georg büchner - premiers actes

Transcription

georg büchner - premiers actes
WOYZECK
GEORG BÜCHNER
MISE EN SCENE THIBAUT WENGER
COPRODUCTION THEATRE OCEAN NORD, BRUXELLES
PREMIERS ACTES / TRAVAUX PUBLICS
ET LA FILATURE - SCENE NATIONALE, MULHOUSE
8-16 juin 2012 / Théâtre Océan Nord, Bruxelles
27 + 28 juillet 2012 / DMC-75, Mulhouse
24 + 25 août 2012 / Friche Wesserling – Festival 1ers Actes
coproduction Théâtre Océan Nord, Bruxelles
Festival Premiers Actes & La Filature - Scène nationale, Mulhouse
avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles / Service du théâtre,
du fonds d’acteurs de la COCOF, de Wallonie-Bruxelles International, du
Ministère de la Culture / DRAC Alsace, de la Région Alsace, de la
SPEDIDAM et de l’ADAMI. Résidence au CIP de Lichtenberg.
Avec la participation artistique du Jeune théâtre national.
mise en scène THIBAUT WENGER
traduction, dramaturgie ADELINE ROSENSTEIN
scénographie et costumes CLAIRE SCHIRCK
assistée de RAFFAËLLE BLOCH
lumières FLORENT JACOB
musique GREGOIRE LETOUVET
sons GEOFFREY SORGIUS
collaboration artistique JOSEPHINE DE WECK
avec FABIEN MAGRY (WOYZECK)
BERDINE NUSSELDER (MARIE)
OLINDO BOLZAN (ANDRES)
NATHANAËLLE VANDERSMISSEN (KÄTHE)
MARCEL DELVAL (LE CAPITAINE)
FREDDY SICX (LE DOCTEUR)
MATTHIEU BESNARD (TAMBOUR-MAJOR)
LAETITIA YALON (KARL)
& REMI GOEBBERT OU VINCIANNE BONNAFOUX (L’ENFANT)
Le garçon soldat Franz Woyzeck rase son capitaine et ne
mange que des pois, à des fins scientifiques, tandis qu'au
Cheval Blanc, Marie la mère du petit danse avec le
tambour-major. Par une nuit de pleine lune, rongé par la
jalousie, Woyzeck entraîne Marie à la lisière de la ville.
Trois ébauches, inachevées et fragmentaires. La première,
cadrée sur le drame amoureux, court jusqu'au meurtre. La
langue gauche, heurtée, un da-sein qui troue le théâtre.
Les deux suivantes, en suspens, prennent la mesure du
mécanisme social de la pulsion intime.
Mais aucun tribunal n'aura le temps de se pencher sur la
question de la responsabilité du sujet-objet, quand
l'avenir ne signifie rien.
Woyzeck, aimant puissant où s'origine le théâtre où nous
nous inscrivons, porte dans ses étonnantes dissonances,
dans sa matière même, minée, la métaphore d'autres
désarrois, d'autres colères meurtrières d'anti-héros –
contemporains.
Théâtre Océan Nord, juin 2012
© Jef Bonifacio
Humain, trop humain
Oeuvre bouleversante d’un génie fulgurant, le Woyzeck de Georg
Büchner demeure inachevé en 1837, lorsque son auteur disparait à
l’âge de 23 ans. Les quelques fragments qui constituent la pièce
racontent l’existence d’un soldat en lutte pour sa propre vie,
plongé dans une société qui ne l’accepte pas. Soutenue par la
dramaturgie d’Adeline Rosenstein, la mise en scène de Thibaut
Wenger propose une version résolument chthonienne de cet homme
ordinaire, en proie aux tourments quotidiens. Au final, l’on
obtient une création abondante en propositions, dont le sens réel
demeure malheureusement en partie inaccessible.
Woyzeck, c’est avant tout un univers singulier peuplé d’individus
misérables. Ceux-ci sont interprétés par d’excellents comédiens,
dont le jeu et la direction témoignent d’un vrai travail de fond.
En guise de scénographie, un espace segmenté par de larges
grilles métalliques. Etranges frontières que ces murs troués, qui
tout à la fois séparent les êtres et les mettent à nu, sous le
regard d’un public constitué malgré lui en voyeuriste. Sous ses
yeux, les changement de tableaux sont rythmés par des de néons
vifs et froids, agrémentés quelquefois d’une lueur rouge et
angoissante. A d’autres moments encore, la lumière révèle le
plateau entier, semblant faire reculer les ténèbres dans un
illusoire dénuement. Par une intense succession de fragments, la
narration reflète l’univers brisé du personnage principal.
L’étrangeté est encore appuyée par une musique sourde et
pénétrante, sans aucun chatoiement ni complaisance pour ce
qu’elle illustre.
Autre aspect fondamental de cette création : le "baragouzek",
patois original né d’un travail sur la langue de Büchner et
nourri par des ateliers effectués dans le milieu associatif.
Bien plus qu’une simple curiosité linguistique, ce parlé devient
l’expression d’un être-au-monde particulier. La brutalité des
mots, la syntaxe rompue et torsadée, l’accent fort et sec : ce
sont là les signes, non d’une psychologie propre aux personnages,
mais de leur manière fondamentale d’exister dans leur
environnement. Dès lors, les quelques percées de notre langue
française exposent un langage dans sa pure conventionalité, en
rupture avec le monde trop humain du soldat Woyzeck.
Assurément, cette création présente de sérieuses qualités.
Cependant, sa richesse fera également son principal défaut, celui
de rendre opaque et peu intelligible l’univers qui s’offre au
spectateur. A trop exprimer la nature fragmentaire du texte, la
pièce ne parvient jamais à tisser un lien entre ses différents
éléments. En cause notamment, l’idiome des protagoniste, dont on
peine souvent à comprendre les répliques. Si l’intention d’une
trame décomposée est prégnante, elle manque cependant l’objectif
de nous rendre les événements compréhensibles. L’éclatement des
ingrédients perdra le profane, ce qui est d’autant plus
regrettable que celui-ci passera à coté d’un travail sincère et
profond. Mais la perdition n’est-elle pas logée au coeur du
pauvre Woyzeck ?
