Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles (français)

Transcription

Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles (français)
Collection
Connaissances
Münchener Rück
Munich Re Group
Gestion des sinistres dus
aux catastrophes naturelles
Expériences, analyses et plans d’action
Après les inondations de 2002 : les costumes
du « Lac des cygnes » sont mis à sécher sur les
fauteuils de la salle de spectacle de l’Opéra
Semper.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Préface
Préface
Les catastrophes naturelles occasionnent généralement des sinistres de masse et des gros sinistres, et la
gestion des dommages peut ici facilement évoluer en management de crise. En effet, lorsqu’ils veulent
régler les sinistres, les assureurs n’ont pas seulement à faire face à des milliers de dommages, ils sont
aussi directement confrontés à leurs effets : l’effondrement des infrastructures ou la défaillance des
réseaux de communication représentent des défis colossaux pour les professionnels de l’assurance.
Sans préparation adéquate et sans programmes de prévention ou plans d’action appropriés, les
assureurs peuvent facilement courir le risque d’être dépassés par les événements quand il leur faut
régler des milliers de dommages le plus rapidement possible. Actions non homogènes, retards et
trop-payés peuvent en être les conséquences, et les entreprises risquent non seulement d’avoir à
assumer des frais qui auraient pu être évités, mais aussi d’être confrontées à une perte de confiance
susceptible de nuire à leurs affaires.
Désireuse de proposer des pistes de solution à ces problèmes et de permettre une approche proactive, l’équipe de gestion des connaissances de la Münchener Rück a réuni dans la présente brochure
un ensemble d’expériences en matière de gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles.
Les articles portent non seulement sur les tâches classiques de la gestion de sinistres, ils font aussi
état des enseignements et des connaissances acquises sur la base de sinistres récents ou renseignent sur les solutions envisageables et les tendances en matière de management des sinistres. Les
check-lists pour les assureurs et les assurés soulignent l’intention des auteurs de donner des indications transposables dans la pratique de l’assurance.
Alfons Maier
Knowledge Management – Topic Network Leader Property Claims
1
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Sommaire
Sommaire
Tâches et défis
4
La dynamique particulière des sinistres dus aux catastrophes naturelles
6
Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
Tendances et développements
10
Gestion efficace des sinistres
Une action rapide et ciblée est décisive
Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
12
Résultats et enseignements à tirer des événements
14
27
29
Tempêtes et ouragans
2004 aux États-Unis : les ouragans Charley, Frances, Ivan et Jeanne
2003 en Corée et au Japon : le typhon Maemi
1999 en Europe : les tempêtes d’hiver Lothar et Martin
32
34
Séismes
1999 en Turquie : le séisme d’Izmit
1995 au Japon : le séisme de Kobe
41
Inondations
2002 en Europe : les inondations
Tendances et solutions possibles
46
De la check-list à la gestion des sinistres
48
Géocodage
La transparence est le préalable indispensable
52
Fraude
Les sinistres de masse peuvent inciter à la fraude
59
Plans d’action pour les assureurs
Flexibilité en cas de sinistre
Résumé et perspectives
70
Modèles de sinistre récurrents – Approches innovantes
Annexe : check-lists pour une gestion proactive des sinistres
74
Gestion professionnelle des sinistres pour les assureurs et les assurés
Sur la côte est des États-Unis, après le passage
du cyclone Isabel en septembre 2003, toute aide
était la bienvenue pour mener à bien les travaux
de déblaiement.
3
Tâches et défis
La dynamique particulière des sinistres
dus aux catastrophes naturelles
Les sinistres liés aux catastrophes naturelles ne
présentent jamais la même configuration. La
gestion des sinistres requiert donc une démarche
proactive et intégrée pour permettre une action
rapide et professionnelle dans une situation
d’urgence.
À Oakland, dans la cave d’une maison exposée
aux tremblements de terre, des techniciens
fixent des panneaux et des tiges d’ancrage sur
les murs. Ces mesures sont destinées à stabiliser
la maison et à lui permettre de résister aux
secousses telluriques.
4
5
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
Les catastrophes naturelles sont de graves sinistres qui occasionnent
généralement d’énormes dégâts économiques ou de lourds
dommages humains. La Münchener Rück suppose que leur
fréquence et leur intensité ne cesseront d’augmenter. Le secteur
assurantiel doit donc s’attendre à ce que les sinistres résultant
d’événements naturels augmentent considérablement dans les
années à venir.
Les cataclysmes ont des causes naturelles ou présumées
naturelles, par exemple les séismes générés par des travaux souterrains dans les mines (écaillement). On pourrait
aussi classer dans cette catégorie les événements météorologiques, qui, intensifiés par le changement climatique
d’origine anthropique, se transforment en catastrophes.
Mais quelle doit être l’importance du sinistre pour que l’on
puisse parler de catastrophe naturelle ? La Münchener Rück
considère un événement naturel comme étant un cataclysme, lorsque la vie d’êtres humains est en jeu ou que
surviennent des dommages matériels très importants. De
plus, elle distingue encore ici les « grandes catastrophes
naturelles ». Conformément à la définition des Nations
unies, on parle de grandes catastrophes naturelles lorsque
les régions affectées sont incapables de faire face seules à
la situation. C’est le cas, en principe, si au moins l’un des
critères suivants est rempli :
– une aide nationale ou internationale est nécessaire
– il y a plusieurs milliers de morts
– il y a plusieurs centaines de milliers de sans-abri
– le préjudice économique est considérable
– les dommages assurés sont substantiels (en fonction du
volume du marché)
Le NatCatSERVICE® de la Münchener Rück, l’une des archives électroniques les plus vastes du monde en matière de
catastrophes naturelles, gère des statistiques sur les plus
grandes catastrophes naturelles des 2 dernières décennies
et sur l’ensemble des cataclysmes survenus depuis 1980.
La représentation graphique 1 montre dans quelles proportions les conséquences pécuniaires et humanitaires des
grandes catastrophes naturelles se répartissent entre les
divers risques naturels depuis 1950. Les autres événements
sont constitués essentiellement par les vagues de chaleur,
les incendies de forêt, la sécheresse, le gel et les avalanches.
Le graphique fait tout d’abord apparaître que, avec une part
de 54 %, les séismes, y compris les tsunamis, font le plus de
victimes. Il montre aussi que les événements d’origine
6
atmosphérique génèrent les préjudices économiques les
plus importants et les plus gros dommages assurés. Environ
les trois quarts des dommages assurés ont été causés par
des tempêtes, 6 % étaient imputables aux inondations et le
même pourcentage était attribuable à d’autres catastrophes
météorologiques. Cette large part de dommages d’origine
météorologique revêt une importance particulière, car elle
est influencée par l’homme à travers le changement climatique anthropogène.
La représentation graphique 2 montre le nombre des grandes
catastrophes naturelles par an, depuis 1950, qui varient entre
0 (années 1952 et 1958 peu marquées par les cataclysmes) et
15 (année 1993). Alors que pour les événements géologiques,
on ne constate pas de tendance dans le temps, il est frappant
de voir que les catastrophes climatiques ont augmenté en
flèche dans les années 1980 et 1990. On peut donc exclure
les distorsions pour ces grandes catastrophes, car, étant
donné l’amélioration globale des canaux d’information (par
exemple, enregistrements plus détaillés au cours des dernières décennies), cela aurait aussi un impact sur le nombre
des tremblements de terre. La tendance à la hausse des
catastrophes climatiques n’est pas en soi une preuve de
l’influence du changement climatique, mais elle en est un
indice éloquent. Cette évolution correspond exactement à
la situation à laquelle on s’attendait du fait du changement
climatique.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
Fig. 1 : Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
Nombre d’événements : 268
Inondation
25 %
Tremblement de terre, tsunami
et éruption volcanique
29 %
Tempête
40 %
Autres événements (vague de
chaleur/sécheresse, incendie de forêts,
intempérie hivernale/gel)
6%
Préjudice économique :
1 400 milliards de $US
Inondation
27 %
Tremblement de terre, tsunami
et éruption volcanique
35 %
Tempête
31 %
Autres événements (vague de
chaleur/sécheresse, incendie de forêts,
intempérie hivernale/gel)
7%
Nombre de morts : 1,65 million
Les séismes, y compris les tsunamis,
ont de loin été les plus meurtriers.
Cependant, les événements
d’origine atmosphérique ont causé
les préjudices économiques et les
dommages assurés les plus importants. Environ les trois quarts des
dommages assurés ont été causés
par des tempêtes, 6 % étaient imputables aux inondations et le
même pourcentage était attribuable
à d’autres catastrophes météorologiques.
Inondation
7%
Tremblement de terre, tsunami
et éruption volcanique
54 %
Tempête
38 %
Autres événements (vague de
chaleur/sécheresse, incendie de forêts,
intempérie hivernale/gel)
1%
Dommages assurés :
230 milliards de $US
Inondation
6%
Tremblement de terre, tsunami
et éruption volcanique
14 %
Tempête
74 %
Autres événements (vague de
chaleur/sécheresse, incendie de forêts,
intempérie hivernale/gel)
6%
Source : NatCatSERVICE®, Groupe de Recherche GéoRisques, Münchener Rück (2005)
7
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
Fig. 2 : Grandes catastrophes naturelles par an depuis 1950
nombre
14
12
10
8
6
4
2
0
1950
1955
1960
1965
1970
1975
Le nombre des catastrophes climatiques a
fortement augmenté au cours des années
1980 et 1990. La tendance à la hausse des
catastrophes climatiques n’est pas en soi
une preuve de l’influence du changement
climatique, mais elle en est un indice éloquent.
1980
1985
1990
1995
2000
Tremblement de terre, tsunami et éruption volcanique
Tempête
Inondation
Autres événements (par ex. vague de chaleur/sécheresse,
incendie de forêt, vague de froid/gel)
Fig. 3 : Préjudices économiques et dommages assurés
> 113 milliards
de $US
> 178 milliards
de $US
en milliards
de US$
80
70
60
50
40
30
20
10
0
1950
1955
1960
1965
1970
1975
Les courbes représentant l’évolution du
préjudice économique et des dommages
assurés (à la valeur actuelle) montrent que
depuis 1950 les dégâts causés par les catastrophes n’ont pas seulement augmenté de
façon linéaire, mais aussi exponentielle.
Source : NatCatSERVICE®, Groupe de Recherche GéoRisques, Münchener Rück (2005)
8
16
14
1980
1985
1990
1995
Préjudice économique (à la valeur de 2004)
Dont dommages assurés (à la valeur de 2004)
Moyenne décennale du préjudice économique
Évolution du préjudice économique
Évolution des dommages assurés
2000
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Si l’augmentation du nombre des événements est frappante, la croissance du préjudice économique et des dommages assurés causés par les catastrophes naturelles est
encore plus impressionnante. Le graphique 3 montre nettement que les montants de sinistres n’augmentent pas
seulement de façon linéaire, mais aussi exponentielle, et
ce bien que les valeurs soient données après correction de
l’inflation.
Augmentation des dommages assurés et du préjudice
économique générés par les cataclysmes
La croissance radicale des dommages est principalement
due à l’accroissement de la population et à la forte augmentation des valeurs et des densités d’assurance dans un
grand nombre des pays concernés. On constate également
que, malgré le renforcement des règles de construction et
l’évolution technique, beaucoup de bâtiments et d’infrastructures ne sont pas devenus plus stables, mais plus
vulnérables aux risques naturels. Le peuplement et l’industrialisation de régions hautement exposées ainsi que
l’urbanisation à l’échelle mondiale favorisent aussi cette
évolution. En même temps, les indices d’une influence
croissante du changement climatique sur la fréquence et
l’intensité des catastrophes naturelles se sont multipliés.
Grandes catastrophes naturelles 1950–2004
La gestion des sinistres se trouve devant de grands défis
posés par les nouvelles dimensions de sinistres
Le secteur assurantiel doit donc se préparer à devoir faire
face à une continuelle aggravation des charges d’indemnisation découlant des catastrophes naturelles. La gestion
des sinistres a aussi devant elle des défis colossaux lancés
par les nouvelles dimensions de sinistres. À l’avenir, au
plafonnement des engagements et à l’application d’une
prime adéquate devra venir s’ajouter une gestion efficace
des sinistres pour que ces risques restent assurables. La
succession des cyclones qui ont sévi aux États-Unis en
2004 – 4 événements majeurs en l’espace de 6 semaines –
a fait ressortir clairement les limites et les déficits de la
gestion des sinistres.
Nous présentons dans les chapitres suivants les particularités de la gestion des sinistres dans le domaine des catastrophes naturelles. Nous faisons aussi état des enseignements et des connaissances acquises sur la base de
catastrophes naturelles survenues au cours de ces dernières années et présentons des approches envisageables
pour l’avenir en matière de gestion des sinistres.
2004 – l’année la plus coûteuse de l’histoire de l’assurance
en termes de catastrophes naturelles
2004 s’inscrit pleinement dans la tendance à long terme à
l’aggravation des dommages dus aux événements naturels.
Avec 35 milliards de $US de dommages assurés imputables
aux 9 grandes catastrophes naturelles de l’année et 45
milliards de $US générés par l’ensemble des cataclysmes,
l’année 2004 a été l’année des catastrophes naturelles la
plus coûteuse de l’histoire de l’assurance. Les grandes catastrophes de l’année écoulée confirment de façon impressionnante que le monde de l’assurance doit s’attendre à
faire face à de nouvelles dimensions de sinistres. Il est probable que la fréquence et l’intensité des catastrophes naturelles continueront d’augmenter. Si les tendances perdurent, il y a lieu de s’attendre dans 10 ans à la survenance de
plus de 800 événements par an en moyenne, dont presque
90 % seront dus à des catastrophes climatiques. Le montant
des dommages économiques dépassera alors largement
les valeurs record actuelles de 150 milliards de $US par an
et, en moyenne annuelle, la part des dommages assurés
progressera d’environ un quart, représentant quelque
40 milliards de $US. Certaines supercatastrophes isolées
ou des catastrophes en série, comme en 2004, pourraient
atteindre des coûts encore bien supérieurs à ces montants.
9
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Gestion efficace des sinistres
Lors de catastrophes naturelles, l’industrie des assurances s’emploie
aussi à régler de gros sinistres et des sinistres de masse. La clé du
professionnalisme dans le règlement des sinistres réside dans une
gestion proactive.
Pour le monde de l’assurance, les dommages issus des
risques naturels présentent un intérêt bien particulier, et ceci
pour différentes raisons. En premier lieu, nous sommes frappés par la tragédie provoquée par les catastrophes, comme
dernièrement le tsunami qui s’est produit en décembre 2004.
En second lieu, il semblerait que, ces derniers temps, les
dommages causés par les risques naturels prennent des
proportions de plus en plus importantes. C’est ce qu’ont
montré, entre autres, les 4 cyclones qui ont balayé la Floride
en l’espace de seulement 6 semaines en 2004.
Il est probable que les catastrophes naturelles ne cesseront
d’augmenter en fréquence et en intensité.
Tenir compte des dimensions nouvelles de sinistres pour
leur règlement
La particularité de ce genre de catastrophes repose sur le
fait qu’elles développent une dynamique tout à fait différente de celle que l’on connaît des gros sinistres individuels. En outre, ces catastrophes demandent de toutes les
entités concernées un comportement très souple et une
mobilisation élevée.
Pourquoi ces sinistres sont-ils d’une nature complètement
différente de celle des sinistres individuels ? Il y a plusieurs
raisons à cela : au contraire des sinistres individuels, les
événements naturels sont souvent prévisibles plusieurs
jours à l’avance, comme cela a été le cas lors du typhon
Maemi en 2003. De surcroît, leur étendue géographique est
bien plus importante et ils engendrent des millions de
sinistres individuels, ainsi que l’ont montré les tempêtes
de l’hiver 1999 en Europe.
En raison de la complexité de leurs répercussions, les
risques de catastrophes naturelles sont souvent considérés
comme des événements susceptibles de toucher en même
temps les polices d’assurance Dommages, Transport, Automobile, Vie, Maladie, Accidents du travail et Voyages. Les
assureurs sont également confrontés au fait que les sinistres
10
sont souvent déclarés avec un certain retard. Ici encore, plusieurs raisons expliquent les choses : tout d’abord, sur les
lieux de la catastrophe, les mesures d’urgence ont priorité.
Ensuite, dans les régions touchées, l’infrastructure est souvent anéantie, de sorte que l’on ne peut pas, ou bien difficilement, accéder aux lieux sinistrés. Parfois, après une catastrophe, les assurés ne trouvent plus leurs polices, ou
celles-ci sont détruites, ce qui complique la déclaration de
sinistre.
Il y a alors problème pour les assureurs et les réassureurs :
plus les déclarations de sinistre arrivent tard et moins il
y a de données empiriques, plus une première estimation
du préjudice est difficile. Dans quelques cas, on a donc
recours à une analyse descendante. À partir de l’estimation du préjudice économique et du dommage assuré qui
s’étend à l’ensemble du marché, on détermine le nombre
d’assurés et les parts de marché éventuellement touchés
par le sinistre.
Tout assuré a droit à ce que son préjudice soit traité convenablement, même dans une situation exceptionnelle. Par
contre, l’assureur se voit aussitôt confronté à des milliers
de déclarations de sinistre qui l’obligent à faire preuve de
prouesses logistiques et organisationnelles. En principe,
tous les événements catastrophiques représentent une
lourde épreuve physique et psychique, non seulement
pour le service Sinistres, mais encore pour l’ensemble de
la compagnie d’assurance, comme cela a été le cas lors des
séismes à Kobe au Japon en 1995 ou, 4 ans plus tard, en
Turquie.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Solutions pour arriver à une gestion efficace des sinistres
Étant donné que des accidents de ce genre ont toujours
une immense répercussion sur le monde de l’assurance,
les articles de la présente publication traiteront de la gestion des sinistres après une catastrophe. Les questions clés
sont les suivantes : comment une compagnie d’assurances
peut-elle se préparer à de pareils cas, par exemple à des
inondations du genre de celles qu’a connues l’Europe en
2002 ? Ou bien comment réagir, aussi bien en interne que
vis-à-vis de l’extérieur, avant et pendant l’événement ? Et,
le plus important : par quels moyens puis-je satisfaire mes
clients le plus rapidement possible après l’événement ?
Et, finalement : que faut-il que je modifie pour être, la prochaine fois, encore meilleur?
Gestion efficace des sinistres
Nous souhaitons que cette brochure vous aide à l’avenir à
gérer efficacement les dommages causés par les catastrophes naturelles. C’est un bon ouvrage de référence,
contenant une quantité de faits issus de l’expérience, qui
vous permettra de juger si votre organisation est prête à
intervenir et vous incitera peut-être à la structurer différemment, à y apporter des modifications ou à la perfectionner.
Car une chose est sûre : les prochaines catastrophes naturelles, et les sinistres de masse qui en découlent, se produiront certainement.
La gestion des situations d’urgence est importante
En se basant sur une analyse des événements les plus
récents, nous allons montrer différentes mesures (mise en
place d’une équipe de secours) et différents processus
organisationnels (intervention de spécialistes des sinistres) qui peuvent augmenter l'efficacité de la gestion des
sinistres. En outre, nous donnerons des éclaircissements
à propos des récents développements techniques destinés
à l’instruction des sinistres, par exemple à propos du géocodage. Cet aperçu sera complété par une série de suggestions que nous avons résumées sous forme de check-lists à
la fin de ces pages. Le thème de la fraude jouant également
un rôle croissant dans le règlement des catastrophes naturelles, nous y consacrerons un chapitre particulier.
Cependant, tous les exemples de sinistres cités par la suite
confirment à nouveau les faits suivants : lorsque la majeure
partie des dossiers est traitée après une catastrophe naturelle, toutes les personnes concernées devraient procéder
à une rétrospective des événements. Sans attendre, une
analyse commune entre assureurs et réassureurs est alors
requise, qui pourra englober les thèmes et les contenus
suivants :
– estimation du coût total définitif de la catastrophe pour
l’assurance directe
– enseignements à tirer de la catastrophe
– propositions visant à améliorer la gestion future des
cumuls et des gros sinistres
– en guise de conclusion, recommandations pratiques
pour la souscription
11
Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Résultats et enseignements à tirer des événements
La Münchener Rück s’attend à une augmentation
de la fréquence et de l’intensité des catastrophes
naturelles. Pour le monde de l’assurance, cela
signifie qu’il aura à faire face à un défi des plus
difficiles. Dans le chapitre qui suit, nous allons
présenter plusieurs événements marquants qui
se sont produits au cours des dernières années et
dont l’analyse contribue à l’élaboration d’une
gestion plus efficace des sinistres.
Après les inondations catastrophiques de
2002 à Dresde, des volontaires et des
employés d’un hôtel retirent des sacs de
sable d’une digue.
12
13
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
Les tempêtes constituent manifestement la majeure partie des
catastrophes naturelles. En 2004, avec 96 % des dommages assurés,
les dommages consécutifs aux tempêtes ont pris une place prépondérante dans le bilan des catastrophes naturelles chez les assureurs
mondiaux. Nous avons procédé à l’analyse de la gestion des sinistres
à partir de 3 événements exemplaires qui se sont produits, au cours
des dernières années, aux États-Unis, en Asie et en Europe.
2004 aux États-Unis : les ouragans Charley, Frances, Ivan
et Jeanne
En 2004, les cyclones tropicaux qui se sont formés dans
l’Atlantique et dans les Caraïbes ont marqué de nouveaux
records dans les annales météorologiques. Au cours de la
saison cyclonique, qui va de juin à septembre, l’État de la
Floride a été touché par 4 ouragans : Charley, Frances, Ivan
et Jeanne. Jamais encore il n’y avait eu autant de catastrophes dues à des tempêtes, à tout le moins depuis 1850,
date à partir de laquelle on a commencé à rassembler, pour
la première fois, des données sur les ouragans. Jusqu’ici,
le nombre maximum de sinistres causés par des cyclones
en Floride avait été de 3 en 1886, 1896 et 1964.
Gaston
Alex
Memphis
Houston La Nouvelle-Orléans
Charley, le 3e ouragan de la saison 2004, a traversé la Floride les 13 et 14 août en direction ouest-est au nord de Fort
Myers. Au moment de son entrée sur les terres, Charley
avait atteint la catégorie 3 sur l’échelle Saffir-Simpson (qui
en compte 5), avec des vents soufflant en rafales de 270 à
280 km/h. L’ouragan Andrew avait une vitesse de vent
comparable, en 1992, en traversant le sud de la Floride.
Une fois au-dessus des terres, Charley a diminué d’intensité et est passé dans la catégorie 2, tout en conservant sa
force cyclonique, avec des rafales de plus de 150 km/h,
avant de quitter la Floride près de Daytona Beach, sur la
côte Atlantique. Ensuite, Charley a remonté la côte est des
États-Unis, soufflant encore à 120 km/h sur la Caroline du
Sud et du Nord et causant de légers dommages.
Fig. 2 : L’ouragan Charley
Fig. 1 : La succession d’ouragans en Floride
New York
Washington
L’ouragan Charley
Tallahassee
Lisa
Daytona Beach
Nicole
Otto
Clermont
Hermine
Matthew
Tampa
Frances
Danielle
Fort Meade
Sebring
Bradenton
Arcadia
Jeanne
Bonnie
Earl
En 2004, au total 15 cyclones tropicaux ont pris
naissance dans l’océan Atlantique, 9 d’entre
eux ont atteint une force d’ouragan avec des
vents soufflant à plus de 118 km/h. La charge
principale d’indemnisation pour les assureurs
a été causée par les 4 ouragans Charley,
Frances, Ivan et Jeanne.
14
Sanford
Orlando
Auburndale
St. Petersburg
La Havane
Charley
Jacksonville
Panama City
!(
Karl
Punta Gorda
Fort Myers
Naples
Ivan
Palm Beach
Fort Lauderdale
Miami
Vitesse du vent sur
l’échelle Saffir-Simpson
Vitesse en km/h
Dépression
tropicale (< 60)
Tempête tropicale (60–117)
SS 1 (118–153)
SS 2 (154–177)
SS 3 (178–209)
SS 4 (210–249)
SS 5 (>
– 250)
Les 13 et 14 août, l’ouragan Charley a traversé
la Floride en direction du nord-est.
Source Fig. 1, Fig. 2 :
Groupe de Recherche Géo Risques,
Münchener Rück (2005)
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
L’ouragan Frances
Les 3 et 4 septembre 2004, l’ouragan Frances a traversé les
Bahamas avec une intensité de catégorie 3 sur l’échelle
Saffir-Simpson. Sur sa trajectoire qui le menait vers la
Floride, il s’est légèrement affaibli et a atteint la côte américaine avec la force d’un ouragan de catégorie 2, accompagné de rafales de vents soufflant à 180–200 km/h. Dans la
nuit du 4 au 5 septembre, le cyclone se trouvait à proximité
des comtés de Sainte-Lucie et de Martin. Frances était une
tempête exceptionnellement puissante : à lui seul, l’œil du
cyclone avait un diamètre de près de 100 km lorsqu’il a
atteint les terres et était donc environ 5 fois plus grand que
le cyclone Charley. Le diamètre de la zone balayée par les
vents cycloniques (atteignant donc plus de 120 km/h)
mesurait 280 km, soit nettement plus que lors d’un ouragan de moyenne taille. Autre particularité : se déplaçant à
une vitesse de 5 à 10 km/h, la tempête avançait très lentement. C’est ce qui explique que l’ouragan ait sévi très longtemps dans le périmètre touché et causé, en conséquence,
d’importants dégâts aux bâtiments. De plus, en raison de
son inertie, l’ouragan a pu se charger d’une importante
quantité d’humidité, ce qui, par la suite, a provoqué
des pluies torrentielles et des inondations sur une zone
étendue.
Fig. 3 : L’ouragan Frances
New York
Memphis
Washington
Houston
La Nouvelle-Orléans
La Havane
La trajectoire de Frances, ouragan qui a
traversé la Floride les 4 et 5 septembre 2004.
Source : Groupe de Recherche Géo Risques,
Münchener Rück (2005)
Vitesse du vent sur
l’échelle Saffir-Simpson
Vitesse en km/h
Dépression
tropicale (< 60)
Tempête tropicale (60–117)
SS 1 (118–153)
SS 2 (154–177)
SS 3 (178–209)
SS 4 (210–249)
SS 5 (>
– 250)
Image radar de l’ouragan Frances juste avant
son arrivée sur les côtes de la Floride.
