Organiser le culte idéal Le Manuel du temple

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Organiser le culte idéal Le Manuel du temple
Originalverôffentlichung in: Bulletin de la Société Française d'Égyptologie,
Bd. 160 (2004), S. 9-25
Organiser le culte idéal
Le Manuel du temple
J o a c h i m F r i e d r i c h QUACK
Université Libre de Berlin
L e M a n u e l d u t e m p l e est u n e c o m ­
L a documentation directe du
position égyptienne qui m ' o c c u p e
M a n u e l d u t e m p l e est tout à fait r e ­
depuis plusieurs années 1 . A p r è s a v o i r
m a r q u a b l e aussi b i e n p a r sa r i c h e s s e
découvert u n n o m b r e considérable d e
q u e par sa diversité. Il y a e n v i r o n 4 5
fragments pendant un séjour à
manuscrits différents de la c o m p o s i ­
C o p e n h a g u e , j ' a i recherché les traces
t i o n , t o u s s u r p a p y r u s et d a t a n t d e
de ce texte dans beaucoup d'autres
l ' é p o q u e r o m a i n e - p r e m i e r et d e u ­
c o l l e c t i o n s . J e v a i s présenter m a i n ­
x i è m e siècles après J . - C . L a plupart
tenant q u e l q u e s résultats de ces
d e c e s t é m o i n s sont écrits en h i é r a ­
recherches.
tique et e n é g y p t i e n c l a s s i q u e . M a i s
1
J. F. Quack, «Ein âgyptisches Handbuch
des Tempels und seine griechische Ùbersetzung», ZPE 119 (1997), p. 297-300; Id., «Der
historische Abschnitt des Bûches vom Tempel». dans J. Assmann, E. Blumenthal (Éds.),
Literatur und Politik im pharaonischen und
ptolemâischen Àgypten, BdE 127, Le Caire
(1999), p. 267-278; Id., «Das Buch vom Tempel und verwandte Texte - ein Vorbericht»,
ArchivjiïrReligionsgeschichte 2 (2000), p. 120; Id., «Die Dienstanweisung des Oberlehrers aus dem Buch vom Tempel», dans H.
Beinlich/J. Hallof/H. Hussy/Chr. von Pfeil
(Eds.), 5. Âgyptologische Tempeltagung
Wiirzburg, 23.-26. September 1999, ÀAT 33/3,
Wiesbaden (2002), p. 159-171; Id., «Die
Rolle des heiligen Tieres nach dem Buch vom
Tempel», dans M. Fitzenreiter (Éd.), Tierkulte
"n pharaonischen Àgypten, IBAESIV, Berlin
(2003), http:/Avww2.rz.hu-berlin.de/nilusAiet-
publications/ibaes4, p. 111-123; Id., «Le
Manuel du temple. Une nouvelle source sur
la vie des prêtres égyptiens», Egypte, Afrique
& Orient 29 (2003), p. 11-18; Id., «Between
Magic and Epidémie Control. On some In­
structions in the Book of the Temple», dans
St. Seidlmayer (Éd.), Religion in Context.
Imaginary Concepts and Social Reality, sous
presse; Id., «Tabuisierte und ausgegrenzte
Kranke nach dem Buch vom Tempel», dans
H.-W. Rscher-Elfert (Éd.), Der Papyrus Ebers
und die altâgyptische Medizin, sous presse;
Id., «Die Gotterliste des Bûches vom Tempel
und die gauiibergreifenden Dekorationsprogramme», dans B. Haring (Éd.), 6. Âgyptolo­
gische Tempeltagung Leiden, sous presse; Id.,
«Die Uberiieferungsstruktur des Bûches vom
Tempel», dans S. Lippert, M. Schentuleit
(Éds.), Tebtynis und Soknopaiou Nesos Leben im rômerzeitlichen Fajum, sous presse.
9
il y a aussi quelques témoins d'une
glyphique sur le personnel de l'Ate-
traduction démotique, donc d ' u n e
lier des orfèvres à Dendara (Dendara
phase plus récente de la langue égyp-
V I I I , 128,15-131, 6) 4 fasse partie du
tienne. C e qui est vraiment excep-
M a n u e l du temple; il est pour le
tionnel, c'est q u ' u n papyrus
m o i n s écrit dans un style et une
d'Oxyrhynchos atteste qu'il existait
langue similaires.
une traduction grecque. Curieuse-
L a majorité de ces manuscrits
ment, les deux fragments de ce pa-
provient de l'ancien site de Tebtynis
pyrus grec ont été publiés bien avant
dans le sud du F a y o u m , mais un
les premiers témoins sûrs du texte
n o m b r e important d'entre eux
égyptien original 2 .
provient aussi de Soknopaiou Nesos
Malgré le grand nombre de m a nuscrits, on est encore loin de pou-
dans le nord du Fayoum. Éléphantine
est présente avec quelques papyrus,
voir établir une version complète de
dont le seul qui contienne la version
la composition. L e problème majeur
hiératique et la version démotique
est l'état très fragmentaire de tous ces
côte à côte sur le même rouleau. En
papyrus. O n n ' a souvent que des
plus de la version grecque, il y a aus-
bribes isolées, avec quelques mots
si au moins un témoin hiératique
seulement préservés à chaque ligne
( f i g . l ) . L a plupart des manuscrits
proviennent du commerce des antiquités et, par conséquent, des fragments d'un même papyrus peuvent
se trouver aujourd'hui dispersés entre quatre ou cinq collections d i f férentes. Localiser tous ces fragments
s'avère difficile, et j e serais reconnaissant pour toutes les indications
concernant des collections prometteuses. J e connais pour le m o m e n t
des fragments du Manuel du temple
dans les collections de A n n Arbour,
Berlin, Copenhague, Florence, Heidelberg, Londres, New Haven, Oslo,
O x f o r d , Paris et Vienne, et probablement aussi Manchester3. H se peut,
d'ailleurs, q u ' u n passage hiéro10
2
S. Eitrem, Papyri Osloenses, Fasc. I,
Magical Papyri, Oslo (1925), p. 18; V . B
Schuman, « A Second-Century Treatise on
Egyptian Priests and Temples», Harvard The
ological Review 53 (1960), p. 159-170, pl. 12. Tous les deux chez M. Totti, «Ausgewahltt
Texte der Isis- und Sarapisreligion», Subsidia
Epigraphica 12, MdesheinVZurich/New York
(1985), p. 21-24.