Charles-Henry Boland, 10/06/2012 demandezleprogramme.be
Woyzeck à l’Océan Nord
Woyzeck, c’est de la musique, c’est du bruit, ce sont des flashes
qui pénètrent le corps et l’esprit. Woyzeck, c’est un jeu
d’acteurs sublimé par l’ambiance l’enveloppant et animé de sa
collaboration avec les ateliers d’Océan Nord. C’est une présence
scénique indéniable, de la proximité la plus oppressante à la
silhouette se profilant au loin. Woyzeck, c’est de l’émotion et
de la souffrance, c’est un rythme qui vous prend et vous emmène
au cœur de la tourmente.
Woyzeck, c’est essayer de comprendre ce qui est dit, c’est
essayer de comprendre ce qui est ressenti. C’est un malheur
humain et une torture psychologique. Alors on ne comprend pas
tout, mais on ressent. Woyzeck, c’est cru et pourtant si subtil.
Woyzeck, c’est une impression, Woyzeck, c’est une interprétation
de chaque côté du quatrième mur.
« Compris moi pas bien ? » Alors disons simplement qu’il faut
parfois prendre du recul pour pouvoir admirer une œuvre d’art,
mais que c’en est définitivement une….
Pour spectateurs avertis.
Christophe Berück et Sève Arbach, 10/06/2012
lebourlingueurdunet.be
Les chardons du baragouzeck
Vous ne parlez pas baragouzeck ? Il importe moins de comprendre
une histoire que de ressentir des ambiances, sombres éclats d'une
oeuvre restée inachevée et qui aurait pu devenir un autre "Opéra
des gueux".
Le jeune metteur en scène Thibaut Wegner n'a pas ménagé ses
comédiens, ni surtout son public. Pourtant ce n'est que la simple
histoire d'un simple soldat, Frans Woyzeck, exploité par son
capitaine, réduit à se prêter à des expériences médicales
douteuses afin de gagner quelques sous insuffisants pour procurer
une vie confortable à celle qu'il aime, Marie, et à leur enfant.
Un homme qui aimant trop "à la vie à la mort", finit par tuer
Marie l'infidèle.
D'autres détails ayant échappé, on supputera seulement que le
fait qu'il travaille comme un forcené, que sa santé est malmenée,
ont pu endommager sa raison... Car malgré une attention (très)
soutenue pour capter çà et là, en plein vol, un mot connu (ou
plus ou moins proche d'un mot connu), beaucoup se sont noyés dans
le flot sonore bizarre du "baragouzeck".
Peut-être eut-il fallu que certains personnages s'expriment
"normalement", en toute logique pour des êtres éduqués comme le
médecin ou le capitaine ? Et peut-être qu'il n'en fallait pas
tant, de ces mots inventés, pour faire ressentir sinon tous les
enjeux, du moins les sentiments qui s'expriment de façon très
parlante par le jeu expressif des comédiens ?
De cette histoire laissée "fragmentaire" par son auteur,
l'Allemand Büchner, et sur base de plusieurs ébauches, Thibaut
Wegner a voulu rendre avant tout l'impression d'une oeuvre
ouverte et en devenir (voire d'un brouillon ou de ce qui
ressemblerait à une étape de travail). Comme des éclats de verre
à ramasser, il nous faudra reconstituer l'objet branlant initial.
Nous n'y serons donc pas aidés par le texte, en langue
imaginaire, sans le surtitrage habituel. Ombre et pénombre pour
des scènes se déroulant souvent en fond de plateau, au travers de
parois grillagées, rendront bien ardue la tâche de reconstruction
des étapes du drame, alors que les expressions des visages
auraient pu... éclairer le spectateur. De plus, le concept
d'éclatement fait commencer le spectacle par la fin (dramatique
et non certaine), l'ensemble se déroulant dans un labyrinthe
concentrationnaire de grilles et de métal.
Ne pas tout comprendre mais s'abandonner aux images, aux sons
"Tant pis si moi tout compris avoir pas..."! On devinera assez
rapidement qu'il faut laisser là tout pragmatisme, tout réalisme
et se laisser imprégner d'ambiances sauvages et primitives,
d'images fortes, d'un puissant climat d'étrangeté.
La scénographie, le très beau travail sur les sons et lumières
étroitement associés, sont parfaitement au point et épousent
l'ambiance générale. Il faut savoir que les options prises par le
metteur en scène résultent non seulement d'un travail avec
d'excellents comédiens professionnels mais d'expériences au sein
d'ateliers ouverts aux habitants (souvent"primo-arrivants") du
quartier populaire et métissé où se situe le théâtre Océan Nord.
De là est venue l'idée d'une langue tour de Babel, une langue qui
serait donc "populaire" et telle qu'elle aurait été souhaitée par
Büchner. Adeline Rosentein, co-animatrice des ateliers avec
Wegner, l'a introduite dans sa traduction. Ainsi la dramaturgie,
comme la scénographie, rendent bien le côté décousu, "prise
d'intantanés"qu'aurait voulu l'auteur d'après ce que l'on sait.
Voilà un texte qui (par un curieux hasard ?) marie la langue
oulipienne d'Antoine Lemoine ("Les chardons du baragouin", 1961)
à une évocation du sort de/s pauvre/s exploité/s, ceux du Roumain
Panait Istrati ("Les chardons du Baragan" en 1928) et cela dans
un vision originale certes, de Woyzeck ! Son malheureux troufion
ne ressemble-t-il pas à tous les "forçats de la terre",
au "cojan" roumain (dans une langue qui n'est, elle,
que "émaillée... d'expressions populaires") ?
Paradoxe : ce spectacle s'adresse à un public averti.
