georg büchner - premiers actes
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georg büchner - premiers actes
WOYZECK GEORG BÜCHNER MISE EN SCENE THIBAUT WENGER COPRODUCTION THEATRE OCEAN NORD, BRUXELLES PREMIERS ACTES / TRAVAUX PUBLICS ET LA FILATURE - SCENE NATIONALE, MULHOUSE 8-16 juin 2012 / Théâtre Océan Nord, Bruxelles 27 + 28 juillet 2012 / DMC-75, Mulhouse 24 + 25 août 2012 / Friche Wesserling – Festival 1ers Actes coproduction Théâtre Océan Nord, Bruxelles Festival Premiers Actes & La Filature - Scène nationale, Mulhouse avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles / Service du théâtre, du fonds d’acteurs de la COCOF, de Wallonie-Bruxelles International, du Ministère de la Culture / DRAC Alsace, de la Région Alsace, de la SPEDIDAM et de l’ADAMI. Résidence au CIP de Lichtenberg. Avec la participation artistique du Jeune théâtre national. mise en scène THIBAUT WENGER traduction, dramaturgie ADELINE ROSENSTEIN scénographie et costumes CLAIRE SCHIRCK assistée de RAFFAËLLE BLOCH lumières FLORENT JACOB musique GREGOIRE LETOUVET sons GEOFFREY SORGIUS collaboration artistique JOSEPHINE DE WECK avec FABIEN MAGRY (WOYZECK) BERDINE NUSSELDER (MARIE) OLINDO BOLZAN (ANDRES) NATHANAËLLE VANDERSMISSEN (KÄTHE) MARCEL DELVAL (LE CAPITAINE) FREDDY SICX (LE DOCTEUR) MATTHIEU BESNARD (TAMBOUR-MAJOR) LAETITIA YALON (KARL) & REMI GOEBBERT OU VINCIANNE BONNAFOUX (L’ENFANT) Le garçon soldat Franz Woyzeck rase son capitaine et ne mange que des pois, à des fins scientifiques, tandis qu'au Cheval Blanc, Marie la mère du petit danse avec le tambour-major. Par une nuit de pleine lune, rongé par la jalousie, Woyzeck entraîne Marie à la lisière de la ville. Trois ébauches, inachevées et fragmentaires. La première, cadrée sur le drame amoureux, court jusqu'au meurtre. La langue gauche, heurtée, un da-sein qui troue le théâtre. Les deux suivantes, en suspens, prennent la mesure du mécanisme social de la pulsion intime. Mais aucun tribunal n'aura le temps de se pencher sur la question de la responsabilité du sujet-objet, quand l'avenir ne signifie rien. Woyzeck, aimant puissant où s'origine le théâtre où nous nous inscrivons, porte dans ses étonnantes dissonances, dans sa matière même, minée, la métaphore d'autres désarrois, d'autres colères meurtrières d'anti-héros – contemporains. Théâtre Océan Nord, juin 2012 © Jef Bonifacio Humain, trop humain Oeuvre bouleversante d’un génie fulgurant, le Woyzeck de Georg Büchner demeure inachevé en 1837, lorsque son auteur disparait à l’âge de 23 ans. Les quelques fragments qui constituent la pièce racontent l’existence d’un soldat en lutte pour sa propre vie, plongé dans une société qui ne l’accepte pas. Soutenue par la dramaturgie d’Adeline Rosenstein, la mise en scène de Thibaut Wenger propose une version résolument chthonienne de cet homme ordinaire, en proie aux tourments quotidiens. Au final, l’on obtient une création abondante en propositions, dont le sens réel demeure malheureusement en partie inaccessible. Woyzeck, c’est avant tout un univers singulier peuplé d’individus misérables. Ceux-ci sont interprétés par d’excellents comédiens, dont le jeu et la direction témoignent d’un vrai travail de fond. En guise de scénographie, un espace segmenté par de larges grilles métalliques. Etranges frontières que ces murs troués, qui tout à la fois séparent les êtres et les mettent à nu, sous le regard d’un public constitué malgré lui en voyeuriste. Sous ses yeux, les changement de tableaux sont rythmés par des de néons vifs et froids, agrémentés quelquefois d’une lueur rouge et angoissante. A d’autres moments encore, la lumière révèle le plateau entier, semblant faire reculer les ténèbres dans un illusoire dénuement. Par une intense succession de fragments, la narration reflète l’univers brisé du personnage principal. L’étrangeté est encore appuyée par une musique sourde et pénétrante, sans aucun chatoiement ni complaisance pour ce qu’elle illustre. Autre aspect fondamental de cette création : le "baragouzek", patois original né d’un travail sur la langue de Büchner et nourri par des ateliers effectués dans le milieu associatif. Bien plus qu’une simple curiosité linguistique, ce parlé devient l’expression d’un être-au-monde particulier. La brutalité des mots, la syntaxe rompue et torsadée, l’accent fort et sec : ce sont là les signes, non d’une psychologie propre aux personnages, mais de leur manière fondamentale d’exister dans leur environnement. Dès lors, les quelques percées de notre langue française exposent un langage dans sa pure conventionalité, en rupture avec le monde trop humain du soldat Woyzeck. Assurément, cette création présente de sérieuses qualités. Cependant, sa richesse fera également son principal défaut, celui de rendre opaque et peu intelligible l’univers qui s’offre au spectateur. A trop exprimer la nature fragmentaire du texte, la pièce ne parvient jamais à tisser un lien entre ses différents éléments. En cause notamment, l’idiome des protagoniste, dont on peine souvent à comprendre les répliques. Si l’intention d’une trame décomposée est prégnante, elle manque cependant l’objectif de nous rendre les événements compréhensibles. L’éclatement des ingrédients perdra le profane, ce qui est d’autant plus regrettable que celui-ci passera à coté d’un travail sincère et profond. Mais la perdition n’est-elle pas logée au coeur du