MCF histoire contemporaine CERHIC

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MCF histoire contemporaine CERHIC
Marc DELEPLACE
MCF histoire contemporaine
CERHIC-EA 2616
Université de Reims Champagne-Ardenne
IUFM Champagne-Ardenne
Didier Nourrisson (dir.), Enseigner l’État, Actes du colloque IREGH, IUFM de Lyon-CRDP
d’Auvergne, 2000.
L’État au péril de la formation du citoyen ?
Si « l’actualité est son commencement réel » (M. de Certeau, 1975)1, nul autre objet que
l’enseignement de la notion d’État, peut-être, ne nous offre un meilleur exemple de cette
« rétrodiction » (A. Prost, 1996 ; P. Veyne, 1978) propre à la démarche de l’historien, et que les
accompagnements des programmes les plus récents de l’enseignement secondaire, notamment pour le
lycée, incitent les professeurs à transposer dans le cadre de la classe. Ce sont quelques-uns des effets
de cette démarche pédagogique qui intéressent particulièrement dans ce cas les relations entre l’histoire
et l’éducation civique, ou, pour utiliser un langage plus inscrit dans les préoccupations officielles, la
formation du citoyen, que nous voulons ici interroger. Pour ce faire, nous nous appuyons
essentiellement sur une analyse de l’évolution des programmes officiels depuis 1945.
Notre propos vise à la fois à mettre en évidence les éléments constitutifs d’un enseignement de
l’État vu sous cet angle particulier, c’est-à-dire repérer quelle consistance il lui est donné à tel ou tel
moment, et à suggérer que cet enseignement est le plus exposé aux risques de l’imbrication des
finalités qui caractérise l’enseignement de l’histoire-géographie en France, tel que redéfini encore par
les textes les plus récents : formation de l’esprit critique, acquisition d’une culture historique et
géographique, formation du citoyen ; toutes devant concourir à leur manière à la formation générale
de l’individu libre et responsable que l’on considère comme le fondement irréductible de l’État
démocratique moderne (CNDP, 1997, p. 11).
Or la rencontre entre finalité culturelle et civique, quasi originelle dans l’enseignement de l’histoire
(E. Lavisse), peut, nous semble-t-il, se faire au détriment de la dimension spécifique de l’histoire,
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Toutes les indications entre parenthèses renvoient à la bibliographie de fin d’article.
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lors même que les programmes, comme nous allons tenter de le montrer, enregistrent tout à la fois
les évolutions de la recherche et celles de la société. Nous suivrons donc cette évolution à l’aide de
quelques points de repère (programmes de 1947, 1962, et deux dernières générations, que par
commodité nous désignerons programmes de 1985 et 1996), pour soutenir quelques éléments de
réflexions sur la richesse et les dangers de ce mariage ancien entre l’histoire et l’éducation civique en
France.
I. L’ÉTAT DANS LES PROGRAMMES DE 1947 ET 1962 : PARTOUT ET NULLE PART ?
1) L’État comme cadre de référence
Cadre de référence de présentation des programmes de géographie, l’État apparaît jouer un rôle
identique en histoire, au même titre que la période ou la présentation chronologique. Les remarques
faites de longue date sur cette dernière, imposée comme cadre « naturel » de présentation des
programmes d’histoire depuis Victor Duruy (H. Moniot, 1993), quant à sa « réification » dans la
recherche historique aussi bien que dans l’enseignement qui en découle (D. Milo, 1991), nous
semblent pouvoir également s’appliquer à l’État. Individu acteur d’une histoire qui s’incarne encore
à la manière du Siècle de Louis XIV de Voltaire (l’expression « Siècle de Périclès », et son dérivé
atténué « Athènes au temps de Périclès », figure jusque récemment dans les programmes de 6 e pour
désigner l’étude de l’Athènes du
Ve
siècle), l’État, en tant que territoire identifié de manière
anhistorique (frontières, capitale, gouvernement, lois, administration), forme tout autant la trame
des programmes que le découpage chronologique. Avec en arrière-plan un modèle appliqué
rétrospectivement, celui de l’État-nation, concomitant ou presque de l’introduction de l’histoire
dans l’enseignement.
La liste des États inscrits dans les programmes de 1947 et de 1962 plaide en faveur de cette
assertion. Et cela de trois manières complémentaires.
Tout d’abord la précocité de la référence au cadre territorial étatique, introduite dès les programmes
de 6e, à l’exception de l’Égypte pour laquelle seule le terme de civilisation est utilisé. Mais dès
l’étude de la Grèce, c’est le cadre de la cité qui s’impose au travers des exemple d’Athènes et de
Sparte. Dans la suite, tant au collège qu’au lycée, et malgré une atténuation certaine pour l’ensemble
du nouveau programme de 6e en 1962 (la périodisation entre Grèce archaïque et Grèce classique
l’emportant malgré tout sur la cité), la présentation des sujets d’études se fait essentiellement par
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l’intermédiaire d‘une liste d’États à connaître dans un moment donné de leur histoire (« La France et
l’Angleterre du
XIe
au
XIVe
siècle (5e-1947) ; « La France sous Louis XV » (4e-1947) ; « Les États
continentaux, la Prusse de Frédéric II, la Russie de Catherine II, l’Autriche de Joseph II » (4e-1947)).
Remarquable est, à cet égard, la manière dont certains territoires n’apparaissent dans cette liste que
lorsqu’il s’y forme un État (« Formation des États-Unis » (4e-1947), « L’Indépendance de la
Belgique » (1re-1947)), ou lorsqu’il se défait (« Partage de la Pologne » (4e-1947)). Dans le cas
contraire, la référence au cadre étatique n’est jamais très éloignée. C’est ainsi que le « Monde au
début du
XXe
siècle », en 3e en 1947, renvoie aux « alliances et aux ententes » (entre États donc),
tandis que la partie intitulée « transformation de l’Europe aux
XIVe
et
XVe
siècles », qui clôt le
programme de 5e à la même époque, est accompagnée des précisions « Papauté, Angleterre, Espagne,
Allemagne, Orient ».
L’ampleur de la liste des États ainsi parcourus, que le programme de lycée de 1947, qui reprend une
partie de celui de collège pour l’approfondir, enrichit encore (Provinces-Unies) et le caractère
récurent d’une telle forme de présentation (le programme de 5 e de 1947 présente successivement
l’Empire romain d’Orient, l’Empire Franc, l’Empire arabe, l’Empire germanique ; et celui de 1962
conserve à ce cadre la prééminence malgré l’adjonction systématique, et novatrice du terme de
civilisation : l’Empire et la civilisation de Byzance, l’Empire et la civilisation arabe, l’Empire et la
civilisation carolingienne) est le deuxième argument que nous retiendrons donc. Et la réforme de
1962, qui pallie le chevauchement chronologique des programmes de 1947 par une redistribution de
la périodisation réservant au lycée seul l’histoire du Monde depuis 1789, ne modifie en rien cet autre
cadre de formulation des contenus à enseigner.
