EMBAIXADA DO BRASIL EM PARIS

Transcription

EMBAIXADA DO BRASIL EM PARIS
EMBAIXADA DO BRASIL EM PARIS
Setor de Imprensa e Divulgação 9/6/11
Le Figaro 08 06/11
Oscar Niemeyer et les frères Campana,
l’exceptionnelle rencontre
PROPOS RECUEILLIS PAR CÉDRIC MORISSET
Sous les feux de l’actualité, le maître de l’architecture et les surdoués du design brésilien achèvent
de nouveaux projets en Europe. L’occasion d’une conversation inédite entre ces trois figures
mythiques que tout rapproche malgré cinquante années d’écart
ENTRETIEN Le premier est l’inventeur de Brasilia et le dernier géant de l’architecture moderne, selon
Michael Kimmelman, critique au New York Times. Les seconds sont les enfants terribles du design brésilien,
qui ont mis à l’honneur la culture populaire du pays, en créant des meubles qui évoquent la transfiguration
de la pauvreté et de la « récup » en objets porteurs de sens et de joie de vivre. Figures tutélaires de
l’architecture et du design brésilien dans le monde, leurs noms font aussi la fierté d’un pays en pleine
renaissance économique et créative, qui essaime sa culture dans le monde entier. Oscar Niemeyer aura dû
atteindre l’âge de 103 ans pour livrer son premier bâtiment en Espagne. Dans la petite ville médiévale
d’Aviles, au coeur des Asturies, le Centro Niemeyer, nouveau centre culturel inauguré il y a quelques
semaines, ne fait pas mentir la verve du maître. Avec ses formes futuristes et labyrinthiques, ses courbes,
sa blancheur immaculée et sa vigie qui semble regarder vers l’avenir, Niemeyer joue, comme à son
habitude, une mélodie harmonieuse entre surprise et poésie. Infatigables globe-trotteurs de 50 et 58 ans, les
frères Campana inaugurent quant à eux dans quelques jours leur premier hôtel à Athènes pour le grand
collectionneur d’art Dakis Joannou, puis, à Paris, le Café des Hauteurs au Musée d’Orsay et enfin le Café
du Théâtre municipal de Sao Paulo, leurs premières réalisations architecturales. Conversation libre autour
de la création et de la vie entre trois icônes du Brésil contemporain.
M.
SALVAING Oscar Niemeyer dans son bureau à Rio de Janeiro, entouré des frères Campana,
Humberto (à gauche) et Fernando.
Fernando CAMPANA. - Quand j’étais enfant, notre père est allé à l’inauguration de Brasilia avec la
communauté religieuse de notre ville de Brotas, dans l’état de Sao Paulo. Votre cathédrale l’a tellement
marqué qu’il l’a reproduite en miniature pour une procession. C’est une image que nous avons toujours eue
en tête. Je suis né quand Brasilia a été inaugurée et Humberto, quand elle a été conçue. J’ai 50 ans demain
et j’ai toujours voulu vous rencontrer. Je n’ai pas de mots pour vous dire ce que je ressens.
Oscar NIEMEYER.-Pour moi, vous êtes un gamin ! C’est bon d’avoir 50 ans, non ? On peut profiter des
bonnes choses et faire encore tant de bêtises ! ( Rires.)
LE FIGARO. - Vous êtes architecte et designers, et pourtant on dit de vous que vous êtes avant tout des
sculpteurs. Que répondez-vous ?
O. N. Une maison, ce n’est pas seulement un toit pour abriter, mais c’est aussi fait pour surprendre et créer
de la poésie ! En utilisant la nouveauté et la surprise, l’architecture se rapproche d’une oeuvre d’art, comme
une peinture ou une sculpture. L’architecture selon moi, c’est l’invention !
Humberto CAMPANA. - Nous pensons la même chose ! Nos meubles sont comme des sculptures… faites
pour s’asseoir. Il faut qu’on soit d’abord surpris nous-mêmes par nos créations pour pouvoir étonner les
autres. Regarder le passé, cela a déjà été tellement bien fait qu’il faut se consacrer désormais à l’avenir.
Inventer des choses nouvelles, différentes.
