Nouvelles techniques et bénéfices attendus pour la radiothérapie du
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Nouvelles techniques et bénéfices attendus pour la radiothérapie du
Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Mise au point Nouvelles techniques et bénéfices attendus pour la radiothérapie du cancer du poumon New techniques and potential benefits for radiotherapy of lung cancer L. Lefebvre a,∗ , M. Doré b , P. Giraud c,d a Département de radiothérapie, centre Henri-Becquerel, rue d’Amiens, 76038 Rouen cedex 1, France Département de radiothérapie, institut de cancérologie de l’Ouest, centre René-Gauducheau, boulevard Jacques-Monod, 44805 Saint-Herblain cedex, France c Service d’oncologie-radiothérapie, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France d Université Paris Descartes, Paris Cité Sorbonne, 12, rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France b i n f o a r t i c l e Mots clés : Cancer du poumon Radiothérapie Stéréotaxique Radiothérapie conformationnelle par modulation d’intensité Asservissement respiratoire Imagerie métabolique r é s u m é La radiothérapie est utilisée dans les cancers du poumon inopérables, associée ou non à de la chimiothérapie. La radiothérapie classique donne des résultats décevants. De nouvelles techniques permettent une meilleure adaptation au volume tumoral et limitent l’irradiation des tissus sains avec, à terme, la possibilité d’augmenter les doses dans la tumeur et potentiellement d’améliorer la probabilité de survie. Avec la radiothérapie conformationnelle par modulation d’intensité, il est possible de conformer les isodoses à des volumes complexes. Elle est largement utilisée et semble indiquée quand la tumeur est localement évoluée. Ses gains dosimétriques sont démontrés mais les résultats cliniques sont encore hétérogènes. La radiothérapie stéréotaxique permet le traitement de petits volumes cibles par de multiples faisceaux étroits. Elle nécessite des appareils dédiés ou des équipements adaptés sur des accélérateurs classiques. Pour les tumeurs de faible stade, son efficacité est comparable à la chirurgie avec une toxicité acceptable. La curiethérapie endobronchique peut aussi être utilisée pour des tumeurs de faible stade répondant à des critères particuliers. L’hadronthérapie est une technique encore expérimentale. Les hadrons possèdent des propriétés physiques permettant une distribution de dose très précise. Dans les rares études publiées, la toxicité est globalement inférieure aux autres techniques mais pour les tumeurs de faible stade, son efficacité ne semblerait pas supérieure celle de la radiothérapie en conditions stéréotaxiques. Ces techniques sont optimisées par l’imagerie métabolique qui permet de mieux définir la cible et d’évaluer la réponse thérapeutique, la radiothérapie guidée par l’image qui permet un repositionnement plus précis et par les techniques d’asservissement respiratoire qui prennent en compte des mouvements de la cible. © 2014 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. a b s t r a c t Keywords: Lung neoplasms Stereotactic body radiotherapy Intensity-modulated radiotherapy Respiratory gating Dose painting Radiotherapy is used for inoperable lung cancers, sometimes in association with chemotherapy. Outcomes of conventional radiotherapy are disappointing. New techniques improve adaptation to tumour volume, decrease normal tissue irradiation and lead to increasing tumour dose with the opportunity for improved survival. With intensity-modulated radiation therapy, isodoses can conform to complex volumes. It is widely used and seems to be indicated in locally advanced stages. Its dosimetric improvements have been demonstrated but outcomes are still heterogeneous. Stereotactic radiotherapy allows treatment of small volumes with many narrow beams. Dedicated devices or appropriate equipment on classical devices are needed. In early stages, its efficacy is comparable to surgery with an acceptable toxicity. Endobronchial brachytherapy could be used for early stages with specific criteria. Hadrontherapy is still experimental regarding lung cancer. Hadrons have physical properties leading to very accurate dose distribution. In the rare published studies, toxicities are roughly lower than others techniques but for early stages its effectiveness is not better than stereotactic radiotherapy. These techniques are optimized ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (L. Lefebvre). http://dx.doi.org/10.1016/j.canrad.2014.06.017 1278-3218/© 2014 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 474 L. Lefebvre et al. / Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 by metabolic imaging which precisely defines the target volume and assesses the therapeutic response; image-guided radiation therapy which allows a more accurate patient set up and by respiratory tracking or gating which takes account of tumour respiratory motions. © 2014 Société française de radiothérapie oncologique (SFRO). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. 1. Introduction Avec 39 495 nouveaux cas estimés en 2012, le cancer du poumon est le quatrième cancer le plus fréquent en France. Il se situe au premier rang des décès par cancer avec 29 949 décès par an [1]. Quatre-vingt-cinq pour cent des patients atteints présentent un type histologique non à petits cellules. Le pronostic est très défavorable avec une probabilité de survie relative à 5 ans tous stades confondus de 14 %. Pour les cancers localisés, souvent accessibles à un traitement chirurgical, cette probabilité à 5 ans peut atteindre 50 % [2]. Un quart de ces patients ne peuvent être opérés à visée curative en raison de maladies associées et une radiothérapie exclusive leur est alors proposée de première intention [3]. La majorité des patients est atteinte d’un cancer localement évolué ou métastatique inopérable au moment du diagnostic. Chez ces patients, les volumes irradiés sont souvent importants, surtout si une irradiation ganglionnaire est nécessaire ; la toxicité est alors accrue et peut devenir limitante. Ainsi, la radiothérapie classique donne des résultats décevants ; tous stades confondus, le taux de contrôle local à 5 ans est de 30 à 50 % et celui de survie globale de 10 à 30 % [4]. De plus, les complications aiguës et chroniques restent fréquentes, particulièrement les complications pulmonaires qui peuvent entraîner une dégradation de la fonction respiratoire définitive et handicapante. Récemment, les progrès en robotique et en informatique ont permis d’optimiser la radiothérapie et d’utiliser de nouvelles techniques plus précises mais plus complexes. Nous aborderons ici la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI), la radiothérapie en conditions stéréotaxiques, l’hadronthérapie et la curiethérapie endobronchique ; le but commun de toutes ces nouvelles techniques étant d’augmenter la dose aux volumes cible tout en épargnant mieux les organes à risque. Ces techniques innovantes sont le plus souvent associées à différents systèmes d’imagerie pour le contrôle quotidien de la position du patient (radiothérapie guidée par l’image ou IGRT), aux dispositifs d’asservissement respiratoire pour améliorer leur précision et à l’imagerie métabolique pour mieux définir les volumes cibles. Ces différentes approches seront aussi abordées dans cet article. 2. Radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI) Tableau 1 rapporte les résultats des principales séries sur l’efficacité et la toxicité de la RCMI pour cancer pulmonaire. 2.2. Résultats des études dosimétriques Dans la plupart des études, la RCMI diminue significativement le V20 (volume recevant 20 Gy) pulmonaire par rapport à la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle, mais la dose moyenne délivrée aux poumons paraît semblable entre ces deux techniques. Ainsi, Yom et al. ont obtenu un V20 de 35 % avec la RCMI et 38 % avec la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle (p < 0,001) [5]. L’étude de Liao et al. a confirmé ces résultats avec des V20 respectivement de 34 % et 37 % (p = 0,0013) [6]. Cependant, le principal inconvénient de la RCMI, et qui semble être majoré avec l’arcthérapie dynamique, est le large volume de tissu sain irradié à faible dose (moins de 15 Gy), conséquence des multiples portes d’entrée des faisceaux. Dans les études de Yom et al. et Liao et al., les V5 (volume recevant 5 Gy) étaient respectivement de 63 % et de 64 % avec la RCMI contre 57 % avec la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle pour les deux études (p = 0,011 et p < 0,0004). Il est possible que cette irradiation importante de tissu pulmonaire sain (entre 5 et 13 Gy) puisse entraîner un surcroît de pneumopathies interstitielles et, en théorie, des cancers secondaires [7]. 