Suzane VANINA 20/06/2012 Ruedutheatre.com
Théâtre Océan Nord, juin 2012
© Jef Bonifacio
S’ECHAPPER D’UN TRAIN EN FLAMMES,
ALLER METTRE LE FEU
1. Un matin d’octobre 2005 à la frontière entre la province et la
capitale fédérale de Buenos Aires, des passagers d’un train en
panne ont saccagé une gare et ses environs. Ils avaient attendu
depuis plus d’une heure qu’il redémarre, agglutinés dans une
chaleur suffocante. Ce train régulièrement défectueux et bondé
les mène tous les jours de la banlieue de Buenos Aires vers le
centre ville, sur leur lieu de travail.
Ce matin-là, un feu s’était déclaré à l’arrière de l’un des
wagons. Finalement des personnes sont descendues sur la voie
ferrée. Aussitôt, des agents de police mobilisés le long de la
gare prochaine, leur crièrent par mégaphone qu’il était interdit
de descendre du train, les menacèrent, puis ouvrirent le feu. A
la première détonation une émeute éclata. Le train déversa des
passagers enragés, les policiers furent vite débordés, la gare et
les petits commerces environnants, incendiés ou mis en miettes.
Au même moment sur le satellite nous parvenaient avec le décalage
horaire, les images de la première nuit d’émeute de Clichy-sousBois déclenchée par la mort de Bouna Traoré (15 ans) et Zyed
Benna (17 ans) qui s’étaient réfugiés dans un transformateur pour
échapper à la police.
Le facteur racial travaillait l’opinion dans les deux pays. Sur
les
télévisions
hurlait
dans
le
argentines,
micro
de
le
père
de
famille
la
journaliste :
ils
en
sueur
nous
qui
tirent
dessus mais le putain de train brûlait ! Je sais bien que c’est
interdit de marcher sur les voies – est de petite taille, cheveux
noirs, la peau mate, quelques tatouages sur ses gros bras agités.
S’il n’est pas d’origine bolivienne, il est en tout cas ce qu’on
appelle un Negro, un de ces êtres humains dont partout dans le
monde on redoute la colère parce qu’on sait que depuis des années
ils sont priés d’attendre patiemment dans des trains pourris qui
vont finir par prendre feu.
Depuis longtemps le théâtre savait montrer la collision entre le
délinquant et les forces de l’ordre, entre le prince furieux et
son
entourage
stupéfait,
meurtri.
Et
soudain,
annonçant
les
presque deux prochains siècles de littérature, Georg Büchner, 23
ans, chercheur en anatomie comparée et en philosophie, auteur et
révolutionnaire allemand d’avant le printemps des peuples, décide
de représenter le train en flammes duquel s’échappe un homme qui
a tout l’air d’un délinquant, n’en est pas un mais va commettre
un meurtre, Woyzeck.
Ils
étaient
des
centaines
à
assister
à
la
mise
à
mort
du
perruquier sans emploi Johann Christian Woyzeck, le 27 août 1824
à Leipzig, condamné pour le meurtre de sa maîtresse infidèle. Pas
d’école ce jour-là, on allait au spectacle de la décapitation par
l’épée. Il paraît que le bourreau lui avait si bien tranché la
tête qu’elle resta posée sur le plat de la lame. Et qu’il la fit
tomber
d’un
expertises
mouvement
médicales
du
sur
poignet.
le
degré
Ces
détails
ainsi
d’imputabilité
que
du
les
coiffeur
chômeur Woyzeck, son degré d’ignorance et de folie avaient donné
lieu à de nombreuses publications.
Büchner décide de condamner les spectateurs de son exécution,
braves gens à la conscience tranquille qui se demandent, avec les
experts, si Woyzeck est plus ou moins fou. Büchner n’épargnerait
personne, toute la société allait y passer. L’auteur en exil à
Zürich meurt du Typhus avant d’achever ce projet.
Pièce
inachevée,
succession
de
le
fragment
scènes
à
Woyzeck
coulisses:
on
se
présente
peut
comme
« cadrer »
une
sur
la
personnalité de Woyzeck, comme sur les tendances psychiques de
tous les autres personnages qui s’amusent à l’humilier : cadrage
au format « portrait », vertical. Mais chaque scène nous invite
aussi à élargir le champ et reculer d’un pas, pour obtenir un
cadrage
« horizontal »
au
format « paysage »
où
la
dynamique
sociale du monde de Woyzeck (avec ses castes bien distinctes, ses
langages bien distincts et ses repoussoirs de distinction)
apparaît pour prendre la place du personnage principal.
–
La main qui ramasse
une pierre, le gars
qui va « faire une
connerie » passent au second plan. Dès lors et avant tout, il y a
le fait que le train en flammes dont s’échappe l’innocent, et les
armes pointées vers le délinquant se fondent en un même récit.
C’est
une
Schiller
grande
faisait
claque
de
à
la
l’idéalisme
allemand
représentation
–
qui
théâtrale
un
avec
cours
préparatoire à la révolution et dont les spectateurs sortaient en
criant « Vive la liberté !».
L’individu
dont
l’existence
dépend
de
facteurs
complètement
extérieurs à lui-même peut-il par la force de sa volonté, par la
révolte ou la décision planifiée, intervenir sur le cours de
l’histoire ? Sur le cours de sa propre vie?
toutes
les
révoltes
sociales
que
pose
C’est la question de
l’auteur
du
fragment
Woyzeck, scène après scène, celle de la liberté. On pourrait dire
que Büchner introduit la pensée matérialiste en littérature 50
ans avant qu’elle ne soit formulée par Marx et Engels.
Quelle liberté pour « le chien »
réincarnation
en
loup,
dans
dont Heiner Müller attendait la
un
texte
intitulé
« la
blessure
Woyzeck » prononcé lors de la remise du Prix Büchner en 1985 ?
« WOYZECK est la blessure ouverte. Woyzeck vit là où le chien est
enterré,
le
chien
s’appelle
Woyzeck.