Enfin, l’on sera peut-être sensible à certains choix qui nous semblent dénoter une lecture de
l’histoire du monde comme celle des États territoriaux qui le composent. Ainsi des libellés qui
introduisent une référence implicite à un cadre territorial devenu postérieurement étatique
(« L’Italie primitive et les débuts de Rome » (5e-1962)) lors même que l’étude se centre en fait à
l’évidence sur une entité d’une autre nature (la cité romaine). De même, ceux qui invitent à suivre la
naissance et le développement d’un État au travers de son accroissement territorial (« Conquête et
organisation de l’Italie par Rome » (5e-1962)). On sera tenté d’y joindre enfin les énoncés qui, sous
des dehors généralisateurs, ramènent irrésistiblement le regard vers cette référence territoriale
omniprésente, aux travers de références dynastiques qui semblent autant de paravents (« L’Europe à
l’avènement des Capétiens » (4e-1962), ou dans un sens inverse « Les Valois et la guerre de Cent ans »
(idem)).
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Ce constat, nous le redoublerons volontiers de celui que ces programmes montrent une insistance
toute particulière sur des territoires destinés à constituer, à un moment ou à un autre de leur
histoire, des États-nations européens, quitte à rapporter à cette image d’autres États, notamment
asiatiques, fort éloignés de ce modèle. C’est dans cette perspective que nous replaçons la mise en
exergue des monarchies anglaises et françaises dans les programmes de 5 e de 1947 et de 4 e de 1962,
ainsi que les énumérations proposées en explicitations de certains énoncés plus englobants. Telle la
formule se rapportant aux États continentaux (4e-1947) dont il est précisé qu’il s’agit de la Prusse,
de la Russie et de l’Autriche, certes justifiée dans l’instant du programme qui se rapporte au
XVIIIe siècle,
mais orientant la lecture vers le siècle suivant. Dans la même logique, on peut relever la
place faite aux unités nationales allemandes et italiennes (3e et Terminale-1947 ; 1re-1962), le
premier de ces deux exemples étant encore renforcé en 1947 par un sujet sur le « développement de
l’État de Brandebourg : la Prusse jusqu’en 1740 », en classe de seconde. L’apparition sur la scène de
l’histoire de nations nouvellement constituées en États, déjà relevée précédemment, entre également
dans cet aspect de la question (indépendance de la Belgique, ou formation des États-Unis, pour
lesquels on parle alors aussi d’indépendance).
La seule exception notable à ce constat général porte sur le programme de terminale de 1962 qui
innove sur deux points. S’il conserve le principe d’une étude de « l’évolution intérieure » des
principaux États dans l’entre-deux-guerres, il n’en fait pas le point d’entrée dans le programme,
créant une première partie centrée sur une approche plus globale du premier XXe siècle, en établissant
comme cadre d’ensemble un parcours de la connaissance du monde qui conduit de 1914 à 1945.
Choix qui se précise et s’accentue dans les autres parties du programme qui indiquent résolument
une entrée par la notion de « civilisation ». Les études de cas sont ici reléguées au second plan pour
laisser place à une présentation plus englobante divisée en trois grands moments : « Les civilisations
du monde contemporain », « Le monde musulman », « Les grands problèmes mondiaux ». Pour
chacun, le renversement de perspective est significatif. Ainsi étudiera-t-on, après une explicitation
préalable de la notion de civilisation (y compris dans ses aspects politiques), le monde occidental en
revenant sur les fondements et l’évolution de sa civilisation (tradition gréco-romaine, tradition
chrétienne et médiévale, tradition révolutionnaire et libérale) et le monde communiste européen,
l’étude des États étant rejetée dans une rubrique « Aspects particuliers ».
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Cette innovation, où se lira l’influence de Fernand Braudel, va en fait de paire avec une seconde qui
la justifie pour l’essentiel. Les programmes de 1962, au contraire de ceux de 1947, réintroduisent
(V. Duruy déjà l’avait incluse dans les programmes ; Moniot, 1993) l’histoire la plus contemporaine,
voire l’histoire immédiate dirait-on aujourd’hui, dans l’enseignement de l’histoire. Le choix d’une
approche plus générale pourrait alors se comprendre comme un moyen de surmonter les difficultés
posées par cette démarche (J.-F. Soulet, 1994), en conservant de la sorte cette distance à
l’événement si chère à l’historien, qu’il soit d’antan ou d’aujourd’hui (Fustel de Coulanges ; A. Prost,
1996), gage de son « objectivité » et marque de distinction d’avec le discours journalistique.
D’autant plus que l’enseignant se trouve alors confronté à certains États sans « histoire » identifiée
(c’est-à-dire sans épaisseur historique dans leurs nouvelles frontières) autre que celle de la
colonisation dans les années d’enseignement antérieures (monde africain noir, Madagascar).
Cela étant, cet État territoire qui sous-tend, au même titre que le déroulement chronologique
ininterrompu, l’ensemble des programmes de 1947 et 1962 est également chargé d’un contenu qu’il
convient de préciser.
2) Le sens de l’État : catalogue et histoire intérieure
La forme de nomenclature d’États que revêtent les programmes de 1947 et 1962 conduit à établir
pour chacun une sorte de carte de visite qui en fixe les traits essentiels pour un temps donné. Ce
constat ne peut cependant revêtir un caractère généralisateur. En effet, si les programmes sont
souvent libellés en terme d’étude de l’histoire intérieure des États considérés, certains d’entre eux
donnent lieu à une interprétation qui leur assigne un caractère distinctif que l’on retrouve à chaque
étape de leur développement. Ainsi en est-il de l’Angleterre pour laquelle on insiste, lors de son
apparition dans le programme de 5e de 1947 sur la limitation du pouvoir monarchique par la Grande
Charte et le Parlement, pour suivre en 4e la formation du régime parlementaire, étude que l’on
retrouve énoncée dans les mêmes termes dans le programme de 3e de 1962.
L’insistance mise sur l’histoire intérieure d’un nombre élevé d’États laisse l’impression d’une volonté
de dresser, à quelque moment chronologique que l’on se situe, une manière d’inventaire du monde
qui fait écho à la forme des programmes de géographie. Dans les programmes de 1962, cette
impression devient particulièrement sensible à partir de la classe de 4 e qui invite à rencontrer toutes
les grandes unités étatiques du monde médiéval (France, Angleterre, Saint-Empire, Papauté) ainsi
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que des unités territoriales plus floues pour l’époque considérée (Italie, Espagne), mais qui
complètent un panorama que l’on semble vouloir le plus exhaustif possible. La plénitude de la
présentation territoriale répondant de la sorte à la continuité chronologique qui forme l’autre grande unité des
programmes.