pauvre Woyzeck ? Charles-Henry Boland, 10/06/2012 demandezleprogramme.be Woyzeck à l’Océan Nord Woyzeck, c’est de la musique, c’est du bruit, ce sont des flashes qui pénètrent le corps et l’esprit. Woyzeck, c’est un jeu d’acteurs sublimé par l’ambiance l’enveloppant et animé de sa collaboration avec les ateliers d’Océan Nord. C’est une présence scénique indéniable, de la proximité la plus oppressante à la silhouette se profilant au loin. Woyzeck, c’est de l’émotion et de la souffrance, c’est un rythme qui vous prend et vous emmène au cœur de la tourmente. Woyzeck, c’est essayer de comprendre ce qui est dit, c’est essayer de comprendre ce qui est ressenti. C’est un malheur humain et une torture psychologique. Alors on ne comprend pas tout, mais on ressent. Woyzeck, c’est cru et pourtant si subtil. Woyzeck, c’est une impression, Woyzeck, c’est une interprétation de chaque côté du quatrième mur. « Compris moi pas bien ? » Alors disons simplement qu’il faut parfois prendre du recul pour pouvoir admirer une œuvre d’art, mais que c’en est définitivement une…. Pour spectateurs avertis. Christophe Berück et Sève Arbach, 10/06/2012 lebourlingueurdunet.be Les chardons du baragouzeck Vous ne parlez pas baragouzeck ? Il importe moins de comprendre une histoire que de ressentir des ambiances, sombres éclats d'une oeuvre restée inachevée et qui aurait pu devenir un autre "Opéra des gueux". Le jeune metteur en scène Thibaut Wegner n'a pas ménagé ses comédiens, ni surtout son public. Pourtant ce n'est que la simple histoire d'un simple soldat, Frans Woyzeck, exploité par son capitaine, réduit à se prêter à des expériences médicales douteuses afin de gagner quelques sous insuffisants pour procurer une vie confortable à celle qu'il aime, Marie, et à leur enfant. Un homme qui aimant trop "à la vie à la mort", finit par tuer Marie l'infidèle. D'autres détails ayant échappé, on supputera seulement que le fait qu'il travaille comme un forcené, que sa santé est malmenée, ont pu endommager sa raison... Car malgré une attention (très) soutenue pour capter çà et là, en plein vol, un mot connu (ou plus ou moins proche d'un mot connu), beaucoup se sont noyés dans le flot sonore bizarre du "baragouzeck". Peut-être eut-il fallu que certains personnages s'expriment "normalement", en toute logique pour des êtres éduqués comme le médecin ou le capitaine ? Et peut-être qu'il n'en fallait pas tant, de ces mots inventés, pour faire ressentir sinon tous les enjeux, du moins les sentiments qui s'expriment de façon très parlante par le jeu expressif des comédiens ? De cette histoire laissée "fragmentaire" par son auteur, l'Allemand Büchner, et sur base de plusieurs ébauches, Thibaut Wegner a voulu rendre avant tout l'impression d'une oeuvre ouverte et en devenir (voire d'un brouillon ou de ce qui ressemblerait à une étape de travail). Comme des éclats de verre à ramasser, il nous faudra reconstituer l'objet branlant initial. Nous n'y serons donc pas aidés par le texte, en langue imaginaire, sans le surtitrage habituel. Ombre et pénombre pour des scènes se déroulant souvent en fond de plateau, au travers de parois grillagées, rendront bien ardue la tâche de reconstruction des étapes du drame, alors que les expressions des visages auraient pu... éclairer le spectateur. De plus, le concept d'éclatement fait commencer le spectacle par la fin (dramatique et non certaine), l'ensemble se déroulant dans un labyrinthe concentrationnaire de grilles et de métal. Ne pas tout comprendre mais s'abandonner aux images, aux sons "Tant pis si moi tout compris avoir pas..."! On devinera assez rapidement qu'il faut laisser là tout pragmatisme, tout réalisme et se laisser imprégner d'ambiances sauvages et primitives, d'images fortes, d'un puissant climat d'étrangeté. La scénographie, le très beau travail sur les sons et lumières étroitement associés, sont parfaitement au point et épousent l'ambiance générale. Il faut savoir que les options prises par le metteur en scène résultent non seulement d'un travail avec d'excellents comédiens professionnels mais d'expériences au sein d'ateliers ouverts aux habitants (souvent"primo-arrivants") du quartier populaire et métissé où se situe le théâtre Océan Nord. De là est venue l'idée d'une langue tour de Babel, une langue qui serait donc "populaire" et telle qu'elle aurait été souhaitée par Büchner. Adeline Rosentein, co-animatrice des ateliers avec Wegner, l'a introduite dans sa traduction. Ainsi la dramaturgie, comme la scénographie, rendent bien le côté décousu, "prise d'intantanés"qu'aurait voulu l'auteur d'après ce que l'on sait. Voilà un texte qui (par un curieux hasard ?) marie la langue oulipienne d'Antoine Lemoine ("Les chardons du baragouin", 1961) à une évocation du sort de/s pauvre/s exploité/s, ceux du Roumain Panait Istrati ("Les chardons du Baragan" en 1928) et cela dans un vision originale certes, de Woyzeck ! Son malheureux troufion ne ressemble-t-il pas à tous les "forçats de la terre", au "cojan" roumain (dans une langue qui n'est, elle, que "émaillée... d'expressions populaires") ? Paradoxe : ce spectacle s'adresse à un public averti. Suzane VANINA 20/06/2012 Ruedutheatre.com Théâtre Océan Nord, juin 2012 © Jef Bonifacio S’ECHAPPER D’UN TRAIN EN FLAMMES, ALLER METTRE LE FEU 1. Un matin d’octobre 2005 à la frontière entre la province et la capitale fédérale de Buenos Aires, des