2.3. Résultats des études cliniques en termes d’efficacité Dans l’étude de Liao et al., la durée médiane de survie était meilleure après RCMI que radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle (16,8 contre 10,2 mois p = 0,039) [6]. Dans l’étude de Govaert et al. portant sur 86 patients, la durée de survie médiane était de 29,7 mois [8], dans celle de Jiang et al. de 21,6 mois. Ces résultats sont comparables, voire meilleurs que ceux de la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle rapportés dans la littérature à dose totale équivalente [9]. L’étude de Harris et al., réalisée rétrospectivement sur 7610 patients de la base de données SEER (Surveillance, epidemiology and end results) et comparant la RCMI et la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle, a montré en analyse unifactorielle une différence de survie globale en faveur de la RCMI avec un hazard ratio (HR) de 0,9 (p = 0,02), mais ce résultat n’était pas confirmé par l’analyse multifactorielle (HR = 0,94 p = 0,28) [10] (voir Tableau 1). 2.1. Description de la technique 2.4. Résultats des études cliniques en termes de toxicité La radiothérapie conformationnelle en modulation d’intensité (RCMI) est une technique multifaisceaux qui utilise les mouvements des lames du collimateur pour moduler l’intensité des faisceaux pendant l’irradiation. La dosimétrie par planification inverse prend en compte les nombreuses hétérogénéités rencontrées et détermine la fluence de chaque faisceau en fonction des contraintes de dose choisies. Dans le cancer du poumon, il n’y a pas d’étude clinique prospective comparant la RCMI à la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle. Son bénéfice dosimétrique théorique a incité de nombreuses équipes à la proposer pour traiter les cancers localement avancés ne pouvant bénéficier d’un traitement chirurgical. Le Yom et al. ont observé rétrospectivement des taux de pneumopathie radique de grade 3 ou plus à 12 mois de 8 % pour la RCMI contre 32 % pour la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle (p = 0,002) [5]. L’étude de Jiang et al. a montré 11 % de pneumopathies radiques à 6 mois et 14 % à 12 mois [9]. À noter que dans les séries modernes de radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle, le taux de pneumopathie radique de grade 2 ou plus se situe aux alentours de 15–20 % [7,11,12]. En ce qui concerne la survenue d’œsophagite, dans l’étude de Jiang et al., 18 % des patients souffraient d’une œsophagite aiguë de grade 3, 11 % d’une sténose œsophagienne à distance de L. Lefebvre et al. / Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 475 Tableau 1 Principales études de RCMI dans le cancer du poumon. Étudea Nombre de patients Dose totale médiane (Gy) Stade Suivi médian (mois) Contrôle local Survie globale Toxicité Yom et al., 2007 [5] 68 63 III–IV 8 Liao et al., 2009 [6]b 91 63 III–IV 15,6 6 mois : 93,5 % 1 an : 55,3 % 2 ans : 76 % Jiang et al., 2012 [9] 165 66 III–IV 16,5 Govaert et al., 2012 [8] 86 66 III 12 2 ans : 57 % 3 ans : 41 % – Shirvani et al., 2013 [14] 3986 (base SEER) – III – – 6 mois : 78,8 % 1 an : 57 % 1 an : 70 % 2 ans : 60 % 2 ans : 46 % 3 ans : 30 % 1 an : 71 % 2 ans : 56 % – Chen et al., 2013 [13] 171 66 (dose de prescription) III 33 2 ans : 50 % 8 %, pneumopathie de grade ≥ 3 10 %, pneumopathie de grade ≥ 3 11 %, pneumopathie de grade ≥ 3 0 %, pneumopathie ou œsophagite de grade 3 10,5 % pneumopathies aiguës 44 % œsophagites aiguës Tous grade 6 %, œsophagites tardives de grade ≥ 3 SEER : surveillance, epidemiology and end results program. a Études rétrospectives. b Les données tirées de l’étude de Liao et al. [6] sont estimées à partir des courbes présentées dans l’article original. l’irradiation [9]. Chen et al. ont rapporté un taux de toxicité œsophagienne tardive de grade 3 ou plus de 6 % [13]. Une étude plus récente mais toujours rétrospective portant sur 3986 patients de la base de données SEER n’a pas retrouvé pas de différence significative en termes de toxicité aiguë pulmonaire et œsophagienne entre la RCMI et la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle [14]. Dans l’étude de Harris et al., toute la toxicité était similaire entre les deux groupes en analyse multifactorielle [10] (voir Tableau 1). 