Pour un suffrage universel

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Pour un suffrage universel
Par François-Pierre Gladu, MD
Vision d’avenir
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Pour un suffrage universel
Vers un congrès syndical démocratique à la FMOQ?
À LA VEILLE du congrès syndical de la
FMOQ qui se tiendra les 17 et 18 novembre, il y a lieu de se questionner sur les
structures démocratiques à la FMOQ. Si
la population était aussi bien prise en
charge par les médecins de famille que
dans le reste du Canada, si les
omnipraticiens n'avaient pas vu leur
rémunération péricliter des premiers
vers le dernier rang au Canada (un écart
d'environ 35 % connu depuis au moins
1999), si notre propre association n'avait
pas bafoué notre liberté professionnelle
en acceptant soudainement les contrats
d'engagement et en calculant les PREM
avec si peu de vision, si nos champs de
pratique n'étaient pas pris d'assaut de
toutes parts et si les dépenses de la
FMOQ n'augmentaient pas plus rapidement que nos revenus, il n'y aurait pas
lieu de s'interroger. Hélas!
Généralement, en politique, il existe une
opposition officielle dont c'est le rôle de
critiquer et, si la population le sanctionne,
de remplacer un gouvernement corrompu
ou inefficace. Tel n'est pas le cas en
médecine générale. Malgré tous les
reculs, le pouvoir suprême tient toujours
entre les mains du même homme à la
présidence de la FMOQ, élu par acclama-
tion par les délégués syndicaux pour une
10e année consécutive. L'attitude désinvolte de la FMOQ a de quoi démobiliser
même les plus impliqués parmi nous.
Quand on regarde ailleurs au Canada, on
se rend compte que les médecins de la
base entérinent au suffrage universel les
nouvelles ententes collectives, que leurs
représentants ne les menacent pas d'un
décret gouvernemental au moment d'un
vote et que les instances syndicales sont
couramment renvoyées à la table de
négociation au décours d'un rejet par
leurs membres d'un projet d'entente non
satisfaisant. Les dernières négociations
en Ontario, au Manitoba et en ColombieBritannique représentent de puissants
exemples d'action syndicale efficace qui
devraient nous inspirer.
La structure même de la FMOQ l'éloigne
de la réalité de ses membres.
Contrairement à la CSN, à la FTQ et
même à la FMSQ, la FMOQ n'est pas
constituée de syndicats professionnels
distincts. Elle est constituée d'associations régionales de membres de la même
profession, et dans ce contexte, la structure fédérative n'est pas justifiée. Sans
empêcher la formation de groupes de
pression internes ad hoc comme cela se
fait au Canada, les associations
régionales ne doivent plus servir d'écran
au pouvoir exécutif. Les médecins de la
base au Canada sont assez intelligents
pour voter sur des questions d'importance et je crois que nous le sommes
aussi. On n'a qu'à penser à l'élection du
président et des membres du Bureau,
au projet de fonds de pension, aux
recommandations du comité conjoint
OIIQ-FMOQ sur la Loi 90 ou aux ententes
collectives. Ces suffrages universels
devraient toujours être précédés d'un
débat en bonne et due forme et avoir un
rôle décisionnel et non seulement consultatif. La tournée annuelle du président
devrait être une des occasions de débattre, et ne pas se limiter à un souper au
« Old boys club » où les dissidences ne
sont pas bienvenues.
La candidature des délégués régionaux
devrait être accompagnée des idées qu'ils
défendent (et comme au Collège, des
candidats à la présidence qu'ils appuient)
afin que les orientations politiques et les
cahiers de charges de la FMOQ reflètent
mieux les intérêts de ses membres. Enfin,
la FMOQ devrait suivre l'exemple des
grandes centrales syndicales et ne pas
garder secrète la rémunération des permanents et des élus.
Il y a de bonnes personnes à la FMOQ et
de bonnes idées (notamment les cliniques réseaux). Par contre, la détérioration depuis 10 ans des conditions de
pratique, le manque de transparence
dans l'élaboration et la ratification des
politiques ainsi qu'une démocratie pour
le moins indirecte nous inquiètent tous.
Chapeau à la FMOQ pour la mise sur
pied d'un congrès syndical qui semble
vouloir discuter des lacunes dont j'ai fait
la liste ici. Cependant, les médecins de
famille s'attendent cette fois à des
réformes démocratiques significatives
dans l'espoir de pouvoir enfin pratiquer
notre belle profession, et ce dans la quiétude d'esprit qui devrait aller de soi avec
nos lourdes responsabilités. En l'absence de tels changements, il ne nous
restera plus qu'à remettre en question
l'application de la formule Rand à ce
monopole syndical unique. ⌧
L’auteur est médecin de famille, enseignant clinique à l’Université de Montréal et président de
l’Association des jeunes médecins du Québec.
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S A N T É
Rendez-vous à la page 64 pour répondre au sondage sur les orientations que devraient
prendre les fédérations en 2006. Votre opinion est importante.
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