lettre de l`Image n°180.pub - Cinéma l`Image, Plougastel

Transcription

lettre de l`Image n°180.pub - Cinéma l`Image, Plougastel
Associa on IMAGES « Clos de l’Image »
29470 PLOUGASTEL-DAOULAS
Tél. bureau 02 98 04 22 79 Tél programmes 02 98 40 30 79
Fax 02 98 04 26 09
Et h,p://www.imagecinema.org
La le re de l’Image est un programme spécifique Art & Essai
N° 180 (Avril 2016)
Semaine du 6 avril 2016
E
n Version Originale et Sous-Titrée.
Amér. (Durée : 1h51). Science Fiction de Jeff Nichols avec Michael Shannon, Jaeden
Lieberher, Joel Edgerton...
Fuyant d’abord des fanatiques religieux et des forces de police, Roy, père de famille et son
fils Alton, se retrouvent bientôt les proies d’une chasse à l’homme à travers tout le pays, mobilisant
même les plus hautes instances du gouvernement fédéral. En fin de compte, le père risque tout
pour sauver son fils et lui permettre d’accomplir son destin. Un destin qui pourrait bien changer le
monde pour toujours.
D
eux hommes ont enlevé un petit
garçon. L'alerte est déclenchée,
toutes les polices sont à leurs
trousses. Sauf que, dans la nuit
profonde des petites routes américaines, où les
fuyards circulent tous feux éteints, rien n'est ce
qu'il paraît. Pourquoi le gamin, Alton, cache-t-il
son regard derrière de curieuses lunettes
noires ? Et surtout, pourquoi n'a-t-il pas peur de
ses ravisseurs ? Presque tout de suite, on
comprend que Roy, l'un d'entre eux, fébrile
mais déterminé, est son père. Pendant que
l'enquête du FBI progresse (en tête, un Adam
Driver à la fois perspicace et -lunaire), d'autres
gens se lancent dans la traque : les membres
de la secte religieuse où vivait le petit Alton.
Drôle de cavale, où la mélancolie le dispute à
l'action. De motels crépusculaires en cascades
sur le bitume, Jeff Nichols joue sur tous les
tableaux : la complexité des sentiments, autant
que le vertige du spectacle. Du plus délicat au
plus fracassant, des demi-teintes et demi-mots
du cinéma indépendant au surgissement
démesuré du merveilleux, ce film atypique
change peu à peu de registre et d'ampleur :
c'est une incursion très personnelle sur les
terres de la science-fiction. L'enfant a des
pouvoirs. Il est hanté par une force
surnaturelle, écho d'un ailleurs inconnu, vers
lequel le récit roule à tombeau ouvert. Pour son
quatrième long métrage, le réalisateur joue
avec les codes du genre, emprunte ses voies
rapides — suspense, hypothèses et révélations
— et ses chemins oubliés — effets spéciaux un
peu « vintage », volontairement artisanaux,
presque bricolo, hommage à la SF des années
70-80.
Mais, au-delà des explosions de lumière, des
secousses telluriques et autres bizarreries
ébouriffa ntes
—
ne
pa s
manq uer
l'extraordinaire chute d'un satellite sur une
station-service —, Jeff Nichols poursuit les
mêmes thèmes. Où l'on retrouve son acteur
fétiche, le poignant et sourcilleux Michael
Shannon dans le rôle du père, mais aussi ses
obsessions. Comme dans Take shelter, il est
question de l'amour filial, ce gouffre
d'angoisses, et d'un père de famille face à la
nécessité de laisser son enfant s'émanciper,
malgré la violence du monde. Comme avec
Matthew McConaughey, le héros idéaliste et
marginal de Mud, le cinéaste fait aussi la part
belle à la foi, poétique, totale, insensée. Les
parents d'Alton (Kirsten Dunst, tout en retenue,
joue la mère, embarquée en chemin), les
membres de la secte, et même la police, tous
courent vers quelque chose qui les dépasse, qui
nous dépasse.
Ne comptez pas sur Jeff Nichols pour dévoiler la
totalité du mystère. Il l'a voulu trop grand pour
ses personnages, largement ouvert à
l'imagination de ses spectateurs. C'est à la fois
passionnant — une espèce d'ode fervente et
douloureuse à l'inconnu — et presque naïf,
dans la vision finale grandiose et clinquante
d'un autre monde. Un mélange de toc et de
rêveuse exaltation qui rappelle à dessein un
grand classique du genre signé Spielberg,
Rencontres du troisième type.