Par ailleurs, l’État semble bien s’identifier, peu ou prou, avec l’idée d’une centralisation, d’une unité,
qu’elle soit territoriale ou administrative. Comment ne pas songer, dans ces conditions, à une
surdétermination de la notion générale d’État à partir de l’exemple français ? Le développement de
l’État en France est d’ailleurs intimement lié à celui de cette centralité, qu’il s’agisse du
rassemblement progressif du territoire français autour du domaine capétien, suivi de Philippe
Auguste à Louis XI (5e-1947), ou de l’affermissement de l'autorité d’un État plus ou moins
centralisateur, aux dépens d’une féodalité disséminatrice (« progrès de la monarchie française à la fin
de la guerre de Cent ans et sous Louis XI », 5 e-1947). Cette assimilation de l’État à une double
centralité se retrouve dans la façon dont les libellés du programme de 5 e de 1962 déploient l’étude
successive des Empires byzantin, arabe et carolingien, mettant en avant implicitement leur unité, et
dans celle dont ils abordent la question de leur rupture. Elle est exprimée en termes de
« décomposition [du corps putride ?] de l’Empire carolingien », alors que le programme de 1947 usait
du terme plus atténué mais voisin de « dislocation ». Comme si l’unité (territoriale) perdue était
nécessairement synonyme de recul de l’État en tant qu’institution. À l’inverse, la croissance de
« l’État prussien » (4e-1947) recouvre aussi bien l’idée de son expansion territoriale que du
renforcement de l’autorité princière et de la centralisation administrative.
Et cela dans la mesure où l’État est systématiquement interprété en terme de pouvoir, organisé ou
exercé, et que l’étendue de ce pouvoir semble se mesurer dans certains cas à celle du territoire sur
lequel il s’exerce. Ainsi de la « conquête et organisation de l’Italie par Rome » (5e-1962). Sur un
autre plan, le recul ou le renforcement du pouvoir rythme les palinodies de l’État : limitation du
pouvoir en Angleterre (5e-1947) ; « restauration du pouvoir royal en France – Henri IV, Richelieu,
Mazarin » (4e-1947).
3) L’État comme individu et acteur de l’histoire
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L’identification de l’État comme individu acteur de l’histoire passe par différents vecteurs, adaptés
en particulier à l’époque où se réalise cette identification.
L’incarnation dans le prince ou la dynastie précède ainsi celle dans la nation. L’accent mis sur les
souverains comme éponymes ou épiphanes d’une période et d’un État, ou mieux encore d’un État
dans une période donnée, qualifie le plus évidemment ce procédé de personnification de l’État. Des
énoncés tels que « Croissance de la royauté capétienne : Philippe Auguste, saint Louis, Philippe le
Bel » (5e-1947), en sont la forme la plus atténuée. De même, la présentation de « l’Angleterre sous
Élisabeth 1re » et de « l’Espagne sous Philippe II » (4e-1947, 3 e-1962) n’exploitent pas le procédé
jusqu’au bout. En revanche, on le retrouve plus nettement à l’œuvre lorsqu’il s’agit des «États
continentaux » au
XVIIIe
siècle : « la Prusse de Frédéric II, la Russie de Catherine II, l’Autriche de
Joseph II » (4e-1947). Certaines inversions sont à cet égard également révélatrices, qu’il s’agisse de
« Les Valois et la guerre de Cent ans » (5e-1947, 4 e-1962), ou mieux encore du passage d’un énoncé
tel que « restauration du pouvoir royal en France : Henri IV, Richelieu, Mazarin » (4e-1947) à celui
de « Henri IV et la réorganisation de la France » (3e-1962 : Jacques Rancière, 1992, analyse de la
même manière la signification de l’inversion de l’ordre des titres entre la thèse de L. Febvre
« Philippe II et la Franche-Comté », et celle de F. Braudel « La Méditerranée et le monde
méditerranéen à l’époque de Philippe II »).
Il est aussi possible de retenir que le mode de présentation général des programmes comme un
catalogue d’histoires intérieures relève d’un procédé identique (« Transformations de l’Europe aux
XIVe
et
X Ve
siècles : Papauté, Angleterre, Espagne, Allemagne, Orient », 5 e-1947 ; « Histoire
intérieure des principaux États européens : Angleterre, Autriche-Hongrie, Russie, de 1849 à 1914 »,
1 re-1962). Et ce parce qu’il institue comme acteurs identifiables de l’histoire des unités territoriales,
lors même qu’elles ne sont pas identifiables à des États.
Enfin, l’apparition d’unités nouvelles au fur et à mesure qu’elles s’incarnent dans des États qui
préfigurent ou affirment le caractère de l’État-nation, les rendant aptes à tenir leur rôle sur la scène
du théâtre du monde, complète ces processus d’individualisation des États, que ce soit par
l’accession à l’indépendance : les Provinces-Unies (2de-1947), les États-Unis (4e et 2de-1947 ; 3e1962), mais aussi la Belgique (3e-1947), la Serbie et la Grèce (1re-1962) ; ou par la formation d’une
unité (Italie et Allemagne).
Ces individus sont également identifiables par leur capacité à s’animer (histoire intérieure) et se
mouvoir (histoire extérieure). Les forces qui les animent peuvent être de nature stabilisatrice, on
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parlera alors de leur organisation : « Conquête et organisation de l’Italie par Rome – le
gouvernement » (5e-1962). Elle peuvent également manifester leur croissance comme celle d’un
organisme vivant, croissance qui se réalise selon deux modalités, l’une interne (« croissance de la
royauté capétienne », 5e-1947), se rapportant à l’institution, l’autre externe (« Expansion de
l’Europe sous ses différentes formes 1849-1914, les Empires coloniaux », 1re-1962), signifiant la
capacité de développement par extension de l’organisme État identifié à son territoire. Enfin, ces
forces peuvent être celles de la déchéance de l’organisme, manifestée sous la forme neutre d’une
révolution (d’Angleterre ou de France ; russe de 1917 ou allemande de 1918 ; Terminale-1947) ou
biologique de la « décomposition de l’Empire carolingien » (4e-1962), ou encore mécanique de la
« dislocation » du même (5e-1947). Quant aux relations qui se nouent entre ces entités, s’il est bien
question des « relations internationales de 1871 à 1914 » (Terminale-1947, 1 re-1962), elles côtoient
des énoncés plus vitalistes du type « lutte du Sacerdoce et de l’Empire » (4e-1962) et « Rivalités des
maisons de France et d’Autriche » (4e-1947), davantage digne de la classique histoire diplomatique
sorélienne que de l’histoire des relations internationales initiée par Pierre Renouvin (G. Noiriel,
1998).