Nous
attendons
sa
résurrection, dans la crainte / l’espoir que le chien revienne en
loup. Le loup vient du Sud. S’il fait un avec notre ombre, quand
le
soleil
est
au
zénith,
alors
commencera,
à
l’heure
incandescente, l’histoire ». (Traduction Jean-Pierre Morel)
Ils sont nombreux à venir du Sud, les nouveaux Woyzecks échappés
d’un train en flammes, nos policiers sont à leurs postes : vontils les menacer ? Ou bien l’histoire « à l’heure incandescente »
où
nos
voisins
commencer ?
se
Comment
soulèvent
contre
peuvent-ils
« ne
leurs
tyrans,
faire
qu’un
va-t-elle
avec
notre
ombre » quand le soleil est au-dessus de nos têtes, si ce n’est
dans l’étreinte?
 Adeline Rosenstein, dramaturge, juin 2011
Théâtre Océan Nord, juin 2012
© Jef Bonifacio
Trois ébauches, trois courbes
La première, très serrée sur l’intime, sur le drame amoureux,
court jusqu’au meurtre. Quelques humains, personnages en
transit : Louis, Andrès, Marie, Käthe. La langue gauche, heurtée,
lacunaire. Les deux suivantes, en suspens.
La focale s’élargit – et prend la mesure du mécanisme social de
la pulsion intime.
« Messieurs, nous en sommes à l’importante question du rapport du
<individu> sujet à objet. » Singeries du savoir, le Docteur juché
sur le toit du théâtre pour un lancé de chat scientifique, le
Capitaine-philosophe de comptoir et sa mélancolie psychiatrique…
Fantoches aux langues baroques, cabots.
Dans le mouvement de l’écriture
Nous monterons les ébauches à la suite l’une de l’autre, comme
des œuvres autonomes au prisme d’intérêts subjectifs. Le temps
tourne en boucle. La répétition, l’issue connue, la progression
dramatique sans causalité, joue sur notre regard.
La matière au travail, réécrite, remaniée, déconstruit la
synthèse et change notre perception des enjeux – narratifs à
analytiques. Nous examinerons des fragments de rouages – sous le
microscope, l’inéluctable au travail.
Libre-arbitre
Alors que les révolutions érigent l’individu contre le
déterminisme religieux, « en l’homme, l’individualité se
transforme en liberté » claironne le Capitaine, le sous-soldat
Woyzeck face au ciel vide, au tout-disséqué, aux fossiles
pétrifiés de loi morale, subie et incomprise, jaloux aliéné ne
sachant qui cogner, tue son amour.
« Un bon meurtre, un vrai meurtre, un beau meurtre, aussi beau
qu’on pouvait le souhaiter, voilà longtemps qu’on en avait pas vu
de comme ça », conclut l’huissier.
Pour l’individu, le crime est passionnel.
Pour l’objet social, le crime est sacrificiel, constitutif de son
propre malheur. Ici, aucun tribunal n’aura le temps de se pencher
sur la responsabilité du sujet-objet, son libre-arbitre, la
préméditation – quand l’avenir ne signifie rien.
L’absence de loi travaille d’elle-même.
« je ne comprends rien à tout cela » dit Marion dans La mort de
Danton. Woyzeck et Marie parlent comme elle, dans un da-sein qui
troue le théâtre, dans une langue sans ressource où le degré de
propriété précède l’idée.
Il y a quelque chose de jeté, de pas tout à fait en place – des
trous, des abîmes. Et qui pénètre soudain profondément, quand la
conscience surgit.
Avec une concision ramassée, comme un souvenir dans les gestes,
je chercherai à dégraisser les phrases, à les tendre comme des
peaux de tambour, avec lenteur peut-être, une intensité sur le
qui-vive, des moteurs d’une densité animale.
Nous nous en tiendrons à ce qui est dit, au mutisme aussi.
Woyzeck, paysan des villes balèze, à la recherche d’une relation
perdue avec le secret des choses. Ce n’est pas à priori une
victime. D’une ébauche l’autre, d’une vérité l’autre, le statut
de sa parole change : le sujet agit, l’objet est agit.
Je ne crois pas qu’il soit inadapté par trop d’imaginaire, au
contraire. Acculé par la rationalisation, mais pourtant trop
d’inconnues, forces de la nature dans laquelle on cherche des
signes, même si « Dieu parti, tout parti ».
La mystique est aussi parfois l’occasion de répercuter la frousse
sur les plus faibles, et on l’abandonne, dans un éclat de rire.
Amorces
Quelques fluos, lumière noire, des fanions, une guitare
électrique, kilb de punk-bûcherons entre une voie ferrée et une
route nationale, non lieu en attente, écrasé immobile dans la
moiteur de juin. Canettes, flaques, étoiles.
Marie devant le miroir, des lèvres rouges comme des fraises trop
cuites, deux boucles d’oreille. Un fragment de l’image / du son
pour dire le tout. Une boucle rythmique s’engouffre dans un
raccord sec, surexposé, trois corps dans un mètre carré pour Le
Cheval Blanc, l’auberge « où l’on danse » et sue, « un homme
avant l’autre », nous aussi souvent à l’extérieur, dans
l’impossibilité de voir, spectateurs de spectateurs de la sodomie
générale, Wodan apoplectiques de l’aristocratie romantique, armes
rutilantes et tatouages, écrabouillant de leur graisse les
caissières du Lidl.
Hors-champ
Toute la première ébauche gravite en marge de cette fête, qui
tantôt s’éloigne, tantôt se rapproche, jeu de plans, de focales,
sauts d’axe. La scénographie, mouvante, cadre, cache, enferme,
joue avec notre frustration du hors-champ, permettant des
collages, des superpositions entre les paroles de figures
périphériques invisibles : artisans, forains – chœur dont les
pitreries diffusées par de petits hauts-parleurs éclairent la
courbe du drame ; et des scènes muettes : Franz exclu de la
baraque foraine, joue au cheval…
Même si l’écriture de plateau emprunte au cinéma, son étrangeté
repose sur la co-présence des différents plans, sur des signes
concrets distordus et une architecture mentale de l’espace.
Une galerie de figures théâtrales frappées, aux logiques
disparates, dès les premiers instants, habite le plateau : le
Tambour-Major, le Capitaine, le Docteur… Innocents autonomes,
puis, d’une ébauche à l’autre, les relations s’établissent.