Source : US National Weather Service
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Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
L’ouragan Ivan
L’ouragan Ivan s’est formé le 2 septembre 2004 à 10° de latitude N et 30° de longitude O. La dépression tropicale, qui se
développait rapidement, a atteint une force de tempête le
3 septembre et une intensité cyclonique le 5 septembre, avec
des vents soufflant à plus de 118 km/h. En l’espace des
18 heures qui ont suivi, l’intensité du système cyclonique est
passée de la catégorie 1 à la catégorie 4 sur l’échelle SaffirSimpson. Les rafales de vent ont atteint 210 à 250 km/h. Ivan
a conservé cette intensité pendant environ 12 heures avant
de s'affaiblir et de redescendre dans la catégorie 2. Mais ce
n’était que le premier pas vers un record : le 8 septembre,
Ivan a de nouveau atteint la catégorie 4 et s’y est maintenu
jusqu’à son arrivée sur les côtes de l’Alabama le 16 septembre. L’ouragan a conservé cette intensité pendant environ
200 heures. Au cours de cette période, Ivan a même atteint
à 3 reprises la catégorie 5 pour s’y maintenir chaque fois
pendant plusieurs heures. L’ouragan a montré toute sa puissance le 12 septembre en soufflant en rafales de 330 km/h. La
puissance d’Ivan était énorme : son potentiel de destruction,
c’est-à-dire la valeur de son indice intensité-durée, a été la
plus élevée de tous les ouragans qui l’avaient précédé.
Tempêtes et ouragans
Cependant, Ivan n’a pas seulement battu de nouveaux
records météorologiques. Sur sa trajectoire à travers les
Caraïbes, et bien avant son passage sur les terres des
États-Unis, l’ouragan Ivan a généré des records négatifs
dans l’industrie des assurances : le 7 septembre 2004, Ivan
a traversé l’île de la Grenade avec une force de catégorie 3
sur l’échelle Saffir-Simpson. L’île n’était pas préparée à
faire face à une tempête de pareille intensité. Trente-neuf
personnes ont trouvé la mort ; 90 % des bâtiments ont été
endommagés ou complètement détruits. Le 12 septembre,
les dégâts matériels ont été encore plus importants sur les
îles Caïmans. Dans cette région, les violentes tempêtes et
les raz de marée ont détruit près d’1,5 milliard de $US de
valeurs assurées, sur un montant total de l’ordre de 5
milliards de $US.
Fig. 4 : La succession d'ouragans en Floride : Ivan
New York
Washington D.C.
Oklahoma City
Nashville
Memphis
Dallas
Houston
La Nouvelle-Orléans
!(
500 km
0
0
La Havane
250
500
Kilometers
La trajectoire de l’ouragan
Ivan qui a atteint les terres
le 16 septembre 2004, à la
frontière de l’Alabama et de
la Floride.
Engagements par
comté en milliards
de $US
<
–1
>1–2
>2–5
Source : Groupe de
Recherche Géo Risques,
Münchener Rück (2005)
16
>5–10
>10–30
>30–500
Vitesse du vent sur
l’échelle Saffir-Simpson
Vitesse en km/h
Dépression
tropicale (< 60)
Tempête tropicale
(60–117)
SS 1 (118–153)
SS 2 (154–177)
SS 3 (178–209)
SS 4 (210–249)
SS 5 (>
– 250)
Image radar de l’ouragan Ivan avant son arrivée
sur la Floride.
Source : US National Weather Service
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
L’ouragan Jeanne
Dommages
Tout comme Frances 3 semaines auparavant, l’ouragan
Jeanne a frappé la côte est de la Floride le 25 septembre
2004, alors qu’il se trouvait dans la catégorie 3 avec des
pointes de vent de 230 à 240 km/h. D’un diamètre atteignant
70 à 75 km, l’œil de cette tempête tropicale avait également
une taille qui dépassait la moyenne. En conséquence, le territoire touché par les dégâts était très étendu. Jeanne a
conservé la vitesse élevée de ses vents encore très loin dans
l’intérieur du pays. Cinq heures après que l’ouragan a eu
traversé la côte, les rafales atteignaient encore 190 à 200
km/h. Jeanne a été le 4e et dernier grand ouragan qui est
venu frapper la Floride en l’espace de 6 semaines en 2004.
Les dommages assurés, qui s’élèvent à plus de 30 milliards
de $US, constituent pour l’assurance, en valeurs originales, une nouvelle charge maximum découlant des cyclones
tropicaux qui se sont produits au cours d’une même année
dans l’Atlantique. La Floride a dû supporter la charge
d’indemnisation la plus élevée (21 milliards de $US) aux
États-Unis. Toutefois, l’Alabama et d’autres États fédéraux
ont contribué pour un montant considérable d’environ
5 milliards de $US au préjudice total. En sus, aux Caraïbes
(îles Caïmans, Bahamas, Jamaïque, République dominicaine, Grenade), les 4 ouragans ont détruit pour 2,5
milliards de $US de valeurs assurées. Un total de quelque
2 millions de sinistres individuels souligne encore à quel
point la succession d’ouragans a constitué un défi particulier pour les inspecteurs-régleurs ; rien qu’en Floride,
1,6 million de sinistres ont été déclarés.
Fig. 5 : L’ouragan Jeanne
New York
Washington D.C.
Oklahoma City
Memphis
Dallas
Houston
La Nouvelle-Orléans
La Havane
0
500 km
La trajectoire de Jeanne, ouragan qui a traversé la Floride les 26 et 27 septembre 2004.
Vitesse du vent sur
l’échelle Saffir-Simpson
Vitesse en km/h
Source : Groupe de Recherche Géo Risques,
Münchener Rück (2005)
Dépression
tropicale (< 60)
Tempête tropicale
(60–117)
SS 1 (118–153)
SS 2 (154–177)
SS 3 (178–209)
SS 4 (210–249)
SS 5 (>
– 250)
Image radar de l’ouragan Jeanne avant son
arrivée sur les terres dans le comté de Martin
(Floride).
Source : US National Weather Service
17
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
Fig. 6 : Plateformes pétrolières offshore dans le golfe du Mexique et simulation
du champ des vents de l’ouragan Ivan
Plateforme d’extraction
de pétrole
Trajectoire de l’ouragan
Ivan
Vitesse du vent en km/h
100–109
110–119
120–129
130–139
140–149
150–159
160–169
170–179
180–189
190–199
200–209
210–219
220–229
230–239
240–249
250–259
260–269
≥ 270
Simulation par la Münchener Rück du champ des
vents de l’ouragan Ivan dans le golfe du Mexique
et sites des plateformes pétrolières offshore.
Bien qu’Ivan ait frôlé la partie est de la zone de
forage, où les installations offshore ne
représentaient qu’une concentration de valeurs
assez faible, ce cyclone a été un événement
extrêmement coûteux pour le secteur énergie
offshore.
Source : United States Department of the
Interior – Minerals Management Service
Simulation du champ des vents :
Münchener Rück
Fig. 7 : Bilan des sinistres occasionnés par la succession d’ouragans qui se sont
produits aux États-Unis et dans les Caraïbes en 2004
Ouragan
Préjudice économique
(en milliards de $US)
Dommages assurés
(en milliards $US)
dont dommages assurés aux
États-Unis (avec secteur énergie
offshore ; en milliards de $US)
Charley
18,0
8,0
7,6
Frances
12,0
6,0
5,6
Ivan
23,0
12,5
10,6
Jeanne
Total
9,2
5,0
4,9
62,2
31,5
28,7
Situation : septembre 2005.
Le préjudice économique et les dommages
assurés des 4 catastrophes cycloniques ont battu
un nouveau record.
Source : Groupe de Recherche
Géo Risques, Münchener Rück (2005)
18
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
Secteur énergie offshore : nouveau record en termes de
dégâts
Surcharge des services Sinistres des compagnies
d’assurances
Au vu de près de 2,5 à 3 milliards de $US de dommages
matériels assurés et d’interruptions d’exploitation infligés
au secteur énergie offshore, l’ouragan Ivan surpasse nettement tous les gros sinistres connus dans ce segment
d’affaires. En comparaison : la perte totale de la plateforme
pétrolière « Piper Alpha » en 1988 a coûté à l’assurance 1,4
milliard de $US et, en 1992, après le passage de l’ouragan
Andrew, les dommages maritimes assurés s’élevaient à
moins d’1 milliard de $US.
Les plans d’urgence de presque tous les assureurs ne prévoyaient aucun cumul de catastrophes de cette ampleur.
On n’avait surtout pas prévu l’apparition de tant de sinistres
individuels en l’espace de seulement 6 semaines – dont environ 1,6 million en Floride. C’est ce qui, au début, a contribué
à un certain manque d’organisation dans l’instruction des
sinistres.
Un coup d’œil sur la carte de la répartition géographique
des plateformes pétrolières offshore dans le golfe du
Mexique (voir fig. 6) montre que le potentiel de dommages
causés par Ivan aurait été encore bien plus important si la
trajectoire de l'ouragan était passée un peu plus à l’ouest.
Gestion des sinistres
La partie qui suit décrit les problèmes spécifiques apparus
au niveau de la gestion des sinistres après le passage des
4 ouragans en Floride. Cependant, plusieurs catastrophes
naturelles peuvent se reproduire à n’importe quel moment
sur un même territoire et dans un laps de temps relativement court. C’est pourquoi il est recommandé de procéder
à un examen précis des problèmes spécifiques liés au
cumul des catastrophes qui engendrent une immense
quantité de sinistres individuels, afin d’en tirer des leçons.
Une bonne partie des thèmes abordés ont également une
grande importance pour la gestion des sinistres dus à des
mégacatastrophes individuelles.
Dans un premier temps, la plupart des compagnies d’assurances avaient trop peu de gestionnaires et de collaborateurs internes à leur disposition pour effectuer un règlement correct des sinistres, puisque leur nombre était établi
en fonction d’une seule mégacatastrophe qui surviendrait
dans un certain secteur. La somme des dommages causés
par la succession de 4 ouragans a donc engendré une surcharge de travail à laquelle les assureurs ne pouvaient pratiquement plus faire face, compte tenu du personnel et de
l’équipement bureautique disponibles.
Par conséquent, les compagnies d’assurances se sont
efforcées d’obtenir des gestionnaires supplémentaires,
mais parfois en vain. On a donc eu recours à des collaborateurs venus d’autres services (par exemple du service de
production) ou rappelés de leurs congés. On est même allé
jusqu’à faire revenir des gestionnaires qui étaient à la
retraite. Pour les services internes, beaucoup de compagnies ont chargé des centres d’appel externes de la saisie
des dommages, ainsi que des employés qualifiés de sociétés d’intérim pour l’étude des sinistres.
Des compagnies d’assurances qui utilisaient un système
de règlement des sinistres basé sur l’Internet ont fait travailler leurs spécialistes à la maison pour compenser la
pénurie de bureaux. Quelques assureurs ont ouvert des
bureaux de soutien hors de Floride, d’autres en ont installé
provisoirement dans le secteur touché par la catastrophe,
dans lesquels leurs collaborateurs ont pu procéder à l’enregistrement des dommages et au versement d’acomptes
aux clients concernés. D’une manière générale, toutes les
compagnies ont travaillé sous forte pression – 7 jours sur
7 pendant les premiers mois qui ont suivi le passage des
ouragans.
19
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Les assureurs ont mis en place des numéros de téléphone
gratuits pour les déclarations de sinistres. Pour faire face au
grand nombre de déclarations effectuées par téléphone, les
appels ont également été enregistrés, convertis en fichiers
sonores, puis envoyés par courrier électronique au personnel
en charge de la gestion des sinistres. Des employés de nombreuses sociétés ont même utilisé leur appareil portable privé
afin de téléphoner en dépit des lignes bloquées. Dans leur
message d’attente, plusieurs compagnies d’assurances ont
fait passer une bande d’annonce qui, au lieu de la musique
habituelle, répondait aux questions fréquemment posées par
les assurés, par exemple concernant la limitation de l’importance du sinistre ou l’étendue de la garantie.
En raison de la surcharge, d’autres appareils techniques,
tels que photocopieurs et imprimantes, ont capitulé : des
centaines d’experts en sinistres devaient être pourvus en
copies de polices originales et, chaque jour, les sociétés
d’assurances établissaient des milliers de chèques. On
avait donc un besoin urgent d’appareils supplémentaires.
Même le logiciel servant à la saisie des dommages, qui, en
fait, devait venir à bout d’une telle charge, a dû être adapté
immédiatement ou complété par d’autres applications.
Cependant, ceux qui ont souffert le plus, ce sont les assureurs dont les bureaux et l’infrastructure avaient été
endommagés par les ouragans. Les sociétés touchées,
équipées d’une alimentation électrique de secours, ont pu
au moins surmonter l’interruption du courant. Néanmoins,
même les entreprises qui, peu avant le passage des ouragans, avait acquis des affaires importantes dans la branche
Dommages ou des sociétés entières, ont été durement touchées. Au moment des sinistres, l’organisation de leur service Dommages n’avait pas encore été consolidée et le
matériel électronique et les logiciels n’étaient pas encore
pleinement utilisables.
En outre, le Department of Financial Services de Floride,
favorable aux consommateurs, a augmenté la pression sur
les assureurs et donc la charge de travail. Cette autorité a
fixé aux sociétés des délais très courts pour régler les dommages dus aux ouragans subis par les clients privés. Dans
un délai de 30 jours après la déclaration d’un sinistre, il
fallait que les assureurs procèdent au moins à l’estimation
des dommages individuels, fassent une offre de règlement
sérieuse et effectuent, le cas échéant, le versement d’un
acompte raisonnable.
20
Tempêtes et ouragans
Pénurie d’experts externes en dommages matériels
Avec près de 0,5 million de sinistres individuels, l’ouragan
Charley avait déjà engendré une pénurie d’experts externes en dommages matériels. Après le passage du second
ouragan, les sociétés d’assurances n’ont pu engager des
experts, si elles le pouvaient, qu’à des coûts révisés à la
hausse. Certains assureurs ont même proposé de leur propre chef des honoraires plus élevés aux experts afin de les
attacher à leur service. Cependant, une bonne rémunération ne représentait pas une garantie : si, en raison de problèmes internes, les assureurs ne parvenaient pas à mettre
à la disposition des experts les documents nécessaires,
ceux-ci se laissaient parfois débaucher par des sociétés
mieux organisées.
Comme il n’y avait pas assez d’experts sur place, les assureurs en ont fait venir de très loin. Après le passage de
Charley, le Department of Financial Services de Floride a
délivré environ 7 000 licences, et, après Frances, 5 000. Si
l’on y ajoute les 3 000 experts déjà enregistrés, près de
15 000 travaillaient donc en Floride. Cela a entraîné
quelques problèmes : d’une part, les experts n’étaient bien
souvent pas familiarisés avec les données locales, d’autre
part, les différentes langues et dialectes, mais encore les
comportements divers, ont créé de nouvelles difficultés.
Mais ce n’était pas tout : étant donné que de vastes zones
devaient être évacuées et que les infrastructures étaient
endommagées, rapidement, le carburant est devenu rare.
Le prix de l’essence a atteint 6 $US le gallon. En outre, les
ouragans avaient dégradé de nombreux hôtels et les
experts sinistres ont dû loger à une grande distance des
zones touchées. C’est pourquoi les frais d’essence et de
voyage des experts ont été considérables. Par-dessus le
marché, nombreux sont ceux qui ont perdu beaucoup de
temps en attendant dans des queues parfois interminables
devant les stations-services. De ce fait, ils ne pouvaient
inspecter qu’un nombre réduit de risques par jour et,
finalement, ils ont été moins sollicités par les coordinateurs de catastrophes.
Les possibilités de communication, parfois extrêmement
restreintes, ont en outre handicapé la coordination des
experts. Les réseaux téléphoniques étaient surchargés ou
ne fonctionnaient pas du tout pendant des semaines, les
ouragans ayant détruit les antennes-relais de téléphonie
mobile et les lignes téléphoniques. Les experts qui avaient
conclu des contrats avec différentes sociétés de téléphonie
mobile étaient avantagés, puisque les fournisseurs de services n’étaient pas tous touchés par les pannes dans toutes
les régions. Souvent, il n’y avait plus que les téléphones
par satellite ou les talkies-walkies ainsi que l’Internet qui
pouvaient aider, ce dernier s’avérant le meilleur moyen de
communication entre les assureurs et les experts.
Pendant l’évacuation, des milliers d’habitants de
Floride se sont trouvés bloqués pendant des
heures dans les embouteillages sur les autoroutes.
Il y a également eu une pénurie de personnel, de nombreuses sociétés ayant dû évacuer à plusieurs reprises les
experts qui inspectaient les dommages causés par l’ouragan Charley en Floride : tout d’abord, juste avant l’arrivée
de l’ouragan Frances, puis de nouveau avant Ivan et finalement avant l’apparition de Jeanne. Ceci a considérablement ralenti l’inspection des lieux, la mise en place de
mesures conservatoires et l’instruction des sinistres.
Toutefois, les compagnies d’assurances, qui avaient procédé au géocodage de leur portefeuille Dommages matériels, avaient un certain avantage : elles ont pu orienter
leurs experts de façon ciblée et gagner ainsi du temps et
de l’argent, car elles ont comparé les coordonnées de leur
portefeuille avec la trajectoire des ouragans et étaient ainsi
en mesure d’identifier rapidement les secteurs ayant
probablement subi les dommages les plus grands.
Les risques géocodés ont en outre empêché les experts
sinistres de se perdre en chemin en cherchant des assurés.
En effet, après le passage des tempêtes, aucune plaque de
rue ne se trouvait à sa place. Les experts équipés d’un système GPS ont trouvé leurs clients malgré l’absence de panneaux de signalisation.
21
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Présélection des dommages à inspecter par les assureurs
Le Department of Financial Services de Floride propose
aux compagnies d’assurances d’inspecter la région touchée par l’ouragan. Dans le cadre du projet « Partenaires
dans le risque », la zone est survolée par un hélicoptère
juste après la pénétration de l’ouragan sur les terres, afin
d’établir la liste des dommages. À peine 48 heures plus
tard, tous les assureurs ont accès à une carte électronique
placée sur l’Internet, qui présente les secteurs ayant un
profil de sinistre identique ou similaire. À partir des données du risque, les assureurs peuvent alors procéder à une
première évaluation de leurs préjudices.
Afin de maîtriser, dans de telles circonstances, l’énorme
quantité de sinistres individuels, plusieurs assureurs ont
effectué une présélection des dommages qui devaient être
expertisés par des spécialistes externes. Les petits dommages présumés ont fréquemment été réglés sans formalité et sans déplacement, soit sur seule étude du dossier,
ce que l’on appelle « desk adjustment », soit par téléphone,
« telephone adjustment » Dans ces cas-là, ce n’est pas un
expert externe qui a inspecté le sinistre, mais ce sont les
employés du service intérieur qui ont interrogé les clients
par téléphone et qui ont évalué le montant du préjudice.
Tempêtes et ouragans
L’intervention d’experts publics (« public adjusters ») a
entraîné une hausse des limites d’indemnisation
Alors que les experts sinistres externes travaillent sur
ordre de l’assureur et sont rétribués par celui-ci, les
experts publics agissent à la demande des assurés, en
général des clients particuliers, pour leur propre compte et
indépendamment d’une compagnie d’assurances. Leurs
honoraires, qui sont à la charge de l’assuré, sont calculés à
partir du montant d’indemnisation versé par l’assureur.
Pour ce qui est des dommages causés par les ouragans en
Floride, le Department of Financial Services a cependant
limité les honoraires des experts publics à un maximum de
10 % de l’indemnisation, et ceci jusqu’au 14 février 2005.
Souvent, des experts à la retraite ou des anciens rédacteurs sinistres travaillent comme experts publics. Le grand
nombre de dommages causés par les ouragans a attiré
vers la Floride des experts publics venant de toutes les
régions des États-Unis et le Department of Financial Services a établi environ 400 licences d’urgence d’une validité
d’un an. Malheureusement, parmi ces experts se trouvaient également de nombreux auxiliaires jeunes, inexpérimentés et peu qualifiés qui voulaient surtout gagner de
l’argent rapidement.
De manière générale, on constate que l’intervention d’experts publics a entraîné une hausse des limites d’indemnisation. En effet, ceux-ci estiment habituellement – ce qui
est dans leur propre intérêt – la valeur du préjudice à un
montant plus élevé que ne le fait un expert sinistres qui travaille pour un assureur. Dans des cas isolés, ils ont procédé
à des évaluations correspondant à 4 fois celles des experts
Après le passage des ouragans sur la Floride, les
couvreurs étaient particulièrement demandés et
ont pu nettement augmenter leurs tarifs.
22
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
engagés par les compagnies d’assurances. En outre, les
indemnisations augmentent fréquemment du fait que l’intervention d’experts publics retarde le règlement d’un
sinistre, par exemple en raison de longues négociations
entre assuré et expert public d’un côté et assureurs et
inspecteurs-régleurs de l’autre.
Problèmes liés aux franchises et à la répartition des
dommages
Après la catastrophe causée par les tempêtes, de nombreux clients privés ont constaté avec étonnement que leur
assurance Multirisque des bâtiments prévoyait, en sus de
la franchise forfaitaire, une franchise particulière, proportionnellement plus élevée en cas de dommages dus à des
ouragans et allant de 2 à 5 % de la somme assurée par événement. Les franchises prévues en cas d’ouragan avaient
été introduites en 1996, en réaction au cyclone Andrew qui
avait ravagé la Floride 4 ans plus tôt.
L’application d’une franchise proportionnelle avait déjà
plongé certains assurés, qui n’avaient été touchés que par
un seul ouragan, dans des difficultés financières et la situation a donc été encore pire pour les quelque 29 000 assurés
qui ont été frappés à 2 ou 3 reprises par les ouragans, par
exemple dans la région d’Orlando. Car, d’une façon générale, la franchise prévue pour les ouragans doit être appliquée pour chaque événement, c’est-à-dire, dans les cas
susmentionnés, 2 ou 3 fois.
En raison de la succession rapide des ouragans dans une
seule et même région en l’espace de quelques semaines, il
était presque impossible, dans de nombreux cas, de distinguer les dommages les uns des autres lorsqu’un risque avait
été touché par plusieurs tempêtes. Des problèmes sont
apparus, notamment lorsqu’un premier dommage, qui
n’avait pas encore été enregistré, par exemple en raison de
l’absence d’experts ou de la surcharge des assureurs, a été
frappé par l’ouragan suivant.
Tempêtes et ouragans
De nombreux assurés ont documenté leurs propres sinistres et les sinistres avoisinants au moyen de photographies
ou de films vidéo, de sorte que les dommages ont pu être
identifiés ultérieurement. Par contre, si l’expert sinistres ne
parvenait pas à différencier les sinistres, il ne pouvait finalement appliquer qu’une seule franchise. Finalement, plusieurs assureurs de particuliers sont allés jusqu’à renoncer
globalement à l’application de plusieurs franchises, puisqu’on ne pouvait bien souvent plus faire de différence entre
les dommages. En outre, des clients ont souvent prétendu
que le premier ouragan avait tellement endommagé leur
maison que, pour cette seule raison, elle n’avait pu résister
aux ouragans ultérieurs. La pression exercée sur les assureurs a également été renforcée par le directeur du Department of Financial Services, qui a qualifié d’« injuste »
l’application de plusieurs franchises pour les bâtiments
d’habitation privés qui avaient été endommagés par
plusieurs tempêtes.
Mais il est aussi arrivé que certains assurés essayent de
déclarer plusieurs fois un même et unique sinistre en prétendant qu’il avait été causé par différents ouragans. Dans
ce genre de cas, de nombreux assureurs ont préféré faire
de nouveau appel à des experts en sinistres qui connaissaient le risque et le dommage prétendu. D’autres assureurs, en revanche, ont envoyé, à la place d’un expert, un
spécialiste des fraudes. Pour faire face à de pareils cas, il
s’est avéré très utile de procéder, immédiatement après la
survenance du sinistre, à une saisie rapide des déclarations, d’établir une documentation photographique complète – du voisinage également –, d’introduire des mentions
précises dans les dossiers de sinistres et de recourir à un
système permettant de dresser l’historique des sinistres.
Fig. 8 : Hausse des prix de matériaux de construction et des coûts de main-d’œuvre en Floride (exemples)
Prix selon le programme
d’enquête des sinistres
Prix réels en Floride
en décembre 2004
Hausse des
prix de
Toitures
2,86 $US par sq. ft.*
3,25 $US par sq. ft.*
Moquettes
2,44 $US par sq. ft.*
3,75 $US par sq. ft.*
54 %
Placoplâtre
1,74 $US par sq. ft.*
4,00 $US par sq. ft.*
130 %
Travaux de peinture
0,33 $US par sq. ft.*
1,00 $US par sq. ft.*
203 %
L’énorme hausse des prix des matériaux de
construction et des coûts de main-d’œuvre en
Floride après les ouragans de 2004 a entraîné
pour les assureurs une charge d’indemnisation
nettement supérieure à celle qui avait été
envisagée à l’origine.
14 %
*sq. ft. = square feet
1 sq. ft. = 0,09290 m2
23
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Difficile calcul du préjudice total
Pour la majeure partie des compagnies d’assurance, il n’a
pas été simple de procéder à l’estimation de leur préjudice
total. Ce n’est que peu à peu que des résultats correspondant
à la réalité ont été révélés. Il faut cependant constater que le
coût total du sinistre a finalement dépassé la charge originellement escomptée. Il y a pour cela différentes raisons :
– Après le second ouragan, des sociétés indépendantes
d’experts en sinistres ont augmenté leurs tarifs en raison
d'un besoin plus élevé. Quelques assureurs ont également, de leur propre gré, versé aux experts des honoraires plus élevés afin de les fidéliser.
– De même, l’intervention d’experts publics, en majeure
partie à la demande de particuliers, a causé une augmentation de la charge totale que les assureurs devaient supporter.
– Lors de la constitution des provisions pour sinistres à
payer, l’énorme hausse des prix des matériaux de construction et des coûts de main-d’œuvre (qui atteignait parfois 100 % et plus) n’avait bien souvent pas été prise en
compte. Ce sont principalement les couvreurs qui, en raison de la forte demande, ont nettement augmenté leurs
prix. De nombreux assurés ont donc réclamé des prestations supplémentaires, les sommes déjà versées ne suffisant plus à couvrir les frais de réparation.
Tempêtes et ouragans
– En raison de la pénurie de matériaux de construction et
de main-d’œuvre en Floride, les pertes d’exploitation ont
aussi sensiblement augmenté, étant donné que le calendrier des échéances fixé à l’origine ne pouvait plus être
respecté.
– Enfin, de nombreux assurés, qui n'avaient pas de résidence principale en Floride, ont déclaré leurs dommages
relativement tard. Bien souvent, ces personnes, que l’on
appelle les « snowbirds », car ils ne font qu’hiverner en
Floride, ont constaté, des mois après le passage des
ouragans, que leurs résidences secondaires avaient été
endommagées ou entièrement détruites. De la sorte, les
assureurs ont encore reçu, 6 mois après les ouragans,
quelque 8 000 nouvelles déclarations de sinistre par
semaine.