II. LES PROGRAMMES DES ANNÉES 1980-1990
1) Le recul de l’État comme cadre de présentation
Les deux dernières générations de programmes font apparaître une refonte complète du cadre
général de présentation de l’histoire dans l’enseignement secondaire, refonte dont il convient de
saisir ce qu’elle entraîne au niveau de l’approche de l’État. Outre le recul évident de l’État comme
cadre territorial naturel d’exposé de ces programmes, on doit insister sur le fait que ce recul
s’accompagne d’une relecture de ce que l’on souhaite enseigner sous le terme d’État, non sans
souligner, lorsqu’ils apparaissent, les nœuds de résistance de l’ancien cadre de référence, celui de
l’État territoire.
Deux thèmes prennent le pas sur celui de l’État pour structurer les nouveaux programmes dans le
sens général d’un renversement de perspective qui tend à redéfinir la place à accorder désormais à ce
dernier : ceux de civilisation et de dimension mondiale de l’histoire.
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Le premier concerne en particulier les programmes du collège définis en 1985. Les compléments du
niveau 4e précisent ainsi que « sur la trame d’une continuité – la succession des civilisations de la
Préhistoire à nos jours – les programmes de collège proposent à chaque niveau une perspective
différente sur l’espace et le temps de l’histoire » (CNDP, 1989, p. 43). Réitération d’une mise en
perspective générale des programmes déjà affirmée en 6e et 5 e, et reprise en 3 e, classe où il s’agit
d’« achever la présentation de la succession dans le temps et de la coexistence dans l’espace des
civilisations depuis la Préhistoire […] » (CNDP, 1989, p. 57). Certes, l’utilisation du terme de
civilisation n’est pas une innovation à cette date. Deux cas le mettait déjà en avant dans les
programmes de 1947 et 1962 : celui de l’Égypte en classe de 6 e (étude de la civilisation égyptienne
en 1947, de la civilisation des Égyptiens, des Mésopotamiens et autres peuples de la haute antiquité
en 1962) ; et celui du programme de terminale de 1962 dont nous avons souligné l’originalité alors,
l’une des parties étant intitulée « les civilisations du monde contemporain ». C’est-à-dire aux deux
bouts de la « chaîne » chronologique, soit lorsque le cadre étatique apparaissait trop incertain, soit
lorsque le contourner permettait d’éviter de soulever trop ostensiblement les problèmes brûlant
(Terminale-1962). Sinon, le mot, peu utilisé, se trouvait toujours en situation de « subordination »
(« L’Empire et la civilisation de Byzance », « l’Empire et la civilisation arabe », « l’Empire et la
civilisation carolingienne », 5e-1962). La situation est tout autre dès lors que la notion même de
civilisation se trouve placée au centre de l’organisation des programmes. Et ce non seulement pour
l’architecture générale des quatre années du collège mais aussi au sein de chacune de ces années. Les
programmes de 6e et de 5e de 1985 mettent en avant l’étude des « Anciennes civilisations du monde
méditerranéen » et des « principales civilisations médiévales ». D’autres notations, plus restreintes,
reprennent cette logique qui efface l’entrée classique par les États territoires : « la civilisation de la
Grèce classique » précède la cité en 6e. De même, on étudie des « notions sur la civilisation
byzantine » et l’on suit « l’évolution de la civilisation chrétienne en Europe occidentale » en 5e. Le
cas de la « civilisation arabo-islamique » est encore plus significatif dès lors qu’il s’agit « de montrer
comment un espace géographique occupé a cessé très tôt de constituer une unité politique pour
devenir l’espace d’une civilisation originale » (CNDP, 1989, p. 31).
Sans doute ce cadre général est-il fortement atténué dans les derniers programmes qui usent avec
plus de circonspection de la notion de civilisation et invitent à ne plus chercher une construction
systématique de cette notion. Les libellés eux-mêmes semblent revenir à des formulation plus
classiques : Athènes au
Ve
siècle (6e-1996), L’Empire byzantin, l’Empire carolingien (5e-1996). Y
compris lorsqu'ils conservent un caractère plus englobant (la chrétienté occidentale, 5 e-1996).
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Cependant, les accompagnements ne se font pas faute de rappeler que « Marathon ne serait qu’un
événement insignifiant s’il n’était fondateur de l’opposition entre les Grecs et les Barbares » (CNDP,
1998, p. 25), restituant ainsi à l’événement son sens plein.
Quant à la dimension mondiale qui accompagne ce passage de l’État à la civilisation, elle constitue
un « changement d’échelle » dans l’appréhension des phénomènes historiques qui porte la marque d’une
lecture rétroactive similaire à celle de la transposition implicite du cadre de l’État-nation comme
référence à l’organisation des programmes de 1947 et 1962. Ce sont les programmes de 3 e de 1985
qui développent le plus longuement cette question de la dimension mondiale de l’histoire, mais c’est
encore davantage le lycée qui est concerné par cette nouvelle perspective, dans la mesure où elle se
trouve intimement liée au renforcement du poids accordé à l’histoire du temps présent. C’est en
effet cette extension chronologique nouvelle du champ de l’enseignement de l’histoire qui induit à la
fois un rééquilibrage de la périodisation des programmes ainsi qu’une relecture marquée par un
changement d’échelle dans l’analyse historique. Les compléments de 3 e de 1985 insistent bien sur la
dimension mondiale de l’histoire au
XXe
siècle (CNDP, 1989, p. 58), liée à la « multiplication des
centres de décision », et introduit la notion de « mondialisation ». Une perspective que reprennent
les programmes de lycée. « Les sociétés contemporaines sont, dans leurs cadres nationaux, des
sociétés complexes et ouvertes sur le monde ; les influences réciproques y jouent un rôle
déterminant », est-il écrit dans la présentation des programmes de 1re de 1985 (CNDP, 1996, p. 43),
avant qu’on ne soit renvoyé à l’aphorisme de P. Valéry « le temps du monde fini commence » (idem,
p 50). Cette dimension « macrohistorique » est perceptible dans les libellés des programmes, qui
renvoient à des phénomènes généraux pour lesquels il n’est plus spécifié aucun cadre étatique :
« Guerres et crises de 1914 à 1945 » (3e-1985), « 1914-1945 : guerres, démocraties, totalitarismes »
(3e-1996). Et ce regard se projette vers le passé si l’on songe par exemple au dernier programme de
2 de qui propose l’un de ses thèmes d’étude sous le titre « la Méditerranée au
XIIe
siècle : carrefour de
trois civilisations » (2de-1996).
Cela ne signifie nullement l’effacement total de cette référence au cadre étatique. Elle se trouve
simplement tout à la fois réduite et décalée (on pourrait dire déclassée). En fait, les habitudes de la
profession et les fondements épistémologiques de la science historique concourent à préserver à la
fois le cadre chronologique (voir la brièveté de la tentative de 1977 ; J. Leduc, 1999) et celui du
cadre étatique pour donner corps aux phénomènes généraux dont on privilégie désormais l’étude.