L’idiot se promène avec un ballon à hélium. Andrès rôde et mate,
sournois et lâche, drôle de camarade dans les bras de qui Woyzeck
dort, pourtant.
Quand on retraverse des scènes déjà jouées, les pieds dans l’eau
noire comme du pétrole de l’étang où se suspend la première
ébauche, le cadre a bougé, l’angle aussi, ce qui était caché est
peut-être maintenant à vue. Une rumeur, des fuites de lumière
dégueulent des découvertes, éclairent ou polluent comme par
accident l’action, sauf peut-être les scènes d’intérieur chez
Marie, protégées comme dans une bulle d’air, où le son n’a pas la
même valeur. Fantasia, un rail d’héroïne, et l’enfant joue sous
cloche. La violence n’est pas toujours là où l’on croit.
Le conte de la grand-mère est terrifiant, kammerspiel monstrueux,
tandis que le meurtre me semble écrit avec une certaine douceur,
comme une scène d’amour – enfin que je souhaite mettre en scène
comme telle.
 Thibaut Wenger, metteur en scène, juin 2011
Théâtre Océan Nord, juin 2012
© Jef Bonifacio
Image
Les trois fragments se jouent dans un espace unique. Une seule
image pour les trois versions de l’œuvre. Il nous faudra une
image profonde, constituée de plusieurs fonds ; trois couches
superposées, afin de la rendre triple. Des lieux identiques comme
posés les uns sur les autres, en cascade. Un puit sans fond, une
image sérielle. Il existe alors trois lieux semblables, mais
ceux-ci
sont
de
moins
en
moins
papables,
s’effaçant
par
saturation, dans le flou.
L’apparence de l’espace devra être puissante.
Cette force, elle la tiendra de sa duplication mais aussi des
matériaux qui la constituent. Ici le théâtre se fera sans ses
artifices
habituels :
clôtures
mobiles
de
chantier,
gaze
de
plastique translucide, citernes de plastique, fanions crus, bâche
de chantier et tables pliantes.
Costumes
D’inspiration plutôt réaliste ou cinématographique, les costumes
sont des vêtements d’aujourd’hui. Les silhouettes viennent droit
d’H&M, de C&A et du supermarché. Ils ont ainsi tous la vulgarité
d’une mode populaire sans élégance. Chaque personnage peut avoir
plusieurs silhouettes, suivant le temps qu’il fait, que se soit
le jour ou la nuit, que l’on soit à l’intérieur ou à l’extérieur.
Tous sont plutôt contemporains, mais ont la tendance commune de
dessiner des corps mous dont on perçoit les imperfections. La
peau nue, chaire rosée, est très présente. Rien n’est fait sur
mesure. Souvent, il y a des zones de blancs qui vivront dans la
lumière noire, il y a des poils, des filets clairs, des bas
blancs et quelques joggings blancs aussi. Les matières doivent
être attirantes, pour que l’on ait le désir de les toucher, pour
que le regard s’y accroche. Seuls Le Docteur, le Capitaine et le
Tambour-Major ont des costumes de facture plus théâtrale. 
Claire Schirck, scénographe et costumière
Théâtre Océan Nord, juin 2012
© Jef Bonifacio
Slam-transe
1
L’inachèvement du texte, de la construction, la langue heurtée
appelle un travail de phrasé rythmique et d’appui de ces lacuneshésitations. Utiliser la ponctuation étrange du texte comme des
modes d’attaque instrumentaux dans un genre de slam-transe atonal
où
les
personnages
tentent
laborieusement
de
s’exprimer,
s’envoler, chanter.
Des nappes synthétiques off et les hits radio martelés dans le
poste derrière accompagnent ces corps disant – voix amplifiée au
micro pour l’abstraire du temps scénique. La matière sonore et
musicale de l’arrière plan tire les solos vers le sermon athée,
profond et ridicule.
Les paroles de Woyzeck sont les plus acoustiques. Elles portent
violemment comme des haut-le-cœur que les frustrations intimes
ont fait naître. Il faudra voir avec lui ce qu’il entend dans la
tête: peut être des cris d’enfants, le bruit de l’eau ou la voix
du docteur, mais sûrement pas de chansons.
La chanson populaire
Poignées de vers sans élégance qui irriguent les scènes, ce sont
des hymnes, des chansons entendues à la radio, des comptines
d’enfants. Les chansons se composent en répétitions, pour suivre
et motiver les mouvements de tension dans les scènes. Chaque
chanson est écrite dans la tessiture de l’acteur en veillant à ce
qu’il intègre la musique au point de donner l’impression d’en
être
l’auteur
ou
milliers de fois
qu’il
–
s’agit
d’une
rengaine
entendue
des
par matraquage radiophonique ou tradition
orale. On créera ainsi de toutes pièces un patrimoine musical.
Pour la composition, on travaille sur la récitation du texte qui
fait naître métrique et enchaînements harmoniques simples, proche
des chansons de tradition orales.
 Grégoire Letouvet, compositeur et musicien
Atelier au festival 1ers Actes,
août 2011 © Jef Bonifacio
Thibaut Wenger, mise en scène
Né en 1985. Diplômé de l’INSAS en Réalisation Théâtre (2006-10). Après mon bac, j’ai
aussi été élève en Ciné-Sup à Nantes (2003-05), puis étudiant en histoire du cinéma à
la Sorbonne. J’ai conduit des recherches sur les groupes Medvedkine, et réalisé un
journal de voyage dans les territoires occupés du Sahara occidental, Smara.
En 2004, j’ai commencé à travailler sur le théâtre de Jean-Louis Maunoury, passeur des
contes de Nasr Edin Hodja. Pour la création de Litanies d’Al-Qamar, j’ai dirigé le
comédien et danseur Aguibou Dembele, grâce à un dispositif de dialogue artistique
Angers-Bamako. J’ai également monté Sòlo Goya, parcours de l’Adami – Avignon 2006.
En 2006, j’ai mis en scène Toujours l’Orage et Je m’appelle d’Enzo Cormann, cabaret
performance, tombeau du siècle, avec Adama Diop et Lamine Diabakté.
