A une Madone - Empreintes du religieux dans l`espace public
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A une Madone - Empreintes du religieux dans l`espace public
A une Madone ex-voto dans le goût espagnol Je veux bâtir pour toi, Madone, ma maîtresse, Un autel souterrain au fond de ma détresse, Et creuser dans le coin le plus noir de mon cœur, Loin du désir mondain et du regard moqueur, Une niche, d'azur et d'or tout émaillée, Où tu te dresseras, Statue émerveillée. Piero Della Francesca, Madone à l'Enfant avec des Anges, huile et tempera sur panneau, 248 x 170 cm, 1472-74, Pinacoteca di Brera, Milan Avec mes Vers polis, treillis d'un pur métal Savamment constellé de rimes de cristal, Je ferai pour ta tête une énorme Couronne ; Et dans ma jalousie, ô mortelle Madone, icone de La Mère de Dieu de la Passion, Mont Sinaï, monastère Ste-Catherine, 1579 Barbare, roide et lourd, et doublé de soupçon, Qui, comme une guérite, enfermera tes charmes ; Non de Perles brodé, mais de toutes mes Larmes ! Ta Robe, ce sera mon Désir, frémissant, Onduleux, mon Désir qui monte et qui descend, Aux pointes se balance, aux vallons se repose, Et revêt d'un baiser tout ton corps blanc et rose. Jan Van Eyck, Madone à l'enfant lisant, huile sur bois, 26.5 x 19.5 cm, 1433 Le Bernin, L'extase de Sainte Thérèse, marbre, Église Santa Maria della Vittoria de Rome, 1647-1652 Je te ferai de mon Respect de beaux Souliers De satin, par tes pieds divins humiliés, Qui, les emprisonnant dans une molle étreinte, Comme un moule fidèle en garderont l'empreinte. Si je ne puis, malgré tout mon art diligent, Pour Marchepied tailler une Lune d'argent, Je mettrai le Serpent qui me mord les entrailles Sous tes talons, afin que tu foules et railles, Reine victorieuse et féconde en rachats, Ce monstre tout gonflé de haine et de crachats Rubens, L'immaculée conception, huile sur toile, 198 x 124 cm, 1628 Le thème iconographique de l'Immaculée Conception est issu du chapitre 12 de l'Apocalypse selon St Jean : "Un signe grandiose apparut au ciel : une Femme ! le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête ; elle est enceinte et crie dans les douleurs et le travail de l'enfantement. Puis un second signe apparut au ciel : un énorme Dragon rouge feu, à sept têtes et dix cornes, chaque tête surmontée d'un diadème. Sa queue balaie le tiers des étoiles du ciel et les précipite sur la terre. En arrêt devant la Femme en travail, le Dragon s’apprête à dévorer son enfant aussitôt né. » Tiepolo, L'immaculée Conception, huile sur toile, 279 x 152 cm, 1769 Artus Quillinus, Vierge de l'Immaculée Conception, marbre noir et blanc, 112 cm de haut, 1690 Enfin, pour compléter ton rôle de Marie, Et pour mêler l'amour avec la barbarie, Volupté noire ! des sept Péchés capitaux, Bourreau plein de remords, je ferai sept Couteaux Bien affilés, et, comme un jongleur insensible, Prenant le plus profond de ton amour pour cible, Je les planterai tous dans ton Cœur pantelant, Dans ton Cœur sanglotant, dans ton Cœur ruisselant ! Miniature du XIVème siècle, illustrant une bible en figures La Vierge aux Sept Douleurs et la figure de la Mater Dolorosa Il s'agit d'une dévotion mariale tardive : la première représentation de la Vierge avec les sept glaives date de 1510. Le culte de la Mater Dolorosa apparaît officiellement en 1221, au Monastère de Schönau, en Allemagne. En 1239, dans le diocèse de Florence en Italie, l'Ordre des Servites de Marie (Ordo Servita), dont la spiritualité est très attachée à la Sainte Vierge, fixe la fête de Notre-Dame des douleurs au 15 septembre. Ce titre doit son nom aux sept Douleurs dites éprouvées par la Vierge Marie : - La prophétie de Syméon sur l'Enfant Jésus. (Lc, 2, 34-35) - La fuite de la Sainte Famille en l'Égypte. (Mat, 2, 13-21) - La disparition de Jésus pendant trois jours au temple. (Lc, 2, 41-51) - La rencontre de Marie et Jésus sur la via crucis. (Lc, 23, 27-31) - Marie contemplant la souffrance et le décès de Jésus sur la Croix. (Jn, 19, 25-27) - Marie accueille son fils mort dans ses bras lors de la Descente de croix. (Mat, 27, 57-59) - Marie abandonne le corps de son fils lors de la mise au tombeau. (Jn, 19, 40-42) Prophétie de Syméon : « Voici, cet enfant est destiné à amener la chute et le relèvement de plusieurs en Israël, et à devenir un signe qui provoquera la contradiction, et à toi-même une épée te transpercera l'âme, afin que les pensées de beaucoup de cœurs soient dévoilées. » (Lc 2, 34-35). La vierge aux Sept Douleurs, vitrail dans la nef de la Basilique Notre-Dame Les 4 pères de l'église avec la vierge aux sept douleurs et des Saints, Francesco Guardi, 131 x 106 cm, XVIIIème Vierge aux sept glaives, huile sur bois, auteur anonyme, XVIème siècle, église de la nativité à Esbarres Dürer, Les 7 chagrins de la Vierge, huile sur panneau, 109 x 43 cm (centre), 63 x 46 cm (panneaux côté), 1496, Dresde La Pietà, marbre, 174 x 195 x 69 cm, 1498-99, Michelangelo Pietà, huile sur toile, 185 x 150 cm, 1545, Lorenzo Lotto Vierge des douleurs, marbre, 1525, Germain Pilon Par l’ajout de cet élément nouveau, l’expression de la souffrance, la Vierge et le Christ s’humanisent, perdent de leur caractère surnaturel. L'expression latine mater dolorosa conserve une forte connotation religieuse jusqu'au XIV-XVème siècle. Par la suite les emplois se diversifient et quittent le domaine strictement religieux. Des représentations de mater dolorosa profane apparaissent au XVIème siècle, notamment sous le pinceau de Titien. Titien, Mater Dolorosa, huile sur bois, 68 x 61 cm, 1555 Pietà, Lee Yong Baek, 400 x 340 x 320 cm, 2008