3. Radiothérapie en conditions stéréotaxiques 3.1. Description de la technique et indications Historiquement développée pour l’irradiation de lésions intracrâniennes, la radiothérapie en conditions stéréotaxiques, s’adresse à de petits volumes cibles. Grâce à un repositionnement très précis du patient et à un grand nombre de faisceaux de petit diamètre, l’irradiation des organes à risque avoisinants (ou situés sur le trajet des faisceaux) est réduite permettant d’augmenter la dose totale et surtout la dose par séance sans toxicité rédhibitoire. Dans les cancers du poumon, la radiothérapie en conditions stéréotaxiques s’adresse habituellement à de petites lésions pulmonaires, de stade T1N0 ou T2N0 et de moins de 5 cm, avec un objectif curatif chez des patients le plus souvent inopérables en raison de maladies associées. Les taux de survie sont très élevés à 2 ans (56 à 80 %), semblables à ceux de la chirurgie, avec des taux de toxicité tardive acceptables. Les schémas de fractionnement sont adaptés à la localisation et à la taille de la tumeur. Ainsi, de plus grosses doses par fraction sont fréquemment utilisées pour les tumeurs les plus volumineuses et les plus périphériques. Pour les tumeurs situées à proximité d’organes à risque, les doses par fraction sont plus faibles. À titre d’exemple, il est délivré trois fractions de 20 Gy pour les tumeurs de stade T1, cinq fractions de 12 Gy pour les tumeurs de stade T2 ou proches de la paroi thoracique et huit fractions de 7,5 Gy pour les tumeurs proches du médiastin [15]. Dans les études, une preuve histologique de malignité n’est pas toujours obtenue et le cas échéant, seuls des arguments indirects à l’imagerie en faveur d’une malignité associés à une forte probabilité clinique (facteurs de risque) suffisent pour poser l’indication. Cette attitude pragmatique est consécutive du fait qu’il est souvent difficile de réaliser des biopsies de ces tumeurs de petites tailles chez des patients pour lesquels une chirurgie a été récusée et les gestes invasifs diagnostics sont risqués. De plus, les lésions pulmonaires spiculées et évolutives avec un hypermétabolisme à la TEP ne sont bénignes que dans 4 % des cas dans les séries chirurgicales [16]. Les résultats de la littérature chez ces patients irradiés sans confirmation histologique, sont semblables à ceux des séries chirurgicales ou de radiothérapie avec biopsies [17–19]. Le Tableau 2 rapporte les résultats des principales études en termes d’efficacité, de toxicité, de la radiothérapie en conditions stéréotaxiques. 3.2. Résultats des études cliniques en termes d’efficacité Dans une étude rétrospective multicentrique japonaise portant sur 245 patients, un taux de progression locale après radiothérapie en conditions stéréotaxiques de 14,5 % a été observé [20]. Un essai de phase II portant sur 70 patients médicalement inopérables a rapporté des probabilités à 2 ans de contrôle local de 95 % et de survie globale de 56 %, avec plus de décès en rapport avec les maladies associées qu’avec une progression de la maladie [21]. D’autres études ont retrouvé des taux comparables : entre 88 et 93 % à 2 ans pour le contrôle local et entre 42 et 60 % à 3 ans pour la survie globale [15,18,19,22]. En ce qui concerne la comparaison à la chirurgie, dans une étude rétrospective récente, la radiothérapie en conditions stéréotaxiques permettait un meilleur taux de contrôle locorégional que la lobectomie par thoracoscopie vidéo-assistée (93,3 % contre 82,6 % à 3 ans) mais sans différence significative de survie globale [23]. À noter qu’après une radiothérapie en conditions stéréotaxiques l’évaluation de la réponse est difficile. En effet, les fortes doses délivrées entraînent des modifications morphologiques et métaboliques qui rendent les scanographies et les TEP-scanographies difficiles à interpréter. D’après les critères RECIST (Response Evaluation Criteria In Solid Tumors) 1.1, les lésions tumorales traitées par irradiation en conditions stéréotaxiques sont considérées comme non évaluables sauf en cas de progression [24]. 