3
La plupart des voyages sur les traces des
manuscrits ont été aidés par une bourse de la
Deutsche Forschungsgemeinschaft pour laquelle je suis reconnaissant.
4
Étudié par F. Daumas, «Quelques textes
de l'atelier des orfèvres dans le temple de
Dendara», dans Livre du Centenaire 18801980, MIFAO 104, Le Caire (1980), p. 109118, surtout p. 112-114; S. Cauville, «Les
statues cultuelles de Dendera d'après les inscriptions pariétales», BIFAO 87 (1987), p. 73117, surtout p. 110sq.; Ph. Derchain, «L'atelier des orfèvres à Dendara et les origines de
l'Alchimie», CdE 65 (1990), p. 219-242,
surtout p. 233sq.
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D a : [...] «3 nti wsm n mty mh-k ni nti | [..] tttf lri-k i[hy]-ntr [...]
D a : [ ] nb n hvnw
Fig. 1. Reconstitution d'un passage du Manuel du temple à l'aide de
plusieurs fragments de papyrus.
d'Oxyrhynchos. Il s'agit d'un texte
utilisés au même lieu. Visiblement,
qui était répandu dans l'Égypte en-
c'était un ouvrage de référence qui
tière, en grand nombre, avec beau-
était important pour les prêtres égyp-
coup de manuscrits contemporains
tiens.
11
L'étendue du texte est aussi très
remarquable. Je n'ai pas encore réussi à restituer l'intégralité de la composition, mais il y a des papyrus aux
pages numérotées qui aident au calcul de la longueur originale. Sur un
manuscrit dont certaines parties sont
relativement bien conservées, le
numéro de page le plus élevé est 24,
sur un autre 20 + x, ce qui pourrait
être m ê m e supérieur. Dans ce m a nuscrit, chaque page contient 30 lignes
de grande longueur (plus de 20 cm)
dans une écriture plutôt serrée. Par
conséquent, dans une traduction suivie de l'ensemble, on peut estimer
qu'il prendrait plus de 100 pages dans
une langue moderne. En comparaison avec les autres c o m p o s i t i o n s
égyptiennes, c'est tout à fait exceptionnel.
Dans l'état actuel de la recherche,
le début compte parmi les parties les
mieux préservées du texte. Il n'en
manque que les deux ou trois premiers mots; il mérite une citation exacte:
«[Copie du texte du] roi de Haute
et Basse-Égypte Néferkasokar qui fut
trouvé dans un ancien décret dans la
maison des livres du roi de Haute et
Basse-Égypte Khéops, concernant un
grand sacrilège qui s'est passé au
temps du roi de Haute et Basse-Égypte
[Néferkasokar]. Alors les dieux et les
temples furent en ruine après sept années où l'inondation ne venait pas
pour Sa Majesté. Il y avait plus
d'abeilles (?) que d'eau dans le pays.
12
Après cela, l'inondation vint (de nouveau) pour Sa Majesté. O n laboura le
champ avec toutes les semailles et la
v i e se produisit après la mort.
Alors, Sa Majesté rêva qu'on lui disait dans la nuit: " V o y a g e vers le sud
vers toutes les villes de Haute-Égypte;
voyage en bas vers toutes les villes de
Basse-Égypte! Q u e tu fondes le temple de chaque dieu pour lui, que tu approvisionnes les cuisines des dieux!
Q u e tu r e n o u v e l l e s ce q u i est en
ruine, que tu remplisses ce qui se trouv e v i d e ! Q u e tu a c c o m p l i s s e s des
rituels dans tous les s a n c t u a i r e s ! " »
Cette section introductive contient
déjà plusieurs indications notables.
Peut-être la plus surprenante est le
choix du roi auquel est attribuée la
composition première de ce manuel.
Néferkasokar est un roi très peu connu de la deuxième dynastie, qui n'est
jusqu'ici attesté dans aucun document
contemporain, mais uniquement dans
les listes postérieures5. D ' u n côté, il
semble exclu que le texte date réellement de son règne; trop de détails
dans la description montrent un état
de l'architecture et de l'organisation
qui dépasse tout ce qui est connu de
l'époque thinite. D ' u n autre côté, il
est difficile de concevoir les raisons
d ' u n e attribution pseudo-épigraphique à une figure tellement obscure
de l'histoire égyptienne.
L e prince Hardjédef, par contre,
auquel est attribuée la redécouverte
5
J. von Beckerafh, Handbuch der âgyptischen Kônigsnamen, p. 49 et 174.
de la composition, est beaucoup plus
connu 6 . Il est attesté dans le même
rôle dans le Livre des morts, où on
lui attribue la découverte des
le temple en dehors du Manuel du
temple dont j e parle aujourd'hui.
