A PROPOS DU CHAMANISME MONGOL

Transcription

A PROPOS DU CHAMANISME MONGOL
Sruor¡. OnrENTAr,ra
EDII}IT gOOIEIAS ORIENTA,I¿IS FENNIOA
XVIII:A
I
Mor¡yol lcöiür
LE JEU DE CARTES MONGOL
II
A PROPOS DU CHAMANISME MONGOL
PAR
RINTCHEN
i
,
HELSINKI T955
guomalslse¡¡ KlrJalllsuuden IírJapslno Oy Helslnkl
1955
M
or¡yol kði rir
-
le jeu de carteg monSol
PAß
Rr¡¡ r c n n r.T (oulanbator).
Depuis longtemps les cartes à jouer chinoises, fabriquées en
papier, sont connues parmi les Mongols sous le norn de óøyasun pøi
< tchakhar [ã,s.tn ltai, khalkha tsdsontyt'u,e et torgout tsã,sp pü.
Lee cartes européennes ne pénétrèrent en Mongolie qu'au début du
XXe siècle, par I'intermédiaire des marchands russes; le nom des
cartesenmongol lcaitlr, khalkha nòil,zù,r ( russcroaà¿pb nous montre
clairement leur origine russe.
I-,es voyages fréquents des princes mongols en Russie, avant et
ap-rès la proclamation, en 1911, de I'indépendance de la Mongolie
septentrionale, contribuèrent à la tliffusion du jeu de cartes européen au quartier des princes mongols et même à la cour du khoutoukhtu d'Ourga, qui, après la proclamation de I'indépendance,
porta le titre officiel d'auguste qayan Ltmi-òre du Soleil, Souverain
de la Religion et de la Puissatrce.
Les termes tle ce jeu à la moile clu jour, empntntés du russe 'estouke' q'cryna^uta','remise','mariage','echmindefer' <'chemin
de fer' étaient très populaires parmi les citadins rl'Ourga, dans le
premier quart de notre siècle.
Dans la première année d'existence du nouvel Etat, le prince et
ministre des Affaires Etrangères de la Mongolie, Khandadortlji (ðitt
vang Gandadorji) faisait mongoliser les cartes par ses peintres et ses
graveurt sur bois.
Le coeur des cartes européennes était remplacé par qøs - la,
fleur, rosacet ciìrreau par egíil.øt.
.croix gammée; trèfle par ðeõ,eg
-
RrrrcE.Bt{
4
s
gøs
-
'cocur'
#
ðeðeg
-
'trèfle'
duy
-'pique'
nuage, nue stylisée; pique pñ ¿hty - le tlécor bulbiformc sur le
dôme d'un temple ou stlr la harnpe d'ttn clrapeau.
-
Les gravcurs tlu prince Khantladordji faisaient les cachets de
hois servant à imprirncr les six, scpt, huit, neuf, etc. de carrea,u,
rle pique, etc. Après I'irnpression on les coloriait.
Le valct cst représonté sur les cartes rnongoles par I'image d'ttn
page hiy-a en vêternent national; la dame, par I'image d'une da,me
mongole qatun et le roi, pÍrr un prince mongol nollo,n.
Le valet de carreau est nommé egülm lúy-a - page de nuage;
la. rlanre de ca,rreau, cgälen qatun - dame de nuage; le roi de carreaur
cg¡älen. no'.Uan
- prince dc nuage, etc.
L'as dc cène¡ìu est reprrisenté par I'image d'un tlragon, avec le
signe clrt nuûge a,u r:oitt sttpériettr gattche; l'¡rs de coellrr par un tigre,
a,ver', la croix gammóe a.tr môme coin de lil carte; I'as dc trèfle, par
un lion stvlisé; I'as tle cilrreirl¡, piùr un ókipharlt avec le signe d'rr'7
sr¡r le tlos. Les images rlu pa4¡e, de la dame, du prince et de I'as étaient
embellies de couleurs.
Les artisans mongols emploient le papier ru.qse et les couleurg
minérales de Chine. Pour rendre le carton plus solide, on collait
ensemble plusieurs feuilles ile papier.