Renforcement profitable des lois de construction ; recours
quasiment impossible pour les assureurs
Le renforcement des lois de construction en Floride après le
passage de l’ouragan Andrew a porté ses fruits. Du côté des
entreprises de construction notamment, il y a encore eu,
juste avant les 4 ouragans, des tentatives visant à obtenir
un assouplissement de la réglementation, sous prétexte
que la dépense supplémentaire était inutile et trop élevée.
Entre-temps, on n’évoque plus cette question, car les bâtiments qui ont été construits selon les nouvelles normes ont
résisté aux tempêtes et subi, en général, tout au plus des
dommages bénins.
Les ouragans ont détruit de nombreuses résidences mobiles, un
genre d’habitation très prisé en
Floride. Emportés par le vent, les
débris de ces maisons construites
de manière simple ont causé des
dommages supplémentaires.
24
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
C’est ce qui explique qu’en fin de compte les assureurs
n’ont eu que peu de possibilité de recours, par exemple
contre les entrepreneurs en bâtiment ou les architectes.
Les bâtiments plus anciens, qui ont été les plus touchés, ne
tombaient pas sous le coup des normes renforcées. Par
contre, si des maisons neuves présentaient des dégâts, il
fallait prouver qu’elles n’avaient pu résister aux vitesses de
vent prévues par les normes. Mais cela était quasiment
impossible, car on pouvait opposer aux assureurs que les
dommages étaient dus à des rafales de vent particulièrement fortes.
Les sociétés d’assurances entamaient également une tentative de recours chaque fois que des dommages avaient été
causés à des maisons voisines par des pans de bâtiment ou
des débris emportés par le vent. De nombreux dommages
de ce genre ont surtout été causés par les résidences mobiles si populaires en Floride. Mais ici encore, il était généralement impossible d’apporter des preuves, de sorte que la
possibilité de recours est restée purement théorique.
Enseignements à tirer de la saison des ouragans en 2004
pour la gestion des sinistres
La succession d’ouragans en Floride a montré que les compagnies d’assurances doivent également tenir compte de
ce genre de gros sinistres dans leurs plans d’urgence. On
pourrait par exemple imaginer une double approche : une
première étape du plan d’urgence pourrait être orientée
sur les conditions d’une catastrophe naturelle moyenne ;
une seconde étape pourrait prendre en considération l’accumulation de catastrophes naturelles sur une courte
période ou la survenance de mégacatastrophes, encore
jamais vues. Du reste, il est recommandé de s’entraîner à
la mise en pratique des plans d’urgence.
Après le passage des ouragans, bien que la situation ait été
nouvelle et extrêmement lourde pour les rédacteurs sinistres – ne serait-ce qu’en Floride, il a fallu traiter 1,6 million
de dossiers individuels dans un temps record en travaillant
7 jours sur 7 –, il importait cependant d’être précis et
rigoureux. En effet, chaque erreur commise est maintes
fois reproduite et, par la suite, ne peut être retrouvée et
corrigée qu’à grand peine en raison de la quantité énorme
des déclarations enregistrées.
Tempêtes et ouragans
L’évolution continue des systèmes techniques de secours
offre de bonnes chances de moderniser et de perfectionner
en permanence la gestion des sinistres. Comme exemples,
nous pouvons citer le système GPS, le téléphone par satellite et l’Internet, qui ont rendu de précieux services pour la
gestion des sinistres dus aux ouragans. Pour de nombreux
assureurs, il s’est révélé avantageux d’utiliser un système
homogène de données, car la double saisie d’informations
recèle le danger d’erreurs supplémentaires et d’un temps
de réponse plus long.
La rapide succession de 4 ouragans sur un même territoire
a également posé des problèmes encore inconnus jusqu’alors pour attribuer correctement certains dommages aux
événements correspondants. Dans la gestion des sinistres,
le facteur temps a acquis une importance supplémentaire.
Ainsi, seuls les assureurs qui avaient enregistré rapidement
les dommages individuels que leurs experts avaient inspectés sans tarder, sont parvenus à faire la distinction entre les
différents sinistres affectant un même risque et à éviter
qu’un seul et même dommage ne soit indemnisé plusieurs
fois.
Après une catastrophe naturelle, il ne faut pas sous-estimer
l’énorme pénurie de rédacteurs sinistres et d’experts, mais
également le manque de matériaux de construction, de
machines et la pénurie d’ouvriers, ainsi que la carence en
eau, en nourriture, en carburant et l’insuffisance de logements intacts. Lorsqu’ils calculent les coûts escomptés, les
assureurs devraient tenir compte de ces facteurs, tant dans
leur plan d’urgence concret que pour évaluer les extrêmes
hausses de prix qui découlent d’une telle situation.
Pour finir, le secteur assurantiel doit s’attendre, après de
grandes catastrophes naturelles, à être l’objet d’un surcroît
de pression provenant des milieux politiques et de l’État
qui, bien souvent, essaient d’intervenir pour représenter
les intérêts des assurés.
25
26
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tempêtes et ouragans
2003 en Corée et au Japon : le typhon Maemi
Dommages
En général, des sinistres tels que le typhon Maemi ne se
limitent pas à un seul pays. La situation géographique
particulière de Taïwan, de la Corée du Sud et du Japon
rend cette région de l’Asie extrêmement sensible aux
catastrophes ; en outre, ces 3 pays possèdent un haut
niveau de développement technique et présentent ainsi
des concentrations de valeur importantes au niveau de
l’économie mondiale.
Lors du passage de Maemi, le Japon s’en est tiré à bon
compte. Seul l’archipel des Ryukyu, dans la préfecture
d’Okinawa, a été violemment touché. Sur l’île de Miyako,
entièrement développée du point de vue touristique, le
réseau d’électricité, par exemple, n’était pratiquement plus
en état de fonctionner. Si Maemi avait suivi une trajectoire
plus à l’est, de nombreuses régions du Japon auraient probablement été fortement touchées.
Événement
En sus des dommages habituels causés par des vitesses
du vent élevées, la Corée du Sud a été dévastée par des raz
de marée et des inondations monstres déclenchées par
des pluies diluviennes qui ont été pour une bonne part à
l’origine de destructions de bâtiments, de structures et de
machines. Plus de 80 % des dommages assurés proviennent des branches Dommages et Transport. Les affaires de
la branche Automobile ont contribué aux dommages pour
une part atteignant près de 18 %. Le reste provenait de différentes couvertures non-Vie (voir fig. 11).
Le 5 septembre 2003, un front de mauvais temps s’est
développé aux abords de l’île de Guam, puis s’est transformé rapidement en une puissante dépression tropicale.
Le 8 septembre, cette dépression a atteint une force de
typhon – Maemi était né. Maemi a continué de gagner en
intensité pour se métamorphoser en supertyphon de catégorie 5 sur l’échelle Saffir-Simpson lorsqu’il a atteint les
îles situées au sud d’Okinawa (archipel des Ryukyu). Sur sa
trajectoire qui le menait vers la Corée du Sud, il s’est légèrement affaibli et a frappé la côte sud de la province de
Kyungsang dans la nuit du 12 septembre. À ce moment-là,
le typhon était dans la catégorie 3 de l’échelle Saffir-Simpson. En l’espace de 6 heures seulement, il avait traversé la
partie sud-est de la République de Corée.
Au début, on a cru que Maemi était l’événement le plus
exceptionnel et le plus violent jamais connu. La vitesse de
ses vents et l’intensité de ses précipitations montrent
cependant que la période de récurrence d’un tel événement est de 10 à 15 ans.
La trajectoire de Maemi est passée par les régions les plus
industrialisées de la Corée : Pusan, Masan et Ulsan. En raison de l’hyperconcentration de valeurs, ces régions présentent une pénétration d’assurance beaucoup plus élevée
que les autres parties du pays. Avec ses nombreux chantiers de construction et ses installations industrielles, cette
zone a connu le plus grand cumul de dommages assurés.
Une caractéristique de ce genre d’événement est le grand
nombre de sinistres individuels, avec toutefois des montants relativement peu élevés. Les seules exceptions ont
été certaines installations portuaires et infrastructures en
chantier, particulièrement exposées.
Fig. 9 : Échelle de Saffir-Simpson pour les tempêtes tropicales
Vitesse moyenne du vent
Catégorie
m/s
km/h
mile/h
Nœud
1
Faible
32,7–42,6
118–153
73–95
64–82
2
Moyen
42,7–49,5
154–177
96–110
83–96
3
Intense
49,6–58,5
178–209
111–130
97–113
4
Extrême
58,6–69,4
210–249
131–155
114–134
5
Catastrophique
69,5–
250–
156–
135–
Classification de l’intensité d’une tempête selon
la vitesse moyenne du vent.
Le 13 septembre 2003, dans le port de Pusan
(au sud de Séoul), le typhon Maemi a fait tomber
les grues comme des allumettes.
27
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Le segment Transport a subi de graves dommages affectant
les polices de construction navale. Rien que dans 3 chantiers navals, 25 grands navires ont été endommagés. D’un
côté, ces faits illustrent bien la vulnérabilité de ce genre
d’installations en cas de tempête. De surcroît, ils mettent en
évidence que nous avons affaire à un problème de cumul
qu’il ne faut pas négliger. Pour le souscripteur, cela signifie
qu’il doit connaître parfaitement ses risques et son portefeuille et qu’il doit savoir adapter sa politique d’acceptation
en conséquence. Pour le gestionnaire de risques de l’assuré, il s’agit d’orienter de façon optimale les étapes de processus de production sur l’exposition et de définir clairement des mesures préventives.
En prenant la Corée comme exemple, l’énumération qui
suit montre de manière concrète les dommages causés par
le typhon Maemi :
– 127 victimes
– 25 000 personnes évacuées/sans-abri
– plus de 5 000 habitations détruites
– 13 000 foyers privés et magasins endommagés
– 465 navires touchés, avariés ou détruits
– 2 raffineries de pétrole ont dû être fermées
– 5 centrales nucléaires ont dû être arrêtées ; 1,4 million de
ménages en ont été affectés.
Rien qu’en Corée, le dommage économique causé par
Maemi a atteint 4,8 milliards de $US. Environ 12 %, soit
557 millions de $US, étaient assurés.
Fig. 10 : Typhon Maemi en 2003
La répartition des pointes de vent
maximales sur la trajectoire de Maemi,
du sud de la Corée en direction nordest. Les raz de marée sur la côte et les
inondations à l’intérieur du pays ont
contribué pour une bonne part aux
charges d’indemnisation.
Source : Groupe de Recherche
Géo Risques, Münchener Rück (2005)
28
Tempêtes et ouragans
Gestion du sinistre
En Corée du Sud, ni le gouvernement ni les assureurs ne s’attendaient à une catastrophe de cette ampleur. Dans un premier temps, certaines compagnies d’assurances étaient débordées, tant sur le plan de l’organisation que du personnel,
et avaient du mal à traiter les déclarations de sinistres. Vu la
quantité d’événements, les effectifs d’inspecteurs-régleurs
ont rapidement été épuisés. Ceci a ralenti l’inspection des
sinistres et, en conséquence, empêché une liquidation
rapide.
La loi coréenne de protection contre les incendies prévoit
une protection automatique contre tous les risques naturels. Jusqu’alors, cette situation ne représentait pas un
problème pour le pays et l’industrie des assurances,
puisque le taux de pénétration de l’assurance et les valeurs
assurées étaient, en particulier dans le domaine privé, relativement faibles. D’après les données connues, le rapport
entre les dommages assurés et les dommages économiques causés par les typhons s’est élevé à 2 ou 3 %.
Outre la possibilité de contracter une assurance, il existe un
programme national de protection, qui procure une aide
financière directe aux personnes concernées. Ce programme
entre en application à partir d’un préjudice économique total
d’1,5 milliard de wons sud-coréens, soit environ 1,3 million
de $US, et/ou de 30 000 sans-abri.
Le rapport dommages assurés/préjudice économique
atteint par Maemi était de 12 %. Les indemnités versées par
l’État se sont élevées à environ 1 400 milliards de wons
(environ 1,2 milliard de $US). En raison de ces expérien-
Fig. 11 : Typhon Maemi :
pourcentage des dommages assurés
Trajectoire du typhon Maemi
Pointes de vent
maximales en km/h
80–100 km/h
110–120 km/h
130–140 km/h
150–160 km/h
210–220 km/h
Dommages matériels
Transport
Automobile
Autres
60,3 %
20,6 %
17,7 %
1,4 %
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
ces, on envisage maintenant un système d’assurance des
risques naturels. En parallèle, on projette d’adapter le
niveau des taux à l’exposition et d’introduire une franchise
généralisée pour les risques naturels.
L’évolution de la sinistralité dans le segment Transport a
montré que les différents chantiers navals constituaient de
fortes concentrations de valeurs et représentaient ainsi,
pendant la saison bien connue des typhons, un risque de
cumul qu’il ne fallait pas sous-estimer. Ceci souligne le fait
que, dans ce segment aussi, le contrôle des cumuls est un
élément essentiel et primordial de la gestion des risques.
Les exploitants de chantiers navals peuvent donc s’inspirer
de cette méthode de gestion afin de réduire le potentiel de
dommages.
1999 en Europe : les tempêtes d’hiver Lothar et Martin
De nombreuses régions européennes ont été complètement
surprises par les tempêtes qui se sont produites en décembre 1999. En France et en Allemagne principalement, ces
événements ont causé des dommages sans précédent. Du
26 au 28 décembre 1999, les tempêtes Lothar et Martin ont
ravagé l’Europe centrale. Elles s’étaient formées au-dessus
des eaux froides de l’Atlantique nord, avaient développé
leur force maximale au-dessus de l’Europe et fini par se
dissiper 2 ou 3 jours plus tard. Lothar a atteint sa plus
basse pression (961 hPa) dans les alentours de Paris. Une
montée de l’intensité des vents au-dessus des terres n’avait pas été annoncée. Dans l’intérieur du pays, l’ouragan
Lothar a atteint des pointes de vent de 180 km/h et, sur les
sommets des Alpes, il a même soufflé en rafales de 250
km/h. Le diamètre de l’ouragan mesurait presque 300 km.
Des millions de façades et de fenêtres ont été
endommagées par les tempêtes d’hiver en 1999.
Tempêtes et ouragans
Les dommages causés par Lothar ne pouvaient être évités,
car les météorologues avaient sous-estimé la tempête :
soit on ne l’avait pas annoncée du tout, soit on l’avait
annoncée, mais en pronostiquant des vitesses de vent trop
faibles. C’est pourquoi beaucoup de personnes ont été
surprises aussi bien par la violence de l’ouragan que par
l’ampleur des dommages.
200 km plus au sud, la tempête Martin a traversé la France
en soufflant en rafales de 150 à 190 km/h. Sa plus basse
pression étant de 964 hPa, elle n’atteignait pas tout à fait
celle de l’ouragan Lothar.
Une semblable superposition de 2 tempêtes s’était produite en janvier et février 1990 avec le passage de Daria et
Herta. Les dommages assurés engendrés par ces ouragans
s’étaient élevés alors à environ 8,5 milliards d’€. Cependant, les vents de Lothar et de Martin ayant soufflé à des
vitesses nettement supérieures, les dommages causés ont
atteint de nouveaux niveaux record, notamment en France
et en Allemagne.
Dommages
À elle seule, la tempête Lothar a causé des dommages économiques de près de 11,5 milliards d’€, dont 50 % étaient
assurés. Vu les quelque 2,4 millions de sinistres individuels, cela correspond à un montant moyen d’environ
2 500 € par sinistre. L’endroit dévasté le plus connu a été le
parc d’attraction Disneyland Paris, qui, en raison des
dégâts matériels, a dû fermer ses portes le lendemain de
Noël.
Dans presque tous les cas, des toits ont été
endommagés et certains ont même en partie été
déclarés pertes totales.
29
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
C’est surtout en France que la tempête Martin a causé des
dégâts, mais elle a également sévi en Espagne, en Suisse et
en Italie, causant la mort de 30 personnes. Le montant total
des dommages économiques s’est élevé à 4 milliards d’€,
celui des dommages assurés à 2,5 milliards d’€ pour 1 million
de sinistres individuels. Pour la tempête Martin, le montant
moyen du sinistre a également atteint environ 2 500 €.
Au total, les tempêtes d’hiver ont coûté la vie à 140 personnes en 1999. Le montant des dommages économiques s’est
élevé à 15,5 milliards d’€, celui des dommages assurés à
8,4 milliards d’€ pour 3 millions de sinistres individuels. Par
rapport à une seule tempête, les tempêtes d’hiver ont
engendré, en France, le plus grand montant de dommages
assurés de toute l’histoire du pays. Sur les 96 départements,
69 ont été déclarés zones sinistrées.
Les bourrasques, les débris emportés par le vent et les arbres abattus ont endommagé de nombreuses infrastructures telles que routes et lignes de chemin de fer, mais également lignes téléphoniques, lignes à haute tension et de
surface appartenant à des entreprises industrielles ou
étatiques.
Pour le seul territoire français, environ 3 millions de sinistres individuels ont été enregistrés, la plupart concernant
des bâtiments d’habitation. À Paris, 60 % des toits ont été
endommagés et environ 6 000 des 175 000 arbres déracinés.
Pour 95 % des risques, les dommages ont touché les toitures,
pour 35 % les murs extérieurs. On a déploré d’autres dommages principalement aux cheminées, aux antennes, aux fenêtres et à des millions d’arbres. Dans une analyse effectuée sur
place, Risk Management Solutions (RMS) a constaté que les
bâtiments datant de la fin des années 1980 et du début des
années 1990 présentaient plus de dommages que les édifices
plus anciens datant des années 1960 et 1970.
En outre, on a constaté que les hautes cheminées, qui
dominent habituellement les bâtiments anciens, avaient
causé, en s’écrasant, d’autres dommages aux toitures. De
surcroît, quand les toitures n’étaient pas bien entretenues,
des dégâts s’étaient également produits.
De même, les entreprises industrielles ont été fortement
touchées. En sus des toitures et des façades, ce sont principalement les lignes électriques de surface qui ont été détériorées. 3,5 millions de foyers ont été privés d’électricité à
la suite de la chute de près de 300 pylônes électriques, en
raison de câbles arrachés et de transformateurs grillés. La
plus importante société française de distribution d'énergie
a estimé ses propres dommages à 2,5 milliards d’€ et a
parlé d’actions de grande envergure pour minimiser et éliminer les dégâts. Pour effectuer les opérations de rétablissement du réseau, une armée de 100 000 techniciens, dont
certains venant d’entreprises de construction européennes, une flotte de 400 hélicoptères et un groupe de 6 000
30
Tempêtes et ouragans
sapeurs sont intervenus. Plus de 600 km de câbles de remplacement ont dû être acheminés d’autres pays par un
pont aérien. En outre, de nombreuses entreprises ont rappelé leurs employés en congés ou en retraite anticipée. On
a prié les collègues de revenir au bureau. Ce n’est qu’à la
mi-janvier que la situation est redevenue normale et que
pratiquement tous les branchements fonctionnaient de
nouveau.
Une grande entreprise française de télécommunication a
déclaré un sinistre de 150 millions d’€, le plus grand sinistre individuel assuré. De nombreux bâtiments avaient été
touchés et près de 500 000 pylônes abattus. À la fin de
l’année, plus d’1 million d’usagers n’avaient pas de ligne
téléphonique en état de fonctionner. L’entreprise a effectué
assez tard la déclaration de ce gros sinistre et, quelques
mois plus tard, a dû relever de presque 100 % sa première
estimation. En sus de l’absence d’un système approprié de
contrôle des dommages, c’est surtout une hausse de 300 %
des prix des matériaux de réparation et des coûts de maind’œuvre qui a conduit à cette correction.
Les bâtiments publics ont également été touchés par les
tempêtes. Selon les estimations, près de 10 % des écoles
ont été endommagées. À Paris et en banlieue, par exemple, certaines écoles étaient dévastées à 60 %. Sur la côte
Atlantique, des ondes de tempête ont détruit des embarcations mouillées dans les ports, des automobiles en stationnement, des digues et des habitations situées à proximité.
Gestion du sinistre
Comme les 2 tempêtes s’étaient produites dans les limites
de la clause de 72 heures, habituellement appliquée, une
controverse est née au sujet du texte des polices et des
estimations du SMP. En définitive cependant, les tempêtes
ont été définies par le marché des assurances comme
2 événements indépendants. Une conséquence de ces plus
de 3 millions de sinistres individuels survenus de manière
inattendue a été la pénurie d’experts. Vu la quantité de
petits sinistres, certains assureurs ont effectué le règlement sans avoir recours à des experts.
Juste après le passage des tempêtes, certains assureurs
Dommages étaient débordés par l’affluence des déclarations de sinistre. Afin de créer des capacités, par exemple,
les dommages non couverts n’ont pas été saisis sur ordinateur et des employés venus d’autres branches ont été
adjoints au service de règlement des sinistres de la branche Dommages. Parfois, des badauds avides de sensation
ont considérablement gêné l’accès aux lieux sinistrés et
retardé les travaux de déblaiement. Ceci a perturbé, entre
autres, l’intervention du Service allemand d’assistance
technique ( « Technisches Hilfswerk » ) qui venait porter
secours avec 2 000 collaborateurs.
Des constructions légères, comme ce chapiteau à
Munich, ont été des proies faciles pour la tempête
Lothar en décembre 1999.
Les jours fériés de Noël, et les vacances scolaires ont eu,
pour l’industrie des assurances, une répercussion positive,
surtout sur les sinistres de pertes d’exploitation, car de
nombreux dommages ont pu être réparés pendant ces
journées-là.
Vous trouverez de plus amples informations dans notre
brochure « Tempêtes d’hiver en Europe » (2001).
31
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Séismes
Les géologues estiment que la terre tremble environ 20 000 fois par
an. Tous les 2 à 3 jours survient un séisme d’une intensité atteignant
au moins 6 sur l’échelle de Richter et pouvant occasionner de lourds
dommages. Les enseignements tirés des tremblements de terre d’Izmit, en Turquie, et de Kobe, au Japon, offrent des critères utiles pour
la gestion des sinistres découlant de catastrophes de cette ampleur.
1999 en Turquie : le séisme d’Izmit
1999 a été l’année des grandes catastrophes naturelles.
Rien qu’en Turquie, presque 18 000 personnes sont mortes
lors de violents séismes qui ont sévi aux mois d’août et de
novembre. Le préjudice économique a été énorme et a pesé
sur la croissance de l’économie turque durant plusieurs
années.
Événement
Le 17 août 1999 à 3 h 02 (heure locale) est survenu, à une
latitude Nord de 40,7° et une longitude Est de 30°, un séisme
de magnitude 7,4 sur l’échelle de Richter. Le foyer sismique
était situé à quelque 17 km de profondeur et à environ 90 km
au sud-est d’Istanbul, dans le golfe d’Izmit. La secousse
principale du 17 août a été suivie de centaines de répliques,
dont la plus forte a ébranlé le sol le 13 septembre 1999
(magnitude 5,9), faisant encore au moins 10 victimes et plus
de 300 blessés.
Ce séisme n’a pas frappé la région de façon totalement
inattendue. Cette zone est connue pour être une « lacune
sismique », autrement dit une région à probabilité d’occurrence accrue. Un peu plus à l’ouest se trouve une autre
lacune.
Dommages
Cette série de secousses telluriques dévastatrices se
traduit en chiffres comme suit :
– Préjudice économique :
– Dommages assurés :
– Morts :
32
12 milliards de $US
600 millions de $US
17 200
Dans l’ensemble, l’ampleur des dévastations a été à l’échelle des dégâts auxquels on peut s’attendre face à un
séisme de cette intensité dans des régions proches du foyer
sismique. À l’exception, toutefois, des nombreux effondrements totaux qui étaient dus à la très mauvaise qualité de la
construction des bâtiments d’habitation en Turquie. Des
déplacements de sol et des tassements ont aussi été à l’origine de très gros dégâts. Les bâtiments effondrés – comme
tous les immeubles récents en Turquie – avaient été conçus
et construits suivant des normes leur permettant en principe de résister aux tremblements de terre. Elles correspondent en majeure partie au « Uniform Building Code » californien. Le fait que des immeubles à plusieurs étages n’ont
pas résisté aux secousses sismiques et ont été détruits
vient de ce que le code de construction parasismique n’a
pas été strictement appliqué, faute aussi de surveillance
durant les travaux.
Du point de vue assurantiel, les séismes entrent dans la
catégorie des cumuls, pour lesquels non seulement plusieurs branches sont touchées, par exemple les branches
Dommages ou Risques techniques, mais aussi divers
domaines de l’industrie. Les secousses destructrices qui
ont frappé la Turquie ont surtout affecté l’industrie lourde
et l’industrie pharmaceutique, le secteur automobile, la
fabrication du papier et des pneus, les industries de l’acier
et du ciment ainsi que l’industrie pétrochimique. L’incendie
de la raffinerie de Tupras a constitué le plus gros sinistre
individuel (150 millions de $US) et aussi le premier incendie d’une raffinerie de pétrole consécutif à un tremblement
de terre depuis 1992.
L’infrastructure, elle non plus, n’a pas été épargnée. En très
peu de temps, le séisme a paralysé les systèmes de distribution d’eau et d’électricité et a dévasté docks, ouvrages portuaires, ponts et routes. Cela a occasionné pour les assureurs et les réassureurs des coûts substantiels en assurance
Dommages, notamment lorsqu’il existait des garanties Pertes d’exploitation.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Route endommagée dans le port de Gölcük.
Trois jours après le séisme, la raffinerie de Tupras,
près de Korfez, brûle encore.
Les sapeurs-pompiers luttent contre le feu qui
ravage les réservoirs de la raffinerie de Tupras.
Sinistre partiel chez un fabricant de pneus à
Izmit.
De nombreuses maisons situées le long de la
côte, entre Gölcük et Yalova, se sont écroulées.
Dégâts caractéristiques sur un bâtiment doté
d’un rez-de-chaussée de construction souple : les
piliers ont cédé et la maison s’est effondrée.
Séismes
33
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Séismes
Gestion du sinistre
1995 au Japon : le séisme de Kobe
La zone sinistrée a offert un spectacle de désolation après
la première vague de secousses telluriques. Des problèmes
massifs de communication sont encore venus aggraver la
situation.
Le Japon est situé sur une des zones sismiques les plus
actives du monde. Les petites secousses n’y sont presque
plus prises en compte, et l’amélioration des techniques de
la construction donne au public un sentiment de sécurité.
Pourtant, l’exemple de Kobe a montré que ce risque naturel
est insidieux et, de ce fait, fort préoccupant : contrairement
à d’autres risques naturels, celui-ci est pratiquement imprévisible et une mise en garde est quasiment impossible.
Rappelons-le, le séisme est survenu la nuit, peu après 3 h.
