreprises,
dont Leap, MetroPCS et Monet Mobile Networks, font des efforts importants pour le
développement des réseaux 3G,.
Pour l'instant, aucun de ces fournisseurs de services cellulaires ne rend disponible un appareil
téléphonique cellulaire permettant de profiter des avantages du réseau 3G. Toutefois, une carte
PCMCIA est disponible, permettant de relier son PDA ou son ordinateur portable au réseau 3G.
De plus, aucun service n'est offert à la manière de NTT DoCoMo au Japon. L'infrastructure
existe, mais la perception d’utilité n'est pas encore ressentie. Les frais mensuels d'utilisation de
ce réseau sont de 30 $US de plus qu'un lien cellulaire.
Il est clair que les firmes occidentales ont pris du retard par rapport à leurs homologues
japonais. Les utilitaires qui feront de ce réseau un réseau utile et pratique se font toujours
attendre aux États-Unis. NTT DoCoMo tente de faire sa place sur le continent américain, mais
fait face à un mur de résistance politique.
Au Canada
Au mois de mars, Bell Mobilité inaugurait son réseau 3G à Montréal. La région de Québec
devra être couverte d'ici la fin de l'été et la province entière sera graduellement couverte par
cette technologie. Un autre opérateur canadien, Telus Mobilité, devrait inaugurer son réseau 3G
sous peu. D'autres entreprises participent au développement des réseaux 3G au Canada.
Parmi les participants au développement des réseaux 3G, figurent Ericsson/Rogers AT&T,
Commworks/Telus et Microcell.
Cartographie mondiale du 3G
La prédominance de l'approche asiatique sur l'approche nord-américaine s'explique par le
grand nombre d’ordinateurs personnels en sol nord-américain. Les consommateurs nordaméricains ne perçoivent pas un petit appareil cellulaire comme une fenêtre idéale à la
navigation Internet. Ils préfèrent un clavier et un écran de dimension plus « raisonnable ».
3
Il est intéressant de noter que les pays qui ne se sont pas développés dans la consommation
de produits informatiques personnels perçoivent les appareils cellulaires reliés à l'Internet
comme plus accessibles au contenu du réseau. Les pays africains, notamment, manifestent un
intérêt prononcé pour de telles technologies. L'intérêt présenté par le déploiement des réseaux
3G permettra-t-il aux pays du Tiers-Monde de rattraper leur retard informatique ?
Un avenir prometteur ?
Le domaine des télécommunications mobile génère beaucoup d'effervescence dans les médias
technologiques. D’énormes investissements sont en jeu et la population semble être
généralement favorable à de nouveaux services basés sur une technologie de communication
cellulaire supérieure. Les possibilités engendrées par ces technologies améliorées présentent
de nombreuses occasions pour développer des applications originales et pratiques, notamment
la reconnaissance de la parole en mobilité.
Toutefois la mondialisation de la technologie 3G est un projet d'envergure imposante. Déjà,
plusieurs standards qui ne font pas partie de la spécification 3G originale apparaissent. Les
citoyens de la planète ont-ils tous les mêmes besoins de télécommunications cellulaires ? Au
Canada, la population semble satisfaite de l'infrastructure 2.5G. Il est alors possible que
l’implantation de ces réseaux se voit opposer une certaine résistance et que le processus
d'adoption prenne plus de temps que prévu. Toutefois, les nouvelles fonctionnalités
qu’apporteront les réseaux 3G pourraient peut-être permettre au marché des
télécommunications de sortir de sa torpeur actuelle.
Il s'agit, pour l'instant, de surveiller la progression du 3G et de chercher à développer les
applications pratiques qui rendront cette technologie réellement utile à la société.
Frédéric Osterrath
Agent de recherche, Équipe Reconnaissance de la parole, CRIM
[email protected]
4

Documents pareils