(ies cartes mongoles étaient très populaires en leur temps et
tllor¡1u¡l
l¡¡;¡¡¡,' L',jntt rL, car'[('s
nrnnf.î{)l
,tl
ir
I
,l!
¡/'.:
æt
i.J
¡:.-È_
l. cgíilrrt'tt¿t¡'te¿ttt'
ll, egrï/en l¡1¿r¿r'(ta¡tìr tlr, citt'rr,¿rtt'
!. r,giilen Á'i.¡7-tr 'valct dc carteau'
4. cgiilt'n nuyln 'r't.ti tle r'atteat¡'
(Jnaoc op st¿t D'.lDattÙl ttrt'sùb 'ti
..rlìi)oc op s]s. Ù-llDUtDl urt-rlrtp 'z
.rlJQJl ap sll( ¡r'l¡)¿¿Dl rt¡¡'âapg '2
(nuil.¡Juc op stt, n-luuln¡ ua¡nïa '1
I
T
1.,
\
¡i,l
üu. li,
fi 'iI
I
*
I
L
.'(/
-1
.¡
_J
'T'ot
c> :-=
'.:L)';
t.
i
I
,(c.
ì\
)
t
(
I
,(
ç
/,
r
,)
\l:'tillì,1.NIU
Mor¡yol kriiür
-
lo jeu de oartes mongol
7
bien des artisans d'Ourga tiraient profit de leur fabrioation pour la
vente.
Encore de nos jours, on peut voir de ces ki¡lür dans les yourtes
des nomades, mais à Oulanbator ils ont été supplantés par les cartes
européennes.
Le vieux peintre, lauréat du prix Tchoïbalsang, M. Manibadar,
qui faisait autrefois ces cartes mongoles les a deesinées pour ce petit
article.
Peut-être ceg oartes si originales méritent-elles d'ôtre reproduites en fac-similé pour les amateurs du jeu de cartes.
I-res pièces
du domino chinois, connu chez les Mongols sous le nom
de ilalou, étaient en Mongolie septentrionale aussi mongolisées et
répandues sous le nom de gorlo, mais ce gera le sujet d'un autre
article sur les jeux populaires des Mongols, dont je prépare la publication.
A propos du chamanlsme mon$ol
Le culte de I'on$on Dayan degerchí chez les MoSole
Khotou$altes du Kosso$ol
PÄTì
R t ¡¡'r
L:
tI lt
N (f)ulatrbatttr)
A la móntoire de mon trtaître
I'acaclómicien B. Vlailirrlirtsor'.
()arpini sont
Les pr\res Guillaume de Rttbruquis et Jeatt cle Plitlto
les prentiers Ettropéens qui norts otìt colnllìtlniqtté les
g¡Oy¿rlìces
t:hamanistes des l\{ongols urédióvaux.
Nons tronvons également, dans tles sottrces chinoises et tttongnles,
bien des ltrentions sur les rites chattra,nistes des antliens }lorrgols'
[Jne nratiòre très intd:ressattte portr l'étude dtt cltatna.nisnle se tlouvait
¿tussi contenue rìa,ns les mitrtttscrits des prir\res chamatlistes. l\fais lil
plus griude partie cle cette littirratttre, ainsi r¡tte bcatt¡ottp de vieilles
traditions cham¿,ttistcs ont ¡réri, en partic :ì cause rlu fanatistlte et
(¡
bouddhisnte' cn partie
,ì\¡ec l¿ì Chrtte de l¿r cla.ssc conscrv¿ltrice dcS frirldattx rnolgols.
1l cst regrcttahle quc jusr¡u'anjourrl'hni les nranuscrits dcs priò-
fle I'intolérancc tles
lan-rir^s
prddicatettrs
res clìam¿ìnistes ¿rlressées attx beanx esplits fltt feu, ceux des itlvocations aux gónies cles ancêtres et rlutres spócituens de ltt poésie
gharnane, se trouvilnt enfonis tlalns cluelques-llnes tles bibliothtìtlues
des institutiotts sa,t¡tntes d'Ðulope et d'Asie, rcsttlllt elìcote ilróditS
et inactessibles aux retlherches scientifirlues rles mottgr-rlis¿rnts et des
ethnographes.