Cécile Mury, Télérama.
Ç
a démarre à peine et déjà, en
sélectionnant sur notre juke-box mental
un souvenir d’E.T. qui se superpose à
l’introduction du jeune héros de Midnight
Special, Jeff Nichols affiche ses intentions. Son
quatrième film sera un hommage à l’imaginaire
du Spielberg des années 70-80, plus
généralement à la SF de l’époque, et même,
précise le réalisateur, "aux films de coursepoursuite
avec
le
gouvernement
comme Starman, Rencontres du troisième
type et E.T. l’extraterrestre." Car on apprend
d’emblée qu’Alton est en cavale avec son père
Roy après que ce dernier l’a soustrait au Ranch,
une secte où les pouvoirs du gamin de 8 ans –
son regard laser transmet la prescience d’un
« outremonde » – en font une quasi-divinité.
Affublé de lunettes de plongée, le fils dévore
des comics de Superman à l’arrière de la
Chevrolet que Roy et son vieux copain Lucas
font tracer dans le noir, vers un lieu, LE lieu,
révélé par ses prophéties. Que se passera-t-il là
-bas? On ne le saura qu’au terme d’un roadmovie à travers une Amérique intemporelle,
-1-
succession
de champs
de blé et de
stations-service désertes où les cabines
téléphoniques – à pièces – se mettent toutes à
sonner en même temps. Mythologie automobile
face à la puissance occulte d’un territoire
monstre, émergence du surnaturel dans une
Amérique où la famille nucléaire est le lien
perpétuellement défait... Aux motifs
spielbergiens s’attachent des citations presque
directes, à Rencontres du troisième
type surtout, dans lequel un autre Roy roulait
aussi, sur les traces d’un lieu pressenti par des
visions. Midnight Special s’offre même un
personnage d’expert dont le nom a une
consonance française, Paul Sevier, double du
Claude Lacombe jadis interprété par François
Truffaut. Mais dans Midnight Special, les échos
les plus manifestes ne sonnent pas comme des
clins d’œil. À la différence de J.J.Abrams dans
Super8, Nichols ne laisse pas le geste mémoriel
prendre le pas sur l’actualité de son regard. Ces
référencesil les fond dans la matière du film,
dont le cadre et la couleur restituent la
sensation 80s avec une grande pureté, sans
qu’il y ait besoin d’en rajouter dans le détail
fétichiste. Pas d’aplomb postmoderne ni de
griserie rétro : cette simplicité dans la manière
de rendre hommage réduit paradoxalement la
distance où devrait se loger la nostalgie. C’est
ainsi que Midnight Special ressemble plus à un
film des années
80 qui regarde vers
aujourd’hui qu’à un film d’aujourd’hui qui se
souviendrait des années 80. Une fable pour ici
et maintenant, dont la clé serait prospective.
"Alton est plus important", assène Roy à Lucas
lorsque son ami hésite à tirer sur qui se met en
travers de leur chemin. Plus important que tout,
l’enfant n’est pas roi parce qu’il flatte le culte
régressif des adulescents grandis sous Reagan,
mais parce qu’il est celui qui, demain,
emportera l’humanité loin d’un monde
subclaquant. Fini les pères fondateurs, lestés
par leurs corps trop lourds, place aux fils
extraterrestres, de vide et de lumière.
Si Midnight Special célèbre à la façon de
Spielberg le pouvoir de l’enfance, c’est comme
ultime recours quand il ne s’agit plus que de
sauver ce qui peut encore l’être. L’âme des
enfants d’abord.
Caroline Veunac, Première.
Semaine du 13 avril 2016
C
an. (Durée : 1h43). Drame de Léa Pool avec Céline Bonnier, Lysandre Ménard,
Diane Lavallée...
Simone Beaulieu, devenue Mère Augustine, dirige un couvent au Québec.
Passionnée, résiliente, Mère Augustine consacre son énergie et son talent de
musicienne à ses élèves. Lors de son arrivée, elle prend sa nièce, Alice, une jeune pianiste
prodige, sous son aile. L’école est un haut lieu musical qui rafle tous les grands prix de
piano de la région. Il y résonne un flot de gammes, d’arpèges, de valses de Chopin et
d’Inventions de Bach. Mais lorsque le gouvernement instaure un système d’éducation
publique dans les années 60, l’avenir de Mère Augustine et de ses Sœurs est menacé.