Bien que les informations soient parvenues tôt le matin, il
a été impossible de contacter les collaborateurs des entreprises d’assurance concernées durant 1 ou 2 jours. Cela
s’explique, entre autres, par le fait que le nombre de victimes était très élevé et que, dans la capitale aussi, beaucoup de personnes étaient personnellement affectées par
la catastrophe ; par ailleurs, la défaillance du réseau d’alimentation en courant électrique et le chaos généralisé de
la circulation ont empêché que l’on puisse prendre contact
avec les personnes compétentes. Ce n’est que 3 ou 4 jours
plus tard que les premiers interlocuteurs ont de nouveau
été joignables. La zone touchée n’était généralement pas
accessible. Seuls les secours turcs ou internationaux
avaient le droit de se rendre sur les lieux. Les experts en
sinistres et les experts d’assurance n’ont pu examiner la
zone sinistrée qu’une semaine ou 15 jours plus tard.
Événement
Le Japon a fait cette triste expérience le 17 janvier 1995,
lorsqu’un terrible séisme est venu frapper la ville de Kobe et
les préfectures voisines de Hyogo et d’Osaka. À 5 h 46, un
séisme, qui a duré 20 secondes, a ravagé la ville. Ce court
espace de temps a suffi pour changer complètement la
physionomie de la ville et transformer la vie de ses habitants.
L’épicentre du séisme était situé à une profondeur de 13
km, environ à mi-chemin entre l’île de Awaji et la ville de
Kobe, par 34,65° de longitude Nord et 135,18°de latitude
Est. Sa magnitude a atteint 7,2 sur l’échelle de Richter. Cela
correspond à la magnitude 7 sur l’échelle d’intensité japonaise à 7 degrés. Jamais auparavant, le Japon moderne
n’avait été la proie d’une force destructrice aussi intense.
Fig. 1 : Carte sismotectonique du sud du Japon
Plaque eurasienne
Tokyo
Kobe
Plaque du
Pacifique
Awaji
1944
MTL
Plaque des Philippines
1946
Risque sismique pour Kobe : 2 plaques entrent ici en
collision, la plaque eurasienne et la plaque des Philippines. Après la survenance des séismes en 1944/1946,
on avait supposé que le risque de tremblement de terre
portait essentiellement sur la zone nord se trouvant à la
frontière des plaques. Les zones de cette frontière qui
ont subi une rupture en 1944/46 sont hachurées en
rouge. Le risque sismique semblait faible pour la région
de Kobe qui, de ce fait, n’était pas préparée au tremblement de terre de 1995.
Source : http://www.seismo.unr.edu
34
Épicentre du séisme de 1995
Zones de rupture du séisme de 1944/46
Frontière des plaques
MTL
Median Tectonic Line
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Séismes
La ville de Kobe compte environ 1,5 million d’habitants et
est située à quelque 200 km au nord de la fosse océanique
de Nankaï qui marque la frontière entre la plaque eurasienne et la plaque des Philippines. Les surfaces hachurées
en rouge (figure 1) constituent des parties de la zone de
frontière entre les plaques qui se sont déjà rompues lors
des séismes de 1944 et 1946. En outre, la Median Tectonic
Line (MTL), une faille horizontale comparable à celle de de
San Andreas, en Californie, est localisée à 60 km au sud de
Kobe.
On peut localiser exactement le système de faille en se
basant sur les épicentres des répliques survenues durant
les 2 premiers jours. La zone de rupture du séisme de Kobe
s’étend de la partie nord de l’île Awaji jusqu’à la baie
d’Osaka et le long de Honshu jusqu’au sud de Kobe. Les
conséquences catastrophiques du séisme sont dus à ce
que la secousse principale s’est produite en plein sur la
faille ArimaTakatsuki.
Étant donné l’éloignement relativement important de grandes failles telles que la MTL, le non-spécialiste se demande
comment un événement comme celui de Kobe a pu se produire. Les modèles de microfissuration nous donnent ici
une explication. Le schéma 2 fait apparaître les frontières
de fissuration pour la région Kobe-Osaka. Kobe est localisée directement au-dessus de la ligne tectonique ArimaTakatsuki qui constitue la portion Nord-Ouest du microbloc
d’Osaka. Ce bloc est limité au sud par la MTL. On suppose
que le système de faille Arima-Takatsuki est à l’origine du
grand tremblement de terre de Hanshin, comme on appelle
aussi au Japon le tremblement de terre de Kobe. Cela se
trouve confirmé par l’enregistrement des répliques représentées dans le schéma 3.
Vu l’activité sismique relativement faible de la faille ArimaTakatsuki – le dernier gros séisme survenu dans cette zone
datait de 1596 –, personne ne s’attendait à un séisme de
cette ampleur. Cela explique aussi les difficultés rencontrées au début pour maîtriser la catastrophe. Notamment
les champs de compétence entre les autorités locales, le
gouvernement national et les organisations humanitaires
internationales n’étaient pas clairement délimités. Bien
que le « Large-Scale Countermeasure Act » du gouvernement réglemente depuis 1978 les mesures d’urgence en
cas de gros tremblement de terre, il n’en a tout d’abord pas
été fait application. Motif : ces mesures destinées à sauvegarder les vies et les valeurs matérielles n’entrent en jeu
que pour les gros séismes qui surviennent dans des
régions sismiques spécialement enregistrées comme
zones sismiques. Jusqu’alors, seules la ville de Tokyo et la
région de Tokai étaient considérées comme exposées,
Kobe n’était absolument pas prévue dans la liste.
Fig. 2 : Failles dans la conurbation Osaka-Kobe
Fig. 3 : Répliques de 1995
0
Dommages
20 km
ATL
Osaka
Kobe
Kobe
UF
RF
Osaka Bay
OB
F
Nojima F.
Awaji
MTL
Le dernier gros séisme a eu lieu
dans cette région en 1596. Cela
explique que le risque sismique y ait
été malheureusement sous-estimé.
Collines et montagnes
Sols alluviaux/plaine
RF
OBF
UF
ATL
MTL
Rokko fault system
Osaka Bay fault
Uemachi fault
Arima Takatsuki Tectonic
Line
Median Tectonic Line
On peut localiser exactement le
système de faille en se basant sur les
épicentres des répliques survenues
durant les 2 premiers jours. Les
conséquences catastrophiques du
séisme sont dus au fait que la
secousse principale s’est produite en
plein sur la faille Arima-Takatsuki.
Épicentres des répliques
Source : wwweic.eri.u-tokyo.ac.jp/
db/jma/index.html
Épicentre du séisme
de 1995
35
Le port artificiel de Port Island quelques semaines
après le séisme. Les postes à quai étaient inutilisables et les rails des grues étaient détruits. Un an
plus tard, le port était reconstruit à près de 80 %.
Les chiffres ressortant du bilan de Kobe reflètent l’effroyable ampleur de cette catastrophe naturelle :
– Morts :
> 6 000
– Blessés :
> 40 000
– Dommages aux bâtiments causés par le séisme :
> 390 000
– Dommages aux bâtiments dus aux incendies consécutifs
au séisme :
> 6 000
Au total, la catastrophe a occasionné un préjudice économique représentant 100 milliards de $US. Seule une infime
partie de cette somme, environ 3 milliards de $US, était
assurée.
Des dégâts massifs dus à la liquéfaction des sols ont affecté
particulièrement le port à conteneurs de Kobe. Les 35 postes à quai pour conteneurs ont été paralysés en l’espace de
quelques secondes. Les îles artificielles de Rokko Island et
de Port Island, notamment, ont subi des tassements représentant parfois 3 m (moyenne atteinte pour Rokko Island :
1,6 m) et il y a eu des déplacements du sol dans la zone
littorale artificielle qui ont atteint par endroits plus de 5 m.
36
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Kobe était jusqu’alors le sixième port à conteneurs du
monde, et il était à craindre que le séisme ait effacé ce
centre de transbordement de la carte mondiale des ports de
chargement. D’après les premières estimations du gouvernement, les frais de reconstruction se situaient autour de
1 400 milliards de ¥ (environ 12,8 milliards de $US).
Grâce à un planning de construction prévoyant et à de
solides fondations de piliers, les constructions ont été largement épargnées par le séisme, notamment dans la partie
centrale des îles artificielles. Cependant, les dégâts survenus aux systèmes d’approvisionnement ont été considérables. Des effondrements complets ou des dommages massifs aux structures porteuses d’immeubles d’habitation,
à usage commercial ou de bâtiments industriels se sont
surtout produits dans une zone étroite parallèle à la faille
active. De vastes incendies ont en outre entièrement détruit
des blocs d’habitation notamment dans des régions à forte
densité de population. Les facteurs combinés – construction
à grande densité, rues étroites et nature des matériaux de
construction utilisés – ont permis au feu de se propager
rapidement. De plus, les actions de secours immédiates et
ultérieures ont été entravées par la défaillance et l’effondrement de l’infrastructure. La part des incendies dans le sinistre total a cependant représenté moins de 10 %.
En particulier dans le district de Hanshin, les voies principales de circulation (rues, rails, métro) passent toutes dans
un étroit corridor de 3 km de large. Elles constituent le long
de la baie d’Osaka l’axe principal de communication pour
les transports de marchandises et de personnes entre l’est
et l’ouest du pays. C’est aussi là que s’est produit l’effondrement spectaculaire de l’autoroute de Hanshin sur une
Cet appontement dans le port à conteneurs de
Kobe a été littéralement soulevé par les forces
telluriques.
Séismes
longueur de quelque 650 m. Dans cette zone, vu l’exiguïté,
plusieurs routes et voies de chemin de fer sont en surélévation. Le séisme ne les a pas épargnés : 320 ponts et plus
de 9 400 tronçons de voies ont été endommagés ou
détruits. De plus, de nombreuses routes secondaires ont
été bloquées par les décombres de maisons effondrées ou
suite à des affaissements consécutifs à des éboulements
dans les zones de circulation du métro.
Tous les systèmes vitaux d’approvisionnement et d’évacuation (électricité, eau, gaz, téléphone, eaux usées, etc.)
étaient presque complètement paralysés, environ 1 million
de personnes ont été privées d’électricité. Toutefois, en
l’espace de 24 heures, la moitié était de nouveau approvisionnée par le réseau et, une semaine après, les autres
foyers restés intacts étaient de nouveau alimentés.
Et cela, grâce à l’étroite coopération des centrales de
production d’électricité, qui ont aidé à la reconstruction
moyennant d’immenses efforts et des moyens techniques
exceptionnels.
La distribution d’eau pour les quelque 3,4 millions d’habitants de Kobe et des préfectures limitrophes a été
défaillante à 85 %. Cela a considérablement handicapé les
opérations d’extinction. D’innombrables ruptures de
conduites, difficiles à localiser, ont occasionné des goulots
d’étranglement au niveau de l’approvisionnement de la
population. Il a fallu environ 5 semaines pour arriver à
réparer presque 90 % des dommages. Avant le séisme, la
ville de Kobe avait déjà mis au point, pour un approvisionnement de secours, un système appelé « two-supply pond
system ». L’alimentation se fait ici par l’intermédiaire de 2
retenues. En cas de tremblement de terre, une commande
Les obstacles dangereux et volumineux comme
les décombres, les câbles électriques ou les
conduites de gaz béantes ont gêné les actions de
secours. Par mesure de prévention, beaucoup de
canalisations d’alimentation de gaz sont munies
de soupapes de coupure, mais ces dernières ne
fonctionnent pas toujours.
37
38
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
électronique permet de stopper l’écoulement d’une retenue. La réserve en eau ainsi obtenue est censée suffire
pour alimenter Kobe durant une semaine. Ce système a
fonctionné comme prévu de sorte qu’il y a tout d’abord eu
suffisamment d’eau pour tout le monde. Mais la répartition
via le réseau de conduites n’a pas été possible, car diverses canalisations avaient éclaté. Cependant, l’intervention
de plus de 2 000 techniciens et d’environ 840 engins-citernes a permis de résoudre le problème.
Sur le plan commercial, ce sont surtout les fabricants de
chaussures en plastique qui ont subi les plus gros dégâts.
Leurs installations ont été détruites à 90 % par le séisme et
les incendies qui lui ont succédé. Jusque-là cette branche
de l’industrie couvrait environ un dixième du marché japonais de la chaussure. Les fabricants de saké, boisson nationale très appréciée des Japonais, ont aussi été durement
frappés. Avant le séisme, les 50 fabricants de saké de Kobe
produisaient environ un tiers du saké consommé au Japon.
Gestion du sinistre
Pour l’assurance des immeubles d’habitation contre le
risque de tremblement de terre, on peut tirer de la catastrophe de Kobe des enseignements d’ordre général, utiles
pour la gestion des sinistres : en principe, le programme
d’assurance d’État, auquel tous les assureurs locaux sont
rattachés, couvre les bâtiments d’habitation au Japon. Les
mutuelles offrent des solutions alternatives, mais elles ne
prennent pas en charge les risques de tremblement de terre
Séismes
dans le centre des villes. C’est la General Insurance Association of Japan (GIAJ) qui coordonne la gestion des sinistres pour le programme d’État. Cette société intègre tous les
assureurs et les experts en sinistres pour les catastrophes
causées par des tremblements de terre. Il est clairement
défini comment les sinistres doivent être traités et classés,
ce qui permet une gestion relativement rapide et simple.
Le séisme de Kobe a donné l’occasion de tester ce système, qui a dû être adapté dans différentes phases, notamment sur le plan de l’indemnisation.
Dans le détail, le programme d’assurance d’État couvre 2 domaines : les bâtiments d’habitation et les biens mobiliers – il
est donc comparable à une assurance Multirisque Habitation
normale. L’indemnisation se fait en 3 étapes, suivant qu’il s’agit d’un sinistre total, d’un demi-sinistre ou d’un sinistre partiel. Comme le fait apparaître le tableau suivant, le montant
de l’indemnisation est fonction du taux d’endommagement.
Ce programme est en place depuis le tremblement de terre
de Niigata en 1964. Les plafonds d’indemnisation ont été relevés en plusieurs étapes et adaptés dans la formule de garantie ; au moment du séisme, ils étaient fixés à 10 millions de ¥
(93 000 $US) pour les bâtiments et à 5 millions de ¥ (46 500
$US) pour les biens mobiliers. Ces montants n’ont pourtant
couvert qu’une fraction des dommages occasionnés par la
catastrophe. Sous le poids de la pression publique, ces limites ont dû encore être relevées, et représentent à l’heure
actuelle respectivement 50 millions de ¥ (465 000 $US) et
10 Millions de ¥ (93 000 $US).
Fig. 4 : Le programme d’assurance de l’État au Japon
Dommages aux biens
Bâtiments
Sinistre total
Dommage/réparation
structure porteuse > 50 %
de la valeur du bâtiment
(valeur de marché) ou surface utile perdue > 70 % de
la surface utile totale
Demi-sinistre
Dommage/réparation
structure porteuse > 20 % et
< 50 % de la valeur du bâtiment (valeur de marché) ou
surface utile perdue > 20 %
et < 70 % de la surface utile
totale
Sinistre partiel
Dommage/réparation
structure porteuse > 3 %
et < à 20 % de la valeur du
bâtiment (valeur de marché) ou inondation du rezde-chaussée consécutive à
un séisme/45 cm au-dessus
du niveau du sol
Contenu
Dommage au contenu
> 80 % de la valeur de
marché
Dommage au contenu
> 30 % et < 80 % de la valeur
de marché
Dommage au contenu
> 10 % et < 30 % de la valeur
de marché
Indemnisation
100 % de la S.A.
Tremblement de terre*
50 % de la S.A.
Tremblement de terre*
5 % de la S.A.
Tremblement de terre*
* Somme assurée Tremblement de terre
= 30–50 % de la somme assurée Incendie,
mais ne pouvant dépasser la limite
d’indemnisation.
Le système d’indemnisation de l’assurance
Tremblement de terre au Japon pour les
bâtiments et leur contenu.
En 1995, le tremblement de terre de Kobe a
complètement détruit l’autoroute de Hanshin
sur une longueur de 650 m.
Source : EQ Insurance in Japan
39
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Le modèle japonais montre que la coordination ciblée et la
façon de procéder pour le règlement des sinistres a des
retombées positives : les sinistres de masse sont réglés
rapidement et équitablement.
La sécurité des bâtiments joue depuis toujours un rôle très
important au Japon. C’est le premier pays à avoir introduit,
en avril 1919, à l’échelle nationale, un code de la construction portant sur la planification de constructions parasismiques. Les paramètres en matière de conception se sont
améliorés au cours des décennies, surtout sur la base de
données nouvelles acquises après la survenance de gros
séismes. D’importantes modifications sont intervenues en
1982. Malgré ces progrès, une grand nombre de structures
et de bâtiments existants comportent de gros déficits eu
égard à la résistance aux secousses telluriques, et ce pour
les raisons suivantes :
– structure correspondant à des normes anciennes
– non-respect des normes de sécurité en vigueur
– négligence dans l’exécution des travaux
On observe malheureusement cette tendance négative
dans de nombreux pays, et même dans les pays riches. La
situation pourrait être améliorée grâce à un contrôle efficace effectué par une autorité compétente lors de la construction de bâtiments et pour les opérations de réfection
imposées par la loi. Eu égard aux aspects sécurité, ces
mesures devraient figurer tout en haut sur la liste to-do.
Les taux de pénétration de l’assurance au niveau des
risques commerciaux et industriels étaient très faibles en
1995. D’où la difficulté d’apprécier la gestion des risques
du point de vue assurantiel. Cependant, si l’on compare les
biens et les industries concernés, on constate ce qui suit :
les bâtiments et les installations industrielles modernes,
conformes aux normes parasismiques après la réforme du
code de la construction en 1982, se sont généralement
révélés être nettement plus stables que les constructions
40
Séismes
plus anciennes. En même temps, les dommages subis
par les bâtiments plus vétustes ont été plus importants
que prévus. Le séisme a généré des arrêts d’exploitation
considérables dans la branche commerciale et industrielle. Le plus souvent, les pertes économiques ont été
supportées par les entreprises elles-mêmes, étant donné
qu’habituellement, sur le marché local, les interruptions
d’exploitation ne sont pas assurées. On peut en conclure
que ce genre de garanties, en cas de supercatastrophes,
peuvent devenir problématiques pour les assureurs et
les réassureurs.
Le tremblement de terre de Kobe a montré que des
mesures telles qu’une planification complète, une gestion de la qualité et un contrôle technique des travaux
constituent des composants essentiels pour un management d’urgence efficace. C’est de cette façon que l’on
peut le mieux prendre en compte les expositions
connues. Il devrait en être fait application dans toutes les
régions exposées aux tremblements de terre.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Inondations
Les inondations constituent les causes naturelles de sinistres catastrophiques les plus fréquentes. Dans le monde entier, environ un
tiers de tous les événements enregistrés et un tiers des dommages
économiques sont générés par les inondations. Et il n’y a pas que
les événements centennaux qui constituent des défis particuliers
pour le management des sinistres.
2002 en Europe : les inondations
Fig. 1 : Les inondations en Europe en 2002
Événement
Au cours des premières semaines du mois d’août 2002,
des inondations massives ont eu lieu dans toute l’Europe,
de la péninsule ibérique à la mer Noire, de l’Écosse au Sud
de l’Italie. Le bilan humain a représenté quelque 400 morts.
Les plus gros dommages ont été enregistrés à l’est de
l’Europe centrale : certaines parties de l’Allemagne, de
l’Autriche et de la République tchèque ont été dévastées,
plusieurs jours durant, par de violentes chutes de pluie qui
ont provoqué des inondations catastrophiques dans les
régions du Danube et de l’Elbe. Sur certains affluents des
fleuves Kamp (Autriche), et Wießeritz (Saxe), les débits ont
atteint l’intensité de périodes de retour de plus de 500 ans.
Les inondations ont été d’une telle gravité que de gros
dommages sont survenus non seulement à proximité des
fleuves, mais aussi là où on ne se serait normalement pas
attendu à un aléa d'inondation. D’énormes dégâts ont été
occasionnés notamment par les crues de type torrentiel
qui, par exemple dans les monts Métallifères, ont transformé de petits ruisseaux en fleuves impétueux. Dans bien
des cas, il a même fallu constater que les pertes étaient
totales. L’Elbe a atteint en 2002 des niveaux d’eau sans précédent. La crue a abîmé plusieurs digues qui se sont rompues à une bonne douzaine d’endroits. Les unités de prévention des catastrophes ont lutté plusieurs jours contre
l’eau, car de larges étendues étaient inondées ; elles ont
sauvé des vies humaines et essayé de parer au plus pressé.
Zone sinistrée
El
Pays touchés
be
Fleuves en crue
Bassins versants
Elbe
Danube
Allemagne
République
tchèque
Da
nu
be
Slovaquie
Autriche
Hongrie
Les inondations du mois d’août 2002 ont affecté
en Europe centrale les bassins versants du
Danube et de l’Elbe. La zone sinistrée est
hachurée en vert.
Dommages
Il n’est pas exagéré de considérer l’événement du mois
d’août 2002 comme une crue d’occurrence centennale. Cela
a incontestablement représenté – en chiffres absolus – la
catastrophe due aux inondations la plus coûteuse que l’Europe ait jamais connue. Rien que dans les 3 pays évoqués, le
préjudice économique a représenté au total presque 18
milliards d’€, dont à peine un cinquième était assuré.
41
Dresde, le 17 août 2002 : la prise de vue aérienne
permet de voir l’étendue des inondations. La
place située devant l’opéra Semper (au centre de
la photo) et la cour intérieure du Zwinger (en bas)
étaient totalement envahies par les eaux qui atteignaient une hauteur de 9,4 m.
L’Allemagne a été le pays le plus gravement touché par la
catastrophe. Environ les deux tiers des dommages dus aux
inondations sont survenus sur le sol allemand, dont environ les trois quarts en Saxe et à Dresde, sa capitale.
On a enregistré plus de 140 000 avis de sinistres en Allemagne. Le coût total des dégâts assurés s’est chiffré à environ
1,8 milliard d’€ et la charge moyenne des sinistres a représenté quelque 12 000 €. Presque 87 % des dommages relevaient de l’assurance Dommages (contenu, bâtiment
d’habitation, assurances des biens commerciaux et industriels). 12 % d’entre eux grevaient l’assurance Automobile,
et le reste impactait essentiellement l’assurance Transport.
42
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Inondations
En République tchèque, selon les informations de l’association nationale des assureurs, presque 78 000 sinistres ont
généré un coût total de dommages assurés s’élevant à
quelque 1,2 milliard d’€. Le sinistre moyen représentait ainsi
environ 15 000 €. Un tiers des dommages s’est focalisé sur
Prague, la capitale, où, entre autres, le métro a été inondé.
L’ampleur des inondations était telle que même les moyens
de protection contre les inondations mis en place temporairement le long des fleuves n’ont pas permis de juguler vraiment les dommages.
Dégâts à l’infrastructure et dommages industriels
C’est l’infrastructure qui a le plus souffert des inondations.
En Allemagne, les masses d’eau ont détruit 180 ponts et
740 km de routes. Rien qu’en Saxe, la compagnie des chemins de fer allemands a enregistré une perte (partielle ou
totale) de 540 km de rails, 130 km de remblais, 240 postes
d’aiguillage, 94 ponts et 200 gares. Le coût total du sinistre
s’est chiffré à environ 1 milliard d’€.
La situation n’était pas beaucoup plus réjouissante pour le
métro pragois : 13 stations inondées par la crue et 35 km
de tronçons de voie étaient noyés sous les eaux. Les
exploitants ont évalué le sinistre à un montant se chiffrant
au moins à plusieurs dizaines de millions d’€, et les travaux
de réparation ont duré 6 mois. L’eau a pénétré dans le système du métro non seulement d’en haut, par la rue, mais
aussi d’en bas, par des joints défaillants ou des gaines
pour câbles et tuyauteries.
Comme en République tchèque, un certain nombre d’exploitations industrielles étaient inondées, avec un niveau
d’eau atteignaient parfois 2 mètres, les dégâts matériels
ont également été accompagnés d’importants sinistres
de pertes d’exploitation. Ainsi, une grande exploitation
chimique a subi des dommages dus aux inondations se
chiffrant à plusieurs dizaines de millions d’€. D’autres
entreprises, par exemple une firme de télécommunication
allemande, ont subi des pertes dont le montant a dépassé
100 millions d’€.
République tchèque : des zones industrielles
entières étaient sous l’eau qui atteignait par
endroits un niveau de 2 m. Les parcs de réservoirs et les installations électriques ont été particulièrement détériorés par les inondations.
Dommages aux bâtiments
Les sinistres les plus dramatiques sont survenus le long
des petits cours d’eau, dans le bassin versant de l’Elbe.
Dans la région des monts Métallifères, l’eau a enfoncé des
murs, sapé des fondations et a provoqué ainsi l’écroulement total de certaines maisons. Après les crues, de nombreux bâtiments étaient tellement endommagés qu’ils
n’ont pas pu être sauvés ou réparés.
Dans le quartier de Karlin, dans la vieille ville de Prague,
ainsi qu’à Dresde et dans d’autres villes, l’eau en s’écoulant a détérioré un grand nombre d’immeubles qui sont
devenus inutilisables ; ceci étant dû, entre autres, à l’humidité, aux boues polluées et parfois à un manque de stabilité statique. À la suite de mesures préventives défaillantes, certains réservoirs d’hydrocarbures qui fuyaient ont
provoqué une série de dommages de contamination. Les
boues laissées par les crues, contaminées par le pétrole ou
des bactéries, ont du être évacuées. La moisissure qui
s’était formée dans nombre de bâtiments mal séchés a
Fig. 2 : Bilan des inondations survenues en 2002 (en milliards d’€) :
Préjudice total
Dommages assurés
Pourcentage assuré
Allemagne
11,5
1,8
16 %
Autriche
3,1
0,4
13 %
République
tchèque
3,0
1,2
40 %
Les inondations du mois d’août
2002 ont constitué – en chiffres
absolus – la catastrophe due aux
inondations la plus coûteuse que
l’Europe ait jamais connue. Les
dommages assurés se sont élevés
au total à 3,4 milliards d’€.
Source : Groupe de Recherche
Géo Risques, Münchener Rück
(2005)
43
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
occasionné d’autres dommages consécutifs aux inondations. La fermeture de ces immeubles a généré diverses
interruptions d’exploitation.
Inondations
Fig. 3 : Dommages liés aux inondations : le coût des
sinistres est fonction du niveau d’eau
20
Les eaux souterraines, qui étaient remontées à la surface,
ont en partie impacté massivement la statique des bâtiments, ce qui a augmenté le coût total du sinistre. Le flottement, les inclinaisons et les fissurations ont généré des
problèmes de stabilité statique ou des pertes de stabilité,
suivis dans certains cas de l’écroulement des constructions. Pour réduire les dommages, on a en partie inondé
volontairement des caves afin d’équilibrer les charges de
pression sur le bâtiment et pour éviter aussi que les masses d’eau qui s’écoulaient détériorent la structure des
constructions. Toutefois, il a souvent été nécessaire d’appliquer des mesures supplémentaires pour préserver la
stabilité statique, ce qui a fait sensiblement augmenter les
coûts de sinistres.