passagers d’un train en panne ont saccagé une gare et ses environs. Ils avaient attendu depuis plus d’une heure qu’il redémarre, agglutinés dans une chaleur suffocante. Ce train régulièrement défectueux et bondé les mène tous les jours de la banlieue de Buenos Aires vers le centre ville, sur leur lieu de travail. Ce matin-là, un feu s’était déclaré à l’arrière de l’un des wagons. Finalement des personnes sont descendues sur la voie ferrée. Aussitôt, des agents de police mobilisés le long de la gare prochaine, leur crièrent par mégaphone qu’il était interdit de descendre du train, les menacèrent, puis ouvrirent le feu. A la première détonation une émeute éclata. Le train déversa des passagers enragés, les policiers furent vite débordés, la gare et les petits commerces environnants, incendiés ou mis en miettes. Au même moment sur le satellite nous parvenaient avec le décalage horaire, les images de la première nuit d’émeute de Clichy-sousBois déclenchée par la mort de Bouna Traoré (15 ans) et Zyed Benna (17 ans) qui s’étaient réfugiés dans un transformateur pour échapper à la police. Le facteur racial travaillait l’opinion dans les deux pays. Sur les télévisions hurlait dans le argentines, micro de le père de famille la journaliste : ils en sueur nous qui tirent dessus mais le putain de train brûlait ! Je sais bien que c’est interdit de marcher sur les voies – est de petite taille, cheveux noirs, la peau mate, quelques tatouages sur ses gros bras agités. S’il n’est pas d’origine bolivienne, il est en tout cas ce qu’on appelle un Negro, un de ces êtres humains dont partout dans le monde on redoute la colère parce qu’on sait que depuis des années ils sont priés d’attendre patiemment dans des trains pourris qui vont finir par prendre feu. Depuis longtemps le théâtre savait montrer la collision entre le délinquant et les forces de l’ordre, entre le prince furieux et son entourage stupéfait, meurtri. Et soudain, annonçant les presque deux prochains siècles de littérature, Georg Büchner, 23 ans, chercheur en anatomie comparée et en philosophie, auteur et révolutionnaire allemand d’avant le printemps des peuples, décide de représenter le train en flammes duquel s’échappe un homme qui a tout l’air d’un délinquant, n’en est pas un mais va commettre un meurtre, Woyzeck. Ils étaient des centaines à assister à la mise à mort du perruquier sans emploi Johann Christian Woyzeck, le 27 août 1824 à Leipzig, condamné pour le meurtre de sa maîtresse infidèle. Pas d’école ce jour-là, on allait au spectacle de la décapitation par l’épée. Il paraît que le bourreau lui avait si bien tranché la tête qu’elle resta posée sur le plat de la lame. Et qu’il la fit tomber d’un expertises mouvement médicales du sur poignet. le degré Ces détails ainsi d’imputabilité que du les coiffeur chômeur Woyzeck, son degré d’ignorance et de folie avaient donné lieu à de nombreuses publications. Büchner décide de condamner les spectateurs de son exécution, braves gens à la conscience tranquille qui se demandent, avec les experts, si Woyzeck est plus ou moins fou. Büchner n’épargnerait personne, toute la société allait y passer. L’auteur en exil à Zürich meurt du Typhus avant d’achever ce projet. Pièce inachevée, succession de le fragment scènes à Woyzeck coulisses: on se présente peut comme « cadrer » une sur la personnalité de Woyzeck, comme sur les tendances psychiques de tous les autres personnages qui s’amusent à l’humilier : cadrage au format « portrait », vertical. Mais chaque scène nous invite aussi à élargir le champ et reculer d’un pas, pour obtenir un cadrage « horizontal » au format « paysage » où la dynamique sociale du monde de Woyzeck (avec ses castes bien distinctes, ses langages bien distincts et ses repoussoirs de distinction) apparaît pour prendre la place du personnage principal. – La main qui ramasse une pierre, le gars qui va « faire une connerie » passent au second plan. Dès lors et avant tout, il y a le fait que le train en flammes dont s’échappe l’innocent, et les armes pointées vers le délinquant se fondent en un même récit. C’est une Schiller grande faisait claque de à la l’idéalisme allemand représentation – qui théâtrale un avec cours préparatoire à la révolution et dont les spectateurs sortaient en criant « Vive la liberté !». L’individu dont l’existence dépend de facteurs complètement extérieurs à lui-même peut-il par la force de sa volonté, par la révolte ou la décision planifiée, intervenir sur le cours de l’histoire ? Sur le cours de sa propre vie? toutes les révoltes sociales que pose C’est la question de l’auteur du fragment Woyzeck, scène après scène, celle de la liberté. On pourrait dire que Büchner introduit la pensée matérialiste en littérature 50 ans avant qu’elle ne soit formulée par Marx et Engels. Quelle liberté pour « le chien » réincarnation en loup, dans dont Heiner Müller attendait la un texte intitulé « la blessure Woyzeck » prononcé lors de la remise du Prix Büchner en 1985 ? « WOYZECK est la blessure ouverte. Woyzeck vit là où le chien est enterré, le chien s’appelle Woyzeck. Nous attendons sa résurrection, dans la crainte / l’espoir que le chien revienne en loup. Le loup vient du Sud. S’il fait un avec notre ombre, quand le soleil est au zénith, alors commencera, à l’heure incandescente, l’histoire ». (Traduction Jean-Pierre Morel) Ils sont nombreux à venir du Sud, les