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(
)
GRANDE DISTRIBUTION
Quelle conduite
adopter pour
les drives ?
Avec une croissance du chiffre d’affaires de
40 % par an, ces nouveaux lieux de
consommation que sont les drives franchissent
cette année les 2 200 points de retrait. Mais
derrière un concept simple se cachent plusieurs
modèles logistiques, avec des structures de
coût encore à définir.
À
peine publiés, les chiffres sont déjà à revoir.
Entre 2012 et 2013, le
nombre de drives en
France est passé de
1 487 à 2 278, selon une étude
menée par A3 Distrib, et il n’y a
pas un mois sans qu’une enseigne
de la grande distribution n’annonce l’ouverture d’un nouveau
site. Le concept est apparu en
2000, au sein du groupe Auchan.
Un employé de la chaîne imagine
un nouveau service : la possibilité
Profil d’un drive
> 350 clients par jour ;
> 12 000 produits vendus
par jour ;
> entre 1 400 et 1 600 m2
d’entrepôt ;
> 40 salariés en moyenne (de
20 à 90 selon l’importance de
la zone de chalandise) ;
> un investissement de
2,5 millions d’euros par
ouverture.
Au mois de septembre
de cette année, Carrefour
a totalisé 300 drives
ouverts en France,
contre 271 en juin.
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de commander les produits
lourds sur une borne à l’entrée du
centre commercial, pour qu’ils
soient ensuite déposés dans le
coffre du client à sa sortie du
supermarché. C’était la genèse
d’Auchan Drive. En 2004, deux
entrepreneurs, Ludovic Duprez
et Martin Toulemonde, créent en
partenariat avec Auchan l’enseigne Chronodrive. En 2006,
Auchan ouvre son second drive,
avec désormais la possibilité de
passer la commande sur Internet,
24 h sur 24, avec le choix de la
date et de l’heure pour retirer les
courses. Plus besoin d’errer dans
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les allées du supermarché, de perdre
son temps aux
caisses, ou encore
d’attendre patiemment les livreurs à
son domicile. Sur le
parking de l’enseigne choisie, des
employés chargent
le coffre de la voiture en 5 à
10 minutes, à peine quelques
heures après la validation de la
liste des courses sur le web. Gain
de temps pour les clients, gain
«
Le concept du drive permet
aux enseignes de proposer
une offre e-commerce en
évitant ainsi le coût de
livraison du dernier kilomètre,
Grégory Boulanger,
directeur retail chez Argon Consulting
puisque beaucoup proposent ce
service gratuitement au-delà d’un
certain montant de panier.
»
d’argent pour les distributeurs.
En effet, pour ces derniers, une
commande passée sur Internet
avec une livraison à domicile peut
coûter jusqu’à 25 euros de plus,
Un enjeu stratégique. « Le
concept du drive permet aux enseignes
de proposer une offre e-commerce
tout en restant rentable, explique
Grégory Boulanger, directeur retail
chez Argon Consulting. Elles évitent ainsi le coût de livraison du dernier kilomètre ». Depuis le début
des années 2000, le concept a fait
des émules, 15 % des consommaN° 283 \\ OCTOBRE 2013 \\ LOGISTIQUES MAGAZINE
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GRANDE DISTRIBUTION
DRIVE PIÉTON. Le client doit
quitter son véhicule et se
présenter au point de retrait,
souvent à l’accueil du magasin.
Les chiffres du drive en France
DRIVE VOITURE. Le client
s’identifie à une borne et peut ne
pas s’éloigner de son véhicule.
55 % des sites.
45 % des sites.