Les innombrables dommages aux constructions le montrent clairement : il est impératif de prendre en compte
l’éventualité d’une crue dans le planning de construction.
Un grand nombre de bâtiments étaient par exemple construits directement au bord de rivières de moyenne montagne, presque au même niveau que le cours d’eau ou dans
des vallons. La situation a également été aggravée par les
facteurs suivants : construction ne prenant pas en compte
les risques, ne prévoyant pas de moyens d’étanchement
ou avec des cuvelages de cave non étanche, utilisation ne
tenant pas compte des risques, comme l’aménagement
coûteux d’une cave.
La figure 3 fait apparaître l’interdépendance de la hauteur
d’eau (en centimètres) et du coût de sinistre (en pourcentage) par rapport à la valeur du bâtiment pour la cave et
le rez-de-chaussée. La ligne critique est indiquée en pointillés, entre cave et rez-de-chaussée, les valeurs situées
dans la zone d’habitation au-dessus du sol étant habituellement beaucoup plus élevées. On peut ici limiter au préalable les dégâts en transportant les biens de valeur dans
les étages supérieurs.
Gestion du sinistre
Avant que les fleuves ne débordent, plusieurs sociétés
d’assurance ont essayé de développer et de coordonner
les opérations de règlement de sinistres en mettant en
place des groupes de gestion des situations d’urgence. Il
était prévu qu’une équipe centrale ait des pouvoirs étendus pour mettre en place les premières mesures d’urgence
et réunir les flux d’informations. On a pu ici mettre aussi à
profit les expériences faites lors du changement de millénaire et desquelles on avait beaucoup appris pour le maintien de la conduite d’une exploitation et la gestion des
situations d’urgence. Les techniques d’approche proactives ont largement aidé à maîtriser les sinistres de masse et
les problèmes d’infrastructure.
44
Sinistre
(1 000 €)
15
Préjudice total
10
Biens
mobiliers
5
Biens immobiliers
Bâtiments et
installations
extérieures
A
Cave
0
30
60
90
120
Rez-de-chaussée
Hauteur d’eau en cm
150
180
210
30
60
90 120
Source : Bayer. Landesamt für
Wasserwirtschaft 1989
La courbe fait apparaître l’interdépendance de la
hauteur d’eau (en centimètres) et du coût de
sinistre (en pourcentage) par rapport à la valeur
du bâtiment pour la cave et le rez-de-chaussée.
Certaines sociétés avaient déjà auparavant adapté leurs
systèmes informatiques afin de pouvoir effectuer le règlement des sinistres de masse et mettre au point des formulaires simplifiés destinés par exemple au règlement des
dommages aux bâtiments. Leur objectif était, dans le cas
d’une accumulation de dommages, de permettre à leurs
clients et à leurs collègues, sur place, un règlement de
sinistres rapide, homogène et de haut niveau. Ces sociétés
ont aussi été les premières à être en mesure d’apprécier
correctement les sinistres.
Le fait que certaines compagnies aient mis en place des
équipes spéciales pour le règlement des gros sinistres
s’est aussi avéré efficace. Ces équipes étaient composées
d’experts en sinistres, d’ingénieurs et de juristes ayant
pour tâche d’effectuer un règlement rapide et optimal des
sinistres importants. La gestion des dommages a également été facilitée par le fait qu’au départ les sinistres ont
été documentés à l’aide d’une caméra.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Inondations
Problèmes lors de l’ouverture des dossiers de sinistres
Au cours des premiers jours qui ont suivi les inondations,
les déclarations de sinistres ne sont parvenues que très
lentement auprès des compagnies. D’une part, l’infrastructure étant détruite, les informations ne pouvaient pas circuler rapidement ; d’autre part les assurés avaient tout d’abord d’autres mesures d’urgence importantes à prendre. À
cela est venu s’ajouter le fait que certains assurés n’avaient
plus de documents contractuels justificatifs, leurs immeubles ayant été inondés. Les installations centrales de traitement des données des entreprises d’assurance étaient en
partie noyées sous les eaux.
De plus, le travail des assureurs a été problématique du fait
que pour les crues du mois d’août, il n’existait pas de base
d’appréciation empirique comme c’est le cas pour les tempêtes ou les tremblements de terre. Il leur a donc fallu
apprécier les premiers dommages ad hoc, en se fondant
sur la dimension macroéconomique et le préjudice économique supposés.
Une station de métro dans la vieille ville de Prague
après les terribles inondations d’août 2002 : les
marques sur les vitres permettent encore de se
faire une idée du niveau des eaux. L’infrastructure
de la ville a été fortement touchée, les zones
inondées du métro n’ayant pu être remises en
service que plusieurs semaines plus tard.
À l’avenir, il se pourrait que les systèmes d’information
géographique, ce que l’on appelle les portefeuilles géocodés, jouent un rôle majeur dans l’appréciation des sinistres
liés aux catastrophes naturelles. Plus d’informations à ce
sujet dans notre chapitre consacré au géocodage.
Durant ces inondations catastrophiques, les assureurs ont
pu difficilement contrôler les insuffisances d’assurance.
Par suite d’un manque de personnel, les divers cas n’ont
souvent pu être analysés que longtemps après. Cela a parfois provoqué le mécontentement des assurés. Une solution pratique pour résoudre ce dilemme a consisté à faire
intervenir des experts en sinistres et des experts comptables externes qui ont examiné à un stade encore précoce
du sinistre les éventuelles insuffisances d’assurance.
Dommages consécutifs et limitation de l’importance du
sinistre
En matière d’inondations, les sinistres dus à l’humidité ou à
la corrosion jouent un rôle important. Pour atténuer les
dégâts, autrement dit éviter ou limiter la corrosion, il s’est
avéré très utile de faire appel à des entreprises de nettoyage
et d’assainissement des locaux. Les spécialistes ont rapidement nettoyé les bâtiments et effectué le sauvetage et le nettoyage des installations et appareils endommagés. Ces entreprises spécialisées ont mobilisé jusqu’à 500 collaborateurs
répartis dans toute l’Europe pour venir à bout des sinistres.
Il s’est cependant avéré que de nombreux assurés ne
savaient pas quelles étaient les premières mesures à prendre
pour éviter les dégâts de corrosion et de moisissure. Il serait
bon de les sensibiliser suffisamment tôt dans ce domaine. Il
serait aussi judicieux d’établir déjà dans le contrat-cadre un
lien avec les entreprises spécialisées chargées de réparer les
dégâts d’eau, afin qu’en cas d’urgence, on puisse faire appel
à elles moyennant un prix fixé au préalable.
De bonnes initiatives pour combattre la fraude
À l’occasion de cette crue du siècle, il a aussi fallu éclaircir
certains cas de fraude éventuelle. Le problème s’est notamment posé toutes les fois qu’un assuré déclarait la perte de
valeurs assurées élevées dans sa cave.
Ainsi, en République tchèque, des mesures préventives
internes de lutte contre la fraude fournissent des exemples
positifs : certains paiements des inspecteurs-régleurs ont
été effectués suivant un système prévoyant 2 signatures.
En outre, on a veillé à ce que les personnes chargées de
l’instruction du sinistre ne soient pas du pays.
Les contrôleurs ont aussi été méfiants lorsque les dommages déclarés étaient survenus en dehors des zones réputées sinistrées. Dans de tels cas, les sinistres ont fait l’objet
d’un traitement particulièrement minutieux permettant
d’exclure sans ambiguïté les présomptions de fraude.
45
Tendances et solutions possibles
De la check-list à la gestion des sinistres
Les catastrophes naturelles décrites précédemment
fournissent aux sociétés d’assurance des informations précieuses sur lesquelles elles peuvent
s’appuyer pour gérer les autres événements du
même type qui se produiront à l’avenir. Le chapitre
suivant propose des solutions supplémentaires en
présentant des techniques spéciales et des instruments de travail, allant de la check-list aux plans
d’action.
Mise sur orbite du système de satellites Galiléo
par l’étage supérieur de la fusée Ariane 5.
Galiléo est l’équivalent européen du système
américain GPS.
46
47
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Géocodage
Un haut niveau de transparence dans la souscription est un préalable
nécessaire pour une gestion efficace des risques et des sinistres dans
la branche des assurances. Les informations géocodées sont particulièrement bien adaptées pour répondre à ces exigences. On peut
en outre y avoir recours pour démasquer les fraudeurs de l’assurance.
La transparence est le préalable indispensable
Beaucoup de spécialistes de l’assurance ne savent pas
encore très exactement ce que recouvre la notion de géocodage ou de géoréférencement. Cette méthode est pourtant depuis longtemps la base sur laquelle peuvent s’appuyer les souscripteurs pour identifier les risques, les
analyser et les rendre assurables.
Le principe de base du géocodage est en fait assez simple ;
il s’agit de faire la liaison entre les banques de données et
les cartes géographiques. Ce sont les données de portefeuille et de sinistres des assureurs directs qui constituent
le fondement de la souscription géographique. Le géocodage, c’est-à-dire la localisation d’un risque dans l’espace,
associe à l’adresse de l’assuré ou au lieu du sinistre un
couple de coordonnées géographiques (longitude et latitude). Ces informations peuvent être ensuite utilisées pour
un traitement statistique ou pour des analyses de risque
complexes, dès lors qu’elles sont combinées à d’autres
données, comme, par exemple, des données météorologiques ou des sinistres historiques.
Les données géocodées permettent d’effectuer des analyses de portefeuilles, des modélisations et de définir des
scénarios. Elles constituent une base essentielle de prise
de décision pour la souscription et la gestion des risques,
car on peut, grâce à elles, identifier les cumuls chez les
assureurs et les réassureurs. Cela comprend également les
risques de cumuls dans les polices dites polices collectives
ou polices master qui sont courantes dans les grands
groupes ou dans les sociétés de construction d’immeubles. En effet, les adresses de référence indiquées dans les
données de portefeuilles sont souvent celles des bureaux
de la société de gestion, alors que les polices collectives
couvrent plusieurs dizaines ou centaines de risques individuels situés à des endroits divers. Les risques d’accumula-
Fig. 1 : L’ouragan Lothar en décembre 1999
Champ
des vents
en km/h
20
30
40
50
60
70
80
90
100
110
120
130
140
150
Identifier les potentiels de cumuls
Le géocodage peut être réalisé à plusieurs degrés de précision : on peut se baser sur des États entiers, des villes, des
secteurs de code postal ou des adresses précises. Dans de
nombreux cas, un géocodage approximatif, effectué au
niveau des États ou des Länder, est insuffisant. De même,
le système de classification des risques par zonage
CRESTA (www.cresta.org), fréquemment utilisé dans l’assurance Dommages, est souvent trop imprécis pour la gestion des sinistres. Il n’est pas assez exact pour reconnaître
les sinistres ou les modèles de sinistres très localisés ou
concentrés sur un périmètre limité, ou pour effectuer un
contrôle fiable des localisations des risques à forte exposition ou à haute concentration de valeurs, par exemple les
installations industrielles ou les surfaces potentiellement
inondables.
48
En combinant les données relatives
aux champs des vents et les informations des polices avec adresses géocodées, on peut identifier des modèles de sinistre et évaluer rapidement
les sinistres probables.
En jaune : immeubles exposés à
des vents de plus de 80 km/h
En bleu : immeubles exposés à des
vents de moins de 80 km/h
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Géocodage
tion sont donc parfois difficiles à identifier ou sont mal évalués. Grâce à des informations géographiques précises
indiquant les adresses exactes, il devient facile de reconnaître les polices collectives et de les décomposer en
objets individuels. Il est même souvent possible de déterminer le montant exact de l’engagement de chaque risque
en particulier. Si ceci n’est pas le cas, on peut toujours arriver à calculer un engagement moyen par bien.
Mettre en évidence les modèles de sinistre
Tous les fournisseurs de services de géocodage utilisent
des données rassemblées à l’origine pour la navigation
aérienne et la planification routière. Un grand nombre de
centres nationaux de relevés topographiques ont, en outre,
commencé à collecter et à proposer des coordonnées
exactes au niveau de chaque construction. Les informations géocodées ont un degré de couverture particulièrement élevé dans les grands pays industrialisés, notamment aux États-Unis et en Europe. Des données de cette
précision existent déjà pour les marchés asiatiques. On
peut également faire appel, via l’Internet, à des services
extérieurs qu’il est possible d’intégrer dans le paysage
informatique spécifique de l’entreprise. Accessoirement,
ces informations peuvent servir à contrôler l’exactitude
des données de base des clients et être utilisées pour des
mesures ciblées de géomarketing – un avantage bien
entendu exclusivement réservé aux assureurs directs.
Exemple : dommages causés par les tempêtes
Pour déterminer l’exposition d’un portefeuille d’assurance
au risque de tempête, on peut comparer le portefeuille
avec les informations disponibles concernant les champs
des vents d’un événement. La figure 1 montre qu’après la
tempête Lothar, en décembre 1999, il a été possible d’identifier tous les bâtiments qui avaient été exposés à des
vents supérieurs à 80 km/h (marqués en jaune) ; en mettant
en relation les champs des vents (zones marquées en
rouge) et les bâtiments en portefeuille, c’est-à-dire des
centaines de milliers de risques individuels.
Les adresses de risque géocodées servent à élaborer des
modèles et des profils de sinistres possibles pour les portefeuilles et les périls naturels ; ils permettent d’autre part
de calculer des scénarios. De même, ces données contribuent à éclaircir toutes les questions en rapport avec la
survenance d’un sinistre.
Si les données des événements météorologiques actuels
sont de bonne qualité, les combinaisons de données, de
plus en plus détaillées, peuvent même aider à évaluer
rapidement et de manière précise le montant de sinistres
attendu pour un portefeuille. Pour optimiser encore davantage le règlement des sinistres et le travail des experts, on
peut faire ressortir les régions touchées par les plus gros
sinistres.
Fig. 2 : Conséquences de l’inondation d’août 2002
La gestion des risques peut être
considérablement améliorée en
combinant les données météorologiques actuelles et les données des
inondations avec les informations
des portefeuilles.
Rayures rouges : zone inondée
Points rouges : risques isolés au
niveau d’un bâtiment
Triangles verts : dommages au
niveau d’un bâtiment
En jaune : zones de code postal et
chiffres des codes postaux
49
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Géocodage
Le géocodage apporte également une aide précieuse pour
éclaircir les cas de fraudes locales à l’assurance.
Reconnaître les sinistres via les satellites et se défendre
des fraudes
Exemple : dommages causés par les inondations
Le système allemand de zonage des inondations, des fortes
pluies et des refoulements d’eau, ZÜRS, fonctionne également à partir de données de géocodage des adresses. Il
représente, pour le marché mondial, une base d’évaluation
uniforme dont on ne pourrait plus se passer aujourd’hui
dans la branche assurance Dommages. Pour la première
fois, les assureurs peuvent automatiquement combiner des
informations précises sur les risques liés aux inondations
avec les adresses exactes des risques des clients.
Les images satellitaires étant de plus en plus précises et les
satellites de plus en plus nombreux, les assurances sont
donc aidés par le ciel, au sens propre du terme. Un assureur ayant reçu un avis de sinistre survenu à l’aéroport de
Munich en a fait l’expérience. La déclaration de sinistre
faisait état d’avions endommagés par des rafales de neige
mélangée à des graviers. Des photos satellite, prises par
hasard au moment du sinistre, ont prouvé que la cause
déclarée n’avait pas pu être à l’origine du sinistre.
Le géocodage améliore la gestion locale des sinistres
Le détail d’une photo satellite, à la figure 2, montre les
suites de l’inondation d’août 2002 en Allemagne et met en
évidence l’énorme potentiel d’analyse des données géocodées des adresses.
Les données satellite montrent les limites de la zone inondée, marquée en rayures rouges. Les risques isolés sont
représentés avec des points rouges et les avis de sinistres
avec des triangles verts. Les lignes jaunes délimitent les
zones de code postal, montrant par cet exemple l’inexactitude de ce référencement géographique pour la gestion
des sinistres, car il ne permet pas de délimiter exactement
les objets touchés ou ceux qui ne le sont pas, ce qui rend
l'évaluation des potentiels de sinistres difficile.
L’inconvénient des prises de vue par satellite est, actuellement encore, que les nuages font écran et rendent de nombreux systèmes aveugles. D’autre part, la durée de révolution des satellites empêchent d’assurer une observation
constante.
Le géocodage, combiné avec des photos satellite très
récentes et traitées spécialement, est aussi utilisé pour des
contrôles dans le domaine de l’agriculture. À partir de 2007,
la société RapidEye (www.rapideye.de) exploitera un système assisté par satellite qui pourra offrir des services et
des analyses aux assureurs agricoles. Ce système devrait
permettre d’améliorer les prévisions en matière de rendements agricoles et d’évaluer non seulement plus précisément mais aussi plus vite les dommages causés aux récoltes et les pertes dues à la grêle, aux tempêtes, à la
sécheresse et au gel.
Les avis de sinistres (triangles verts) mettent par contre en
évidence certains modèles de sinistres dans la mesure où
des localisations précises issues du géocodage ont été utilisées. Ces informations sont en même temps une aide précieuse pour la gestion des sinistres. Le graphique fait clairement ressortir les sinistres connus se trouvant à l’extérieur
de la zone de dommages concernée et les cas douteux peuvent ainsi être rapidement éclaircis.
Les effets climatiques sont
clairement reconnaissables sur ces
parcelles agricoles. La photo
montre au mois de mai des
dommages partiels dus à la grêle et
en juin de grandes surfaces sinistrées à cause de la sécheresse.
avril
50
mai
juin
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Géocodage
L’aide qui vient du ciel
Les assureurs qui opèrent dans la branche Transport – un
domaine particulièrement touché par la fraude – peuvent
espérer profiter du système de localisation ponctuelle
qu’offrent la technologie GPS (Global Positioning System)
et le futur système européen Galileo. Le système de « vessel tracking » permet de savoir de manière détaillée où se
trouvent les risques mobiles, telles les flottes de navires ou
de véhicules, y compris leurs précieuses cargaisons.
Le traitement des sinistres, en particulier après de grandes
catastrophes naturelles, pourrait, à l’avenir, être effectué
par une utilisation combinée des systèmes GPS et des données de géocodage. Actuellement déjà, il serait tout à fait
possible, du point de vue technique, d’équiper les inspecteurs-régleurs de Palm ou de PDA (Personal Digital Assistant), ces appareils contenant non seulement les principales données géocodées des clients, mais aussi une petite
unité GPS permettant une localisation précise.
Les systèmes de localisation assistés par satellite facilitent
non seulement la recherche des adresses des clients et des
sinistres, mais ils permettent de prévenir les fraudes
puisque l’expertise se concentre, non pas sur le bien le
plus gravement endommagé de toute une rue, mais très
exactement sur le bien de l’assuré. Ce type de cas est fréquent dans les régions sévèrement touchées par des tempêtes et dans lesquelles il est impossible de s’orienter.
Du point de vue technique, les outils électroniques sont
déjà une réalité. Notre rôle, en tant que sociétés d’assurance, est d’exploiter les possibilités offrant le plus grand
potentiel de réduction des sinistres.
Une unité Palm avec récepteur
GPS intégré (www.garmin.de).
L’appareil contient des données
cartographiques et des adresses
de clients pouvant être utilisées
après de grandes catastrophes
naturelles.
Sources
Schadenspiegel 1/2005 : Les informations géographiques permettent
de résoudre des cas de sinistres
complexes. Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft (éd.).
Versicherungsbetrug – Neue
Methoden – Effizientere Abwehrtechniken (2005) : Mehr Schadentransparenz durch Geokodierung.
Münchener RückversicherungsGesellschaft (éd.) (n’existe qu’en
allemand).
Geo Bit 1/2004 Rendite und Risiko
(n’existe qu’en allemand)
Topics geo – Rétrospective des catastrophes naturelles survenues
en 2004 (2005) : Les informations
géocodées permettent d’améliorer
la transparence des sinistres –
Münchener RückversicherungsGesellschaft (éd.).
Topics Geo – Rétrospective des
catastrophes naturelles survenues
en 2003 (2004) : La souscription
géographique : applications dans
la pratique, Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft (éd.).
Topics – Rétrospective des catastrophes naturelles survenues
en 2002 (2003) : Le « point » sur les
risques : la souscription géographique améliore-t-elle la gestion
des risques ? Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft (éd.).
51
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Fraude
Après une catastrophe naturelle, les compagnies d’assurances sont
en général submergées d’avis de sinistres. Dans cette situation
d’exception, accentuée encore par la pression des délais serrés exigés
pour le règlement des sinistres et en raison de l’énorme charge au
niveau de l’organisation, les assureurs doivent en outre faire preuve
d’une grande vigilance pour reconnaître les tentatives de fraude.
Le problème
Les données ci-dessous donnent une idée concrète de
l’ampleur du problème : selon plusieurs études américaines, environ 10 % des déclarations de sinistres en assurance Dommages et RC sont frauduleuses. Aux États-Unis,
la fraude à l’assurance occupe le deuxième rang des crimes économiques, précédée seulement de la fraude fiscale. L’office américain se consacrant à la lutte contre la
fraude en assurance, National Insurance Crime Bureau
(NICB), indique qu’aux États-Unis, en assurances Dommages et RC, environ 30 milliards de $US sont versés par an
en raison de déclarations frauduleuses. La fédération allemande des assureurs, Gesamtverband der Deutschen Versicherungswirtschaft (GDV), estime qu’en Allemagne les
sinistres résultant d’une fraude à l’assurance s’élèvent à
plus de 4 milliards d’€ par an. Suivant une estimation prudente, il semble donc que, dans le monde entier, plus de
100 milliards de $US soient payés pour des prestations
d’assurance dérivant de fraudes.
Pour l’industrie des assurances, l’un des grands problèmes
réside dans le fait que la fraude à l’assurance est un délit
relativement bien accepté dans la société. En d’autres termes, un trop grand nombre de personnes considèrent la
fraude à l’assurance comme une peccadille ou comme un
délit ne faisant pas de victime. Une enquête neutre, réalisée à la demande de l’Association of British Insurers (ABI)
en 2002, a fait apparaître que presque la moitié (48 %) des
personnes interrogées déclaraient qu’elles seraient prêtes
à réclamer des dommages et intérêts à une assurance à
partir d’une fausse déclaration. 7 % ont même avoué avoir
déjà fait de fausses déclarations de sinistres, ce qui signifie
qu’apparemment, en Grande-Bretagne, plus de 3 millions
de personnes ont déjà escroqué leur assurance ou essayé
de le faire. En Allemagne, la situation n’est pas beaucoup
52
plus brillante. Une enquête a montré que près de la moitié
des personnes interrogées considéraient la fraude à l’assurance comme un délit anodin. 22 % ont même déclaré
qu’elles trouvaient normal de demander aux assurances
des prestations basées sur une fausse déclaration, si cela
ne se répétait pas régulièrement.
Après une catastrophe naturelle, le nombre des dommages individuels est tellement énorme que la tentation est
grande pour les assurés de présenter des demandes
frauduleuses, supposant que les inspecteurs-régleurs des
assurances ont devant eux des piles de dossiers de dommages qu’ils ne peuvent pas étudier dans le détail.
Définitions
L’industrie des assurances parle de catastrophe chaque
fois qu’un événement entraîne des dommages matériels
assurés d’un montant correspondant à un minimum fixé
et qu‘un grand nombre d’assurés et d’assureurs sont touchés. L’unité Property Claims Services (PCS) de l’American
Insurance Office (ISO) qualifie un événement de catastrophe lorsque les dommages matériels assurés dépassent 25 millions de $US. Ces définitions ne sont toutefois
pas d'une grande aide face au problème de la fraude traité
dans ce chapitre. Le facteur déterminant n’est pas ici le
montant des dommages, mais bien plus le nombre exceptionnellement élevé des sinistres individuels, auquel se
trouve confrontée l’industrie des assurances à la suite
d'ouragans, de tornades, d’inondations, de tremblements
de terre ou de feux de brousse.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
La définition juridique exacte de la fraude dépend bien
entendu du système juridique en vigueur. Dans le droit
coutumier anglo-saxon, la définition faisant référence se
base sur le jugement de principe Derry v. Peek datant de
1889. Selon cette décision, on considère qu’il y a fraude
lorsque des faits sont déclarés intentionnellement de façon
erronée ou si l’auteur de la déclaration ne croit pas à la
véracité des faits ou les présente de façon inexacte avec
une indifférence évidente.
Les éléments constitutifs de la fraude sont cependant à peu
près similaires dans la plupart des systèmes juridiques. Il
faut, en premier lieu, prouver que les faits ont été déclarés
sciemment de façon erronée, cette fausse déclaration ayant
été faite par écrit, oralement ou par acte concluant. Un simple
avis, un jugement de valeur ou des pronostics ne peuvent pas
être considérés comme des faits. La fraude sous-entend en
outre une action intentionnelle. En ce qui concerne le règlement des sinistres, il faut souligner qu’une fausse déclaration
non intentionnelle des faits ne représente pas en soi un délit.
Il faut de plus que la personne voulant tromper ait effectivement réussi à duper l’autre partie. La fausse déclaration des
faits doit finalement avoir entraîné une mise à disposition de
capital, qui à son tour est à l’origine d’un dommage immatériel. Dans le cas d’une fraude lésant un assureur, la fausse
présentation des faits dans la déclaration de sinistre entraîne
en règle générale une prestation d’assurance injustifiée
réduisant le patrimoine de l’assureur.
Les différents types de fraudes à la suite de catastrophes
naturelles
Fraude
Le bateau disparu
En septembre 2003, l’ouragan Isabel a atteint les côtes de
Caroline du Nord et s’est dirigé ensuite vers le nord-ouest en
traversant la Virginie. Isabel a causé au total des dommages
de 5 milliards de $US, les dommages assurés s’élevant à
1,7 milliard de $US. Le propriétaire d’un luxueux bateau de
plaisance a voulu profiter de l’occasion et a déclaré un
dommage à son assurance. Il a prétendu que le bateau avait
coulé après s’être détaché de ses amarres pendant la tempête. Dans sa déclaration de sinistre, il affirmait que les
amarres du yacht avaient été renforcées avant la tempête.
Après le passage de l’ouragan, il avait voulu contrôler l’état
de son yacht mais celui-ci avait disparu. Quelques jours plus
tard, le bateau qui avait soi-disant coulé était retrouvé dans
un entrepôt au lieu de travail de l’assuré, où il avait visiblement été transporté. Les collaborateurs de la division Fraude
à l’assurance (Insurance Fraud Division) de la police de l’État
de Virginie ont découvert le bateau après avoir reçu des
informations de la société d’assurance.