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C’est dire que l’on incite le professeur à s’appuyer toujours sur des exemples précis, c’est-à-dire
relevant du niveau de l’État, territoire ou nation, pour fonder son propos. Le nombre de ces
exemples se trouve cependant réduit, et leur rôle subordonné à leur validité au regard de la
thématique générale : « les nouveaux programmes mettent l’accent sur les faits de civilisation et les
problèmes de société qui sont le plus souvent sans frontières, les histoires nationales, allégées de
l’accessoire, intervenant pour donner à l’ensemble une assise solide et des illustrations concrètes »
(CNDP, 1996, p. 43). La France fait exception, pour des raisons qui relèvent à la fois de la tradition
et de la formation du citoyen, ce que nous reprendrons en troisième partie. En revanche, Athènes
demeure seule parmi les cités grecques, l’Angleterre médiévale est oubliée au profit de la seule
monarchie capétienne, l’Espagne de Philippe II et l’Angleterre d’Élisabeth 1re ne sont plus
mentionnées pour elles-mêmes, le despotisme éclairé, et avec lui la Prusse de Frédéric ou la Russie
de Catherine sont également écartés, et l’Italie fasciste elle-même n’est pas épargnée par les derniers
programmes de 3e.
2) Un contenu modifié
Lorsque l’État est présent, il ne recouvre pas non plus tout à fait les mêmes contenus
d’enseignement que dans les programmes de 1947 et 1962.
Le point le plus immédiatement perceptible est le recul de l’histoire intérieure, conçue comme
l’établissement d’une carte de visite des États considérés, sensible déjà dans la forte réduction du
nombre des exemples retenus et du sens qu’on leur donne. Cela provient notamment de la
séparation entre deux formes d’approche, qui réduit notablement le champ d’intérêt de l’État. D’un
côté l’étude des phénomènes généraux qui transcendent la dimension étatique, de l’autre un État
réduit à sa plus simple expression : celle de ses institutions politiques. Ce qui se traduit par des
résultats contradictoires. Sauf encore une fois pour la France, où l’événementiel politique inscrit
dans le cadre du territoire national reprend ses droits en partie à partir de la Révolution française
(dont on présente les grandes phases, certes sous des formes et avec un poids différents, en 4 e et en
2 de). Il est particulièrement frappant de lire, dans les accompagnements de programmes qui vont le
plus loin dans l’éviction d’une telle approche, que pour la France de la Ve République, on pourra
recourir à une présentation de la succession des présidents de la République (CNDP, 1989, p. 61).
Marc Deleplace
L’État au péril de la formation du citoyen ?
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Résultats contradictoires, par ailleurs, parce qu’ils entérinent l’importance accordée à l’histoire
économique et sociale, tout en manifestant le retour du politique. Il est vrai que se produit en fait
un glissement des programmes de 1985 à ceux de 1996.
En ce qui nous concerne pour le moment, nous nous en tiendrons à constater que l’on passe d’une
histoire intérieure des états entendue dans toutes ses dimensions (politique, économique, sociale,
voire culturelle), à une approche qui se resserre autour de la connaissance des institutions, et par
suite restreint l’étude de l’État en tant qu’institution au seul niveau de son intervention politique.
L’exemple qui nous semble le plus remarquable de ce glissement d’une histoire intérieure à une
histoire des institutions de l’État est celui de l’Ancien Régime dans les programmes de 4 e. Alors que
le programme de 1985 maintenait une présentation de « l’Ancien Régime en France : aspects
économique, social, religieux, culturel et politique », celui de 1996, qui l’inclut dans un sujet général
sur « l’absolutisme et ses remises en cause », met l’accent sur « la monarchie absolue en France »,
même s’il n’omet pas qu’il conviendra de rappeler le principe de la division de la société en trois
ordres (ce qui ne laisse pas de soulever quelques interrogations sur l’articulation avec l’étude de la
Révolution française).
D’autre part, l’étude intérieure des quelques autres États qui figurent toujours dans les programmes
est désormais toujours spécifiée de manière restrictive visant à leur donner ce caractère
d’exemplarité de phénomènes plus généraux souligné plus haut, qu’il s’agisse, dans les programmes
de 3e, de l’étude de l’URSS et de l’Allemagne comme modalités de systèmes totalitaires (3e-1996),
ou de celle des États-Unis dans la perspective de la « crise des années 30 ». Pour la France, un
phénomène similaire est à relever lorsque l’on précise que l’étude de la IVe République sera guidée
par les questions de la reconstruction économique, des difficultés coloniales et de l’ouverture à
l’Europe, les institutions, entre autres, étant ici au contraire ignorées (CNDP, 1989, p. 61).
Du remodelage complet du cadre général de présentation des programmes, il ne faudrait pas
conclure trop rapidement à l’oubli total du territoire comme élément constitutif de l’État. Non
seulement parce que, malgré la quasi-disparition de l’Empire musulman, ou « arabe », d’autres
demeurent bien présents (Empire romain, Empire byzantin, Empire carolingien), mais aussi parce
que la construction des État-nations, si elle n’occupe plus autant les esprits que par le passé,
conserve cependant toute sa place par l’intermédiaire des « mouvements nationaux et libéraux »
(sous-titrés entre autres « unités italienne et allemande »), étudiés aussi bien en 4 e qu’en 2 de
(programmes de 1996). Mieux encore, l’État-nation fait l’objet de toute une partie du dernier
Marc Deleplace
L’État au péril de la formation du citoyen ?
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programme de 1re : « Nations et États (milieu du XIXe siècle à 1914) », partie pour laquelle on invite
le professeur à s’appuyer sur une carte montrant la création de nouveaux États-nations (CNDP,
1997, p. 42). Mais cette délimitation elle-même donne le sens qui est dorénavant assigné à l’État
comme cadre territorial. Plus qu’un cadre général de présentation reproductible impunément d’une
période à l’autre, il s’identifie davantage à la notion d’État-nation, et ce faisant, s’il conserve une
certaine pertinence, c’est par une historicisation mieux assumée que dans les anciens programmes.
De référence implicite naturelle, le territoire comme identification de l’État renvoie plus
explicitement à un modèle historique daté et donc circonscrit. Sa validité s’en trouve ainsi
totalement redéfinie.
Évolution qui nous renvoie en fait à la fin de la « réification » de l’État, sous-jacente aux
programmes de 1947 et 1962.
3) La fin d’une « réification »
Tout d’abord parce que l’on redonne à l’État une dynamique qui n’était sans doute pas absente des
anciens programmes, mais n’y jouait pas le même rôle.
Alors qu’ils constituaient, malgré les mises en perspective historique inhérente à un programme
d’histoire, d’une certaine manière, des unités de référence stables, on insiste plutôt sur la dynamique de
leur construction, dans le but avoué de donner à penser à l’élève que si l’État est une construction
historique, il est aussi en devenir. C’est dire que l’on rejoint ici la question du lien entre l’histoire et
l’éducation civique sur lequel nous reviendrons.