Modèle de
retrait dominant
1er Juillet
2012
1er Juin
2012
Course U .com
448
442
+6
Le drive Intermarché
344
304
+ 40
+ 15
E.Leclerc drive
209
197
+ 12
+ 13
Carrefour drive
125
97
+ 28
134
+2
Mes courses Casino.fr
Casino drive.fr
117
114
+3
78
77
+1
Auchan Drive.fr
56
53
+3
Juin
2013
Mai
2013
Évol / 1 mois
Le drive Intermarché
622
606
+ 16
Courses U .com
539
533
+6
E.Leclerc drive
340
325
Carrefour drive
270
257
Mes courses Casino.fr
Casino drive.fr
136
Auchan Drive.fr
Évol / 1 mois
Leader drive
67
63
+4
Chrono drive.com
45
44
+1
Monoprix.fr
64
63
+1
Cora drive.fr
43
39
+4
Chrono drive.com
59
58
+1
Simply drive.fr
37
37
-
Cora drive.fr
56
56
-
Monoprix.fr
34
28
+6
25
21
+4
Simply drive.fr
39
39
-
Leader drive
Casino express.fr
6
6
-
Casino express.fr
3
3
-
Match
1
1
-
Match
1
1
-
Houra drive.fr
1
1
-
teurs étaient clients du drive en 2012
selon un sondage de Kantar Worldpanel, et la plupart des enseignes
de la grande distribution n’en finissent plus d’ouvrir de nouveaux
points de retrait de ce type, prêtes
à tout pour relancer une consommation jugée atone. « Depuis
deux ans, le chiffre d’affaires augmente d’environ 40 % chaque année,
relève Grégory Boulanger. Entre 2012
et 2013, nous sommes ainsi passés
de 1 487 à 2 278 points de retrait ».
(deux tableaux fournis par le cabinet de conseil Argon Consulting pour les années 2012
et 2013, suite à une étude menée par A3 Distrib et publiée par les éditions Dauvers)
Des chiffres datant de juin 2013 mais
qui sont déjà obsolètes tant le rythme
d’ouvertures est élevé. En septembre, Carrefour « compte 300 drives
ouverts en France (contre 271 en
juin, ndlr) et continue son développement », indique-t-on à la direction de la communication de l’enseigne, se refusant à tout autre
commentaire sur le sujet. Selon les
spécialistes, le silence des distributeurs autour des drives est lié à l’enjeu stratégique qu’ils représentent
Le total des drives est
passé, selon cette étude,
de 1 487 en 2012 à 2 278
en 2013. Pour 55 % d’entre
eux, le client s’identifie à
une borne et peut ne pas
s’éloigner de son
véhicule, que le drive soit
accolé à un magasin ou
non. Pour les 45 %
restants, le client doit
quitter son véhicule et se
présenter à un point de
retrait, souvent installé à
l’entrée du magasin.
et aux choix que chaque enseigne
est amené à faire dans son organisation.
Plusieurs modèles
logistiques. Derrière ce concept
a priori simple, se cachent en réalité plusieurs modèles logistiques.
Il en existe quatre selon les spécialistes : le drive « solo », le drive
« picking », le drive « en étoile » ou
« star » et le drive mutualisé avec la
livraison à domicile (cf. encadré).
Les différents modèles logistiques de drives
> Le drive solo : 1 400 à 1 600 m2 d’entrepôt, uniquement dédiés au drive,
situés ou non à côté du magasin. Ce
modèle est peu courant (environ
500 drives de ce type en France sur les
2 278 recensés). Il s’agit pourtant du
modèle le plus performant logistiquement, selon Grégory Boulanger, directeur
Retail supply chain chez Argon Consulting. C’est le choix logistique d’Auchan
Drive et de Chronodrive, par exemple.
> Le drive « picking » : un entrepôt
commun au magasin et au drive. Le
picking s’effectue alors dans les rayons
du magasin. Pour Grégory Boulanger, il
s’agit du modèle le moins performant
logistiquement parlant, avec de plus une
gestion des stocks plus sensible car la
rupture en rayon est plus difficile à
78
LOGISTIQUES MAGAZINE // OCTOBRE 2013 // N° 283
prévoir. Selon les enseignes, la collecte
des marchandises peut se faire sur le
parking avec les marchandises placées
dans le coffre par des employés de l’enseigne, soit en magasin à un guichet
dédié. Le cas où les marchandises sont
retirées par le client à un guichet, leur
imposant alors de quitter leur véhicule,
représente 45 % des drives en France.
Système U est l’enseigne la plus
souvent citée pour ce modèle, mais on
note également le positionnement d’Intermarché, de Cora et de Carrefour sur
ce créneau.
> Le drive star ou en étoile : en
entrepôt régional centralisé, où les
commandes sont préparées pour
plusieurs drives de la région. Leclerc
utilise ce modèle pour certains de ses
sites.
> Le drive mutualisé avec la livraison à
domicile : l’entrepôt s’occupe de toutes
les commandes passées sur Internet,
qu’elles soient destinées au drive ou à la
livraison à domicile. C’est le cas de la
chaîne Ahold aux Pays-Bas. Ce modèle
est quasi inexistant en France pour l’instant.