C'est la scénariste Marie Vien, elle-même pensionnaire dans un couvent
quand elle était jeune, qui a écrit la première version de cette histoire.
Elle a ensuite fait appel à Léa Pool pour l’aider à structurer son scénario
puis le réaliser. La cinéaste a particulièrement été intéressée par le projet
pour pouvoir mettre en scène la musique au sein d'un univers féminin.
bâtisseuses et ont apporté beaucoup
de choses au niveau social et culturel.
La plupart avaient des idées de gauche, des positions très affirmées face
au monde, à la pauvreté. Souvent, elles entraient en religion car elles
n’avaient pas envie de se marier, d’avoir des enfants, de se couler dans le
moule de la femme au foyer."
Changement rapide
Réalisation
A l'origine
Léa Pool avait, en 1975 pour ses études, déménagé au Québec. Sur
place, elle fut fascinée par la liberté qui y régnait mais apprit que six ans
plus tôt, les choses étaient bien différentes puisqu'à ce moment la religion
avait encore une emprise forte sur la population (qui souffrait d’une
éducation très rigide). La cinéaste a été particulièrement interpelée par la
rapidité de ce changement et s'est demandée pourquoi il n’a pas encore
été traité de l’intérieur via le point de vue d'une petite communauté
religieuse.
Léa Pool a opté pour une mise en scène proche des actrices sans pour
autant filmer en trop gros plans, la cinéaste ne voulant pas faire un film
trop claustrophobe. "La nature était donc importante, il fallait maximiser
sa présence, en faire un espace de liberté, une ouverture conquise peu à
peu par ces sœurs. J’ai été beaucoup inspirée par le peintre Jean-Paul
Lemieux pour les scènes de neige. Je voulais partir de l’hiver pour aller
vers un dégel progressif, jusqu’à l’éclosion du printemps. Le film raconte
aussi le dégel d’une société."
Casser les clichés
Authenticité
Les religieuses du couvent dépeintes dans La Passion d'Augustine sont
pour la plupart progressistes, comme sœur Augustine qui se bat pour les
valeurs mêmes qui vont mener à la perte son école. Léa Pool explique ce
choix : "On tombe trop souvent dans le cliché de la religieuse rigide et
rétrograde. Beaucoup d’entre elles étaient au contraire des personnes
d’exception, très libres et avant-gardistes. Au Québec, les plus grands
hôpitaux, en particulier les hôpitaux pour enfants ont été fondés par des
sœurs. Ainsi que les grandes écoles de musique. Elles étaient des
N
ée en Suisse, Léa Pool arrive au Québec en 1975 et
démarre sa carrière de réalisatrice dès 1979 avec Strass
Café. Depuis, elle a reçu plusieurs prix et plusieurs
hommages à travers le monde. Il semble pourtant que la
France ne se soit jamais réellement penchée sur l’une de ses œuvres. On
ne peut que le regretter au vu de la qualité de La passion d’’Augustine,
une histoire née de sa rencontre avec la scénariste Marie Vien, elle-même
pensionnaire dans un couvent à la fin des années soixante. A cette
époque, la religion avait encore une emprise très forte sur la population,
tout particulièrement au sein des écoles. Pour la plupart d’entre nous, les
écoles religieuses, qu’elles se situent au Québec ou dans n’importe quelle
partie du monde, symbolisent austérité et rigidité. Avec humour et
fantaisie, Léa Pool nous en offre une toute autre vision, grâce à la
description juste de cette communauté de femmes, aux profils divers et
variés.
La plus emblématique reste bien sûr sœur Augustine (Céline Bonnier, très
connue au Québec), femme aux véritables valeurs humanistes qui
manage « son entreprise » avec la même ardeur et la même autorité
qu’un dirigeant de PME. Grâce à des flashbacks, on apprend qu’elle a eu
une vie de femme avant d’entrer dans les ordres et qu’à un moment
difficile de sa vie, la musique a été salvatrice pour elle. Généreuse, elle
Au départ, Léa Pool a commencé par rencontrer des comédiennes qui
savaient tout juste jouer au piano, mais elle s'est rapidement rendue
compte qu'il allait être difficile et ennuyeux de "tricher" à l'écran en
alternant avec des plans sur les mains d’une vraie pianiste. La réalisatrice
a donc décidé de chercher ses comédiennes du côté des écoles de
musique. Au final, aucune image n'a été doublée dans le film, même du
côté des actrices professionnelles comme Céline Bonnier qui jouent
réellement.