L e l o n g titre original du texte
donne une bonne description de la
chapitres 137A et la combinaison du
double visée de cette composition.
chapitre 30B et de la version longue
D ' u n e part, il a pour but de mettre
du chapitre 64. Il est censé de plus
chaque chose à sa place convenable
avoir composé une Sagesse, dont le
dans le temple, c'est-à-dire qu'il s'oc-
début est attesté sur plusieurs ostra-
cupe de l'architecture du temple;
ca du Nouvel Empire. L a tradition
d'autre part, il a pour but de mettre
de sa sagesse et de sa culture lit-
chaque personne dans son office et
téraire semble déjà établie à cette
de donner des indications pour le
époque.
comportement correct, c'est-à-dire
L a redécouverte de textes anciens
q u ' i l s ' o c c u p e des prêtres et des
dans le temple est un thème assez ré-
autres classes des employés du tem-
pandu en Egypte, sans être pourtant
ple. Ces deux fins correspondent aux
devenu tout à fait un lieu commun.
deux sections principales de la com-
Je ne peux pas entrer, par manque de
position - et le titre est aussi un in-
temps, dans une discussion détaillée
dice assurant l'unité de la composi-
de ce dernier point.
tion, bien qu'il soit rare d'avoir des
Les sept années de famine ont un
parallèle bien connu dans la fameuse
manuscrits préservant des fragments
des deux sections.
Stèle de la famine à Séhel 7 . À la différence de notre texte, elle est située
sous le règne de D j o s e r et montre
Imhotep c o m m e acteur principal 8 .
Pour rendre la situation encore plus
compliquée, au British Muséum se
trouve un papyrus hiératique tardif
qui contient un texte en partie parallèle à l'introduction historique du
Manuel du temple, mais qui met en
scène Imhotep. C o m m e ce texte est
mal préservé, j e ne peux pas encore
juger de sa relation exacte au Manuel
du temple - en fait, il y a plusieurs
autres compositions normatives sur
6
Pour lui, voir V . Ritter, «Hordjédef ou
le glorieux destin d'un prince oublié», Égypte,
Afrique & Orient 15 (1999), p. 41-50.
7
Édition de référence P. Barguet, La stèle
de la famine à Séhel, BdE 24, Le Caire
(1953); discussion générale dans Y . Haiying,
«The Famine Stela: A Source-Critical A p proach and Historical-Comparative Perspective», dans Ch. Eyre (Éd.), Proceedings of
the Seventh International Congress ofEgyptologists, Cambridge, 3-9 September 1995,
OLA 82, Louvain (1998), p. 515-521; voir
aussi H. Goedicke, Commente on the «Famine
Stela», VA Supplément 5, San Antonio (1994).
8
Contre l'interprétation de Barguet, Stèle
de la famine, p. 16, il faut comprendre «le
prêtre lecteur Imhotep» avec D. Wildung,
Imhotep und Amenhotep, p. 150.
13
Commençons par la section archi-
Cette partie est mal conservée dans
tecturale, qui est la première dans le
les manuscrits, mais on devine en-
texte. Elle s'ouvre par une cérémonie
core qu'il y avait une foule étonnante
de fondation mettant en scène le roi
de chapelles différentes - au moins
et la déesse Séchât, selon un type
une dizaine autour du sanctuaire prin-
d'images très fréquent en Egypte 9 .
cipal.
Après cela se trouve une énuméra-
Dans cette partie du temple, on in-
tion des chambres et bâtiments du
dique aussi la construction d'une
complexe du temple. Quelques traits
crypte - on notera le singulier, qui
caractéristiques sont à noter: d'abord,
s'oppose à la situation normale de la
le texte se distingue par la sécheresse
Basse Époque, où il y a un grand
du style; son vocabulaire est assez
nombre de cryptes dans chaque tem-
élémentaire et ses constructions syn-
ple. Concernant la f o n c t i o n des
taxiques simples. Il montre ainsi une
cryptes qui a été discutée récem-
divergence notable par rapport à des
ment 10 , on peut noter ces remarques
compositions comme la grande des-
brèves, mais pertinentes: «pour y
cription du temple d'Edfou {Edfou
faire demeurer les dieux chthoniens
V U , 1-20) ou d'autres, qui traitent de
de ce nome, ainsi que les dieux
l'architecture dans les temples gré-
chthoniens qui ne manquent pas (de
co-romains. Ainsi, il s'exprime claire-
se trouver) dans tout autre nome.
ment et sans ambiguïté en sacrifiant
Quand des troubles se produisent sur
l'élégance de l'expression.
Ensuite, l'ordre de la description est
terre, alors on y met les images
cultuelles Çhm.w) de tous les dieux
une question de principe. L a plupart
pour les en éloigner». Une telle con-
des descriptions modernes d'un tem-
ception donne raison, en quelque
ple égyptien procèdent du dehors, en
mesure, aussi bien à ceux qui souli-
pénétrant de plus en plus dans le bâti-
gnent l'aspect de protection et de re-
ment. C'est la perspective du visiteur.
traite qu'à ceux qui se concentrent
Par contre, le Manuel du temple prend
sur les indices incontestables d'un
rigoureusement la perspective du dieu,
culte dans ces lieux.
ce qui est d'ailleurs l'ordre adopté
quand on construit vraiment un temple. C'est aussi l'ordre respecté dans
d'anciennes publications françaises de
temples comme Edfou ou Dendara.
O n commence donc par le sanctuaire et les chambres avoisinantes.
14
9
D. Budde, Die Gôttin Seschat, Kanobos
2, Leipzig (2000), p. 191-199.
10
Voir spécialement W . Waitkus, Die
Texte in den unteren Krypten des Hathortempels von Dendera. Ihre Aussagen zu Funktion und Bedeutung dieser Ràume, MAS 47.
Mayence (1997).
Directement après la crypte est
respondre, par exemple, aux images
décrite la construction de deux es-
de rois anonymes dans le couloir du
caliers menant au toit du temple, l'un
temple de Dendara (Dendara U 54s.,
à l'ouest, l'autre à l'est. Ils doivent
pl. X C V I I I ) . Dans le pronaos, il y a
être inaccessibles à tous, sauf pendant
aussi deux pièces pour les gardiens
les fêtes saisonnières et surtout la
de porte qui interdisent l'accès à
«première fête» au début de l'année,
quiconque sauf aux grands prêtres
quand on enlève les anciens vête-
chargés du service divin.
ments et les onctions des statues.