nouveaux Woyzecks échappés d’un train en flammes, nos policiers sont à leurs postes : vontils les menacer ? Ou bien l’histoire « à l’heure incandescente » où nos voisins commencer ? se Comment soulèvent contre peuvent-ils « ne leurs tyrans, faire qu’un va-t-elle avec notre ombre » quand le soleil est au-dessus de nos têtes, si ce n’est dans l’étreinte? Adeline Rosenstein, dramaturge, juin 2011 Théâtre Océan Nord, juin 2012 © Jef Bonifacio Trois ébauches, trois courbes La première, très serrée sur l’intime, sur le drame amoureux, court jusqu’au meurtre. Quelques humains, personnages en transit : Louis, Andrès, Marie, Käthe. La langue gauche, heurtée, lacunaire. Les deux suivantes, en suspens. La focale s’élargit – et prend la mesure du mécanisme social de la pulsion intime. « Messieurs, nous en sommes à l’importante question du rapport du <individu> sujet à objet. » Singeries du savoir, le Docteur juché sur le toit du théâtre pour un lancé de chat scientifique, le Capitaine-philosophe de comptoir et sa mélancolie psychiatrique… Fantoches aux langues baroques, cabots. Dans le mouvement de l’écriture Nous monterons les ébauches à la suite l’une de l’autre, comme des œuvres autonomes au prisme d’intérêts subjectifs. Le temps tourne en boucle. La répétition, l’issue connue, la progression dramatique sans causalité, joue sur notre regard. La matière au travail, réécrite, remaniée, déconstruit la synthèse et change notre perception des enjeux – narratifs à analytiques. Nous examinerons des fragments de rouages – sous le microscope, l’inéluctable au travail. Libre-arbitre Alors que les révolutions érigent l’individu contre le déterminisme religieux, « en l’homme, l’individualité se transforme en liberté » claironne le Capitaine, le sous-soldat Woyzeck face au ciel vide, au tout-disséqué, aux fossiles pétrifiés de loi morale, subie et incomprise, jaloux aliéné ne sachant qui cogner, tue son amour. « Un bon meurtre, un vrai meurtre, un beau meurtre, aussi beau qu’on pouvait le souhaiter, voilà longtemps qu’on en avait pas vu de comme ça », conclut l’huissier. Pour l’individu, le crime est passionnel. Pour l’objet social, le crime est sacrificiel, constitutif de son propre malheur. Ici, aucun tribunal n’aura le temps de se pencher sur la responsabilité du sujet-objet, son libre-arbitre, la préméditation – quand l’avenir ne signifie rien. L’absence de loi travaille d’elle-même. « je ne comprends rien à tout cela » dit Marion dans La mort de Danton. Woyzeck et Marie parlent comme elle, dans un da-sein qui troue le théâtre, dans une langue sans ressource où le degré de propriété précède l’idée. Il y a quelque chose de jeté, de pas tout à fait en place – des trous, des abîmes. Et qui pénètre soudain profondément, quand la conscience surgit. Avec une concision ramassée, comme un souvenir dans les gestes, je chercherai à dégraisser les phrases, à les tendre comme des peaux de tambour, avec lenteur peut-être, une intensité sur le qui-vive, des moteurs d’une densité animale. Nous nous en tiendrons à ce qui est dit, au mutisme aussi. Woyzeck, paysan des villes balèze, à la recherche d’une relation perdue avec le secret des choses. Ce n’est pas à priori une victime. D’une ébauche l’autre, d’une vérité l’autre, le statut de sa parole change : le sujet agit, l’objet est agit. Je ne crois pas qu’il soit inadapté par trop d’imaginaire, au contraire. Acculé par la rationalisation, mais pourtant trop d’inconnues, forces de la nature dans laquelle on cherche des signes, même si « Dieu parti, tout parti ». La mystique est aussi parfois l’occasion de répercuter la frousse sur les plus faibles, et on l’abandonne, dans un éclat de rire. Amorces Quelques fluos, lumière noire, des fanions, une guitare électrique, kilb de punk-bûcherons entre une voie ferrée et une route nationale, non lieu en attente, écrasé immobile dans la moiteur de juin. Canettes, flaques, étoiles. Marie devant le miroir, des lèvres rouges comme des fraises trop cuites, deux boucles d’oreille. Un fragment de l’image / du son pour dire le tout. Une boucle rythmique s’engouffre dans un raccord sec, surexposé, trois corps dans un mètre carré pour Le Cheval Blanc, l’auberge « où l’on danse » et sue, « un homme avant l’autre », nous aussi souvent à l’extérieur, dans l’impossibilité de voir, spectateurs de spectateurs de la sodomie générale, Wodan apoplectiques de l’aristocratie romantique, armes rutilantes et tatouages, écrabouillant de leur graisse les caissières du Lidl. Hors-champ Toute la première ébauche gravite en marge de cette fête, qui tantôt s’éloigne, tantôt se rapproche, jeu de plans, de focales, sauts d’axe. La scénographie, mouvante, cadre, cache, enferme, joue avec notre frustration du hors-champ, permettant des collages, des superpositions entre les paroles de figures périphériques invisibles : artisans, forains – chœur dont les pitreries diffusées par de petits hauts-parleurs éclairent la courbe du drame ; et des scènes muettes : Franz exclu de la baraque foraine, joue au cheval… Même si l’écriture de plateau emprunte au cinéma, son étrangeté repose sur la co-présence des différents plans, sur des signes concrets distordus et une architecture mentale de l’espace. Une galerie de figures théâtrales frappées, aux logiques disparates, dès les premiers instants, habite le plateau : le Tambour-Major, le Capitaine, le Docteur… Innocents