Bien que plus tl'un siècle notts sépare de la parution, en 1846,
de I'oeuvre de lr[. Dordji Bans&rov, savant mongol du xIX" siècle,
,1 propos du cha¡nanis¡ne nrcngol
I
I'u foi
n,ti¡'t ou I¿' cl¡¿rlralrist,t(' (he; l's ily'orrgols, ll{rtlñ ll'¿ì\I(llìs piìs
d'iìntres tlalaux scientifirlu¡s cr)ns¿l(Ìr'És ¿ì l'étude tlrt challr¿rnisme
rurr)lrgol.
Seul l'atrarlritrritrirln ts. \¡lirrlinrit'tso\,, rlans son cnltt¡tttr t'ctttltt lrld'lilllilr¿rit'e Ilednrrhu rlhnok4yrlit4¡u"íslitlrtts ù t)ur¡¡u cl rl¿rrs lr:.s rrrr/iols
d'our¡¡t tl. tltt lirnlcrlt rlotur¡it rhl ltrr\r'rrs iltfr¡t'nl;rtiotts stlr I'r1htt, du
clt¿lritlristrre cn Nlotrgolit ( )l'ientakl ct lcs trxtrs rlr tlettt illvot:ations
ch¿ulr¿ures
el trlllsrrl'iptiorr
lrlrorrrltirlrre in'crr l;r tt'lrlrrr'tiolr tltsse.
rlals tle lrorrrres contlitions pottr ritttcliet' le
tlttrgir,
chananistne lì
¡rilrt:e r1u'err sorr tetrrps rles rliz¿rines rlc cltn,nr¿tlìs
et rlc chalnanLìs Iìal)itaierrt ottrgir, bierr rlu'il plt'lât clu ddclin dtt
cltaltraltislue ert Ilrltgolio ( )rielttlle.
NÍ. Vl¿idilniltsov nrerntionne rlllrì les trlt¿tlr¿tns de la }fongolie f)rielttalc tir.nrteltt letr oligint' rlr'/):rilirl tn) eL tltr ?'s¡u/.¿t¿lr¿r¡ trd¡u4. ìIais
r¡ui sout ccs t.r*,,urrages? ( )rrt-ils existrl jadis ou n'ótaient-ils rlue
L'¿rcrtLirrrit:icn 11t¡lit
t AH (ICCI' Cele¡ruan llosro¡utR IL Ilpc¡naptrreJblttre t)Ttterbr .rrlrHrBltcr¡r'
qecxoll lr alrxeo.'ror¡rrrecrioli axcrre¡rnllur o ¡ra6orax, IlpoBe;Ieltllbtx r 1926 ro¡y.
P, l- h2. L'acarlô¡nicie¡r \¡ladirnirtsov ¡¡tentionnc, dans son cotn¡rte tendu,
les travar¡x qu'il fil, en t913, sur le chanlanisnrc en trlongolie occidentale, mais
st's ulatóriaux restent inêdits. Il est regrettahle aussi que toules mes colleclions de lógen<les et d'invocations cltanla¡ristes ct d'autres genres tle folklore
charnan, réunies en l()27-1930, restcnt enfouies dans les archives du Comité
tlos Scieneps.
N[. \¡ladil¡¡irlsov a notó rlerrx rìorrrs désignant des invocations chatnanis-
dûdul\a - 'i¡rvocation' et åurilg¿, mais il nc tlonne ¿rt¡culre ex¡rlication rle ce
tlernier nnnt. ðrrrilga est unc folrne très intóressa¡tte rltt tto¡lt uril)r-o - 'invitation', co¡rsrìrvó dans les lerrrres ch¿rrnartistes sorrs la fornre archaïrlue avcc
corìsorìne labiale initiale. l[. \'latlintirtsov avait notó artssi le nor¡t qobusurt
> khalkha :rorr,¿rs et ì'ttx¡rliquait colììrììe ,¡no.rue6rlaR cnocofittocts, cnoco6nocrrr TBoprrr, rry;Iecar et ajoutait: )rc!'rono Ðro ß coornsrctnl'roulell ltoHr.
