Témoignages entre garçon manqué et masculinité
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Témoignages entre garçon manqué et masculinité
Soirée annuelle Bloom and Boom 28 novembre 2014 – témoignages d’ouverture Qu’est-ce qu’être un homme ? Cette question m’a poursuivi de nombreuses années. Enfant, j’adorais jouer aux petites voitures. Mais j’aimais aussi habiller les poupées de mes amies. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi je ne pouvais pas faire les deux. Et j’avais tout autant de difficulté à saisir les contours du moule duquel semblaient provenir les autres garçons. Pourquoi se battre ou jouer au plus fort? Pourquoi ne pas plutôt faire de la danse ? Quel plaisir y-a-t-il à courir après un ballon tout un après-midi? Pourquoi ce ballon me fait-il si peur? Je redoutais particulièrement les cours de sport à l’école. Ils étaient souvent l’occasion pour les garçons de faire valoir qui était le plus fort. L’espace semblait dédié à la performance et aux jeux de force. Je me sentais totalement étranger à tout cela, et pourtant j’étais bien dans le groupe des garçons. Les années passant, ces cours de sport sont devenus un enfer : ma différence m’était durement reprochée. J’étais la risée de ces garçons qui semblaient être les dépositaires de la norme, et à ce titre, me rejetaient de leur groupe et niaient mon identité masculine. J’ai donc appris que si je ne respectais pas leurs codes de comportement très stricts, je perdais mon identité masculine. Je devenais une fille, mais pas vraiment non plus car physiquement j’étais bien un garçon. La douceur, le calme, la tendresse, la rêverie, et l’envie de m’habiller avec les vêtements de maman ont aussi posé quelques questions en famille. Là aussi, j’ai appris que si je ne suivais pas ces énigmatiques codes, j’en paierais le prix plus tard. Il fallait m’endurcir. Pourquoi était-il si difficile pour moi de savoir comment me comporter pour être un vrai garçon ? Cela paraissait tellement évident pour la plupart de autres. J’ai bien essayé de les imiter afin d’être accepté dans ce club masculin très fermé. J’ai essayé de me convaincre que je pouvais leur ressembler et devenir comme les garçons de l’école, de la télévision, de ma famille. C’est bien connu: les garçons comme les mecs sont tous les mêmes. N’y arrivant pas, je m’en suis terriblement voulu. J’ai petit à petit intériorisé leurs voix de reproche que j’ai ensuite dirigé contre moi-même : tu n’est pas commeci, tu devrais être comme ça, tu n’est pas assez ceci, tu es trop cela, etc, etc. Adolescent et jeune adulte, l’identité masculine est devenue liée à la sexualité : le moule du garçon devient le moule du mec, de l’homme, le vrai, qui doit impérativement perpétuer la légende urbaine du séducteur invétéré qui est performant au lit avec ses conquêtes féminines. Le moule continue et là aussi, le rejet guette si l’on ne respecte pas la loi suprême masculine décidée je ne sais pas quand, par je ne sais pas qui, je ne sais pas où, mais qui pourtant est religieusement perpétrée. Heureusement, se dessine une alternative, que toute personne bien pensante peut prédire à l’avance pour la catégorie de ceux qui ne sont pas issus du moule : tu vas être gay mon fils. L’homosexualité légitimise la différence, mais ne résout pas la quête identitaire. Être gay ne menace pas la loi suprême masculine, car en fait, un vrai mec n’est pas gay. Donc je suis un homme mais pas un vrai? C’est un fait étrange que de penser que l’identité masculine soit limitées à quelques attitudes dans la vie ou sous la couette. Cette question identitaire est devenue une quête, qui m’a amenée à une longue introspection pour redécouvrir et assumer ma propre version du masculin : j’aime des femmes mais je ne couche pas avec, j’aime écouter Britney Spears et la couleur rose, et je ne comprendrai jamais comment on peut passer des heures à regarder un ballon passer d’un coté à l’autre d’un carré de pelouse. Dans ma version du masculin, il y a entre autres s’engager pour des causes qui me tiennent à cœur. La campagne he for she appelle à créer un espace de liberté où les hommes et les femmes peuvent être tels qu’ils sont, et exprimer leur singularité et leur authenticité, qu’ils se sentent proches des normes ou pas. Je me joins entièrement à cette cause et me réjouis de créer ensemble ce monde demain. Soirée annuelle Bloom and Boom 28 novembre 2014 – témoignages d’ouverture Garçon manqué 1 J'adorais le foot, leader dans le préau grâce à mon jeu, je faisais les équipes avec l'autre footballeur star, jamais je n'ai eu de remarque de la part de mes camarades garçons ou filles, j'inspirais le respect et 20 ans plus tard, certaines personnes se souviennent encore de mon jeux. Par contre dans ma famille proche alors que je jouais avec mon frère et mes cousins plutôt qu'avec ma soeur, un oncle m'a dit que j'étais un vrai garçon manqué, cela m'avait profondément blessé, je ne l'appréciais pas beaucoup et encore maintenant je le perçois comme une personne dogmatique. J'ai cessé de jouer au foot à l'adolescence mais suis restée très sportive, plus tard j'ai eu le plaisir de shooter dans le ballon avec mes fils, leur père n'étant lui pas un footballeur. Garçon manqué 2 J'ai aussi été un garçon manqué jusqu'à ce que l'âge de la puberté viennent transformer mon corps vers 12 à 13 ans. Je pense avoir souhaité être un garçon dans l'intention de me faire aimer par mon père qui avait un profond désir de garçon. Le pauvre homme avait 4 filles et avait adopté une orpheline! Il se retrouvait donc dans une maison où il était le seul homme parmi 6 femmes. Le paroxysme de mon envie de ressembler à un garçon m'a été très claire lorsque vers 12 ans un ami de mon père qui ne me connaissait pas m'a pris pour le fils de la famille. Cela m'a donné une telle satisfaction que j'ai réalisé que j'aurais préféré être un garçon dans cette famille où la meilleure place n'était certainement pas donnée aux femmes. J'étais la rebelle de la famille, peut être ce comportement de garçon manqué (habillement, coupe de cheveux, pensée etc ..) est-ce une façon de me démarquer des autres membres de la famille. Le garçon manqué est tombé aux oubliettes lorsque les hormones de l'adolescence sont venues me chambouler. Il ne restait plus de place pour ce rôle de garçon devant le raz de marée qui m'avait prise par surprise et que j'allais vivre dans la solitude. Je me suis ensuite dirigée vers des métiers et rôles en entreprise où j'ai souvent été la première femme ou le seule femme dans un environnement d'hommes dans lesquels il était attendu que je fonctionne comme un homme. Ce que je n'étais pas. Cela m'a demandé une longue démarche personnelle pour que je récupère intégralement toute ma féminité. Une très belle aventure ...