autonomes, puis, d’une ébauche à l’autre, les relations s’établissent. L’idiot se promène avec un ballon à hélium. Andrès rôde et mate, sournois et lâche, drôle de camarade dans les bras de qui Woyzeck dort, pourtant. Quand on retraverse des scènes déjà jouées, les pieds dans l’eau noire comme du pétrole de l’étang où se suspend la première ébauche, le cadre a bougé, l’angle aussi, ce qui était caché est peut-être maintenant à vue. Une rumeur, des fuites de lumière dégueulent des découvertes, éclairent ou polluent comme par accident l’action, sauf peut-être les scènes d’intérieur chez Marie, protégées comme dans une bulle d’air, où le son n’a pas la même valeur. Fantasia, un rail d’héroïne, et l’enfant joue sous cloche. La violence n’est pas toujours là où l’on croit. Le conte de la grand-mère est terrifiant, kammerspiel monstrueux, tandis que le meurtre me semble écrit avec une certaine douceur, comme une scène d’amour – enfin que je souhaite mettre en scène comme telle. Thibaut Wenger, metteur en scène, juin 2011 Théâtre Océan Nord, juin 2012 © Jef Bonifacio Image Les trois fragments se jouent dans un espace unique. Une seule image pour les trois versions de l’œuvre. Il nous faudra une image profonde, constituée de plusieurs fonds ; trois couches superposées, afin de la rendre triple. Des lieux identiques comme posés les uns sur les autres, en cascade. Un puit sans fond, une image sérielle. Il existe alors trois lieux semblables, mais ceux-ci sont de moins en moins papables, s’effaçant par saturation, dans le flou. L’apparence de l’espace devra être puissante. Cette force, elle la tiendra de sa duplication mais aussi des matériaux qui la constituent. Ici le théâtre se fera sans ses artifices habituels : clôtures mobiles de chantier, gaze de plastique translucide, citernes de plastique, fanions crus, bâche de chantier et tables pliantes. Costumes D’inspiration plutôt réaliste ou cinématographique, les costumes sont des vêtements d’aujourd’hui. Les silhouettes viennent droit d’H&M, de C&A et du supermarché. Ils ont ainsi tous la vulgarité d’une mode populaire sans élégance. Chaque personnage peut avoir plusieurs silhouettes, suivant le temps qu’il fait, que se soit le jour ou la nuit, que l’on soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Tous sont plutôt contemporains, mais ont la tendance commune de dessiner des corps mous dont on perçoit les imperfections. La peau nue, chaire rosée, est très présente. Rien n’est fait sur mesure. Souvent, il y a des zones de blancs qui vivront dans la lumière noire, il y a des poils, des filets clairs, des bas blancs et quelques joggings blancs aussi. Les matières doivent être attirantes, pour que l’on ait le désir de les toucher, pour que le regard s’y accroche. Seuls Le Docteur, le Capitaine et le Tambour-Major ont des costumes de facture plus théâtrale. Claire Schirck, scénographe et costumière Théâtre Océan Nord, juin 2012 © Jef Bonifacio Slam-transe 1 L’inachèvement du texte, de la construction, la langue heurtée appelle un travail de phrasé rythmique et d’appui de ces lacuneshésitations. Utiliser la ponctuation étrange du texte comme des modes d’attaque instrumentaux dans un genre de slam-transe atonal où les personnages tentent laborieusement de s’exprimer, s’envoler, chanter. Des nappes synthétiques off et les hits radio martelés dans le poste derrière accompagnent ces corps disant – voix amplifiée au micro pour l’abstraire du temps scénique. La matière sonore et musicale de l’arrière plan tire les solos vers le sermon athée, profond et ridicule. Les paroles de Woyzeck sont les plus acoustiques. Elles portent violemment comme des haut-le-cœur que les frustrations intimes ont fait naître. Il faudra voir avec lui ce qu’il entend dans la tête: peut être des cris d’enfants, le bruit de l’eau ou la voix du docteur, mais sûrement pas de chansons. La chanson populaire Poignées de vers sans élégance qui irriguent les scènes, ce sont des hymnes, des chansons entendues à la radio, des comptines d’enfants. Les chansons se composent en répétitions, pour suivre et motiver les mouvements de tension dans les scènes. Chaque chanson est écrite dans la tessiture de l’acteur en veillant à ce qu’il intègre la musique au point de donner l’impression d’en être l’auteur ou milliers de fois qu’il – s’agit d’une rengaine entendue des par matraquage radiophonique ou tradition orale. On créera ainsi de toutes pièces un patrimoine musical. Pour la composition, on travaille sur la récitation du texte qui fait naître métrique et enchaînements harmoniques simples, proche des chansons de tradition orales. Grégoire Letouvet, compositeur et musicien Atelier au festival 1ers Actes, août 2011 © Jef Bonifacio Thibaut Wenger, mise en scène Né en 1985. Diplômé de l’INSAS en Réalisation Théâtre (2006-10). Après mon bac, j’ai aussi été élève en Ciné-Sup à Nantes (2003-05), puis étudiant en histoire du cinéma à la Sorbonne. J’ai conduit des recherches sur les groupes Medvedkine, et réalisé un journal de voyage dans les territoires occupés du Sahara occidental, Smara. En 2004, j’ai commencé à travailler sur le théâtre de Jean-Louis Maunoury, passeur des contes de Nasr Edin Hodja. Pour la création de Litanies d’Al-Qamar, j’ai dirigé le comédien et danseur Aguibou Dembele, grâce à un dispositif de dialogue artistique Angers-Bamako. J’ai également monté Sòlo Goya, parcours