nrrcr,,v. {xr¡nre rnùu.sa(a) Bcrfcrtacrctr n rtolrro¡hcl{nx l{ttnrax, ¡to o6'gcHeHtrn
ce6e g uaurrtx c.uoßaJ)lx lre r¡¿rxoil¡r.rlo; lrsnecrrro otlo ¡r R ue¡iorollrrx Äpyr¡rx
¡loHro.ìIbcnl-\ HaPettrrnxr rritnlr. ¡ {ivpnrcli¡rx roBoll¿lxt. (le nlot ;rolt'¿1r, chez
les c.hanlans nrongols, est lc nom de I'h¡'¡rnose el. j'ai a-ssisté à la séance
Les
h¡'pnotiquc d'un chanran
forme archaïr¡ue de 4oyusr¡n
chose illusoire',
cn lg27 à (iulanbat.or'. Le mot goòusun est la
) khalklla ¡dso¡r el. signifie littéralement 'une
Rln'rcnD¡i
l0
de I'imagination des ch¿urlans rnonggls? Nons s¡rvons qne les
cha,nrarrs borrri¿rtes i¡votluaient les gónies du fcu uamitae bõ et
le
fruit
ott
Su,t¡ralar¡ oiligor¡
,Sa¡ír¡¿k¿¿
tiltgen
et
Saralo,4 oiligo4. Dans les
grlnie du feu, et dans celui
IJrér'iaires chamanistes, consiìcrés au
du (iengis au jour des libatiolrs de l¿it tle jument, nous trouvons les
ttoms rle Õu,,n¿rr; ebiigtn' ct de Cutgqu'kr,*¡¡ idu,,'a?¿ et ll()lls y rec()n()ut¡lqu'lang qatutr"
naissons le fils du tiengis (inl'Q¿,r¡ Ent' eI s¿ fcnllne
Voici ttu fragtnettt d'ttne de ces prir\res chamanes:
l)
rli:et ä.
Hl
fuIiliyu'tr'
In
gr
i
Etìigen, ekc,
Qun ll'Iön¡fte lnç¡ri,
Qcn J-a)ar ttsttn,
Bägäde-yitt,
Örgen. öliç¡,
I'aryun takil,
Arbin ss[uli,
Qutuyttr, qwinr,,
Bägäd,e-yin,
Qallan qahnt,
Qa,nru,y bä ¡¡ü d,e-y in,
Önði elbeg boltuyai :
:
I{enton Deresütä you,lt'n.
Ilkin-rtä bayu,ju,
Dnlan )ntrban, eke'tä
G egä rr,-i1¡en u,rr,uyt øIsy1r¡r'rr,
I)ayan. tänrcn ulus qu,riYalu,
)'oultut
Ettitt''tlü buy'ttlu,
Quht.str.ú'u
Qu,lur
[oyu7'ð'i,y¡¡¿-i¡y
crt ttnuyalu'yuli tt',
I C'est
lt[alãt¡ teqger eu f.se6e fuIalãr¡ te4ger - 'Le riiett char¡ve' ou le
Père dieu chauve' Les variantes tr'Iatigan ) ntaliãl + nnlã'l sont conformes
à la loi phonétique du ntongol et nor¡s avons plusieurs dérivés de la racine
mal - mel n ntíl - möl - 'chauve, nlt, uni, ¡rlat, poli, glabre': maliyar,
melíger, milger, möIíger
-
'une chose polie, uno choso nue, lisse, etc'
A
Qo
t
ll
propoc ilu ehdmønisme monlol
ala b üf ttiite' A i wtd,alaY uli u,
J Algotil youl-un,
Eki;n-ilä bay'ulu,
Jäsü, quran untyuliu,
J
u.róidei-yin,
Õ oo*-a
M erg at-iy er
J el-e-ben tûtayu,üu1
Og¡irailai-yin ()ar-a Kir'uyu-bar
IJ i,ay a-b un,,ury alayull u,
'l' an
gy'udai-yi1¡
$eðen -iy er
a-ban tatbiyullu,
T atnrdøinin Siki Q,u,ttty-iyør
'I' oy-
D ny ay-a-b
an
itelb e¡¡ät1
ti,
Õayailai nouüx böge-bmt
ahtli-b an sahryu,li u,
S
Õ angqu,Iang
qahrn iduyan'iyat
K ön ä g-iy en, b ari,y
K ke I atar- iy au
ö
u"ü
bo
s
u,
qayulwr t' a,] uy
u''
Traduction:
o, puissant Miliayan tengri,
Mère bienfaitrice Etouguen,
r
Gråce à que Òayadai et son épouso Öangqulang qatun ótaienl, des charnans, les textes oraux et littéraires cl¡a¡nanistes ont conservé leurs noms,
cependant ils ne noUs donnent aucun nom des autres fils et descendants de
Gengis, non chamans.