O n parle ensuite de nouveau de
beaucoup de sanctuaires pour la
Puis nous est donnée une description assez détaillée de la Place de la
première fête sur le toit du temple.
grande et la petite Ennéades, et on
J e suppose q u ' i l s'agit ici d ' u n e
mentionne deux chambres fonction-
référence précise aux lieux dont l'ac-
nelles importantes, à savoir la cham-
cès a déjà été décrit à propos des es-
bre des étoffes (hw.t-mnh.t) et le tré-
caliers. En tout cas, le texte indique
sor Çbl-dfJ.w). Des bribes mal con-
que les constructions devraient sui-
servées concernent une première salle
vre le modèle du rez-de-chaussée et
hypostyle et un sanctuaire spécial
qu'il y a un kiosque à colonnes au-
pour une déesse appelé Per-Our, avec
dessus du sanctuaire. Les spécialistes
Per-Nou et Per-Neser de chaque côté.
des fêtes égyptiennes seront peut-être
Après plusieurs autres chambres et
intéressés de noter que l'expression
peut-être une autre salle, on nous in-
«les fêtes tp-tr.w», dont on a si sou-
forme de nouveau de l ' e x i s t e n c e
vent discuté la portée exacte 11 , est
d'escaliers menant au toit pour y voir
rendue dans la version démotique par
le soleil au Jour de l'an.
Finalement on arrive au pronaos,
dont il est dit qu'il doit être plus large
«les fêtes à leurs dates» (ni hb.w n
p]y=w ssw).
Après quelques lignes peu claires,
et plus haut que les parties an-
on arrive au complexe architectural
térieures, ce qui correspond bien à la
réservé à l'animal sacré (mir.w), qui
réalité architecturale en Égypte.
est désigné comme «lieu de séjour
L'augmentation de largeur est uti-
de ce dieu». Les Egyptiens parais-
lisée pour construire ici un mur tout
sent avoir eu une conception au
autour du temple, qui détermine un
m o i n s élémentaire de l ' é l e v a g e
couloir entourant les bâtiments intérieurs. Il est dit expressément que
'es images (twt.w) des rois doivent
trouver place ici, ce qui pourrait cor-
11
Voir par exemple A . Spalinger, The Private Feast Lists of Ancient Egypt, ÂA 57,
Wiesbaden (1996), p. 1-31.
15
adéquat, car ils prescrivent des ouvertures pour la lumière et expliquent
Peut-être un égyptologue normal
s'attendrait-il à ce que la description
que chaque animal se sent bien quand
soit achevée avec le dernier pylône,
il voit le soleil.
mais c'est loin d'être le cas. Il y a
Après d'autres passages mal con-
une foule de bâtiments supplémen-
servés est décrite une grande cour
taires qui sont énumérés minutieuse-
ouverte, limitée par un pylône avec
ment. Sur le côté droit du temple il
des mâts de bois plaqués en cuivre et
y avait, par exemple, la maison de
plusieurs pièces de service à l ' i n -
l'or pour fondre les images cultuelles,
térieur. Sont mentionnés, entre autres,
l'abattoir, le laboratoire des onguents,
le pr-dwi prévu pour la purification
la latrine et la tannerie. Devant ces
du roi quand il entre dans le temple,
bâtiments se trouve un lac. Sur le côté
et aussi la «maison de la purifica-
gauche, il y a surtout des construc-
t i o n » (hw.t-hsmn)12. L e m u r e n -
tions pour les prêtres spécialistes, en-
tourant cette cour est censé avoir une
tre autres l'astronome (jmw-p.t)13, les
largeur de 8 coudées, et une hauteur
prêtres qui confectionnent les images
qui n'est pas préservée c o m p l è t e -
osiriennes, le savetier, le professeur
ment, peut-être de 15 coudées.
Puis est prévue une nouvelle cour
en chef, le maître de chant, le tein
turier, et une latrine. O n définit en-
limitée par un pylône, appelée «cour
suite les cinq portes pour tout le com-
de la foule» (wsh.t ms"), avec là aus-
plexe décrit jusqu'ici. L e mur d'en-
si une installation pour la purifica-
ceinte a une largeur de 12 coudées et
tion du roi. Une troisième cour fait
une hauteur de 20 coudées.
suite, de nouveau avec un pylône.
À l'extérieur de cette enceinte, il
Cette cour est définie comme lieu de
y a d'autres dépendances, par exem-
station pour un groupe dont le nom
ple le pâturage, l'étang de la volaille,
n'est malheureusement pas préservé,
le magasin des céréales et la cuisine,
mais il s'agit peut-être des citadins.
mais aussi l'atelier d'embaumement
Il se peut qu'il y ait même une qua-
de l ' a n i m a l sacré dont le plan est
trième cour avec pylône, mais la re-
décrit de façon assez détaillée, avec
construction de ce passage n'est pas
encore tout à fait assurée. En tout cas,
par le nombre important des cours et
des pylônes, le texte semble se rapporter plutôt aux grands temples du
Nouvel Empire qu'à ceux de la Basse
Epoque.
16
12
Voir N. Kloth, «Das Natronhaus hw.thzmn », SAK 29 (2001), p. 203-216.