de l’Adami – Avignon 2006. En 2006, j’ai mis en scène Toujours l’Orage et Je m’appelle d’Enzo Cormann, cabaret performance, tombeau du siècle, avec Adama Diop et Lamine Diabakté. En 2007, j’ai dit La nuit juste avant les forêts de Koltès dans 24 lycées en Alsace. J’ai aussi travaillé avec des collégiens sur Tout Contre Léo de Christophe Honoré. En 2008, j’ai mis en scène La Mission de Müller au Festival Premiers Actes avec notamment Adama Diop, André Pomarat, Aude Ruyter, Léa Drouet… En 2009, j’ai mis en scène Lenz de Büchner, théâtre de l’échec à l’épreuve du réel, repris en tournée en 2010-11. J’ai également mis en voix Terre sainte de Mohamed Kacimi au Théâtre National à Bruxelles, dans le cadre du festival Ecritures organisé en partenariat avec l’INSAS, et joué dans Trilogie du Revoir de Botho Strauss, production de fin d’études dirigée par Michel Dezoteux au Varia. En 2010, j’ai joué dans Penthésilée de H.v. Kleist ms Sabine Durand à l’INSAS et dans Des Hommes, court-métrage de Romain Cogitore (De Facto cinéma). En 2011, j’ai assisté Marcel Delval - Théâtre Varia sur Et la nuit chante de Jon Fosse et Pierre Diependaële sur Histoire(s) de théâtre aux Taps à Strasbourg. En 2012, j’ai mis en scène Woyzeck de Georg Büchner au Théâtre Océan Nord et joué dans Le Banquet dans les bois, création de Sabine Durand d’après Shakespeare au Théâtre de la Balsamine, à Bruxelles. Adeline Rosenstein, traduction, dramaturgie Comédienne, metteur en scène et documentariste originaire de Genève et installée depuis 1995 à Berlin, depuis 2010 à Bruxelles, diplômée de l’école de comédiens Nissan Nativ de Jérusalem et de la HfS Ernst Busch, bat (institut de mise en scène). Prédilection pour les dramaturgies dites éclatées, langues dites malades en particulier Michel Vinaver et Lothar Trolle. En 2003, elle rencontre la compagnie Scènes avec qui elle crée à Lyon le spectacle «Les Oresties» (d’après Les Choéphores d’Eschyle et des témoignages) au NTH8. Entre 2004 et 2006, elle développe un projet documentaire en Argentine avec le réalisateur italien Ronny Trocker sur le mouvement de chômeurs MTR. Entre 2004 et 2008, elle participe aux recherches, écriture et réalisation du projet théâtral « Les Experts » à Bruxelles avec le sociologue belge Jean-Michel Chaumont sur l’histoire des débats relatifs à la traite des femmes. En 2009, elle met en scène Fatzer Fragment de Bertolt Brecht dans le montage d’Heiner Müller au Festival Premiers Actes. Elle est appelée à intervenir dans différentes universités, colloques et lors de stages d’acteurs sur son expérience de la rencontre entre théâtre et sciences sociales. Il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Claire Schirck, scénographie Claire Schirck a rejoint l'école du TNS après avoir obtenu un DNSEP aux arts décoratifs de Strasbourg en 2007 et avoir assisté Annette Kurz pour les productions Auslöschung de T. Bernard, mes Christiane Pohle au Thalia Theater de Hambourg et Platonov de A. Tchekov, mes Luk Perceval à la Schaubühne de Berlin. Elle y a conçu la scénographie pour Trois de Phillippe Malone mes Rachel West au festival FIND. A Berlin elle a aussi conçu la scénographie et les costumes pour Oberröstereich de F.X Kroetz, mes Catherine Umbdenstock au BAT puis la scénographie et les costumes pour Land without Words mes Lydia Ziemke à Edimburg. Depuis 2009 elle collabore avec Raffaëlle Bloch pour Philoctete de H. Müller mes E.Marie, puis L'enfant froid, de M.v.Mayenburg, mes T. Wenger. Raffaëlle Bloch, costumes Après quatre années à la Villa Arson, Raffaëlle Bloch intègre l'Ecole du Théâtre National de Strasbourg, section scénographie/costumes. Elle y travaille notamment auprès de Laurent Gutman, Alexandre et Alwyne de Dardel, Patrice Cauchetier, Gildas Milin, Jean Paul Wenzel, Théâtre Sfumato basé en Bulgarie, de la jeune metteur en scène Pauline Ringeade pour Le Conte d'hiver de Shakespeare et Maëlle Poésy pour Funérailles d'hiver de Hanoch Levin. Elle y met en scène avec l'éclairagiste Florent Jacob une adaptation pour le théâtre de Le bavard de Louis René des Forêts. De 2008 à 2010, elle co-organise le Festival Premiers Actes en Alsace où elle conçoit les scénographies de La mission de Heiner Müller et de L'enfant froid de M.v.Mayenburg, mes Thibaut Wenger. Elle travaille aussi avec Philippe Lanton (Le Cartel), Elisabeth Marie (Scarface Ensemble) et intervient auprès du collectif Gongle. Elle rejoint en mai 2010 le Théâtre de la Démesure au sein duquel elle joue et co-réalise les espaces. Parallèlement à son métier de scénographe, elle conçoit des installations et dessine. Florent Jacob, lumières Après des études littéraires (hypokâgne, kâgne, licence de lettres modernes) et parallèlement à une activité de régisseur au sein de la compagnie des abbéssiens il s'initie à la création lumière auprès d'André Diot (Pélléas et Mélisande au théâtre des Champs-élysées, L'illusion comique au théâtre Hebertot) avant d'entrer au TNS où il créera notamment les lumières de super-flux mise en scène de Gildas Milin et de la nuit arabe mise en scène de Charlotte Lagrange. Il y pratique également la régie générale (Funérailles d'hiver mise en scène de Maelle Poesy, A l'ouest de Joel Jouanneau), la création son (quelle partie de moi-même trompe l'autre mise en scène Jean-Paul Wenzel), la création vidéo (atelier Tcheckhov animé par Julie Brochen), la régie