Ce type d’escroquerie à l’assurance est certes relativement
rare, mais les montants d’indemnité réclamés sont en général élevés. Selon l’enquête du ABI citée plus haut, 37 % des
personnes interrogées affirmaient qu’elles n'écartaient pas
l’idée de déclarer à leur assurance un cas de sinistre totalement inventé et 29 % d’entre elles étaient d’avis qu’il s’agissait d’une façon d’agir acceptable ou tout du moins tolérable. Seulement 2 % avouaient avoir déjà commis une fraude
de ce type. D’après cette enquête, les personnes interrogées
estiment qu’une fausse déclaration n’est pas plus répréhensible qu’un vol en magasin.
La fraude peut prendre les formes les plus diverses. Après
des catastrophes naturelles, les principaux scénarios de
fraude, qu’il s’agisse de tentatives ou de fraudes réellement réalisées, se présentent essentiellement sous les
formes suivantes – cette énumération n’étant toutefois pas
exhaustive :
Le dommage simulé
Ce premier type de fraude comprend les cas où aucun dommage n’a eu lieu en réalité. Les circonstances du sinistre
sont totalement inventées et les biens soi-disant détruits
n’ont jamais existé. L’assuré n’a donc subi aucun dommage.
Un port de plaisance sur la côte est des ÉtatsUnis en Virginie, après le passage de l’ouragan
Isabel – un seul bateau est sorti indemne de la
tempête.
53
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Fraude
Le dommage provoqué intentionnellement
Le dommage adapté aux conditions de la police
Un type de fraude classique est le dommage provoqué
volontairement. Dans ce genre de cas, l’assuré déclenche
intentionnellement le dommage, comme par exemple dans
le cas d’un incendie volontaire. Il subit donc effectivement
un dommage qu’il a toutefois délibérément causé.
La troisième variante de fraude à l’assurance englobe les cas
dans lesquels l’assuré a effectivement subi un dommage en
raison d’un événement fortuit. Le dommage n’étant pourtant
pas couvert conformément au libellé de la police, le déroulement du sinistre est exposé à l’assureur de telle façon que le
dommage puisse encore entrer dans la garantie.
La voiture cabossée
La grêle imaginaire
En juillet 1984, un terrible orage de grêle de 20 minutes a
causé des dommages matériels de plus de 1,5 milliard d’€
dans la région de Munich, les dommages assurés représentant 750 millions d’€. De toute son histoire, l’industrie
allemande des assurances n’avait jamais connu de sinistre
d’une telle ampleur. Des grêlons gros comme des balles de
tennis ont endommagé des bâtiments, cassé des fenêtres,
brisé des serres et abîmé au total 240 000 véhicules. Les
dommages aux véhicules assurés ont coûté environ 460
millions d’€, pour réparer les pare-brises éclatés et les carrosseries parsemées de bosses. Un propriétaire de véhicule particulièrement futé voulait profiter du règlement de
sinistre rapide et sans formalité des assureurs après la
tempête de grêle et a lui-même fait des bosses sur sa voiture espérant recevoir une indemnisation de son assurance Tierce partielle. Sa tentative a néanmoins échoué car
il avait fait les bosses en tapant au marteau de l’intérieur.
Le propriétaire d’un magasin dans le Midwest des ÉtatsUnis a déclaré un sinistre à son assurance, affirmant que le
toit de sa maison avait été fortement endommagé par un
violent orage de grêle. De l’eau avait donc pénétré dans le
bâtiment, abîmant les murs et le mobilier. D’après la police
d’assurance, les dommages au contenu dus à la pluie n’étaient couverts que si l’eau de pluie avait pénétré dans le
bâtiment en raison d’un événement naturel, par exemple si
le vent ou la grêle avaient provoqué des dommages au toit
ou aux murs extérieurs. L’expert sinistres s’est informé
auprès des services météorologiques pour vérifier l’origine
du sinistre. Ceux-ci ont révélé qu’il y avait effectivement eu
un orage de grêle dans la région, mais justement pas à
l’endroit où se trouvait l’immeuble assuré. Le dommage au
toit qui avait permis à la pluie de pénétrer dans la maison
était en fait dû à l’état général de délabrement du bâtiment.
Comme dans le premier exemple, ce type de fraude à
l’assurance se caractérise en général par des demandes
d’indemnisation élevées. Mais ici aussi, heureusement,
en comparaison avec les autres formes de fraude à l’assurance, le nombre des cas est restreint.
Contrairement aux 2 premiers types, cette forme de fraude
à l’assurance est très fréquente. Dans l’ensemble, les
indemnités réclamées sont cependant relativement peu
élevées.
La tempête de grêle qui s’est abattue sur Munich
en juillet 1984 a endommagé 240 000 véhicules,
les dommages aux véhicules assurés se sont
montés à environ 460 millions d’€. Les vitres ont
éclaté, les carrosseries étaient pleines de bosses
et les toits des cabriolets étaient en lambeaux.
En cas de sinistre, les services météorologiques
peuvent donner des indications exactes sur la
progression régionale d’une tempête ou d’un
orage de grêle.
54
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Le dommage exagéré
La forme de fraude la plus fréquente, qui se retrouve dans
toutes les branches d’assurance, est certainement d’exagérer
une demande de dédommagement existante envers l’assureur. La personne lésée subit donc réellement un dommage,
survenu en raison d’un événement fortuit et dont la cause est
couverte par la police, mais elle grossit le montant du sinistre. La question est de savoir à partir de quand une exagération devient une fraude ?
En particulier après une catastrophe naturelle, les dommages
subis par les assurés sont d’une ampleur telle qu’ils ne sont
plus en mesure d’estimer exactement le montant des sinistres et encore moins d’en apporter une quelconque preuve.
Il est donc fréquent que la hauteur de l’indemnité doive être
négociée entre l’assuré et l’assureur, auquel cas on fait en
général appel à un expert d’assurance indépendant. Pour
beaucoup d’assurés, il semble donc légitime d’entamer la
négociation avec des demandes de réparation relativement
élevées afin de garder une certaine marge de manœuvre vers
le bas.
Les tribunaux anglais ont statué, dans le cas Nsbuga v.
Commercial Union en 1998, « qu’il faut reconnaître comme
une réalité commerciale le fait que l’assuré demande une
indemnisation souvent supérieure au montant qu’il
escompte recevoir. Ceci s’expliquant par le fait qu’il s’attend
dès le début à devoir mener une sorte de marchandage ou
tout du moins à s'engager dans des négociations. Et il serait
injuste de conclure, à partir de ces circonstances, que quelqu’un a agi de façon frauduleuse uniquement parce qu’il a
énoncé un montant plus élevé que celui qu’il supposait raisonnablement recevoir. Pour qu’il y ait fraude, il faut que la
personne lésée demande une indemnisation franchement
exagérée, tout en sachant que sa revendication est en
grande partie totalement dénuée de fondement ».
Fraude
Ce jugement fait ressortir à quel point il est important de
disposer d’informations actuelles et exactes sur les risques
assurés. Il est également indispensable d’enregistrer les
sinistres sans délai et dans les détails, car ceci permet de
faire une estimation fiable du montant des sinistres, de
limiter la marge de négociation à un minimum et d’exclure
ainsi à priori les exagérations frauduleuses.
Les dommages exagérés prennent une forme particulière
lorsqu’interviennent des entreprises de travaux ou de
services. Après une catastrophe naturelle, les régions touchées sont souvent quadrillées par des sociétés de
nettoyage ou de réparations qui offrent leurs services, en
faisant du porte à porte. Un grand nombre d’entre elles
sont tout à fait sérieuses et cherchent à réaliser des affaires
honnêtes, mais les catastrophes naturelles attirent également les escrocs et les charlatans qui veulent tirer profit de
la situation précaire des personnes touchées. Des entreprises peu scrupuleuses exigent par exemple une avance élevée avant le début des travaux, mais ne les terminent pas
et disparaissent purement et simplement. D’autres utilisent des matériaux bon marché ou font du mauvais travail
ne correspondant pas aux réglementations de construction
en vigueur, mais facturent pourtant des prestations de
haute qualité. Il est fréquent que l’assuré ne s’aperçoive
même pas de la supercherie. D’autres méthodes inclut la
participation de l’assuré, par exemple en proposant à ce
dernier des réparations qui, en raison d’une déclaration de
sinistres exagérée, l’avantagent et lui permettent d’améliorer sa situation par rapport à celle d’avant le sinistre.
55
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Dommage exagéré à une toiture
El Niño est un phénomène au cours duquel la partie est du
Pacifique tropical se réchauffe, influençant l’ensemble du
système atmosphérique de l’océan Pacifique tropical. Le
phénomène El Niño de 1997/1998 a été, au siècle dernier, le
plus redoutable dans son genre et a engendré des tempêtes
d’une violence extrême qui se sont abattues sur la Californie.
Pourtant, les dommages n’ont pas été causés seulement par
El Niño. Un couvreur de la région a décrit en détail à des
enquêteurs « secrets » qui se faisaient passer pour des promeneurs et observaient une maison endommagée construite sur une plage, comment obtenir non seulement une
nouvelle toiture pour « leur » domicile, mais de surcroît un
peu plus d’argent de l’assurance. Il avait l’intention de remettre à l’assurance un devis indiquant, en plus des travaux
de couverture, les réparations d’une installation de chauffage solaire. En posant quelques débris d’une installation de
ce type sur le toit de la maison, il voulait donner l’impression
que la tempête avait arraché non seulement le toit, mais également les panneaux solaires.
Les fraudes à l’assurance basées sur des demandes d’indemnisation exagérées sont très fréquentes, mais les dommages dans chaque cas individuel sont en général relativement peu élevés. Une enquête menée en 2000 par le US
Insurance Research Council (conseil américain de recherche en assurance) a montré que 24 % des américains considéraient comme acceptable de gonfler un montant
réclamé pour, de cette façon, compenser les derniers versements de prime. 35 % des personnes interrogées trouvaient correct de grossir un dommage pour « rattraper »
la franchise. Selon le sondage réalisé pour l’ABI, déjà
mentionné plus haut, 47 % n’excluaient pas d’exagérer un
dommage tandis que 40 % affirmaient qu’ils trouvaient
El Niño (ici en modèle) n’est pas le seul phénomène générateur de dommages ; à la suite de
catastrophes naturelles, les assureurs doivent
souvent faire face à des demandes de réparation
exagérées et donc injustifiées.
56
Fraude
cela acceptable ou tout du moins encore tolérable. Dans la
conscience morale du grand public, le fait de gonfler les
réclamations d’assurance est donc mis au même niveau
que le fait d’acheter, en connaissance de cause, des biens à
un receleur.
Comment reconnaître les fraudes après des catastrophes
naturelles ?
En règle générale, après des catastrophes naturelles, les
rédacteurs sinistres des compagnies d’assurance tout
comme les experts indépendants ploient sous l’énorme
masse des déclarations de sinistres individuels. L’imagination criminelle de certains assurés se trouve stimulée par
ces circonstances hors du commun. D’une part, la tentation
est grande de s’approprier beaucoup d’argent, de l’autre, le
danger d’être pris semble minime. Les scénarios de fraude
se renouvellent sans cesse, ce qui rend aux assureurs la
tâche encore plus difficile. De plus, la plupart des assureurs
ne veulent pas importuner encore leurs clients, déjà victimes d’une catastrophe naturelle, en se montrant tatillons
ou à fortiori en les accusant à tort. Pour les assureurs, la
meilleure des publicités, après une catastrophe naturelle,
est en effet un règlement des sinistres rapide et sans formalité. Il existe toutefois des indices typiques pouvant éveiller
des soupçons de fraude et qu’il est utile de noter.
Par exemple, une demande d’indemnisation relativement
élevée pour laquelle il n’existe aucune preuve, même pas
des restes ou tout du moins des photos ou des factures de
l’objet assuré. Il peut également arriver que les objets soidisant disparus ne correspondent pas à la situation financière, à la profession ou au style de vie de l’assuré ou que,
tout simplement de par leur taille, ils ne puissent pas faire
partie du bâtiment occupé par l’assuré. Il se peut également que l’assuré ne soit pas capable de décrire les objets
prétendument détruits, ne se souvienne plus quand et où il
les a achetés, ne retrouve plus ni le mode d’emploi ni la
carte de garantie ; il est alors justifié d’avoir des doutes. On
peut aussi présumer une tentative de fraude en cas d’absence de factures officielles ou lorsque les factures d’artisans n’indiquent pas de façon plausible et correcte les
prestations fournies.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
En ce qui concerne les assurés ayant des couvertures commerciales ou industrielles, des indices révélateurs peuvent
être un volume de stock particulièrement élevé juste le jour
du sinistre, la perte d’articles qui étaient visiblement depuis
longtemps en magasin, un déséquilibre net entre la réclamation et l’actif de la société ou même une insolvabilité
menaçante.
Les assureurs devraient en tous cas se montrer suspicieux
si aucun autre dommage n’a été déclaré dans les alentours
immédiats, s’il n’est pas possible de vérifier que les circonstances prétendues dans la déclaration existaient réellement le jour et au lieu du sinistre ou si le déroulement et
la configuration du sinistre ne peuvent pas être expliqués
de façon plausible. La situation est également suspecte si
le risque était déjà en mauvais état avant l’événement, si
l’assuré n’a pas satisfait à certaines obligations de déclaration avant la souscription du contrat ou si l’adresse indiquée sur les factures n’est pas celle du prétendu lieu du
sinistre. Un autre indicateur pour une éventuelle tentative
de fraude peut être le fait que l’assuré connaisse les conditions de la police dans les moindres détails, qu’il ait réglé
des arriérés de prime avant la survenance du sinistre ou
qu’il ait demandé une modification contractuelle ayant un
impact sur l’indemnisation ou encore que le sinistre se soit
produit très peu de temps après le début de l’assurance.
Face à des cas de ce type, il est recommandé aux rédacteurs sinistres, malgré la masse de travail, d’analyser le
dossier avec une attention toute particulière et de faire des
recherches plus avancées. Dans certaines circonstances, il
est conseillé de faire appel à un spécialiste de la fraude et,
si les soupçons se confirment, d’informer les autorités
compétentes.
Fraude
Conséquences de la fraude à l’assurance et bilan
Les conséquences de la fraude à l’assurance sont considérables, pour chaque assuré en particulier, pour la communauté des assurés et pour l’industrie des assurances dans
son ensemble.
Pour le demandeur, une fausse déclaration de sinistre peut
entraîner en premier lieu des conséquences juridiques
relevant du droit civil. Suivant le système juridique en
vigueur et les circonstances du cas en question, celles-ci
peuvent aller du refus de versement de l’indemnité à l’obligation de restitution en passant par la résiliation ou la
contestation par voie d’annulation du contrat d’assurance
ou même par la demande de dommages-intérêts de la part
de l’assureur.
Viennent ensuite les éventuelles conséquences pénales.
Certaines sociétés d’assurance hésitent pourtant à porter
plainte contre des demandeurs malhonnêtes auprès des
autorités répressives, soit parce qu’ils ne pensent en tirer
aucun avantage soit parce qu’ils craignent une publicité
négative (en l’occurrence de passer pour un assureur qui
cherche par tous les moyens à se dérober à ses obligations
de paiement). Pourtant, dans de nombreux pays, comme
par exemple dans 20 des États fédéraux américains, les
assureurs ont une obligation légale de le faire. Depuis
1996, le nombre des arrestations pour fraude à l’assurance
aux États-Unis a augmenté de plus de 400 % et les condamnations ont plus que doublé dans le même temps. Dans un
grand nombre de systèmes juridiques, de nouveaux types
de délits ont été définis permettant de punir plus sévèrement les fraudes envers les assureurs ou de combler les
lacunes existant au niveau pénal pour certaines infractions. En Allemagne, les sanctions punissant la fraude
consommée peuvent aller d’une simple amende à une
peine d’emprisonnement, de 5 à 10 ans au maximum, dans
Fig. 1 : Les 4 types de scénarios de fraude à l’assurance, qu’il s’agisse de tentative de fraude ou de fraude consommée
Sinistre réel
En raison d’un
événement fortuit
Couvert
par la police
Montant du sinistre justifié
Dommage simulé
non
non
non
non
Dommage provoqué
intentionnellement
oui
non
non
non
Dommage adapté aux
conditions de la police
oui
oui
non
non
Dommage exagéré
oui
oui
oui
non
Après les catastrophes naturelles, les règlements
de sinistres se font parfois dans une situation un
peu confuse qui stimule l’imagination de certains
assurés et les incite à faire des demandes
d’indemnisation frauduleuses.
57
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
les cas particulièrement graves. Aux États-Unis, la fraude à
l’assurance peut être pénalisée par des peines d’emprisonnement allant même jusqu’à 14 ans. Il ne faut pas oublier
que la fraude à l’assurance a un impact financier sur l’industrie des assurances dans son ensemble ainsi que sur la
communauté des assurés, qui pour la grande majorité, ont
un comportement intègre et loyal. Les règlements de sinistre, obtenus de façon frauduleuse et injustifiée, atteignent
des sommes énormes, et de plus, ils sont finalement répartis sur tous les assurés sous la forme d’une augmentation
des primes.
Les sociétés d’assurance ont pour cette raison pris des
initiatives variées pour se défendre contre la fraude. Elles
soumettent leurs rédacteurs sinistres et leurs experts sinistres à une formation intensive afin qu’ils soient en mesure
de reconnaître les indices de fraude avec rapidité et certitude, elles désignent des spécialistes de la fraude, créent
des services spéciaux de fraude et font appel aux moyens
électroniques les plus modernes. En s’appuyant sur des
données de portefeuilles géocodés, par exemple, il est
facile de contrôler si les risques soi-disant touchés se trouvent réellement dans la zone sinistrée. Les nombreuses
possibilités de recherche offertes par l’Internet et par les
banques de données interbranche, comme par exemple le
système d’information allemand Uniwagnis ainsi que les
systèmes de recherche automatique « datamining », ont
déjà fait leur preuve dans la chasse aux fausses déclarations de sinistres. Dans certains pays, les assureurs se sont
regroupés pour fonder des sociétés de droit privé se
consacrant à la lutte contre la fraude. Aux États-Unis, le
National Insurance Crime Bureau (NICB), déjà mentionné
plus haut, en est un exemple. D’autres pays se saisissent
du problème au niveau associatif, en France par exemple
avec ALFA (Agence pour la lutte contre la fraude à l’assurance). Les organisations de ce type soutiennent les assureurs non seulement dans les cas individuels de sinistre,
elles mènent également de grandes campagnes d’information afin d’expliquer aux assurés la portée et les effets de la
fraude à l’assurance. Car il est finalement de l’intérêt de
tous les intervenants qu’une catastrophe naturelle ne se
termine pas par un désastre.
58
Fraude
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Un plan d’action augmente la flexibilité en cas de sinistre et fonctionne selon une approche globale. Il permet de mieux exploiter
l’organisation et la méthode de gestion des sinistres ainsi que les
ressources existantes.
Un plan d’action (PA) augmente la flexibilité en cas de
sinistre, car il organise les processus d’instruction des
sinistres. Son introduction et son suivi suivent une approche globale dans le cadre de laquelle interviennent tant
des facteurs internes que des éléments externes. Bien que
toutes les éventualités ne soient pas planifiables, le fait de
comprendre clairement les processus et les propres objectifs aide à réagir, même à l’imprévisible.
Un PA appliqué de façon conséquente permet, en cas de
catastrophe, de concentrer le peu de ressources disponibles sur les points essentiels. Il est alors possible, non seulement d’augmenter l’efficacité de la gestion des sinistres,
mais également d’arriver à une réduction des coûts. La
mise en œuvre d’un plan d’urgence fait ressortir les points
faibles de l’entreprise et apporte ainsi une valeur ajoutée
non négligeable.
Pour créer la structure d’un PA, on peut dans l’ensemble
faire appel aux outils de gestion de projet existants. Ce
sont en fait les données et les expériences de la gestion
des sinistres qui viennent remplir la structure et lui donner
vie. S’il n’y a pas de données disponibles, on peut aussi
travailler à partir de modèles.
Dans de nombreux pays, la loi exige que certaines entreprises possèdent des plans opérationnels d’urgence pour
les accidents majeurs. Afin que les sociétés soient prêtes à
faire face à des situations d’urgence, par exemple une fuite
de gaz toxique. Du point de vue de la technique de l’assurance, les assureurs ne sont pas obligés de créer des plans
d’urgence pour maîtriser les dommages dus aux catastrophes naturelles.
Étant donné la tendance actuelle à protéger de plus en plus
les consommateurs et les investisseurs, les sociétés d’assurance voient également la nécessité d’une gestion efficace de l’urgence. En d’autre termes, les assureurs veulent
et doivent, à leur tour, prouver qu’ils ont leurs affaires bien
en mains. Ceci concerne essentiellement leur capacité de
gérer les opérations techniques liées aux cumuls et aux
gros sinistres, en particulier après une catastrophe naturelle.
Un système opérationnel de management des urgences
est bien sûr toujours un facteur de coûts, mais c’est également un argument important en termes de service et de
sécurité qui finalement réduit les coûts. Des études
menées par l’université d’Oxford indiquent qu’une gestion
efficace des catastrophes peut même faire augmenter la
valeur de l’entreprise dans son ensemble.
La longue expérience des sinistres de cumul montre que
certains des assureurs concernés n’ont toujours pas de
schéma défini selon lequel ils doivent traiter les sinistres
majeurs.
Il ressort en outre que certains modèles de sinistres apparaissent régulièrement. Par exemple, l’accumulation de
milliers de sinistres individuels, le manque d’information
sur les sinistres dans les premiers jours ou semaines suivant l’événement, la mauvaise coordination du personnel
s’occupant des sinistres ainsi qu’un nombre insuffisant
d’inspecteurs-régleurs. Il est possible et nécessaire de mettre en œuvre des mesures organisationnelles proactives
dont le but est d’alléger au maximum la tâche de tous les
intervenants en cas de sinistre. Tous ces processus peuvent être rassemblés dans un plan d’action ; lorsqu’une
situation d’urgence se présente, ils forment la structure
portante d’une gestion efficace des sinistres.
Le processus de développement d’un PA
Normalement, c’est la Direction qui donne l’ordre d’élaborer un PA. L’expérience a montré qu’il était bon de désigner
un membre de la Direction pour parrainer le projet afin que
le PA se voit attribuer au sein de l’entreprise une valeur
digne de son importance. La planification de l’urgence
représentant un ensemble très complexe (voir fig. 1), il est
recommandé d’avoir recours à une approche professionnelle de gestion de projet pour structurer les processus.
59
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
L’équipe de planification
De quels événements s’agit-il ?
Le premier pas dans l’élaboration d’un PA est de former
une équipe de planification. Celle-ci doit représenter toutes
les branches touchées, les services sinistres, souscription,
gestion clients, personnel et gestion des risques. Il est
important que les intervenants aient des connaissances
fondées sur les points suivants :
Outre les désastres induits par l’homme, les catastrophes
naturelles représentent le plus grand défi pour les assureurs. Suivant les régions, les scénarios à prendre en
compte sont différents. Les risques de tempête, d’inondation et de séisme sont actuellement considérés comme les
plus importants. Il existe également de nombreux autres
périls, en général limités dans l’espace ou de par le volume
de sinistres qu’ils engendrent, tels le volcanisme, la grêle
ou les avalanches.
– potentiels de sinistre et mécanismes des risques naturels
– processus de règlement de sinistres
– marchés et clients concernés
– interlocuteurs en cas de sinistre
– potentiels de risques pour les employés, les bâtiments et
l’informatique
– propres possibilités d’intervention, par exemple en ce qui
concerne l’informatique
Les employés devraient d’autre part être en mesure de
transposer les informations disponibles dans des processus.
Les risques naturels peuvent être classifiés selon des critères multiples. Par exemple, la fréquence de récurrence,
l’intensité, l’espace touché, la durée moyenne ou le temps
de pré-alerte d’un événement catastrophique, c’est-à-dire
le temps entre l’alerte et la survenance de l’événement.
La classification des risques naturels doit également tenir
compte des facteurs locaux. La figure 3 montre par exemple des paramètres locaux influant sur certains scénarios.
La phase de conception d’un PA
Il existe certes un grand nombre d’approches possibles
dans la gestion des urgences, mais elles sont toutes
basées, pour l’essentiel, sur le même modèle. Les 3 questions fondamentales pour la conception d’un plan d’action
sont les suivantes :
Fig. 1 : Exemple de gestion de projet
Définition de
– l’objectif du
projet
– l’équipe
responsable
Define
Calcul des
risques
Measure
Évaluation
des risques
Mise au
point de contremesures/PA
Analyse
Mise en
application et
contrôle des
mesures
Improve
Adaptation et
amélioration
permanentes
des processus
Control
Fig. 2 : Questions fondamentales de la planification de l’urgence
60
De quels événements s’agit-il ?
Risque
Quels peuvent être les effets de ces événements ?
Conséquences/
effets
Que peut-on faire pour lutter contre les effets négatifs ?
Mesures
Une gestion de projet professionnelle est indispensable pour la planification des urgences. Le processus
« SixSigman-DMAIC » propose une
approche possible : une comparaison est établie, en plusieurs étapes,
entre les résultats prévus et la situation réelle ; on effectue ensuite les
améliorations adéquates, on contrôle leur impact et on procède
éventuellement à nouveau à
certaines rectifications. Les
différentes phases sont réalisées
avec l’aide d’outils et de méthodes
déterminés.
Un plan d’urgence se déroule en
principe toujours selon le même
schéma fondamental.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Quels peuvent être les effets de ces événements ?
Les catastrophes naturelles entraînent en général des
dommages matériels et corporels pour les assurés. Les
assureurs, qui peuvent être eux-mêmes touchés par l’événement, devraient donc aussi prendre en compte leur
éventuel préjudice personnel dans la planification. En premier lieu, pourtant, les assureurs s’intéressent aux effets
possibles sur l’organisation de leur travail :
– Dans quelle mesure les sinistres vont-ils toucher leur
propre société, dans toutes les branches assurées ?
– Est-il possible, avec les moyens disponibles, de calculer
et d’évaluer un tel nombre de sinistres ?
– Combien de temps va-t-il falloir pour l’ouverture des
sinistres ?
Pour pouvoir répondre à ces questions, il est indispensable
que l’assureur connaisse parfaitement ses portefeuilles,
ses clients, ses marchés, etc.
Les résultats de cette analyse servent de base au plan d’urgence. Si les données rassemblées ne suffisent pas pour
mettre au point un modèle sérieux d’intervention en cas de
catastrophe, il est alors nécessaire de créer et d’appliquer
des scénarios hypothétiques. On peut prendre comme
orientation des informations déjà existantes, provenant de
sinistres antérieurs, même si les causes de sinistres étaient
différentes. Par exemple, en cas de typhon ou d’inonda-
Plans d’action pour les assureurs
tion, le temps de pré-alerte pour Tokyo va d’un à plusieurs
jours (voir fig. 3). Dans les 2 cas, ce laps de temps peut être
utilisé pour prendre des mesures préventives et pour préparer l’instruction des sinistres.