Pour l’heure, nous soulignerons simplement que les évolutions, touchant tant le territoire que les
structures internes des États, sont davantage mises en évidence dans les libellés des programmes.
Pour nous en tenir à la dernière mouture de ceux-ci, si l’étude de Rome à partir de « la cité et son
expansion » ne diffère pas sensiblement de la « conquête et organisation de l’Italie par Rome », nous
remarquerons cependant qu’elle envisage davantage la question du point de vue des structures de
l’État que de la simple absorption de nouveaux territoires, ce que confirme le fait que l’on précise,
pour l’étude de l’Empire romain, que l’on insistera sur « le rôle de l’empereur et l’adaptation des
institutions de la cité » (CNDP, 1998, p. 20). En 2 de, on invite l’élève à suivre le « processus de
romanisation » au sein de l’Empire.
Mis à part le cas du « déclin de l’Europe », le vocabulaire qui spécifie la dynamique de l’État fait la
part plus belle à des termes positifs tels que « adaptation ». L’évolution de l’Empire carolingien est
Marc Deleplace
L’État au péril de la formation du citoyen ?
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ainsi décrite sous le terme de « partage de l’Empire de Charlemagne » (5e-1996), plus neutre que
celui de « décomposition ».
Une évolution que nous rapporterions volontiers au recul, dans les implicites qui sous-tendaient la
présentation des États dans les anciens programmes, du modèle français identifiant unité et force de
l’État, unité territoriale et existence de l’État. Modèle conservé en revanche dans le cas de la
France. Le programme de 5e nous le rappelle à deux reprises. Lorsqu'il s’agit d’étudier « le Royaume
de France et l’affirmation de l’État (X e-XVe siècles) », on précise que « l’étude est centrée sur la
construction territoriale du royaume et l’affirmation de l’État » (CNDP, 1998, p. 71). Et concernant
le royaume au
XVIe
siècle, on prend soin d’ajouter qu’il « s’agit seulement de montrer comment la
monarchie française s’efforce d’asseoir son autorité et d’unifier le royaume en dépit des multiples
forces centrifuges qui l’affectent » (idem, p. 72), alors que ce rôle négatif n’est plus assigné par
ailleurs au système féodal.
Dernier élément qui joue dans ce processus de déconstruction du rôle et de la place de l’État dans la
présentation des programmes de l’enseignement secondaire, c’est le recul de l’histoire politique. Non
pas par la place qu’elle occupe en termes de temps consacré, car de ce point de vue, les programmes
de 1996 témoignent au contraire d’un « retour du politique » très net, tant au travers de l’exemple
de la France d’Ancien Régime, nous l’avons vu, que de celui de la Révolution française, notamment
en 2de (suivre les « expérimentations politiques »), ou dans l’approche de l’histoire contemporaine
avec la place nouvelle faite à l’étude des modèles idéologiques (3e, 1 re et Terminale-1996). Mais
recul du politique par l’apparition et le maintien de libellés ouvertement orientés vers l’histoire
économique et sociale, tandis que ceux à connotation politique ont changé de sens. En fait, il serait
peut-être plus judicieux encore de rapporter cette évolution au souci d’aborder des questions dont la
compréhension exige de sortir du cadre étroit du territoire étatique. L’étude de phénomènes de
longue durée, touchant aux structures sociales et économiques de l’Europe médiévale et moderne
(4e, 5e), aussi bien que celle des évolutions idéologiques ou de l’histoire des idées (lycée),
contraignent en quelque sorte à une telle révision en profondeur des programmes. Révision qui
résiste finalement, dans leur dernière version, au retour du cadre chronologique, lié aux craintes de
voir se diluer, pour l’élève, le sens de la temporalité historique.
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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Il nous reste à proposer un sens à ces évolutions des programmes depuis 1945, c’est-à-dire à
interroger plus ouvertement le lien entre histoire et formation du citoyen dans l’enseignement
français.
III. HISTOIRE ET ÉDUCATION CIVIQUE : D’UN MODÈLE À L’AUTRE
1) De l’État-nation au Monde : pertinence d’un niveau d’analyse
Nous avons souligné ce que représente, comme renversement de perspective, l’évolution des
énoncés des programmes entre 1947 et 1996, qui font passer l’État du statut d’objet privilégié de
l’étude historique à celui d’exemple soutenant une démonstration dont l’intérêt premier se situe à un
autre niveau d’analyse. Or ce renversement comporte deux aspects qu’il convient de distinguer, mais
qui contribuent également à disqualifier l’État comme niveau pertinent de l’analyse.
D’une part, ce renversement se produit dans l’ensemble des programmes, de la 6 e à la terminale. On
peut lire dans ce changement de fond l’influence de l’évolution des centres d’intérêt de la recherche
historique, qui déporte le centre de gravité des programmes vers l’histoire économique et sociale, qui
ne se laisse pas aussi aisément enfermer, ni dans une chronologie classique, courte ou moyenne, ni
dans les limites d’une approche par État. Tout en relevant la capacité de résistance d’une histoire
politique plus classique, comme nous avons pu le constater par quelques exemples.
D’autre part, il enregistre la place plus grande laissée à l’histoire contemporaine. Or cette histoire, on
aime à le répéter depuis Paul Valéry, est celle d’un « monde fini », dans lequel les relations sont
suffisamment serrées et étendues pour que l’histoire intérieure d’un État dépende plus étroitement
des conditions générales de son environnement. L’on ne peut que souscrire de ce point de vue, au
propos de Valéry et lui trouver les accents d’une anticipation de la mondialisation qui devient
aujourd’hui un sujet d’enseignement. Le développement des institutions internationales depuis
1945, ainsi que la constitution d’ensembles régionaux qui transcendent les frontières de l’Étatnation, enfin la mondialisation de l’économie qui voit remise en cause le contrôle de celui-ci sur des
domaines qui jusque-là relevaient de sa compétence (malgré les résistances et les difficultés
rencontrées pour concrétiser ce processus, comme le montre l’échec récent de la conférence de
l’OMC à Seattle), incitent l’historien, et l’enseignant en histoire, à changer d’échelle pour rendre
intelligible aux élèves le monde qui est le leur, objectif avoué des programmes de lycée.
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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Dans ces conditions, c’est la déperdition de souveraineté, de capacité de décision, qui trouve un
écho dans ce changement des programmes, et particulièrement dans l’exemple de la France envisagée
dans son rapport à l’Europe et au Monde. Si le programme de Terminale inclut toujours une étude
des institutions de la Ve République (« des citoyens responsables doivent comprendre le pays dans
lequel ils vivent »), on ne peut plus imaginer une histoire de celle-ci qui ne prendrait pas en compte
son inscription dans le processus de formation de l’Europe et dans l’intégration au sein des grands
organismes internationaux (OTAN, ONU, OMC, etc.). « L’étude de la France se conçoit à la fois
comme une étude de cas et comme une initiation à la vie civique : c’est dans ce sens qu’il faut
aborder notamment l’examen des institutions et la vie politique » (Terminale-1996). Institutions
exemplaires par conséquent d’une réalité qui ne se réduit pas au seul cas de la France.
