Téléchargez la Fiche-objet du Télégraphe électrique de Wheastone

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Télégraphe électrique de Wheastone
et Cooke, 1842. Inv. 14619-0000Fiche objet
LES PREMISSES
C’est en 1837 qu’est mis au point le premier système de
télégraphe électrique réellement opérationnel. Cette découverte
ouvre une nouvelle ère, celle des applications pratiques de
l’électricité.
Certes, quelques tentatives de communication grâce à
l’électricité ont été tentées comme celle d’un Ecossais
anonyme en 1753 ou du franco-genevois Lesage, en 1774. Ces
systèmes embryonnaires utilisent les propriétés connues de
l’électricité statique : attractions, répulsions, chocs électriques.
Ainsi le système écossais nécessite 26 fils conducteurs isolés
reliant l’émetteur et le récepteur. Le fil conducteur transmet
une charge électrique, le dispositif de réception permet par
exemple d’attirer de petites pièces de papier sur lesquelles
figurent les lettres correspondant au message de départ. De tels
systèmes utilisent l’énergie produite par une machine
électrostatique à friction : le peu de maîtrise de l’électricité
entrave le développement de ces techniques, forcément lentes
et condamnées à de courtes distances.
© Musée des arts et métiers
Un changement considérable est introduit avec la découverte de la pile par Alessandro Volta en
1799. Cette invention est perfectionnée dans les premières décennies du XIXe siècle et les savants
disposent alors du premier générateur susceptible de fournir un courant électrique permanent. L’étude des
propriétés de ce courant ouvre l’ère de son utilisation dans de nouvelles techniques. Ainsi, le physicien
danois Christian Oersted découvre en 1819 les propriétés magnétiques du courant électrique : un fil
conducteur parcouru par un courant dévie une aiguille aimantée. L’application de ce phénomène à la
transmission des informations vient immédiatement à l’esprit du physicien français André-Marie Ampère.
Se succèdent alors deux décennies de recherches et d’inventions menées en Europe et en Amérique.
Savants, ingénieurs et entrepreneurs se mobilisent dans un va-et-vient entre l’étude des conducteurs et des
propriétés magnétiques du courant et la mise au point de nouveaux instruments.
Les idées et les découvertes circulent grâce aux publications savantes. Cela rend possible une réelle
mise en commun des connaissances, qui explique la rapidité des progrès par rapport aux époques
précédentes.
LES INVENTEURS
En 1837 a lieu la première rencontre entre William Cooke (1806-1879) et Charles Wheatstone
(1802-1875). Cooke est un jeune officier qui quitte l’armée des Indes pour des raisons de santé. Il profite
de sa convalescence pour voyager en Europe, et assiste en 1836 en Allemagne à la présentation d’un
télégraphe électrique expérimental. Il développe alors son propre prototype, qu’il présente à son retour en
Angleterre à des compagnies ferroviaires. Poursuivant ses expérimentations, il s’adresse d’abord à
Michael Faraday, le « roi des électromagnéticiens » et trouve finalement l’aide de Charles Wheatstone,
titulaire de la chaire de physique expérimentale au King’s College de Londres. C’est le début d’une
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Fiche objet : Télégraphe électrique de Wheastone et Cooke, 1842. Inv. 14619-0000-
collaboration aux intérêts complémentaires, Wheatstone se préoccupant de l’avancement des
connaissances scientifiques, Cooke visant à la réussite commerciale. Ils déposent leur brevet commun en
1837, pour un télégraphe à cinq aiguilles aimantées, expérimenté avec succès sur une ligne de 2 km entre
Euston et Camden
L’originalité de Wheastone et Cooke n’est pas tant dans l’appareil lui-même, fortement inspiré par
ceux des prédécesseurs, que dans la volonté d’exploitation rapide et de commercialisation. C’est une
attitude toute différente de celle de Claude Chappe en France ; elle s’apparente toutes proportions gardées
à celle de James Watt et de Boulton pour la machine à vapeur. En effet, pour promouvoir leur appareil,
Wheastone et Cooke s’adressent aux compagnies privées de chemin de fer dont les besoins de
transmissions rapides sont réels afin d’éviter les collisions. Au cours de l’année 1838, une liaison est
exploitée entre Paddington (Londres) et West Drayton, sur une ligne de la Great Western Railway, et
l’expérience permet de nouveaux perfectionnements.
LE RESEAU
En Angleterre, puis dans le reste de l’Europe, le développement du télégraphe est directement lié au
développement du réseau de chemin de fer. D’autres compagnies ferroviaires sont séduites par le système
Wheastone et Cooke. Plusieurs lignes sont ainsi réalisées le long des voies ferrées et les deux associés
touchent alors des redevances pour l’utilisation de leur brevet. Dès 1842, le réseau s’ouvre à d’autres
usages comme les communications privées. Un épisode contribue grandement à la popularité du
télégraphe électrique et à son essor : le 1er janvier 1845, un homme suspecté de meurtre est arrêté en gare
de Paddington à Londres grâce à la transmission de son signalement.
Peu à peu les lignes de télégraphe optique dépendantes de l’Amirauté britannique sont fermées. Le
réseau anglais se développe dans le cadre de sociétés privées sans intervention de l’Etat. Vers 1852, il y
a en Angleterre 6 500 km de lignes télégraphiques équipées. De nombreux hommes politiques souhaitent
que le gouvernement développe son propre système de télégraphie. Les raisons mises en avant sont
d’une part, la nécessité d’un financement conséquent pour permettre le développement du système et
d’autre part, les multiples inconvénients du télégraphe électrique fonctionnant au sein de compagnies
privées : tarifs prohibitifs, mauvaise qualité du service et couverture insuffisante du territoire. En 1868,
une première loi votée au Parlement permet au ministre des Postes d’acquérir, d’exploiter et d’entretenir
les télégraphes électriques. En 1869, le Telegraph Act octroie au Post Office le monopole légal de la
transmission télégraphique. C’est la première nationalisation de l’Histoire et c’est une grande originalité
en Angleterre où la plupart des infrastructures ont été jusqu’ici développées dans un cadre privé.
LE POINT DE VUE DU TECHNICIEN
Le télégraphe de Wheastone et Cooke présenté au musée est un appareil à deux aiguilles, qui met
donc en œuvre deux circuits électriques. Chaque circuit est composé d’un seul fil, la connexion à la terre
assurant le retour du circuit. Chaque aiguille est placée dans le voisinage d’un enroulement de fil
conducteur. Lorsque le circuit est parcouru par le courant électrique fourni par une pile, la bobine produit
un champ magnétique qui dévie l’aiguille. En inversant le sens du courant, l’aiguille pivote dans le sens
opposé.
Les aiguilles sont placées verticalement sur le devant de l’appareil. Le code alphabétique utilisé
associe chaque lettre à une déviation ou une série de déviation de l’une des aiguilles. Deux poignées
commandent le passage ou l’interruption du courant électrique, et, de manière assez ingénieuse, le sens
du courant. La déviation de l’aiguille reproduit finalement le déplacement de la poignée. A distance, un
appareil identique se comporte en récepteur : relié au précédent par deux fils conducteurs, il affiche des
déviations des aiguilles identiques à celle de l’appareil émetteur.
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