En 2007, j’ai dit La nuit juste avant les forêts de Koltès dans 24 lycées en Alsace. J’ai
aussi travaillé avec des collégiens sur Tout Contre Léo de Christophe Honoré.
En 2008, j’ai mis en scène La Mission de Müller au Festival Premiers Actes avec
notamment Adama Diop, André Pomarat, Aude Ruyter, Léa Drouet…
En 2009, j’ai mis en scène Lenz de Büchner, théâtre de l’échec à l’épreuve du réel,
repris en tournée en 2010-11. J’ai également mis en voix Terre sainte de Mohamed
Kacimi au Théâtre National à Bruxelles, dans le cadre du festival Ecritures organisé en
partenariat avec l’INSAS, et joué dans Trilogie du Revoir de Botho Strauss, production
de fin d’études dirigée par Michel Dezoteux au Varia.
En 2010, j’ai joué dans Penthésilée de H.v. Kleist ms Sabine Durand à l’INSAS et dans
Des Hommes, court-métrage de Romain Cogitore (De Facto cinéma).
En 2011, j’ai assisté Marcel Delval - Théâtre Varia sur Et la nuit chante de Jon Fosse et
Pierre Diependaële sur Histoire(s) de théâtre aux Taps à Strasbourg.
En 2012, j’ai mis en scène Woyzeck de Georg Büchner au Théâtre Océan Nord et joué
dans Le Banquet dans les bois, création de Sabine Durand d’après Shakespeare au
Théâtre de la Balsamine, à Bruxelles.
Adeline Rosenstein, traduction, dramaturgie
Comédienne, metteur en scène et documentariste originaire de Genève et installée
depuis 1995 à Berlin, depuis 2010 à Bruxelles, diplômée de l’école de comédiens
Nissan Nativ de Jérusalem et de la HfS Ernst Busch, bat (institut de mise en scène).
Prédilection pour les dramaturgies dites éclatées, langues dites malades en particulier
Michel Vinaver et Lothar Trolle.
En 2003, elle rencontre la compagnie Scènes avec qui elle crée à Lyon le spectacle
«Les Oresties» (d’après Les Choéphores d’Eschyle et des témoignages) au NTH8.
Entre 2004 et 2006, elle développe un projet documentaire en Argentine avec le
réalisateur italien Ronny Trocker sur le mouvement de chômeurs MTR. Entre 2004 et
2008, elle participe aux recherches, écriture et réalisation du projet théâtral « Les
Experts » à Bruxelles avec le sociologue belge Jean-Michel Chaumont sur l’histoire des
débats relatifs à la traite des femmes. En 2009, elle met en scène Fatzer Fragment de
Bertolt Brecht dans le montage d’Heiner Müller au Festival Premiers Actes. Elle est
appelée à intervenir dans différentes universités, colloques et lors de stages d’acteurs
sur son expérience de la rencontre entre théâtre et sciences sociales.
Il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Claire Schirck, scénographie
Claire Schirck a rejoint l'école du TNS après avoir obtenu un DNSEP aux arts décoratifs
de Strasbourg en 2007 et avoir assisté Annette Kurz pour les productions Auslöschung
de T. Bernard, mes Christiane Pohle au Thalia Theater de Hambourg et Platonov de A.
Tchekov, mes Luk Perceval à la Schaubühne de Berlin.
Elle y a conçu la scénographie pour Trois de Phillippe Malone mes Rachel West au
festival FIND. A Berlin elle a aussi conçu la scénographie et les costumes pour
Oberröstereich de F.X Kroetz, mes Catherine Umbdenstock au BAT puis la
scénographie et les costumes pour Land without Words mes Lydia Ziemke à Edimburg.
Depuis 2009 elle collabore avec Raffaëlle Bloch pour Philoctete de H. Müller mes
E.Marie, puis L'enfant froid, de M.v.Mayenburg, mes T. Wenger.
Raffaëlle Bloch, costumes
Après quatre années à la Villa Arson, Raffaëlle Bloch intègre l'Ecole du Théâtre National
de Strasbourg, section scénographie/costumes. Elle y travaille notamment auprès de
Laurent Gutman, Alexandre et Alwyne de Dardel, Patrice
Cauchetier, Gildas Milin, Jean Paul Wenzel, Théâtre Sfumato basé en Bulgarie, de la
jeune metteur en scène Pauline Ringeade pour Le Conte d'hiver de Shakespeare et
Maëlle Poésy pour Funérailles d'hiver de Hanoch Levin. Elle y met en scène avec
l'éclairagiste Florent Jacob une adaptation pour le théâtre de Le bavard de Louis René
des Forêts.
De 2008 à 2010, elle co-organise le Festival Premiers Actes en Alsace où elle conçoit
les scénographies de La mission de Heiner Müller et de L'enfant froid de
M.v.Mayenburg, mes Thibaut Wenger.
Elle travaille aussi avec Philippe Lanton (Le Cartel), Elisabeth Marie (Scarface
Ensemble) et intervient auprès du collectif Gongle. Elle rejoint en mai 2010 le Théâtre
de la Démesure au sein duquel elle joue et co-réalise les espaces.
Parallèlement à son métier de scénographe, elle conçoit des installations et dessine.
Florent Jacob, lumières
Après des études littéraires (hypokâgne, kâgne, licence de lettres modernes) et
parallèlement à une activité de régisseur au sein de la compagnie des abbéssiens il
s'initie à la création lumière auprès d'André Diot (Pélléas et Mélisande au théâtre des
Champs-élysées, L'illusion comique au théâtre Hebertot) avant d'entrer au TNS où il
créera notamment les lumières de super-flux mise en scène de Gildas Milin et de la nuit
arabe mise en scène de Charlotte Lagrange. Il y pratique également la régie générale
(Funérailles d'hiver mise en scène de Maelle Poesy, A l'ouest de Joel Jouanneau), la
création son (quelle partie de moi-même trompe l'autre mise en scène Jean-Paul
Wenzel), la création vidéo (atelier Tcheckhov animé par Julie Brochen), la régie plateau
(avec Dostoievski mise en scène de Margarita Mladenova et Ivan Dobchev du ThéâtreLaboratoire Sfumato de Sofia) et il met en scène une adaptation du bavard de LouisRené des Forêts. A sa sortie de l'école, il fait la création lumière de L'enfant froid, mise
en scène Thibaut Wenger et de Philoctète, mise en scène Elisabeth Marie. Il assure
également la régie vidéo du Livre d'or de Jan, mise en scène Hubert Colas...