13
L'orthographe des manuscrits du
Manuel du temple montre que S. Sauneron,
«Le prêtre astronome du temple d'Esna», terni 15 (1959), p. 36-41, a eu tort de lire ce
mot comme biq-p.t.
une salle centrale et la rsn.t et la
c'est-à-dire qu'il sera mis à mort et
mhn.t sur les côtés. Il a un dromos
brûlé sur l'autel. O n nous donne en-
décoré et, dans l'énumération de cette
suite une brève notice sur l'œuvre in-
décoration, nous apprenons q u ' u n
connaissable (ki.t nn rh)16 qui est
titre dont la lecture est délicate, et qui
remplacée chaque année. Il s'agit
est attesté principalement dans le ri-
bien sûr des figurines bien connues
tuel de l'ouverture de la bouche 14 , est
des rites osiriens du m o i s de
traduit par shl qdy.t, «dessinateur des
Khoiak 17 . Ici, et encore dans d'autres
contours», dans la version d é m o -
passages du Manuel du temple, sont
tique. À côté il y a la filature, des ma-
indiquées trois manières de les élim-
gasins pour les papyrus, les nattes et
iner: soit les jeter dans l'eau du lac
le bois destiné au charbon, l'atelier
sacré, soit les jeter dans l ' e a u du
du potier, le dépotoir aux ordures et
fleuve, soit les enterrer dans la butte
une latrine.
sacrée18. Les offrandes présentées en
Mais cela n'est pas encore la fin
cette zone ne sont pas destinées à la
de la section architecturale. Il y a en-
consommation des humains, mais
core des emplacements religieux qui
rendues à la nature, probablement
se trouvent en dehors de l'enceinte
aussi jetées à l'eau.
principale. L ' u n d'entre eux est le
A v e c cette partie, la section archi-
Mammisi, qui doit avoir une cour de
tecturale au sens strict se termine,
fête et des colonnes avec décoration
mais il y a encore un appendice im-
de démons nains15. Il semble bien que
portant, qui énumère les dieux qui
l'on ait aussi des descriptions du lieu
doivent «se tenir» (Tz1) dans les dif-
d'apparition (s.t h'.w) et un embar-
férentes chambres du temple. L a
cadère, mais ici une partie considérable du texte est mal préservée.
L à où le fil reprend, on se trouve
dans la description de la dernière
unité architecturale à traiter, à savoir
le c o m p l e x e osirien. Il y a un lac
sacré (sy nfr.î) et une butte sacrée (U.t
ntr.it), qui ont de sévères restrictions
d'accès. Quiconque est pris sur le fait,
quand il y marche ou trempe ses
doigts dans l'eau sacrée sans autorisation, sera condamné c o m m e
coupable du crime de lèse-majesté,
14
Discutée entre autres par E. Otto, Dos
àgyptische Mundôffnungsritual, ÂA 3, Wiesbaden (1960), volume H", p. 13s.; W . Helck,
«Einige Bemerkungen zum Mundôffmmgsritual», MDAIK 22 (1967), p. 27-41, là
p. 31s.; R. Drenkhahn, Die Handwerker und
ihre Tàtigkeiten im Alten Âgypten, ÂA 31,
Wiesbaden (1976), p. 62-69.
15
Le mot hyt utilisé dans les manuscrits
est une orthographe tardive pour 'hS.tl.
16
Traduit comme «œuvre du temple»
(ipy(.t) hw.t-ntr) dans la version démotique.
17
Voir E. Chassinat, Le mystère d'Osiris
au mois de Khoiak, Le Caire (1966-68); S.
Cauville, Dendera. Les chapelles osiriennes,
BdE 117-119, Le Caire (1997).
17
restitution de cette liste est loin d'être
de cette composition funéraire22, alors
achevée mais elle a déjà donné
que d'autres l'ont nié en notant la
quelques résultats. Plusieurs groupes
assez remarquables se trouvent dans
la salle des offrandes et les chambres
avoisinantes. O n y trouve ainsi les
maîtres d'autels bien connus dans les
temples tardifs 19 , et les sept vaches
et le taureau que l'on connaît surtout
par le chapitre 148 du L i v r e des
morts, mais qui sont aussi bien attestés comme pourvoyeurs de nourriture justement dans les salles d ' o f frandes des temples réels20. U n autre
passage nous présente l'ensemble des
génies luni-solaires étudiés dernièrement par F. LabriqUe 21 . M a l heureusement, je ne peux pas encore
dire dans quel lieu du temple cette
section se situe. L e s attestations
réelles se trouvent soit dans des complexes osiriens, soit dans le pronaos.
Finalement, on passe à la deuxième section principale du Manuel
du temple, qui traite des prêtres. Elle
commence probablement par quelques règles concernant les prêtres en
général. Ici aussi se situerait le
fameux serment des prêtres égyptiens
que l'on connaît déjà par la version
grecque. Il a donné lieu à une grande
discussion sur ses relations avec les
déclarations d'innocence du Livre des
morts, chapitre 125. Quelques chercheurs ont proposé de considérer le
serment des prêtres comme la source
18
18
Pour une discussion plus détaillée
surtout concernant la mise à l'eau, voir J. F.
Quack, «Die rituelle Erneuerung der Osirisfigurinen», WdO 31 (2000/01), p. 5-18.
19
J. Simonet, Le Collège des Dieux
Maîtres d'Autel. Nature et histoire d'une figure tardive de la religion égyptienne, Orientalia Monspeliensia 7, Montpellier (1994).
20
R. El-Sayed, «Les sept vaches célestes,
leur taureau et les quatre gouvernails d'après
les données de documents divers», MDAIK
36 (1980), p. 357-390; A . von Lieven, «Book
of the Dead - Book of the Living», dans St.
Seidlmayer (Ed.), Religion in Context. Imaginary Concepts and Social Reality, sous presse.
21
F. Labrique, «Les escortes de la lune
dans le complexe lunaire de Khonsou à Karnak», BSFE 140 (1997), p. 13-26; Ead.,
«L'escorte de la lune sur la porte d'Evergète
à Karnak», dans R. Gundlach, M. Rochholz
(Éds.), 4. Agyptologische Tempeltagung. Feste
im Tempel, ÂAT 33, 2, Wiesbaden (1998),
p. 91-121; Ead., «L'escorte de la lune sur la
porte d'Évergète à Karnak», RdE 49 (1998).
p. 107-150.