3.3. Résultats des études cliniques en termes de toxicité Les principaux effets secondaires rencontrés par les patients en cours ou après un traitement par irradiation en conditions stéréotaxiques sont la fatigue (31 %), les douleurs thoraciques (12 %), les nausées (9 %), la dyspnée (6 %), et la toux (6 %), tous stades et tous délais d’apparition confondus [15]. Dans la littérature, les taux d’effets secondaires tardifs sévères sont hétérogènes, allant de 3 % dans l’essai de Lagerwaard et al. [15] à 12 % pour Baumann et al. [18]. Dans cette étude, il était rapporté 28 % de cas de toxicité aiguë (survenant dans les 18 premiers mois), il s’agissait principalement de complications pulmonaires. Une analyse de l’essai 0236 476 L. Lefebvre et al. / Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 Tableau 2 Études de radiothérapie stéréotaxique pulmonaire. Étude Nombre de patients Doses Stade TNM Suivi médian (mois) Contrôle local Survie globale Onishi et al., 2004 [20]a 245 T1–T2 24 2 ans : 87 % 2 ans : 70 % 7 Lagerwaard et al., 2008 [15] 206 18–75 Gy : fractions de 3 à 18 Gy 3 × 20 Gy 5 × 12 Gy 8 × 7,5 Gy 3 × 20 à 22 Gy 3 × 15 Gy 3 × 18 Gy 54 à 60 Gy en 3, 5, 8 ou 12 fractions T1–T2 12 2 ans : 93 % 2 ans : 64 % 3 T1–T2 T1–T2 T1–T2 T1–T2 50,2 23 34,4 30 3 ans : 88,1 % 3 ans : 92 % 3 ans : 97,6 % 3 ans : 93,8 % 3 ans : 42,7 % 2 ans : 65 %3 ans : 60 % 3 ans : 55,8 % 3 ans : 79,6 % Fakiris et al., 2009 [22] Baumann et al., 2009 [18] Timmerman et al., 2010 [19] Verstegen et al., 2013 [23]a a 70 57 55 64 Toxicité de grade ≥ 3 (%) 20 28 16,3 6,3 Étude rétrospective. du Radiation Therapy Oncology Group (RTOG) a montré à 2 ans un déclin de 5,8 % du volume expiratoire forcé en 1 seconde (VEMS) et de 6,3 % de la diffusion libre du monoxyde de carbone (DLCO). Les épreuves fonctionnelles respiratoires initiales n’étaient pas prédictives d’une toxicité pulmonaire plus forte, ce qui amenait les auteurs à conclure que ce critère ne devrait pas être utilisé pour récuser les patients d’un traitement par irradiation en conditions stéréotaxiques [25]. 4. Hadronthérapie 4.1. Description de la technique et indications L’hadronthérapie consiste en l’utilisation de particules comme les protons et les ions carbones pour irradier les tumeurs. L’absence de pénombre latérale et le transfert d’énergie suivant le pic de Bragg permettent de réduire considérablement la dose aux organes à risque. L’utilisation de l’hadronthérapie est limitée du fait de son coût élevé, de la lourdeur des installations et des difficultés dosimétriques dans des milieux très hétérogènes. Dans le cancer du poumon, cette technique est prometteuse mais encore expérimentale. 4.2. Résultats des études dosimétriques Une étude multicentrique prospective in silico sur la cohorte de l’étude ROCOCO a comparé une dosimétrie utilisant des photons (radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle classique et RCMI) et une dosimétrie utilisant des protons chez 25 patients atteints de cancers de stade IA à IIIB [26]. La dose de prescription était de 70 Gy en 35 fractions. La dose aux organes à risque était plus faible avec la protonthérapie sans dégradation de la couverture du volume cible. Les V20 pulmonaires étaient respectivement de 27,1 %, 23,4 % et 20,5 % pour la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle, la RCMI et la protonthérapie. Ces résultats permettraient d’envisager une augmentation de la dose dans la tumeur avec les protons. 4.3. Résultats des études cliniques en termes d’efficacité Dans la première étude prospective réalisée, la probabilité de survie globale à 2 ans était de 31 % pour l’ensemble des patients, celle de contrôle local était de 87 % à 2 ans [27]. Bush et al. ont rapporté des probabilités de contrôle local et de survie globale à 3 ans respectivement de 74 % et 44 % tous stades confondus dans une cohorte prospective de 65 patients [28]. Dans l’étude de Sugane et al., la probabilité de contrôle local atteignait 95,8 % à 5 ans celles de survie globale à 2 et 5 ans étaient respectivement de 64,3 et 30,7 % [29]. Pour 21 patients atteints de cancer de stade I, Hata et al. ont retrouvé un taux de contrôle local de 100 % et une probabilité de survie globale à 2 ans de 74 % avec un suivi médian de 25 mois [30]. Myamoto et al. ont retrouvé des résultats comparables chez des patients atteints de cancer de stade I [31]. Une méta-analyse récente comparant photons (radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle et stéréotaxique), protons et ions carbones, a montré des taux de survie globale similaires entre radiothérapie en conditions stéréotaxiques et hadronthérapie pour les cancers de stade I inopérables. La probabilité de survie globale à 5 ans était de 20 % pour la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle, 42 % pour la radiothérapie en conditions stéréotaxiques, 40 % pour la protonthérapie et 42 % pour les ions carbone. L’hadronthérapie semblerait donc plutôt bénéficier aux patients atteints de cancer localement évolué [32]. 