L’exemple de l’Allemagne après 1945 est encore plus net dans les accompagnements des programmes
de 3e de 1996. Si l’on retient qu’il doit être particulièrement analysé dans le cadre du chapitre sur les
affrontements Est-Ouest, c’est qu’il « permet de voir concrètement ce que fut cette bipolarité,
marquée dans le territoire même et dans cette ville symbole que fut Berlin (CNDP, 1999, p. 9).
Le programme de 3 e, tout en confortant cette situation, nous invite en même temps à saisir un
deuxième niveau de remise en cause de la place de l’État dans l’analyse de la compréhension du
monde contemporain. La France y est également présentée comme puissance européenne et
mondiale, ce qui conserve du reste davantage qu’en terminale l’antériorité du niveau national. Mais
surtout, il propose une réflexion sur la dialectique entre la multiplication et l’effacement des
frontières, c’est-à-dire qu’à la dimension supranationale de la remise en cause de l’État comme
niveau d’interprétation, il ajoute celle du niveau infranational. Ce que les accompagnements des
programmes de lycée de 1985 traduisaient déjà en soulignant que « l’État de droit est au service de la
personne ». Le remodelage des programmes d’éducation civique va dans le même sens en
développant une thématique forte autour des droits de la personne humaine, traduits en termes
historiques par la reconnaissance de la valeur « patrimoniale » des textes qui les fondent. Il est à cet
égard significatif que l’on retrouve dans cette liste, aux côtés de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen de 1789, aussi bien la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948
et la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1950, que la
Convention internationale des droits de l’enfant de 1989 (CNDP, 1998, p. 38).
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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Pris entre le phénomène de la mondialisation et l’affirmation des droits individuels, qui peuvent
d’ailleurs se conjuguer lorsque le ressortissant d’un État ne peut plus se prévaloir de sa citoyenneté
nationale pour échapper à des instances judiciaires étrangères (cas Pinochet), ou qu’il peut au
contraire porter son cas devant une juridiction supranationale (cas Papon), l’État voit se restreindre
son espace de validité.
Ce qui ne signifie pas qu’il se trouve vidé de tout contenu.
2) Le glissement des contenus de l’État dans l’enseignement
Si des permanences sont apparentes dans le contenu enseigné, vu au travers du prisme des
programmes et de leurs accompagnements, de 1947 à 1996, comme la construction du royaume et
l’affirmation de l’État dans la France des Capétiens aux
XIIe
et XIIIe siècles, l’essentiel a cependant
changé en même temps que changeait la perspective générale des programmes. On pourrait résumer
cette évolution en écrivant que c’est une histoire des régimes politiques qui tend à se substituer, plus ou
moins explicitement selon les cas, à une histoire des États entendus en tant que structures. Autre
élément propre à faire reculer la place d’une histoire proprement nationale dans l’enseignement,
exception faite, et encore, de la France. Deux exemples permettront de fonder cette affirmation.
Le programme de Terminale de 1996 tout d’abord, qui inclut une partie sur « les grands modèles
idéologiques », au sujet de laquelle il est bien précisé qu’il ne faudra pas « juxtaposer les histoires
nationales des États » mais s’attacher à mettre en évidence la « convergence des choix
institutionnels » (Terminale-1996). Choix qui accentue l’évolution esquissée par les programmes de
1985, incluant dans une partie sur « les sociétés libérales d’Occident », une étude des « formes
politiques » considérées sous l’angle « évolution et fonctionnement de la démocratie libérale
(institutions, vie politique, opinions publiques) » (CNDP, 1996, p. 91). Alors que les compléments
des programmes de 1985 s'interrogeant sur « comment s’explique la permanence des nations et du
nationalisme au sein des grands ensembles », précisaient qu’en ce qui concerne les systèmes politiques
« l’étude s’appuiera sur les évolutions historiques sans se perdre dans le détail de l’histoire intérieure
de chaque État » (idem, p.98).
Ensuite l’évolution des formulations portant sur l’étude de l’Allemagne dans la période de l’entredeux-guerres. En 1947, la question n’est abordée qu’en classe de terminale dans une partie intitulée
« les dictatures : Italie fasciste, national-socialisme en Allemagne, crises ibériques », elle-même
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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précédée d’une étude la révolution allemande de 1918. Nous sommes donc dans la logique de
l’étude de l’évolution intérieure d’un pays sur une durée de vingt ans (1918-1938), et l’expression
« national-socialisme en Allemagne » apparaît même plus neutre que celle « d’Italie fasciste ».
L’évolution du libellé dans le programme de 3 e de 1985 est sensible : l’Italie fasciste et l’Allemagne
nationale-socialiste voisinent sur pied d’égalité sémantique d’une part, d’autre part les
accompagnements sont plus directs encore. Il faut « faire comprendre l’opposition entre quatre types
de régimes : régimes fascistes, URSS de Staline, régimes autoritaires, démocraties ». À quoi l’on
ajoute que « sans entrer dans le détail des histoires nationales, on analysera ces régimes et leur
confrontation à partir d’exemples précis (celui de l’Allemagne nazie est indispensable) » (CNDP,
1989, p. 60). La substitution de termes (Allemagne nazie plutôt que nationale-socialiste) suffit à
annoncer le sens de l’analyse recherchée. Quant au programme de 1re de la même génération, il
comptabilise dans « la montée des totalitarismes » le « fascisme en Italie » et « la montée du nazisme
en Allemagne » (Terminale, 1985). Le programme de 1re de 1996 ajoute une dernière dimension à
cette évolution qui met en avant l’analyse des régimes politiques en lieu et place de celle des États
entendus de manière plus générique, en insistant lorsqu’il aborde « les régimes totalitaires : fascisme,
nazisme, stalinisme » sur la notion « d’idéologie d’État ». Du « national-socialisme en Allemagne » au
« nazisme », c’est une relecture qui efface à nouveau l’État derrière une autre réalité.
3) D’un modèle à l’autre
Voici venu le temps de resituer ces évolutions dans la question des relations entre enseignement de
l’histoire et formation du citoyen.
Rappelons pour commencer que c’est une constante du système scolaire républicain, et que si les
accents lyriques, et guerriers, que pouvait laisser échapper la plume d’un Lavisse ou de tout autre
rédacteur de manuel républicain de la fin du
XIXe
siècle : « soyez de bons élèves […] soyez de bons
soldats […] soyez de bons citoyens ! » (Belin, 1895) ne sont plus de mise aujourd’hui, la
réaffirmation des vertus civiques de l’histoire n’en est pas moins forte.