souhaite qu’à leur tour ses élèves puissent s’appuyer sur la musique pour
embellir leur vie, particulièrement Alice (Lysandre Ménard), sa nièce,
jeune fille rebelle et au caractère bien trempé à qui elle s’attache
rapidement et dont on peut imaginer qu’elle lui rappelle celle qu’elle fut
dans sa jeunesse. Et puis il y a la sœur syndicaliste, la sœur hermétique
au changement mais non moins attachante et toutes les autres. Toutes
ont une personnalité très marquée, toutes ont des idées bien précises
qu’elles n’hésitent pas à exprimer même si elles sont en désaccord avec
leurs autres. Une communauté bien soudée où le mot solidarité prend tout
son sens. Elles ne sont pas entrées dans ce couvent par dépit. Elles ne
souhaitaient pas se marier, avoir des enfants et se couler dans le moule
de la femme au foyer. Le couvent symbolisait pour elle un lieu
d’émancipation où elles pouvaient étudier, faire de la musique, faire
exister les valeurs auxquelles elles étaient attachées... Pas question de
n’être que des contemplatrices, elles se veulent bâtisseuses, de
préférence dans la joie et la bonne humeur. La scène où une sœur
extravertie fait cirer le parquet en rythme par les jeunes pensionnaires
décrit avec bonheur cette ambiance perpétuelle de légèreté.
Véhiculer la spiritualité non pas par la religion mais plutôt par la musique,
voilà qui adoucit les mœurs, surtout quand la musique est transcendée
par la magnifique prestation, entre autres, de la jeune Lysandre Ménard.
Elle est avant tout une musicienne hors pair qui nous régale de morceaux
classiques parfois mâtinés de jazz grâce aux prouesses du directeur
musical François Dompierre. Grands moments musicaux assurés ! Et
quand elle délaisse son piano, Lysandre se révèle être une fabuleuse
(c’est son premier rôle au cinéma) comédienne. C’est avec une fougue
plus vraie que nature qu’elle incarne cette jeune fille contrastée, assagie
par les morceaux qu’elle joue et enflammée par la vie qu’on lui impose. La
caméra passe avec aisance des mains aux visages des musiciennes au
rythme des partitions, apportant ainsi fluidité et authenticité à leur jeu.
Pour conforter cet esprit d’ouverture vers le monde, le film offre de belles
images de nature. Du plan de démarrage sous la neige où n’apparaît que
cette grande bâtisse aux briques rouges austères, on évolue vers l’arrivée
du printemps, laissant entrevoir des prairies à l’herbe verdissante,
symbole du passage d’une société ténébreuse à une époque progressiste.
-2-
Claudinne Levanneur, http://www.avoir-alire.com.
Semaine du 20 avril 2016
F
ranç. (Durée : 1h35). Comédie de Julien Rappeneau avec Noémie Lvovsky, Kyan
Khojandi, Alice Isaaz...
Vincent Machot connaît sa vie par cœur. Il la partage entre son salon de coiffure,
son cousin, son chat, et sa mère bien trop envahissante. Mais la vie réserve parfois
des surprises, même aux plus prudents... Il croise par hasard Rosalie Blum, une femme
mystérieuse et solitaire, qu’il est convaincu d’avoir déjà rencontrée. Mais où ? Intrigué, il se
décide à la suivre partout, dans l’espoir d’en savoir plus. Il ne se doute pas que cette filature
va l’entraîner dans une aventure pleine d’imprévus où il découvrira des personnages aussi
fantasques qu’attachants. Une chose est sûre : la vie de Vincent Machot va changer…
Première expérience
Rosalie Blum est le premier long-métrage de
Julien Rappeneau, fils du réalisateur Jean-Paul
Rappeneau : "Je n'avais jamais tourné de ma
vie, ni même réalisé de court métrage. J'ai
donc appris en faisant. Mais je savais
exactement ce que j'attendais de chaque
personnage et où je voulais aller. Nous avons
fait des lectures pour qu'ils apprennent à se
connaître et pour que je me familiarise avec
leur travail. Cette phase a permis aux acteurs
d'entrer dans leurs rôles.", explique le metteur
en scène à qui l'on doit les scénarios de Cloclo,
Faubourg 36 ou Pars vite et reviens tard.