I)ans un petit bréviaire chamaniste Sapg saëuli-gin sudur appartenant
à une porsonne privée, j'ai trouvé en 1927 le nom d'unc ancienne villo mongole
aux bords de la \¡olga: Iiíl mören-ü Ükeg birlya-sun, àlaquelle le bréviaire
ordonnait de faire libatiou de lait de jument. La prière nom¡nai[ aussi la
ville de l{houbilal l{han - IGyibeng Sanilu'gitt balyasun et je supposo que
dans ces villes se trouvaient quelqrres sanctuaires charnanistes, grâce à quoi
on se souvient d'elles encore de nos jours dans les prières chamanes.
¡ Ce fragment conservé dans mes carnel,s de notes est extrait en 192?
d'un manuscril Gegün-ü saóuli-gin süilür orusibai de la bibliothèque privée
de M. iamyong sayid, premier président du Comité des Sciences.
t2
R'trvtc¡tEN
Princier Ciel Etetnel,
Princières 'Ierre et Eaux,
Que les prières communes
Et les offrandes grasses!
Que les libations abondantes
Et les festins de grâce (des dieux),
Que les propriétés
Du Khagan et de la Reine de
Et celles de tout son PeuPle,
tous
Qu'ils soient richesl
Et pour cela on camPait
Sur la source de la rivière des Stipas
En étabtissant sa tente bleue,
Et faisait pouliner les juments
Qui avaient solxante-treize mères.
Et I'on réunissait tout le peuple nombreux;
Pour cela on campait
Sur la source de la rivière des Roseaux,
Et faisait poulinor les juments,
Tachetées comme des onagles,
Et I'on donnait des boissons à tout le peuple;
Pour cela on camPait
Sur la source de la rivière des Herbes,
Et I'on faisait verser des pluies de longue durée
Et par les sage Tso des Joutchens
Ficher les piquets des Poulains,
Et par Kara Kirougou - Rosée Noire d'Oirates
Capturer au lasso des Poulains
Et par le Sage Setsen des Tangoutes
Tondre la crinière des Poulains
Et par le prince chaman Tsagadai
Faire des libations du lait des juments
Et par la reine chamane Tsankhoulan
Tenir le sceau à traire des jumentsu.
A
propos du chamanís¡ne mongol
13
L'image xylographique de I'ongon Dayan d.egereki
M. Vlaciirnirtsov mentioììne pa,rnìi les esprits bienveillants des
clìamaDs Íìussi le l)a¡¡irrrlítrñ:\tol. I)aVan de¡¡ueki. (l'ét¿it la déité
locale de tous les chamans de la }fongolie tlrr Nortl, ;ì laquelle, mênre
de nos jours, ils font en &utonìne des offrantles et des libations.