Dans tous les cas, il faudrait utiliser des paramètres comparables pour tous les types de catastrophes afin de pouvoir transposer d’un scénario à l’autre les mesures concernant les processus de règlement de sinistres. Ces mesures
devraient par exemple être présentées sous forme de
check-lists dans le PA.
Un point important devant être pris en compte dans le PA
concerne le comportement du client en matière de déclaration de sinistre. Dans certaines régions, il est courant que
les déclarations soient remises personnellement au représentant de la société d’assurance. Souvent, les habitants
restent auprès de leurs biens pour se protéger contre les
pillages et n’ont donc pas la possibilité de faire une déclaration du sinistre. Si donc l’assureur n’envoie pas de
régleur sur place, les déclarations de sinistres lui parviendront vraisemblablement avec du retard, ce qui souvent
n’en facilite pas la compréhension. La conséquence directe
– voir fig. 2 – dans cet exemple serait ainsi un besoin accru
de personnel des services extérieurs et de régleurs et non
pas un nombre insuffisant de rédacteurs sinistres. Cette
conséquence devrait également s’inscrire dans le processus du PA.
Fig. 3 : Évaluation du site en fonction de l’exposition aux catastrophes naturelles,
en prenant l’exemple de Tokyo.
Risque naturel
Typhon
Inondation
Séisme
Potentiel de risques
moyen
moyen
élevé
Période de récurrence estimée
< 50 ans
< 50 ans
< 100 ans
Temps de pré-alerte (zone)
1–5 jours
1–2 jours
aucun
Durée prévue
1–2 jours
1–3 jours
< 1 minute
Saison
Été/automne
Été/automne
sans
incidence
Pour évaluer l’exposition aux
catastrophes naturelles d’un
endroit donné, il suffit d’appliquer
des critères relativement simples
mais toutefois pertinents. Les expériences tirées d’une catastrophe
(par ex. une tempête) peuvent
ensuite être transposées à un autre
scénario de catastrophe potentielle
(par ex. une inondation) et l’on peut
en déduire des mesures adéquates.
61
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Une fois que les différents scénarios individuels sont décrits,
il faut mettre au point des contre-mesures et établir une liste
de priorités pour les démarches suivantes. Il est important
de faire également une évaluation des conséquences possibles pour sa propre société, sur une échelle allant de « négligeable » à « menace existentielle ». La figure 4 présente un
schéma d’évaluation simple permettant de calculer le propre
risque d’être touché par un dommage.
Évaluation des facteurs de risque individuels
Le potentiel de sinistres est en règle générale relativement
facile à exprimer en valeur monétaire. Le danger immédiat
et l’efficacité des mesures de protection sont, par contre,
plus difficiles à évaluer. C’est pour cette raison qu’il est
recommandé de se servir d’échelles d’évaluation utilisant
des valeurs absolues (0 = peu important/très mauvais,
5 = très important/bon) et de réaliser l’évaluation au sein
d’une équipe composée de personnes provenant de divers
départements et occupant des fonctions variées. Les chiffres obtenus peuvent être repris dans une matrice prédéfinie
pour être ensuite évalués. La figure 5 montre un schéma de
ce type grâce auquel il est facile de constater si le risque se
trouve encore, ou non, dans un cadre acceptable.
Le risque de sinistre d’un objet
augmente avec son exposition
immédiate, c’est-à-dire avec sa
probabilité d’occurrence et son
potentiel de sinistres (sur le plan
financier). Il peut être réduit par
des mesures de protection
adéquates.
Fig. 4 : Évaluation des facteurs de risque individuels
Risque de sinistre =
exposition immédiate/probabilité d’occurrence
+
potentiel de sinistres
./.
mesures de protection
La matrice permet une évaluation
simple et pertinente du risque de
sinistre. Les risques dépassant la
limite de tolérance sont inacceptables et doivent être réduits. Ceci
ne veut pourtant pas dire que les
risques en dessous de la limite de
tolérance n’exigent pas de mesures
de prévention ou de réduction des
sinistres, ils se trouvent simplement
plus bas dans la liste des priorités.
Fig. 5 : Matrice d’évaluation pour les risques
Exposition
immédiate
Valeur
maximale
M
de esu
pr re
ot
ec
tio
Limite de tolérance
n
Risque sans mesure
de protection
Dimension
acceptable
Risque avec mesure
de protection
Valeur maximale
62
Potentiel de
sinistres
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Que peut-on faire pour lutter contre les effets (négatifs)
d’une catastrophe ?
Une fois que la définition des scénarios de sinistres et de
leurs conséquences éventuelles est terminée, il faut spécifier
les contre-mesures.
Pour les processus complexes, il est conseillé de subdiviser
les actions prévues en :
– mesures préventives
– mesures à prendre pendant la catastrophe
– reconstruction ou autres mesures consécutives
Il ne suffit pas bien sûr de se contenter de donner une liste
de solutions possibles. Les mesures doivent être évaluées
en fonction de leur efficacité et des facteurs d’influence
présents. Et ceci sous-entend que les processus existants
et les objectifs de l’entreprise sont connus et intégrés dans
la planification.
Outre la rentabilité, les besoins en ressources et les effets
temporels, c’est le facteur humain qui joue un rôle essentiel lors de catastrophes. Les paramètres indiqués à la
figure 6 devraient donc être pris en considération pour la
définition et l’évaluation des contre-mesures. Certains de
ces paramètres peuvent, dans des cas individuels, se compléter ou concourir. Il faut, le cas échéant, réévaluer les
divers aspects ou chercher des alternatives et des solutions universellement applicables.
Fig. 6 : Facteurs d’influence possibles sur la gestion des sinistres
Informations des
investisseurs
Nombre des
sinistres individuels attendus
Réserves
Accessibilité
sur place
Mesures
immédiates
Effet monétaire
Acomptes
Facteurs
quantitatifs
Effet moral
Risque
existentiel
Urgence
Facteurs temporels
Alternatives
Cohérence
Solution
interne
Dommages propres
ou aux tiers ?
PA du client
Solution externe
Plusieurs facteurs ont une influence variée sur
la gestion des sinistres. Pour éviter les goulets
d’étranglement en cas de catastrophe, il faut
décider préalablement quelles sont les valeurs
importantes pour sa propre entreprise.
63
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Citons un exemple : le poids donné aux facteurs d’influence
dépend des valeurs « éléments temporels » et « dommages
propres/aux tiers ». Si ces composants se trouvent réunis
dans un cas de sinistre, ce sont les intérêts du client qui,
pour des raisons d’orientation clients, auront priorité. Si un
dommage subi par la société d’assurance représente un
danger pour la gestion des sinistres dans son ensemble, il
faut bien sûr tout d’abord régler le dommage de l’assureur.
Dans le cas d’une inondation, par exemple, une entreprise
chargée du séchage s’occuperait en premier lieu des bâtiments et des installations de l’assureur.
Les exemples de cas suivants, qui représentent des scénarios individuels, illustrent comment un plan d’urgence peut
se dérouler concrètement. La partie « Mesures » (secteur
du bas dans le graphique ci-contre) comprend les mesures
concrètes en cas de catastrophe et donc la part de planification se trouvant, pour sa majeure partie, dans le manuel
d’urgence.
La mise en application d’un PA
Exemple 2 : les routes sont coupées à cause d’une inondation. La figure 9 montre les diverses phases du PA, prenant
en compte les éventuelles influences externes.
Lorsque le PA est défini dans ses grandes lignes, on en
vient à la planification des détails qui sera suivi, par étapes,
de la mise en application. Celle-ci comprend différentes
phases indiquées à la figure 7.
Exemple 1 : une inondation cause des dommages chez un
assureur. La figure 8 montre les diverses phases du PA,
avec les éventuels problèmes internes de l’assureur.
Fig. 7 : Les différentes étapes de la mise en application du PA
Planification détaillée de mesures de réduction ou de suppression des sinistres et création d’une cellule catastrophe et d’un groupe spécial catastrophe (Cat-Task-Force/CTF).
Mise en place de mesures préventives
Réaliser des simulations (exercices d’urgence)/améliorations
Communication et formation des employés
Perfectionnement permanent des processus
64
Le cadre du PA pour les mesures
nécessaires en cas de catastrophe
étant défini, il faut élaborer les
mesures individuelles et les
mettre en place.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Fig. 8 : Les diverses étapes du déroulement d’un PA, avec les éventuels problèmes
internes de l’assureur.
Risque
Conséquences
Tempête
Mesures
Catastrophes sans
temps de pré-alerte
Catastrophes avec temps
de pré-alerte
Non-disponibilité des outils
de travail nécessaires
Analyse des
risques
possibles
Inondation
Dommages
aux bâtiments
Surplus de travail
administratif
Panne des installations techniques/d’électricité/des moyens de
communication/de l’informatique
Insuffisance de
capacité
informatique
Nombre insuffisant de
rédacteurs sinistres
Nombre insuffisant
de spécialistes
informatiques
Employés en
vacances
Employés non touchés
Collaborateurs
externes
Employés des
antennes
extérieures
Employés des
départements non touchés
Secteur central
Départements sinistres
d’autres branches/pays
Vérifier les
connaissances
linguistiques
Les cases marquées en orange montrent, tout au
long du scénario, le surplus de travail administratif causé par le grand nombre de déclarations de
sinistres à la suite d’une inondation et par conséquent le besoin accru de rédacteurs sinistres.
Une inondation est en général une catastrophe
avec un temps de pré-alerte ; il est donc possible
de prendre certaines mesures avant l’arrivée de
l’événement. Pour être en mesure de maîtriser le
Régler l’accès
aux systèmes
Transfert des dossiers de
sinistres aux antennes
extérieures
Comment
l’événement
pourrait-il nous
toucher ?
Quelles sont
les mesures
nécessaires pour
la gestion et la
prévention des
risques ?
Souscription
Régler la
coordination
surcroît de travail, on peut faire appel aux employés des départements sinistres d’autres branches
ou d’autres secteurs géographiques. Il est nécessaire que les employés obtiennent les droits
d’accès nécessaires ainsi que les pouvoirs de
régler les sinistres. Il s’agit là d’une étape qui
peut être mise en œuvre de façon proactive, en
amont.
65
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Fig. 9 : Les diverses étapes du déroulement d’un PA devant faire face à
d’éventuelles influences externes.
Catastrophes sans temps
de pré-alerte
Risque
Catastrophes avec temps
de pré-alerte
Tempête
Inondation
Panne du réseau
de communication
Conséquences
Dommages aux
bâtiments
Analyse
des risques
possibles
Routes coupées
Panne d’électricité/
de distribution d’eau
Interruption de la distribution/du ramassage du
courrier
Approvisionnement
général interrompu
Comment
l’événement
pourrait-il
toucher nos
clients ?
Impossible d’envoyer les formulaires
de déclaration de sinistres
Impossible de faire
une déclaration directe
Mesures
Création d’un bureau
provisoire sur place
Propres employés
Budget
Le scénario fait apparaître les effets rétroactifs
sur les processus d’affaires de l’assureur. Il se
peut qu’à la suite d’une inondation, les routes
vers la région touchée soit coupées et que le
réseau téléphonique soit perturbé. Il est donc
impossible de remettre une déclaration de
sinistre par voie normale ou d’envoyer un
formulaire de déclaration. Pour pouvoir malgré
66
Expert sinistres
Ordre
Rapport
tout enregistrer les sinistres sans perdre de
temps, un bureau provisoire est créé sur place
dans lequel un expert sinistres est chargé de
distribuer les formulaires, de recevoir les déclarations et d’organiser les visites d’inspection.
L’expert peut par exemple transmettre une
déclaration groupée à l’assureur par téléphone
satellite.
Contrat-cadre
avec les experts
sinistres
Quelles sont
les mesures
nécessaires pour
la gestion et la
prévention des
risques ?
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Gestion de l’action en cas de sinistre à caractère
catastrophique
Comme ceci a déjà été dit, une catastrophe peut doublement toucher une société d’assurance, d’une part par les
dommages des assurés et de l’autre par ceux touchant
l’entreprise elle-même. La gestion des sinistres nécessite
donc une stratégie tournée à la fois vers l’extérieur et vers
l’intérieur pour pouvoir, en situation d’urgence, garantir un
suivi ordonné des dossiers.
Dans le cadre de la stratégie interne, il faudrait créer des
organes et établir des règles pour pouvoir agir en cas de
catastrophe. Il est important qu’au moins certains de ces
organes soient en mesure de travailler de façon autonome.
Il faut donc constituer des unités redondantes qui, tout du
moins en partie, peuvent se charger de la gestion des sinistres après la survenance de l’événement.
La cellule catastrophe
La cellule catastrophe est l’organe exécutant du PA en cas
de catastrophe. Il n’est pas absolument indispensable que
les membres du groupe spécial Cat-Task-Force (CTF) ou de
la cellule soient les mêmes que ceux de l'équipe de planification d’origine.
La cellule catastrophe s’occupe de la gestion des catastrophes au niveau global de l’entreprise. Étant donné qu’elle
doit, selon la situation, prendre des décisions immédiates,
la cellule a besoin d’être habilitée des pouvoirs correspondants. Les rapports faits aux décideurs doivent suivre un
parcours clair et rapide. Il serait irrationnel d’attendre que la
catastrophe ne survienne pour répartir les fonctions et il faut
donc que non seulement la cellule, mais également les autres employés, à tous les niveaux hiérarchiques, reçoivent
auparavant des directives et des formations sur les conditions de travail en situation d’urgence.
Toute catastrophe a pourtant toujours des effets inattendus sortant du cadre habituel et l’entraînement n’est donc
possible que dans une mesure limitée. Il est recommandé
de former un groupe spécial CTF chargé de faire face à ces
défis exceptionnels.
Plans d’action pour les assureurs
Le groupe spécial CAT-Task-Force (CTF)
La fonction essentielle du CTF est d’exécuter des tâches qui
n’apparaissent que rarement ou dans un cadre restreint en
matière de gestion des sinistres. Une mission typique prise
en charge par un CTF est par exemple de se rendre sans tarder sur les lieux de la catastrophe pour se faire une idée des
dommages. Les membres du groupe spécial CTF fournissent
en quelque sorte les tout premiers reportages et organisent
les mesures, telles l’intervention des inspecteurs-régleurs.
En particulier pour les gros sinistres, ils peuvent avoir des
compétences spéciales, par exemple pour les acomptes ou
bien remplir des fonctions de conseil technique, juridique ou
assurantiel auprès des personnes lésées.
Amélioration du déroulement des sinistres
La cellule et le groupe CTF s’occupent surtout des fonctions de direction dans la communication, l’organisation et
le règlement. La gestion de base des sinistres ne changent
pas de mains. Il est pourtant possible d’améliorer les processus standard au moyen de mesures spécialement
conçues pour les catastrophes. Il ressort de presque toutes
les enquêtes menées auprès des assurés autour du thème
satisfaction des clients que ces derniers souhaitent un
règlement rapide et efficace des sinistres. Une approche
proactive de cette question au niveau de la gestion des
sinistres, et en particulier des sinistres de masse, peut être
réalisée de 3 façons :
– en se préparant bien aux événements escomptés
– en mettant au point des processus de gestion
performants
– en gardant des réserves ou en augmentant les ressources
en cas de sinistre
Ces 3 points constituent en fait la base de tout plan d’urgence. Il est évident qu’un PA ne peut pas éliminer les
influences extérieures qui rendent la gestion des sinistres
difficile ou la retardent. Il aide cependant à fiabiliser les
processus et apporte un soutien notoire dans le cadre des
potentiels propres et dans un espace temporel le plus
réduit possible. Les mesures doivent donc être créées en
fonction des scénarios de sinistres attendus, c’est-à-dire
selon
– le type du sinistre,
– le nombre des sinistres individuels escomptés,
– la propagation géographique des sinistres individuels,
– l’infrastructure existante.
Les catastrophes naturelles entraînant en général une multitude d’événements individuels, l’optimisation des processus porte essentiellement sur les mesures de réduction des
sinistres ou les mesures anticipant la gestion des sinistres.
67
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Pour améliorer le déroulement des sinistres, on peut
utiliser les moyens suivants :
– recommandations en matière de prévention des sinistres
qui seraient par exemple envoyées en même temps que
la police d’assurance (voir check-list en annexe)
– créer et envoyer au préalable un formulaire unique de
déclaration
– créer et gérer des hot-lines sinistres et des services
assistance
– installer des outils informatiques permettant d’enregistrer, de gérer et d’évaluer les sinistres de masse
– créer des outils informatiques pour pouvoir faire une
estimation rapide de la charge globale des sinistres
– établir des circuits de communication et un format de
rapport uniformes pour les contacts avec la Direction,
la presse, etc.
Simulation, exercices d’urgence et analyses postévénement
Pour mettre un PA en application, il faut s’être préparé à
faire face à une situation d’urgence. Les exercices ont pour
but non seulement de faire connaître les mesures d’urgence aux employés, mais également de déceler les faiblesses et les erreurs du système pour pouvoir y remédier.
L’efficacité des mesures techniques d’urgence, par exemple avoir recours à de la capacité informatique externe,
peut facilement être contrôlée par des simulations. Toute
mesure ayant un impact direct sur le processus d’exploitation devrait toutefois faire l’objet d’un exercice d’urgence
impliquant les employés concernés de façon à recenser le
plus grand nombre possible de facteurs d’influence potentiels. Après chaque exercice, tout comme après chaque
événement, il faut analyser toutes les expériences et intégrer les résultats dans des processus améliorés. Il est
important de mettre en évidence les résultats tant négatifs
que positifs. Étant donné que nous nous trouvons, comme
ceci a déjà été mentionné, dans un domaine fonctionnant
essentiellement sur une base empirique, les connaissances tirées des tests et de la pratique sont souvent la seule
source de données.
Plans d’action pour les assureurs
Documentation et manuel d’urgence
Dans la planification d’urgence, l’un des points essentiels
est de fixer par écrit les différentes démarches à suivre en
cas de catastrophe. Un manuel d’urgence doit être écrit de
telle façon qu’il puisse être compris par toute personne
externe ayant des connaissances techniques normales,
sans pour autant être au courant des secrets de l’entreprise.
En plus de la version électronique, il doit exister des exemplaires imprimés du manuel, dont un au moins devrait être
conservé à l’extérieur de l’entreprise. Il est recommandé de
remettre un exemplaire, toujours actualisé bien entendu, à
chacun des membres du CTF et de la cellule.
Prévention des sinistres
L’un des éléments fondamentaux d’une gestion performante des sinistres est le facteur temps. En règle générale,
plus on réagit tôt et rapidement à un sinistre, plus il reste
limité. L’échelle de priorités est donc la suivante :
– prévention des sinistres
– réduction des sinistres
– règlement des sinistres et remise en état
L’objectif principal doit donc être la prévention. En général,
les conditions d’assurance obligent l’assuré à prendre, à
ses frais, des mesures de prévention et de réduction des
sinistres. Cette obligation pour l’assuré d’intervenir par
anticipation représente un aspect déterminant de la gestion des sinistres. Il a pourtant longtemps été sous-estimé,
en particulier dans l’assurance des particuliers. Les cas
sont rarissimes où l’on demande à l’assuré d’indiquer les
mesures qu’il a prises pour réduire d’éventuels sinistres.
Les sinistres catastrophiques étant en augmentation permanente, c’est pourtant là un aspect qui occupera une
place de plus en plus importante dans le règlement des
sinistres, car c’est le seul moyen de faire évoluer les mentalités et d’empêcher les assurés de se reposer totalement
sur les assurances. Il faut qu’ils comprennent qu’ils sont
liés à une obligation contractuelle d’éviter les dommages,
dans la mesure du possible.
Il est clair que personne ne peut empêcher une catastrophe
naturelle. En ce qui concerne les sinistres, et tout spécialement les sinistres individuels, il existe toujours des possibilités de prévenir ou de minimiser les sinistres. Ceci est
également valable pour les dommages subis par l’assureur
lui-même. L’une des approches possibles est proposée par
les check-lists, en annexe de la brochure, qui devraient
faire partie intégrante du PA.
68
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action pour les assureurs
Communication
Pour qu’un PA fonctionne sans problème, il est indispensable que la communication soit assurée pendant toutes les
phases du plan. L’assuré devrait être informé, en amont,
par exemple au moyen de la police, des mesures de réduction des sinistres ou des formalités de déclaration. L’information du public et des marchés financiers est également
d’une importance croissante pour que les communiqués
sur les charges attendues soient publiées « juste à temps ».
En ce qui concerne la communication du risque, nous
renvoyons à la brochure de la MR sur ce thème (no de
commande MR 302-03158).
Perspectives
Le nombre croissant des catastrophes naturelles exige de
la part des assureurs la recherche constante de nouvelles
approches en matière de gestion des sinistres. Les professionnels de l’assurance sont de plus en plus nombreux à
reconnaître les signes du temps et ils s’orientent désormais, surtout en assurance des particuliers et au-delà du
dédommagement monétaire classique, sur ce que l’on
appelle la restitution en nature. Il s’agit ici d’un service
comprenant les mesures les plus diverses de remise en état
ou de remplacement des biens endommagés de l’assuré.
Dans l’ensemble, il est nécessaire d’intégrer davantage
l’assuré dans la gestion des sinistres, pas seulement parce
qu’il est le mieux placé pour connaître le risque individuel,
mais également parce que c’est lui qui peut intervenir le
plus tôt dans le déroulement d’un sinistre.
69
Résumé et perspectives
Modèles de sinistres récurrents – Approches innovantes
Les grands défis qui se posent à la gestion de
sinistres lors de catastrophes naturelles ont été
décrits au moyen d’exemples de dommages
concrets, et les données et leçons à en tirer ont été
exposées.
Le 1er septembre, jour anniversaire du tremblement de terre du Kanto en 1923, les écoliers
japonais à Tokyo portent des capuches
matelassées destinées à les protéger contre la
chute de débris. C’est ainsi que l’on prépare
chaque année des milliers de personnes au
séisme majeur qui pourrait à tout moment
toucher le Japon.
70
71
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Résumé et perspectives
La présente publication décrit les principaux défis qui se posent à la
gestion de sinistres lors de catastrophes naturelles. En s’appuyant
sur des exemples de sinistres concrets, elle soumet aux sociétés
d’assurance de précieuses propositions d’amélioration ainsi que des
pistes de solution permettant une action proactive.
Nous avons eu à faire à une série d’événements naturels
importants dans le passé récent : les 4 ouragans aux ÉtatsUnis en 2004, le typhon en Corée et au Japon en 2003, les
inondations en Europe en 2002, les tempêtes d’hiver en
Europe en 1999 ainsi que les séismes en Turquie en 1999 et
au Japon en 1995. Toutes les catastrophes ont été soigneusement analysées et des aspects intéressants ont été mis
en lumière lors du règlement des sinistres, tout particulièrement en ce qui concerne la situation d’urgence qui règne
après la survenance d’une catastrophe et les défis auxquels est confronté l’assureur. En nous appuyant sur des
exemples de sinistres, nous montrons clairement que
nombre de défis se posent, mais aussi qu’il existe des solutions pour optimiser la gestion des sinistres. Il faut s’occuper des clients avec encore plus de rapidité et de professionnalisme. Car les sinistres font partie intégrante des
opérations d’assurance pour les assureurs directs et les
réassureurs – et souvent, ce n’est que lorsqu’ils sont en
présence d’un sinistre que les clients et l’économie nationale peuvent vraiment apprécier la qualité et la valeur
ajoutée offertes par les assureurs.
Gestion des sinistres : Quo vadis ?
Aujourd’hui, la gestion professionnelle des sinistres dans
le cadre du règlement des sinistres individuels est chez
tous les assureurs synonyme de « best practice ». Les dommages provoqués par des catastrophes naturelles dont il
est question ici montrent cependant que ce professionnalisme doit aussi être appliqué au management de milliers
de sinistres de cumul et de gros sinistres. Pour la gestion
de sinistres d’urgence, il convient de se conformer au
principe suivant : à une catastrophe succède toujours une
autre catastrophe ! Cela signifie qu’après la survenance
d’un événement il faut analyser ce qui a bien fonctionné,
ce qui a été négatif et comment on peut s’améliorer. Pour
permettre à nos clients d’effectuer une brève analyse, nous
avons élaboré à leur intention, à titre de service, un catalogue de check-lists situé en annexe.
À l’avenir, il sera accordé une importance beaucoup plus
grande aux alertes précoces et, de ce fait, à l’intensification
de la prévention des sinistres dans le domaine des risques
naturels.
72
Systèmes d’alerte précoce
Il sera plus que jamais nécessaire de disposer de systèmes
d’alerte précoce efficaces qui devront contribuer à l’établissement de prévisions précises sur les événements et à la
mise en pratique d’une gestion proactive des sinistres. La
mise en œuvre des plans d’action peut ainsi avoir lieu
encore plus tôt. À cet égard, on peut, aujourd’hui déjà, citer
l’exemple des applications en matière de logistique de
l’information, grâce auxquelles les alertes aux intempéries
lancées par les services d’information sont communiquées
directement et à temps aux personnes touchées. Les informations météorologiques sont transmises aux personnes
sur le support qu’elles ont choisi (téléphone, téléfax, e-mail,
téléphone portable, pager). Il est également possible de
consulter les alertes météo lorsque l’on change de lieu de
résidence (pendant des voyages par exemple). Pour cela,
les utilisateurs sont localisés via leur téléphone portable et
reçoivent ensuite – si nécessaire – une alerte par SMS.
Géocodage
Le géocodage aide à identifier les modèles de sinistres et
permet d’améliorer leur gestion au plan local. Nous avons
montré en détail combien cette méthode est performante.
L’objectif poursuivi étant d’exploiter les possibilités offrant
le plus grand potentiel de réduction des sinistres, une
attention toute particulière sera accordée, dans le futur,
aux systèmes de localisation par satellite.
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Plans d’action
Un plan d’action (PA) augmente la flexibilité en cas de
sinistre, car il organise les processus d’instruction des
sinistres. Une approche globale permet, en cas de catastrophe (sinistre naturel, gros sinistre, perte d’image de
marque, sinistre catastrophique dû au terrorisme), de
concentrer le peu de ressources disponibles sur les points
essentiels. Il est alors possible, non seulement d’augmenter l’efficacité et la fiabilité de la gestion des sinistres, mais
également d’arriver à une réduction des coûts. La mise en
œuvre d’un plan d’urgence fait ressortir les points faibles
de l’entreprise et apporte ainsi une valeur ajoutée non
négligeable.
À l’avenir, les assurés seront, eux aussi, davantage intégrés dans la gestion des sinistres (prévoyance en amont et
suivi en aval), pas seulement parce qu’il sont les mieux
placés pour connaître le risque individuel (prévention des
sinistres), mais également parce que ce sont eux qui peuvent intervenir le plus tôt dans le déroulement d’un sinistre
(réduction de sinistre).