«R OSALIE
B LUM »:
KYAN KHOJANDI EST
«UN BOSSEUR, PAS UN
GLANDEUR»
RÉVÉLATION Le créateur de
«Bref» démontre son talent de
comédien dans l'excellente
comédie
de
Julien
Rappeneau, «Rosalie Blum»…
Adaptation de BD
Rosalie Blum est l'adaptation de la bandedessinée du même nom créée par Camille
Jourdy et parue pour la première fois en 2007.
Le réalisateur Julien Rappeneau a découvert la
BD à la parution de son 3ème tome en 2009 et
a tout de suite été touché par les
personnages : "La transposition de cette
histoire m'est alors apparue comme une
évidence. Comme si cette Rosalie, qui
correspondait si bien à ma sensibilité, avait
infusé en moi. Je me suis d'autant plus
enthousiasmé pour ce projet qu'il y avait là une
vraie singularité et que je pouvais y injecter
des choses personnelles", explique le cinéaste.
Découpage
Julien Rappeneau a choisi de découper le film
en 3 parties, à la manière des 3 tomes déjà
parus. Pour ce faire, il est parti s'isoler en
Bretagne afin de travailler sereinement : "Dès
le départ, j’ai pensé le film comme un triptyque
en utilisant des cartons avec le nom des
personnages. Le roman graphique est luimême en trois volumes, mais ils ne sont pas
intitulés de la même façon. J'ai lu et relu la BD
pour bien m'imprégner de son esprit, puis je
l'ai refermée pour l'adapter", raconte le
metteur en scène.
Casting
Pour le rôle de Vincent, Julien Rappeneau a
très vite pensé à Kyan Khojandi qu'il avait
découvert dans Bref sur Canal+ : "Je trouve
qu’il dégage beaucoup d’empathie. Il a un côté
maladroit et beaucoup de charme", affirme le
cinéaste. Concernant Noémie Lvovsky, le
metteur en scène trouvait qu'elle pourrait
dégager le désarroi dans lequel vit Rosalie
Blum. Il a donc apporté personnellement le
scénario à l'actrice chez elle. Cette dernière a
rappelé le lendemain en acceptant le rôle. Pour
incarner Aude, Rappeneau a pensé à Alice
Isaaz en visionnant La Crème de la crème :
"J'ai trouvé qu'elle était très jolie, excellente
actrice. J’aimais notamment beaucoup sa voix
grave qui tranche avec son physique. On s'est
rencontrés et je l'ai choisie rapidement. J'ai
découvert sur le tournage à quel point elle a
une vraie capacité émotionnelle."
Et si Kyan Khojandi était un excellent acteur ? Sa prestation dans Rosalie Blum, premier film de
Julien Rappeneau le donne à penser. Le co-créateur des séries Bref et Bloqués émeut dans la peau
d’un solitaire qui change de vie en rencontrant une femme étrange incarnée par la toujours parfaite
Noémie Lvovsky. Cette comédie rend justice à la bande dessinée de Camille Jourdy (éditions Actes
Sud) dont elle retrouve la liberté de ton. Kyan Khojandi s’est confié à 20 Minutes avant de repartir
sur la scène de L’Européen (Paris, 17e) où il joue Pulsions, son one-man-show qui sera bientôt en
tournée.
Le cinéma, c’était une matière obligatoire pour vous ?
En fait, c’est ce que j’ai toujours voulu faire. J’ai grandi avec un rêve de cinéma. J’ai juste pensé
longtemps que c’était impossible. Les opportunités sont venues petit à petit avec des films comme
Lou, journal infime (Julien Neel, 2014) Casse-tête chinois (Cédric Klapisch, 2013) ou Rosalie Blum
qui m’offre mon premier grand rôle.
Pourquoi impossible ?
Cela paraissait réservé aux gens qui ont des relations et des cheveux ! C’est pour cela que j’ai
commencé à réaliser et à monter des sketches tout gamin avec ma petite caméra. Je viens d’une
génération qui n’est pas passée par la case « court-métrage » ou par les écoles de cinéma, mais qui
a mis tout de suite la main à la pâte.
Quand vous parlez de « génération », vous pensez à des gens comme Franck
Gastambide ?