plateau (avec Dostoievski mise en scène de Margarita Mladenova et Ivan Dobchev du ThéâtreLaboratoire Sfumato de Sofia) et il met en scène une adaptation du bavard de LouisRené des Forêts. A sa sortie de l'école, il fait la création lumière de L'enfant froid, mise en scène Thibaut Wenger et de Philoctète, mise en scène Elisabeth Marie. Il assure également la régie vidéo du Livre d'or de Jan, mise en scène Hubert Colas... Il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Grégoire Letouvet, musique Compositeur, pianiste et ingénieur du son formé à la FEMIS puis au CNR de Paris, Grégoire Letouvet compose des musiques de scène et de cinéma pour des formations allant de l’orchestre symphonique au quintette jazz, de la musique electro-acoustique aux combos rock. Au théâtre, il a travaillé la bande son d’auteurs comme Müller, Beckett, Koltes, Cormann, Pommerat ou Büchner. Il crée en 2010 la compagnie lyrique des Rugissants, collectifs de chanteurs et musiciens se consacrant l’opéra contemporain avec laquelle il monte Les Soldats (Zimmermann) en 2010, Génèse, création du compositeur François Nicolas sur des textes d’Adonis en 2011, puis Du jour au lendemain d’Arnold Schoenberg en 2012. Il s’agit ici de sa sixième collaboration avec Thibaut Wenger. Joséphine De Weck, collaboration artistique Après avoir suivi la classe pré-professionnelle au Conservatoire de Fribourg, Joséphine est actuellement étudiante à l’INSAS, en jeu. Elle danse et joue du piano. Depuis 2010, elle collabore étroitement avec Jean Steinauer en créant des impromptus théâtraux à Fribourg et est modèle pour Joelle van Autreve. Elle a dernièrement joué dans plusieurs courts-métrages (Flore Bleiberg, Hoang-Son Doan). Marcel Delval, jeu Comédien, metteur en scène, chargé de cours à l’Insas, Marcel Delval est aussi codirecteur du Théâtre Varia, ce qui ne l’empêche pas de proposer au Rideau ou ailleurs les auteurs anglo-saxons qu’il affectionne tout particulièrement. Le virus lui a été transmis après un passage marquant à l’Actor Studio en 1981. Depuis 1972, Marcel Delval s’attache particulièrement à mettre en scène Edward Albee, Horovitz, David Mamet, Harold Pinter, Tennessee Williams, ou récemment des auteurs comme Daniel Keene ou Martin Crimp. Des auteurs qui sondent férocement l’hypocrisie d’une certaine société. Il ne néglige pas pour autant la création contemporaine francophone ou les classiques de ce siècle ou d’autres. Berdine Nusselder, jeu Berdine est née en 1984 à la campagne aux Pays-Bas. A l'âge de 16 ans, elle arrête son école secondaire et quitte son pays pour faire ce dont elle a envie : du théâtre ! Berdine est néerlandaise, mais elle a suivi des formations théâtrales en Angleterre e (LAMDA), à Paris (Conservatoire du 9 ) et à Bruxelles, à INSAS dont elle a été diplômée en 2011. Berdine est donc une comédienne trilingue néerlandais, français, anglais. A Bruxelles elle a notamment travaillé avec Aurore Fattier sur On purge bébé, à l'Opéra de la Monnaie avec Guy Joosten, et était stagiaire de Guy Dermul au KVS. En 2012-13, elle jouera aux Tanneurs à Bruxelles Rien d’officiel, un monologue que lui a écrit Jean-Marie Piemme, mis en scène par Raven Rüell. Elle jouera également pour Philippe Sireuil, dans Les Mains sales de Sartre, à la Comédie de Genève. Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Laetitia Yalon, jeu Née en 1934 à Ibiza, fille de la grande exploratrice et journaliste Gabrielle Bertrand, Laetitia a grandi cachée dans les Pyrénées et dans un pensionnat suisse. Elle a vécu sur l’île d’Hydra avec Leonard Cohen, à Göttingen, dans un kibboutz en Israël... Mariée à un agent du Mossad, plasticienne officielle du régime israélien, elle est arrivée en Belgique pour soigner son fils en 1974. Elle y collabore notamment avec Maguy Marin, les dialoguistes Kantor, et plus récemment Les patacyclistes… Depuis peu, elle joue au théâtre, avec Léa Drouet, et au cinéma, avec Rachel Lang. Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Fabien Magry, jeu Formé à l’INSAS de 2006 à 2010. Il travaille dès sa sortie d’école sur 12 Works mis en scène par Pierre Megos et dans L’Enfant Zéro mis en scène par Céline Ohrel. Avant d’arriver en Belgique, Fabien a été formé au Cours Florent à Paris où il a pu travailler avec Michel Faux, Claude Brasseur, Vincent Lindon, Christophe Garcia... En parallèle, il participe aux ateliers dirigés par Pico Berkowitch autour de la méthode Lee Strasberg et suit une formation de clown dirigé par Philippe Renaut. Il joue au cinéma dans La Maison réalisé par Sarah Liers et dans Cachet de Michael Haneke. Après La Mission en 2008, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Mathieu Besnard, jeu Diplômé de l’INSAS en juin 2009. Il a travaillé depuis avec Léa Schwebel, Marcel Delval, Isabelle Pousseur, Sophie Maillard, Thibaut Wenger, ainsi que sur des projets au cinéma et à la télévision. Il fait partie de la compagnie Rafistole, et du collectif 6414. Après L’Enfant froid, il s’agit ici de sa seconde collaboration avec Thibaut Wenger. Nathanaëlle Vandersmissen, jeu Nathanaëlle vient d’achever ses études en jeu à l’INSAS, où elle a été initiée à l’écriture, au chant, à l'escrime, au tango et au cirque. Elle collabore avec le performer Mathias Varenne sur le projet La Preuve. Après La Mission et L’Enfant froid, il s’agit de sa troisième collaboration avec Thibaut Wenger. Olindo