En septentbre 195.1, ¡lendattt tnon v{ry:ìge au l(ossogol, jc trouvai
tout occasiollnellernent iì, Mourerr, centre ¡rdrninistr¡rtif tle I'aTmak
de Kossogol, une planchette xylographique portant I'empreinte de
I'effigie rl'un guerrier équestre sous le toit d'une petite chapeìle. Au
premier abord, ,je le pris pour une divinitó lamaïste. IVlais il portait
sur l¡r tête un chapeatt mongol, un carrluoi,s avec c¡uatre fltlches sur
le côté droit et un arc cn ótui sur le côté gauche. Dans sa main droite,
ler'óe au-dessns de la, tôte du cheval, le guerrier tenait un fouet
Iìtxrr:tr¡ir*
t4
ril¡lirlitrt t,ltoz lt's trlìiìnì¡tlls.r lìt je ntc sollvilìs
r¡tte, ¡tl¡s tle vi¡gl tìt¡lrir,s irrtlral'itvattt, j'itvitis I'oncrllttrri les int¡rressi()lrs xvklgLlphirlrtcs rlo r.0t,tr: urêlìrtr glilvllt'e sllt'lxlis sllr lf's ¡lièr't's
( )ttlalrlr¡r[Lrr.
rìe soie juIttr of llltmchc rl¡urs k.s y(]lll'tes tltrs trhalltittìs iì
nlrlngol
-
Synìhr)le tlrt
(lclarrrcrL,lltnal'i¡lrirltltrlrr(:()ltl'il'itl'a'itletlesttltitlnilltsltotlt'idett(ltlltlll'gls tltttifier. I'irnage tl¡ cg gttrrt't'ir,r ilttronlttt. Lcs tr¿ryaiìletlt's
N[rlutctrllì.il\r¿ìi(]ntiriltl¡tlllrltttrllttttr¡ltr.rit¡llcttx.tllìalnllll0rl'sfìlX'littloÌrlji et j'rl,tais sutpris tl'ap¡rt'entlre rltttl lit, gt'¡ì\'tlrc sur lrois ritait
l,irnage icorrrlgll¡rlti(lue du gt'anrl es¡tl'it ¡lLotet't,trttl'tles clt¡tlrtllrs
f)uyurr, d¡lr'¡:i - 'Stt¡rLôttte snr tottt L: ¡rrrtt¡rle''
La repLotlttctiott des ittlagtls rlc tlivinitrls cltittlt¿tnistes lllìL ilìlplt-ssi0n xyloglil¡thiqurr cst,iusr¡tt'it ltrtlst'nt tr¡ttt it fitit i¡lcontltte Íìllx
peup]eScolrfessfl.lìtlctlltiulrilltislìleettl()llsav()llstlitltslttll,rtlrlas
sans tloute ttlle influcnrle l¿rnlitiste.
J'ai pU truter, ¡{r.iìce ir ntoll iufol'lllatlicrl 'l'sellr:lidrn'dji, iìgrie dc
dtr I'itïltlnk
i-)O atìS et htrlritÌllt le ucttvir\nlc ìrl,g rÌtt lìot¡ritt Sotttttottlt
tle l(ossrrgot (/iöösiiyiil tr¡¡itn'tt]''ttn lJiirtlrt 'stor¿t¿tr-rt ]Ttrsiidiigor ltuT''¡1¡
I)43¡ctt
QxuI entt:ttltti Õettogtl,,nii) l'iuv(rfilttiolt clt¿rtll¡tltistc ù I'eslrrit tlu
je
ileçlereki. IIitis, crltttttltl lll¡ll m¡tît¡c I'ittratlrilrrir''iclr Vl¡rrìilniltsov,
pils colììllìtllìidois fa,it'e tÌìOS lirscl'\¡eS:s l¡r cltatttilììc lle nl'ir ¡tettt-ôtre
r¡uri les textcs tle I'ittvtlcat,iolt ill exteltsr-¡!
\¡oici lc texte cle I'illt'tltratiolt à Dlyin cttlrxi:
gu'[:in' yrrnt'ut¡ {arga moritl 't'irlùgl'ã
riin I )tr.rttn
l¡'ril'nlrTr¿:u lr'r
tr
tll
Xat'r-ru,n' dunul íil Y aI' ttc,
0 4yon doltií stnvloli gul' ut,
ú,ri
4
tl¡ur
m ortr¡ u'ndulgrú' uc,
¡rarcotllaient d'un seul
chlurane'
coup de fottet unc mille de ga¡ìrr (chin. li) ct, dans la pictogrlphic
le fouet est le syrilbolc rle la rapiditó. La planchcLte avcc I'itùage úu Dayun
I Sclon les croyànces chamanistes, tes csplits
degereki a été transférire au
trf
usée
d'Ethntglaphie de I'Acadérnie tlcs sciettces
Soviétiques à Leningrad.