Exactement et aussi à Orelsan avec qui je bosse sur Bloqués. Nous sommes un petit nombre à avoir
eu des parcours similaires, passant par la case web et le désir de faire des choses par nous-mêmes,
sans attendre que quelqu’un nous produise. Même si je donne l’impression du contraire, je suis un
bosseur pas un glandeur.
Quelle a été le plus difficile pour vous sur Rosalie Blum ?
Apprendre à faire confiance. J’ai le défaut des gens qui se sont faits seuls, celui d’avoir envie de
tout contrôler. La qualité du scénario, tout en tendresse, et le talent de Julien Rappeneau m’ont
permis de me laisser aller. J’ai découvert le plaisir de n’avoir qu’à jouer la comédie sans m’occuper
du reste.
Cela vous est-il facile ?
Pas forcément, car je suis un grand traqueur et ça ne s’arrange pas en vieillissant. C’est bizarre de
voir comme on prend conscience des choses en devenant adulte. Enfant, je n’avais pas peur de me
produire avec mon violon ou de jouer dans un spectacle à l’école…
Comment voyez-vous l’avenir ?
Le plus dur, c’est de se renouveler car je m’ennuie vite. Dès que je sais faire quelque chose, cela
cesse de m’intéresser. Là, je joue dans le nouveau film d’Albert Dupontel, Au revoir là-haut. Les
tournages sont une école précieuse qui m’apprend à penser davantage visuellement sans avoir à
passer par le dialogue. J’aimerais réaliser un long-métrage.
Ce sera une comédie ?
Je voudrais bien le savoir ! J’attends d’avoir l’idée d’une bonne histoire et je prends des cours de
scénario notamment avec le script doctor John
Truby. Je n’ai jamais cherché la drôlerie à tout
prix. J’ai envie de faire partager des émotions
que tout le monde a pu ressentir ce qui explique
Drôle, touchant et intelligent, le
sans doute la diversité de mes fans.
Les Fiches du Cinéma
premier film de Rappeneau fils est
une franche réussite.
-3-
Caroline Vié , 20 minutes.
Semaine du 27 avril 2016
Mardi
3 mai
à
14h00.
F
ranç. (Durée : 1h56). Drame d'André Téchiné avec Kacey Mottet
Klein, Corentin Fila, Sandrine Kiberlain...
Damien, 17 ans, fils de militaire, vit avec sa mère médecin, pendant
que son père est en mission. Au lycée, il est malmené par un
garçon, Tom. La violence dont Damien et Tom font preuve l’un envers l’autre
va évoluer quand la mère de Damien décide de recueillir Tom sous leur toit.
Bande de garçons
Pour écrire le scénario de
Quand on a 17 ans, André
Téchiné a collaboré avec une
spécialiste des affres de
l'adolescence, Céline Sciamma :
"André et moi avons travaillé
ensemble, à la table, sur le
séquencier. Je lui ai ensuite
livré une première continuité
dialoguée – une sorte de
réinterprétation de ce que nous
avions écrit. Il a repris le texte
seul puis nous avons retravaillé
ensemble", analyse Céline. On
doit notamment à la cinéaste
Naissance des pieuvres avec
Adèle Haenel, mettant en scène
la relation trouble entre deux
jeunes filles et Bande de filles,
relatant l'histoire d'un groupe
de jeunes adolescentes. Cette
fois, l'artiste s'est attaquée à un
récit mettant en scène deux
ados qui se déchirent et qui
n'assument pas leur attirance. À
noter que Téchiné avait déjà
mis en scène l'adolescence dans
Les Roseaux sauvages en 1994,
récompensé notamment par le
César du Meilleur Film.
O
n le croyait perdu... André Téchiné revient avec une histoire d'amour
magnifique. Coup de coeur.
EN 1994 sortait Les roseaux sauvages, film générationnel d'André
Téchiné, amour adolescent, histoire de corps et de nature, de peau et de
chagrin. Depuis, le cinéaste n'a pas fait mieux. Il a réussi quelques belles choses
(Les temps qui changent) mais a plus souvent été en demi-teinte, quand il ne
s'est pas totalement fourvoyé, comme pour Impardonnables. La critique continuait à soutenir, parfois du bout du
clavier, un auteur important (Hôtel des Amériques, Barocco, deux chefs-d'oeuvre) mais le public boudait - à raison.