4.4. Résultats des études cliniques en termes de toxicité Les études de Myamoto et al. et de Sugane et al. sur les ions carbones ont donné un taux de pneumopathie radique aiguë et tardive de grade 3 ou plus nul avec 5 ans de suivi [29,31]. Dans les autres études prospectives, le taux de toxicité pulmonaire aiguë de grade 2 ou plus variait de 2 à 5 % [30,33]. Les résultats sur la toxicité pulmonaire tardive de grade 2 ou plus sont plus hétérogènes avec un taux de 10 % rapporté par Hata et al. et de 4 % dans l’étude de Myamoto et al. [30,33]. Dans la méta-analyse de Grutters et al., les études sur la radiothérapie en conditions stéréotaxiques rapportaient en général plus d’effets secondaires que la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle et l’hadronthérapie, en ce qui concerne principalement les pneumopathies radiques. Avec l’hadronthérapie il n’y avait pas d’œsophagite grade 3 et plus et seulement 4 patients sur 336 (1 %) ont souffert d’une pneumopathie radique de grade 3 ou plus [32]. 5. Curiethérapie endobronchique 5.1. Description de la technique La curiethérapie endobronchique consiste en la mise en place de sources radioactives au contact de la tumeur dans la lumière bronchique, permettant d’administrer une forte dose in situ et d’épargner les tissus sains. Elle utilise souvent des sources de haut débit de dose. En France, le consensus est de délivrer une dose de l’ordre de 5 Gy par séance et une dose totale de 15 à 30 Gy. Cette technique a été utilisée initialement dans les situations palliatives mais les indications se sont élargies à des traitements à visée curative. 5.2. Résultats en termes d’efficacité À visée curative, l’intérêt de la curiethérapie semble plus marqué pour des tumeurs endobronchiques de moins de 2 cm, L. Lefebvre et al. / Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 non visibles sur la scanographie et obstruant moins de 25 % de la lumière, éventuellement en zone déjà irradiée, chez des patients ne pouvant bénéficier de chirurgie ou de radiothérapie externe en raison d’une insuffisance respiratoire. Dans cette population, des études ont montré un taux de contrôle local de 93,6 % à 3 mois et une probabilité de survie de 57 % à 2 ans, 29 % à 5 ans avec une durée médiane de 28,6 mois. 5.3. Résultats en termes de toxicité La tolérance de la curiethérapie endobronchique semble très bonne. Les effets secondaires sont principalement des hémoptysies et des pneumopathies radiques. Les taux d’hémoptysie massive varient de 0 à 32 % mais leur origine exacte reste difficile à établir (progression, toxicité des traitements). À noter que la majorité des études portent sur des traitements palliatifs [34]. 6. Apport de la radiothérapie guidée par l’image (IGRT, image-guided radiation therapy) La radiothérapie guidée par l’image consiste en l’acquisition d’images anatomiques du patient en salle et en position de traitement dans le but d’améliorer son repositionnement. Cette technique permet de limiter la taille des marges pour le volume cible prévisionnel. À titre d’exemple, chez des patients traités en conditions stéréotaxiques pour lesquels une tomographie conique (CBCT, cone beam-CT) était réalisé quotidiennement, il a été observé des décalages de 2 à 6 mm avant correction du positionnement et de 0,4 à 1 mm après correction. Les marges pour le volume cible prévisionnel calculées selon la méthode de Yan et al. [35] passaient de 9 à 14 mm avant correction à 1 à 3 mm après correction [36]. Ramsey et al. ont montré une réduction de 21 % du V20 pulmonaire grâce à une nouvelle planification quotidienne après tomographie conique [37,38]. 7. Apport de l’asservissement respiratoire Les tumeurs pulmonaires suivent les mouvements respiratoires et changent potentiellement de position, de forme, voire de densité, en cours de traitement. Cette incertitude est normalement prise en compte par la création d’un volume cible prévisionnel. Cependant, pour des tumeurs très mobiles, le volume cible prévisionnel est très volumineux ce qui conduit à l’irradiation d’un grand volume de tissu sain. L’asservissement respiratoire permet de prendre en compte ces mouvements. Plusieurs techniques sont utilisées : la respiration superficielle forcée (par compression abdominale), les techniques de gating et de tracking [39]. 