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Ainsi, sur les presque 2 300 drives,
seuls 500 peuvent être considérés
comme de « vrais » drives, c’est-àdire avec un retrait possible sans
quitter son véhicule et avec un entrepôt dédié à ce type de retrait (drive
« solo »), que le drive soit ou non
accolé au magasin. Environ 75 %
du marché en valeur sont détenus
par les seules enseignes Chronodrive, Auchan Drive et Leclerc Drive.
De l’importance de la
réactivité. Selon Dominique
Testa, directeur général et cofondateur d’a-SIS, qui a équipé 70 sites
pour Auchan Drive et Chronodrive,
le défi des enseignes réside dans la
gestion des commandes, « dont 50 %
sont passées à 3 heures avant le retrait
des marchandises, qui se concentre
de plus entre 17 h 30 et 20 h... Un
vrai pic d’activité sur un laps de
POUR DOMINIQUE TESTA, directeur
général et cofondateur d’a-SIS, société
qui a équipé 70 sites pour Auchan Drive
et Chronodrive, le défi des enseignes
réside dans la gestion des commandes,
dont 50 % sont passées à 3 heures
avant le retrait des marchandises.
temps très court, où les opérateurs
doivent gérer 5 flux de préparation
de commandes de façon simultanée : le sec, le frais, les surgelés, les
volumineux, les fruits et légumes. »
Les exigences de qualité sont par
ailleurs très élevées puisque la plupart des enseignes garantissent le
chargement du coffre en 5 minutes
après l’arrivée du client sur place et
une erreur dans la préparation ne
permettrait plus d’offrir cette réactivité. « Le WMS doit donc permettre, plus que jamais, d’articuler les
commandes, la préparation », assure
Dominique Testa. Un constat
confirmé par Donal Mac Daid, viceprésident marketing supply chain
de Symphony EYC (ex-Aldata), qui
a fourni ses solutions à Casino et
Système U, pour assurer le contrôle
des inventaires en temps réel. « Les
systèmes d’information permettent
aux distributeurs de gérer au plus
Les ambitions du pionnier Auchan Drive en France
Créée en 2000, l’enseigne Auchan Drive a
enregistré en 2012 un chiffre d’affaires de
460 millions d’euros et anticipe 600 millions
d’euros pour 2013. 5,1 millions de
commandes ont été livrées en 2012 et
7 millions devraient l’être cette année.
1,2 clients devraient avoir recours à ce
service en 2013. Le catalogue d’Auchan
drive est aujourd’hui constitué de
8 000 références.
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GRANDE DISTRIBUTION
En 2004, deux entrepreneurs, Ludovic Duprez et Martin Toulemende
créent, en partenariat avec Auchan, l’enseigne Chronodrive.
juste et en temps réel leurs stocks et
d’éviter la rupture en rayon... Une
erreur en la matière et le consommateur a vite fait de choisir une autre
enseigne ».
Et la rentabilité ? Si le nombre de drives continue d’augmenter pour l’instant – Argon Consulting anticipe une part de marché à
5 % d’ici à 2015, contre 2 %
aujourd’hui, à comparer avec tous
les autres modes de consommation – certains spécialistes émettent quelques doutes sur la structure des coûts de cette organisation.
Ainsi Donal Mac Daid, avoue
qu’« on ne sait pas encore si le drive
taxes à venir liées à l’identification de ces zones
comme espaces commerciaux, « les enseignes ne sont
pas encore en mesure de
déterminer avec certitude les
coûts réels des drives. Elles
Donal Mac Daid,
vice-président marketing
cherchent encore le modèle
supply chain de Symphony
idéal », commente Donal
EYC (ex-Aldata).
Mac Daid. Pour preuve de
cette instabilité, l’un des
drives de Chronodrive, à
est rentable. Entre la construction
Halluin (59), a dû fermer ses portes
du bâtiment, les ressources humaines
en mars dernier, suivi en août par
à mobiliser, l’acheminement des
celui de Carrefour à Tours (37).
marchandises jusque dans l’entreDans leur précipitation à propopôt, les systèmes d’information à
ser cette offre sur l’ensemble du
mettre en place, etc. », ainsi que les
territoire, les entreprises de la grande
«
Les enseignes ne sont pas
encore en mesure de
déterminer avec certitude
les coûts réels des drives,
»
43 % des Européens devraient utiliser le drive dans les années à venir
La France est l’un des
premiers pays où les
enseignes de la grande distribution ont commencé à
proposer une offre drive à
leurs clients. Mais d’après
une étude menée par Cetelem
auprès de 6 500 Européens en
80
2012, les pays de l’Est sont
eux aussi sur les rangs : 60 %
des Polonais et des Hongrois
se disent prêts à utiliser le
drive pour faire leurs courses.