O. N. - L’architecture n’a pas besoin d’être strictement utile comme le Bauhaus l’ordonnait. Il faut avant tout
que cela soit beau. Le Bauhaus, c’était une saloperie ! ( Rires.)
F. C. - On nous reproche souvent de ne pas nous intéresser au confort et à la fonctionnalité d’une pièce.
Mais ce sont nos idées qui doivent d’abord l’emporter. Nous considérons qu’il est toujours possible de
revenir plus tard sur un produit pour le rendre plus confortable. O. N. - Alors, vous faites des meubles ? F. C.
- Nous avons commencé à dessiner des meubles il y a trente ans. On a rencontré beaucoup de résistance
au Brésil : nous avons d’abord été reconnus en Europe, notamment grâce à la société italienne Edra, puis
enfin ici…
H. C. - Nous essayons d’abord de montrer dans notre travail une photographie de ce qu’est le Brésil
contemporain. Et ça, ça vient beaucoup de votre regard, de ce que vous nous avez enseigné. Nous créons
en regardant et en admirant ce que vous avez fait. J’aurais aimé avoir le même oeil que vous. J’ai fait des
études pour devenir avocat pendant la dictature militaire, mais ma passion c’était l’architecture. Et je n’ai
jamais pu l’étudier car, à l’époque, cela signifiait que l’on était communiste, comme vous. Tout ce que j’ai
appris, c’est avec la main et le regard. Je suis autodidacte.
O. N.-C’était la pire période… J’ai dû partir en France au moment du coup d’État en 1964. Il y avait là André
Malraux, avec qui je suis devenu ami. Grâce à lui, un décret m’a permis de rester en France et d’y travailler
en tant qu’architecte aussi longtemps que je le souhaitais. Pendant ce temps-là, ces crétins de la dictature
inventaient une vérité et un respect des hommes à leur manière… Ils ont fait beaucoup de mal, mais un
nouveau jour s’est finalement levé. Maintenant, ça va mieux au Brésil, mais ce n’est pas encore suffisant. Il
faut penser un peu pour pouvoir continuer à marcher. Je suis avec Lula ! Il protège l’Amérique latine de la
pression du capitalisme nord-américain. Il est de notre côté, avec Fidel et Chavez. Dilma Rousseff est bien
aussi. Elle est compétente et discrète. C’est une bonne représentation du Brésil.
F. C.-Moi, j’ai pu étudier l’architecture à la fin des années 1970, au moment de la transition vers la
démocratie, mais, au fond, je voulais être acteur… C’était encore pire ! L’architecture, c’est à ça que je
m’identifiais néanmoins le plus à l’époque. Aujourd’hui, nous dessinons finalement surtout des meubles.
O. N.-Le meuble complète l’architecture. Il faut qu’il soit confortable et beau. Il doit aussi être une oeuvre
d’art. Aujourd’hui, c’est plus facile de dessiner des meubles qu’à mon époque. Il y a plus de matériaux, plus
de techniques. Cela permet tant de choses différentes, mais ce n’est pas facile pour autant. Il faut essayer
plusieurs fois, expérimenter et faire preuve de beaucoup d’astuce. Ce qui est bien, c’est avant tout la volonté
de faire des choses.
H. C. - Nous imaginons toujours nos meubles en partant des matériaux. Ce sont eux qui nous disent en quoi
ils vont être transformés. LE FIGARO.-Vous venez de terminer le Centro Niemeyer à Aviles.
Réfléchissezvous encore à de nouveaux projets ?
O. N.-Je travaille beaucoup. Tout le temps. Je vais, par exemple, faire un livre sur les trente églises que j’ai
dessinées. Pourtant je ne crois pas en Dieu…
H. C. - Vous ne croyez en rien ?
O. N.-On dit qu’on a commencé à exister avec le big bang… Je crois qu’avec la mort, tout s’arrête. H. C. - Et
la réincarnation ?
O. N.-Je n’y crois pas non plus ! On a nos années pour travailler, être poète, faire en sorte d’être égaux et
fraternels, et c’est là la seule chose essentielle. Cela m’a fait plaisir de vous rencontrer. Nous aurons peutêtre l’occasion de travailler ensemble dans le futur. Laissez-moi votre CV !