7.1. Respiration superficielle forcée Une étude sur 10 patients a montré qu’en respiration libre une tumeur pulmonaire a une amplitude de mouvement en moyenne de 12,3 mm (de 8 à 20 mm). Cette amplitude passe à 7 mm en moyenne (de 2 à 11 mm) avec une compression abdominale (p = 0,0002) [40,41]. 7.2. Gating L’irradiation n’est déclenchée qu’à certains temps respiratoires définis lors de la scanographie de mise en place. Dans une étude prospective non randomisée comparant une irradiation utilisant le gating à une irradiation simple, le volume cible prévisionnel était significativement plus petit dans le groupe avec le gating et la dose reçue par 95 % (D95 ) et celle reçu par 5 % (D5 ) du volume cible prévisionnel étaient significativement plus élevées. Les organes 477 à risque recevaient tous une dose significativement plus faible avec le gating. Ainsi, le V20 pulmonaire passait de 26,5 ± 12,5 % à 22,8 ± 9,6 %. En termes de toxicité aiguë, seul le taux de toxicité aiguë pulmonaire était différent entre les deux groupes avec 48 % pour le groupe sans gating contre 36 % avec (p = 0,02). À 3 mois et à 6 mois il y avait moins de toxicité avec le gating, mais cette différence n’était plus retrouvée sur le long terme. Sur le plan du contrôle de la maladie, il n’y avait pas de différence de survie globale, de survie spécifique ni en survie sans maladie [42]. 7.3. Tracking Cette technique consiste à localiser la tumeur et à adapter le faisceau en temps réel. Si la tumeur n’est pas visible sur les imageries réalisées en salle de traitement, il est possible de la localiser indirectement en implantant un repère fiduciel radio-opaque dans la tumeur ou à proximité [41]. 8. Apport de la médecine nucléaire La délinéation précise des volumes cibles par le radiothérapeute reste primordiale, d’autant plus que les perspectives de traitement tendent à réduire les marges et à augmenter les doses. L’isotope radioactif le plus utilisé actuellement est le (18 F)fluorodésoxyglucose (FDG). 8.1. Délinéation des volumes cible Dans le cancer du poumon, l’apport de la scanographie après injection est limité pour la délinéation du volume tumoral macroscopique. La tomographie par émission de positons (TEP) au FDG permet à l’oncologue radiothérapeute d’utiliser le volume cible métabolique dans la délinéation en permettant par exemple de visualiser la tumeur au sein d’une atélectasie. Dans une étude prospective sur 19 patients, Ashmalla et al. ont montré une modification du volume tumoral macrosopique dans 52 % des cas avec l’utilisation de la TEP au FDG par rapport à la délinéation sur scanographie seule et une meilleure concordance de planification de traitement entre deux radiothérapeutes [43,44]. Ces résultats ont été confirmés par Steenbakkers et al. [45]. 8.2. Évaluation précoce de la réponse et adaptation thérapeutique Il a été montré que la SUVmax (standard uptake value maximale) préthérapeutique était corrélé à une moins bonne survie dans les cancers pulmonaires localisés [46]. Xu et al. ont confirmé que le SUVmax avant et après traitement était un facteur pronostique de rechute locale et à distance [47]. Plusieurs études ont montré qu’il était possible d’interpréter de façon fiable les images de TEP au FDG réalisées en cours de radiothérapie [44], et l’essai RETP1 a montré que la diminution de 50 % de al SUVmax et du volume tumoral survenait aux alentours de la dose de 42 Gy pendant la radiothérapie [48]. L’essai RTEP 2 en cours a pour objectif d’établir l’aspect pronostique d’une TEP au FDG réalisée à ce moment de la radiothérapie. Les résultats de cette étude pourraient permettre d’envisager des modifications thérapeutiques en cours de radiothérapie. Un essai multicentrique prospectif français d’augmentation de dose dans les volumes « hyperfixants » à 42 Gy va d’ailleurs bientôt débuter pour confirmer ces données (IFCT 14-01). 8.3. Perspectives en médecine nucléaire De nouveaux traceurs permettent d’explorer différents aspects de la biologie tumorale. Ainsi, le (18 F)-fluoromisonidazole (F-Miso) est utilisé comme marqueur des zones hypoxiques de la tumeur et pourrait permettre de mieux cibler ces zones radiorésistantes. 