Il faut donc le dire d'emblée: Quand on a 17 ans est ce qu'il a fait de mieux depuis... Les roseaux sauvages. Il y est
aussi question d'amour adolescent, de corps et de nature, de peau et de chagrin. Mais pas de redites pour autant: à
chaque film son époque, ses comédiens, ses couleurs, ses humeurs. L'arrivée de Céline Sciamma comme
coscénariste (Naissance des pieuvres, Tomboy, Bande de filles) a sûrement été déterminante; elle a apporté l'acuité
d'un regard sur cet âge mouvant et bouleversant, également sa faculté à mettre du romanesque dans l'intime et de
l'émotion dans la trivialité.
Du réalisme brut à l'intimité des draps
Damien (fils unique) et Tom (fils adopté métis) sont dans la même classe d'un lycée, au pied des Pyrénées. Regards
volés, gestes agressifs, silence de feu: l'amour naît dans cette rage à ne pas exprimer ses sentiments. L'intelligence
du récit est d'avoir inclus à ce duo la mère de Damien, médecin généreuse, épouse d'un militaire, femme (souvent)
seule et copine, qui aimerait tant prendre sa vie à son compte sans devoir la subir. Le film oscille ainsi d'un point de
vue à un autre.
Du coup, tout y est incarné. Quand on a 17 ans passe du réalisme brut à l'intimité des draps. C'est un mélo qui se
coltine le quotidien, une histoire d'amour qui n'évacue jamais le temps présent; la mort, le travail, le repas du soir à
préparer, la clôture à réparer. Mais sur cette nécessité à vivre, souffle la rage d'aimer.
Le mélange est casse-gueule; qu'il soit réussi élève le film vers les sommets. Sandrine Kiberlain lui apporte sa classe
et sa droiture qui déjoue le pathos d'un oeil espiègle, Kacey Mottet Klein et Corentin Fila tiennent la note jusqu'au
bout, comme si la difficulté des comédiens à se jeter corps et âme dans cette histoire donnait à leur personnage la
force émotive nécessaire.
Sous influence
Pour cette "aventure des sentiments", André Téchiné avait en tête le roman d'Emily Brontë, Les Hauts de HurleVent. Dans ce classique de la littérature anglaise, Heathcliff, le personnage principal, est lui aussi métissé et adopté.
Comme Tom.
Studio Ciné Live.
:
Programme des Court-Métrages du mois du mois, en partenariat avec
Semaine du 6 avril :
3D No Glasses de Luis Garone. Animation. (Durée : 1min55). Explication d'un nouveau procédé bio-techno pour voir le relief 'sans lunettes'.
Semaine du 13 avril :
Aubade de Mauro Carraro. Animation. (Durée : 5min25). Un soleil noir se lève sur le lac Léman. Dans un surréaliste contre-jour,
plusieurs baigneurs et oiseaux aquatiques assistent au spectacle de l'aube, hypnotisés par la musique d'un contrebassiste.
Semaine du 20 avril :
A la française de Morrigane Boyer, Julien Hazebroucq, Ren-Hsien Hsu, Emmanuelle Leleu et William Lorton.
Animation. (Durée : 7min). C'est un après-midi à Versailles, du temps de Louis XIV.
Semaine du 27 avril :
Le Plongeon de Delphine Le Courtois. Ficton. (Durée : 9min54). Treize ans, au bord du précipice de l'âge adulte, un
garçon sur un plongeoir fait face à l'abysse.
Prochainement sur nos écrans :
Les visiteurs : La révolution Comédie de Jean-Marie Poiré avec Jean Reno, Christian Clavier,
Marie-Anne Chazel ... (en sortie nationale, à partir de 8/9 ans)
Le livre de la jungle Film d'aventure de Jon Favreau avec Neel Sethi, Ritesh Rajan, Sara
Arrington... (en sortie nationale, à partir de 8/9 ans)
Captain America : civil war Film fantstique d'Anthony et Joe Russo avec Chris Evans, Robert
Downey Jr., Scarlett Johansson... (en sortie nationale, en 2D et 3D)
Robinson Crusoë Film d'animation de Vincent Kesteloot avec les voix de Matthias Schweighöfer,
Kaya Yanar, Dieter Hallervorden ... (à partir de 6 ans, en 2D et 3D)
Les malheurs de Sophie Comédie dramatique de Christophe Honoré avec Anaïs Demoustier,
Golshifteh Farahani, Muriel Robin... (à partir de 8 ans)
-4-
P o u r
p l u s
d’information sur la
programmation
du
cinéma
Image,
consultez son site
internet :
www.imagecinema.org