Plus généralement, 43 % des
Européens devraient avoir
recours au drive dans les
LOGISTIQUES MAGAZINE // OCTOBRE 2013 // N° 283
années à venir. « Même s’il est
encore tôt pour en parler
concrètement, on sent effectivement une demande
émerger dans les pays de
l’euro », confirme Dominique
Testa, d’a-SIS. « Aux ÉtatsUnis, par contre, l’offre
commence tout juste à se
mettre en place, constate
Grégory Boulanger, d’Argon
Consulting, mais ils devraient
le faire à plus grande échelle
qu’en Europe, avec de gros
entrepôts automatisés, de
30 000 à 40 000 m2 ».
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3
questions à ....
Philippe Lachaize,
associé du cabinet Stanwell Consulting
« L’extension de la Tascom (1) aux drives est regardée de
près par les enseignes car elle sera un nouvel élément
de tension sur leur modèle économique »
Logistiques Magazine : En juin
dernier, Sylvia Pinel, ministre de
l’Artisanat, du Commerce et du
Tourisme, a proposé 50 mesures en
Conseil des ministres, dont certaines
concernent le marché des drives, avec
l’obligation de s’acquitter de la
Tascom (1) et de demander une
autorisation d’implantation. Quels
seront les impacts de cette nouvelle
législation sur les drives en France ?
Philippe Lachaize : Il existe
aujourd’hui deux grands modèles de
drives : le drive accolé, qui met en place
des synergies avec le magasin, et le
drive « isolé », qui s’articule autour de
contraintes économiques différentes.
Pour ce dernier, le modèle est tendu car
leur apparition fait naître une véritable
concurrence entre les différentes
enseignes puisqu’un drive « isolé »
d’une enseigne pourra s’implanter à
proximité d’un magasin ou d’un drive
d’une autre enseigne. Ainsi, l’extension
de la Tascom aux drives est regardée de
près par les enseignes car elle sera un
nouvel élément de tension sur leur
modèle économique, même si le
distribution n’ont pas toujours pris
le temps d’étudier en détail les zones
de chalandise et la pertinence d’une
implantation sur telle ou telle zone.
Plusieurs drives ont ainsi parfois
été placés trop proches les uns des
autres ne garantissant pas un niveau
d’activité suffisant à tous. Mais il
existe un autre frein potentiel au
foisonnement des drives en France.
En octobre 2012, la ministre de
l’Artisanat et du Commerce, Sylvia Pinel, annonçait son intention
de mieux encadrer l’implantation
des drives, jusqu’alors entourés
d’un vide juridique. Comme les
magasins de moins de 1 000 m2, les
proximité devraient au contraire
bénéficier de ces nouvelles
implantations. Les consommateurs
viendront dans les drives pour certains
produits et en profiteront pour faire le
reste de leurs courses dans les magasins
alentour. Les drives sont un nouveau
levier de concurrence entre les
enseignes de la grande distribution mais
pas pour les petits commerces. Au
contraire.
principal enjeu reste la capacité à
générer un chiffre d’affaires suffisant
pour compenser les investissements
nécessaires à un entrepôt indépendant
au magasin. D’autant qu’à terme, si le
nombre de clients continue de croître, il
faudra passer à une automatisation de
ces entrepôts, afin d’augmenter la
productivité sans augmenter la surface.
L.M. : Les drives sont-ils une nouvelle
concurrence aux commerces de
proximité ?
Ph.L. : Les drives, comme les autres
modèles de la grande distribution,
génèrent du flux. Ils intensifient le trafic
et le modifient. Les commerces de
L.M. : Vont-ils continuer à se
développer ?
Ph.L. : Sans conteste. Il s’agit du
modèle de distribution le plus innovant
de ces dernières années. Leur chiffre
d’affaires ne cesse d’augmenter et les
consommateurs y sont devenus fidèles.
Les drives implantés à proximité des
magasins ont connu une forte
croissance ces dernières années et je
pense que c’est aujourd’hui au tour des
drives isolés de connaître un franc
succès, nouvelle législation ou non.