478 L. Lefebvre et al. / Cancer/Radiothérapie 18 (2014) 473–479 D’autres marqueurs tel que la (18 F)-fluorothymidine (FLT), marqueurs de la prolifération cellulaire, sont en cours d’évaluation [48]. 9. Discussion Les résultats des nouvelles techniques d’irradiation des cancers pulmonaires sont plutôt encourageants, même si les niveaux de preuve dans la littérature sont parfois faibles. Pour les cancers de stade T1–T2N0 et de moins de 5 cm, la radiothérapie en conditions stéréotaxiques permet de très bons taux de contrôle locorégional. Son efficacité semble équivalente à celle de la chirurgie qui reste le traitement de première intention. La principale limite de la radiothérapie en conditions stéréotaxiques est l’absence d’évaluation et/ou de traitement des aires ganglionnaire hilaires et médiastinales ainsi que, dans certains cas, l’absence d’examen anatomopathologique de la tumeur ; à ces limites théoriques vient s’ajouter la difficulté d’interprétation des images post-thérapeutiques. Des études prospectives, randomisées ou pas, sont en cours pour comparer chez des patients opérables les résultats en termes d’efficacité et de toxicité la radiothérapie en conditions stéréotaxiques et la chirurgie. Pour des cancers de faible stade répondant à des critères précis, la curiethérapie peut être envisagée, surtout chez les patients insuffisants respiratoires pour lesquels la chirurgie ou la radiothérapie externe peuvent être risquées. Pour ce qui concerne les tumeurs de stade T3 et/ou colonisant les ganglions inopérables, la RCMI semble plutôt indiquée. Le niveau de preuve concernant cette technique est faible en raison de l’absence d’étude prospective la comparant directement à la radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle. Cependant, des études de phase III randomisées semblent difficilement réalisables en raison des larges effectifs et de la durée de suivi qui seraient nécessaires [49]. L’hadronthérapie est supérieure aux autres techniques sur le plan dosimétrique théorique en termes de couverture du volume cible et de diminution de la dose aux organes à risque. Pour les tumeurs de faible stade, son efficacité semble comparable à celle de la radiothérapie en conditions stéréotaxiques qui est plus disponible et moins coûteuse. Pour les tumeurs localement évoluées, l’hadronthérapie pourrait théoriquement permettre une augmentation locale de la dose notamment si elle est associée aux techniques d’imagerie métabolique. Malgré ces progrès techniques, les résultats des traitements du cancer du poumon restent décevants notamment pour les tumeurs évoluées. L’association de la radiothérapie et d’autres molécules comme des thérapies ciblées ou des nanoparticules pourraient permettre d’améliorer la prise en charge de ces patients [50–52]. 10. Conclusion Les nouvelles techniques de radiothérapie permettent un meilleur contrôle local de la maladie, principalement pour les faibles stades. Le développement de moyens permettant de limiter l’irradiation de tissu sain reste un enjeu majeur. Pour les tumeurs évoluées, il semble que les perspectives thérapeutiques reposent sur le développement de la RCMI et des associations de la radiothérapie avec des molécules permettant de mieux cibler les cellules tumorales et d’épargner les tissus sains. Leurs rôles en termes d’efficacité et de toxicité restent à évaluer. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Binder Foucard F, Belot A, Delafosse P, Remontet L, Woronoff AS, Bossard N. Estimation nationale de l’incidence et de la mortalité par cancer en France entre 1980 et 2012. Partie 1 : tumeurs solides. Saint-Maurice: Institut de veille sanitaire (INVS); 2013. Disponible en ligne à l’adresse : http://www.invs.sante.fr/ [2] Institut national du cancer (Inca). Recommandations professionnelles. Cancer du poumon non à petites cellules. Formes localisées non opérables, localement avancées et métastatiques [Collection Recommandations & référentiels]. Boulogne-Billancourt: Inca; 2010. Disponible en ligne à l’adresse : http://www.e-cancer.fr/publications/55-recommandations-de-pratiqueclinique/597-cancer-du-poumon-non-a-petites-cellules-formes-localiseesnon-operables-localement-avancees-et-metastatiques-recommandationsargumentees [3] Giraud P. 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