Il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Grégoire Letouvet, musique
Compositeur, pianiste et ingénieur du son formé à la FEMIS puis au CNR de Paris,
Grégoire Letouvet compose des musiques de scène et de cinéma pour des formations
allant de l’orchestre symphonique au quintette jazz, de la musique electro-acoustique
aux combos rock. Au théâtre, il a travaillé la bande son d’auteurs comme Müller,
Beckett, Koltes, Cormann, Pommerat ou Büchner.
Il crée en 2010 la compagnie lyrique des Rugissants, collectifs de chanteurs et
musiciens se consacrant l’opéra contemporain avec laquelle il monte Les Soldats
(Zimmermann) en 2010, Génèse, création du compositeur François Nicolas sur des
textes d’Adonis en 2011, puis Du jour au lendemain d’Arnold Schoenberg en 2012.
Il s’agit ici de sa sixième collaboration avec Thibaut Wenger.
Joséphine De Weck, collaboration artistique
Après avoir suivi la classe pré-professionnelle au Conservatoire de Fribourg, Joséphine
est actuellement étudiante à l’INSAS, en jeu. Elle danse et joue du piano. Depuis 2010,
elle collabore étroitement avec Jean Steinauer en créant des impromptus théâtraux à
Fribourg et est modèle pour Joelle van Autreve. Elle a dernièrement joué dans plusieurs
courts-métrages (Flore Bleiberg, Hoang-Son Doan).
Marcel Delval, jeu
Comédien, metteur en scène, chargé de cours à l’Insas, Marcel Delval est aussi codirecteur du Théâtre Varia, ce qui ne l’empêche pas de proposer au Rideau ou ailleurs
les auteurs anglo-saxons qu’il affectionne tout particulièrement. Le virus lui a été
transmis après un passage marquant à l’Actor Studio en 1981.
Depuis 1972, Marcel Delval s’attache particulièrement à mettre en scène Edward Albee,
Horovitz, David Mamet, Harold Pinter, Tennessee Williams, ou récemment des auteurs
comme Daniel Keene ou Martin Crimp. Des auteurs qui sondent férocement l’hypocrisie
d’une certaine société. Il ne néglige pas pour autant la création contemporaine
francophone ou les classiques de ce siècle ou d’autres.
Berdine Nusselder, jeu
Berdine est née en 1984 à la campagne aux Pays-Bas. A l'âge de 16 ans, elle arrête
son école secondaire et quitte son pays pour faire ce dont elle a envie : du théâtre !
Berdine est néerlandaise, mais elle a suivi des formations théâtrales en Angleterre
e
(LAMDA), à Paris (Conservatoire du 9 ) et à Bruxelles, à INSAS dont elle a été diplômée
en 2011. Berdine est donc une comédienne trilingue néerlandais, français, anglais.
A Bruxelles elle a notamment travaillé avec Aurore Fattier sur On purge bébé, à l'Opéra
de la Monnaie avec Guy Joosten, et était stagiaire de Guy Dermul au KVS.
En 2012-13, elle jouera aux Tanneurs à Bruxelles Rien d’officiel, un monologue que lui a
écrit Jean-Marie Piemme, mis en scène par Raven Rüell. Elle jouera également pour
Philippe Sireuil, dans Les Mains sales de Sartre, à la Comédie de Genève.
Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Laetitia Yalon, jeu
Née en 1934 à Ibiza, fille de la grande exploratrice et journaliste Gabrielle Bertrand,
Laetitia a grandi cachée dans les Pyrénées et dans un pensionnat suisse. Elle a vécu
sur l’île d’Hydra avec Leonard Cohen, à Göttingen, dans un kibboutz en Israël... Mariée
à un agent du Mossad, plasticienne officielle du régime israélien, elle est arrivée en
Belgique pour soigner son fils en 1974. Elle y collabore notamment avec Maguy Marin,
les dialoguistes Kantor, et plus récemment Les patacyclistes…
Depuis peu, elle joue au théâtre, avec Léa Drouet, et au cinéma, avec Rachel Lang.
Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Fabien Magry, jeu
Formé à l’INSAS de 2006 à 2010. Il travaille dès sa sortie d’école sur 12 Works mis en
scène par Pierre Megos et dans L’Enfant Zéro mis en scène par Céline Ohrel. Avant
d’arriver en Belgique, Fabien a été formé au Cours Florent à Paris où il a pu travailler
avec Michel Faux, Claude Brasseur, Vincent Lindon, Christophe Garcia... En parallèle, il
participe aux ateliers dirigés par Pico Berkowitch autour de la méthode Lee Strasberg et
suit une formation de clown dirigé par Philippe Renaut. Il joue au cinéma dans La
Maison réalisé par Sarah Liers et dans Cachet de Michael Haneke.
Après La Mission en 2008, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Mathieu Besnard, jeu
Diplômé de l’INSAS en juin 2009. Il a travaillé depuis avec Léa Schwebel, Marcel Delval,
Isabelle Pousseur, Sophie Maillard, Thibaut Wenger, ainsi que sur des projets au
cinéma et à la télévision. Il fait partie de la compagnie Rafistole, et du collectif 6414.
Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger.
Nathanaëlle Vandersmissen, jeu
Nathanaëlle vient d’achever ses études en jeu à l’INSAS, où elle a été initiée à l’écriture,
au chant, à l'escrime, au tango et au cirque. Elle collabore avec le performer Mathias
Varenne sur le projet La Preuve. Après La Mission et L’Enfant froid, il s’agit de sa
troisième collaboration avec Thibaut Wenger.