Propos recueillis par Éloïse Leydier
(1) Tascom : Taxe sur les surfaces commerciales.
drives échappent en effet à toute
demande d’autorisation de s’installer via des commissions départementales d’équipement commer-
cial ou de la Commission national
d’aménagement commercial. Ces
drives ne sont pas non plus soumis à la taxe sur les surfaces commerciales, puisque l’acte de vente
ne s’effectue pas sur place, représentant un manque à gagner pour
les collectivités locales. Le 19 juin
dernier, la ministre a donc présenté
en Conseil des ministres 50 mesures
du plan d’action pour le commerce
et les commerçants, durant lequel
elle a confirmé que les règles d’urbanisme local seront bientôt étendues aux drives. De quoi ralentir
leur expansion…
Éloïse Leydier
N° 283 \\ OCTOBRE 2013 \\ LOGISTIQUES MAGAZINE
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(
)
GRANDE DISTRIBUTION
Au pays du drive, visite chez
Système U à Châteaugiron
Un drive, comment ça marche ? Pour s’en rendre compte, nous vous
proposons de suivre pas à pas notre journaliste-internaute qui s’est
rendue à Chateaugiron en Ille-et-Vilaine, où elle a rencontré le patron
de l’Hyper U local, chef de file du e-commerce pour l’enseigne.
Photos et texte Éloïse Leydier
Le drive de Châteaugiron, pas à pas
1
2
Une fois sa commande passée, elle
indique le créneau horaire pendant
lequel elle viendra retirer sa
commande. Avant de se
déconnecter, elle peut choisir de
payer en ligne ou de payer au
moment du retrait des
marchandises, à l’accueil du drive en
82
3
Lynda se connecte sur le site
www.coursesu.com. Après avoir
sélectionné le drive qui lui
convient le mieux (sur
559 possibilités), entre son
travail et son domicile, elle peut
commencer à sélectionner ses
articles parmi les 18 000
références présentées en ligne.
carte bleue ou par chèque. Sa
commande s’affiche sur l’ordinateur
du drive. Deux heures avant l’arrivée
de la cliente, la préparation par l’un
des huit opérateurs commence, au
cas où elle arriverait plus tôt. Dans
la réserve de 700 m2, accolée à la
réserve du magasin,
3 500 références en sec. Quand c’est
nécessaire, le préparateur part faire
du picking dans les rayons de
l’hypermarché pour compléter la
liste des courses. Plusieurs bacs
sont préparés : le sec est stocké à
un endroit, le frais à un autre et le
surgelé dans des congélateurs.
Chaque bac porte un numéro associé
à une commande.
LOGISTIQUES MAGAZINE // OCTOBRE 2013 // N° 283
Trois heures après la validation
de sa commande sur Internet,
Lynda arrive en voiture. Au rondpoint, deux possibilités : à
gauche l’hypermarché U, à
droite, la zone réservée au drive.
Elle gare sa voiture devant l’une
des quatre bornes et présente sa
carte U. Dans la réserve, un
gyrophare se déclenche pour
annoncer l’arrivée d’un client.
Tous les bacs portant le même
numéro, correspondant à une
commande, sont réunis et dirigés
vers la voiture après lecture du
code à barres associé au numéro
à l’accueil validant le retrait.
4
En cinq minutes après son arrivée, le coffre de Lynda contient toutes
ses courses.
LM283_P082-083_Doss 4_07-Dossier 02/10/13 11:29 Page83
3
questions à ....
Gaëtan Chauviré,
associé (propriétaire) de l’Hyper U de Châteaugiron
et chef de file e-commerce de l’enseigne.
« Le véritable coût est le client qui ne revient plus chez
nous. Alors s’il faut une offre drive pour le fidéliser,
l’investissement doit être fait. »
Logistiques Magazine : Quand s’est
ouvert le drive de Châteaugiron ?
Gaëtan Chauviré : En 2008, nous
avons commencé à proposer une offre
drive sur notre ancien bâtiment :
2 900 m2 de surface commerciale sur les
11 000 m2 de bâtiment. Aucune zone
n’était dédiée au drive. Nous assurions
la préparation d’une centaine de
commandes toutes les semaines. À
l’étroit sur ce site, nous avons
déménagé en janvier 2013, pour un
bâtiment de 18 500 m2, avec 5 200 m2
d’espace commercial et 2 000 m2 de
galerie commerciale, loués à d’autres
commerçants comme un coiffeur, un
pressing, un fleuriste, etc., et une
réserve de 700 m2 dédiés à l’activité
drive. Nous traitons 350 commandes
chaque semaine (80 le vendredi soir, 70
le samedi, 60 le jeudi) et ce chiffre
devrait continuer à augmenter dans les
prochains mois. L’entrepôt dédié au
drive est accolé et intégré au bâtiment.