Résumé et perspectives
– Gestion des sinistres dans le cadre d’événements naturels (NatCat Loss Estimation Service) : la Münchener
Rück a mis au point et testé une méthode (reposant sur
le géocodage) en vue d’une estimation et d’une gestion
rapide des sinistres dans le cadre d’événements naturels.
Sur la base des données des polices avec adresses géocodées et grâce aux informations relatives à la météorologie fournies par des tiers et traitées par le Groupe de
Recherche GéoRisques de la Münchener Rück, il est possible d’analyser rapidement, pour chaque portefeuille
individuel, l’incidence d’un événement concret tel qu’une
tempête. Ces informations sont ensuite transmises à la
cédante. Les courts temps de traitement permettent
même, dans certaines circonstances, de prévenir les
assurés menacés.
L’assurance et la réassurance des risques naturels constituent l’un des rares domaines de croissance existant dans
l’assurance Dommages. En conséquence, il faudrait faire
appel aux meilleurs méthodes et procédés disponibles
pour les processus, les structures et les outils utilisés pour
ces opérations, notamment dans le cadre de l’instruction et
du règlement des sinistres.
Offres de services innovantes de la Münchener Rück
Les services Sinistres disposent de ressources limitées, et
ce, non seulement pour le règlement des sinistres catastrophiques. Les informations essentielles doivent être à jour
et à portée de la main. Les offres de services innovantes de
la Münchener Rück, développées à l’origine pour nos
cédantes allemandes, vont dans ce sens :
– Le système informatique de management des sinistres
par connect.munichre propose, en ligne, aux rédacteurs
sinistres de nos clients des informations sur certains
types de sinistres choisis, tels que les événements naturels par exemple. La navigation dans le système est fonction de la façon dont l’assureur direct traite les dossiers.
Le suivi et l’actualisation des informations est effectué à
un niveau central, et il suffit ensuite aux utilisateurs d’appuyer sur une touche pour disposer de celles-ci immédiatement.
La Münchener Rück est en mesure de mettre à votre disposition des experts du Département Dommages et du Groupe
de Recherche GéoRisques, qui pourront vous apporter leur
appui avant et après une catastrophe. La présente brochure
a pour objet de contribuer à répondre aux attentes des assurés, des autorités de surveillance ainsi que des employés et
des actionnaires des compagnies d’assurance en ce qui
concerne la gestion professionnelle des sinistres, et à faire
face le mieux possible aux catastrophes naturelles à venir.
73
Annexe : check-lists pour une gestion
proactive des sinistres
Gestion professionnelle des sinistres pour
les assureurs et les assurés
Les mesures, indiquées dans les check-lists qui
suivent, ont seulement valeur d’exemple et ne
sauraient être considérées comme exhaustives.
74
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
A. Check-list pour les assureurs
Mesures à prendre avant une catastrophe
Mettre au point un plan d’action qui tient compte de la survenance de plusieurs
événements catastrophiques et le tester
Concevoir des systèmes informatiques et organiser la gestion des documents de
façon à pouvoir traiter plusieurs milliers de dossiers de sinistres et de résoudre au
plan technique le problème du rattachement des sinistres aux événements qui les
ont provoqués, afin d’éviter les doubles décomptes
Élaborer un concept permettant aux clients d’établir et d’envoyer leur déclaration de
sinistre (sur des formulaires simplifiés ou par l’Internet)
Prendre des mesures de prévention des dommages (application de standards techniques, amélioration des règles de construction et des sauvegardes informatiques) ;
cette recommandation vaut à la fois pour les assurés et pour les assureurs qui peuvent
eux aussi être touchés par la catastrophe
Procéder à l’évaluation du risque en faisant, si possible, une inspection chez l’assuré
pour vérifier si les standards techniques de sécurité vis-à-vis des périls naturels sont
respectés
Conclure des accords-cadre avec des sociétés spécialisées dans la liquidation des
sinistres et dans le nettoyage et l’assainissement des locaux
Préparer une liste des inspecteurs-régleurs et des experts disponibles
Identifier et contrôler le risque de cumul des périls naturels que peut présenter
le portefeuille
Fournir aux clients des modèles NatCat et des outils appropriés (par ex. zones Cresta
et service MRcatPML) de façon à pouvoir évaluer l’exposition du portefeuille
Géocoder le portefeuille
Préparer des informations (cartes) indiquant les scénarios et les expositions auxquels
les zones touchées peuvent être confrontées
Tenir à la disposition du réassureur ou d’autres spécialistes des événements naturels
les données nécessaires à des études et des analyses scientifiques
Encourager l’utilisation et l’amélioration de systèmes d’alerte précoce
Estimer les SMP et transmettre l’information au réassureur ; actualiser régulièrement
les estimations
75
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Gestion des sinistres
Créer un comité d’action et faire prendre les premières mesures
Premières estimations de sinistre ; plusieurs mesures sont possibles :
– évaluation des propres dommages subis
– prise de vues aériennes (qui facilitent éventuellement une première estimation)
– géocodage des portefeuilles (ce qui simplifie la première estimation des dommages)
– prise en compte des déclarations tardives
– prise en considération du surcoût des frais d’expert, des tarifs des sociétés de
réparation et du prix du matériel utilisé
Mettre en application le plan d’urgence actuel
Constituer une équipe pour les gros sinistres
Enregistrer les gros sinistres
Prévoir et gérer l’intervention des inspecteurs-régleurs
Rechercher des ressources disponibles pour le règlement des sinistres (personnel en
congé, à la retraite, en congé parental, etc.)
Surveiller et gérer la charge de travail des services administratifs et des services
commerciaux
Préparer une liste des numéros de téléphone et des adresses e-mail de tous les
gestionnaires de sinistres
Mettre à la disposition des collaborateurs et des clients des informations concernant
les mesures prioritaires et le règlement des sinistres
Remettre aux inspecteurs-régleurs et aux gestionnaires de sinistres des résumés des
conditions d’assurance et des clauses
Mettre en place des outils informatiques permettant le traitement des sinistres de
masse
Définir des circuits de communication et des chaînes d’information uniformes
76
Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
Déclaration de sinistres et règlement
Installer une hotline ; plusieurs mesures sont possibles :
– numéros de téléphone (gratuits) pour déclarer les sinistres
– convertir les appels téléphoniques en fichiers sonores, lesquels pourront être
envoyés sous forme de courriers électroniques aux gestionnaires sinistres
– en cas d’encombrement de l’installation téléphonique, avoir recours éventuellement
aux téléphones mobiles personnels des collaborateurs
– annonce préenregistrée des réponses aux questions les plus fréquentes (FAQ)
concernant l’étendue de la garantie et les mesures conservatoires
– créer et gérer des services d’assistance
Créer sur place dans les zones sinistrées des bureaux mobiles chargés du règlement
des sinistres (ouverture des dossiers ou paiements)
Prévoir et gérer l’intervention des inspecteurs-régleurs ; plusieurs mesures sont possibles :
– évaluer et augmenter les ressources en personnel, si besoin est, en rappelant les
absents, les retraités ou en formant des souscripteurs, des commerciaux, etc.
– accorder des autorisations de règlement, en vérifier les limites et éventuellement
les adapter
– prendre le plus tôt possible des photos des dégâts pour les utiliser à des fins de
documentation
– gérer le planning des déplacements et des rendez-vous des inspecteurs-régleurs
– faire le point sur les conditions de circulation (routes ou ponts détruits ou
infranchissables, etc.)
– premières inspections des zones sinistrées, une fois le danger passé (force du vent,
hauteur d’eau, répliques sismiques)
– intégrer dans la planification l’interdiction d’accéder dans les zones sinistrées
Optimiser l’enregistrement des sinistres
– mettre à la disposition des collaborateurs un formulaire simplifié permettant une
déclaration groupée des sinistres de masse, que l’on peut éventuellement remplir
sur un micro-ordinateur
Établir une liste des priorités pour le traitement des dossiers de sinistre et pour
les visites ; plusieurs mesures sont possibles :
– confier le règlement des gros sinistres et des sinistres pertes d’exploitation à des
inspecteurs-régleurs expérimentés
– fixer pour certains sinistres un règlement simplifié et sur seule étude du dossier
– documenter rapidement les sinistres afin de les distinguer des autres événements
et des événements précédents
– faire intervenir si possible le même inspecteur-régleur lorsqu’un assuré déclare
plusieurs événements dommageables
– faire appel, si besoin est, à des spécialistes de la fraude
Mandater et gérer les inspecteurs-régleurs externes ; plusieurs mesures sont possibles :
– tenir compte de l’infrastructure détruite dans le plan d’intervention et dans le
traitement du nombre des sinistres
– prendre éventuellement en considération le surcoût des frais d’expert, s’il y a pénurie
d’experts
– penser à la situation linguistique et culturelle dans la zone sinistrée
– prévoir l’utilisation de téléphones satellite ou de talkies-walkies en cas de panne des
réseaux de téléphonie fixe et mobile
– gérer le travail des inspecteurs-régleurs (souvent possible avec des portefeuilles
géocodés)
– envisager l’utilisation de systèmes GPS de façon à localiser le lieu d’assurance
Mandater des sociétés de réparation et des sociétés spécialisées dans le nettoyage et
l’assainissement
77
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Conduite à adopter par l’assureur lorsqu’il a lui-même subi des dommages et qu’il n’y a
plus suffisamment de postes de travail ; plusieurs mesures sont possibles :
– installer les collaborateurs dans des bureaux mobiles
– créer des postes de travail à domicile connectés à l’Internet
– déplacer les personnels chargés du traitement des sinistres sur simple étude des
dossiers vers d’autres unités de l’entreprise qui n’ont pas été touchées
Augmenter, si besoin est, l’équipement bureautique (photocopieuses et imprimantes)
Traiter les questions relatives au règlement des sinistres ; plusieurs mesures sont
possibles :
– franchise applicable lorsque plusieurs événements naturels se chevauchent dans le
temps
– franchise applicable lorsque plusieurs risques couverts par une police sont frappés
par un sinistre
– plafonds d’indemnisation (question de l’indemnisation maximale ou de la franchise)
– dommages assurés en vertu d’arrêtés administratifs
– frais assurés (couverture des frais occasionnés par les mesures préventives ou
conservatoires suite à la catastrophe)
– pertes d’exploitation sans dommages matériels
– dommages indirects
Communiquer le plus rapidement possible au réassureur les estimations de sinistre
ainsi que les bases sur lesquelles elles ont été calculées ; lui communiquer également
à intervalles réguliers et rapprochés les actualisations des montants mis en réserve
Mettre le plus tôt possible à la disposition du réassureur toutes informations utiles :
paiements déjà effectués, bordereaux, traités concernés, schémas d’indemnisation,
estimations de perte définitive
78
Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
B. Check-list Plan d’urgence
Mettre en place une équipe de planification
Constituer une équipe
Répartir les pouvoirs
Définir les tâches
Élaborer un plan et un budget
Analyser les ressources et les dangers
Vérifier les plans internes et les polices
Échange d’expériences avec des groupes externes
Contrôler/identifier les instructions et les règlements
Identifier les produits, services et processus critiques
Identifier les ressources internes et les capacités
Vérifier les assurances
Dresser une liste des situations d’urgence et des probabilités de survenance
de ces situations
Conséquence possible sur l’homme
Conséquence possible sur les biens
Conséquence possible sur les activités
Évaluer les ressources internes et externes
Concevoir le plan, le cas échéant, pour plusieurs événements catastrophiques
79
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Développer un plan d’urgence
Rassembler les pièces nécessaires à la planification, telles que résumé, mesures
d’urgence, documents de support (chaînes d’information, listes de numéros de
téléphone, etc.)
Identifier les défis ; établir une liste de priorités pour les activités
Élaborer un plan d’urgence
Élaborer un programme d’entraînement
Gérer la coordination avec les organisations extérieures
Entretenir des contacts avec les organisations intérieures
Remanier les exercices
Faire approuver officiellement le plan
Distribuer le plan
Mettre en œuvre un plan d’urgence
Intégrer le plan dans les circuits internes de la société
Effectuer des séances d’entraînement
Évaluer le plan et le modifier, si nécessaire
80
Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
C. Check-list en cas d’intervention d’inspecteurs-régleurs
externes
Critères d’intervention des inspecteurs-régleurs
Mandater les inspecteurs-régleurs (leur mission est fonction, le cas échéant, du type
et du montant de sinistre, des pertes d’exploitation, de leurs connaissances linguistiques)
Gestion et organisation des missions des inspecteurs-régleurs
Fixer le plan d’intervention des inspecteurs-régleurs dans les zones touchées
Coordonner les inspecteurs-régleurs, au niveau régional
Gérer la coopération et l’information entre les inspecteurs-régleurs et les assureurs
et/ou les assurés
Déterminer la charge de travail moyenne et/ou le nombre de dossiers instruits par
chaque inspecteur-régleur et procéder à une régulation
Gérer la chaîne d’information et son déroulement dans le temps en ce qui concerne le
traitement des dossiers de sinistre (nombre de rapports provisoires et ordre dans
lequel ils doivent être établis, rapport final)
Accords contractuels
Conclure éventuellement des accords de coopération (en exclusivité) entre les
inspecteurs-régleurs et les assureurs et/ou les assurés
Si les inspecteurs-régleurs recourent à des sous-traitants (sociétés, collaborateurs
indépendants), vérifier la qualité de ces derniers
Communication
Définir les circuits et les moyens de communication avec les inspecteurs-régleurs
(téléphone mobile, talkie-walkie, téléphone satellite)
Utiliser, le cas échéant, des systèmes GPS pour localiser le lieu d’assurance
81
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Tâches et compétences des inspecteurs-régleurs
Donner aux inspecteurs-régleurs le pouvoir de régler les sinistres (compte tenu du type
et du montant)
Vérifier périodiquement s’ils connaissent les termes de la police ; contrôler si les questions importantes en matière de règlement (conditions de garantie et d’indemnisation)
ont été prises en compte
Leur laisser, le cas échéant, la possibilité d’introduire des mesures conservatoires
Vérifier que les règles de construction des bâtiments ont été respectées
Si un même lieu d’assurance est frappé par plusieurs cataclysmes :
– les inspecteurs-régleurs vérifient l’application des franchises, aident à évaluer les
pertes d’exploitation (pertes d’exploitation étendues en raison de l’arrêt des travaux
de réparation dû à l’arrivée d’un nouvel événement : dommages consécutifs ou
nouveaux dommages ?)
– les inspecteurs-régleurs apportent leur concours lorsque les assurés ont tendance à
demander des dédommagements exagérés (détection et prévention de la fraude)
Structure des coûts
Fixer la rétribution des inspecteurs-régleurs (prix à la journée/tarif horaire, forfaits
déplacements, etc.)
Intégrer éventuellement dans le coût de sinistre une modification de la structure des
droits et des coûts de règlement de sinistres (s’il y a pénurie d’inspecteurs-régleurs)
Élaborer des mesures visant à détecter le double décompte des frais de déplacement
(en cas d’intervention d’un inspecteur dans la même zone)
82
Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
D. Check-list en cas d’intervention de sociétés de
nettoyage et d’assainissement des locaux
Mandater rapidement une société de nettoyage en fonction du type et du montant de
sinistre ; envisager une interruption de son activité
Vérifier quel type de sinistre doit être traité en priorité (dommages dus à l’humidité,
moisissures)
Sélectionner des techniques de nettoyage et d’assainissement pour des bâtiments et
des installations spéciales ; vérifier si l’on a recours à des techniques particulièrement
coûteuses
Vérifier la formation et la qualité du travail des agents des sociétés de nettoyage et
d’assaissement intervenant sur place (expérience en matière de nettoyage, de
séchage, d’assainissement, connaissances en langues)
Conclure éventuellement des accords de coopération (en exclusivité) entre les sociétés
de nettoyage et d’assainissement et les assureurs et/ou les assurés
Vérifier si la société de nettoyage et d’assainissement emploie des sous-traitants
(sociétés, collaborateurs indépendants) ainsi que la qualité du travail de ces derniers
Coordoner les sociétés de nettoyage et d’assainissement, au niveau régional
Définir les circuits et les moyens de communication (téléphone mobile, talkie-walkie,
téléphone satellite) entre la société de nettoyage, l’assuré et l’assureur
Décider des mesures d’assainissement en étroite collaboration avec la société de
nettoyage, l’assuré et l’assureur
Vérifier la structure des droits et des coûts des prestations de nettoyage et d’assainissement (montant des travaux, montants fixes, prix par unité)
Calculer, le cas échéant, une augmentation des frais d’assainissement
83
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
E. Check-list pour les assurés
(essentiellement industriels)
Généralités
Identifier les zones touchées par les périls naturels et demander des informations à
l’assureur local
En cas d’exposition aux périls naturels, se renseigner auprès des autorités locales pour
savoir s’il existe des plans d’urgence et d’évacuation
Consulter la compagnie d’assurances qui se chargera de visiter et d’apprécier les
risques et d’émettre des recommandations en matière de prévention des sinistres
Développer un plan d’action et un plan d’urgence en cas de catastrophe et le tester
Personnel
Constituer une équipe d’intervention d’urgence (emergency response team)
Informer le personnel sur la sécurité et sur les expériences lors de catastrophes
naturelles et le former
Mettre en œuvre des mesures d’entraînement permettant la préparation et la maîtrise
des situations d’urgence
Bâtiments et équipements
Tenir compte des règles de sécurité en vigueur pour la construction et/ou la remise en
état de bâtiments et d’équipements. Consulter l’assureur, le réassureur, l’architecte ou
l’ingénieur du génie civil pour obtenir des conseils professionnels sur les mesures de
prévention des sinistres
Vérifier l’installation pour détecter les points faibles et son éventuelle vulnérabilité et
prendre des mesures pour réduire ces risques
Contrôler à intervalles réguliers les divers éléments des installations sur le plan de la
construction, de la technique et de l’organisation
Conclure un contrat-cadre avec des sociétés spécialisées dans le nettoyage et
l’assainissement des locaux
Prévoir une alimentation de secours en cas de coupure de courant
Documenter à l’aide de photos ou d’enregistrements vidéo les bâtiments,
les structures, les installations et les produits essentiels
Envisager de déplacer les documents et les équipements dans des endroits sûrs
Mesures précédant ou suivant immédiatement la catastrophe
Prendre les mesures d’urgence conformément au plan d’action
Suivre les alertes aux catastrophes dans les médias
Vérifier si les réseaux d’alimentation en énergie et en fluides ont été endommagés
Déclencher l’alimentation électrique de secours
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Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
Mesures spécifiques
1. Inondation
Vérifier si les zones où se trouvent les installations sont exposées aux risques
d’inondation, de refoulement et de pluies torrentielles
Déplacer les documents et les équipements et les mettre dans des endroits plus élevés
Suivre les alertes aux inondations (radio)
Demander à l’assureur toutes informations sur l’assurance Inondation (exposition à
ce risque)
Réfléchir aux mesures de protection des installations contre les inondations ; plusieurs
mesures sont possibles :
– mettre en œuvre les dispositifs de coupure d’urgence des installations
– boucher les fenêtres, les portes ou autres ouvertures à l’aide de matériaux résistants à
l’eau (parpaings ou briques)
– installer des clapets anti-retour et anti-refoulement pour éviter le retour des eaux dans
les locaux techniques
– renforcer, le cas échéant, les murs afin qu’ils puissent mieux résister à la pression
hydraulique
– construire des murs étanches autour des équipements ou des zones de travail des
installations, particulièrement exposés aux inondations
– envisager la construction de murs de protection ou de digues à l’extérieur de
l’installation industrielle afin de retenir l’eau
– ancrer les cuves de stockage (des combustibles, des produits chimiques) pour
éviter qu’elles ne soient soulevées et emportées par l’eau ; remplir les cuves vides ;
rehausser les conduits de ventilation
– serrer les freins des grues et fixer les ponts mobiles
– protéger ou déplacer les biens entreposés à l’air libre
– installer, le cas échéant, des portes étanches
– prévoir, le cas échéant, des ouvertures dans les soubassements de façon à ne pas
gêner l’écoulement de l’eau (pour ne pas affecter la solidité du bâtiment)
– mettre en place des murs mobiles de protection contre les inondations
– installer éventuellement une pompe avec une alimentation de secours pour pomper
l’eau en permanence
– identifier les matériaux ou produits chimiques dangereux qui sont dans des entrepôts
inondables, les déplacer ou les stocker en hauteur
– stocker les documents importants et les objets de valeur en lieu sûr
– couper l’alimentation des installations électriques pour éviter les courts-circuits dus à
l’humidité
– protéger les fours, les chauffe-eau, les tableaux électriques et autres équipements, les
surélever ou les déplacer
– déplacer les contenus/les biens pouvant être inondés ; réduire les stocks exposés aux
inondations ; si possible, les mettre en hauteur, les déménager ou les mettre à l’abri
Empêcher les dommages consécutifs dus à l’humidité en enlevant ou en séchant les
contenus/biens touchés par l’eau
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Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
2. Tremblement de terre
Déterminer l’exposition des installations aux tremblements de terre (par l’intermédiaire de l’assureur ou du réassureur)
Interroger les autorités locales et l’assureur pour connaître l’exposition du lieu
d’assurance et du voisinage au risque sismique
Faire vérifier par un expert (ingénieur du génie civil) les défauts de structure
Mettre en œuvre les dispositifs de coupure d’urgence des installations
Mettre au point des mesures de renforcement et de protection et établir une liste des
priorités ; plusieurs mesures sont possibles :
– ajouter au cadre des entretoises métalliques ou des murs de renforcement
– renforcer les colonnes et murs de fondation des bâtiments
– remplacer les murs en briques qui ne sont pas renforcés avec du ciment
– descendre les gros objets lourds sur les rayons inférieurs des étagères ou les poser
sur le sol et les fixer s’ils présentent un danger pour les personnes
– fixer les étagères, les armoires de rangement, les meubles hauts, les appareils de
bureau, les ordinateurs, les imprimantes, les photocopieuses et autres appareils
inventoriés pour les empêcher de glisser ou de se renverser
– ancrer dans le sol les équipements stationnaires et les machines qui pèsent lourd
– mettre, si possible, les équipements plus grands sur des roulettes et les attacher aux
murs avec des sangles
– mettre, si nécessaire, des entretoises dans les plafonds suspendus
– poser, là où c’est nécessaire, du verre de sécurité
– protéger les conduites d’alimentation et les conduites industrielles principales
– protéger plus particulièrement les systèmes de secours (colonnes sèches)
– installer des embouts flexibles sur les conduites de façon à empêcher toute fuite de
gaz ou d’eau
– respecter les normes de construction locales et les règles d’utilisation des sols
Préparer des doubles des plans de construction pour pouvoir apprécier la solidité du
bâtiment après un séisme
Contrôler d’un œil critique l’utilisation et le stockage de matériaux dangereux ; séparer
les produits chimiques qui sont incompatibles entre eux
Fixer des points de rassemblement pour le personnel après un séisme – à l’intérieur
des installations, mais loin des murs extérieurs et des fenêtres
Effectuer avec le personnel des exercices de simulation et d’évacuation en cas de
secousse sismique
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Annexe
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Annexe
3. Tempête
Mettre en œuvre l’alerte aux tempêtes ainsi que les plans d’évacuation et préparer des
moyens de transport pour les collaborateurs
Arrimer les équipements et les structures à l’air libre
Protéger les fenêtres (avec des volets ou du bois)
Vérifier régulièrement la charpente des toits
Préparer une couverture de toit et des bâches pour réduire les dommages consécutifs
Mettre en œuvre les dispositifs d’arrêt d’urgence des installations
Effectuer des exercices de simulation et d’évacuation en cas de tempête, d’ouragan et
de tornade
Installer des pompes pour éliminer l’eau et prévoir une alimentation électrique de
secours
Préparer le déménagement de certaines parties de l’installation à un autre endroit
Effectuer un back-up des enregistrements, des logiciels et des données importantes
Mettre en place des mesures d’assainissement (séchage par exemple) pour éviter les
dommages consécutifs dus à l’humidité (corrosion, moisissures)
Mettre à l’abri et protéger les véhicules automobiles
87
Münchener Rück, Gestion des sinistres dus aux catastrophes naturelles
Auteurs
Auteurs
Pr. Dr. Peter Höppe
Responsable du Groupe de
Recherche GéoRisques/Gestion
de l’environnement – Corporate
Underwriting/Global Clients
Uwe Kastl
Ingénieur Gestionnaire Risques et
Sinistres
Secteur Opérationnel Claims
Management and Consulting –
Corporate Underwriting/Global
Clients
Dr. Horst Kirrmann
Ingénieur Gestionnaire Risques et
Sinistres
Département Sinistres – Asie,
Australasie, Afrique
Dr. Wolfgang Kron
Responsable Risques hydrologiques;
Département des risques géophysiques et hydrologiques, Groupe de
Recherche GéoRisques/Gestion de
l’environnement – Corporate Underwriting/Global Clients
Dr. Alfons Maier
Responsable Knowledge
Management
Topic Network Property Claims
Ingénieur Gestionnaire Risques et
Sinistres Senior, Département
Sinistres Europe 1
Ernst Rauch
Chef de département
Risque tempêtes, météorologiques et
climatiques, Groupe de Recherche
GéoRisques/Gestion de l’environnement – Corporate Underwriting/
Global Clients
Jürgen Ruß
Ingénieur Gestionnaire Risques et
Sinistres
Département Sinistres – Asie,
Australasie, Afrique
Barbara Sättler
Souscriptrice junior
Special and Financial Risks –
Munich-American RiskPartners
Andreas Siebert
Responsable Géoinformatique et
Communication
Groupe de Recherches GéoRisques –
Corporate Underwriting/Global
Clients
Dr. Anselm Smolka
Chef de département
Séismes/Inondations, Groupe de
Recherche GéoRisques –
Corporate Underwriting/Global
Clients
Thomas J. Toth
Vice-président
Property Claims – American Re
Klaus Wenselowski
Ingénieur Gestionnaire Risques et
Sinistres Senior
Secteur Opérationnel Claims
Management and Consulting –
Corporate Underwriting/Global
Clients
Peter Wißhak
Juriste Gestionnaire Sinistres
Secteur Opérationnel Claims
Management and Consulting –
Corporate Underwriting/Global
Clients
88
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Topic Network Property Claims
Contact
Dr. Alfons Maier
Téléphone : +49 (89) 38 91-53 83
Téléfax : +49 (89) 38 91-7 53 83
E-mail : [email protected]
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Page 5 : Roger Ressmeyer/CORBIS
Page 13 : Till Leeser/Bilderberg
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Page 24 : Archives MR
Page 26 : Associated Press, YONHAP
Page 29 : Archives MR
Page 31 : Archives MR
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4–6 Archives MR
Page 36 : Archives MR
Page 37 : Archives MR
Page 38 : Masaharu Hatano/Reuters/CORBIS
Page 42 : picture-alliance/dpa
Page 43 : picture-alliance/dpa
Page 45 : Archives MR
Page 47 : picture-alliance/dpa
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