Bolzan, jeu Olindo Bolzan a commencé à jouer dès 1979 au Théâtre de la Renaissance (ThéâtreAction) avec Jean-Louis Colinet puis suit des études au conservatoire de Liège. Il a depuis lors travaillé sur de très nombreux spectacles, sous la direction de Pietro Varasso, Jacques Delcuvellerie, Françoise Bloch, Philippe Sireuil, Lorent Wanson, Martine Wijkaert, David Strosberg, Michel Dezoteux… Freddy Sicx, jeu Freddy Sicx devient acteur professionnel dès 1984, à l’issue d’un cycle de quatre années de formation à l’Institut des Arts de Diffusion (IAD). Son parcours est fait de théâtre, de cinéma, de prestations publicitaires ou radiophoniques. Il a joué sous la direction d’Yves Beaunesne, Patrick Bonté, Philippe Von Kessel, Michel Kacenelenbogen, Macel Delval, Roumen Tchakarov, Stuart Seide, Alain Françon… Presse Monuments dans la vallée Guillaume Malvoisin Novo, 11/010 (…) Le Cas Wenger. Lenz et L’Enfant froid s’affichent d’emblée comme une extériorisation de l’espace cérébral, singulier, de leur metteur en scène. Deux spectacles pour deux facettes convergentes. Le point de réunion ? Cette obsession quant à la démission de la langue face au réel, face à ce que l’œil peut en recevoir, à ce que l’idée peut en soulever. Thibaut Wenger est un garçon du pays, son théâtre s’en souvient. La montagne têtue qui ombrage son Lenz appartient autant à l’imaginaire de Büchner qu’à des souvenirs de sensations d’enfance. Les langages imbriqués avec patience et ingéniosité, la font trembler à force d’énergie et de questions. Lenz et L’Enfant froid doivent leur réussite aux gens qui les habitent. Que ce soient les spectres planants et rageurs de Lenz, que ce soit le bestiaire fracassé rythmant le texte trop poli de Mayenburg. Pour Lenz, il y a les cavalcades d’enfance, les sons rencontrés ici ou là et cette féroce impression d’avoir les mains aussi vides qu’inutiles à produire du concret. Wenger trace un parcours sommaire et impalpable mugissant dans les ruines de la petite chaufferie de Wesserling. Lenz, le fou, dévale les collines, Wenger et ses camarades remontent la pente d’une litanie impressionniste, ouverte, sensible et non résolue. L’Enfant tient le versant opposé. Ce pourrait être un morceau de rock joué par un orchestre bavarois, une fête un peu triste et extralucide. Sa collection de gueules à l’érotisme glacé s’agite au rythme des ruptures et autres étirements temporels. La mise en scène nous observe en train de regarder les comédiens, beaux et présents. Et si Thibaut Wenger emprunte à Godard hors-cadre, mise en abîme et faux raccords, il empile ses tentatives en les liant avec un venin caractériel, autistique et diablement sournois. Un genre de grotesque qui touche le nerf du plaisir. Dans la noirceur environnante et stagnante, la leçon est excitante. Presse Froides crudités Myriam Aït-Sidoum Dernières Nouvelles d’Alsace, 09/09/010 Au festival Premiers Actes, Thibaut Wenger, son directeur, présente sa copie de fin d’étude à Bruxelles, une mise en scène de L’Enfant froid, de Marius von Mayenburg : un théâtre collectif de la désintégration, à la Comédie de l’Est encore ce soir. Le jeune dramaturge allemand Marius von Mayenburg, traduit par Laurent Mulheisen, a une écriture elliptique, violente, drôle parfois. Il raconte en substance des parents, leurs grands enfants, leurs amis, leurs relations explosives, névrosées, désespérées. Ce qui est vulgaire est moins l’obsession d’un désaxé exhibitionniste dans les toilettes des filles que le règne de l’argent, de l’apparence, cette société qui met K.O. avant même qu’on l’ait formulé. Le costume du gendre idéal cache le tortionnaire, celui du pervers un (presque) agneau. Partant de là, Thibaut Wenger met en scène comme le propose le texte ce parcours collectif pessimiste vers une implosion intime de chacun. Les temporalités se télescopent, entre flashback, temps de l’action, moments bornés par trois actes, une rencontre, un mariage, un enterrement. Il y a bien le père, joué par Jean-Pierre Basté, qui reste monolithique de bout en bout, jusqu’à sa mort d’ailleurs. Tout autour, ce n’est que craquèlements, autour du personnage de Lena, la comédienne Berdine Nusselder, malmenée de bout en bout, jusqu’à choisir un moyen de révolte radical, Laetitia Yalon est sa mère passive, Léa Drouet l’amie psychotique, Tristan Schott son mari malade. Tous les ingrédients sont là, comédiens à vue sur le plateau du début à la fin, tons le plus souvent juste, ils portent la pièce. La crudité des mots se double d’une crudité du geste, de crudités aussi au sens littéral, avec un poivron fiché on ne dira pas où pour ne pas trop en dire. Mais la tension dramatique, qui devrait aller crescendo, baisse par endroits, à mesure qu’approche la fin, comme si le tout manquait un peu de liant. On peut toujours le mettre sur le compte de cette absence de liant qui fait défaut à ce bout de société décortiqué. Prix de vente Première représentation 4 000 € Représentation supplémentaire 3 000 € + transport, déplacements et hébergement (12 personnes) Conditions techniques Dimensions minimales du plateau 10 m d’ouverture / 15 m de profondeur Services techniques 2 services de montage 1 service de raccords et de conduite 1 service de démontage Durée du spectacle 1h30 Contacts Thibaut Wenger 55, rue de Gerlache B-1040 Bruxelles +32 (0) 488/228.929 +33 (0) 682 11 22 87 [email protected]