22
Ainsi R. Merkelbach, «Ein âgyptischer Priestereid», ZPE 2 (1968), p. 7-30; R.
Grieshammer, Reinhard, «Zum „Sitz im
Leben" des negativen Sundenbekenntnisses»,
dans XVIII. Deutscher Orientalistentag vom
1. bis 5. Oktober 1972 in Lubeck. Vortrâge.
Herausgegeben von Wolfgang Voigt, ZDMG
Supplément 2, Wiesbaden (1974), p. 19-25;
Id., «Zum Fortwirken âgyptischer und K-^
raelitisch-judischer Unschuldserklârungen in
friihchristlichen Texten Agyptens», dans I.
Shirun-Grumach (Éd.), Jérusalem Studies in
Egyptology, ÂAT 40, Wiesbaden (1998), p.
247-264; J. Assmann, Ma'at. Gerechtigkeit
und Unsterblichkeit im Alten Àgypten, Munich (1990), p. 140-149; voir aussi J. Gee,
The Requirements of Rituel Purity in Ancient
Egypt, thèse soutenue à l'Université de Yale
(1998).
date tardive du texte grec23. A v e c la
à ce dieu contre lequel le bras est
découverte des fragments hiératiques
dressé à Memphis (ntr pf dti.tw '.w
en égyptien classique, la discussion
r=fm Hw.t-kl-Pth). Une section sur
doit reprendre sur une base nouvelle.
l'initiation de quelques prêtres aux
M o n impression personnelle est,
parties réservées du temple donne de
d'ailleurs, que les déclarations du
n o u v e a u x détails sur les secteurs
Livre des morts ne dérivent pas du
osiriens: seuls un ritualiste en chef
serment du Manuel du temple, mais
(hrî-sstï) et deux purificateurs du
d'une composition structurellement
dieu ('b.w-ntr) peuvent y pénétrer.
similaire qui s'occupait de l'admi-
Sont énumérées de nouveau les pos-
nistration civile, et dont les fameux
sibilités d'élimination des figurines
Devoirs du vizir 24 faisaient proba-
osiriennes. Dans quelques situations
blement partie. En fait, style et langue
le culte doit être si secret que seul le
des Devoirs du vizir s'apparentent
ritualiste en chef est admis à célé-
beaucoup aux instructions détaillées
brer le culte journalier, après avoir
dans le Manuel du temple, surtout
écarté son entourage et en détournant
pour la partie finale du texte sur le
son visage vers l'arrière.
v i z i r qui a toujours été regardée
comme la section la plus ancienne.
D'autres règlements généraux concernent les biens à fournir au prêtre
Après quelques passages mal conservés, on passe à la deuxième partie de la section sur les prêtres. Elle
est introduite par une histoire de trou-
et, en cas de décès, à sa femme et à
ses enfants. Les fils sont censés prendre la fonction de leur père, mais s'ils
sont trop jeunes, le travail est confié
à un assistant qui touche la moitié du
salaire. L a partie suivante énumère
les personnes qui, à cause de déformations physiques ou de défauts de
comportement, ne sont pas admis au
service du temple, par exemple ceux
qui boivent trop de vin ou de bière,
qui racontent des mensonges, qui sont
insolents envers leurs supérieurs, qui
sont voleurs ou qui forniquent. Ils
sont désignés comme des hommes
qui ressemblent à Seth, à Apopis et
23
Ainsi J. G. Griffiths, The Divine Verdict. A Study of Divine Judgement in the Ancient Religions, Numen Supplément 52, Leyde
e.a. (1991), p. 218-224; M. Lichtheim, Maat
in Egyptien Autobiographies and Related
Studies, OBO 120, Fribourg/Gôttingen (1992),
p. 127.
24
Pour eux, voir en dernier lieu G.P.F.
van den Boom, The Duties ofthe Vizier. Civil
Administration in the Early New Kingdom,
Londres/New York (1988), et pour la datation: J.-M. Kruchten,BiO/'48 (1991), p. 821831 ; E. Pardey, «Die Datierung der „Dienstanweisung fur den Wesir" und die Problematik von tp rsj im Neuen Reich», dans N.
Kloth, K. Martin, E. Pardey (Éds.), „Es werde
niedergelegt als Schriftstiick". Festschriftfur
Hartwig Altenmùller zum 65. Geburtstag,
BSAK 9, Hambourg (2003), p. 323-334.
19
vaille, de nouveau avec Hardjédef,
tent et en condamnant l'incompétent,
fils de Khéops, comme protagoniste.
en châtiant sa faute, en frappant, en
On passe ensuite en revue les devoirs
incarcérant, en confisquant ses biens
de toutes les classes de personnel du
à la campagne et à la ville.»
temple, en commençant par les de-
L a peau de panthère est définie
grés les plus élevés de la hiérarchie
c o m m e vêtement solennel du gou-
jusqu'aux couches les plus basses de
verneur; toutefois, est-il expliqué, il
la population. L e texte présente
ne s'agit pas de peau naturelle, mais
généralement un système de quatre
d'un produit artificiel fait de lin, d'or
phylés tournantes pour le service
et de pierres précieuses. Il est inter-
mensuel. Pour les prêtres supérieurs,
dit aux prêtres que le cuir touche leur
il est normal d'avoir un seul tenant
corps. Cet interdit semble confirmer
par mois, donc quatre en tout. Dans
la tradition rapportée par les auteurs
de rares cas, on emploie des spécia-
grecs, qui affirment que les prêtres
listes permanents, normalement deux
égyptiens ont un tabou contre la laine
à la fois.