L’arrêté du 14 novembre 1985 reprend les objectifs généraux de l’école républicaine (« L’école de la
République, dont la fonction est de former des hommes capables de penser par eux-mêmes, c’est-àdire des citoyens ») en des termes que n’eurent sans doute pas démentis les pères fondateurs, encore
que s’y fasse aussi sentir l’air du temps et la nécessité de certaines redéfinitions. Et à cette date, la
place de l’histoire nationale (française) montre le basculement qui s’opère en même temps que
Marc Deleplace
L’État au péril de la formation du citoyen ?
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l’ancrage conservé de cette citoyenneté. L’enseignement républicain « donne à l’histoire nationale la
place qui lui revient dans le dialogue des grandes civilisations. Il montre comment s’est constituée
l’identité nationale et fait apparaître, à travers les siècles et les régimes, la continuité de l’histoire de
France, creuset de peuples et de cultures » (CNDP, 1996).
La présentation des programmes du collège de 1996 rappelle pour sa part la triple fonction
intellectuelle, culturelle et civique de l’enseignement de l’histoire-géographie, en attribuant à cette
dernière un rôle qui confirme la délicate position de l’État dans un tel enseignement aujourd’hui,
entre dimension supranationale et épanouissement individuel : « comprendre le monde
contemporain et agir sur lui en personne libre et responsable » (CNDP, 1998, p. 14). Substitution
que nous considérons comme non négligeable du monde à l’État et de la personne au citoyen. Et dont les
accompagnements de 3e restituent bien le sens en affirmant qu’il convient de donner à l’élève les
moyens « d’affronter en citoyen responsable la nation, l’Europe et le monde où il vivra sa vie de
citoyen ». Avant de conclure par un résumé du projet de cet enseignement rénové : « faire de
l’histoire et de la géographie un projet civique et culturel » (CNDP, 1999, p. 16).
Construire le citoyen suppose, que l’on en fasse ou non un préalable explicite, de le renvoyer à un
modèle civique. C’est peut-être là que l’évolution que nous avons voulu mettre en évidence trouve
sa pleine signification, si l’on considère qu’en arrière-plan de l’enseignement de l’État se profilent
deux modèles historiques successifs.
En premier lieu, le modèle de l’État-nation, dont la construction historique est certes identifiée
pour ce qu’elle est, notamment au travers des exemples d’unifications nationales, mais parfois
renvoyée à des époques pour lesquelles elles ne laissent pas d’être problématique. C’est le sens que
nous donnons au cadre descriptif général des programmes de 1947 et 1962, sous-tendu par l’idée
récurrente, presque finaliste, que l’évolution des agrégats humains tendrait vers la réalisation de ce
modèle reçu alors comme universel. L’unité donnée à l’exemple de l’évolution historique de la
France, et dont on peut retrouver la trace jusque dans l’arrêté du 14 novembre 1985, est à cet égard
révélateur du problème posé à la fois par la validité des lectures historiques possibles, qui relèvent de
l’évolution de la connaissance universitaire, et par les contradictions qui peuvent naître de l’attente
civique vis-à-vis de la discipline histoire.
Les changements intervenus dans les nouveaux programmes, s’ils introduisent un plus grand sens de
la relativité historique, en particulier concernant ce modèle de l’État-nation, nous semblent
cependant renouveler la même difficulté à conjuguer histoire et formation du citoyen sans que celle-
Marc Deleplace
L’État au péril de la formation du citoyen ?
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là en pâtisse. Car c’est cette fois le modèle, non moins prégnant, de la démocratie libérale que nous
voyons se profiler ici, indépendamment de la justesse ou non d’une telle démarche. Que l’intitulé de
la première partie des programmes de 3 e impose d’emblée une lecture centrée sur « guerres,
démocraties, totalitarismes » pour la période 1914-1945 peut ne pas prêter à une interprétation
discutable. En revanche, il est permis de se demander si la présentation de l’histoire de France de
1815 à 1914 dans le programme de 4e, pour lequel « l’accent est mis sur la recherche à travers de
nombreuses luttes politiques et sociales et de multiples expériences politiques, d’un régime stable,
capable de satisfaire les aspirations d’une société française majoritairement attachée à l’héritage
révolutionnaire » (CNDP, 1998, p. 76), n’est pas de nature à réintroduire une lecture par trop
déterministe de ce long XIXe siècle. D’autant qu’en identifiant rapidement république et démocratie,
l’on tend à effacer certaines contradictions entre l’ordre républicain d’avant 1914 et l’exercice
effectif de la démocratie (Y. Mollier, 1994 ; C. Nicolet, 1994), ou encore qu’en affirmant que « les
démocraties, par essence ne sont pas conquérante » (CNDP, 1996, p. 58), on semble faire bon
ménage de l’entreprise coloniale de la IIIe République.
Poids d’un modèle de démocratie libérale, qui se substitue au modèle républicain classique, et que
nous retrouvons dans les indications sur le travail de l’élève quand il y est écrit que « le
développement de l’esprit critique – fondé sur des savoirs – et la formation du jugement personnel –
fondé sur des mécanismes intellectuels – sont des objectifs permanents dans une perspective civique
au sein d’une cité démocratique ».
En fait, l’enseignement de l’État en histoire est constamment confronté à cette question de la
rencontre avec la dimension civique, même si l’on veut distinguer l’un de l’autre ; « l’éducation
civique, en abordant les institutions de la France et les questions de défense, vise à former le
citoyen : la perspective historique est plus attentive à l’inscription dans une époque » (3e-1996). Il en
résulte une tension dont les hésitations et contradictions de certaines formulations portent
témoignage. Ainsi précise-t-on, en 3 e, que « l’exigence d’esprit critique ne conduit pas au
relativisme : si l’histoire et la géographie, pas plus que les autres sciences, ne sont morales en ellesmêmes, elles ont une finalité civique, et portent des valeurs » (CNDP, 1999, p. 11, note 1), tandis
que l’on rappelle pour le lycée que « l’histoire et la géographie […] apportent à la fois l’absolu des
valeurs et le sens du relatif » (CNDP, 1997, p. 18). Tension qui prend peut-être naissance dans le
vocabulaire, dans la mesure où, indépendamment de la difficulté de conjuguer « l’absolu des
valeurs » et le sens de la relativité historique, l’enseignement de l’histoire, comme de la géographie,
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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repose entre autre sur l’acquisition d‘un vocabulaire stable permettant l’identification des objets
étudiés, acquisition qui évacue souvent la dimension historique de la langue dans l’approche des textes
(R. Koselleck, 1990). Tension enrichissante cependant, si elle est maîtrisée.
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L’État au péril de la formation du citoyen ?
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