Sur les 18 000 références que nous
proposons, 3 500 sont présentes dans la
réserve du drive, uniquement en
produits secs. Lors de la préparation de
la commande drive, nos 8 opérateurs
vont opérer le reste du picking dans le
magasin, notamment pour les produits
frais et surgelés. Contrairement à
d’autres enseignes, les clients du drive
peuvent avoir accès aux mêmes
produits qu’un client du magasin. Le
déménagement du début d’année et
cette nouvelle organisation nous ont
permis d’augmenter la qualité de service
pour nos clients : avant, il n’y avait pas
vraiment de zone d’accueil pour les
clients du drive et les opérateurs
travaillaient aussi bien pour le magasin
que pour le drive. De plus, nous
n’avions pas de moyens d’identification
du client. En janvier 2014, nous
mettrons en place un WMS, avec une
préparation vocale des commandes, ce
qui devrait nous permettre d’accroître
notre productivité de 20 %. Et quand
cela sera possible, nous augmenterons
probablement également le nombre de
bornes, jusqu’à 7, pour absorber le
nombre croissant de demandes. Un de
nos autres axes de développement sera
de pouvoir dissocier les stocks du
magasin du stock du drive.
L.M. : Est-ce le modèle le plus courant
parmi les drives des supermarchés U ?
G.C. : Sur les 1 504 magasins U en
France, 559 proposent une offre drive.
Sur ces 559, il existe aujourd’hui trois
« solos », c’est-à-dire avec un entrepôt
dédié au drive, sans dépendance à un
magasin. Il a ouvert ses portes en
mai 2013, et un autre drive de ce type
ouvrira dans les prochains mois, dans
l’est de la France. Par ailleurs, quatre
drives « accolés » existent en France, sur
le même modèle que celui de
Châteaugiron, avec une réserve accolée
au magasin U, même si nous avons la
particularité d’être intégré au bâtiment.
Le premier drive accolé a fait son
apparition au sein de la coopérative en
2012. Les magasins proposent une offre
drive avec en majorité un picking qui se
fait en magasin, éventuellement avec
une petite réserve pour les produits à
forte rotation. Le retrait des
marchandises se fait désormais
rarement à l’accueil du magasin, sans
opérateur pour charger le coffre de la
voiture. Les magasins s’organisent pour
offrir à leurs clients un meilleur service
avec des points dédiés pour les retraits
des commandes drive. Pour la
préparation de commandes, plusieurs
outils peuvent venir nous aider : le
WMS avec préparation vocale ou un
système de « put-to-light » ou sinon,
pour les plus petits sites, un simple
PDA. Pour les drives « solo », nous
regardons de près les possibilités de
mécanisation pour augmenter la
productivité sans accroître le nombre
d’opérateurs et de mètres carrés.
L.M. : Est-ce un service rentable ?
G.C. : Le véritable coût est le client qui
ne revient plus chez nous. Alors s’il faut
une offre drive pour le fidéliser,
l’investissement doit être fait. Avec nos
quelques mois d’activité à Châteaugiron,
j’estime que nous arrivons à l’équilibre,
entre les investissements qui ont été
nécessaires, la fidélisation de nos clients
et les demandes de l’offre drive qui
augmentent de mois en mois.
Aujourd’hui, l’activité drive représente
entre 2 et 10 % du chiffre d’affaires d’un
magasin. Certains coûts sont communs
au magasin et au drive, et je ne peux
donc pas déterminer la structure exacte
des dépenses en associant l’une
uniquement à la mise en place de cette
offre. Nous gardons en ligne de mire
l’amélioration de la qualité de service
fourni à nos clients. Le panier moyen
d’un drive est de 105 euros, quand il est
de 46 en magasin. Mais il y a
17 000 passages en caisse, contre
350 commandes drive.
Propos recueillis par Éloïse Leydier
N° 283 \\ OCTOBRE 2013 \\ LOGISTIQUES MAGAZINE
83