en tant que produit issu du corps des
L e premier de tous est le g o u -
animaux. En tout cas, de nombreuses
verneur et directeur des prophètes. Il
statues ou peintures montrent la peau
y en a deux, le gouverneur en chef
de panthère de manière si schéma-
(hl.tî-' wr) et le gouverneur-adjoint
tique q u ' o n peut en effet la c o m -
(hl.tl-' jmj-hf). Ce système est aussi
prendre c o m m e artificielle; on a
attesté dans quelques descriptions de
d'ailleurs trouvé de ces peaux artifi-
fêtes dans les temples gréco-romains.
cielles, par exemple dans la tombe de
Ces gouverneurs fonctionnent comme
Toutankhamon. À la mort du gou-
charnières entre l'administration
verneur, on lui érige une statue dans
civile du roi et l'administration in-
le temple et on commémore son nom.
terne du temple. D ' u n e part, ils ont
L a section suivante concerne les
compétence pour des processions
prophètes, mais elle est si mal con-
solennelles; de l'autre, ils sont as-
servée qu'on peut difficilement en ti-
sistés de scribes pour l'administra-
rer des informations spécifiques. H
tion économique et ont aussi des res-
semble qu'on distingue entre premier,
ponsabilités judiciaires. C o m m e dit
d e u x i è m e , troisième et quatrième
le texte: «ce sont eux auxquels les
prophète. Eux aussi portent la peau
affaires sont rapportées par des
de panthère artificielle en quelques
scribes, et qui regardent [un h o m m e
occasions, et pour eux aussi il y a une
(?)] en le condamnant [...] quand il
statue dans le temple, bien que la ter-
finit sa mission, en louant le compé-
minologie soit différente (hn.tî contre
20
twt.w pour le gouverneur).
Plusieurs autres sections, au moins
deux ou trois, concernent des spécialistes rituels qui semblent centrés
sur le culte d'Osiris. Il y a probablement des ritualistes en chef et des
en présence de la divinité à l'escalier
du dieu de la ville. Ils sont des serviteurs du roi dans le temple. Ils sont
équivalents aux grands prêtres dans
tous leurs devoirs au jour où on se
tient et met son fils à sa place.»
L a section suivante traite du pro-
prêtres-Sem. Malheureusement, pour
fesseur en chef. Pour elle aussi, j ' a i
retrouver un sens suivi, il faut en ar-
déjà donné un commentaire détaillé
river aux devoirs du scribe du livre
ailleurs 26 . En résumé, on peut dire
d i v i n ( f i g . 2 ) . C e l u i - c i collabore à
qu'il est responsable du choix, par-
plusieurs activités avec le prêtre de
mi les enfants des prêtres, de ceux
Sekhmet et le charmeur de scorpions.
qui sont dignes de succéder à leur
C o m m e j ' e n ai déjà parlé ailleurs 25 ,
père. Il donne un enseignement élé-
je résume en disant que ces prêtres
mentaire à tous les enfants des prêtres
combinent activités médicales et
et un enseignement supérieur aux fils
fonctions magiques; ainsi l'exécution
des prophètes.
de rituels d'exécration, l'inspection
Après les fonctions intellectuelles,
du bétail à l'abattoir et l'inspection
on passe aux artisans, et ils sont
de la peau des citoyens pour prévenir
plusieurs. L e titre du premier est per-
la lèpre.
du mais, selon ses activités, il devrait
Après ces trois fonctions, on passe
s'agir du dessinateur des contours
à un titre assez obscur qui semble de-
(shi.w qd.wt). Il lui incombe de
voir être lu nsw.tî. Si la graphie mon-
dessiner les dieux qui doivent se trou-
tre un lien avec le mot « r o i » , cela
ver dans chaque chapelle, en suivant
correspond à ce qui est dit de leurs
des modèles établis. Il semble qu'il
devoirs. Pour donner une idée du
y ait une date déterminée (14 T h o t ? )
style de ces instructions, j e traduis
pour repasser les contours en ocre.
cette section en totalité:
Le sculpteur (qs.tï) lui fait suite dans
«Nesouti, quatre hommes, chacun
dans son service mensuel. C'est lui
qui dépose des offrandes aux statues
du seigneur qui se trouvent dans le
temple et dans le couloir du temple.
C'est lui qui inspecte les images processionnelles (hn.tiw) du roi qui se
trouvent avec ïes dieux dans leurs
tabernacles (M). C'est lui qui prie les
dieux pour le Ka du roi à l'occasion
des fêtes saisonnières quand on se tient
la hiérarchie, et après lui vient le
grand artisan (wr hmw.w), puis le
«supérieur des supérieurs» (hrl
hrî.w), qui est bien connu comme ar-
25
J.F. Quack, dans Seidlmayer (Éd.), Religion in Context, sous presse.
26
J.F. Quack, dans Beinlich e.a. (Eds.), 5.
Âgyptologische Tempeltagung, p. 159-171.
21
Fig. 2. Papyrus Carlsberg 313: la page 17.
tisan, surtout sur des inscriptions des
térieur du temple doivent se placer
expéditions du M o y e n Empire 27 . A
dans cette partie de la composition.
ce point, la suite du texte dans les
Il y a une notice sur les chasseurs
manuscrits s'interrompt pour
quelques sections.
Il se peut que quelques fragments
traitant des gens travaillant à l ' e x -
22
27
Voir K.-J. Seyfried, Beitràge zu den Expeditionen des Mittleren Reiches in die OslWùste.HÀB 15, Hildesheim (1981). p. 33-35.