Olindo Bolzan, jeu
Olindo Bolzan a commencé à jouer dès 1979 au Théâtre de la Renaissance (ThéâtreAction) avec Jean-Louis Colinet puis suit des études au conservatoire de Liège. Il a
depuis lors travaillé sur de très nombreux spectacles, sous la direction de Pietro
Varasso, Jacques Delcuvellerie, Françoise Bloch, Philippe Sireuil, Lorent Wanson,
Martine Wijkaert, David Strosberg, Michel Dezoteux…
Freddy Sicx, jeu
Freddy Sicx devient acteur professionnel dès 1984, à l’issue d’un cycle de quatre
années de formation à l’Institut des Arts de Diffusion (IAD). Son parcours est fait de
théâtre, de cinéma, de prestations publicitaires ou radiophoniques. Il a joué sous la
direction d’Yves Beaunesne, Patrick Bonté, Philippe Von Kessel, Michel
Kacenelenbogen, Macel Delval, Roumen Tchakarov, Stuart Seide, Alain Françon…
Presse
Monuments dans la vallée
Guillaume Malvoisin
Novo, 11/010
(…) Le Cas Wenger. Lenz et
L’Enfant
froid
s’affichent
d’emblée
comme
une
extériorisation de l’espace
cérébral, singulier, de leur
metteur en scène. Deux
spectacles pour deux facettes
convergentes. Le point de
réunion ? Cette obsession
quant à la démission de la
langue face au réel, face à ce
que l’œil peut en recevoir, à
ce que l’idée peut en
soulever. Thibaut Wenger est
un garçon du pays, son théâtre s’en souvient. La montagne têtue qui ombrage son Lenz
appartient autant à l’imaginaire de Büchner qu’à des souvenirs de sensations d’enfance.
Les langages imbriqués avec patience et ingéniosité, la font trembler à force d’énergie
et de questions.
Lenz et L’Enfant froid doivent leur réussite aux gens qui les habitent. Que ce soient les
spectres planants et rageurs de Lenz, que ce soit le bestiaire fracassé rythmant le texte
trop poli de Mayenburg. Pour Lenz, il y a les cavalcades d’enfance, les sons rencontrés
ici ou là et cette féroce impression d’avoir les mains aussi vides qu’inutiles à produire du
concret. Wenger trace un parcours sommaire et impalpable mugissant dans les ruines
de la petite chaufferie de Wesserling.
Lenz, le fou, dévale les collines, Wenger et ses camarades remontent la pente d’une
litanie impressionniste, ouverte, sensible et non résolue.
L’Enfant tient le versant opposé. Ce pourrait être un morceau de rock joué par un
orchestre bavarois, une fête un peu triste et extralucide. Sa collection de gueules à
l’érotisme glacé s’agite au rythme des ruptures et autres étirements temporels. La mise
en scène nous observe en train de regarder les comédiens, beaux et présents. Et si
Thibaut Wenger emprunte à Godard hors-cadre, mise en abîme et faux raccords, il
empile ses tentatives en les liant avec un venin caractériel, autistique et diablement
sournois. Un genre de grotesque qui touche le nerf du plaisir. Dans la noirceur
environnante et stagnante, la leçon est excitante.
Presse
Froides crudités
Myriam Aït-Sidoum
Dernières Nouvelles d’Alsace, 09/09/010
Au festival Premiers Actes, Thibaut Wenger, son directeur, présente sa copie de fin
d’étude à Bruxelles, une mise en scène de L’Enfant froid, de Marius von Mayenburg : un
théâtre collectif de la désintégration, à la Comédie de l’Est encore ce soir.
Le jeune dramaturge allemand Marius von
Mayenburg, traduit par Laurent Mulheisen, a une
écriture elliptique, violente, drôle parfois. Il
raconte en substance des parents, leurs grands
enfants, leurs amis, leurs relations explosives,
névrosées, désespérées. Ce qui est vulgaire est
moins l’obsession d’un désaxé exhibitionniste
dans les toilettes des filles que le règne de
l’argent, de l’apparence, cette société qui met
K.O. avant même qu’on l’ait formulé. Le costume
du gendre idéal cache le tortionnaire, celui du
pervers un (presque) agneau.
Partant de là, Thibaut Wenger met en scène
comme le propose le texte ce parcours collectif
pessimiste vers une implosion intime de chacun.
Les temporalités se télescopent, entre flashback, temps de l’action, moments bornés par
trois actes, une rencontre, un mariage, un
enterrement.
Il y a bien le père, joué par Jean-Pierre Basté, qui reste monolithique de bout en bout,
jusqu’à sa mort d’ailleurs. Tout autour, ce n’est que craquèlements, autour du
personnage de Lena, la comédienne Berdine Nusselder, malmenée de bout en bout,
jusqu’à choisir un moyen de révolte radical, Laetitia Yalon est sa mère passive, Léa
Drouet l’amie psychotique, Tristan Schott son mari malade.
Tous les ingrédients sont là, comédiens à vue sur le plateau du début à la fin, tons le
plus souvent juste, ils portent la pièce. La crudité des mots se double d’une crudité du
geste, de crudités aussi au sens littéral, avec un poivron fiché on ne dira pas où pour ne
pas trop en dire.
Mais la tension dramatique, qui devrait aller crescendo, baisse par endroits, à mesure
qu’approche la fin, comme si le tout manquait un peu de liant. On peut toujours le mettre
sur le compte de cette absence de liant qui fait défaut à ce bout de société décortiqué.
Prix de vente
Première représentation 4 000 €
Représentation supplémentaire 3 000 €
+ transport, déplacements et hébergement (12 personnes)
Conditions techniques
Dimensions minimales du plateau
10 m d’ouverture / 15 m de profondeur
Services techniques
2 services de montage
1 service de raccords et de conduite
1 service de démontage
Durée du spectacle 1h30
Contacts
Thibaut Wenger
55, rue de Gerlache
B-1040 Bruxelles
+32 (0) 488/228.929
+33 (0) 682 11 22 87
[email protected]