2 Le phot6gra¡-,he qui ¡r'accontpagnail, dans tnon voyagc' étant r¡n homnte
gt'ossières,
peu cultivé, a troublé, pår son cxl,éricur surprettant ct ses nlanières
mon infor¡natrice et elle s'est pressée tle finir son rtlcit'
A
propos du chamanísme mongol
t5
&nt, tutm,ã,ll nùaöileqhæery ireleõi,
òtoùl ntnnd,q l;at'aqrar¡'írekði
nãn Dayan bû,ral ãwn mini!
{ørn xoldzaq roniry Ëû,#î éi.ni ôrEidâi,
u,rin. iÌäalan ilã,ilna,qã.!
iutù,snù,
orçyiurL
ùrí nvini,
malí nt'itti
&ru)&n ßagãnt, huynï,
teran l,' el'neq
naerñ,l
mini
!
Traduction
mon Père libre et princier ¿ìux cheveux blancs,
Qui a trente-trois courciers isabelle!
Mon Père de tous, princier aux cheveux blancs,
ÞO
Qui a passage au mont saint d'Aube,
Qui a siège an col des Esprits,
Qui boit I'eau de la rivière de Santal,
Qui vient en mettant la corde de I'a.rc derrière lui,
Qui vient en bandant I'arc devant luil
A Toi j'offre la chair sacrificatoiro
Du mouton à tête rousse et chauve,
Et je T'invoque en priant!
Mes enfants que je baise,
Mon bétail qui me nourrit
Et tous mes biens jùstes
Je te prie, garde{eslr
Mon informatrice m'a
dit qu'après cette invocation à I'esprit
du
Dagin ilêrri, elle saluait I'assemblée au nom de I'ongon:
- Mon peuple, es-tu en bonne santé? - et I'on répontlait:
- Nous soûrmes sains et saufs, Père Suprême sur tousl Les personnes présentes offraient à I'esprit, c.-à-d. au chaman
ou à la cham&no, du tabac et un repas.
R¡rrcHnN
t6
Après cela le chaman bénissait ä.ìl norì'l de I'esprit la famille qui
I'avait invitó:
òdùr sòtti:tt, donuittt' tso,ktn
anmt dlt, ù,ra ¡,ítnúd''í' õin'i'
retlzã yanrultl'lo rantdëi 1¡atotr'yã,
Du,1¡irr' rlêrñde l.,l¿'òr¡¡i, !
c'est-à-dire:
r
uAux r¡uatrc temps du jour et de la nuit
J'éveillerai tottj outs
Tes procliains et tes eulants,
Ad.ore le Suprêne sur tous!¡r
Ainsi le culte de I'ongon Dayin rlãrri, comme celui de tous les
esprits chamanistes, cr.rnsiste en offrandes pour l'¡ttltadotler et pour
obtenir sa bclnédiction. Natureìletrent cela do¡lnait au chaman
mystificateur tous les moyens d'exploiter ses clients sirnples et
résignés. Nfais la liquidation rle I'analphabétisme et le progrès culturel
restreignent de Itos jours I'activité des cltatnalts, et le char¡ranisme
ne s'est conservé que daus les rógions boisées rlu Kossogol, éloignées
du centre de I'ai'mak, parmi les tribus rnortgoles des khotougaites
et des darchates.
I
Les quatre temps du jour et <Ie la nuit sont: a) le matin, b) le soir, c) la
nuitée du soir, d) la nuitée de I'aube, ou öräige, üdesi, üd.esiyin söní el ürün
sii¿i. À(idi est Ia borne entre le matin et le soir et minr¡it celle entrc la nr¡itée
du soir et la nuitée de l'aube, selt¡n les représentations poprtlaires des nrongols.