(nw.w) qui sont actifs dans le désert
éleveurs des animaux et ceux qui
et atteignent les oasis pendant leurs
doivent broyer le grain pour le tem-
missions. D e plus, il y a au moins
ple. Ces derniers forment le plus
une mention des prospecteurs
grand contingent repéré j u s q u ' i c i
(smn.tîw), bien qu'il ne s'agisse pas
dans la composition tout entière: il y
formellement d'une section énu-
en a cinquante par mois, donc deux
mérant leurs devoirs. A u moins, leur
cents en tout.
existence parmi le personnel du temple est à noter.
L à où les manuscrits reprennent,
A l'origine, il y avait certainement
aussi des sections pour les différentes
classes de gardiens de porte. J ' e n ai
on se trouve dans un passage con-
récupéré un certain nombre de bribes,
cernant des fonctionnaires qui sont
mais leur sens originel et leur cohé-
actifs dans les questions pratiques et
sion ne sont pas encore très clairs. Il
économiques du temple. Ainsi, on a
y a aussi une mention des gardiens
le préposé à la cuisson ( M psî.i). Ils
de porte féminins. J'aimerais signaler
sont responsables pour des produits
qu'une notice dans un papyrus de
comme le pain de jujubier (t'-nbs),
Berlin montre que les gardiens de
les fruits, les légumes, le miel, le pa-
porte s'occupaient aussi de magie,
pyrus et les fleurs.
Puis on a le préposé à l'autel (irîhi.wi). L a première partie conservée
surtout en repoussant des animaux
dangereux. Une telle situation aiderait
à comprendre des cas comme celui
de ses devoirs décrit brièvement des
du fameux Djed-Her qui était gar-
statues d ' A n u b i s , de l ' I n o n d a t i o n
dien de porte à Athribis et qui est
(h 'pî), de H o u et des dieux sur les
connu par sa statue couverte de for-
étendards. Il est donc impliqué dans
mules magiques 28 .
les fêtes comportant une procession.
C o m m e il y a surtout des prêtres
Puis on nous informe que le préposé
masculins, il serait bienvenu de don-
à l'autel est celui qui allume et éteint
ner aussi quelques indications sur le
les cierges dans le temple.
clergé féminin. Malheureusement, les
D'autres sections m o i n s bien
sections en question sont mal
préservées dans cette partie de la
préservées. Il y a quelques bribes
composition mentionnent le scribe
montrant la présence de chanteuses et
des tables d'offrandes {shï.w wdh.w)
de joueuses de sistre. Le plus frus-
et les personnes s'occupant de l'administration du bétail et des champs.
D'autres devoirs, en bas de
l'échelle sociale, concernent les
28
E. Jehnkova-Reymond, Les inscriptions
de la statue guérisseuse de Djed-Her-LeSauveur, BdE 23, Le Caire (1956).
23
trant est un fragment qui mentionne
q u ' i l est éminemment pratique. Il
des règles de pureté pour les femmes:
nous donne des indications détaillées
on a par exemple la phrase: «si elle
sur l'architecture du temple, y com-
est impure, l'expulser de son emploi
pris toutes les chambres et les salles
(fr 'b.w=s dr=s m wnw.t=s)»;
requises, ainsi que toutes les portes,
quelques lignes plus bas, on peut
les directives pour leur ouverture et
déchiffrer: «donner un délai de pureté
les lieux d'accès restreint. O n a une
pour elle». O n ne peut que spéculer
foule de précisions sur les activités
sur le sens exact de ces stipulations.
L e trait caractéristique du Manuel
quotidiennes de tous les employés du
temple. Mais ce Manuel ne dit rien
du temple est évidemment que l'on
sur la théologie ou les formules à
s ' o c c u p e largement du f o n c t i o n -
réciter. Même s'il décrit quelques ac-
nement des activités, sans entrer dans
tivités rituelles, cela n'est pas en rai-
les raisons cultuelles ni donner de des-
son d'un intérêt spirituel, mais pour
criptions détaillées des rites. Il y a
définir les groupes de prêtres qui y
néanmoins une exception notable qui
sont admis et leurs devoirs spéci-
entraîne des difficultés: c o m m e il
fiques dans les rites. Il présuppose
s'agit d ' u n passage qui est attesté
donc l'existence d'autres manuels à
dans deux manuscrits différents, on
utiliser, à savoir des rouleaux con-
ne peut douter q u ' i l appartienne
tenant la description du culte divin
réellement au Manuel du temple; il
journalier, des différentes fêtes du
semble décrire une fête solennelle,
temple et des recettes spécifiques
peut-être celle du Nouvel A n ; on par-
pour confectionner des objets tels que
le d'une grande offrande qui consiste
les figurines osiriennes. D e fait, dans
en pain, bière, taureaux, volailles, vin,
l'état actuel de la documentation,
lait, a n t i l o p e s - o r y x , gazelles et
dans les restes des bibliothèques de
quelques autres mets perdus dans des
Tebtynis et de Soknopaiou Nesos se
lacunes. J e ne sais pas encore où
trouvent précisément de tels textes -
placer ce fragment dans la composi-
compositions pour le culte journalier
tion, mais il est probable q u ' i l ne
et les fêtes, et un nombre considé-
s'agisse que d'une digression à une
rable de manuels spécifiquement
description des devoirs d'un prêtre
osiriens. C o m m e le Manuel du tem-
spécifique.
ple appartient à un genre de texte qui,
j u s q u ' i c i , est très mal connu en
O n peut maintenant passer à un
É g y p t e ancienne, il complète
bref résumé. La portée caractéristique
heureusement nos connaissances et
du Manuel du temple consiste en ce
contribue substantiellement à une
24
meilleure compréhension de la cul-
des faits en eux-mêmes, mais la mise
ture égyptienne. J ' a i mis expressé-
en parallèle avec les réalités connues
ment, dans le cadre de cette commu-
permettra sans doute encore bien des
nication, l'accent sur la présentation
conclusions supplémentaires.
25

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